Extrait Ils étaient dix - Niveau 2/A2 - Lecture CLE en français facile

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LECTURES CLE

EN FRANÇAIS FACILE

Ils étaient dix

Agatha Christie

LECTURES

Ils étaient dix

AgAthA Christie

Adapté en français facile

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Crédits photographiques :

Couverture : © Lotharingia Adobestock ; page 3 : Bettman / Contributeur © Getty

Direction éditoriale : Béatrice Rego

Marketing : Thierry Lucas

Édition : Marie-Charlotte Serio

Couverture : Fernando San Martin

Mise en page : Isabelle Vacher

Illustrations : Conrado Giusti

Enregistrement : Blynd

© Cle International 2025 92 Avenue de France 75013 Paris contact@cle-inter.com

Dépôt légal : août 2025

Code éditeur : 375484

ISBN : 978-209-039872-4

L’auteur

AgAthA Christie est née en 1890 en Angleterre. Elle grandit dans une famille aisée et est scolarisée chez elle1. Enfant, elle lit beaucoup, apprend la musique et le français. Son père meurt quand elle a onze ans. Adulte, elle rêve de devenir chanteuse d’opéra, mais elle est trop timide pour chanter devant un public. Sa mère et sa sœur l’encouragent alors à écrire des histoires. En 1914, elle épouse un militaire, Archibald Christie, puis est infirmière pendant la Première Guerre mondiale. En 1916, elle écrit la première enquête* d’Hercule Poirot, La mystérieuse affaire de Styles, publiée en 1920. Son unique fille, Rosalind, naît en 1919. En 1926, elle passe douze jours dans un hôtel sous un faux nom alors que la police la recherche. On expliquera sa disparition par une amnésie2, causée par la mort de sa mère et des problèmes avec son mari. Après son divorce, elle épouse en 1930 un archéologue, Sir Max Mallowan. C’est l’année de la parution de L’Affaire Protheroe, premier des douze romans de son personnage Miss Marple. Ses voyages au Proche-Orient lui inspirent notamment Le Crime de l’Orient-Express (1934), Mort sur le Nil (1937) et Rendez-vous à Bagdad (1951). À partir des années 1950, la « reine du crime » écrit un livre par an, d’où la publicité de son éditeur : « A Christie for Christmas3 ». En 1971, elle est anoblie4 par la reine Elizabeth II. L’auteure la plus lue dans le monde meurt en 1926 après avoir écrit 66 romans, 154 nouvelles et 20 pièces de théâtre.

1. Elle fait l’école à la maison.

2. Une perte de mémoire.

3. Un Christie pour Noël.

4. Recevoir un titre d’honneur de la part de la reine.

L’œuvre

Ils étaient dix est le plus grand succès d’Agatha Christie. C’est aussi le roman policier le plus vendu dans le monde (plus de 100 millions d’exemplaires depuis sa parution en 1939). Son titre original5, Dix petits nègres, reprend le nom d’une chanson anglaise pour enfants écrite en 1869. Agatha Christie utilise les paroles de cette chanson pour imaginer les meurtres des personnages de son histoire. Ils étaient dix est traduit dans une cinquantaine de langues. De très nombreuses adaptations de ce roman existent au théâtre, au cinéma et à la télévision.

Les mots ou expressions suivis d'un astérisque* dans le texte sont expliqués dans le Vocabulaire, page 57.

5. L’arrière-petit-fils d’Agatha Christie a décidé d’enlever le mot « nègre » (mot ancien utilisé pour désigner des personnes de couleur et associé à l’esclavage) pour ne pas blesser des personnes.

Les invités de M. O’Nyme 1

Le juge* Wargrave regarde les paysages à travers la fenêtre du train. Il est à la retraite et voyage en première classe. Il relit la lettre de lady

Constance Culmington : « Très cher Lawrence… venir sur l’île du Soldat… bon vieux temps… des choses à nous raconter… ». Leur dernière rencontre date de sept ans et elle l’invite sur l’île du Soldat : cette femme est mystérieuse et son écriture est difficile à lire ! On raconte beaucoup de choses sur l’île du Soldat. Elle appartenait à un milliardaire américain et, aujourd’hui, son propriétaire est Monsieur O’Nyme, ou bien la star hollywoodienne Gabrielle Turl, ou bien l’armée … Cette île aussi est mystérieuse !

