Projet de diplôme | Tome 1

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Tome

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Matthias / Matthias / meunier meunier

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m a s t è r e s t r at égie m a s t è r e s t r at égie école école de c ommunic at ion de c ommunic at ion de de p a r l’ i m a g e p a r l’ i m a g e condé condé

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p r o j e T

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diplome diplome PROMOUVOIR LA MUSI Q UE AU T REMEN T

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sui v i pa r sui v i pa r laurence barre y / laurence barre y / julien gargot julien gargot

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07 les supports de diffusion x

08 LE 45 TOURS

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09 LE 33 TOURS

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11 LA CASSETTE AUDIO

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14 LE DISQUE COMPACT

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18 Internet

21 GRAPHISME ET MUSIQUE x

22 ALEX STEINWEISS

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24 LE JAZZ

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28 LE ROCK

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34 LE PUNK

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38 LE RAP

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42 AUTRES genres

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46 DESIGN MUSICAL

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53 exemples de strategies x

54 daft punk

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58 kaiser chiefs

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60 fall out boy

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62 david bowie

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64 radiohead

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66 arcadefire

69 -la cible, ses gouts, ses attentes x

70 Quelle cible ?

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72 ses goûts

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75 enjeux du projet

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76 réflexions et problématiques

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80 biblio-sitographie 5


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les supports de diffusion

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Rares sont les inventions, culturelles, techniques ou mécaniques pouvant se vanter d’avoir été adoptées de manière unanime par l’ensemble des civilisations, des peuples, et ce, à travers les âges. Il n’existe en effet aucune civilisation qui n’aurait développé tôt ou tard son propre système musical. Historiquement, c’est à la Chine que l’on accorde les premières traces de théorie musicale, datant d’environ dix siècles avant Jésus-Christ. Dès lors, le rythme et la musique traverseront les âges. De la Grèce Antique à aujourd’hui, la musique aura subi un nombre important de mutations et d’évolutions. Chants religieux, troubadours, orchestres, solistes, scènes ouvertes... La liste est aussi longue en genres musicaux qu’en moyens de diffusion. De ce fait, nous nous concentrerons sur l’histoire et l’évolution de la communication musicale à partir de l’apparition des vinyles 45 tours, soit au début des années cinquante.

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... LE 45 Tours x

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À l’origine, les disques vinyles 45 tours ont été inventés en 1949 aux États-Unis afin de relancer et développer le marché des juke-boxes. Attention cependant, il ne s’agit pas ici des maxis 45 tours traditionnels encore en fabrication aujourd’hui, mais des 45 tours ne comprenant qu’un ou deux morceaux par face. Il s’agit simplement de l’ancêtre du CD single. En dehors des lieux publics où florissaient les juke-box, les principaux consommateurs sont les adolescents. Pour cause, sur une période allant des années soixante aux années quatre-vingt-dix, seuls les 45 tours étaient compatibles avec les mange-disques, ancêtres des radios-CD. Le single comporte deux faces habilement nommées face A et face B. C’est aussi à cette époque qu’est né ce que l’on appelle encore aujourd’hui les EP (pour « Extended Play »). Il s’agit de disques trop courts pour être appelé albums, mais trop longs pour n’être que de simples singles. Ils comportent en général entre 4 et 8 morceaux.

Les disques vinyles 45 tours ont été inventés en 1949.

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Première apparition des 45T de 30 cm pendant les 70’s

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C’est dans les années soixante-dix, durant l’avènement du disco, que le maxi 45 tours de 30 cm sont apparus. Les chansons s’allongent, les disques passent en radio et les juke-box sont petit à petit remplacés par des disc-joquey. Il existe à ce sujet une anecdote expliquant que la naissance de ces 45 tours est en fait un curieux hasard. En effet, Tom Moulton, célèbre DJ remixeur, avait besoin, un vendredi, d’un pressage test d’un morceau qu’il voulait essayer le soir même dans son club. Comme l’ingénieur du son, Jose Rodriquez, n’avait plus de support de 17 cm, il suggéra d’utiliser un support de 25 cm, en espaçant plus les sillons. Tom Moulton constata l’amélioration du niveau dynamique des basses, et généralisa le principe. Au-delà de l’évolution qualitative qu’apporte ce nouveau format, il apporte aussi un aspect pratique non négligeable pour les DJ’s et autres animateurs musicaux qui pourront dorénavant manipuler des disques avec plus d’aisance.

Première commercialisation des 45T de 30 cm en 1976

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Ces nouveaux formats ont été pendant près de cinq ans réservés à ces DJ’s. Il faudra attendre 1976 pour voir ce format de vinyle vendu au public avec l’arrivée dans les bacs de Ten Percent du groupe funk Double Exposure. À partir des années quatre-vingt, d’autres musiciens pop-rock ont sorti des super 45 tours en y incluant des morceaux en version longue (en comparaison aux formats radio) ainsi que des morceaux remixés en guise de face B. Cette idée d’un simple morceau possédant plusieurs mixages différents est toujours en activité de nos jours.

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... LE 33 Tours x

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Parallèlement aux 45 tours, les ingénieurs du label Columbia Records ont mis au point dès 1948 des disques vinyles de 33 tours. Ce format, possédant une meilleure qualité auditive grâce à des sillons plus rapprochés que sur les 45 tours, permet également une capacité d’enregistrement de près de soixante minutes ! C’est grâce à ces 33 tours qu’est apparue la notion de LP (pour Long Play) et donc d’album. Aussi, de nombreux groupes choisissaient de sortir des 33 tours en guise de maxi single (à la place des 45 initialement prévus à cet effet).

Les disques vinyles 33 tours ont été inventés parallèlement aux 45 tours.

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Pourquoi me direz-vous ? Si nous pouvions sortir des 45 tours comme des 33 de sept à douze pouces l’un comme l’autre, pourquoi autant de choix ?

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Et bien c’est une simple question de technique et d’appréciation de la musique. Un 33 tours pouvait enregistrer des morceaux plus longs, mais si vous y enregistrer un morceau assez cours, initialement prévu pour un 45 tours, vous pouvez éloigner les sillons sur la galette et obtenir ainsi une plus grande qualité sonore. Tout ceci repose donc sur des questions de qualité de production et donc, in fine, de coûts de production.

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... LA cassette audio x

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Le temps passe, la technologie s’emballe, le vinyle est fragile, peu pratique, prend de la place.

La révolution musicale est en marche !

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Le walkman a été inventé en 1979.

La cassette audio démocratisa le piratage.

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C’est ainsi qu’en 1979 apparaît pour la première fois le baladeur cassette, généralement appelé Walkman, marque déposée par Sony. C’est une véritable révolution, la musique est maintenant à porté de doigt et d’oreille pour tous, tout le temps et n’importe où. Le baladeur cassette permet désormais d’apprécier la musique lors de n’importe quelle activité, elle accompagne ses utilisateurs n’importe ou, ou travail, sur les chemins de l’école, en faisant du sport... Bref, l’accès et le partage de la musique se popularisent. Ironiquement, si la radiocassette lance la production musicale de masse, elle en est aussi la principale Némésis. C’est avec l’enregistrement sur des bandes magnétiques qu’apparaissent les premières formes de piratage musical. S’il n’existait pas de vinyles vierges, il existe néanmoins des cassettes vierges qui permettent de copier de manière très simple les sons provenant d’autres K7 et même de vinyles.

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Les cassettes audio ont été inventées en 1963.

En 1963, la firme Philips propose une véritable révolution en matière de production et d’écoute de la musique en introduisant sur le marché la cassette audio, couramment abrégée par K7. Elle permet d’enregistrer et de diffuser de la musique comme toutes autres formes de sons. Plus petite, plus solide, permettant d’enregistrer jusqu’à 120 minutes de son elle est également moins coûteuse à la production et donc à l’achat. L’arrivée des K7 révolutionne totalement le monde de la musique puisqu’elle la démocratise dans de plus en plus de foyers. C’est également grâce à la casse audio que la musique a commencé petit à petit à suivre ses consommateurs au quotidien. Des radiocassettes du début des années soixante-dix en passant par les GhettoBlaster des années, quatre-vingt la musique est désormais transportable n’importe ou. Aussi, s’il existait déjà des récepteurs à lampes (réservés à une élite fortunée) dès les années trente pour capter la radio en voiture, l’arrivée des K7 audio a également permis la production et la démocratisation des autoradios lisant ces cassettes. Fort de son succès et face aux ventes vertigineuses et à l’importance de la musique dans la vie des gens, la société Sony flaire la bonne idée.

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... Le disque compact x

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Suivant la sortie de la cassette audio, deux nouveaux formats sont alors produits. La microcassette et l’elcaset (un format similaire à la K7 originale, mais un peu plus grosse). Ces deux formats n’apportent pas grand-chose à l’univers de la musique et ne bouleversent en rien son importance, il ne semble donc pas nécessaire de s’attarder dessus plus longtemps, d’autant plus que les deux firmes les plus importantes de l’histoire de la musique travaillaient, avec la participation de la firme Hitachi, sur un nouveau support qui lui aussi bouleversera totalement la production, la consommation ainsi que la communication de la musique.

Microcassette,cassette,elcaset.

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C’est donc en 1982, après trois ans de recherches et de prototypes que Philips et Sony annoncent la commercialisation de ce nouveau produit pour l’année en cours. Il faut attendre août 1982 pour que soient produits pour la première fois les disques compacts (CD) Une Symphonie Alpestre de Richard Strauss et The Visitors d’ABBA. La première platine capable de lire ces nouvelles galettes réfléchissantes a été vendue au Japon le premier octobre de cette même année. L’excellente qualité sonore des CD’s lui confère dans un premier temps une aura élitiste. Il est pendant près de deux ans quasiment dédié aux mélomanes de la musique classique. Il faudra attendre 1985 et la sortie de l’album Brothers in Arms de Dire Straits pour provoquer un véritable engouement autour du disque compact. En 1988 les ventes de CD dépassent enfin les ventes de disques vinyles et permet la prolifération d’éditeurs indépendants, comme NTI, Levitan SA ou CD One Music qui proposeront, à l’instar des grandes majors, des catalogues de groupes moins populaires, mais beaucoup plus accessibles question prix pour les consommateurs.

