Reveil des combattants février 14

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Une autre image de l’Amérique

Rentes mutualistes AC : victoire mais vigilance

le réveil Février 2014 - N°800 - 5 e

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Rafle du Vél’ d’Hiv : 13 000 sacrifiés

des combattants

Pour l’amitié, la solidarité, la mémoire, l’antifascisme et la paix

La France est un pays riche ! Chaque Français doit vivre dignement dans notre République

Halte aux mensonges

a! n e y il , t n e g r a l' e D Le journal des droits de tous les anciens combattants et victimes de guerre


LE RÉVEIL actualités

Maurice Audin, un meurtre d’État Ce que nous attendons du Président Hollande, pour l’honneur de la France « Le courage, c’est de chercher la vérité et de la dire », selon Jean Jaurès. Et c’est vrai dans tous les domaines, y compris le journalisme où, beaucoup trop souvent, la recherche du scoop, du sensationnel pour faire « vendre du papier » remplace l’indispensable enquête objective à partir de sources fiables et sérieuses. D’autant plus lorsqu’il s’agit de l’histoire et de ses drames, tel l’assassinat de Maurice Audin à Alger en 1957 par les militaires qu’évoque le livre de JeanClaude Deniau, La vérité sur la mort de Maurice Audin. Comment concevoir que sur un tel sujet, l’auteur se soit bien gardé d’établir un contact, ou pour le moins d’informer la famille Audin, Josette son épouse et ses enfants devant qui Maurice Audin a été arrêté par les paras de Massu, à son domicile, au soir du 11 juin 1957, en pleine guerre d’Algérie ? On peut comprendre que, face à cette situation, la veuve de Maurice Audin (Josette) soit irritée et déclare le processus abject ! Comment porter foi en cette « vérité sur la mort de Maurice Audin » racontée par un journaliste familier du bourreau Aussaresses, de qui il aurait obtenu ces confidences quasiment à la veille de sa mort ? Un vieillard affaibli, certes, mais toujours aussi menteur, retors et abject, se complaisant dans ses crimes passés. Si le but est d’affirmer les mensonges de l’armée (d’après elle, Audin se serait évadé), chacun (sauf l’armée) en est aujourd’hui convaincu. D’ailleurs, la journaliste Nathalie Funès dans une enquête parue 2-

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dans Le Nouvel Observateur en mars 2012, révélait pour sa part une source plus fiable : un manuscrit inédit du colonel Godard (ancien commandant de la zone Alger-Sahel à l’époque), conservé avec ses archives à l’université Stanford en Californie, confirmant le meurtre de Maurice Audin par les militaires le détenant et mentionnant le nom de l’assassin, le sous-lieutenant Gérard Carcet… lequel continue de mener aujourd’hui encore, des jours paisibles en Bretagne. Il y a bien eu meurtre, un meurtre d’État sur Maurice Audin, jeune mathématicien promus à un brillant avenir, mais communiste et soutenant la lutte du peuple algérien pour son indépendance contre la puissance coloniale de la France. Comme il y a eu meurtre d’État contre des milliers et des milliers de patriotes algériens arrêtés, torturés, assassinés, déclarés « disparus ». Et ceux qui donnèrent les ordres ou couvrirent les assassins avaient pour noms François Mitterrand (ministre de la Justice de 1954 à 1957), Guy Mollet (SFIO), président du Conseil qui, jusqu’à fin 1955, déclarait la guerre

d’Algérie « bête et sans issue », puis se fit donner les « pouvoirs spéciaux » pour amplifier la guerre et y envoyer les appelés du contingent. Le radical-socialiste Bourgès-Maunoury lui succèdera, puis Antoine Pinay, tandis que les socialistes Robert Lacoste (gouverneur général de l’Algérie) et Max Lejeune (plusieurs fois ministre SFIO) laissaient faire l’armée en l’encourageant à la torture.

Et là est le problème, celui de crimes d’État non reconnus Certes, François Hollande en décembre 2012 s’est recueilli à Alger, place Maurice-Audin, et a exprimé ses regrets pour les souffrances infligées par la colonisation au peuple algérien. Certes, répondant à Josette Audin, François Hollande a écrit : « Plus de 50 ans après la fin de la guerre d’Algérie, l’État français doit faire face à ses responsabilités et au devoir de vérité qui lui incombent envers vous et votre famille d’abord, mais également envers l’ensemble des citoyens ». Mais depuis, silence radio, pas un mot sur les crimes de guerre, pas un mot de condamnation officielle. Il importe aujourd’hui, et c’est ce que nous attendons pour l’honneur de la France, notre pays, que soit rejetée la thèse de l’évasion et que le Président de la République française reconnaisse officiellement la responsabilité de l’État dans l’institutionnalisation de la torture, la condamne et condamne les crimes de guerre et contre l’humanité perpétrés durant la guerre d’Algérie. Alors seront rendus officiellement les honneurs à Maurice Audin, aux siens, à ses compagnons de martyres et à toutes les familles qui attendent depuis si longtemps la reconnaissance de la République, la vraie, la nôtre. Il faut que la vérité soit dite. André Fillère


ÉDITO LE RÉVEIL

Non au mensonge d’État !

SOMMAIRE Actualités p. 4 Désindustrialisation de la France : en augmentation.. . . . . . . . . . . . . . . . . 4 Dexia : le salaire des dirigeants augmente de 30 %.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4 OPEX : un rythme accéléré, pourquoi ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5 Allemagne : la pauvreté à un niveau record en 2012.. . . . . . . . . . . . . . . . . . 6 Europe : débat démocratique et répression.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7 International p.8 Réforme de la NSA : circulez, y a rien à voir !.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8 Nucléaire iranien : les premiers pas.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9 Moyen-Orient : enjeux sur fond de guerre. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10 Une autre image de l’Amérique.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11 Vie de l’ARAC p. 21 La vie des comités. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21 Vos droits p. 26 Quelle situation pour les veuves de guerre ?.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25 Relation administration / citoyens.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25 Quelle défense nationale ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 26 Rentes mutualistes AC : victoire, mais vigilance .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27 Mutuelle : meilleurs vœux 2014.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29 Magazine p. 31

P. 13 D o s s i e r

RAfle du vél’ d’hiv

13 000 sacrifiés www.le-reveil-des-combattants.fr LE RÉVEIL DES COMBATTANTS Fondé en 1931 par Henri-Barbusse Mensuel de l’Association républicaine des anciens combattants et victimes de guerre. Commission paritaire n° 0713-A 06545 Édité par les Éditions du Réveil des Combattants SARL au capital de 45 734,41 - Siret : 572 052 991 000 39 2, place du Méridien, 94807 Villejuif cedex Téléphone : 01 42 11 11 12 Télécopie : 01 42 11 11 10 reveil-des-combattants@wanadoo.fr Tirage : 60 000 exemplaires

Gérant Directeur de la publication : Raphaël Vahé • Directeur délégué - Rédacteur en chef : Patrick Staat • Comité de Rédaction : Brigitte Canévêt, Hervé Corzani, Jean-Pierre Delahaye, André Fillère, Laurence Gorain• Service photos : JeanClaude Fèvre • Administratrice : Annick Chevalier • Secrétariat de rédaction, conception graphique : Escalier D Communication • Illustration de Une : © Ajubel - Paru dans Courrier Internatio-

nal et El Mundo • Impression : RIVET P.E. - 24 rue Claude-Henri-Gorceix, 87022 Limoges cedex 9

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ne poignée d’individus monopolise l’information, formate l’opinion. Leur objectif : imposer un mode de pensée. C’est le règne du mensonge. On nous ment sur l’état de la France. On nous ment sur l’état de l’économie. Tout est tourné vers la rentabilité financière. A la moindre occasion, ils nous répètent : « Avec la mondialisation, on ne peut pas faire autrement », « La conjoncture économique nous oblige à prendre des mesures radicales », « Nous ne sommes pas assez compétitifs », « Le coût du travail est trop élevé »… C’est la crise. Mais pas pour tout le monde. De l’argent, il y en a. Les 85 personnes les plus riches du monde possèdent autant que la moitié la plus pauvre de la population, soit 3,5 milliards de personnes. La richesse des 1 % les plus riches s’élève à 110 000 milliards de dollars. C’est 65 fois la richesse totale de la moitié de la population la plus pauvre. En 2012, 230 milliards ont été versés aux 445 actionnaires du CAC 40. Cet argent n’est pas investi dans l’économie, pas investi dans l’industrie, pas investi dans la recherche. Cet argent est utilisé pour spéculer, pour faire toujours plus de profits. C’est une des conséquences des inégalités. Inégalités qui renforcent la désespérance, le repli sur soi. Airbus est un bel exemple. Il annonce la suppression de 5 800 emplois alors que le carnet de commandes est plein. Le seul objectif des actionnaires est d’augmenter la rentabilité à 10 % en 2015, à 20 % en 2020, pour toucher encore plus de dividendes. « Tout va très bien pour les riches… Nous n’avons jamais été aussi prospères. C’est une guerre de classes et c’est ma classe qui est en train de gagner ! » Warren Buffet. Il faut mettre un terme à la politique qui capitule devant la finance. Les Françaises et les Français doivent réagir, se rassembler, dire STOP. Il est inconcevable devant autant de richesse et d’opulence que nous, nos enfants et petits-enfants, vivions plus mal que nos parents. N’abandonnons pas nos enfants à la loi des seigneurs du CAC40. A chaque grand mouvement de l’histoire de notre nation, les Françaises et les Français ont su se rassembler pour mettre fin à des comportements politiques contraire à l’intérêt de l’immense majorité de notre peuple. Tout a été conquis par les luttes des générations passées. Il faut nous rassembler, avec courage, avec détermination, pour que cessent ces mensonges, cette politique et soient sauves les valeurs de la République. Patrick Staat LE RÉVEIL - N° 800 - février 2014

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LE RÉVEIL ACTUALITÉS

Désindustrialisation de la France Ça continue à fortement augmenter Régulièrement Le Réveil des Combattants fait le point sur la situation économique, industrielle de notre pays. Notre volonté est bien d’aider à discerner les véritables causes de cette situation. Nous nous permettons quelques constats. Tout d’abord, nous constatons que notre pays a perdu plus d’un millier d’usines de plus de 100 salariés l’année dernière, il y a eu plus de 42 % d’augmentation en un an. La taille moyenne des sites fermés est de 71 salariés. En quelques années, de 1980 à 2007, près de 2 millions d’emplois industriels ont été détruits et depuis 2007, ce sont à nouveau des centaines de milliers d’emplois industriels qui ont été perdus. Au-delà des drames humains que cette situation génère, ce sont des villes, des territoires entiers que l’on pousse dans la récession. Ce sont des territoires de notre pays touchés en plein cœur. D’aucuns expliquent cette désindustrialisation massive de notre pays par le transfert de l’emploi industriel vers l’emploi de service, la révolution informationnelle, le bas coup de production des pays émergents, des pays sous-développés. Pour les patrons, c’est sur la misère des pays pauvres qu’ils se construisent leurs profits. S’il n’est pas dans notre propos de mettre en cause le fait que l’ensemble des données économiques doit être pris en compte pour apprécier à leur juste valeur les causes de cette situation, l’élément majeur qui détermine cette politique c’est bien le pillage de notre économie, des richesses produites par un système d’accumulation de profits pour quelques-uns. Pour preuve, dans le même temps que l’on casse nos usines, les dividendes versés aux actionnaires ont fait un bond exponentiel. En 2012 par exemple, ce sont 299 milliards 4-

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d’euros qui ont été versés en dividendes, frais bancaires et financiers, auxquels il faut ajouter les exonérations fiscales et charges sociales des entreprises pour un montant de 200 milliards d’euros. Alors que le montant des intérêts de la dette de l’État ne représente que 50 milliards d’euros. A peu près la même chose pour 2013, alors que seuls 197 milliards d’euros ont été aux investissements matériels des entreprises. Cette course effrénée au profit est bien le cœur des problèmes de notre société. Que Hollande ait décidé de jeter aux orties les promesses sur lesquelles il s’est fait élire et préfère être le porte-parole de Gattaz n’a rien de surprenant, à partir du moment où son credo c’est celui du

social-libéralisme, cher aux dirigeants européens actuels. Hollande vient d’ailleurs d’offrir un cadeau supplémentaire de 31 milliards aux patrons. La suppression des cotisations familiales pour les entreprises, comble de satisfecit pour le patronat. Et Gattaz d’en demander déjà encore plus, sur le financement de l’UNEDIC par exemple. Cela étant, c’est de notre avenir dont il s’agit, et cette tendance mortifère pour notre société de désindustrialisation à marche forcée hypothèque notre capacité future à redresser économiquement notre pays. La nécessité urgente maintenant, c’est d’entendre notre peuple et d’engager notre pays sur une voie courageuse de revenir à une pratique politique au service des salariés, de l’emploi, de la Nation. Hervé Corzani

Dexia

Le salaire des dirigeants augmente de 30 % Sauvé par le gouvernement Sarkozy, les dirigeants de Dexia vont bien. Alors que l’établissement enchaîne toujours des pertes, le Journal du Dimanche révèle que trois dirigeants de la banque en cours de démantèlement ont vu leur salaire augmenter de 30 % au 1er janvier, à 450 000 euros par an. Selon la direction de Dexia, interrogée par le journal, la liquidation des prêts au bilan de la banque « nécessite des compétences pointues ». Nommés midécembre au comité de direction de la banque, le directeur financier Pierre Vergnes, le responsable des risques Marc Brugière et le secrétaire général Johan Bohets ont vu leur rémunération passer de 340 000 euros à 450 000 euros, précise le JDD, sans citer ses sources. Ces salaires sont comparables