Dans le même train, mais en troisième classe, Vera Claythorne a trop chaud. Elle est heureuse car elle a trouvé un travail pour l’été. Elle sera secrétaire sur l’île du Soldat. Cela la reposera de son année de professeur de gymnastique. La mer lui fera du bien. Mais elle lui rappellera aussi la plage, Hugo qui lui dit « je t’aime » et Cyril qui nage vers le rocher… Ce n’était pas sa faute, elle a essayé de le sauver. Tout le monde le sait sauf Hugo. Mais elle ne doit pas penser à Hugo. Elle regarde l’homme assis en face d’elle. Il a les yeux clairs et ressemble à un aventurier. Mais il a aussi un air dur.

Le capitaine Philip Lombard trouve Vera séduisante mais un peu stricte. Il doit se concentrer sur son travail. Un certain Isaac Morris l’a embauché pour passer une semaine sur l’île du Soldat. Il ne sait pas encore pour quoi

faire. Les activités de Lombard ne suivent pas toujours la loi mais il va bien s’amuser sur cette île.

Mlle Emily Brent est installée dans un compartiment non-fumeur de troisième classe. Il fait très chaud et il y a du monde. Elle supporte sans rien dire, comme d’habitude. Depuis soixante-cinq ans, elle se tient toujours très bien. Cela vient de l’éducation de son père militaire.

Aujourd’hui, les gens font tout le temps des histoires et les jeunes filles se promènent à moitié nues sur les plages. Ses vacances de l’année dernière étaient horribles. Mais heureusement ce sera différent cette année. Elle repense à la lettre d’invitation : « Chère mademoiselle Brent. Nous nous sommes rencontrées il y a quelques années à la pension Belhaven. J’ai ouvert une pension de famille sur l’île du Soldat. Mes clients sont tous respectables. Je vous invite à passer vos vacances d’été, par exemple à partir du 8 août. » Malheureusement, la signature était très difficile à lire. Alvina Nancy O’N… peut-être O’Neary ou O’Norry ou … ah oui, elle a connu une Madame O’Neal. Elle ne sait rien de cette île, mais cela lui fera des vacances gratuites. Le train du général Macarthur arrive dans la gare d’Exeter. Il doit attendre une heure avant de prendre un autre train. Le voyage est très long. Qui est ce O’Nyme qui l’a invité sur l’île du Soldat ? Il n’a pas bien compris sa lettre : « Certains de vos anciens amis seront là… nous parlerons du bon vieux temps. ». Cela lui fait plaisir car ses amis ne l’invitent plus à cause d’une histoire vieille de trente ans. C’est la faute d’Armitage sans doute. Quel idiot ! Le général ne doit plus y penser. Il est content de découvrir cette île car on parle beaucoup d’elle.

Le docteur Armstrong traverse la campagne au volant de sa voiture. C’est un médecin célèbre. Il est très fatigué car

ses journées de travail sont très longues dans son cabinet de Harley Street. Il est heureux de quitter Londres pour aller sur une île quelques jours. Mais ce ne sont pas des vacances. Il a reçu une lettre d’un certain O’Nyme avec un gros chèque. Sa femme a des problèmes avec ses nerfs. Armstrong connaît bien ce problème : ces femmes ne sont pas malades mais elles s’ennuient. Bien sûr, il ne leur dit pas comme cela. Elles lui font de nouveau confiance dix ans après cette affreuse histoire. Depuis, il ne boit plus du tout. Soudain, un coup de klaxon retentit et une voiture de sport le dépasse à cent trente à l’heure. Quel idiot !

Marston n’aime pas les voitures qui bloquent le passage. Conduire en Angleterre est énervant. En France, on peut lâcher les gaz6 ! Il entre à toute vitesse dans un village et s’arrête brusquement. Il ne lui reste plus que centcinquante kilomètres et il fait très chaud : il a le temps de boire un verre. Il ne connaît pas les O’Nyme. Son copain Badger les connaît, ils doivent donc être très riches. Il y aura des fêtes. Plusieurs jeunes femmes regardent ce bel homme d’un mètre quatre-vingts aux yeux bleus et au visage bronzé. Quand il démarre à toute vitesse, des enfants regardent la voiture avec envie.

M. Blore voyage dans un train en provenance de Plymouth. Dans son compartiment, un vieux marin dort. Blore relit une liste de noms dans son carnet : « Emily Brent, Vera Claythorne, le Dr Armstrong, Anthony Marston, le vieux juge Wargrave, Philip Lombard, le général Macarthur, ainsi que M. et Mme Rogers, le majordome7 et sa femme. » Il se lève et s’observe dans la glace. Sa moustache lui donne un air militaire et son visage va avec ses yeux gris. 6. Rouler très vite.

