Extrait Evangeline

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LECTURES CLE EN FRANÇAIS FACILE

Évangeline H E N R Y WA D S W O RT H LO N G F E L LO W

NIVEAU 3

B1 1400 mots


LECTURES CLE EN FRANÇAIS FACILE

Évangeline Henry WadsWortH LongfeLLoW

Adapté en français facile par Fabien Olivry et Julien Perrier Chartrand



Première partie 1 CHAPITRE PREMIER

L

e petit village de Grand-Pré, où s’est déroulée cette histoire, s’élevait au milieu d’une vallée fertile de l’Acadie. Il devait son nom aux vastes prairies qui l’entouraient et qui servaient de pâturages* à de nombreux troupeaux3. Des digues élevées par la main des hommes protégeaient le village contre la mer. À l’ouest et au sud, des champs de lin* et de blé, de riches vergers4 annonçaient la fertilité de ce pays qui était limité au nord par d’immenses forêts et de hautes montagnes. Entouré de fermes riches et florissantes, au milieu d’une nature si parfaitement harmonisée, le petit village acadien semblait être un paradis de tranquillité et de paix. Les maisons bâties solidement rappelaient celles des anciens paysans normands. C’était pour les Acadiens un souvenir de la France qui, malgré l’éloignement, leur était toujours chère. Pendant les calmes soirées d’été, lorsque le soleil éclairait encore les rues du village, les femmes et les jeunes filles, coiffées de bonnets blancs comme la neige, et vêtues de jupes aux couleurs vives et variées, s’asseyaient devant leurs maisons et filaient* le lin, tandis qu’à l’intérieur travaillaient les tisserands*. Le soir, les travailleurs regagnaient leur demeure après une journée de travail, et le repos descendait sur le village

3. Troupeau : groupe d’animaux domestiques (vaches, moutons, chèvres…) qui sont élevés ensemble. 4. Verger : terrain où il y a des arbres fruitiers (pommiers, poiriers, cerisiers…)

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avec le coucher du soleil. La cloche de l’église sonnait l’Angélus ; la fumée qui sortait des cheminées annonçait le repas du soir, et chaque famille, séparée tout le jour, se trouvait à nouveau réunie autour du souper. Tout le monde vivait ainsi, heureux, dans l’affection de sa famille et des autres villageois. Dans ce pays où régnaient l’amour et la charité, il n’y avait ni barreaux aux fenêtres ni verrous aux portes ; on n’y connaissait pas la pauvreté, car le plus riche aidait le plus pauvre, tous étaient solidaires. À quelque distance du village se trouvait la belle propriété de Bénédict Bellefontaine, le plus riche fermier de Grand-Pré. Il vivait de sa ferme, aidé par sa fille, l’aimable Évangéline, aussi modeste que douce. La maison de Bénédict s’élevait sur une colline qui dominait la mer. À côté de la porte d’entrée, un grand sycomore* donnait de l’ombre. Juste à côté, un sentier conduisait à un immense verger. Plus loin, en bas de la colline, on pouvait voir la bergerie*, pleine de moutons, la basse-cour* et ses poules, puis, plus loin encore les chariots et le matériel agricole et enfin les granges5, remplies de foin*. Bénédict Bellefontaine, le propriétaire de ce riche domaine, était âgé de soixante-dix ans ; mais il était encore robuste et vigoureux6. Ses cheveux blancs comme la neige faisaient encore mieux ressortir son visage bruni par les années. Sa fille Évangéline, âgée de dix-sept ans, gouvernait le ménage ; ses yeux noirs étaient pleins de douceur. Cette charmante jeune fille était la joie et l’orgueil du village ; tous l’admiraient quand elle allait porter aux travailleurs à boire à midi, pendant l’époque brûlante 5. Grange : bâtiment agricole où on stocke les récoltes. 6. Vigoureux : qui est plein d’énergie, de santé.