à ceux des dirigeants du Crédit Agricole ou des Caisses d’épargne. Pierre Vergne et Marc Brugière remplacent Philippe Rucheton, qui était payé 500 000 euros, et Claude Piret qui était payé 480 000 euros, indique le JDD. Une faillite qui a coûté 6,6 milliards d’euros à la France : Dexia est détenue à 44 % par la France et à 50% par la Belgique, où les salaires de dirigeants d’entreprises publiques sont respectivement plafonnés à 450 000 et 290 000 euros par an, rappelle le journal. Sauvé de la faillite par les États belge et français à l’automne 2008, le groupe Dexia a été durement frappé par la crise de la dette, ce qui a rendu nécessaire un second sauvetage en octobre 2011. Selon la Cour des comptes, les déboires de la banque ont coûté 6,6 milliards d’euros à la France. Source AFP, 19/01/14


ACTUALITÉS LE RÉVEIL

OPEX I Un rythme accéléré : pourquoi ? Le 29 novembre dernier a été publiée une liste officielle des périodes seuil de pauvreté, et territoires retenus pour la délivrance de la carte du combattant. Des - Tchad : pétrole, coton, gomme arabique. 55 % sous le seuil de pauvreté années 1950 aux années 2010, leur rythme a plus que triplé. Où sont ces national, territoires et pourquoi ? - Djibouti : or, gaz, cuivre, fer, zinc. 33 % Au total, ces interventions ont eu lieu (ou ont encore lieu pour certaines d’elles) dans 35 pays différents et s’étalent, dans le temps, de 1947 (Madagascar) à 2014. Cette liste, qui n’inclut ni la guerre d’Indochine, ni celle de Corée et encore moins celle d’Algérie, prend pourtant en compte Suez (1956), l’Irak (1991) et la Libye (2014). • De 1947 à 1959, on peut compter cinq interventions outre l’Indochine, la Corée et l’Algérie. Ce sont Madagascar, Suez, le Cameroun (2 fois : 1956 et 1959) et la Mauritanie. • De 1969 à 1979, cinq également : Tchad, Mauritanie (2 fois), Liban, Zaïre, République centrafricaine (1re fois). • De 1987 à 1999, le nombre est multiplié part deux - Onze interventions : Golfe Persique et d’Oman (2 fois : 1987 et 1990). Cambodge, Irak, Somalie. Ex-Yougoslavie, Slovénie – Croatie en 1992, puis au Kossovo (2 fois 1995 et 1999). Rwanda, Congo et TimorOriental. • De 2001 à 2013-2014, c’est l’explosion : dix-huit interventions ! Afghanistan, Côte d’Ivoire, République démocratique du Congo, Ouganda, Bosnie-Herzégovine, Gabon, République du Liban, République centrafricaine (5 fois : 1979-19962007-2008-2009-2013), Tchad (3 fois : 2007-2008-2009), Somalie (plus Ethiopie, Kenya, Yémen, Djibouti, Sultanat d’Oman et Mer Rouge). Libéria 2011, Libye (2011), Mali (2013-Serval). Si certaines de ces interventions militaires sont très courtes (2 à 7 mois : Suez, Irak, Libye), d’autres durent jusqu’à 10 ans (Côte d’Ivoire), 11 ans (Somalie), 12 ans (Afghanistan), 16 ans (République

centrafricaine, mais ce n’est pas fini), 20 ans (ex-Yougoslavie), 29 ans (Liban) et la palme au Tchad avec 44 ans (15 mai 1969 au 31 décembre 2013 !)

Pourquoi ? Engrenage des alliances avec l’OTAN ? C’est vrai pour l’Afghanistan, l’Irak et la Libye. Sauvegarde des Français sur le terrain et des populations martyrisées par la guerre… Nous voulons bien le croire. Mais examinons les ressources des pays concernés : - Mauritanie : fer et pétrole. 42 % de la population vit sous le seuil de pauvreté national, - Mali : opération Serval 2013. Pétrole, or, coton. 47 % de la population sous le seuil de pauvreté national, - Sénégal : présence navale française, 350 soldats à Dakar. Or, fer, uranium. 46,7 % sous le seuil de pauvreté national, - Côte d’Ivoire : opération Licorne. Pétrole, café, cacao. 42,7 % sous le seuil de pauvreté national, - C ameroun : pétrole, fer, bauxite, cobalt, diamants, banane, caco, café, coton. 74 % sous le seuil de pauvreté national, - Gabon : pétrole, magnésium, fer, bois. 33 % sous le seuil pauvreté national, - Congo : pétrole. 50,1 % sous le seuil pauvreté nationale. - République démocratique du Congo : pétrole, diamants, cuivre, or, zinc, plomb, uranium, argent. 71,3 % sous le seuil pauvreté national, - République centrafricaine : pétrole, diamant, or, uranium, bois, banane, maïs, café, coton, manioc, tabac. 62 % sous le seuil pauvreté national, - Ouganda : pétrole, café, coton, canne à sucre, patate douce. 24,5 % sous le

sous le seuil de pauvreté national, - Somalie : uranium, fer, étain, sel, gypse, bauxite, cuivre. 73 % sous le seuil de pauvreté, - Soudan : pétrole, cuivre, fer, zinc, argent, or. 50,6 % sous le seuil de pauvreté, - Kenya : pétrole. L’Afrique, un continent riche, héritier du découpage des frontières suivant les intérêts des ex-puissances coloniales (dont la France et son vaste « Empire »), victime aujourd’hui de l’appétit des États et des multinationales pour ses matières premières. Des peuples sous le seuil de pauvreté, des dirigeants souvent avides d’une plus grande part de gâteau, les visées ambitieuses de la Chine et des USA sur ce champ de bataille de la mondialisation encouragent (de fait) la propagation de l’idéologie djihadiste… Autant de raisons et bien d’autres encore qui font de ce continent, au cœur des enjeux économiques stratégiques, le jeu des décisions des gouvernements français successifs (Hollande compris) d’intervenir, sous couvert « d’urgence humanitaire », en utilisant le statut de gendarme de l’OTAN, pour préserver leurs intérêts menacés… alors que meurent de faim, de soif et de maladies endémiques, pourtant guérissables aujourd’hui, les peuples africains. André Fillère

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LE RÉVEIL ACTUALITÉS

Allemagne

La pauvreté à un niveau record en 2012 : 15,2 % Qui a dit que l’Allemagne était un pays prospère ? Qui a osé prétendre que c’était un modèle à suivre ? Qui a vanté la santé de l’économie et de la société allemandes ? Lors de la dernière décennie, on nous a présenté ce pays comme un exemple... Nous aurait-on caché la vérité ? Il semble bien que ce soit le cas, car l’Allemagne est en train de battre des records de pauvreté... Certes, le taux de chômage est faible dans ce pays, mais à quel prix ? Au prix du sacrifice de millions de travailleurs : 1 personne sur 7 est pauvre ou menacée de pauvreté, avec un revenu inférieur à 60 % du revenu médian... (soit 869 e, plus bas qu’en France). Multiplication des emplois à bas salaire, baisse des emplois à plein temps, hausse du temps partiel et des conditions d’emploi précaires depuis dix ans : voilà le résultat d’une politique par laquelle on a voulu masquer le chômage... De plus en plus de salariés, pour vivre, ont plusieurs « petits boulots ». Certains salaires sont dérisoires et indécents en Allemagne. Comment peut-on accepter de telles injustices ? Comment les Allemands ont-ils pu se soumettre à de telles lois ? Pour donner un semblant de lustre, faut-il sacrifier les peuples ? Faut-il sans arrêt baisser les salaires pour faire fonctionner l’Europe ? Une fois encore, on a l’amère impression d’avoir été trompé, abusé par les tenants de l’Europe sur l’état de l’Allemagne. Ce pays nous a été présenté comme un modèle de rigueur, un pays riche où tout allait bien, où le chômage était faible... On oubliait d’évoquer tous les problèmes que connaît l’Allemagne : faible natalité, pays vieillissant, salaires de misère... On nous a bercés d’illusions sur ce pays, on nous a caché la réalité et on commence à la découvrir enfin... Dans les discours officiels, le couple franco-allemand était, sans cesse, mis en avant, il fallait atteindre une “convergence”, l’exemple allemand semblait être un idéal à atteindre et toute critique un peu appuyée portée 6-

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à nos voisins allemands était taxée de “germanophobie”. Désormais, on est informé : le taux de pauvreté a atteint un nouveau et triste record, 15,2 % en 2012 ! Des régions entières sont plongées dans la spirale du déclin... On assiste à une paupérisation inquiétante de la population allemande, les travailleurs précaires se multiplient : ils perçoivent un salaire de moins de 450 euros ! Aujourd’hui, on nous propose le modèle allemand pour le redécoupage du territoire, mais la mise en concurrence des régions allemandes est catastrophique pour les populations allemandes.

Un rapport accablant « Des centres pour jeunes ou personnes âgées, des bibliothèques, des piscines ferment dans beaucoup d’endroits. » « Des régions entières sont plongées dans une spirale du déclin. » « L’exploitation et la

pauvreté ne cessent d’augmenter. » L’Association paritaire d’action sociale (Deutsche Paritätische Wohlfahrtsverband) a publié quelques jours avant les vacances de Noël un rapport sur le développement régional de la pauvreté en Allemagne en 2013 intitulé Entre prospérité et pauvreté - une épreuve de vérité. Le rapport réfute la propagande officielle comme quoi l’Allemagne n’a pratiquement pas été touchée par la crise et est un paradis de la prospérité en Europe. « L’Allemagne n’a jamais été aussi profondément divisée qu’aujourd’hui » a déclaré U. Schneider, président de la très respectée Paritätische Gesamtverband. « Le taux de pauvreté, à 15,2 %, a atteint un nouveau et triste record en 2012 », souligne l’édition 2013 du rapport annuel de cette organisation, qui s’appuie sur des données de l’institut allemand des statistiques (Destatis). « Une personne sur sept est pauvre ou menacée de pauvreté, avec un revenu inférieur à 60 % du revenu médian », a noté U.Schneider en relevant la hausse quasi constante du taux de pauvreté depuis 2006. Ce rapport souligne que la pauvreté a progressé alors que le chômage, au contraire, diminuait dans le pays. « Cela pointe du doigt le gonflement des emplois à bas salaire, la baisse des emplois à plein temps soumis à cotisations sociales, la hausse du temps partiel et des conditions d’emploi précaires depuis dix ans », a estimé M. Schneider. « Le pouvoir d’achat moyen des salariés en Allemagne a baissé sur les neuf premiers mois de 2013 ». « Non seulement l’écart entre riches et pauvres a significativement augmenté en Allemagne », mais en plus « le fossé


entre régions prospères et régions pauvres s’approfondit et s’élargit », a-t-il ajouté. Onze des 16 États fédéraux ont enregistré les pires statistiques par rapport à l’année précédente. L’étude conclut en remarquant que pour « les régions prospères les choses continuent de s’améliorer et pour les régions pauvres les choses empirent ». Ainsi, le taux de pauvreté dépasse à peine 11 % dans les riches États régionaux du sud (Bavière, BadeWurtemberg) mais dépasse 20 % dans plusieurs États du nord (Berlin, Brême, Saxe-Anhalt et Mecklembourg-Poméranie-Occidentale). Un « drame tout particulier » est en train de se développer dans la région de la Ruhr qui, aux côtés de Berlin, a « pour la première fois été identifiée comme une région particulièrement pauvre en Allemagne ». Dans cette ancienne région industrielle, « un développement effréné de la pauvreté » prend place. Depuis 2006, la pauvreté dans la Ruhr, la zone métropolitaine la plus peuplée qui compte plus de 5 millions d’habitants, s’est accrue pour atteindre 19,2 % en 2012. L’Association examine l’écart entre le développement économique et la pauvreté. En 2011, lorsque l’Allemagne avait annoncé une croissance économique de 3,9 % en termes réels, en même temps qu’une baisse du chômage, le taux de pauvreté avait bondi de 14,5 à 15,1 %. En 2012, lorsque la croissance économique n’avait augmenté que de 0,9 point en termes réels et que le taux de chômage était resté stable, le taux de pauvreté avait augmenté. En d’autres termes, alors que les profits de l’essor économique atterrissaient dans les poches d’une riche élite financière et patronale, les emplois nouvellement créés étaient à bas salaires. Moralité : le modèle allemand ne brille pas par son efficacité, et en bonne donneuse de leçons, elle souhaite appliquer son modèle au reste de l’Europe.