7. Le chef des domestiques.

Il va dire qu’il est un riche propriétaire d’Afrique du Sud. Ce sera parfait. Blore est orignaire de l’île du Soldat, il y habitait quand il était enfant. C’est un rocher ordinaire. Son nom vient de sa forme de tête d’homme avec un casque.

Pourquoi y construire une maison ? Les milliardaires ont toujours de drôles d’idées ! Le vieux marin se réveille et annonce la pluie. Le temps est pourtant superbe. Le train s’arrête. Le marin veut descendre, rate une marche et tombe sur le quai.

– Le jour du jugement8 est proche, dit le marin. C’est à vous que je parle, jeune homme.

Ce jour est plus proche pour ce vieux type que pour lui, se dit Blore. Mais il se trompe…

À la gare d’Oakbridge, deux taxis attendent les voyageurs.

– Vous allez à l’île du Soldat ? crie l’un des chauffeurs.

– Oui, répondent ensemble quatre voyageurs.

Le juge Wargrave, Mlle Emily Brent, Vera Claythorne et Philip Lombard se regardent étonnés.

– Il y a deux taxis, dit le chauffeur. Un monsieur arrive avec le train d’Exeter dans cinq minutes. L’un de vous veut-il bien l’attendre pour avoir plus de place dans le premier taxi ?

Vera Claythorne et le capitaine Lombard se proposent.

Mlle Brent et le juge Wargrave montent dans le premier taxi. Le juge fait une bonne impression à Mlle Brent : « Mme O’Neal a de bonnes relations, il y a des gens très bien dans sa pension de famille. »

8. Le jour où les humains seront jugés par Dieu pour leurs actes.

– Vous connaissez la région ? demande le juge à Mlle Brent.

– C’est la première fois que je viens dans cette partie du Devon.

– Moi aussi.

Le taxi démarre. Vera et la capitaine Lombard s’installent au soleil et échangent quelques mots sur la région. Vera explique être la secrétaire de Mme O’Nyme pour l’été et être fascinée par cette île dont on parle dans les journaux.

– Comment sont les O’Nyme ? demande-t-elle.

Lombard ne sait pas quoi répondre. Doit-il connaître les O’Nyme pour son travail ? Il change de sujet. Puis, un long sifflement annonce l’arrivée du train. Un vieil homme à l’allure militaire sort de la gare. Ses cheveux gris et sa barbe sont coupés avec soin. Vera s’avance vers lui :

– Je suis la secrétaire de Mme O’Nyme et voici M. Lombard.

Le général trouve que Lombard est un beau garçon mais qu’il a quelque chose d’étrange. Ils montent tous les trois dans le taxi. Celui-ci traverse les rues de Oakbridge puis roule dans la campagne.

– Je ne connais pas cette région, dit le général.

– C’est la première fois que je viens, dit Vera. Ces collines sont très jolies.

– Je préfère les espaces découverts, dit Lombard. J’aime voir ce qui se passe.

– Vous avez pas mal voyagé, j’imagine ?

– Pas mal en effet.

« Il va me demander si j’ai fait la guerre », se dit Lombard. Mais le général ne dit rien. Le taxi arrive au port de Sticklehaven. De là, on aperçoit l’île du Soldat. Vera la pensait plus proche. L’air sinistre de l’île la fait

frissonner9. Ils retrouvent le juge Wargrave et Mlle Brent. Un homme, grand et costaud, les accompagne. Ce dernier se présente :

– Je m’appelle Davis. Ma ville natale10 est Natal en Afrique du Sud, dit-il en riant.

Le juge et Mlle Brent ne le trouvent pas drôle. Un marin au visage bronzé et aux yeux noirs s’approche du petit groupe :

– Vous êtes prêts à partir pour l’île ? Deux messieurs doivent encore arriver en voiture mais M. O’Nyme a dit de ne pas les attendre.

Les invités suivent le marin et s’installent dans un canot à moteur. Chacun se pose des questions sur les autres invités. Le canot va quitter le port quand une belle voiture arrive à toute vitesse. Le conducteur est un jeune homme cheveux au vent. Anthony Marston donne un coup de klaxon puissant.

