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SPECIAL SIRAH
FRÉDÉRIC GRENOUILLER La Potinière championne de l’organisation
Son père en avait fait une institution. En y ajoutant une touche de gastronomie, Frédéric Grenouiller entretient la flatteuse réputation de la Potinière. Le traiteur, minutieux dans ses plats comme avec la logistique, mise sur l’originalité, quitte à laisser la tunique de chef à ses clients. Texte : Morgan Couturier - Photo : Fabrice Schiff
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es détails font souvent la différence. Dans les innombrables allées de sa production, Frédéric Grenouiller en a fait son leitmotiv, jusqu’à l’imprégner dans la pensée de ses cinquante employés. Cette doctrine, le traiteur l’a héritée de son père dont les pâtisseries avaient déjà mené la Potinière sur des chemins prospères. Le jeune commis qu’est Frédéric a beau rouler les truffes dès l’âge de 13 ans, cette spécificité de la cuisine n’est pas sa panacée. Il penche plutôt vers la gastronomie, laquelle lui permet de s’extirper de l’ombre paternelle. Son rayonnement passe par la Ville Lumière et les salles de classe de l’école culinaire Ferrandi. S’ensuit une plongée au sein des grandes maisons parisiennes que sont Potel et Chabot ou Marquetti, avant un périple d’une décennie à l’étranger. Le chef cuisinier y développe son obsession pour le détail, en témoigne sa logistique de pointe, tout droit tirée du savoir-faire américain. Aguerri, il choisit de revenir sur ses terres natales, motivé par l’idée de lyon people • janvier 2017 • 32 •
poursuivre l’épopée de la Potinière. Fils unique, Frédéric Grenouiller renoue avec l’affaire familiale. Il y ajoute la partie traiteur, tout en conservant la pâtisserie, emblème de la société.
LA POTINIÈRE VIT DANS LE DÉFI PERMANENT « Le traiteur, c’est le goût de l’aventure, avance-t-il. La créativité est différente. Nous, on est spécialisé dans le How-Know (savoir-comment). Cuisiner un canard, tout le monde sait le faire. C’est plus compliqué en grand nombre. Chaque événement à son comment ». D’où cette importance quasi-vitale que le chef cuisinier apporte à l’organisation. Sa société est amenée à réagir en temps réel, y compris quand d’importantes sociétés telles que l’hôtel le M à Paris ou Coca-Cola ne lui accordent qu’une poignée d’heures pour tout organiser.
D’autant que son directeur fait de l’originalité, son plat signature. « Chaque manifestation est dessinée, élaborée. Elle est vivante. Les gens ne veulent plus simplement manger un canapé. Moi, j’écris une histoire », enchérit-il. À griffonner l’organisation de sa prochaine soirée sur un papier, le chef cuisinier se plaît à revêtir la tunique de chef d’orchestre. « J’écris la partition et mes employés la jouent », déclare-t-il. Son public, ses clients, n’en sont pas pour autant réduits à apprécier le spectacle. Ces derniers ont carte blanche et restent maîtres de leurs désirs. « La clientèle, aujourd’hui, ne demande plus ce qu’on fait. On est obligé d’être à l’écoute. Les goûts et les couleurs, on ne peut pas les discuter. Il faut s’adapter. Nous élaborons une proposition de plats et une dégustation avec le client. Mais dans 90% des cas, c’est lui qui va créer son assiette. À la fin, il part avec ses menus ». Cette créativité, Frédéric Grenouiller y accorde la plus grande importance. Aussi bien dans ses plats que dans ses réceptions. L’organisation reste sans cesse le nerf de la guerre. Une nécessité lorsqu’on se revendique « institution lyonnaise ». « On n’est plus dans la grande bouffe. Les clients veulent de l’interaction, du participatif. Il faut sans cesse chercher des idées », assure-t-il. Ce penchant pour l’innovation trouve forcément un écho auprès de la clientèle, essentiellement composée d’entreprises. Dont quelques fidèles de la première heure (Enedis, Véolia ou le Crédit Lyonnais). La loyauté a foncièrement du bon. Frédéric Grenouiller peut s’en féliciter, du haut de ses 4000 livraisons annuelles. Comme quoi, le succès ne doit rien au hasard. À 56 ans, ce n’est pas à Frédéric Grenouiller qu’on l’apprendra.