© Dimitris Bouras

actualités LE RÉVEIL

Europe

Débat démocratique et répression C’est vraiment une nouvelle stupéfiante qui nous arrive d’Athènes, mais combien lourde de signification et de menaces : le Code pénal grec s’enrichit d’un nouveau délit, passible de la bagatelle de deux ans de prison : la violation du droit communautaire, et même la critique des institutions communautaires. Apparemment, les autorités grecques qui viennent d’être promues à la présidence de l’Union témoignent ainsi, contre leur propre peuple, de ce que cette Union peut leur faire confiance. Mais c’est plus qu’un acte d’allégeance : c’est un défi ouvert au principe fondamental du droit international institué par la Charte des Nations unies du droit exclusif de tous les peuples à leur libre détermination et gestion de leurs affaires. Pire encore, c’est la mise des moyens de la police répressive « régalienne » de l’État au service de la soumission de la nation à l’autorité étrangère. Dans le droit pénal classique, c’est cela qui serait tombé sous le coup de la loi, comme constituant un crime de trahison ! Mais ce n’est pas par hasard si cela nous vient de Grèce, car c’est le pays qui a le premier et le plus souffert de la soumission à la loi européenne du marché,

et y a manifesté le plus fort son opposition et sa révolte. Donc cette mesure exorbitante ne frappe pas seulement les Grecs. Elle est un avertissement pour tous les peuples de l’Europe : soyez soumis, renoncez à votre droit fondamental de maîtrise de vos affaires, acceptez sans broncher l’esclavagisme européen au profit des marchés du capitalisme mondialisé, ou vous irez en prison, comme y iront les Grecs. Exprimer aujourd’hui notre solidarité contre l’article N° 458 voté le 24 octobre 2013, avec le peuple grec dans son action contre un piétinement insolent de tous des droits, ce n’est pas seulement un devoir humanitaire de solidarité, mais la défense de nos intérêts propres. On devrait pouvoir espérer que tous les peuples d’Europe se lèveront contre ce qui est un défi pour eux tous. On peut aussi se dire que pour que l’Union européenne, par gouvernement grec interposé, en vienne là, c’est qu’elle mesure combien les peuples sont excédés d’être en sa dépendance. Mais, étant acculée à de telles dérives, elle ne fait que montrer combien il est urgent d’en finir avec elle. Roland Weyl

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LE RÉVEIL international

Réforme de la NSA Circulez, y a rien à voir ! Des médias américains et britanniques font de nouvelles révélations sur le scandale des écoutes de la NSA. Obama tente de rassurer en présentant une réforme plus que floue et réaffirme sa volonté de poursuivre l’espionnage des nations et des individus à grande échelle. Pour bon nombre d’Américains Edward Snowden n’est plus un traître. Non contente d’espionner les faits et gestes de la population à l’échelle planétaire via internet, la NSA lit peut-être vos textos. L’Agence nationale de la sécurité américaine collecterait près de 200 millions de SMS par jour, a révélé le quotidien britannique The Guardian dans son édition du 16 janvier dernier. Avec ce programme, baptisé Dishfire elle recueillerait ainsi les données contenues dans les messages envoyés à travers le monde entier. Dans une présentation confidentielle fournie par Edward Snowden à ce journal et à la chaîne Channel 4 News, la NSA compare les SMS à une mine d’or. Le programme Dishfire lui permet « d’extraire les préparatifs de voyage, les carnets d’adresses ou encore les transactions financières, y compris d’individus qui ne sont pas soupçonnés d’activités illégales », écrit le Guardian. Le pendant britannique de la NSA, le GCHQ, piocherait aussi dans cette base de données élaborée par l’Agence américaine pour rechercher des informations envoyées ou reçues par des citoyens britanniques au Royaume-Uni. Un second programme, 8-

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Prefer, permet ensuite au renseignement américain d’analyser automatiquement ces communications non-ciblées. Prefer utilise les textos automatiques, comme ceux notifiant d’un appel manqué ou ceux envoyés par l’opérateur lorsqu’on est à l’étranger – des « métadonnées », comme les appelle la NSA – pour extraire des informations sur leur destinataire. L’agence récolte ainsi plus de cinq millions de notifications d’appels manqués (et les numéros associés) plus de 110 000 cartes de visite électroniques (ainsi que les noms et les images qu’elles contiennent) ou encore 800 000 transactions financières par jour et traque les déplacements de plus de 1,6 million de personnes, détaille le Guardian. Plus de 76 000 textos envoyés quotidiennement pour organiser rendez-vous ou réunions, ou par les compagnies aériennes pour confirmer un vol par exemple, permettent aussi de recueillir des données de géolocalisation. Bref, le programme Dishfire « collecte tout ce qu’il peut », écrit le GCHQ. Une porte-parole de la NSA, contactée par le Guardian a démenti le caractère « arbitraire et illimité » de ce programme. L’Agence ne s’intéressait qu’à des

« cibles étrangères valides », affirme-telle, et évoluerait dans un « cadre juridique strict ». Et ce n’est pas tout, La NSA surveille aussi des ordinateurs non connectés à internet. Depuis plusieurs années, l’agence d’espionnage est capable de pirater des réseaux à l’aide de fréquences radio, révèle à son tour le New York Times. Espionnage mondial, superordinateur, tensions diplomatiques… Il ne manquait plus qu’un espion qui branche une clé USB dans des ordinateurs « ennemis »… Cette fois, c’est fait. Selon le New York Times, daté du 14 janvier, la National Security Agency a espionné près de 100 000 ordinateurs dans le monde. La plupart du temps, un logiciel-espion a été introduit via internet, mais la NSA a également eu recours à des agents de terrain pour installer son programme dans des ordinateurs ennemis comme alliés, selon le Times, qui cite des experts en informatique et des documents divulgués par Edward Snowden.

Obama : je n’ai pas à m’excuser Exploitée depuis 2008 au moins, cette technologie fonctionnerait à l’aide de fréquences radio, émises par des circuits imprimés ou des clés USB. « La technologie des fréquences radio a permis de résoudre l’un des plus gros problèmes des services de renseignement américains : pénétrer dans des ordinateurs que des adversaires et certains alliés s’efforçaient de mettre à l’abri de l’espionnage ou du piratage », écrit le grand quotidien américain. Des programmes mouchards auraient ainsi été implantés dans des réseaux des armées chinoise et russe, de la police mexicaine, des cartels de narcotrafiquants, des institutions européennes chargées des échanges commerciaux ou d’alliés tels que l’Arabie saoudite, l’Inde et le Pakistan. Ces révélations sont intervenues peu avant la conférence de presse de Barack Obama qui souhaitait ras-


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surer ses alliés et l’opinion publique internationale et annoncer une « réforme » des méthodes de la NSA, dont au bout du compte, il est le patron en tant que chef suprême des armées. Le locataire de la Maison-Blanche l’a affirmé, plus jamais il ne fera écouter les chefs d’État étrangers. C’est juré, promis, désormais il leur « téléphonera » ! Mais… pas question de s’arrêter. Le président américain a souligné que les services de renseignements US, « comme c’est leur mission », continueraient à recueillir des informations sur les intentions des gouvernements étrangers et n’avaient à s’excuser auprès de qui que ce soit pour leur efficacité. Il a également insisté sur le fait que conserver les métadonnées téléphoniques constituait une arme essentielle dans la lutte contre le terrorisme. Ces métadonnées sont comparables à ce qu’on trouve sur une facture téléphonique : numéro appelé, durée de l’appel, horaire. « Être capable d’examiner les connections téléphoniques pour établir si un réseau existe est crucial », a-t-il plaidé. Donc cette collecte se poursuivra, a souligné Barack Obama. Il a chargé les renseignements et le ministre de la Justice de mettre au point une réforme à cet effet, sans se prononcer sur quelle entité devrait être dépositaire des informations. Les entreprises de télécommunications ont déjà fait part de leur réticence à s’investir dans de telles opérations. Bref… Circulez, y a rien à voir ! Pour la majorité des observateurs, la philosophie du renseignement aux États-Unis n’est en rien remise en cause. Elle conserve comme postulat, depuis le 11 septembre qu’il faut disposer de bases de données capable de stocker cent ans d’internet afin de pouvoir connaître tout de l’ennemi d’aujourd’hui et surtout de demain… Mauvaise nouvelle pour Obama, Edward Snowden, l’ex-espion de la NSA qui a tout déballé, n’est plus pour une majorité d’Américains, persona non grata. Son image n’est plus celle d’un traître. Le New York Times affirme même qu’il a rendu au pays « un grand service ». Jean-Pierre Delahaye

Nucléaire iranien

Les premiers pas L’accord sur le nucléaire iranien est entré en exercice le 20 janvier dernier. Conclu avec les grandes puissances fin novembre, il est le résultat d’intenses discussions relancées après la victoire, en juin, du président iranien modéré Hassan Rohani. Il prévoit que Téhéran gèle à partir de cette date et pendant six mois une partie de ses activités nucléaires sensibles en échange d’une levée partielle des sanctions. La République islamique doit notamment limiter l’enrichissement d’uranium à 5 %, transformer son stock d’uranium à 20 %, geler à leur niveau actuel ses activités dans les sites de Natanz et Fordo, ainsi qu’au réacteur à eau lourde d’Arak, et stopper l’installation de nouvelles centrifugeuses (environ 19 000). Tous les engagements feront l’objet d’une “surveillance accrue” de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA). En contrepartie, l’Iran devrait recueillir les premiers fruits concrets de sa politique de dialogue avec le déblocage prochain de 550 millions de dollars, comme prévu par l’accord nucléaire de Genève. Ces mesures devraient selon les experts avoir un « effet psychologique immédiat » et permettre une « relance de l’économie ». Les pays du groupe 5+1 (Chine, ÉtatsUnis, France, Royaume-Uni, Russie et Allemagne) se sont également engagés à lever, notamment, les sanctions sur les exportations pétrochimiques et le commerce de l’or, maintenir les exportations de pétrole à leur niveau actuel, supprimer l’embargo sur l’industrie automobile et débloquer graduellement 4,2 milliards de dollars des avoirs iraniens gelés aux États-Unis. Cette période de six mois devrait permettre de démarrer des discussions sur un accord global sur le programme

nucléaire iranien, soupçonné malgré ses dénégations, de chercher à se doter de l’arme atomique sous couvert de programme nucléaire civil. L’embargo pétrolier et financier imposé en janvier 2011 par les États-Unis et l’Union européenne a étranglé l’économie iranienne et sa relance est une priorité pour Téhéran. L’accord prévoit la création de canaux bancaires pour faciliter les échanges commerciaux de l’Iran avec le monde extérieur. « Avec des revenus supplémentaires, le gouvernement pourra importer les produits de consommation dont a besoin la population et les produits intermédiaires pour relancer la production », a estimé Mohammad Reza Behzadian, acteur économique et ancien responsable de la Chambre de commerce de Téhéran. « Le gouvernement va aussi pouvoir payer ses dettes aux entreprises privées, ce qui donnera encore plus de souffle à l’économie », souligne-til. Enfin, la levée des sanctions contre le secteur automobile aura également un important impact, alors que la production de véhicules a baissé de moitié (de 1,6 million en 2011 à moins de 800 000 en 2012). Interrogé récemment par le quotidien La Croix, Thierry Coville, chercheur à l’Institut de relations internationales et stratégiques (Iris) et spécialiste de l’Iran, estime que « la société iranienne soutient cet accord ». Il permettra, selon lui, de relancer l’économie iranienne qui souffre d’une « inflation à 45 % et d’un taux de chômage à 20 %. La levée des sanctions est une avancée importante pour l’industrie automobile, principal pourvoyeur d’emploi, qui tourne au ralenti faute d’approvisionnement ». Cependant, l’accord reste fragile. Les ultra-conservateurs iraniens critiquent les concessions faites par Téhéran. Des faucons américains souhaitent voir voter de nouvelles sanctions et TelAviv n’a pas remisé ses menaces d’intervention militaire. Le chemin de la normalisation des relations reste semé d’embûches. JPD

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Moyen-Orient

Enjeux sur fond de guerre Le Moyen-Orient est, encore et toujours, secoué par l’instabilité politique et les violences qui l’accompagnent. Attentats sanglants en Irak et au Liban, confrontations au Bahreïn et au Yémen sans parler de la guerre qui sévit en Syrie, qui a déjà fait des centaines de milliers de morts, de blessés et de déplacés. Un conflit terrible dont les paramètres ne sont pas que syriens mais régionaux et internationaux, politiques et économiques. Et maintenant confessionnels. Depuis des décennies, le contrôle du Moyen-Orient signifie le contrôle des moyens énergétiques, pétrole et gaz évidemment, auxquels il faut rajouter l’eau. Les États-Unis l’ont compris dès 1945, en s’alliant à l’Arabie Saoudite. Celle-ci, forte de ce soutien, a disséminé à travers le monde son idéologie rétrograde et sectaire, le wahhabisme. Aujourd’hui pourtant, on assiste de plus en plus à une confrontation entre les deux branches de l’Islam, le sunnisme et le chiisme, divisant de fait les pays de la région et amenant des révoltes dans les pays mêmes. D’un côté l’Arabie (où la minorité chiite se trouve dans les zones pétrolifères), le Qatar (qui voudrait bien en finir avec le régime de Damas

pour faire transiter son gaz naturel vers l’Europe au détriment de la Russie) et d’autres pays du Golfe, de l’autre l’Iran, l’Irak, la Syrie. Or, il est avéré que d’ici quelques années, les principales ressources énergétiques se trouveront dans les sous-sols des pays dirigés par des chiites ! Ce qui, en partie, explique l’attitude nouvelle des États-Unis vis-àvis de l’Iran, au grand dam des Saoudiens ! La Jordanie, d’une certaine manière, résume à elle seule toute cette problématique. Le pays est frontalier avec l’Arabie saoudite, l’Irak, la Syrie et Israël ! Autant dire que, dans les tensions actuelles, son rôle pourrait être majeur. Le royaume hachémite joue dans la cour occidentale. C’est pour cela qu’il est un des seuls pays (avec l’Égypte), à avoir signé un traité de paix avec Israël. La Jordanie accueille actuellement quelque

1 500 soldats américains et Washington compte maintenir ce contingent en l’état, opportunément basé entre l’Irak et la Syrie ! De plus, comme l’a révélé The National, un quotidien des Émirats arabes unis, « Un centre secret de commandement des opérations en Jordanie, composé de responsables militaires (de personnels) occidentaux (dont la France) et arabes, a apporté un soutien essentiel aux rebelles combattants sur le front sud de la Syrie en leur fournissant des armes et des conseils tactiques pour attaquer des cibles du régime. Des combattants rebelles et des membres de l’opposition affirment que le centre de commandement, basé dans un bâtiment du siège du renseignement à Amman (en Jordanie), achemine des véhicules, des fusils sniper, des mortiers, des mitrailleuses lourdes, des armes légères et des munitions à des unités de l’Armée syrienne libre. » De leur côté, la Russie et l’Iran soutiennent militairement le régime syrien. Les populations de la région, elles, préfèreraient un cessez-le-feu, la paix et que ces millions d’euros dépensés pour la course à la mort le soient dans le domaine de la santé et de l’éducation. Pierre Barbancey

Le Medef à Téhéran le mois prochain

Lu dans Le Figaro du 20 janvier 2014 La perspective de la levée des sanctions contre l’Iran attise la convoitise des entreprises occidentales, intéressées par l’or noir, mais aussi par un marché de 75 millions de consommateurs. Les Américains, dont le constructeur automobile GM, n’ont pas attendu pour nouer des contacts tandis que les français comme PSA et Renault, présents en Iran avant les sanctions, souffrent de l’intransigeance de Paris dans les négociations. Ceci n’a pas empêché, au contraire, le Medef d’organiser une visite à Téhéran, prévue du 2 au 5 février. La délégation française devrait compter plusieurs dizaines de dirigeants parmi lesquels des représentants de Peugeot.

