Un pied Ă Los Angeles, le cĆur Ă Beyrouth, la tĂȘte dans les nuages et lâautre pied sur terre : Meedo Taha est un vagabond organisĂ©. Un jour de novembre, installĂ© au fond dâune piscine vide cachĂ©e dans la capitale libanaise, il commence Ă rĂ©diger lâhistoire quâil porte en lui: A Road to Damascus, qui parait en juin 2016 aux Ă©ditions Tamyras. Le lecteur mĂ©dusĂ© y dĂ©couvre une fusillade qui dĂ©cime un bus beyrouthin en route pour Damas, un botaniste chargĂ© dâĂ©lucider le drame, les relations toxiques qui sclĂ©rosent une famille, une obsession pour un plant dâacacia qui semble pouvoir conduire tout droit Ă lâassassin et un chapitre Ă©crit du point de vue dâun arbre. « Je dĂ©teste Ă©crire dans des cafĂ©s. Je pense que les meilleurs endroits pour Ă©crire sont des endroits qui permettent Ă lâesprit dâerrer, et je sentais mon esprit errer plus facilement dans un endroit neutre, vide, fait de cĂ©ramique, de lignes droites. Peut-ĂȘtre que jâai Ă©crit dans une piscine vide parce que câest lâexact opposĂ© de Beyrouth », sâamuse-t-il. Il entretient avec la ville une relation dâamant aimantĂ© et fascinĂ© : « On peut arracher le garçon de Beyrouth, mais on ne peut pas extraire Beyrouth du garçon. Ce qui est irrĂ©sistible dans cette ville, câest quâelle change perpĂ©tuellement et reste toujours la mĂȘme. Je lâai toujours 279
portĂ©e en moi ». Tout comme lâacacia qui lâobsĂšde, lâĂ©crivain se nourrit de ses racines. PuretĂ© de lâassassin TantĂŽt macabre, tantĂŽt trompeur, toujours surprenant, plus quâune scĂšne de crime, son roman est une aire de jeu, « Jâadore jouer avec le lecteur, mais je ne me joue jamais de lui. Je ne le manipule pas ; il est tout Ă la fois mon partenaire, mon ami, mon amant, et ce qui lâĂ©tonne mâĂ©tonne aussi, nous dĂ©couvrons les personnages ensemble », poursuit-il. « Si le meurtrier est si inattendu, câest parce quâil se cache en pleine lumiĂšre. Lâassassin sera toujours le plus pur de mes personnages ». Massacrer les passagers dâun bus un matin brumeux ou rĂȘver passivement sa vie au lieu de la vivre sont autant de crimes destructeurs; « Mais je crois que le plus grand des pĂ©chĂ©s est de sâaveugler par choix. Choisir dâignorer les consĂ©quences de nos actes, qui lâon est, notre place dans la vie. Tout le monde devrait aspirer Ă vivre en Ă©puisant son potentiel, et ignorer ce potentiel, câest se dĂ©tourner de lui et le nier entiĂšrement. » Et Ă©videmment, il applique Ă la lettre ses prĂ©cieux conseils : actuellement nominĂ© du prix Samuel Goldwyn pour le script de Gheir 3alam, il finalise le scĂ©nario de lâadaptation de son roman, et Ă©dite un film tournĂ© Ă Bhamdoun cet Ă©tĂ©.