Le Bonbon Nuit 64

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EDITO Ouais, la castagne aime la nuit, elle s'installe tranquille dans ses replis, prospère dans ses culs-de-sac, se propage dans sa pénombre. C'est presque son milieu naturel et en son sein, elle prend mille avatars : verre cassé et dents pilées, visages écrasés sur les pavés au goût de silex, cran d'arrêt reluisant à la lune, corps éthyliques qui valsent, harpies qui s'arrachent la frange, poings de mauvais garçons synonymes de KO, high kicks caillerateux pour un bout de teuch… Vraiment, la castagne aime la nuit, elle s'y développe comme une jolie fleur mais dans le fond, c'est une fleur arrosée de pisse, elle fane aussi vite que ces défoulements éphémères et reste un coup de sang bas du front. Or quand la baston rejoint les idées et qu'elle devient lutte, le combat prend enfin un sens, une direction. Ainsi, place de la République, la nuit est depuis quelques temps déjà érigée comme le terreau des contestations. « J 'ai vu des rêves s'éveiller, j'ai vu la révolte gronder, j'ai vu les codes piétinés, les drapeaux de la liberté. Ah, le joli mois de mai à Paris ! » chantait la révolution en 68, un chant qui fait directement écho à notre mois de mai à nous, à notre bagarre contre les fondements d'un système vermoulu, à notre refus du retour des puritanismes, à notre dégoût de la marchandisation des désirs. Putain, qu'on l'espère beau ce joli mois de mai à Paris, qu'on l'espère décisif comme une dernière cartouche avant la grande dépression, et surtout, qu'il ne soit pas récupéré comme son illustre prédécesseur, cause indirecte d'une libéralisation à outrance source de nos maux actuels. Nous sommes en état de guerre psychologique constante, tel est le sens de notre époque. MPK

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