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Une autre image

de l’Amérique Dans une série documentaire, intitulée Une autre image de l’Amérique diffusée, hélas, uniquement sur la chaîne Planète +, le grand cinéaste américain Oliver Stone explore la face cachée de son pays. Il est également coauteur, avec l’historien Peter Kuznick, d’un ouvrage publié aux éditions Saint-Simon, Les crimes cachés des présidents. De passage en France pour la promotion du livre et de l’émission, il a donné une interview à la journaliste, Sylvie Véran, du magazine ciné-télé Paris-Obs. Nous en publions ici plusieurs extraits. Sylvie Véran : Selon vous, l’Amérique n’a cessé d’étendre son hégémonie militaire parce qu’elle a peur de l’extérieur. Est-ce de la peur ou de la paranoïa ? Oliver Stone : L’Amérique a combattu le communisme de 1917 à 1991, soit jusqu’à la fin de l’ère Gorbatchev.

L’Union soviétique a été présentée comme une menace immense. Pour justifier nos inquiétudes, et notre paranoïa, nous avons fabriqué la plus grande arme de l’histoire de l’humanité. Nous avons lâché la bombe atomique au Japon pour inquiéter les Russes. Et nous avons utilisé la menace nucléaire de nombreuses fois depuis. Dès 1880, année où commence le livre, l’inquiétude à l’égard de ce qui se passait ailleurs était présente. Les Communards français effrayaient terriblement les patrons des entreprises américaines qui craignaient que les travailleurs prennent un jour le pouvoir. Il y avait aux États-Unis de terribles révoltes, de violentes grèves dans les années 1870 à 1890. Les capitalistes, les barons de l’industrie, se servaient de membres de la classe ouvrière pour en tuer d’autres. Les policiers utilisaient des espions parmi les employés. Les patrons étaient prêts à payer des sommes folles pour diviser les travailleurs. L’apogée de la lutte a eu lieu lors de la Première Guerre mondiale (…) Après la Seconde Guerre mondiale, la peur du communisme n’a cessé de grandir… Notamment durant la période du maccarthysme. Même les Américains très peu politisés avaient

peur des communistes. J’ai grandi dans cette ambiance-là. Si vous travailliez dans une entreprise, vous ne pouviez pas envisager de progresser dans la hiérarchie avec des idées libérales. Le FBI pistait les gens de gauche. Des centaines de milliers de personnes ont été surveillées. Cette politique a fonctionné jusqu’à Reagan. C’est lui qui, en 1980, élimina toute forme de syndicalisme, empêchant ainsi une véritable réforme sociale. Aux États-Unis, les manifestations en faveur de telle ou telle cause ne posent pas de problème. Mais ces actions restent distinctes et on fait en sorte qu’elles ne fusionnent pas en un seul mouvement qui serait alors beaucoup plus puissant. C’est la raison pour laquelle Martin Luther King paraissait dangereux à mon sens. Car il rapprochait le Mouvement des droits civiques du mouvement pacifiste et de la lutte contre la pauvreté. S.V : Pourquoi y a-t-il un tel consensus entre démocrates et républicains sur la notion de suprématie militaire de l’Amérique ? Oliver Stone : Ce qui intéresse les Américains, c’est le pouvoir. Ils ont soif de pouvoir. Ils ont peur des immigrés et LE RÉVEIL - N° 800 - février 2014

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craignent les étrangers. Nombre d’entre eux sont venus aux États-Unis après avoir été persécutés pour leur religion en Europe, en Asie, en Amérique du Sud, ou pour fuir des gouvernements corrompus. Ils ont émigré aux ÉtatsUnis afin de débuter une nouvelle vie, emmenant avec eux une certaine paranoïa à l’égard de leur pays d’origine. 75 % des Américains n’ont pas de passeport et ne sont jamais allés à l’étranger. Les Américains ne s’embarrassent pas de concepts. Ils n’ont pas été éduqués à comprendre les autres pays. Il est très facile de s’appuyer sur cette ignorance. De se servir de la peur en faisant du Venezuela, de l’Iran, de la Russie et maintenant de la Chine, des ennemis. Nous pratiquons cela régulièrement. La peur des Communards existait avant la Révolution russe. Quand il y a eu la Révolution russe, c’est la peur de la Russie qui a émergé, puis la peur de la Chine qui s’est transformée en une conspiration de ces deux puissances pour dominer le monde. C’est ce que l’on m’a appris quand j’étais petit… S.V. : Mais, après Gorbatchev, les Russes ne représentaient plus une menace ? Oliver Stone : Qu’avons-nous fait alors ? Nous avons poursuivi la même politique. Le général Noriega, le baron de la drogue au Panama, est devenu la nouvelle menace. Puis Saddam Hussein, lorsqu’il a attaqué le Koweït. De manière aberrante, Bush père a comparé Hussein à Hitler à cinq ou six reprises lors d’interventions publiques. C’était “nécessaire” pour préparer l’opinion à l’envoi de 500 000 hommes en Arabie Saoudite, lors de la guerre du Koweït, dans le but d’assurer notre présence au Moyen-Orient. Lorsque nous avons envoyé 500 000 hommes au Viêt-Nam, les Américains se sont insurgés. Les gens manifestaient. Mais ils n’ont pas bougé pour l’Arabie Saoudite. Bush a obtenu un consensus, de justesse, mais suffisant pour aller à la guerre. Et nous ne sommes jamais vraiment repartis de la région (…) A chaque fois que l’Amé-

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rique est partie en guerre, les conflits ont été basés sur la peur (…) Or, nous avons peur de la peur. Nous n’avons pas cessé depuis 2001. Parce que Bush fils avait déclaré la guerre au terrorisme, il s’est battu contre une cinquantaine de pays. Le plan des néoconservateurs consistait à en finir avec l’Irak, l’Iran, la Syrie, la Libye et le Liban. C’était leur objectif. La politique des faucons. L’Amérique est dominée par la droite, elle l’a toujours été, sauf durant Roosevelt, Kennedy, et les premières années du mandat de Carter. Nous sommes un pays de droite depuis l’ère industrielle (…) S.V. : Le président Obama est moins belliciste que Bush mais il a réarmé et ultra-sécurisé le pays à un point jamais atteint… Oliver Stone : Curieusement, Bush a été le président américain le plus méprisé à la fin de son mandat, mais son influence dure. C’est très difficile pour un président américain de réduire la dimension sécuritaire de l’État. La menace qu’un incident arrive sous son autorité est terrible. Il serait crucifié. Nous vivons donc dans la peur et l’ultra sécurité. Nous dépensons des fortunes pour nous protéger. Mais de qui ? De quoi avons-nous peur ? Nous avons fait la guerre en Irak et en Afghanistan pour soi-disant nous protéger. Le besoin de sécurité peut faire perdre la tête. La sécurité parfaite n’existe pas. Un bon travail d’investigation et la coopération avec d’autres pays garantissent mieux, à mon sens, une certaine sécurité. Tous les grands terroristes ont été neutralisés grâce à la coopération et à des indicateurs. C’est comme ça que Ben Laden a été retrouvé. Nous n’avons pas besoin de ce système délirant d’espionnage. Mais cette idée n’a pas le vent en poupe. Obama dirige mieux l’empire américain que Bush. Cependant il est prisonnier du système : les États-Unis étaient sur le point d’aller en Syrie, même si les Américains n’y étaient pas favorables. Le gouvernement, Wall Street, les médias, tout était en place.

Même si nous n’avions pas les preuves de l’utilisation d’armes chimiques par les troupes de Bachar El-Assad. Nous dépendons d’une économie militaire. Nous sommes très forts militairement grâce à toutes nos bases à l’étranger. Aucun autre pays n’a autant de bases militaires, à part la Chine. C’est une situation délirante. Le problème, avec ce système, est sa domination sur tous les plans : aérien, terrestre, maritime, spatial, numérique. Si un nouveau Bush prend le pouvoir, un McCain, ou un idiot comme Romney, il utilisera à fond cette puissance. A quoi bon ? Déstabiliser la Libye était une grave erreur qui a des conséquences désastreuses dans toute l’Afrique comme on le voit au Mali. S.V. : Y a- t-il une chance pour que les États-Unis deviennent un jour plus magnanimes et humanistes ? Oliver Stone : Les États-Unis devraient être moins crispés et laisser d’autres puissances émerger : la Chine, la Russie, l’Iran, le Venezuela, le Brésil. Ce sont des pays puissants, des économies régionales qui peuvent contribuer à l’équilibre du monde. Je crois en un monde multiculturel. Les ÉtatsUnis veulent une puissance unilatérale conforme à la doctrine néoconservatrice. Ils pensent de manière binaire : si ce n’est pas nous qui contrôlons le monde qui le fera ? Les Chinois ou les Russes. Nos dirigeants le craignent. Mais c’est une manière stupide d’envisager l’avenir à mon avis. Une vision unilatérale : nous seuls, en première position. Je ne crois pas qu’on puisse toujours être le premier. Je ne crois pas que ce soit une bonne chose non plus. La première puissance doit se montrer généreuse et partager. C’était la vision de Roosevelt.


LE CAHIER MÉMOIRE

le réveil

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des combattants

Pour l’amitié, la solidarité, la mémoire, l’antifascisme et la paix

ÉDITO Par Paul Markidès

Juillet 1942

Rafle du Vél’ d’Hiv : 13 000 sacrifiés J’étais, on le comprendra, un petit garçon de 9 ans en juillet 1942. De la fenêtre du 4e étage du salon salle d’attente du spécialiste gastro-entérologue où j’attendais mon tour avec ma mère et ma sœur, rue Blanche dans le IXe arrondissement de Paris, j’ai assisté aux arrestations. Ma mère essayait de me ramener près de son siège, mais je refusais de lui obéir et lui demandais de venir près de moi, car je voyais des autobus de la RATP arrêtés dans la rue et des policiers français qui sortaient des immeubles d’en face en poussant brutalement des hommes, des femmes, des enfants, des vieilles

personnes et les obligeaient à monter dans ces autobus. C’est le médecin sortant de son cabinet pour nous accueillir qui vint me rejoindre et déclara : « Je vais te soigner, mais toi, ta maman et ta petite sœur vous resterez ici ce soir car, à la façon dont ils s’y prennent, ils seraient capables de vous arrêter à cause de votre nom d’origine étrangère. Ils arrêtent aujourd’hui tous les juifs qu’ils trouvent à Paris. » Ce médecin fait partie de ces femmes et des ces hommes courageux qui réussirent à cacher ou à éloigner de Paris 9 000 juifs sur les 30 000 que le sinistre préfet Bousquet et la nazi Oberg

Édité par le Réveil des combattants - 2 place du Méridien - 94807  Villejuif - Tél. 01 42 11 11 12

voulaient interner ce jour-là. Ils en ont tout de même pu faire arrêter 13 000 dont 4 000 enfants qui furent d’abord internés dans les camps de Pithiviers, Beaune-la-Rolande et Drancy, séparés de leurs parents, notamment de leur mère, et ensuite transportés en Allemagne, dont la plus grande partie à Auschwitz. Nous connaissons malheureusement la suite. Nous ne pouvons rester silencieux devant de telles activités, nous combattons pour ne pas les voir se renouveler et nous nous inclinons devant la mémoire de ces 13 000 sacrifiés.

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LE RÉVEIL dossier

16 juillet 1942

La rafle du Vél’ d’Hiv A l’aube du 16 juillet 1942 débute à Paris la rafle du Vél’ d’Hiv. Elle voit l’arrestation par surprise de plus de treize mille juifs parisiens de 2 à 60 ans, tous juifs apatrides (notamment les juifs anciennement Allemands, Autrichiens et Polonais. La plupart sont déportés au camp d’extermination d’AuschwitzBirkenau. Quelques dizaines en reviendront… A l’origine de ce crime contre l’humanité, il y a le projet hitlérien d’arrêter un grand nombre de juifs dans toute l’Europe occupée. En France, jalouse de ses droits, l’administration, tardivement informée, veut dans certaines limites garder la maîtrise de l’opération. C’est ainsi que sont mobilisés à Paris 7 000 policiers et gendarmes sous les ordres du délégué en zone nord, René Bousquet, jeune et efficace fonctionnaire du gouvernement de Vichy.