Fred Narracot, le marin, regarde les invités des O’Nyme : ils ne sont pas habillés comme des gens importants. Les hôtes du milliardaire américain faisaient plus riches. O’Nyme est un autre genre de gentleman. Fred ne l’a jamais vu. Il ne connaît que ce M. Morris (tout est toujours très clair avec lui et il le paye très rapidement). Mais c’est quand même étrange. Ou bien, l’île appartient vraiment à une star américaine ? Non, ces gens-là ne font pas du cinéma. Une vieille dame, un vieux militaire, une jeune femme jolie mais ordinaire, un grand costaud sympa mais pas un vrai gentleman … Le grand maigre aux yeux vifs peut faire du cinéma. C’est vraiment une histoire très bizarre. Le seul gentleman, c’est le conducteur de la belle 9. Trembler de froid ou de peur. 10. La ville où je suis né.

voiture. Lui, il est né avec une cuillère en argent dans la bouche11.

Le canot fait le tour de l’île et les passagers découvrent la maison : elle est magnifique. Fred arrête le moteur et le canot passe entre deux rochers.

– Ce ne doit pas être facile de venir par mauvais temps, dit Lombard.

– C’est impossible par vent de sud-est. Parfois, l’île reste coupée du monde pendant une semaine ou plus, répond Fred.

Les passagers descendent du bateau et montent un escalier taillé dans la roche et arrivent à la terrasse. Un majordome les reçoit dans une tenue impeccable. Il les conduit dans le hall où des boissons les attendent.

– M. O’Nyme arrivera demain. Nous allons vous montrer vos chambres. Le dîner est à 8 heures.

11. Né dans une famille riche.

Les accusations 2

Mme rogers montre sa chambre à Vera. Elle porte une petite robe noire et a les cheveux en arrière. Sa voix est plate et sa peau est très blanche. De quoi cette femme a-t-elle peur ? se demande Vera.

– Je suis la nouvelle secrétaire de Mme O’Nyme. Vous le savez ?

– Non. Je ne sais rien. Je connais simplement la liste des invités avec la chambre de chacun. Je n’ai jamais vu Mme O’Nyme. Rogers et moi sommes ici depuis avant-hier. Nous sommes les seuls domestiques.

Ces O’Nyme sont incroyables ! Il y a un seul couple pour s’occuper de huit personnes ! Mme Rogers quitte la chambre et Vera s’assied devant la fenêtre. La situation est vraiment bizarre et les invités aussi sont bizarres. La chambre est très belle. Vera lit la comptine12 au-dessus de la cheminée. Elle la connaît depuis son enfance.

Dix p’tits soldats s’en furent souper, L’un d’eux but à s’en étouffer – n’en resta plus que neuf.

Neuf p’tits soldats veillèrent très tard, L’un d’eux dormit plus que sa part – n’en resta plus que huit.

Huit p’tits soldats flânèrent de-ci de-là, Dans le Devon l’un s’installa – n’en resta plus que sept.

Sept p’tits soldats débitaient du petit bois, En deux moitiés l’un se coupa – n’en resta plus que six.

Six p’tits soldats s’amusaient au rucher, Par une abeille l’un fut piqué – n’en resta plus que cinq.

12. Une chanson pour les enfants.

Cinq p’tits soldats étudiaient le droit, L’un d’eux fut nommé juge, ma foi ! – n’en resta plus que quatre.

Quatre p’tits soldats prenaient un bain de mer, Poisson d’avril goba l’un, Ô ma mère ! – n’en resta plus que trois.

Trois p’tits soldats visitaient le zoo, Un ours prit l’un entre ses crocs – n’en resta plus que deux.

Deux p’tits soldats se chauffaient au soleil, L’un d’eux grilla jusqu’aux orteils – n’en resta donc plus qu’un.

Un p’tit soldat se retrouva solitaire Il alla se pendre, quelle misère ! – n’en resta plus aucun.

Vera sourit. Bien sûr, on est sur l’île du Soldat. Elle regarde la mer par la fenêtre. Elle est calme aujourd’hui, mais la mer est parfois dangereuse. Noyé13… noyé… non, elle ne veut pas y penser. Tout est fini maintenant.

Le Dr Armstrong arrive sur l’île du Soldat au moment du coucher de soleil. Il est fatigué par son voyage. La mer va lui faire du bien. Il ne peut pas prendre de vacances, sinon sa clientèle va l’oublier. Mais ce soir, il veut en profiter. Sur une île, on laisse sa vie ordinaire derrière soi. Quand il arrive sur la terrasse, il reconnaît le vieil homme assis dans un fauteuil. C’est le juge Wargrave. Armstrong l’a rencontré dans un tribunal*. Le juge a toujours un air endormi mais c’est un homme dur. Il condamne parfois sans véritables preuves*.

