COOPÉRATEUR | NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2017

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AFFAIRES AGRICOLES |

À LA RECHERCHE D’UN COÛT DE PRODUCTION ET D’UN JUSTE PRIX DU LAIT «Les quotas ont figé notre production pendant 30 ans. On a toujours mis l’accent sur le prix du lait, sans se soucier du coût de production», explique Arnaud Degoulet, président de la coopérative Agrial, rencontré en septembre dernier au Salon de la production agricole – Carrefour européen (SPACE), à Rennes, en France. Pour chiffrer ce coût de production et augmenter la compétitivité de ses membres, Agrial a mis récemment sur pied une division économique. On cible surtout la relève, afin de faire bénéficier les jeunes producteurs du réseau d’agrofournitures et de machinerie de la coopérative. Agrial est redevenue transformateur de lait après une absence de 10 ans (1992-2012) et entend miser sur une valeur ajoutée aux 2,5 milliards de litres de lait produits par ses membres, en pariant sur ses marques. Thierry Roquefeuil, président de la Fédération nationale des producteurs de lait (FNPL), parle plutôt d’un coût de production à 340 euros la tonne pour que les producteurs français se maintiennent à flot. Pas étonnant qu’en 2009 et 2016, avec un prix du lait largement sous la barre des 300 euros la tonne après la chute des cours des prix internationaux, les producteurs français et européens aient déversé ou menacé de déverser des milliers de litres sur le parlement européen, à Bruxelles. Mais le « prix syndical » de la FNPL est loin de faire l’unanimité, « quand on sait que l’écart de coût de production entre un groupe de tête et un groupe de queue peut être de 30 % », souligne le président de la

Fédération nationale des coopératives laitières (FNCL), Dominique Charge. « Si on annexait le prix du lait à des coûts de production, les producteurs s’endormiraient sur leurs lauriers et nous, on n’arriverait plus à passer par rapport à la concurrence européenne. Ce chiffre de 340 euros la tonne ne correspond à aucun élément de compétitivité», affirme quant à lui Jehan Moreau, directeur de la Fédération nationale des industries laitières (FNIL). Chose certaine, «on ne peut plus donner aux consommateurs tous les gains de productivité gagnés dans nos fermes et dans nos entreprises», insiste Dominique Charge.

Katrine Lecornu, présidente de European Dairy Farmers, croit que les producteurs doivent dorénavant s’outiller pour affronter la volatilité des marchés.

UN JUSTE PRIX, MAIS LEQUEL? Depuis 10 ans, les producteurs laitiers français font les frais d’une guerre des prix sans merci entre les quatre grands détaillants que sont Leclerc, Carrefour, Système U et Intermarché, où une majorité de Français font leur épicerie. « Il faut trouver une formule pour répartir les revenus de façon équitable le long de la filière », croit Dominique Charge. Selon lui, cette formule est discutée à l’Élysée, avec nul autre que le président Emmanuel Macron, au moment où ont cours des états généraux sur l’alimentation dans l’Hexagone. Sur le plancher des vaches, le désarroi est total. « Tous les éleveurs sont perdus dans un marché volatil et libéralisé. Le coût de production, c’est notre seule certitude. Il faut gérer la trésorerie et gérer la volatilité », dit Katrine Lecornu, productrice de lait française et présidente

Euros/1 000 litres

PRIX DU LAIT MOYEN EN FRANCE 1

1

367 343

336 300

288 2007

327

315

316

294

2015

2016

274 2008

2009

Au 26 octobre 2017, 1 euro valait 1,49 $ CA

2010

2011

2012

2013

2014

Source : FranceAgrimer / S.S.P., Enquête Mensuelle Laitière

COOPERATEUR.COOP – NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2017

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