La rafle 13 152 personnes sont appréhendées par la police française les 16 et 17 juillet 1942, y compris 4 000 enfants de moins de 16 ans qu’il n’avait pas été initialement prévu de déporter. C’est beaucoup… et néanmoins deux fois moins que le quota fixé par les Allemands et la préfecture de police ! Les actes de solidarité heureusement n’ont pas manqué : quelques policiers ont laissé fuir leurs victimes, des concierges, des voisins, des ano14 -

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nymes ont ouvert leurs portes et caché des juifs… Embarqués dans des autobus, les personnes seules et les couples sans enfants sont convoyés vers le camp de Drancy, au nord de Paris. Les familles avec enfants sont, quant à elles, dirigées vers le Vélodrome d’Hiver, rue Nélaton, dans le XVe arrondissement de Paris (aujourd’hui disparu). Plus de 8000 personnes, dont une majorité d’enfants, vont s’y entasser pendant plusieurs jours, parfois jusqu’au 22 juillet, dans des conditions sordides : pas de couchage, ni nourriture, ni eau potable, avec un éclairage violent jour et nuit, au milieu des cris et des appels de haut-parleurs. Seuls trois médecins et une dizaine d’infirmières de la Croix rouge sont autorisés à intervenir. Les familles du Vél’ d’Hiv sont transférées de la gare d’Austerlitz vers les camps d’internement de Pithiviers et Beaune-la-Rolande, dans le Loiret. Au mois d’août suivant, les mères sont enlevées à

leurs enfants par les gendarmes et convoyées vers les camps d’extermination de Pologne. Les enfants seront à leur tour envoyés deux semaines plus tard à AuschwitzBirkenau qui, depuis le début juillet, s’est transformé de camp de travail forcé en camp d’extermination à l’échelle industrielle. Aucun n’en reviendra. Les internés de Drancy prennent également le chemin d’Auschwitz-Birkenau. Quelques dizaines tout au plus reviendront de l’enfer. La rafle accentue la collaboration entre Vichy et l’occupant allemand dans le domaine de la « question juive ». Mais elle entraîne aussi un début de fracture dans l’opinion française, jusque-là massivement indifférente ou attentiste. Peu à peu, certains citoyens basculent dans la Résistance, plus ou moins active ; d’autres, à l’inverse, se radicalisent et basculent dans l’antisémitisme et la collaboration. Il a fallu attendre le 16 juillet 1995 pour qu’à la faveur d’un très beau et très émouvant discours, un président, Jacques Chirac, reconnaisse officiellement « que ces heures noires souillent à jamais notre histoire et sont une injure à notre passé et à nos traditions. Oui, la folie criminelle de l’occupant a été secondée par des Français, par l’État français ».


dossier LE RÉVEIL

La rafle du 16 juillet 1942 Annette Muller A la maison, tout devenait oppressant. Maman était à la fois tendre et nerveuse. Papa était là. Tous deux parlaient à voix basse. J’entendais « grande rafle, tous les hommes juifs allaient être arrêtés, il faut se cacher ». Le 15 juillet, j’allais avec ma mère jusqu’au bureau de poste. Autour de moi, les gens, nombreux, entraient, sortaient. Longuement, ma mère avait téléphoné. Sa voix était précipitée, insistante, suppliante. Elle téléphonait à Bonnières, à tata Annette, pour qu’elle nous prenne rapidement en vacances, mais apparemment ses démarches n’eurent aucun succès. Inlassablement, maman a essayé de nous faire partir de Paris. En vain. Il était trop tard. Nous sommes revenus à la maison. Je pressais timidement ma main dans la sienne. Elle alla frapper chez Mme T, la concierge. Souvent ma mère coiffait sa fille, dans la petite loge, près de la table recouverte d’une toile cirée aux carreaux bleus et blancs. Au lendemain de la rafle, Mme T a pillé l’appartement de mes parents, édredons, couvertures, vêtement et vaisselle, ne laissant au fond d’un tiroir qu’une photo, celle prise en 1940 par un soldat allemand. Le soir, mon père et le père de Rachel sont allés se cacher chez Mme Fossier, place de Guignier. Rachel est venue avec nous à la maison. Nous avons très bien mangé. Du boudin avec de la purée. Depuis ma jaunisse du début de l’année, je n’avais pas le droit d’en manger, mais cette fois maman n’a rien dit et je me suis régalée de boudin autant que j’en ai voulu. Nous sentions que c’était

une soirée importante, comme les soirées de fête, sauf que papa et celui de Rachel étaient absents. J’étais contente que Rachel dorme à la maison. On allait pouvoir se faire des confidences. Mes frères se sont couchés tous trois dans le lit près du mur, et Rachel et moi, nous nous sommes pelotonnées dans l’autre, sous la couverture chaude et verte, ma poupée Marie-Claire entre nous. Je lui confiais tous mes projets. « Rachel, Rachel, écoute-moi », disais-je. On a parlé tard dans la nuit et, enfin on s’est endormies. Soudain j’ai entendu des coups terribles contre la porte. On s’est dressées le cœur battant. Les coups ébranlaient la porte et résonnaient dans la maison. Ça tapait fort, dans mon cœur, dans ma tête. Je tremblais de tout mon corps. Deux hommes sont entrés dans la chambre, grands, avec des imperméables beiges. « Dépêchez-vous, habillez-vous », ont-ils ordonné. « On vous emmène. » Brusquement, j’ai vu ma mère se jeter à genoux, se traînant, enserrant les jambes des hommes beiges, sanglotant, suppliant : « Emmenez-moi, mais je vous en prie, ne prenez pas mes enfants. » Eux la repoussaient du pied. Je regardais ma mère. J’avais honte. Ma mère ! Si belle, si grande, si forte, ma mère qui chantait et riait, et la voila vautrée par terre, pleurant et suppliant les hommes beiges. Les inspecteurs ont relevé maman. « Allons, madame, ne nous compliquez pas la tâche et tout se passera bien. » Ma mère a étendu un grand drap par terre et, pêle-mêle, y a mis du linge, des vêtements. Ses gestes étaient saccadés, affolés. Elle remplissait

Extraits du livre d’Annette Muller, La petite fille du Vel d’Hiv - Éditions Denoël - 1992.

16 juillet 1942 : les autobus devant le Vél’ d’Hiv

le drap, en sortait des affaires, les remettait, nouait les quatre coins. « Dépêchez-vous », criaient les inspecteurs. Elle a voulu prendre des légumes secs. « Mais non, pas la peine », ont dit les hommes, « prenez juste deux jours de nourriture, il y en aura là-bas. » Moi je pensais, là-bas, c’est une prison, un grand trou noir, où on enfermait les juifs. Qu’allait-il se passer ? Je voulais savoir. Maman a dit : « Il faut que je coiffe Annette. Elle ne peut pas partir comme ça. » Mais on ne trouvait pas le peigne. Curieusement, un des inspecteurs m’a dit : « Va acheter un peigne à la mercerie. » Son regard plongeait dans le mien : « Tu reviens tout de suite, hein ? » Dans la rue, des juifs, portant de gros ballots, marchaient vite, poussés par des inspecteurs. Je reconnus Joseph le rouquin, des policiers bousculaient brutalement sa mère. Des gens, aux fenêtres, regardaient, certains

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applaudissaient bruyamment. La mercière était très vieille. Elle m’a dit : « Sauve-toi, ne retourne pas chez toi. » Mais où aller ? J’ai payé, pris mon peigne et j’ai couru rejoindre ma mère et mes frères à la maison. Les ballots étaient prêts. Les tiroirs ouverts, les lits défaits. Marie-Claire était couchée sur ma couverture verte. Je l’ai prise dans mes bras. J’ai dit : « Je veux emmener Marie-Claire, ma poupée, dans la prison, avec moi ». L’inspecteur beige a crié : « Tu vas la laisser là. » J’ai pleuré : « Je veux emmener Marie-Claire avec moi. » L’inspecteur me l’a arrachée des bras et jetée sur le lit. Je me suis tue, effrayée. Nous sommes passés dans le couloir, maman portait un balluchon sur l’épaule, Henri et Jean en tenaient un autre. Ma mère a désigné Rachel : « Ses parents me l’ont confiée, elle n’est pas juive, per16 -

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mettez-moi de la laisser chez Mme T, la concierge. » Les inspecteurs ont accepté. Depuis, sans cesse, je revois le couloir de la maison, je revois les tiroirs ouverts, les lits défaits, les vêtements épars, la couverture verte et, couchée dessus, les yeux fermés, Marie-Claire ma poupée. J’entends la porte qui se referme et nous descendons l’escalier en silence, portant les balluchons de drap blanc, les inspecteurs fermant la marche. Longtemps, longtemps, en rêve, j’ai descendu les escaliers de la maison et il me semblait qu’il suffirait que je les remonte pour que tout recommence comme avant : la maison chaude, le bruit des machines à coudre et nos rires joyeux. On nous a conduits dans une salle, tout en longueur, où étaient installées des grandes tables. Làdedans c’était l’enfer. La puan-

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teur, les gémissements, les hurlements, des gens entassés partout, piétinant les balluchons sales. Un brouhaha hallucinant. Certains, allongés sur les tables, étaient secoués de convulsions, d’autres vomissaient, des mères appelaient leurs enfants qui couraient dans tous les sens. Les portes étaient gardées par les policiers en pèlerine et bâton blanc. Mes frères et moi, nous tenions serrés près de maman. Elle s’est approchée d’une porte de sortie et a parlé à un policier. Il avait un visage sympathique avec des yeux ronds étonnés. Profitant du désordre, avec l’aide du policier, ma mère a pu faire évader Henri et Jean, âgés de dix et onze ans. Portant leur balluchon de drap blanc, ils avaient l’air de garçons se rendant au lavoir. Michel et moi, trop jeunes pour nous débrouiller, sommes restés avec maman. Poussant et bouscu-


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lant, on nous a fait grimper dans des autobus où, comprimés les uns contre les autres, on essayait de se rapprocher des vitres pour regarder la rue. Nous sommes arrivés au Vél’ d’Hiv. L’entrée ressemblait à celle du Cirque d’Hiver où, l’année précédente, j’avais été, avec ma mère, voir BlancheNeige et les sept nains. En larmes, j’avais enlacé ma mère : « Maman, maman, Blanche-Neige n’est pas morte pour de vrai, elle fait semblant ? » Je n’avais été consolée que lorsqu’elle m’avait expliqué que les acteurs jouaient la vie et la mort et que, dans les coulisses, ils ressuscitaient. Nous étions installés sur des gradins, pressés contre d’autres gens, appuyant la tête sur les ballots ou les valises. En bas, sur la grande piste, on voyait des boxes et des gens autour qui gesticulaient. On entendait un bourdonnement de voix, comme une clameur discontinue, et sans cesse on voyait ces mouvements désordonnés de la marée humaine sur les gradins. Au milieu du bruit confus, toute la journée, des haut-parleurs appelaient des noms. On disait que cela signifiait la libération immédiate. Certains criaient : « Je suis français, on ne peut pas me garder » et, le cou tendu vers les haut-parleurs assourdissants, ils espéraient.

Michel et moi avions été déclarés français par maman, en 1936, devant le juge de paix, mais maman, comme papa, n’étaient pas naturalisés. Couchée sur le gradin, je voyais les grosses lampes suspendues au-dessus des têtes, les cous tendus vers les haut-parleurs, et, bizarrement, j’attendais que le spectacle commence, comme au cirque, l’an passé. Le bruit allait cesser, les globes lumineux s’éteindre et de nouveau, peutêtre, Blanche-Neige allait apparaître. Cependant, Michel et moi avions soif. Nous voulions aller aux cabinets. Mais impossible de passer dans les couloirs de sortie et, comme les autres, nous avons dû nous soulager sur place. Il y avait de la pisse et de la merde partout. J’avais mal à la tête, tout tournait, les cris, les grosses lampes suspendues, les haut-parleurs, la puanteur, la chaleur écrasante. Assise près de nous sur les gradins, une femme très belle serrait un petit garçon de deux ans dans ses bras. Un garçon aux boucles brunes, au teint mat délicatement rosé. Je voyais sa mère l’enlacer sauvagement, couvrir son visage de baisers. Je pensais : comme elle l’aime. « C’est Henri, mon fils », a-t-elle dit à ma mère. Elle avait sur elle des photos de sa famille.