Les premiers disques compacts et la première platine capable de les lire ont été commercialisés en 1982.

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À ce sujet, Christian Brunet réalise pour le groupe Carrefour la première opération qui voit proposer au public des coffrets de dix CD pour moins de 90 francs (13,72 euros) dès 1991. Cette collection (Romance du classique) sera vendue à plus de 2,5 millions d’exemplaires en moins d’un mois, durant les fêtes de fin d’année. Cette politique de prix fera exploser les ventes de lecteurs de CD en France.

Le CD a connu un tel succès qu’il a totalement effacé les ventes de vinyles durant presque vingt ans, pour de nombreuses raisons. Le CD est plus résistant que le vinyle, tant par le disque en lui-même que par les pochettes. Le CD mesure 12 cm quand le disque vinyle en mesure trente. La qualité des enregistrements CD est supérieure à celle des disques vinyles (bien que, pour de nombreux mélomanes, ceci est sujet a controverse, ces derniers jugeant le vinyle plus chaud, plus vivant). Véritable révolution qu’apporte le CD, il est désormais possible de sélectionner les morceaux à écouter et d’écouter son disque d’une traite, contrairement au vinyle qui ne permettait pas de choisir le morceau à jouer et qui obligeait également à changer de face au milieu d’un album. Enfin, la durée de vie approximative d’un disque compact est située entre 50 et 200 ans.

Le disque compact offre de nombreux avantages à la fois techniques et financiers par rapport au disque vinyle.

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Pourtant, tout n’est pas rose au pays de l’industrie musicale. Si Sony et Philips ont, indéniablement, changé la face de la musique à jamais, ils ne pouvaient pas anticiper l’invention qui provoquera ce que l’on appelle encore aujourd’hui la crise de l’industrie musicale...

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... internet -

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En effet, l’arrivée d’Internet semblait être un excellent moteur pour l’industrie musicale. Ouverture sur le monde, partage, accès direct à l’information... Le combo gagnant pour faire découvrir sa musique ou ses artistes sur toute la planète. Mais comme à chaque nouvelle invention intervient son lot de problème, il n’aura pas fallu longtemps avant qu’Internet devienne l’outil de prédilection des pirates. Plus de frontières, plus de contraintes physiques, une législation hasardeuse et hop, le moindre contenu se retrouve diffusé allègrement et gratuitement sur la toile.

C’est le début de la fin pour l’industrie du disque.

La plateforme iTunes a été inventé en 2001.

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Du disque oui, et non de la musique. En effet, l’amalgame est souvent fait, pourtant ce sont les ventes physiques qui sont en chute libre et non celle de la musique. Quand il s’agit de rebondir rapidement pour gagner de l’argent nous pouvons constater qu’il y a toujours une solution. Cela qui aura surfé au bon moment sur cette dématérialisation de la musique pour en faire un nouveau business n’est autre que l’homme à la pomme : Steve Jobs. C’est en 2001 que feu Jobs introduit une nouvelle plateforme musicale qui révolutionnera totalement toute l’industrie musicale, iTunes. Sans s’attarder sur les histoires d’environnement informatique ou à savoir lequel des lecteurs multimédias est le meilleur, passons directement aux raisons qui ont fait d’iTunes LA référence en matière de distribution de musique numérique. iTunes permet de créer des listes des playlists (liste de lecture). iTunes permet aussi d’écouter des podcasts et de lire des vidéos. iTunes permet d’écouter des radios en streaming. iTunes synchronise les iPod, les iPad et les iPhone. Mais surtout, iTunes permet d’acheter de la musique en ligne légalement ! Et ça, ce simple petit outil qui semble aujourd’hui gadget tant il est facile de se procurer de la musique sur Internet change tout. L’explosion du piratage a effectivement ruiné l’industrie du disque, qui devenait trop chère à produire, trop chère à fabriquer et bien souvent trop peu suffisamment acheté. Grâce à l’achat de ces supports numériques, les maisons de disques ont fait des économies en matière de production de groupes, les artistes ont pu diffuser leur musique sur toute la planète sans contraintes physiques et les auditeurs ont eu accès à un catalogue musical tout à fait impressionnant. L’idée semble parfaite n’est-ce pas ? Sauf qu’encore une fois, et surtout en matière de business, la perfection n’existe pas. Mettons de côté le téléchargement illégal qui, quoi qu’il arrive ne sera jamais supprimé et de mourra jamais. Un premier constat apparaît peu de temps après la démocratisation d’iTunes.

Steve Jobs à révolutionné la manière de produire, de distribuer et d’écouter la musique.

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Très bien, une partie des auditeurs, des fans de musique sont satisfaits de pouvoir s’offrir des albums résolument moins coûteux en quelques clics, mais pour une autre partie des "afficionados" de la musique, cette dé­ma­ térialisation tue à petit feu la beauté de cette dernière. À quoi bon s’embêter à concevoir de belles pochettes, de beaux livrets, des packagings originaux alors que l’intérêt d’une grande partie des producteurs ne réside que dans faire de l’argent ? Pourquoi dépenser alors que la musique numérique tant à économiser ?

Le côté précieux de la musique, la joie d’ouvrir un boitier, de lire un livret, tout l’attrait visuel de la musique tendrait à s’éteindre pour laisser place à l’éventuelle froideur que peut incomber le numérique. Et bien justement, c’est un détail que beaucoup commencent à prendre en compte. Si iTunes a ouvert, libéré la musique des contraintes physiques de l’industrie du disque il a également totalement modifié la façon dont la musique était écoutée. Avant, tout du moins, avec de la musique physique, toute une symbolique est présente. L’artiste a voulu travailler, éventuellement, avec des graphistes, des artistes, des photographes, pour illustrer avec des images ce que lui raconte avec des sons et des mots. Ensuite, cet imaginaire personnel aux artistes se retrouve entre les mains du fan qui ouvrira délicatement son boitier pour libérer la galette qu’il placera dans son lecteur de disque. Il pourra ensuite parcourir le livret que l’artiste a mis à sa disposition avec, en général et au-delà des informations légales au sujet des morceaux, les paroles des chansons, des photographies, des anecdotes, des choses qu’il veut partager avec son public. Pour l’exemple, le groupe de punk-celtique Dropkick Murphys, très attaché à ses fans à décider de publier dans tout un livret de leur dernier album des photos des tatouages de fans inspirés par le groupe. Cet hommage, cette proximité entre les groupes et leurs fans tend à se perdre à cause de cette dématérialisation de la musique. Douze morceaux, une pochette en .jpeg et le tour est joué. Nous sommes passé de l’écoute de la musique, son appréciation globale à la consommation de la musique. De la même manière que la culture d’ordre générale, nous sommes maintenant engagés dans l’ère du zapping musical. Produire de la musique ne coûte plus si cher, les artistes en vogue sont des sources sûres, il suffit de produire un titre tous les deux mois pour garder cette machine intacte. Cependant nous perdons le plus essentiel de la musique, son essence, son âme.

Première interface d’iTunes.

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graphisme et musique

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Nous avons étudié les évolutions techniques quant à la diffusion de la musique depuis les soixante dernières années. Mais ne nous éloignions pas du sujet initial souhaite pas nécessairement revenir à une industrie musicale physique, mais qui, d’une certaine manière souhaite revaloriser la communication musicale. Il aurait été idiot de ne pas s’intéresser aux supports de la musique puisqu’il rentre directement en ligne de mire de mon travail, l’évolution des supports aurait dû entrainer une évolution des modes de diffusions et de communication autour de la musique. Ce qui ne fut pas tellement le cas avec le recul que nous avons aujourd’hui. Nous restons dans la diffusion d’un spot publicitaire sur les écrans, une affiche de concert ou ventant la sortie d’un nouveau disque, et, éventuellement, un vidéo-clip. En vue de ce qu’il est possible de réaliser aujourd’hui en matière de communication graphique, le résultat est décevant. Par conséquent, avant de proposer des solutions à ce problème il semble inévitable d’établir un constat autour de la place et de l’importance du graphisme dans l’industrie musicale. Dans un souci de clarté, les aspects graphiques de la musique seront traités par styles musicaux, chaque style ayant son univers graphique.

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ALEX STEINWEISS

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Alex Steinweiss est à l’origine du concept d’artwork depuis son arrivée chez Columbia Records en 1939.

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Avant toutes choses, comment ne serait-ce qu’imaginer parler de l’imaginaire de la musique et de l’importance de la communication visuelle de cette dernière sans aborder le cas Alex Steinweiss ? Qui est Alex Steinweiss ? Simplement la personne qui a inventé le principe d’artwork sur les pochettes de disques. Rien que ça. C’est à lui que l’on doit cette idée qui aujourd’hui nous semble si simple. Pourtant, avant son arrivée en tant que directeur artistique chez Columbia Records (c’est d’ailleurs à lui que beaucoup accordent aussi l’invention, du moins la base, de ce qu’on appelle aujourd’hui directeur artistique) l’idée même de mélanger support musical et support artistique ne titillait que très peu d’esprits. C’est en 1939 que le jeune graphiste qu’est Steinweiss, fraîchement engagé chez Columbia Records, lance l’idée d’habiller les jaquettes de disques du label par des illustrations artistiques. Il faut croire que cette idée lumineuse est en fait une idée en or puisqu’elle augmente les ventes du distributeur par 800 %. Oui, 800 %. En effet, avant l’arrivée de « cette idée folle », les disques n’avaient aucune identité. Se rendre chez son disquaire était identique à se rendre dans une bibliothèque. L’apparition de couleurs vives, de créations artistiques, de photographies, de typographiques sur les jaquettes en carton des vinyles conféraient une toute nouvelle dimension à la musique. Lui-même disait :

Cette idée provoquera une augmentation des ventes du label de près de 800 %.

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“J’aime tellement la musique et j’avais tellement d’ambition que j’étais prêt à en faire beaucoup plus que ce pour quoi on pouvait bien me payer. Je voulais que les gens entendent la musique en voyant l’œuvre d’art. ”

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Entendre la musique en voyant l’œuvre d’art. N’est-ce pas le plus intéressant des concepts ? Pour ça, il n’hésite pas à mettre lui même la main à la pâte en réalisant des pochettes aujourd’hui toujours considérées comme cultes par les connaisseurs. Son style, teinté d’influences symbolistes, surréalistes, cubistes ou encore constructiviste continue de marquer les esprits aujourd’hui encore. Il créera même sa propre typographie, le Steinweiss Scrawl. Son règne graphique durera près de 30 ans, jusqu’à l’avènement de la culture pop-art, qui enterrera définitivement son style graphique, lui, à qui l’industrie du disque comme l’industrie de l’image doit tant.