Le juge se souvient du médecin. Pour lui, tous les médecins sont des imbéciles et ceux de Harley Street sont les pires. Le docteur veut aller se présenter aux O’Nyme mais le juge lui explique : 13. Mourir dans l’eau.

– C’est impossible. Ils ne sont pas là. La situation est très étrange. Je ne comprends rien à cet endroit. Vous connaissez Constance Culmington ?

– Je ne pense pas.

– Tant pis. Cette femme a une écriture très difficile à lire. Je suis peut-être à la mauvaise adresse.

Le juge pense aux trois femmes présentes sur l’île. Il n’aime pas la plus jeune, elle doit être sans scrupule14. Mme Rogers, elle, est morte de peur. Il voit Rogers sortir sur la terrasse et il lui demande :

– Lady Constance Culmington doit-elle venir sur l’île ?

– Non, je ne pense pas. ***

Anthony Marston est dans son bain. Cela lui fait du bien après ce long voyage en voiture. Il ne pense à rien. C’est plutôt un homme d’action : un bain, un cocktail, un dîner… et après ? ***

M. Blore vérifie ses habits. Parfait ! Les invités n’ont pas été très aimables avec lui. Chacun se méfie des autres. Mais il doit bien faire son travail. Il remarque la comptine au-dessus de la cheminée. C’est étonnant de revenir ici après toutes ces années.

***

Le général Macarthur est inquiet. La situation est très étrange. Malheureusement, le bateau est déjà reparti 14. Ne pas tenir compte de la morale.

et il ne peut pas quitter cette île. Il est sûr d’une chose : Lombard est un drôle de type. ***

Philipe Lombard sort de sa chambre quand on appelle pour le dîner. Il se dirige vers l’escalier sans bruit et en souplesse, comme une panthère. Il ressemble en effet à cet animal agréable à regarder. Il sourit : il va bien profiter de cette semaine.

Emily Brent lit la bible dans sa chambre : « Les païens15 tombent dans le trou qu’ils ont creusé… ». Elle pince ses lèvres, referme la bible, se lève, accroche une broche sur sa tenue et descend dans la salle à manger.

***

À la fin du dîner, les invités se sentent de meilleure humeur. La nourriture est bonne, le vin est parfait et Rogers fait bien le service. Ils parlent entre eux avec beaucoup de facilité. Le juge amuse le Dr Armstrong et Tony Marston, Mlle Brent et le général Macarthur découvrent des amis communs, M. Davis répond aux questions de Vera sur l’Afrique du Sud. Lombard observe les invités les uns après les autres.

– Ces figurines de porcelaine au centre de la table sont originales, dit Marston. Ce sont les soldats de l’île aux Soldats, c’est ça ?

– Ce sont les dix soldats de la comptine, dit Vera. Elle est accrochée dans ma chambre.

15. Une personne qui n’a pas de religion.

La comptine est accrochée dans toutes les chambres.

– Quelle drôle d’idée, dit le juge.

Emily Brent et Vera se lèvent et s’installent dans le salon. Le bruit des vagues entre par les portes-fenêtres.

Emily aime ce bruit mais Vera le déteste.

– Mme O’Neal a eu de la chance de trouver les Rogers. La femme cuisine bien.

– Oui, les O’Nyme ont beaucoup de chance.

– Les O’Nyme ? C’est la première fois que j’entends ce nom…

Les hommes les rejoignent. Le juge s’assied près d’Emily Brent. Armstrong s’approche de Vera. Marston va vers la fenêtre ouverte. Blore examine une sculpture en bronze. Macarthur pense à l’excellent dîner et se sent de bonne humeur. Lombard lit un journal. Rogers vient leur servir un café très noir et bien chaud. Ils sont tous heureux de leur vie. Soudain, à 9h20, une voix s’élève dans la pièce :

– Silence, s’il vous plaît.

Qui parle ? Les invités regardent autour d’eux sans comprendre.