Elle les a montrées à maman. Sur l’une d’elles, une fillette avait les mêmes traits que moi. « C’est le sosie d’Annette », a-t-elle dit. Je touchais mes joues, mon front. Ça me faisait un effet étrange d’apprendre qu’une autre fillette puisse avoir mon visage, comme si on me volait mon identité. Il n’y avait plus rien à boire et à manger. Un jour, des femmes au voile bleu sur la tête ont distribué de la nourriture. Au milieu des cris et de la bousculade, on nous donne une madeleine et une sardine à la tomate. J’ai grignoté le dessus bombé de la madeleine en laissant fondre lentement les miettes sucrées dans ma bouche, j’ai mangé la sardine en léchant d’abord la tomate qui la recouvrait. C’était délicieux. Je ne me souviens pas avoir mangé autre chose au Vél’ d’Hiv . Rien d’autre. Après nous avons eu très soif. Les lèvres et la langue étaient desséchées, mais il n’y avait rien à boire. Parfois, les haut-parleurs grondaient après les enfants : « Il est interdit de courir sur les pistes. » C’était devenu le grand jeu du Vél’ d’Hiv, les enfants faisaient la course, montant et descendant sur les pistes cyclables en pente. Les mères suppliaient de rester calmes, mais les enfants recommençaient, grimpant et descen-

Râfle d’août 1941 : les juifs arrêtés seront internés au camp de Drancy LE RÉVEIL - N°800 - février 2014

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dant en poussant des cris joyeux. Sur les gradins, près de nous, une femme s’est subitement affaissée. Elle était morte. J’avais de plus en plus mal à la tête. J’étais fatiguée, tout se brouillait. La fièvre me dévorait. Je me débattais en gémissant : « Les lions, les lions du cirque vont me manger. » Je me suis retrouvée, avec Michel et ma mère, sur le terre-plein du Vél’ d’Hiv, couchée dans un box. En face, un autre lit de camp était occupé par une femme qui restait immobile, sans parler. Michel a dormi à mes pieds et ma mère, par terre, dans l’étroit passage qui nous séparait de la dame aux yeux fermés. C’était mieux que sur les gradins, où on était obligé de se tenir recroquevillé près des balluchons. Ma fièvre était tombée. Avec Michel, nous allions nous promener le long de la piste centrale. Sur un des côtés, un espace était réservé à l’infirmerie. Des femmes au voile foncé allaient de l’un à l’autre. Il y avait un amas de corps nus, allongés par terre, pleurant, soupirant, gémissant, toussant. J’aperçus un homme décharné, aux yeux révulsés, de ses 18 -

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lèvres s’échappait un râle rauque et monotone. Son corps nu était tout blanc avec, entre ses jambes maigres, son sexe hideux, au milieu de poils noirs et raides, qui se perdaient dans son ventre creux. Je m’approchai, fascinée. C’était M. G., je le reconnaissais. Le paralytique aux jambes recouvertes de la couverture écossaise, assis dans son fauteuil, sa femme et

ses nombreux enfants s’empressant respectueusement autour de lui. Et le voilà allongé par terre, râlant, les yeux révulsés. Toute mon enfance basculait devant ce corps nu, écartelé. J’avais la révélation d’un monde d’adultes, sales, malades et pitoyables. Je les plaignais mais, en même temps, je les méprisais, comme lors du matin du 16 juillet, quand j’avais vu ma mère suppliante se traînant à genoux devant les policiers beiges. On a remis à ma mère un insigne qu’elle m’accrocha sur la poitrine. L’apercevant, une infirmière se mit à rire en me désignant du doigt à une de ses collègues. Je ne comprenais pas pourquoi. Puis, on nous a fait monter dans des camions pour nous conduire à Beaune-la-Rolande. D’autres partaient pour Pithiviers. On disait : « Ils ont de la chance, tous ceux de Pithiviers seront libérés. » C’était une journée ensoleillée. On respirait à pleins poumons après ces jours enfermés dans l’air puant et confiné.


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Un document bouleversant et accablant « C’est ignoble. On voudrait faire silence autour de ce crime épouvantable ! » Lettre d’une jeune assistance sociale à son père. Au Vél’ d’Hiv, 12 000 juifs sont parqués, c’est quelque chose d’horrible, de démoniaque, quelque chose qui vous prend à la gorge et vous empêche de crier. Je vais essayer de décrire le spectacle, mais ce que tu vois déjà, multipliele par mille, et tu n’auras seulement qu’une partie de la vérité. En entrant, tu as d’abord le souffle coupé par l’atmosphère empuantie et tu te trouves dans ce grand vélodrome noir de gens entassés les uns contre les autres, certains avec de gros ballots déjà salis, d’autres sans rien du tout. Ils ont à peu près un mètre carré d’espace chacun quand ils sont couchés. Les WC qu’il a eu au Vél’ d’Hiv (tu sais combien ils sont peu nombreux) sont bouchés ; personne pour les remettre en état. Tout le monde est obligé de faire ses déjections le long de murs. Au rez-de-chaussée sont les malades. Les bassins pleins à côté d’eux, car on ne sait pas où les vider. Quant à l’eau, depuis que je suis là-bas, je n’ai vu que deux bouches d’eau (comme sous les trottoirs), auxquelles on a adapté un tuyau de caoutchouc. Inutile de te décrire la bousculade. Résultat : les gens ne boivent pas, ne peuvent pas se laver. Le ravitaillement : une louche de lait par enfant de moins de neuf ans (et encore tous n’en ont pas), deux tartines épaisses de 2 cm de gros pain pour toute la journée (et encore tous n’en ont pas) ; une louche de nouilles ou de purée pour les repas (et encore tous n’arrivent pas à en avoir). Cela va encore, car les gens ont des provisions de chez eux, mais

d’ici quelques jours, je ne réponds plus de rien. L’état d’esprit des gens, de ces hommes, femmes et enfants entassés là est indescriptible. Des hurlements hystérique, des cris : « Libéreznous ! », des tentatives de suicide. Il y a des femmes qui veulent se jeter du haut des gradins ; elles se précipitent sur toi : « Tuez-nous, mais ne nous laissez pas ici », « Une piqûre pour mourir, je vous en supplie », et tant d’autres, et tant d’autres. On voit ici des tuberculeux, des infirmes, des enfants qui ont la rougeole, la varicelle. Les malades sont au rez-de-chaussée ; au milieu se trouve le centre de la Croix rouge. Là, pas d’eau courante, pas de gaz. Les instruments, le lait, les bouteilles pour les tout-petits (il y en a qui ont treize mois), tout est chauffé sur des réchauds à métal ou à alcool. Pour faire une piqûre, on met des heures. L’eau est apportée dans des laitières plus ou moins propres. On tire l’eau avec des louches. Il y a trois médecins pour 15 000 personnes et un nombre insuffisant d’infirmières. La plupart des internés sont malades (on est même allé chercher les opérés de la veille dans les hôpitaux, d’où éventrations, hémorragies… J’ai vu aussi un aveugle et une femme enceinte). Le corps sanitaire ne sait où donner de la tête ; de plus, le manque d’eau nous paralyse complètement et nous fait négliger totalement l’hygiène. On craint une épidémie. Pas un seul Allemand ! Ils ont raison. Ils se feraient écharper. Quels lâches de faire faire leur sale besogne par des Français ! Ce sont des gardes

mobiles et des jeunes des « chantiers de jeunesse » qui font le service d’ordre. Inutile de te dire ce qu’ils pensent. Nous - assistantes sociales et infirmières - avons reçu comme consigne de nos monitrices : « Surtout ne racontez rien de ce qui se passe ici au-dehors. » C’est ignoble. On voudrait faire silence autour de ce crime épouvantable. Mais non, nous ne le permettons pas. Il faut qu’on le sache. Il faut que tout le monde soit au courant de ce qui se passe ici.

Le maréchal Pétain est informé, mais laisse faire La direction du Secours national, organisme officiel placé sous le parrainage direct du maréchal, lui adresse un rapport, daté du 20 juillet, sur l’action d’aide aux « juifs étrangers arrêtés le 16 juillet » : « Le Secours national - dit le rapport - a fait venir dès vendredi dixhuit cuisines roulantes et a pu distribuer une nourriture sommaire : un peu de café et, une fois pas jour, un peu de nouilles et des haricots que les détenus recueillaient dans leurs mains faute de récipients. » Les responsables du Secours national n’ignorent pas que les internés seront déportés et semblent inquiets devant le sort des enfants : « Quand les juifs seront emmenés à Drancy, le tri sera opéré pour envoyer les parents en wagons plombés par cinquante, après avoir été séparés de leurs enfants. La question des enfants, au nombre de quatre mille, se posera prochainement. Ils ne peuvent être, d’une façon immédiate, pris en charge par l’Assistance publique. »

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Le sort des juifs sous l’occupation Jean Defrasne Au printemps 1942, les responsables de la police en France sont : Bousquet, secrétaire général de la police de Vichy, Darquier de Pellepoix et, du côté allemand, Knochen, Hagen, Lischka. Dannecker note : « Bousquet déclare que le maréchal Pétain, chef de l’État, aussi bien que le président Laval se sont déclarés d’accord au cours du récent Conseil des ministres pour que tous les juifs apatrides de zone occupée et de zone libre soient déportés pour commencer. » Le nazi Oberg était le chef de la Gestapo. Laval espérait sans doute, en livrant les juifs étrangers, éviter la déportation des juifs français. Mais les Allemands avaient fait savoir qu’ils voulaient frapper tous les juifs sans exception. Bousquet et son correspondant à Paris, Jean Legay, furent chargés de fournir les moyens de l’opération « Vent Printanier ». L’objectif était l’arrestation de 22 000 juifs. Les 16 et 17 juillet, 9 000 policiers,

gendarmes et gardes mobiles français, utilisant le fichier de la préfecture de police, parvinrent à arrêter 13 000 personnes. Bien qu’un grand nombre de juifs, prévenus, aient pu échapper à la rafle, les victimes du coup de filet, 3 095 hommes, 5 885 femmes et 4 000 enfants furent internés à Drancy et au Vélodrome d’hiver dans des conditions effroyables. Les Allemands étaient prêts à laisser les enfants, mais Laval les en dissuada. Dannecker constate : « La question des enfants juifs en zone occupée ne l’intéresse pas. » Pour faire nombre, pour éviter des complications, Laval insista pour la déportation des enfants qu’Eichmann accepta le 20 juillet. En zone libre, les arrestations des 26-28 août portent sur 10 522 juifs. Laval, marchandant avec Oberg, a dit qu’il ne pouvait pas livrer les juifs « comme dans un Prisunic ». Il a refusé la dénaturalisation massive des juifs. Il a justifié cependant la déporta-

Extrait du livre de Jean Defrasne, Histoire de la collaboration, Editions PUF.

Les juifs de la zone occupée devaient remettre leurs postes de radio aux commissariats de police. L’accès à l’information leur était interdit.

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tion, déclarant à Radio-Paris le 14 septembre : « Rien ni personne ne pourra nous détourner de la politique qui consiste à épurer la France d’éléments indésirables sans nationalité. » A partir du 15 septembre, un train d’un millier de déportés part chaque jour de Drancy pour Auschwitz. Sur les 76 000 juifs envoyés de France dans les camps de la mort, 42 500 l’ont été en 1942. La multiplication des rafles, auxquelles procédaient des policiers français pour le compte des Allemands, a suscité dans le pays une vive émotion. Et pourtant, l’opinion ne savait pas encore le sort réservé aux juifs déportés. On parlait de camps de travail en Pologne (à Pitchipoï, disait-on). Lorsque la vérité a été connue peu à peu à l’automne, on a refusé d’y croire. La situation des juifs en zone occupée s’était aggravée avec le port de l’étoile jaune. Il leur était interdit de fréquenter les lieux publics, ils n’avaient pas droit au téléphone, même s’ils étaient médecins, ils devaient faire leurs achats à certaines heures de l’après-midi, alors que les magasins n’avaient souvent plus rien à vendre. Seuls ceux qui se trouvaient dans la petite zone d’occupation italienne vivaient dans des conditions acceptables. Après l’invasion de la zone Sud, la lutte contre les juifs prit une nouvelle extension. Hagen poussa Bousquet à appliquer strictement une loi du 9 novembre qui interdisait le déplacement des juifs étrangers. Ceux-ci ne devaient pas pouvoir échapper à la déportation. C’est aussi à ce moment, qu’en vertu d’une loi du 11 décembre la mention : Juif fut apposée sur les cartes d’identité et d’alimentation. Le gouvernement de Vichy a donc apporté un appui indiscutable à l’occupant nazi.


Vie de l’arac LE RÉVEIL

Champigny (94) Les 9 et 10 novembre derniers a eu lieu à Champigny la traditionnelle foire aux trocs et aux cochons, foire qui existe depuis 1543. Malgré un samedi maussade, la foule était présente. Le Comité pour le Village de l’Amitié Van Canh Vietnam était présent avec de nombreux objets de l’artisanat vietnamien en vente au profit des enfants et des anciens combattants touchés par les défoliants, notamment l’agent orange déversé par millions de tonnes par les Américains pendant la guerre du Vietnam. De nombreux Campinois et d’autres nous ont rendu visite au stand du Comité pour discuter sur l’objectif de notre initiative et certains sont repartis avec un objet pour aider le Village. En 2014, nous serons encore présents et nous comptons sur vous pour venir nous rencontrer sur notre stand.

Rognac (13) Le bureau de l’ARAC de Rognac a souhaité l’anniversaire d’une adhérente qui a eu 100 ans, le 13 décembre 2013. Nous lui avons offert une plante fleurie et quelques gourmandises.

Dordogne (24) Un nouveau drapeau au Lardin Jeudi 23 octobre, en présence de JeanPaul Lachaux, président départemental de l’ARAC, la municipalité du LardinSaint-Lazare, représentée par Daniel Aymard, et le Conseil général par Serge

Eymard ont remis le drapeau de l’ARAC à André Monteil, président de la section locale. Les collectivités territoriales ont été remerciées pour leur participation à l’achat de ce nouveau drapeau.

Trélissac : hommage aux porte-drapeaux La cérémonie s’est déroulée le 19 octobre à Trélissac. C’est dans une ambiance pleine d’émotion et d’amitié que Jean-Paul Lachaux, président départemental de l’ARAC, a remis à chaque

porte-drapeau un diplôme d’honneur, une paire de gants et un caban orné du logo de l’ARAC. Après la photo de groupe, un repas fraternel a réuni tous les participants.

Aisne (02) C’est devant une nombreuse assistance d’adhérents, d’élus et de présidents d’associations voisines que s’est tenue, samedi 11 janvier, l’assemblée générale de l’ARAC du Soissonnais. Après l’hommage aux défunts et l’ordre du jour habituel, le président Jean-Noël Grebert a remis la médaille de l’ORMCM bronze à Jean Fabre, André Velu, Daniel Herillon et la médaille d’or à Eugène Boutillier.

Six diplômes d’honneur de porte-drapeau ont également été décernés à Clément Bardin, Guy Villefroy, JeanClaude Maurice, Bernard Dumay, Yves Sarrasin et Jean-Noël Grebert. Pour terminer, Jean Fabre a reçu la médaille du 95e anniversaire de l ‘ARAC ainsi que la médaille commémorative Algérie. Tout le monde s’est retrouvé autour du verre de l’amitié.

