EN COUVERTURE plus élégant et le plus riche», nous dit dans son journal, Tuotiop en 1911. Il ne s’était pas trompé et quiconque s’intéresse à l’architecture y trouvera beaucoup de choses à glaner et moult observations à formuler. Il constatera les séductions et les déceptions causées par les réalisations des plans et façades de nos architectes, durant près d’un siècle. Ces villas élégantes et somptueuses feront non seulement l’objet d’attention toute particulière dans la sensation d’art qu’elle offre au passant, mais également dans l’arrangement de leur plan, l’utilisation de matériaux inventés et surtout «l’enchantement de la fée Electricité» qui alimente parfois, en leur intérieur, les premiers ascenseurs Edoux.
Photo © Yves Neyrolles
Ils ont été nombreux à participer à ces projets privés, et parmi eux, se trouve l’élite de l’époque, née au cours du 19ème
Mélange de styles UNE ARCHITECTURE FLAMBOYANTE La disparition des fortifications va libérer de nombreux terrains, rive gauche. L’Etat abandonne 60 hectares de forts auxquels s’ajoutent 108 hectares de terrains déclassés. Loin d’être gratuits, les travaux de démolition, de remblaiement, d’assainissement, de voirie et de plantations coûtent cher. Aussi, la ville en charge de ces travaux, se met à vendre…
C
inq hectares libérés le long du parc seront achetés par la «Société des Villas» et gérés par traité en juillet 1895 en ces termes : «Les constructions devront être des Hôtels d’agrément ou maisons bourgeoises d’une hauteur maximale de deux étages, les activités commerciales interdites, le tout à jamais». La contrepartie fut que chacun des nouveaux propriétaires eut son propre accès au parc. Le 28
JUIN 2010
tout fut loti en 23 parcelles régulières, mais inégales, les plus étroites se situant près de l’entrée de la rue Duquesne. Sur une largeur de 25 mètres, la partie de voie dite boulevard d’Enceinte, puis boulevard du Nord facile à réaliser en raison de la place disponible en bordure des fortifications, se concrétise en 15 ans. Une fièvre de construction va s’emparer de ce quartier qui «sans nul doute, pendant un temps plus ou moins long demeurera le Pour partager cette page, allez sur www.hy.pr/628
siècle : Bouilhères, Adolphe Coquet, Charles Meysson, Pras, Louis Rogniat, Thoubillon, Nicolas Vernon, Sainte-Marie Perrin, architecte-adjoint de Pierre-Marie Bossan (1814 – 1888) à la basilique de Fourvière, dresse les plans de deux hôtels particuliers, mais le record semble être détenu par Etienne Curny (1861-1945) qui réalise plus de 30 immeubles de rapport dans le quartier des Brotteaux et 7 villas en bordure du Parc de la Tête d’or. A l’occasion du concours de façades, ouvert entre tous les immeubles construits sur le territoire de la Ville, en 1909 et 1910, est terminé, le jury va en classer deux du boulevard du Nord. Au 19, celui de M. Paufique, 5ème prix et 2 000 frs et médaille d’argent à son architecte Curny et au 52, l’immeuble de M. Larrousse, réalisé par l’architecte M. Thoubillon, sur l’autre face du boulevard. Car ce boulevard a deux côtés bien différents que la numérotation précise. Côté nord et numéro impair, vers le parc, les villas, les « hôtels particuliers », de l’autre, côté sud et numéro pair, les immeubles de rapport, dont nous aurons l’occasion un jour prochain de vous parler. Reconnaissons, sans tarder, que chacun, architecte ou propriétaire, a essayé d’imprimer à l’édifice, une coquetterie, une signature ou un cachet artistique singulier voire ostentatoire, dont les modifications contemporaines sont parfois contestables. Mais cet endroit magique, sa position si avantageuse, autorisent les résidents et les badauds à les apprécier tous à leur manière. Toutes les formes d’architecture, tous les styles sont exprimés par une abondance de détails ou de matériaux. De l’exhaussement à l’extension hasardeuse, des pavillons «dans leur jus» aux immeubles en béton, armés de leur décoration plaquée, chacun réclame un exercice «de style» pour les identifier ! Nous vous laissons la satisfaction et le plaisir de démêler de vousmême les influences diverses qui ont dans le passé déterminé les modes, qu’on appelle des styles lorsqu’ils se sont définitivement installés en masse. Il est souvent difficile de déterminer exactement ce que représentent le néoclassicisme, le néo-gothique, le néo-renaissance, l’historicisme ou l’éclectisme ! Bonne balade le long de ce boulevard mythique et dans ces quelques pages que nous vous offrons. O Pierre Jourdan - Architecte DPLG