Rhapsody in Blue, de George Gershwin, 1976.

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Steinweiss Scrawl, typographie crée en 1947.

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... LE jazz x

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Un des premiers courants musicaux à avoir compris l’importance d’un imaginaire fort n’est autre que le jazz. Culturellement, le jazz est une musique gorgée d’histoire. Né à la Nouvelle-Orléans au début du vingtième siècle, il demeure comme le digne croisement du blues et de la musique européenne. C’est une musique qui réunit cultures africaines et occidentales sous le même drapeau. Rien que ça, en soi, est une raison suffisante pour comprendre l’importance de l’image dans sa musique.

C’est notamment sous grâce à la musique jazz que l’on doit la reconnaissance au grand public de l’un des graphistes musicaux les plus prolifiques de l’histoire, Reid Miles.

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Reid Miles (1927-1993) graphiste américain du label de jazz Blue Note.

C’est en 1956, quand le label en vogue Blue Note commence à produire des 33/45 tours que la question de l’habillage de ce nouveau format de pochette se pose. Selon la légende, Miles n’éprouvait aucun intérêt pour la musique jazz. C’est pourtant entre ses mains que sont passées plus d’une centaine de pochettes de disque ayant fait de l’imaginaire jazz, et de Blue Note une véritable légende. Les productions de Miles contribuaient à donner aux disques sortis sous le label un look moderne et original qui deviendra rapidement l’emblème de la musique jazz dans le monde entier. Miles détruit les codes musicaux en place. Les instruments occupaient plus de place que les artistes sur la pochette, les photographies sont retouchées, déstructurées, recolorées, dégradées... Parfois les pochettes ne comprenaient que des caractères typographiques avec lesquels il continuait de se jouer des codes et des conventions.

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Il fait également partie des premiers graphistes à faire appel à Wandy Warhol pour illustrer son travail. Bien avant que celui-ci devienne également une référence en matière d’imagerie musicale, mais nous aurons l’occasion de revenir dessus. Si dans l’univers de la pochette de disque, Reid Miles reste la référence de la musique jazz, l’univers de ce dernier a apporté de très belles productions réalisées par des artistes certes moins importants, mais tout aussi inspirés.

Premières expériences d’illustrations musicales d’Andy Warhol

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Nous retrouvons néanmoins quelques artistes dont le travail a sans nul doute apporté une pierre à l’édifice graphique musical comme le graphiste Suisse Niklaus Troxler qui aura inspiré quelques pochettes de disques ainsi que quelques affiches autour de la musique jazz ou encore Keith Harring qui aura réalisé à plusieurs reprises les affiches du festival de référence pour les fans de jazz, le Montreux Jazz Festival.

-Keith Harring

Niklaus Troxler

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... LE rock x

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Un autre courant musical gratifié d’une ambiance, d’un graphisme directement en lien avec sa musique n’est autre que la musique rock. Nous prenons évidemment ici la notion de rock dans un sens large, afin d’éviter de trop nous perdre entre les dizaines de genres de rock et leurs nominations aussi futiles que grotesques. Si, vingt ans plus tôt, la musique jazz commençait à porter aux yeux de tous une certaine forme de graphisme dédié à la musique, il a également permis à un artiste de devenir une véritable référence en matière de graphisme musical. Andy Warhol.

Si Warhol travaillait essentiellement le croquis dans sa période jazz, lors de l’essor du rock c’est avec ou mouvement artistique dont il est à l’origine, le pop-art, qu’il revient. La plus symbolique de ses réalisations reste et restera la pochette de l’album The Velvet Underground & Nico, réalisée en 1967 sur laquelle nous retrouvons la fameuse banane jaune signée au nom de l’artiste. Déjà en 1967, Andy Warhol, également producteur de l’album, signait une pochette que l’on pourrait définir « d’interactive » dans le sens où, à côté de cette banane, est indiqué Peel slowly and see, ce qui veut dire « épluchez lentement et voyez » et, qu’une fois l’autocollant de la banane de Warhol est enlevé, il laisse apparaître la photographie d’une banane pellée de couleur rose. Ce fut l’une des premières fois qu’une pochette d’album invitait son possesseur à intervenir directement avec celle-ci. Cinq ans plus tard, Warhol récidive l’expérience avec les légendaires Rolling Stones et leur album Stinky Fingers. Pour cette pochette, Warhol applique une véritable fermeture éclaire sur la photographie originale de Billy Name représentant un gros plan sur les attributs virils d’une personne en jean’s. La fermeture éclaire peut donc être ouverte et laisser apparaître les sousvêtements en coton du personnage présent sur la jaquette. Si c’est deux pochettes sont, à mon sens, les plus intéressantes c’est parce qu’elles invitent le possesseur du disque à interagir avec celles-ci, mais Warhol continuera d’être à la clef de bon nombre de réalisations notables dont The Painter de Paul Anka, Love You Live et Emotional Tatoo des Rolling Stones ou encore Menlove Ave de John Lennon.

-The Velvet Underground & Nico, The Velvet Underground, 1967.

Stinky Fingers, The Rolling Stones, 1972.

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-The Painter, Paul Anka, 1976.

Love You Live, The Rolling Stones, 1977.

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-Emotions In Motion, Billy Squier, 1982.

Menlove Ave, John Lennon, 1986.

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Le graphisme musical aura inspiré d’autres grands pop-artistes à l’image de Peter Blake et Jann Haworth tous deux à l’origine de Sgt. Pepper’s Lonely Hearts Club Band, probablement la plus célèbre pochette des Beatles ou de Richard Hamilton qui lui réalisera également pour le compte des Beatles le packaging du fameux White Album.

Pourtant, ce serait une erreur de considérer que seuls les pop-artistes possèdent le monopole de la culture rock. Un graphiste, décédé en 2013, et dont le nom restera inconnu pour une grande partie des passionnés de musique aura réalisé plus de soixante pochettes d’albums pour le compte des plus grands groupes de rock de ces trente dernières années. Ici, nous parlons véritablement d’un graphiste et non d’un artiste affilié à un courant artistique particulier, nous pouvons donc établir un parallèle intéressant entre ces artistes musicaux cherchant à s’entourer d’artistes « en vogue » face à ceux qui seront plus sensibles à un univers, au ressenti d’un graphiste.

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Sgt. Pepper’s Lonely Hearts Club Band, The Beatles, 1967.

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Storm Thorgerson est un, sinon le graphiste anglais de référence en ce qui concerne l’imaginaire de la culture musicale rock. Parmi ses nombreuses collaborations, nous retiendrons Audioslave, The Cranberries, Dream Theater, Led Zeppelin, Muse, Peter Gabriel, Wishbone Ash et plus récemment Biffy Clyro. Cependant, malgré le prestige de ces collaborations, il en est une qui les surpassera toutes et qui prouvera l’importance et l’impacte d’un imaginaire artistique pour un groupe. En effet, Thorgerson est à l’origine de presque toutes les pochettes d’albums des Pink Floyd. Rien que ça. Il signera donc A Saucerfull of Secrets, More, Ummagumma, Atom Heart Mother, Meddle, Obscured by Clouds, Dark Side of the Moon, Wish You Were Here, Animals, A Momentary Lapse of Reason, The Division Bell, Et enfin Echoes : The Best of Pink Floyd.

Atom Heart Mother, Pink Floyd, 1970.

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Animals, Pink Floyd, 1977.

The Dark Side Of The Moon, Pink Floyd, 1973.

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The Division Bell, Pink Floyd, 1994.

House Of The Holy, Led Zeppelin, 1973.

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Uprising, Muse, 2009.

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Outre l’impressionnante liste de chef d’œuvres que représente cette liste, il faut admettre que toutes ces pochettes d’albums sont cohérentes à la fois entre elles, mais aussi avec l’univers du groupe. Atom Heart Mother et sa vache de dos, Dark Side of the Moon et son légendaire prisme dispersif. Qui peut aujourd’hui, quarante ans après, avouer ne jamais avoir vu cette image ? Animals et ce fameux cochon volant entre les cheminées d’une usine, The Division Bell et ses deux têtes Moaïs stylisées... Bref, jamais le travail d’un graphiste n’aura autant influencé l’imaginaire et le souvenir d’un groupe de rock.

C’est en ça que le graphisme se doit de sublimer la musique, il permet de se souvenir. Vous pouvez avoir oublié la ligne de basse de Money, mais ce fameux prisme réflexif, lui, restera dans votre tête. Vous pouvez, éventuellement, avoir oublié des titres comme Sunday Morning ou I’ll Be Your Mirror, mais votre imaginaire n’oubliera pas la banane de Warhol. En dehors de Storm Thorgerson, nous pouvons aussi ajouter Stefan Sagmeister à la liste des graphistes influents dans l’univers de la musique. Il a notamment réalisé le packaging de Bridges to Babylon des Rolling Stones ainsi qu’une collection d’affiches contemporaines pour le chanteur des Velvet Ungerground, Lou Reed. La preuve qu’une fois encore graphisme et musique sont intimement liés. En fait, nous en venons à nous demander si c’est réellement la musique qui influe l’imaginaire qu’on lui incombe ou si ce n’est justement cet univers visuel et graphique qui influerait sur le style musical qu’il représente ? Et, s’il y a bien un courant dont la portée dépasse la simple notion de musique, c’est bien le mouvement punk...

Set the Twilight Reeling, Collection d’affiches, 1996.

Bridges To Babylon, The Rolling Stones, 1997.

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... LE punk x

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À l’origine, en tout cas pour les puristes, le punk serait apparu dans les années soixante avec l’utilisation des guitares saturées de groupes « garage » dont les très célèbres Stooges ou MC5 faisaient partie. Aujourd’hui ces groupes sont qualifiés de protopunk ou de 60’s punk afin d’éviter toutes confusions avec ce que l’imaginaire collectif appelle le mouvement punk qui lui vivra dans la fin des années soixante-dix.

