paperJam economie & finances janvier 2010

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La nouvelle étable répond aux dernières normes en matière de bien-être animal et peut accueillir plus d’un millier d’animaux. Marianne Pesch y a investi un million d’euros.

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{ mari et moi avons donc décidé de construire une

nouvelle étable, à l’écart du village, dans lequel tout l’élevage porcin pouvait être regroupé. Alors que nous avions toutes les autorisations nécessaires à la construction, nous avons rencontré beaucoup de difficultés, en raison d’une forte opposition de la part des habitants du village et de la commune de Roeser (voir cahier «Economie & Finance», décembre 2009, p. 34). D’ailleurs, un appel est toujours en cours au tribunal, alors que l’étable a été inaugurée au printemps. Ce fut un projet très éprouvant pour moi, car mon mari est tombé malade puis est décédé en février 2008. Mais j’ai tenu à poursuivre ce projet imaginé ensemble et j’en suis très fière. J’ai d’ailleurs organisé une journée ‘portes ouvertes’ dans l’étable, en mai, qui a connu un grand succès. Il est important de lutter contre la mauvaise image qu’a l’élevage porcin auprès du grand public. Est-il de plus en plus difficile de maintenir en vie une agriculture villageoise? «Il est clair que les agriculteurs sont devenus minoritaires dans les villages. Dans certaines localités, il n’y en a même plus du tout. Autrefois, le fermier était installé sur la place du village. Puis, des habitations

se sont créées tout autour et leurs occupants se plaignent que les fermes ‘puent’ et veulent repousser les exploitations en dehors des zones habitées. Nous avons aussi des soucis avec le ministère de l’Environnement. En zone rurale, il existe des règlements, mais chacun peut en avoir sa lecture. L’un va dire ‘oui’, l’autre ‘non’. La délivrance des autorisations, même en ‘zone verte’, est très aléatoire. L’un des mes collègues s’est vu refuser la construction d’une étable car elle gâchait la ligne d’horizon! Ce qui nous inquiète beaucoup, c’est le développement des zones de renaturation. Nous craignons qu’il y ait bientôt plus de zones protégées que de zones agricoles! Nous espérons aussi que les autorités se rendent compte que l’agriculture est une activité économique qui doit rester viable, alors qu’elle dépend largement, et de plus en plus, des subventions. Mais tant que la majorité des gens voudront payer le moins possible pour la nourriture, nous ne pourrons pas nous en sortir. Quels sont les principaux défis auxquels vous êtes confrontée, en tant que chef d’exploitation? «L’approche business est la même que celle de tout entrepreneur. La vue sur l’exploitation

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également. Ce que l’on veut vendre, on doit le vendre le mieux possible. Il faut maîtriser les coûts et parvenir à valoriser sa production. Et là, en tant qu’agricultrice luxembourgeoise, j’ai bien sûr des problèmes spécifiques. Lesquels en particulier? «J’aimerais pouvoir développer beaucoup plus la vente directe à la ferme. Pour l’instant, cela ne représente qu’une part minimale de mon chiffre d’affaires, de l’ordre de 5%. Nous disposons d’une petite salle d’abattage et de découpe, que j’aimerais pouvoir agrandir. Mais nous sommes limités dans ce type de développement. Nous ne sommes autorisés qu’à vendre des pièces de viande entières, des jambons entiers, non découpés… Il nous est également interdit de vendre de la viande à des personnes qui passent la frontière. Donc toute la clientèle frontalière nous échappe! Je ne peux pas non plus commercialiser mes propres charcuteries, mon pâté. Alors que dans d’autres pays européens, cela est possible. Ces réglementations différentes d’un pays à l’autre m’exaspèrent. Les éleveurs luxembourgeois sont limités dans leurs possibilités de valoriser les produits de la ferme. C’est dommage, car ce sont


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