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des moissons7. Le dimanche, lorsque la cloche appelait à la prière les habitants du village, Évangéline, vêtue de sa cape normande et de sa jupe bleue, descendait la rue du village et tous l’entouraient de la plus affectueuse sympathie. À l’église, lorsqu’elle était agenouillée8, son livre de prières à la main, plus d’un jeune garçon jetait les yeux sur elle comme sur une sainte vénérée. Sa pureté illuminait son visage et tous les jeunes hommes rêvaient à elle en silence. Le meilleur ami de Bénédict, Basile Lajeunesse, que tous appelaient Basile le Forgeron* était un homme puissant et considéré de tous dans le village. Les enfants de ces deux hommes avaient grandi ensemble comme frère et sœur, mais, depuis quelque temps déjà, Gabriel était devenu le fiancé de la jeune Acadienne.

7. Moissons : récolte de blé ou d’autres céréales. 8. Agenouillée : sur ses genoux.

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2 CHAPITRE II

L

es nuits devenaient de plus en plus longues et froides. Les moissons étaient rentrées dans les granges, et déjà les vents d’automne secouaient violemment les arbres de la forêt. Tout annonçait un hiver long et froid. Les abeilles avaient emmagasiné9 dans leurs ruches de grandes quantités de miel ; la fourrure des renards et des autres animaux était plus épaisse qu’à l’ordinaire, ce qui était l’indice certain d’un hiver exceptionnellement rude. Cependant il y eut encore quelques beaux jours. Toute la nature était reposante ; l’océan paraissait calme et tranquille. Les voix des enfants qui jouaient, le chant des coqs dans la campagne, le bruit des oiseaux dans les feuilles rendues jaunes et rouges par l’automne, le soleil dont les rayons étaient si doux et voilés ; tout semblait inviter au bonheur. C’était pour les bons paysans acadiens la période du repos qui commençait. Lorsque la nuit allait tomber, les troupeaux rentraient à l’étable. En tête marchait la belle vache d’Évangéline, elle agitait joyeusement sa clochette, comme si elle savait l’affection que lui portait sa jeune maîtresse. Puis venaient des bords de la mer, où se trouvaient leurs pâturages préférés, les moutons conduits par leur berger. Derrière eux marchait le chien, gardien fidèle et vigilant. Il allait de droite à gauche, remuait sa queue, et poussait en avant les retardataires. Pour ces troupeaux, le chien était un chef et un protecteur ; car, la nuit, pendant le sommeil

9. Emmagasiner : entreposer, stocker, mettre en réserve.

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du berger, c’était lui qui défendait les moutons craintifs10 contre les loups qu’on entendait hurler11 au loin dans la forêt. Plus tard, lorsque la lune se levait, les lourds chariots revenaient, chargés de foin. On entendait les chevaux qui rentraient paisiblement à la ferme. Les vaches, après une journée dans les pâturages, donnaient du lait en abondance. Enfin, les rires des hommes et les cris des animaux laissaient la place au silence. Les portes des fermes se fermaient et le calme de la nuit enveloppait le village. À l’intérieur de la maison, Bénédict, assis dans son fauteuil, devant une grande cheminée, suivait du regard les flammes qui dansaient. Il chantait des chansons et des airs de Noëls populaires que ses ancêtres, avant lui, chantaient autrefois dans leurs vergers de Normandie. La gentille Évangéline, assise près de son père, préparait du lin pour le métier à tisser que l’on voyait derrière elle. Tout à coup on entendit des pas, et dans la même seconde, la porte s’ouvrit. Au bruit des souliers, Bénédict le fermier avait reconnu son ami Basile le Forgeron ; Évangéline, le cœur battant, savait qu’il n’était pas seul. Le fermier se leva et leur dit : – Soyez les bienvenus ! Viens, Basile, mon ami ! Viens t’asseoir près de la cheminée, où ton absence fait toujours un vide ; prends ta pipe et le pot de tabac. Tu n’es vraiment jamais aussi heureux que lorsque de la fumée sort de ta pipe. Basile prit alors sa place habituelle au coin du feu, puis il répondit : 10. Craintif : qui a tendance à avoir peur. 11. Hurler : pousser de longs cris.