Le Président Louis Delaunay

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Photo : © Alex Bonnemaison

LE RÉVEIL Vie de l’arac

Val-de-Marne (94) Le 15 décembre, une classe de primaire de Vitry-sur-Seine, lauréate du Concours des petits artistes de la mémoire, a ravivé la flamme à l'Arc de triomphe, accompagnée de la municipalité. Notre association était représentée par Raphaël Vahé, président national, Pierre Bussone, Secrétaire National, Jacques Verrier, Président Départemental ARAC 94 et secrétaire National. Les élèves, impressionnés par l'événement, n'en n’ont pas moins accompli avec beaucoup de respect et d'attention ce moment de recueillement.

Alpes-Maritimes (06) et Nice La présidente départementale de l’ARAC 06, Chantal PIPART, ainsi que le président de la section de Nice, René Pietropaoli, tiendront une permanence tous les jeudis après-midi de 14h à 17h (hors congés scolaires) à la Maison des combattants, au 36 boulevard Risso à Nice. Prévenir éventuellement au 06 13 68 17 23 ou au 04 93 56 39 58.

Merci à André Boulicault pour le complément d’informations suite au dossier du Réveil de janvier « Rendre justice au peuple allemand ». Ceux qui veulent se procurer le livre peuvent s’adresser à : AFMD DT 30, 33 rue F. Boissier 30600 Vauvert. Tel : 04 66 51 02 26 afmd.delegation30@orange.fr La rédaction du Réveil

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Voyage au Vietnam du 23 mars au 9 avril 2014

Il reste encore quelques places ! Contactez Jocelyne Commaret ou Alain Bonnet, au 06 82 12 29 69


VIE DE L’ARAC LE RÉVEIL

ARAC Dijon (21) A l’initiative de l’ANCAC 21, l’ARAC 21, la Libre pensée 21 et Dijon, l’Institut d’histoire sociale CGT 21, le Mouvement de la paix de Dijon et 21, plus d’une centaine de personnes se sont réunies, en novembre dernier, place de la République pour demander à l’État de réhabiliter les fusillés pour l’exemple de 14-18. Pour le président de l’ARAC 21, ce serait « la première des honnêtetés que de faire en sorte que ceux qui ont été sortis des tranchées, jugés comme des chiens par des tribunaux d’exception, et exécutés dans l’heure, retrouvent pleinement leurs droits, tout comme leurs familles, et que leurs noms soient officiellement portés sur les monuments aux morts de la France »

Sainte-Geneviève-des-Bois (91)

Une section qui défend la mémoire L’ARAC de Sainte-Geneviève-des-Bois a tenu son assemblée générale le 18 janvier dernier, en présence de notre camarade Hervé Corzani, membre du Conseil national et de nombreux invités dont Mme Michelle Bouchon, maire-adjointe chargée des retraités et du travail de mémoire. A cette occasion, la section génovéfaine a mis l’accent sur deux éléments importants de notre mémoire : la commémoration officielle du 27 mai et le centenaire de 14-18. Pour le 27 mai, elle considère que cette commémoration ne doit pas se résumer au seul hommage à Jean Moulin. Il est essentiel qu’elle célèbre également la création du Conseil national de la Résistance et son programme porteur, dans une France exsangue, d’avancées sociales et de libertés encore en vigueur aujourd’hui et ce d’autant plus que des voix s’élèvent pour demander leur éradication. Deuxième point : pour l’ARAC, commémorer le centenaire de 14-18 doit être l’occasion d’un sérieux travail de mémoire. Le risque est grand de tom-

ber dans l’image d’Épinal. Ce serait faire injure aux poilus et à leurs familles que de ne pas montrer les origines, les causes et les conséquences de l’enfer qu’ils ont vécu. Une place particulière devra être accordée aux fusillés pour l’exemple.

Née dans l’enfer des tranchées, notre association est fondée à jouer un rôle de premier plan dans l’organisation et le déroulement des manifestations de ce centenaire. La section participe aux travaux de la commission ad hoc mise en place par la municipalité.

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LE RÉVEIL Vie de l’arac

Fléac-Linars (16) C’est en présence de son président départemental, Jean-Pierre Colas, que la section de Fléac-Linars a tenu son Assemblée générale le 18 janvier dernier, en cours de laquelle une adhésion a été faite. Le président de la section, JeanLouis Jouve, a noté que, même si un petit pas a été fait dû à l’assouplissement de la délivrance de la carte du combattant, le budget des ACVG est malheureusement en diminution.

Fréjus et Saint-Raphaël (83) Ce 18 janvier, le Comité d’entente et de liaison des associations patriotiques (CELAP) honorait comme chaque année ses porte-drapeaux. A cette occasion, notre président départemental et porte-drapeau, Bernard Barbieux, s’est vu remettre par le colonel Morelli (président du CELAP), la médaille de la ville de Fréjus, celle du CELAP et son diplôme de porte-drapeau (10 ans). Félicitations au président.

Rectificatif ARAC 13 Dans notre dernier numéro, quelques erreurs ou oublis concernant les légendes des photos. Toutes nos excuses au maire de Septèmes-les-Vallons, M. André Molono. La stèle Henri Barbusse à Berre-l’Étang a été financée par M. Serge Andreoni, sénateur-maire.

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LE RÉVEIL Vos droits

Quelle situation pour les veuves de guerre ? Les veuves de guerre sont les veuves dont le mari militaire est mort au combat ou des suites des blessures ou maladies y afférant. Et leur situation en matière de pension, de droit à réparation est différente de celle des veuves d’anciens combattants dont le mari n’était pas pensionné et qui ne peuvent bénéficier que du titre de ressortissante de l’ONAC (et des mesures y afférant).

Pension de veuve de guerre : 361,22 e à 597,40 e / mois Les conjointes survivantes (nouveau vocable remplaçant le terme de veuves) perçoivent des pensions dites « au taux normal » ou « au taux de réversion », selon la situation du mari défunt leur ouvrant le droit à pension. Le montant de celle-ci peut aller de 371,30 euros mensuels (taux de réversion pour les veuves de victime militaire de guerre ou hors guerre de moins de 40 ans donc OPEX) à 428,16 euros (veuve de victime militaire ou hors guerre ou victime civile de guerre, quel que soit leur âge, dont le droit découle de l’imputabilité du décès aux séquelles des blessures de guerre ou dont le conjoint était pensionné à 85 % avec allocation grand mutilé). Entre ces deux montants, 4 paliers selon le taux d’invalidité du défunt (60 %, 65 %, 70 %, 75 %) et l’âge de la veuve (moins ou plus de 40 ans). Soit une échelle de points d’indice servant au calcul du montant de la pension (de 312 à 515 multiplié par 13,92 e valeur actuelle du point PMI)

Supplément exceptionnel Le supplément exceptionnel porte la pension à 667 points d’indice (773,72 e mensuels) pour les veuves de déportés morts en déportation et de prisonnier du Viet-Minh morts en captivité, sans conditions d’âge et de ressources. Elles sont aujourd’hui peu nombreuses. Il concerne également les conjoints survivants d’au moins 50 ans ou in-

firmes remplissant les conditions de ressources.

Majorations Des majorations de pensions s’appliquent à la réversion des conjointes de grands invalides, c’est-à-dire d’invalides à 100 % bénéficiaires de l’article L.18 (tierce personne pour subvenir à ses besoins), allocations grand invalide 5 bis a ou celle n°5 bis b qui s’applique aux aveugles, bi-amputés ou paraplégiques. Dans les 2 cas, peuvent s’ajouter l’allocation grand invalide n°8. Ces majorations concernent les veuves justifiant de 15 ans de mariage et de soins de l’invalide décédé, lequel bénéficiait de l’article L.18 (tierce personne) avec l’allocation 5 bis a (301,60 e mensuels) ou de l’allocation 5 bis b (aveugle

ou amputé de deux membres ou paraplégique, soit 406 e mensuels). De ce fait, la pension de réversion des veuves de grands invalides peut s’échelonner de 597,40 e par mois, à 1003,40 e, voire à 1 421,00 e/mois, si elle est veuve d’un grand invalide dont la pension était de 11 000 points d’indice minimum (12 760 e mois). Rappelons, pour mémoire, que lors de la mise en place des pensions de réversion en 1928 le taux de 500 points d’indice correspondait à l’époque à 50 % de la Pension militaire d’invalidité la plus élevée. Aujourd’hui ce forfait, même amélioré à 1003 e/mois souffre d’une disproportion aggravée : PMI à 15 000 points = 17 400 e mois, mais réversion de 1 003 seulement. D’où l’appel revendicatif des veuves de plus grands invalides. NB. : toutes ces observations sont, bien entendu, applicables également à tous les « veufs » conjoints survivants.

Relations administration / citoyen Enfin… une “Révolution” ! Le Parlement vient d’adopter par Le même texte prévoit également la un ultime vote de l’Assemblée mise en place d’un droit de saisine de l’administration par courrier électronationale, un projet de loi v isant à nique, lequel pourra avoir valeur de simplifier les relations administra- lettre recommandée avec accusé de réception. tion-citoyen. Ce projet restaure « un accord tacite » de l’administration lorsqu’elle n’aura pas répondu au bout de deux mois. La version, votée à l’unanimité des rares députés présents, avait fait l’accord entre députés et sénateurs en commission mixte paritaire. Qualifiée de « révolution » par plusieurs orateurs, la principale disposition du texte prévoit que « le silence gardé pendant deux mois par l’autorité administrative sur une demande, vaut décision d’acception » et non plus rejet. Le gouvernement doit décider, par décret, des exceptions à ce principe et a ajouté dans le texte que la sécurité nationale ne serait pas concernée par ce principe.

Enfin, ce même texte autorise le gouvernement à systématiser les échanges d’informations entre les administrations, afin d’éviter que les même informations ne soient demandées plusieurs fois aux citoyens et aux entreprises pour appliquer le principe “dites-le nous une seule fois”. Attendons avec impatience la parution des décrets des exceptions à ces principes, en espérant que celles-ci respecteront le sens et l’esprit de la loi et ne la dénatureront pas, comme cela s’est produit à de nombreuses reprises par le passé. Affaire à suivre de très près ! Jacqueline Thabeault-Alcandre LE RÉVEIL - N° 800 - février 2014

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LE RÉVEIL VOS DROITS

Quelle défense nationale ? Questions à Jean-Jacques Candelier, député du Nord, vice-président de la Commission de la défense nationale et des forces armées. La défense nationale, un champ d’intervention capital ? Nous avons besoin d’une armée. C’est le deuxième budget de l’État après l’enseignement scolaire. Pour les députés communistes-Front de gauche, la défense nationale est une mission régalienne. Nous n’acceptons pas les dérives en cours. La défense doit rester publique et nationale, soit l’inverse de la loi de programmation militaire.

Nos intérêts vitaux exigent-ils toutes ces interventions, notamment en Afrique ? Les interventions militaires sont toujours présentées sous la forme de l’évidence : il faudrait agir devant l’imminence des massacres. C’est une présentation tronquée, car la France est souvent pompier pyromane. Nous récoltons ce que nous semons. Personne ne peut nier le chaos qui règne en Libye et a déstabilisé le Mali. Nous exigeons la fin de la Françafrique. Nous devons respecter la souveraineté des peuples. Notre groupe a expliqué pourquoi notre pays n’était pas qualifié pour mener une énième opération en Centrafrique. La France n’a pas vocation à jouer le gendarme. Les interventions militaires n’ont jamais permis de répondre aux problèmes de fond qu’est la pauvreté. La situation catastrophique en Centrafrique est le résultat de décennies de domination néo-coloniale. L’éclatement du pays, le repli religieux ou tribal des populations sont le résultat de l’appauvrissement de ce peuple. Les intérêts des grands groupes ne se confondent pas avec l’intérêt des peuples. À l’occasion du débat sur l’intervention militaire en Centrafrique, le président de groupe UMP invita le Premier ministre à reconnaître que nos troupes ne sont 26 -

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pas là-bas pour de bons sentiments mais pour nos intérêts géostratégiques et économiques. Cela signifie-t-il que là où nous n’avons pas d’intérêts, les peuples peuvent mourir dans l’indifférence ?

Quel est notre rôle au sein du commandement intégré de l’OTAN ? En 2008, le groupe, présidé par JeanMarc Ayrault, avait déposé une motion de censure à l’occasion du retour dans le commandement intégré. Aujourd’hui, la France conserve le poste de supreme allied commander transformation et assure des responsabilités opérationnelles, au sein du grand quartier général et de l’état-major interarmées. La position du gouvernement Hollande vis-à-vis de l’OTAN constitue un recul. L’OTAN est une organisation du passé, qui nous coûte cher. Cette organisation se croit investie de la sécurité du monde, en lieu et place des Nations unies. C’est une survivance de la guerre froide. Son appétence pour le nucléaire tactique, la guerre préventive ou encore la défense antimissiles balistiques est un facteur de déstabilisation. Il y a une contradiction majeure entre la volonté affichée d’autonomie et de réactivité de nos forces et l’inscription de notre stratégie au sein de l’Alliance atlantique.

Le budget de l’armée est gelé. Quelles seront les conséquences pour les ayants droit et le droit à réparation ? C’est vrai, le budget de l’armée est gelé, mais c’est surtout les choix au sein de ce budget que nous contestons : priorité à l’armée de projection, sanctuarisation du nucléaire, externalisations, etc. Quant aux crédits consacrés à la réparation du monde combattant, ils diminueront de 78 millions en 2014. Sous Sarkozy, la baisse avait été de 447 millions. J’estime que les anciens combattants n’ont pas à être un gisement d’économies. À budget constant,

considérant les disparitions annuelles, on pourrait faire beaucoup plus. Nos principales revendications sont : rattrapage de la valeur du point de PMI ; relèvement de l’indice du plafond majorable des rentes mutualistes ; bénéfice effectif de la campagne double pour les anciens d’Afrique du nord ; création d’une allocation différentielle pour les anciens combattants les plus démunis ; relèvement du plafond de l’allocation différentielle au niveau du seuil de pauvreté européen et attribution de la carte du combattant aux militaires des OPEX avec 120 jours de présence, consécutifs ou non.

