PEOPLE STORY
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allier le nouveau perchoir d’Allan Dickens tient déjà de la magie. Nichée aux confins du Beaujolais et de la Saône-et-Loire, la base arrière du Lyonnais est quasi-inexpugnable. Pour bosser heureux, bossons cachés ! Dans l’ancienne usine textile qu’il a réhabilitée, Allan respire. Sur 1 100m2 et trois niveaux, il a pris ses quartiers avec son équipe. Piscine intérieure, jacuzzi, billard gigantesque, le site tient autant du bureau que de la salle de jeux. Sur l’immense table de salle à manger qui fait office d’open-space, Stéphane et Carole, ses deux commerciaux, s’activent. Aux fourneaux, Benjamin prépare la tambouille pour ce Big Bazar revisité, sous l’œil de la mascotte Khéops, un adorable dogue allemand de 85 kilos. L’artiste-peintre lyonnais Marc Curial, en charge des décors du nouveau spectacle, contemple bienveillamment les agitations du microcosme. Ils sont en tout une quarantaine à accompagner depuis 2011 l’ambitieux projet d’Allan Dickens. Un retour sur scène en décembre avec « Magnifica », au Double-Mixte de Villeurbanne, qui promet d’être tonitruant.
« Je ne veux pas me réveiller à 70 ans avec des regrets », angoisse-t-il. Attachante tête brûlée, Allan est prêt à laisser le satin de sa chemise sur ce show. Il le produit entièrement. L’investissement est colossal : 700 000 euros. Un challenge économique à la mesure de son ambition artistique.
L’enfance de l’art
Indubitablement, les fées se sont penchées sur le berceau d’Allan Dickens. Un papa magicien, une maman danseuse, des grands-parents officiant dans le music-hall, le jeune Alain Sapey-Triomphe commence la magie à l’âge de 6 ans. C’est devant ses petits camarades de classe que cet enfant de la balle fait ses premiers tours. Son coffre à jouet : la boutique de magie Séraphin rue d’Algérie à Lyon, tenue par son père. De quoi faire baver tous les gamins de son âge. C’est alors que celui qui n’est pas encore Dickens rejoue sa version d’Oliver Twist. Il quitte l’école en 3ème. Alain se cherche, multiplie les petits boulots. Une première vie de labeur, sans magie et dans l’indifférence générale, qui
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lui enseigne l’opiniâtreté. C’est à 27 ans qu’il décide de revenir à ses premières amours. Tous les matins, il arpente les rues dès 6h. Il passe discrètement derrière les facteurs pour aller arroser les boîtes aux lettres de l’ouest lyonnais de ses flyers jaunâtres bon marché. Les débuts sont âpres. Il fait le magicien dans les anniversaires de la jeunesse dorée des Monts d’Or. L’argent, qui rentre modestement, est immédiatement réinvesti dans du matériel. « Cela rendait folle ma mère », s’amuse-t-il aujourd’hui. Mais les fées ne l’ont pas abandonné. De son propre aveu, il doit tout au magicien lyonnais Jean Régil. « Mon parrain, mon maître, le plus grand magicien de France. » C’est grâce à ce dernier qu’il devient Allan Dickens. « C’est Jean qui m’a conseillé de prendre ce pseudo. J’ai américanisé mon prénom. Pour le nom, David Copperfield avait choisi le héros du roman, nous avons pris l’auteur. » Gonflé l’apprenti ! Mais à l’image du personnage, pugnace et attachant dans sa démesure. La seconde fée s’appelle Claire Mourin. En 1999, elle est présidente du salon des comités d’entreprises. Allan obtient Z
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1 - Allan Dickens voit grand. Pour son spectacle comme pour son chien Kheops, un colosse de 85 kilos. 2 - Un investissement de 700 000 euros dans son nouveau spectacle mais pas question de boire le bouillon.
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OCTOBRE 2012