Pavillon du Théâtre de Vidy, Lausanne Est-il réellement possible de construire un volume de 5000 m3 et de franchir des portées de 20 m grâce à un simple panneau en bois massif de 45 mm d’épaisseur? Le pavillon du Théâtre de Vidy le prouve et repousse loin les limites connues du matériau. Issu de programmes de recherche du labora toire des constructions en bois de l’Ecole poly technique fédérale de Lausanne (IBOIS), le pa villon plissé tel un origami devient à la fois un langage architectural et un système constructif. Il est à contre-courant d’une évolution qui cherche la qualité constructive en s’appuyant sur une multiplicité d’acteurs et de spécialistes. À l’inverse, le prototype en panneaux lamellécroisé montre qu’une compréhension des lois de la gravité amène à développer un langage suffisamment expressif, pour ne nécessiter au cun ajout coûteux. La nouvelle salle de spec tacle de Vidy est une forme parmi d’autres de ce que la nature nous enseigne et propose une lecture d’une rare cohérence. Sous le regard d’Yves Weinand, architecte et ingénieur qui dirige le laboratoire IBOIS, la forme juste émerge d’un état aléatoire et s’ex prime avec poésie. Soustraire plutôt qu’addi tionner, effacer les frontières et réunir les do maines afin de tendre à une économie de moyens. C’est grâce à cette philosophie que le projet va gagner en force, à travers la résolution inédite de ses liaisons, un aspect capital garan tissant la robustesse de l’ensemble et qui va
donner un nouvel essor au projet. Pour esquisser les grandes lignes de son his toire, le théâtre de Vidy cherchait à remplacer un chapiteau installé dans ses abords et qui lui tenait lieu de salle de spectacle. Ouvert aux courants d’air et aux bruits de la circulation, celui-ci offrait un confort rudimentaire. Son nouveau directeur souhaitait trouver une ex pression contemporaine à une extension modu lable respectant la pensée de Max Bill. Le théâtre sis au bord du lac était en effet la réutili sation d’un pavillon conçu par l’artiste pour l’Expo64, bâti sur une trame de 5 m lisible grâce à une ossature métallique, facile à monter et à démonter. Cinquante ans plus tard, l’esprit du théâtre allait toutefois être transposé dans un matériau plus en phase avec les préoccupations environnementales de l’époque, le bois. Par son aspect expérimental et innovant, le projet de vient le pendant d’une programmation théâ trale audacieuse, ouverte à la création contem poraine. Le pavillon de Vidy reprend l’emplacement du chapiteau et occupe grosso modo une même emprise au sol. Il accueille 250 spectateurs pour une scène de 19 x 11 m. L’espace se prête à diffé rentes configurations grâce à des gradins rétrac tables. Sa forme, rigidifiée par l’orientation de ses plis en panneaux de 45 mm, ne nécessite pas d’ajout de matière pour franchir des por tées allant de 16 à 20 m. Les parois pliées adoptent une courbure en plan, tout comme la toiture, courbée dans sa longueur et sa largeur.
Ce double effet offre un taux de déflexion plus faible par rapport à une version à simple cour bure. Le bâtiment qui nécessite une isolation, est conçu avec une double nappe de panneaux en bois lamellé-croisé. Contrairement à la chapelle St-Loup, un précé dent projet conçu avec une simple nappe reliée par des connecteurs métalliques, le pavillon est entièrement développé avec des liaisons boisbois qui s’emboîtent en queues d’aronde en respectant un sens bien précis. Le volume est segmenté en onze unités qui correspondent aux parties préfabriquées en atelier: deux parois sont composées chacune de quatre pièces et la toiture correspondante devient un assemblage de vingt pièces triangulaires, toutes uniques. Les tenons sont simples, ou doubles quand ils s’ac crochent aux deux nappes. Dans ce dernier cas, ils servent également d’écarteurs pour mainte nir une juste distance entre les nappes, avec 210 mm de vide destiné à une isolation en cellu lose insufflée sur le chantier. Leur creux com prend également des capteurs qui détectent les infiltrations d’eau. Pour saisir la forme, vérifier les angles et l’orientation des joints, le projet est d’abord simulé sur un logiciel de conception assistée par ordinateur, analysé selon différents paramètres et optimisé. Pour réussir une pro duction automatique de la géométrie des pan neaux et de ses raccords, il a fallu développer un module complémentaire au programme in formatique et s’initier aux mystères de la pro grammation. Cela a permis de vérifier l’impact