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– Tu as toujours le mot pour rire, Bénédict, et tu es toujours de bonne humeur, même quand les autres ont de mauvais pressentiments12, et ne voient partout que des désastres et des malheurs. Le forgeron prit alors sa pipe qu’Évangéline lui présentait, après l’avoir allumée, il continua d’une voix lente et attristée : – Voici quatre jours que des navires13 anglais sont à l’ancre14 dans la baie du Gaspereau, leurs canons sont pointés sur le village. On ignore ce qu’ils viennent faire ici. Ce qu’il y a de certain, c’est que nous avons tous reçu l’ordre de nous trouver demain dans l’église. L’ordonnance de Sa Majesté le roi d’Angleterre sera proclamée comme loi du pays. En attendant, tous les gens du village sont très inquiets. Le fermier répondit : Ne nous désolons pas avant qu’il en soit temps. Peut-être que les Anglais ont des intentions amicales. Les récoltes ont peut-être été mauvaises dans leur pays, ils viennent peut-être chercher de quoi nourrir leur famille et leurs troupeaux. – Ce n’est pas ce que pensent tous les gens du pays, répondit le forgeron en secouant la tête d’un air de doute ; puis, après un profond soupir, il reprit tristement : on n’a pas oublié Louisbourg15 ni Beau-Séjour, ni Port-Royal. Beaucoup de nos voisins se cachent dans la forêt, où ils 12. Pressentiment : intuition d’un événement à venir, prémonition. 13. Navire : bateau. 14. Ancre : objet lourd au bout d’une corde ou chaine, qu’on laisse tomber au fond de l’eau pour empêcher un bateau de bouger. 15. Louisbourg, situé dans l’île du Cap-Breton, a été pris par les Anglais en 1743. – Le fort de Beau-Séjour a été bombardé, et a capitulé en 1749, comme Port-Royal, aujourd’hui Annapolis.

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attendent de voir ce qui se passera demain, le cœur plein d’angoisses16. Que pouvons-nous faire ? On nous a enlevé nos armes et nos munitions, nous n’avons plus que nos instruments de travail. Le pacifique et trop confiant fermier répondit alors, avec un sourire sur les lèvres : – Nous sommes plus en sécurité au milieu de nos troupeaux et de nos champs de blé que ne l’étaient nos pères dans leurs forts, sous les bombes des ennemis. N’aie pas peur, mon ami ; il ne peut rien nous arriver. N’y pensons plus et soyons heureux, car c’est la soirée du contrat de mariage d’Évangéline et Gabriel. Dans un instant, le notaire René Leblanc sera ici avec ses papiers. Pensons au bonheur de nos enfants qui seront bientôt unis par les liens du mariage. Évangéline, assise à l’écart près de la fenêtre, la main dans la main de son fiancé, rougit en entendant les dernières paroles de son père. Au même moment, le notaire entrait.

16. Angoisse : grande inquiétude.

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LECTURES CLE EN FRANÇAIS FACILE

É VANGELINE Henry Wadswor th Long fellow Cette adaptation d’un poème de Henry Wadsworth Longefellow raconte l’histoire d’Évangeline et de son fiancé Gabriel, deux Acadiens séparés lors de la Grande Déportation par les Britanniques au XVIIIe siècle. Évangéline passe des années à chercher Gabriel à travers les colonies américaines. Se retrouveront-ils finalement ? Cette histoire explore les thèmes de l’exil, de l’amour et de la perte d’un être cher.

MOTS

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700 À 1200

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GRANDS ADOS ET ADULTES Audio disponible sur https://lectures-cle-francais-facile.cle-international.com

ISBN 978-209-035939-8

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