Avant même de parler du graphisme punk, il faut relever toute l’esthétique qu’a apportée ce mouvement au point de devenir un véritable phénomène de société.

*Dans la culture punk, le DIY est lié à la vision punk anti-consumériste. Traduit par : fais-le toi-même.

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L’expression punk reste aujourd’hui encore associée à une forme d’énergie brute, une esthétique particulière et une radicalité prenant le pas sur la contestation hippy des années précédentes. Exit le peace & love, les cheveux longs et le flower power. Place à la rue, à la rébellion, à l’iroquois et à l’autodestruction. Pour preuve de l’importance de cette culture plus que de sa musique, si je dis iroquois,épingle à nourrice, Do It Yourself*, fanzines et tatouages, vous comprendrez et associerez toutes ces images à la culture punk. Si, au lieu de citer les grands noms de la musique punk que sont les Sex Pistols, les Ramones ou les Clash, je ne cite que Strychine ou Stalag vous, et beaucoup d’autres, vous demanderez de quoi je parle. Et bien Strychine et Stalag sont en fait les équivalents français des Pistoles et des Ramones.

Culture hippie et culture punk. Deux modes de protestation. Deux univers totalement opposés.

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Pourtant, aujourd’hui, ce n’est plus forcément la musique punk qui reste dans l’imaginaire collectif, mais bien ses symboles. Simple exemple, si je vous dis Jamie Reid vous me dites ? Rien du tout. Par contre si vous me dites qu’il s’agit du graphiste punk de référence, c’est que vous possédez ne serait-ce qu’une once de culture graphique et musicale. Par contre, si je vous dis Never Mind the Bollocks vous pouvez aisément me parler ou des Sex Pistols ou de cette fameuse pochette dont il est l’auteur et qui reste aujourd’hui encore la référence ultime du graphisme punk, notamment grâce à l’utilisation d’une police d’écriture assimilée aujourd’hui aux fanzines ou aux lettres anonymes dignes des plus grands « corbeaux ». Pourtant, nous ne pouvons pas dire que si cette pochette fait encore partie des pochettes cultes grâce à la qualité du groupe qu’elle représente. Never Mind the Bollocks est en fait l’unique album studio du groupe. Les autres ne sont que des sorties posthumes surfant sur l’impact qu’a eu le groupe sur son époque.

God Save The Queen, Sex Pistols, 1977.

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Never Mind The Bollocks, Sex Pistols, 1977.

Jamie Reid, véritable symbole du graphisme punk.

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Outre son importance quant à l’image des Sex Pistols, Jamie Reid est à l’origine de nombreux fanzines plus ou moins populaires liés à ce courant artistique et musical. Cette apostrophe a son importance.

Le mouvement punk se veut en effet en marge de la société, il indépendant, autogéré, autosuffisant, réfute les modes de consommations et prône la culture du Do It Yourself. Pour faire simple, le punk, c’est l’économie de moyen. C’est la preuve qu’il n’est pas nécessaire d’entrer dans un énorme système économique, de débaucher les plus grands artistes et les plus prolifiques génies du marketing pour communiquer ses idées, ses valeurs et sa musique.

Vague #21, 1989 couverture de Jamie Reid.

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... LE RAP x

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Parce qu’il y de bonnes choses dans tous les styles musicaux, nous allons aborder quelques artistes, graphistes ou non, qui ont participé à l’effort collectif visant à faire du rap plus qu’une sous-culture, souvent et sans raison critiquée par une population de journalistes et de critiques en manque de tête à trancher.

En effet, si nous parlons rap, nous avons instinctivement des images de la rue, de violence, de banlieue, des images qui peuvent être tout à fait fausse selon les artistes. En effet, certains musiciens s’offrent les talents d’artistes de qualité afin de travailler sur les pochettes de leurs albums. Kanye West s’est par exemple offert les services d’artistes comme le photographe et réalisateur Danny Clinch (qui aura travaillé avec d’autres artistes comme Johnny Cash, Bruce Springsteen, Tupac Shakur, Björk ou encore Jay-Z) sur la pochette de 808s & Heartbreak ou encore le peintre et portraitiste George Condo pour la pochette de My Beautiful Dark Twisted Fantasy.

808s & Heartbreak, Kanye West, 2008.

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My Beautiful Dark Twisted Fantasy - Kanye West, 2010.

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Ross Garrett, photographe de mode à quant à lui participer à l’élaboration de l’univers visuel du groupe électro-rap Die Antwoord pour qui il réalisera divers photographies, clips et pochettes d’albums à l’esthétique glauque et poétique. Joe Perez est lui un graphiste ayant depuis quelque temps posé ses valises dans l’imaginaire de la musique rap. Il a collaboré avec les plus grands en réalisant les pochettes de B.O.A.T.S. II : Me Time de 2 Chainz, Cruel Summer du collectif G.O.O.D. Music (crée par Kanye West), Yeezus le dernier album en date de Kanye West, I Am Not a Human Being de Lil Wayne ou encore Long.Live.A$ap d’A$ap Rocky. Autant l’admettre, Joe Perez est donc une référence en matière de graphisme rap,mais il partage cependant l’affiche avec Julian Alexander qui a su gagner la confiance d’artistes comme Eminem sur Recovery, Relapse et Encore, de 50 cent sur Get Rich Or Die Tryin’ et Curtis, de Mobb Deep sur Blood Money ou encore d’Éric Benét avec son Lost in Time.

B.O.A.T.S. II : Me TIme, 2 Chainz, 2013.

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Relapse, Eminem, 2009.

Cruel Summer, g.o.o.d Music, 2012.

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Recovery, Eminem, 2010.

Yeezus, Kanye West, 2013.

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Get Rich Or Die Tryin’ 50 Cent, 2003.

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En France aussi quelques artistes essayent de relever le niveau de l’image du rap, effort qu’il faut saluer surtout quand, pour certains, ce sont les artistes eux-mêmes qui se collent à la réalisation de leurs propres visuels. Grems, par exemple, est un graffeur, graphiste et rappeur qui réalise lui-même absolument tous les visuels de ses albums, vinyles et livrets. Julien Barthelemy, plus connu sous le nom de King Ju, l’effroyable leader du groupe Stupeflip, est également graphiste et peintre de formation. Il réalise donc lui-même les œuvres qui viennent habiller la musique qu’il compose.

STUPEFLIP Stupeflip, 2003.

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STUP RELIGION Stupeflip, 2005.

the hypnoflip invasion stupeflip, 2011.

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terrora !! stupeflip, 2012.

Algèbre 2.0 Grems, 2011.

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Affiche de concert Grems, 2012.

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... autres genres x

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Bien évidemment, les autres styles musicaux possèdent aussi leur propre empreinte graphique, leurs propres codes. Prenons par exemple le reggae. Son imaginaire est très marqué. Il y a avant toutes choses l’utilisation de ces trois couleurs que sont le rouge, le jaune et le vert, reprenant ainsi les couleurs du drapeau éthiopien. Le lion, et plus souvent même le Lion de Juda (présent sur le drapeau de l’empire d’Éthiopie jusqu’en 1975) est également des symboles propres à l’univers graphique (et spirituel) de la musique reggae. Le rapport à la marijuana est aussi très fort dans l’imaginaire de cette musique, mais elle a donné naissance à une magnifique pochette pour le compte de légendaire Bob Marley. Pour l’album Catch a Fire, deux graphistes, Rod Dyer et Bob Weiner imaginent une pochette de disque représentant un briquet de la marque Zippo s’ouvrant de la même manière que ces fameux objets.

Akwaba Alpha Blondy, 2005.

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Legelize It Peter Tosh, 1976.

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Catch A Fire The Wailers, 1973.

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La musique techno est aussi sujette à de belles collaborations, à l’image du travail de Jonathon Cook, directeur artistique ayant déjà collaboré entre autres avec la chaîne MTV, avec The Courteeners, Deadly Avengers ou encore Annie Mac. Le collectif H5 a quant à lui la pochette du dernier album du DJ Toxic Avenger Romance and Cigarettes tout en anaglyphe.

You Overdid It Doll, The Courteeners, 2010.

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Annie Mac Presents Annie Mac, 2009.

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Blossoms & Blod Deadly Avenger, 2007.

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Romance And Cigarettes Toxic Avenger, 2013.

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... design musical x

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Toute fois, nous n’avons observé jusqu’à présent que des collaborations entre graphistes/artistes et groupes/musiciens. Ce ne sont pas les seules possibilités qu’offre la fusion des arts graphiques et des arts sonores.

Depuis quelques années déjà, des designers et des graphistes s’associent afin de trouver de nouveaux moyens d’apprécier et de profiter de la musique. Il semble donc intéressant d’étudier l’apport de ces designers afin d’y trouver des idées, des tentatives pour rendre la communication musicale plus agréable, plus innovante. Prenons l’affiche, le plus simple des supports de communication. Elle peut informer de la sortie d’un disque, d’un DVD, un concert, un festival, une tournée. Bref, c’est l’objet communiquant indispensable. Pourquoi alors se contenter d’un simple visuel et de quelques informations ? Pourquoi ne pas chercher à rendre ce support encore plus fort, afin de marquer les esprits de ceux qui croiseront cette affiche ? Chris Payne, graphiste anglais, a par exemple réalisé une affiche pour le compte de la Royal Academy Of Music intégrant un véritable clavier de piano sur lequel les passants peuvent s’amuser à jouer. Aucune compétence de programmation ou de connaissances en matière de design n’a été nécessaire. Un simple clavier à la verticale en bas d’une affiche, et voilà une expérience interactive mémorable pour ceux qui auront la chance de croiser cette dernière. De la même manière, le collectif Novalia, composé d’ingénieurs, de programmeurs et de designers a réalisé un véritable kit de batterie sous la forme d’une affiche. Sans s’attarder sur les outils techniques déployés pour réaliser ce projet, il suffit désormais de tapoter du bout des doigts des éléments de la batterie présente sur le poster (grosse caisse, caisse claire, cymbales, etc.) pour qu’un micro haut parler diffuse le son de l’instrument. Encore une expérience interactive qui mérite le détour.

Affiche interactive réalisée par Chris Payne.