– Je vous accuse des crimes* suivants : Edward George Armstrong de la mort de Louisa Mary Cless le 14 mars 1925 ; Emily Caroline Brent, de la mort de Beatrice Taylor, le 5 novembre 1931 ; William Henry Blore, de la mort de James Stephen Landor, le 10 octobre 1928 ; Vera Elizabeth Claythorne, de la mort de Cyril Ogilvie Hamilton, le 11 août 1935 ; Philipe Lombard, de la mort de vingt et une personnes d’une tribu d’Afrique orientale, en février 1932 ; John Gordon Macarthur, de la mort d’Arthur Richmond, l’amant de votre femme, le 14 janvier 1917 ; Anthony James Marston, de la mort de John et Lucy Combes, le 14 novembre de cette année ; Thomas et Ethel Rogers, de

la mort de Jennifer Brady, le 6 mai 1929 ; Lawrence John Wargrave, de la mort de Edward Seton, le 10 juin 1930. Avez-vous quelque chose à dire pour votre défense* ?

Un bruit violent retentit : c’est Rogers qui vient de laisser tomber le plateau du café. Puis ils entendent un cri à l’extérieur de la pièce. Lombard se précipite et trouve Mme Rogers au sol. Marston vient l’aider et ils l’allongent sur le divan du salon.

– Ce n’est rien, dit le Dr. Armstrong. Elle va vite se sentir mieux.

– Allez chercher du cognac, dit Lombard à Rogers. Rogers sort, pâle et les mains tremblantes.

– Qui parlait ? s’écrit Vera. Où était-il ?

– C’est une mauvaise plaisanterie, dit Macarthur. Blore s’essuie le visage avec un mouchoir. Seuls Wargrave et Mlle Brent gardent leur calme. Le juge se gratte l’oreille et ses yeux font le tour du salon. Lombard cherche d’où peut venir la voix. Il ouvre une porte à côté de la cheminée :

– Cela vient d’ici.

Les autres (sauf Mlle Brent) se précipitent derrière lui. Un vieux gramophone16 est installé sur une table contre le mur. Lombard montre du doigt de petits trous dans le mur. Il pose l’aiguille sur le disque :

– Vous êtes accusés de…

– Arrêtez ça, crie Vera, c’est horrible.

– C’est une blague cruelle, dit le Dr Armstrong.

Le juge n’a pas encore d’opinion. Marston se demande qui a mis l’appareil en route. Ils retournent tous dans le salon. Rogers les rejoint avec un verre de cognac. 16. Un appareil pour écouter des disques.

Il se penche vers sa femme :

– Éthel, tu m’entends, tout va bien, reprends-toi.

– C’est fini, madame, dit le docteur. C’était un simple malaise.

– Je me suis évanouie ? C’est cette voix horrible…

Mme Rogers se sent de nouveau mal. Le docteur lui donne à boire le verre de cognac.

– Moi aussi, cela m’a choqué, dit Rogers. Ce ne sont que des mensonges et je …

Il s’arrête car le juge Wargrave lui demande :

– C’est vous qui avez posé le disque sur le gramophone ?

– J’ai obéi aux ordres de M. O’Nyme. Je devais poser le disque et ma femme devait le mettre en marche au moment où j’entrais avec le plateau de café.

– Voilà une histoire bien extraordinaire, dit le juge.

– Je jure que c’est la vérité. Pour moi, c’était un disque de musique.

– C’est vrai, intervient Lombard. Il y a écrit « Le Chant du Cygne » sur le disque.

Rogers et le Dr Armstrong accompagnent Mme Rogers dans sa chambre. Le docteur lui donne un médicament pour dormir. Ils retrouvent ensuite les invités au salon qui boivent un verre. Le juge interroge Rogers sur M. O’Nyme. Le majordome n’a jamais vu son patron. Sa femme et lui ont trouvé ce travail grâce à l’agence Regina de Plymouth. Tout était prêt à leur arrivée dans la maison et les courses étaient faites. Ils ont simplement préparé les chambres. Ils ont reçu hier une lettre de M. O’Nyme. Il annonçait son retard et leur expliquait le gramophone. Le juge et Blore lisent la lettre. Marston remarque le prénom compliqué : « Algernon Norman ».

Le juge propose à chaque invité d’expliquer sa présence

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ILS ÉTAIENT DIX

Dix personnes invitées sur une île sont tuées une à une semblant suivre les couplets d’une comptine. L’assassin se cache parmi eux, et la tension monte à mesure que les victimes se succèdent.

Audio disponible sur lectures-cle-francais-facile.cle-international.com

Code éditeur : 375484

ISBN : 978-209-039872-4

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