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Affiche interactive rĂŠalisĂŠe par Novalia.

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Aussi, pourquoi se contenter d’une affiche ? Même interactive. Le Radio Festival de 2012 se déroulant à Zurich a pour sa part confié sa campagne marketing à l’artiste berlinois Bartek Elsner qui aura eu pour ambition de fabriquer une radio Ghettoblaster géante tout en carton. La structure géante, placée dans la ville, masquait alors une voiture de la marque Mini qui pouvait alors se contenter de diffuser de la musique via ses haut-parleurs.

Marketing alternatif réalisé par Bartek Elsner.

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Les possibilités sont infinies, il est également possible d’intégrer le numérique à la communication musicale.

Après tout, si le futur de la musique passer par Internet, pourquoi lutter vainement et ne pas essayer d’apprivoiser les nouveaux outils numériques pour les mettre au service de la communication musicale ? Prenons Volume, projet réalisé par Emmanuel Martinet, étudiant diplômé de l’Esad de Strasbourg. Ce jeune designer a réalisé quatre livres contenant chacun des effets sonores bien spécifiques comme le volume de la musique, la possibilité de créer des boucles de son ou de gérer divers effets sonores. Une caméra, suspendue au-dessus de la zone où sont posés les livres, reconnaît grâce à un système de marquage les informations contenues par ses pages puis les traite informatiquement afin de jouer les sons. Un système de ce genre-là pourrait tout à fait venir enrichir les livrets disponibles dans les boites de CD’s, ou proposer des écoutes musicales dans des pages de magazines ou de livres spécialisés.

Livre musical réalisé par Emmanuel Martinet.

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Dans un tout autre genre, le compositeur américain Philip Glass s’est associé avec le Snibe Studio afin de réaliser, à partir d’une œuvre musicale qu’il a créée, une véritable expérience interactive et numérique.

Le studio a en effet mis au point une application iPad et iPhone générant des visualisations numériques animées et synchronisée en fonction des morceaux joués sur la tablette. De plus, le studio a également développé des outils permettant aux utilisateurs de créer des morceaux à partir de samples et de sons utilisés par Philip Glass dans ses propres compositions. Le rendu final, au-delà d’être somptueux, permet d’apporter une nouvelle vision de la musique, une musique visuelle, virtuelle et interactive entre le compositeur, l’image, le son et l’utilisateur.

Rework_ réalisé par Philip Glass et Snibe Studio.

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Nous avons vu que chaque style musical possède son emprunte graphique, qu’elle possède ses codes, ses valeurs ses artistes qui lui sont propres. Nous pouvons affirmer sans vergogne l’importance de l’image dans l’industrie musicale.

Toute fois, nous nous apercevons que depuis quelques années, les collaborations originales et innovantes se font rares. Certes, Warhol est mort et les artistes d’aujourd’hui ont tendance à ne travailler qu’avec des photographes, mais nous voyons aussi que cela influe sur la longévité et la reconnaissance des artistes et des albums. C’est simple. Reprenons la pochette à la banane de The Velvet Underground & Nico. L’album date de 1967, mais reste aujourd’hui encore implanté dans la mémoire collective, au détriment même de la musique des Velvet. Prenons maintenant la pochette d’un groupe emblématique lui aussi rock, pour ne pas créer de débats entre styles musicaux, comme Kiss. Et bien à force de n’utiliser que des photographies du groupe en guise de pochette d’album, aucune pochette ne se démarque et seule l’image de ce groupe peinturluré demeure. Afin de pallier à ce problème quelques artistes et designers s’essayent à de nouvelles pratiques, de nouvelles méthodes pour sublimer l’image de la musique ainsi que de sa communication, mais la route est longue et les possibilités sont nombreuses, nous sommes loin d’avoir tout essayé en matière de stratégie de communication.

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The Velvet Underground & Nico The Velvet Underground, 1967.

Love Gun Kiss, 1977.

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exemples de strategies

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L’image est importante, mais il ne faut pas oublier de communiquer intelligemment pour rendre cette image illustre. Aujourd’hui encore, chaque album possède sa pochette, mais est-ce suffisant ? Si, il y a vingt ans, une pochette de disque sublime, un vidéo-clip bien léché et des dates de concerts sur tout le globe suffisaient à un artiste pour exister, ce n’est évidemment plus le cas aujourd’hui. Plutôt que de continuer à se morfondre sur les potentiels méfaits de l’industrie et d’Internet, pourquoi ne pas trouver de nouvelles manières de communiquer la musique ? À surfer sur le présent et le futur de la communication pour en faire des productions de qualité. Oui, avant, les groupes possédaient une essence, une communauté de passionnés de musique, ils ont aujourd’hui des communautés de fans. Avant, les artistes partageaient des moments intimistes avec leurs fans grâce à des accès backstage, des interviews dans les fanzines. Aujourd’hui, à l’heure du numérique, il n’a jamais été aussi facile de communiquer. Pourquoi ne pas surfer sur ces nouveaux outils pour raviver la flamme de la musique ? Avant, un simple vidéo-clip permettait de retrouver son groupe favoris en image, les voire en actions. Pourquoi aujourd’hui garder cette simple formule proche de la vidéo publicitaire ?

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Quelques artistes ont déjà tenté de s’engouffrer dans la brèche ouverte par la numérique, nous allons donc étudier quelques-unes de ces tentatives pour trouver ce qui fonctionne, ce qui est perfectible, ce qui se doit d’être perfectionné ou encore ce qu’il reste à trouver pour renforcer la communication de la musique aujourd’hui.

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... daft punk ... -

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la strategie du secret 54


Comment ne pas commencer par la plus grande campagne de lancement d’un album de ces dernières années qu’est celle de Random Access Memories des Daft Punk ? Avant toutes choses, quelques chiffres récupérés sur le site llllitl.fr. Voici quelques statistiques sur la page Facebook des Daft Punk, qui est à l’image du groupe. Elle cultive son absence, diffuse très peu d’informations et flirte avec des chiffres fous à la moindre publication...

x Aucune publication entre 2010 (Tron Legacy) et le 26 février 2012. x 8,1 millions de fans Facebook. x 19 publications (seulement !) en 3 mois de campagne publicitaire. x 11 mots rédigés (seulement !) sur ces 19 publications. x 95.000 partages de la pochette de RAM. x 780.000 « like » au total pour la pochette. Cependant, il ne faut pas oublier un détail à propos des Daft Punk. N’importe quel autre groupe jouant la carte de l’absence médiatique se serait cassé la figure à disparaître totalement comme ça. Mais les Daft Punk ont toujours joué cette carte de la non-médiatisation, et ce jusqu’à l’origine de leurs masques qui leur procurent un minimum d’anonymat. Ce que l’on ne connaît pas, sur qui l’on ne connaît rien fascine forcément. Comment s’est donc articulée la campagne marketing de la sortie du plus gros succès musicale de l’année 2013 ?

Random Access Memories Daft Punk, 2013.

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Il faut avant savoir que le dernier album studio des Daft Punk, Human After All datant de 2005 a été globalement descendu par l’ensemble de la communauté des critiques musicaux. Est-ce que cela justifie une absence de huit ans avant de produire un nouvel album ? Est-ce la raison de leur totale absence des médias durant toutes ces années ? Où s’agit-il de la plus intelligente des techniques de marketing ? Après la sortie de la bande originale du film Tron Legacy qui avait forcé les Daft à sortir du silence, des rumeurs concernant leur retour commençaient à enflammer la toile.

*Vine est une application mobile qui héberge de courtes vidéos de 6 secondes pouvant être partagées avec les abonnés

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En mars 2013, les Daft Punk sortent officiellement du silence et diffusent dans l’un des plus grands talk-shows américains, le Saturday Night Live un teaser de quinze secondes. La machine est lancée. Une semaine après, la fameuse photographie de la pochette reprenant les deux masques des DJ’s est placardée partout autour du South by Southwest (SXSW), l’un des rendez-vous musicaux les plus importants des États-Unis. Le 12 avril, un extrait du clip Get Lucky est diffusé lors du plus grand festival musical au monde, le festival de Coachella, en Californie. Des milliers de festivaliers vont assister à cet événement et le diffuseront en masse et en direct sur les réseaux sociaux. Le lendemain, ce même extrait est à son tour diffusé dans le Saturday Night Live. Le premier single annonçant le retour des deux frenchies se dévoile de plus en plus. Le 16 avril, le compte Twitter de la major Columbia Records diffuse grâce à Vine* la liste complète des morceaux qui figureront sur RAM. Le 18 avril seront acheminés via des valises blindées des exemplaires de RAM dans les plus grosses radios de France. La culture du secret se fait toujours ressentir. Le lendemain, Pharrell Williams, chanteur sur le single Get Lucky chante pour la première fois en live le premier single de RAM. Le 20 avril Spotify annonce que le titre Get Lucky bat tous les records d’écoute. Le 30 avril, soit une semaine après sa première diffusion, le single a été vendu à près de 155 000 fois. Le 3 mai, les Daft Punk donnent leurs premières interviews en France. Le 14 mai, Columbia Records contacte quelques artistes pour leur permettre d’écouter pour la toute première fois l’intégralité de l’album. Ils relayeront l’information via leurs comptes Twitter. Le 20 mai, l’album est dans les bacs.

En novembre 2013, plus de trois millions de copies ont été vendues.

Affiches placardées aux abords du festival SXSW avant la sortie de l’album.

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Laurent Bouneau, directeur des programmes de la radio Skyrock avec les valises blindées contenant RAM

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Si cette nouvelle stratégie du secret, de la diffusion au compte-goutte semble effectivement être le meilleur coup marketing du monde musical de ces dernières années, est-ce vraiment l’unique et bonne solution ? Non. Tout le monde n’est pas les Daft Punk. Nous pouvons même déplorer la froideur du groupe avec ses fans et les médias français puisque les évène– ments les plus importants n’ont jamais eu lieu en France et que les deux DJ’s ne communiquent JAMAIS avec leurs fans. D’autant plus que si cette stratégie a fonctionné, elle n’apporte rien de nouveau quant aux manières de communiquer la musique. Une affiche, deux clips, quelques interviews. Au final, ce sont les fans qui ont fait toute la communication de l’album, ce sont eux qui ont diffusé les informations sur les réseaux sociaux.

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... kaiser chiefs ...

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l interaction numerique 58


En réponse à la froideur de la communication des Daft Punk, penchons nous maintenant sur le site Internet créé par les agences Wieden+Kennedy et Specialmoves pour la sortie du quatrième album des Kaiser Chiefs, The Futur is Medieval. Le brief est simple. Les Kaiser Chiefs ont demandé à leur agence de publicité de proposer quelque chose de différent qui reste attrayant pour les fans, tout en créant un buzz médiatique afin d’attirer un nouveau public. La solution elle, semble simple sur le papier. Ils décident de créer un site Internet interactif pour lancement de ce nouvel album afin de proposer aux fans une expérience unique.

L’idée fut de réaliser une série de machines virtuelles plus loufoques les unes que les autres permettant aux fans connectés de sélectionner dix morceaux parmi un catalogue de vingt titres ainsi que de créer leurs propres pochettes d’albums.

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Site Internet des Kaiser Chiefs, permettant aux fans de composer la tracklist ainsi que la pochette de l’album The Futur is Medieval.

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Les fans peuvent donc posséder leur propre version de The Futur is Medieval. Outre cette possibilité pour les fans de personnaliser leur propre version de l’album, ce nouveau site Internet leur permet également de vendre leur version de l’album. En plus du côté ludique qu’apporte ce fonctionnement, chaque fan arrivant à vendre sa version de l’album touchera une livre. Toute fois, si l’idée est alléchante, il ne faut pas oublier qu’au final, nous pouvons la comprendre parce que, soit, nous en sommes à l’origine, soit nous sommes nous-mêmes issus des milieux de la communication, mais il ne faut pas oublier de rendre ce concept accessible aux fans « lambda » de Kaiser Chiefs. Darrell Wlkins, directeur de création du studio Specialmoves avoua lui-même qu’« il faut expliquer à l’utilisateur ce que vous faites et ce qu’il doit faire en quelques phrases rapides et claires. À cet égard, résumer ce que fait le site des Kaiser Chiefs est relativement simple ». Lors de son lancement en 2011, le site a été salué par la presse et a remporté de nombreux prix. Un autre avantage en dehors de cette portée médiatique ? Les fans du groupe devaient créer et donc acheter deux albums pour posséder les vingt titres que proposait le groupe. Ici, contrairement aux Daft Punk, les Kaiser Chiefs ont tout misé sur une totale interaction avec leurs fans. Ils peuvent choisir leurs morceaux, créer leur pochette et même vendre leurs « compositions » à d’autres fans du groupe en gagnant un petit peu d’argent. Ce même Internet qui est censé tuer les relations sociales, dématérialiser la musique et la tuer permet ici de rassembler toute une communauté autour d’un même projet.

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... fall out boy ...

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les videos federatrices 60


Dans un tout autre genre de promotion, les Américains de Fall Out Boy ont signé leur grand retour en 2013 avec leur album Save Rock’n’Roll. Après leur dernier album cinq ans auparavant puis leur séparation, leur simple retour-surprise est en soit un bon outil de communication autour de leur musique. Mais ce n’est pas tout. En effet, le groupe a imaginé une sorte de film intitulé The Young Blood Chronicles qui ne sera en fait qu’une suite de clip mit bout à bout.

Le groupe a en effet décidé de réaliser un clip pour chacune des chansons de son album, (à savoir qu’il a onze morceaux sur celui-ci) qui, une fois les onze morceaux illustrés donnera un court-métrage complet. Il ne s’agit donc pas d’une simple suite de séquences du groupe interprétant ses morceaux. Cette simple idée permet de fidéliser les fans autour d’un concept qui leur nécessite de suivre ces sorties jusqu’à la fin, afin de posséder et de comprendre l’intégralité de l’histoire que veut raconter le groupe au travers de The Young Blood Chronicles. S’il s’agit de la principale touche d’originalité autour de la communication de cet album, elle pour ambition de surfer sur la vague des vidéoclips dont est très largement fan la génération qui écoute ce genre de musique. Toutes les idées sont bonnes à étudier.

Extraits de divers clips de Fall Out Boy formantle court-métrage The Young Blood Chronicles

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... david bowie ...

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le retour surprise 62


De la même manière que les Daft Punk, David Bowie a aussi utilisé la discrétion et le secret comme outil de promotion pour la sortie de The Next Day, son dernier album. Il aura fallu attendre dix ans pour entendre un nouvel album studio de David Bowie.

Outre cette absence incroyablement longue, l’artiste a réussi à préparer son album dans le plus grand secret au point même que son label, Sony Music Entertainment, n’était même pas au courant de la préparation de cet album. Aucune information, aucune fuite concernant son retour jusqu’au 8 janvier 2013, date du soixante-sixième anniversaire de l’artiste, où l’intéressé diffusa via iTunes son premier single Where Are We Now ?, permettant également de précommander l’album. Si les Daft Punk ont décidé de révéler petit à petit leur plan de communication concernant la sortie de leur nouvel album, Bowie lui joue la carte de la surprise totale. D’un point de vue statistique, l’expérience est concluante, l’album est disque d’or et disque de platine dans plusieurs pays. Cependant, il faut être cohérent, nous parlons de David Bowie, artiste possédant plus de quarante ans de carrière. C’est donc un retour-surprise et inattendu qui fonctionne, mais si un jeune groupe décide de lancer son deuxième ou troisième album, il ne créera évidemment aucune surprise, parce que personne n’attend un retour-surprise.

The Next Day David Bowie, 2013

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... radiohead ...

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le choix du prix 64


Parfois, une bonne stratégie marketing ne passe en aucun cas par l’image ni même les techniques de promotion traditionnelles. Radiohead, groupe britannique mené par le charismatique Thom Yorke, a toujours été assez discret vis-à-vis des médias. Pourtant, la sortie de leur septième album studio In Rainbows est une réussite, notamment grâce à une stratégie marketing dont l’idée ferait pâlir plus d’un label.

Devenu indépendant peu de temps avant sa sortie, le groupe décide de mettre en ligne sur leur site Internet une version digitale de l’album avec un simple appel aux dons. Ce qui veut dire que le groupe laissait le consommateur libre de décider, dans un premier temps, de payer ou non l’album, mais il le laisse aussi libre dans le choix du montant. Le Times a réalisé un sondage indiquant que la somme moyenne versée par les auditeurs était d’environ quatre livres. Un tiers des acheteurs n’ayant rien payé, la somme moyenne déboursée pour l’achat d’un album fut donc de 2,66 livres. À ce jour, In Rainbows a été téléchargé à plus de trois millions d’exemplaires, faisait donc de cet album un véritable succès commercial. C’est également la première fois qu’un groupe de l’envergure de Radiohead laisse au public le choix du prix de son album.

Capture d’écran du site Internet de Radiohead lors de la sortie en téléchargement libre

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... arcade fire ...

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la guerilla marketing 66


Enfin, et il s’agit probablement de la meilleure campagne de communication musicale de l’année 2013, les Canadiens d’Arcade Fire ont parfaitement déployé une stratégie de communication efficace et intelligente mêlant à la fois des supports et techniques de diffusion « classiques » et quelques idées originales qu’il semble important de souligner. Contrairement à Bowie ou aux Daft Punk, le nouvel album d’Arcade Fire n’avait rien de secret, il était annoncé, mais pas n’importe comment.

Cette information a été diffusée dans une simple réponse au tweet d’un fan destiné au groupe.

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L’annonce de Reflektor a donc semblé anecdotique, lâché presque comme par erreur. Pourtant, quoi de plus appréciable pour une communauté de fans de voir un groupe prendre le temps de répondre à ses fans, surtout lorsqu’il s’agit d’une information de cette envergure, généralement réservée aux médias spécialisés.

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Début août, à la suite de la communication de cette date de sortie, des graffitis d’un logo cryptique complétés du mot Reflektor ont commencé à apparaître dans plusieurs grandes villes. Un compte Instagram* rassemblant des photographies de ce logo a été crée allant jusqu’à publier une vidéo sur laquelle nous pouvons observer un street-artiste en train de réaliser un de ces fameux logos.

Le 26 août, Arcade Fire confirme le lien entre leur nouvel album et ce logo mystérieux en affichant une immense peinture murale sur un bâtiment de Manhattan incluant quatre de ces logos ainsi que l’inscription « Arcade Fire 9pm 9/9 ».

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Le 2 septembre, un clip musical de quinze secondes intitulé lui aussi 9pm 9/9 répondant au nom d’album Reflektor est diffusé sur Spotify. Le 9 septembre, le groupe annonce un concert secret de dernière minute sous le nom de The Reflektor à la Salsathèque de Montréal, dévoile la pochette du nouvel album et diffuse un premier clip interactif dans lequel les internautes peuvent apparaître via leur webcam directement dans la vidéo, mimant ainsi une réflexion dans un miroir. Le soir même, un second clip, de la même chanson, est diffusé sur le net par le groupe, qui s’offre même le luxe de laisser les chœurs du morceau à Monsieur David Bowie. Rien que ça. Dans ce cas présent, nous pouvons admettre qu’effectivement, et au même degré que les groupes précédents, les Arcade Fire sont un groupe réputé qui jouit déjà d’une certaine notoriété. Pourtant, les moyens mis en places ne sont pas colossaux. Quelques échanges avec les fans, une campagne en forme de jeu de piste et le tour était joué. Comme quoi, l’originalité peut permettre de grandes choses.

* Instagram est une application de partage de photos et de vidéos pour plates-formes mobiles.

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la cible, -ses gouts, ses attentes

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Après l’analyse de quelques-unes des meilleures stratégies de communication musicales de ces dernières années, plusieurs constats s’imposent. Tout d’abord, tous ces artistes sont de gros artistes. Comme expliqué auparavant, si David Bowie ou les Daft Punk peuvent se permettre de travailler dans le secret et fuir les médias avant de célébrer leur grand retour en musique, il est évident que de plus jeunes groupes, moins importants ne peuvent en aucun cas espérer un tel succès en disparaissant de la scène musicale quelque temps. Tout ce qu’ils risquent c’est de disparaître à jamais. Pourtant, ces grands groupes ne tentent pas grand-chose de nouveau en matière de communication. Les modèles restent les mêmes. Des teasers, des extraits musicaux, quelques affiches... Comment peuvent rivaliser les plus petits groupes face à ces géants de la musique ? D’autant plus qu’il est, aujourd’hui plus que jamais, difficile de se faire une place au soleil tant le nombre d’artistes augmente. Ajoutons à cela l’hyper-consommation de musique par les jeunes, le téléchargement, la génération zapping, bref. S’il faut conquérir, passionner et rassembler, il faut innover !

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... quellE cible ? x

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En parlant de l’hyper-consommation de la musique par les jeunes, la génération zapping, nous nous approchons doucement vers la cible que souhaite conquérir ce projet. En effet, faisant également partie de cette génération, je me sens beaucoup plus proche de cette dernière, de ses modes de consommation et de ses envies et attentes. Avant toutes choses, quelques chiffres tirés d’un sondage commandé par la SACEM* auprès de l’organisme Opinion Way*.

x En 2013, 80 % des Français considèrent la musique comme une passion. x 84 % d’entre eux affirment écouter de la musique tous les jours. x Pour eux, l’appréciation d’un morceau est liée à hauteur de 75 % à la création, la qualité de l’œuvre, Sa pertinence. x 96 % des 15-24 ans estiment écouter de la musique quotidiennement. Ils sont 94 % chez les 25-34 ans. x 73 % d’entre eux la considèrent comme une activité culturelle, ce qui l’érige au premier plan devant le cinéma (62 %) et la télévision (32 %).

Les 18-30 ans seront le cœur de cible de ce projet de mémoire.

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Consommation musicale   35 % petit consommateur   44 % consommateur régulier   21 % gros consommateur

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Ces jeunes générations, elles, privilégient une écoute grâce aux baladeurs ou aux téléphones. Il ne faut donc surtout pas négliger deux modes de conso­ mmation liés à cette utilisation de la musique. Le choix, la sélection des titres ainsi que le zapping. Aujourd’hui, la jeune génération ne s’embête plus à chercher, fouiller et étudier de nouveaux groupes, de nouvelles mélodies. Il faut que tout arrive rapidement. Ensuite, si elle est accrochée par ce qu’elle entend, elle se procurera le fruit du travail d’un groupe ou d’un chanteur, mais il faut que celui-ci soit attachant et présent dans la vie de ces jeunes, sinon ils zapperont et passeront très rapidement à autre chose. C’est ici que réside la complexité de la survie des artistes. Il faut réussir à rassembler, à fédérer une véritable communauté de fan, parce qu’au final, ce sera cette communauté qui fera vivre ces groupes. Dans un souci de cohérence, nous élargirons le panel de cible que ce projet souhaite séduire. Nous mélangerons ainsi la tranche des 15-24 avec celle des 25-34 ans pour ne garder qu’un cœur de cible âgé de 18 à 30 ans pour de simples raisons. Tout d’abord parce qu’elle possède à peu de choses près les mêmes goûts, mais aussi parce qu’on ne peut communiquer efficacement de la même manière pour des jeunes de 15 ans que pour des adultes de 34 ans.

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... ses gouts -

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Maintenant que nous avons vu quelle tranche de population est plus sensible à la musique, ainsi que les modes de consommations de celle-ci,intéressons-nous désormais à ses goûts, ses envies et ses attentes en matière de musique.

x Pour les 15-24 ans, 45 % d’entre eux écoutent principalement du R’n’B et 42 % de la pop et du rock. x chez les 25-34 ans, 49 % tournent à la pop et au rock alors que le R’n’B tombe à seulement 22 %. Nous pouvons donc en déduire que la cible qui nous intéresse, soit les 18-30 ans, écoute principalement de la pop et du rock.

x Il faut également noter que pour près de 30 % de cette cible, la musique est vitale au même titre que de boire ou de respirer. Ce n’est pas négligeable. Cela démontre encore une fois l’importance de la musique pour la population, ce qui justifie également l’importance d’un projet comme celui-ci. Ces fans de musique sont près de 30 % à faire au moins un concert par an, le pic de fréquentation des concerts se situant à 30 ans pour décroître régulièrement par la suite. Il ne faut donc pas négliger cet aspect de la communication musicale non plus. Bien trop souvent, pour un concert, les groupes utilisent une simple affiche, reprenant bien souvent l’artwork de leur album ou une photographie des musiciens alors que les concerts sont aujourd’hui une source de revenus incroyable pour les artistes.

x Il faut savoir que les ventes de disques physiques ont chuté de près de 30 % allant jusqu’à 55 % pour les CD single. Les tournées engendrent désormais énormément d’argent, les fans achètent des places, invitent des amis, qui découvriront le groupe, ils achèteront ensuite, s’ils aiment suffisamment, des disques, des vêtements, des posters, des goodies... Il ne faut en aucun cas négliger l’impact des représentations live dans l’industrie de la musique.

Statistiques d’écoute de la musique par tranche d’âge

heures d’écoute par jours

2,5

2

1,5

Concerts par an

15-25 ans

25-35 ans

35-50 ans

50-65 ans

65 et +

x

1

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Autre chose. Nous avons compris qu’une partie de ces fans de musique pratique le zapping musical. Ils ne rapportent pas d’argent. Ils téléchargent illégalement, écoute, puis passe à autre chose. Ce sont donc ceux que l’on appelle la « Fanbase », l’équivalent du cœur de cible, qu’il faut chouchouter. La loi de Pareto* établit que 80 % des ventes proviennent de 20 % des clients. L’écrivain Kevin Kelly confirme cette loi en constatant qu’il est possible de dissocier en trois groupes une base de fan. 80 % représentent les « casual fans », les fans passifs. Ils connaissent l’artiste de nom ou par quelques titres, le téléchargent puis passent à autre chose. 15 % de fans sont appelés les « regular fans », ce sont les fans engagés, ils connaissent l’artiste, achètent sa musique, vont aux concerts, en parlent autour d’eux. Ils suivent les actions de leur artiste sur les réseaux sociaux, partagent et commentent ses actions... Enfin, les 5 % restant sont les « true fans », les superfans. Ils vivent pour l’artiste, ils veulent à tout prix compter pour lui. Ils achètent le moindre objet en rapport avec ce dernier, le moindre titre. Tout leur argent et toute leur vie sont dédiés de près ou de loin à cet artiste. Il faut donc que ces artistes privilégient ces 20 % de fans en leur donnant ce qu’ils attendent.

Mais qu’est ce qu’attend réellement cette tranche de la population vis-à-vis de ces artistes ? Une présence sur les réseaux sociaux, pouvoir observer des moments de vie de cet artiste, avoir une certaine connexion avec lui. Ils attendent aussi une certaine sincérité dans ses propos, ses agissements. Pourquoi pas le rencontrer, obtenir un autographe, un objet en édition limitée, discuter avec lui de la genèse d’un disque ou d’un morceau. Tout ceci démontre bien qu’il faut impérativement que les artistes aillent au-delà de la traditionnelle stratégie de communication musicale, elle doit être plus large, plus originale, plus accessible et pourquoi pas plus numérique.

Illustration de la Loi Pareto

20 %

20 %

80 %

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Fans 74

80 %

Public

Revenus


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reflexions, problematiques

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En définitive, nous avons pu observer que la culture musicale et graphique sont complémentaires et indissociables. L’une comme l’autre a connu au cours des années de nombreux changements, qu’il s’agisse d’évolutionstechniques, artistiques ou économiques. La musique s’est dématérialisée, le graphisme musical change de tendance selon les époques et les styles et l’appréciation musicale tend à devenir une consommation musicale. Les supports de communication évoluent et se multiplient également. Aujourd’hui tout est accessible en quelques clics, les artistes peuvent diffuser du contenu de manière drastique et instantanée, au détriment d’objets peut-être plus appréciés par les fans de musique, qui ont fait leur temps, à l’image des fanzines musicaux. Il semble important pour les fans de se sentir privilégiés par le groupe, d’être proche de ce dernier. C’est ici qu’un drôle de constat se fait : cette hyper-accessibilité à la musique semble en fait nuire à cette dernière. Il y a de cela quelques années, il fallait se retrouver autour d’un poste pour écouter de la musique, il fallait se déplacer chez son disquaire, rencontrer les artistes aux concerts et attendre que le bouche-à-oreille se fasse. C’est à priori à ce niveau qu’il faut travailler. Peu importe les moyens à mettre en place, ce qui semble judicieux en tout cas serait d’insuffler à travers la communication une interaction entre les artistes, les passionnés de musique, les fans de groupes et tous les acteurs de l’industrie musicale. Si la musique, au même titre que le graphisme, sont des arts suscitant des émotions, des envies et des questions de goûts et de couleurs dont on ne peut discuter, c’est également le partage et l’échange entre ceux qui créent cet art, et ceux qui l’écoutent, le regardent ou l’animent. Finalement, ne serait-ce pas là notre véritable enjeu ?

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... enjeux du projet x

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Toutes ces analyses tendent à nous poser un certain nombre de questions dont les enjeux seraient de revaloriser la communication musicale. Reprenons les supports de diffusion. Nous savons déjà que le marché du disque est en chute libre. Serait-il judicieux de relancer l’objet pour mieux communiquer la musique ? Je ne pense pas. Soyons honnêtes, il faut vivre avec son temps. Si je suis moi même consommateur de disques vinyles et non de CD’s, que je télécharge, je suis intimement convaincu que l’avenir de la musique passe par sa dématérialisation. Ce ne sont pas les chiffres de l’institut GHK qui diront le contraire. D’après eux, 68 % des 15 ans et plus déclarent consommer de la musique en ligne hebdomadairement. 52 % d’entre eux téléchargent légalement et 51 % de manière illégale.

Dans ce cas, comment communiquer cette musique dématérialisée ? Faut-il proposer des contenus enrichis et adaptés, plutôt que de continuer à simplement proposer des albums numériques associés à quelques images comprenant la pochette du disque ? Est-il possible de trouver de nouvelles offres pour enrichir l’expérience musicale ? Une écoute interactive ? Des contenus exclusifs ? Détourner les livrets que l’on retrouve habituellement dans les boîtes de CD’s pour en faire des objets numériques originaux ? Ou alors, à l’image de Deezer ou de Spotify, faut-il créer de nouveaux moyens de diffusion ? Seulement, pour l’instant nous ne parlons que des moyens de diffuser de la musique, mais le disque ou la musique intangible ne sont pas les seuls supports auxquels il faut penser en terme de stratégie de communication. Par exemple, pour promouvoir un concert, évènement qui en pleine crise de l’industrie du disque reste une source de revenus intarissable, que nous propose t-on ? Une affiche reprenant le visuel de l’album ou alors une photographie de l’artiste. Est-ce suffisant ?

Un concert est un moment tellement fort, riche en émotion. comment insuffler cette énergie à travers d’autres supports ? Notre cerveau est confronté à un nombre incalculable d’images par jour, il faut donc absolument tirer son épingle du jeu afin de marquer les esprits. Pourquoi pas créer de véritables campagnes interactives à l’aide de panneaux d’affichages numériques ? Que ce soit la diffusion de concerts, faire participer les passants à un évènement donné, les faire interagir directement avec l’affiche numérique ou y créer des échanges entre fans et artistes. Après tout, si cela nécessite un peu plus qu’une webcam et Internet, cela reste une piste intéressante à envisage.

Cette notion d’interaction semble être une idée qu’il faut creuser.

x

Si la cible qui nous intéresse est hyper-connectée, elle fait également partie de la génération zapping qu’il s’agisse d’image, de musique, de lecture ou de vidéo. Il faut réussir à capter son attention, marquer son esprit pour que cette dernière soit réceptive de manière fidèle à ce qu’on lui présente. Il faut donc, à mon sens, "l’intégrer" comme acteur ou du moins la faire participer à un moment donné dans l’action de communication de la musique.

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C’est simple. Regardons les stratégies de communication d’Arcade Fire ou de Kaiser Chiefs. Dans les deux cas, les groupes ont décidé de mettre en avant leurs fans. Le premier en lui livrant une information capitale (la date de sortie de son album), le second en lui permettant de créer sa propre version du nouvel opus du groupe. Résultat ? Deux réussites en terme de marketing et de ventes d’album. Pourquoi ? Parce que leurs stratégies de communication respectives ont été suffisamment atypiques pour susciter de l’engouement chez les fans, les passionnés de musique et salué par la presse et les professionnels de la communication. Ils ont compris comment communiquer auprès de leur cible.

Il semblerait donc légitime de chercher des stratégies nouvelles visant à investir fans et passionnés à la communication musicale. Dans ce cas, le fan s’impliquerait à la réussite de son artiste, le passionné de musique sera surpris par cette nouvelle communication, l’artiste sera mis en valeur en proposant quelque chose de plus que les autres. Nous supposons que maisons de disques bénéficieront des retombées médiatiques et économiques de ce marketing alternatif. Il ne faut cependant pas oublier une chose. Ces stratégies de communication “nouvelle génération“ sont bien souvent utilisées et/ou utilisables par des groupes et musiciens d’une certaine importance. Tout le monde ne peut s’offrir la campagne marketing des Daft Punk au risque de sombrer de l’oubli le plus total. Pourquoi ne pas démocratiser ces campagnes pour des groupes plus modestes ?

Dans ce cas, Internet et le bouche-à-oreille restent les outils de diffusion les plus accessibles. Comment faire intervenir le bouche-à-oreille me direz vous ? Il suffit de trouver l’événement ou l’action qui fera parler de lui, comme une campagne de marketing alternatif. Plutôt que de se morfondre dans l’idée que “la musique, c’était mieux avant“ nous avons cherché à comprendre comment briser cette idée reçue. Il y a quelques années, la musique possédait une âme, les groupes vivaient pour leur art et partageaient cette passion avec leurs fans. Il n’y avait pas d’Internet, les gens se déplaçaient pour écouter des titres, ils profitaient des morceaux parce qu’ils n’étaient pas tous aussi facilement accessibles d’un clic comme aujourd’hui. Étonnamment, les gens possédaient plus engouement pour les groupes de l’époque que pour la plupart des artistes "kleenex" d’aujourd’hui. Il faudrait alors renouer avec ces valeurs, retrouver la fidélité des fans envers un groupe, leur passion face à des musiciens plutôt que face à une chanson.

Dès lors, pourquoi ne pas imaginer un nouveau moyen de concevoir, créer, produire et vendre de la musique ?

*Directeur artistique, chargé de diffusion, de production ou de relation public, tourneur, attaché de presse...

x

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Créer une sorte de lieu de création, un "loft-story" de la musique avec plusieurs groupes en résidence, la possibilité aux familles, amis et fans d’y résider également avec des salles de répétition, d’enregistrement, des lieux de détentes et tout ce qu’il faut pour y vivre. De cette manière les musiciens pourraient être directement associés par exemple avec des plasticiens, des fans, des journalistes impliqués dans l’esprit de la création musicale. Le musicien pourrait être accompagné par d’autres compositeurs, des fans ou des professionnels*. Le plasticien pourra s’imprégner d’univers musicaux pour concevoir des œuvres destinées aux musiciens (photographies, pochettes, livrets...). Les fans pourront assister à la création d’un projet musical, y participer et les professionnels exerceront leur travail dans des conditions qui, sur le papier en tout cas, semblent idéales.


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resume des enjeux comment communiquer cette musique dématérialisée ? x Faut-il proposer des contenus enrichis et adaptés ? x Est-il possible de trouver de nouvelles offres pour enrichir l’expérience musicale ? x Une écoute interactive ? Des contenus exclusifs ? x À l’image de Deezer ou de Spotify, faut-il créer de nouveaux moyens de diffusion ?

Comment faire des concerts un élément moteur dans la fidélisation des fans et de leurs actes d’achat ? x Peut-on créer des campagnes interactives à l’aide de panneaux d’affichages numériques ? x Peut-on faire participer les fans à un évènement donné ? x Est-il possible de faire interagir le public avec les affichages numériques ? x Peut-on virtuellement mettre en relation artistes et fans grâce à ces panneaux ?

Comment démocratiser ces nouvelles stratégies de communication pour des groupes plus modestes ? x Comment cultiver une certaine idée du “buzz“ pour attirer l’attention des médias ? x Comment développer une campagne de marketing alternatif visant à exploiter le bouche-à-oreille entre les fans et les médias ?

x Comment rendre acteur le fan de musique au point de le rendre pièce maîtresse de la stratégie de communication ?

Est-il possible d’imaginer de nouveaux moyens de concevoir, créer, produire et vendre de la musique ? x Comment réunir autour d’un même projet musiciens, plasticiens, graphistes, fans et professionnels du monde la musique ?

x Est-il possible d’accorder suffisamment d’importance aux fans pour leur permettre de participer

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aux processus de créations artistiques ?

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biblio/sito -graphie

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x bibliographie - Virgine Berger, Musique et stratégies numériques - Marketing, promotion, monétisation et mobilité, Irma - Centre d’Information et de Ressources pour les Musiques Actuelles, 15/09/2012, 161p - Richard Gouard, Grégory Bricout, Christophe Geudin, Vinyles , L’art du disque, La Martiniere Eds De, 27/09/2012, 352p - Gavin Ambrose, Michael Salmond, Les fondamentaux du design interactif, Pyramid, 08/10/2013, 200p

x sitographie - Quand le graphisme rencontre la musique, http://www.ensci.com/uploads/media/etude_Yihong_Liu.pdf - Les jeunes, la musique, les habitudes de consommation http://www.confliktarts.com/fr/blog/127/les-jeunes-la-musique-les-habitudes-de-consommation-le-tout-avec-des-pourcentages#.U7K6YV7TyX9 - Smartphone et vie privée, http://www.cnil.fr/fileadmin/documents/La_CNIL/publications/DEIP/CNIL-Etude-SMARTPHONES-2011.pdf - Alex Steinweiss, symphonie de pochettes, http://next.liberation.fr/musique/2011/07/21/alex-steinweiss-symphonie-de-pochettes_750475 - Les nouvelles exigences des 18-25 ans, http://www.ui-26-07.com/files/newsletter/Article-Lemattre.pdf - Présentation de l’étude sur la consommation de musique en ligne, http://www.hadopi.fr/observation/publications/presentation-de-letude-sur-la-consommation-de-musique-en-ligne - Le marché français de la musique sur Internet, http://www.zdnet.fr/actualites/chiffres-cles-le-marche-francais-de-la-musique-sur-internet-39790982.htm - Petite Histoire de la Pochette de Jazz, http://www.dragonjazz.com/jazzcover/sleeve2.htm - Reid Miles, graphiste majeur du XXème siècle, http://artandcie-dbelleil.blogspot.fr/2012/11/reid-miles-graphiste-majeur-du-xxeme.html - Jamie Reid: « L’éternel Rebel dadaïste et écologiste » http://www.actuart.org/page-jamie-reid-l-eternel-rebel-dadaiste-et-ecologiste-7806936.html - L’art de la pochette, http://www.bm-lyon.fr/musiquazimuts/spip.php?page=pointdactu&id_pda=299 - Voici le premier papier interactif, http://www.danstapub.com/voici-le-premier-papier-interactif-lavenir-du-print-et-de-limpression/201307/ - Faire de la musique électronique avec un livre ?, http://graphism.fr/faire-de-la-musique-lectronique-avec-livre-voici-volume-demmanuel-martinet/ - Musique en carton dans les rues de Zurich, http://etapes.com/musique-en-carton-dans-les-rues-de-zurich - Daft Punk : timeline d’une campagne publicitaire sans précédent ! http://www.llllitl.fr/2013/05/daft-punk-marketing-strategie-campagne-publicitaire-buzz-musique-album-ram/ - Ce que vous devez voir de la stratégie marketing d’Arcade Fire, http://donnetamusique.com/ce-que-vous-devez-voir-de-la-strategie-marketing-darcade-fire/ - L’affichage dynamique arrive dans les stations de métro, http://maximesaada.blogspot.fr/2010/05/laffichage-dynamique-arrive-dans-les.html - Fat Wreck Chords, http://fatwreck.com - Punk Fiction, http://punkfiction.com

x

- La Gaîté Lyrique, http://gaite-lyrique.net/ 81


x 82


x 83


x

Tome

84

x 01


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