A-t-on les moyens de ce que vous avancez ? Nous n’acceptons pas la politique d’austérité et les attaques des droits qui en découlent. On peut économiser sur certaines dépenses militaires. Mais si l’on s’attaquait aux privilégiés et au capital, à la fraude et à l’évasion fiscale, nous ferions entrer dans les caisses plusieurs dizaines de milliards d’euros. La France est un pays riche.

Vous êtes mobilisés pour la réhabilitation des fusillés pour l’exemple ? À l’occasion de la célébration du centenaire de 1914-1918, il est impératif de réhabiliter de façon collective les fusillés pour l’exemple, victimes d’un système qui les a broyés. Les parlementaires communistes proposent une réhabilitation collective. Déjà sous la précédente législature, j’avais porté la proposition de loi et interpellé de multiples fois le ministre. A l’époque, on me répondait : réhabilitation au cas par cas. Avec l’arrivée de François Hollande à la présidence de la République, un espoir existait, car, président du Conseil général de Corrèze, il s’était prononcé pour la réhabilitation collective. Mais là, comme sur beaucoup de sujets, François Hollande oublie ses promesses et se coule dans les pratiques et positions de son prédécesseur. Interview réalisée par Hervé Corzani.


VOS DROITS LE RÉVEIL

Du nouveau pour les OPEX Un regard sur 66 ans d’interventions militaires françaises. La mise à jour du 29 novembre 2013 relative aux périodes reconnues combattantes et les territoires concernés apporte les précisions suivantes : - Afghanistan, pays et eaux avoisinantes. Opérations Héracles, Pamir, Endurnig, Freedom, Arès et Epidote : Périodes reconnues du 3 octobre 2001 au 2 octobre 2013 • Listes des unités combattantes de l’armée de terre et de la gendarmerie publiées jusqu’à la fin 2012 • Listes des UC de l’armée de l’Air à paraître au cours du 1er semestre 2014. - Côte d’Ivoire : Opération Licorne. Listes UC à paraître au cours du 1er semestre 2014. - République du Liban et Israël : Opérations Daman (FINUL) et Baliste : Période reconnue prolongée jusqu’au 31 août 2014 - République du Libéria : Mission des Nations unies au Libéria reconnue combattante du 1er mai 2011 au 30 avril 2013. - République démocratique du Congo : Opération Mamba, Monuc et Monosco reconnues du 2 juin 2003 au 1er juin 2013. - Somalie : République fédérale démocratique d’Ethiopie, de République de Somalie et ses eaux avoisinantes • African Mission in Somalia (Mission de l’Union africaine de Somalie) : 23 septembre 2008 au 22 septembre 2014 • Républiques de la Somalie, du Kenya, du Yemen et de Djibouti, le Sultanat d’Oman et leurs eaux avoisinantes ainsi que sur les eaux de la Mer Rouge • Opération Atalanta : 8 décembre 2008 au 7 décembre 2013. - Tchad et pays avoisinants, notamment le Cameroun : Opérations Tacaud, Silure, Manta, Épervier du 15 mars 1969 au 31 décembre 2013. • Ex-Yougoslavie : Forces multinationales en Ex-Yougoslavie, Kossovo, pays limitrophes et eaux avoisinantes • Opérations Trident, Salamandre, Astrée et Proxima : 1er janvier 1995 au 31 décembre 2013.

Rentes mutualistes AC Victoire, mais vigilance ! Le 27 septembre 2013, le gouvernement publiait en catimini un décret rabotant de 20 % les subventions d’État allouées depuis 1923 aux rentes mutualistes AC qu’il ramenait de 10 % à 40 % au lieu de 12,5 % à 60 %, avec l’aval de certaines mutuelles AC (CARAC, UMR) et, avançaitil, de certaines associations d’ACVG. Mais la très vive réaction des mutualistes AC et de certaines mutuelles et associations a amené l’Assemblée nationale à désavouer le gouvernement le 13 décembre et contraint celui-ci à reculer et à publier un autre texte (n° 2013-1307 du 27 décembre 2013) rétablissant, à compter du 1er janvier 2014, les subventions d’État à leurs taux initiaux. Une victoire incontestable sur un gouvernement qui, ces dernières années, n’avait guère reculé. Il faut en tirer les enseignements d’autant que, selon le ministre du Budget, la rente mutualiste serait un « dispositif des plus injustes ». Alors, vigilance ! Si cette attaque au droit à réparation a pu être contrée, c’est d’abord grâce à la mobilisation des mutualistes et à l’appui des députés. Pour sa part, la Mutuelle de l’ARAC a assuré une campagne de pétition qui reçut immédiatement des milliers et des milliers de signatures souvent accompagnées des copies de lettres adressées aux députés. Forte de ces soutiens, elle s’est adressée personnellement au Président de la République, au Premier Ministre, aux ministres concernés et à tous les députés et sénateurs.

Une victoire donc, qui prouve : - la permanence de l’attachement des ACVG à l’intégrité de droits à réparation inaliénable puisque relevant de la dette de la nation à leur égard, - la capacité des ACVG de réagir dans l’union, en dépit des hésitations et de

l’attitude équivoque (pour ne pas dire plus) de certaines mutuelles et associations d’ACVG, lorsque leurs acquis sont remis en cause, - la possibilité de développer une pression si forte sur les élus qu’ils sont obligés de se désolidariser du gouvernement, - l’obligation pour le gouvernement, dans les circonstances et le contexte qui en résulte, de reculer et d’annuler sa mesure scélérate. Ce n’est pas une mince affaire et plus d’un, des deux côtés, tant élus et gouvernement que mutuelles et associations d’ACVG, devrait y réfléchir en conscience pour l’avenir du mouvement. D’autant que, pour M. Cazeneuve (ministre du Budget) « la rente mutualiste AC est un dispositif des plus injustes et que, en remettant en cause les dispositifs qui sont parmi les plus injustes… on œuvre pour la justice » (intervention devant l’Assemblée nationale le 13 / 12 / 2013). Nous dénonçons avec force cette attaque intolérable qui tend à présenter les mutualistes AC comme des “nantis” au détriment des autres ACVG, alors que ce sont le plus souvent les moins aisés des ACVG qui cotisent pour une rente, selon leurs modestes ressources, afin d’améliorer aujourd’hui leur retraite mise en cause par la politique gouvernementale.

Alors vigilance Oui, vigilance, amis mutualistes, camarades anciens combattants et victimes de guerre. Bravo pour cette victoire significative qui montre que l’action unie et résolue peut faire reculer le gouvernement. Et continuons de veiller, dans l’union, à ce que nul, quel qu’il soit et de quelque bord soit-il, ne vienne remettre en cause ni le droit à réparation, ni ses institutions, tels l’ONAC, ses écoles de réinsertion professionnelle, ses maisons de retraite, ses services départementaux.

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LE RÉVEIL Vos droits

Commission nationale de la carte du combattant

La carte ATM « à cheval »

OPEX et carte « à cheval » La Commission nationale d’attribution de la carte du combattant s’est réunie à l’ONAC, aux Invalides à Paris, les 3 et 4 décembre dernier. André Fillère y a participé. • 2 911 cartes ont été attribuées : 25 AC 39/45 ; 18 Indochine ; 701 ATM dont 647 Algérie et 2 167 OPEX (détail des opérations à demander au Service juridique national). • 2 279 demandes ont été rejetées (208 AC 39/45 ; 48 Indochine ; 584 ATM ; 1 354 OPEX et 85 hors périodes homologuées). • En 2013, sur l’année, 31 337 dossiers ont été examinés, 6 525 rejetés et 24 773 cartes attribuées dont 8 869 à des personnes âgées de + 65 ans. • Dans le détail : - 39/45 : 172 cartes attribuées ; 903 rejets,

- Indochine : 213 cartes ; 106 rejets, - ATM : 8 066 cartes ; 1 387 rejets, - OPEX : 16 322 cartes ; 3 145 rejets, - hors période : 984 rejets.

OPEX • Depuis 1993, 70 456 cartes du combattant OPEX ont été attribuées, ainsi que 190 000 TRN. • Une liste mise à jour des territoires reconnus vient de paraître. • Un arrêté du 30 octobre paru au JO du 30 novembre a publié la liste des unités reconnues combattantes en Afghanistan jusqu’à fin 2012, pour l’armée de terre et la gendarmerie. • Devraient paraître au cours du 1er semestre 2014 la liste des unités combattantes de l’armée de l’air en Afghanistan, l’opération licorne et serval.

• La mesure est définitive. Elle a été adoptée le 17 décembre avec le vote global de la loi de finance 2014. • E lle concerne tous les militaires présents en Algérie, mais aussi au Maroc et en Tunisie (Afrique du Nord). • Peuvent en bénéficier tous ceux qui étaient sur le terrain avant le 2 juillet 1962, mais ne totalisaient pas les 120 jours de présence à cette date et les ont atteint (ou dépassé) après le 2 juillet 1962. • Cette mesure a pris effet au 1er janvier 2014. • Tous les ATM concernés par cette nouvelle disposition et dont la demande déjà déposée a fait l’objet d’un rejet, doivent obligatoirement faire une demande écrite individuelle de réexamen de leur dossier. Et ce, à partir du 1er janvier 2014, date à partir de laquelle cette demande est recevable.

NOS PEINES février 2014 Le Réveil des Combattants adresse aux familles et aux amis de nos camarades décédés ses sincères condoléances. AISNE (02) Gauchy : Michel DODRE, 78 ans, AC ATM. Hubert LEVENT, 78 ans, AC ATM. Claude MASCART, 79 ans, AC ATM. Désiré TRIPET, 80 ans, AC Indochine. ALLIER (03) Commentry : Henry COLLARD, 95 ans. Saint-Germain-des-Fossés : Pierre THONIER, Résistant. ALPES-MARITIMES (06) Nice : Roger ESTIOT, Résistant, déporté, Chevalier de la Légion d’Honneur, Médaille Militaire. BOUCHES-DU-RHÔNE (13) Cornillon-Confoux : Robert DAVID, Combattant pour la Paix. Marseille Centre : Roland BOTELLA, AC ATM. Jean FAURA, AC ATM.

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Fos-sur-Mer : Joseph BONSIGNOUR, 80 ans, AC ATM. Rognac : Jean ARNAUD, AC ATM.

Saint-Étienne : Jean MAGUERRE, 82 ans, AC ATM. Maurice André ROBERT, 74 ans, AC ATM.

DORDOGNE (24) Firbeix : Albert PASCAUD, Combattant pour la Paix. Saint-Priest : Gilbert BOISSARD, AC 39-45.

LOT-ET-GARONNE (47) Agen : Ode SEGUIN, Résistant. Layrac : Jean-Louis BENOIT, AC ATM.

HAUTE-GARONNE (31) Minimes : Antoine CARO, 79 ans, AC ATM.

NIÈVRE (58) Varennes-Vauzelles : Jean AFFLATET, AC ATM, secrétaire de la section. Lucien BONNOTTE, AC 39-45. Roger BOUILLOT, AC ATM. Jean-Pierre LUCIER, AC ATM. Laure TOURAIN, veuve.

GIRONDE (33) Bassens : Jean MATHIEU, 87 ans. ISÈRE (38) Bourgoin-Jallieu : Louis PACCAUD, 86 ans, AC 39-45. René UGOLINI, 87 ans, AC ATM. LOIRE (42) Saint-Chamond : Georges RUDLER, 81 ans.

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NORD (59) Feignies : René SAGEMAN, 91 ans, Résistant, AC 39-45. René THOMAS, 86 ans, Résistant, AC 39-45 et Indochine.

Solre-le-Château : Edouard VANGELUWE, 77 ans, AC ATM. PYRÉNÉES-ORIENTALES (66) Rivesaltes : Lucien FABREG, 85 ans, AC – 20 ans, porte-drapeau départemental. SAVOIE (73) Feissons : Robert SILVOZ, 91 ans, Résistant. HAUTE-SAVOIE (74) Seyssel : Joseph FAURAX, Combattant pour la Paix. SEINE-MARITIME (76) Le Havre : Claude CHAPPELIN, 83 ans, AC ATM. SEINE-ET-MARNE (77) Mitry-le-Neuf : Maurice GODART, AC 39-45. Montereau : Jean SEJOURNÉ, 91 ans, AC 39-45.

DEUX-SÈVRES (79) Niort : Mme Ginette PIOCHAUD, 88 ans, Résistante, Croix de guerre 39-45. TARN (81) Castres : Denis ADAM. VAR (83) Toulon : Christian SASIA. VIENNE (86) Chatellerault : Paul Raymond JAMAIN, 95 ans, Résistant. ESSONNE (91) Chilly-Mazarin : Antoine PALADINO, AC 39-45. SEINE-SAINT-DENIS (93) Montreuil : Michel MALGUY, 72 ans, AC ATM.


VOS DROITS LE RÉVEIL

Mutuelle I Meilleurs vœux 2014 L’ARAC et sa mutuelle ont le plaisir de sont revenues. vous présenter, par le biais du Réveil des Grâce à cette action commune, l’année combattants, leurs meilleurs vœux pour 2014 débute avec une bonne nouvelle : l’abrogation de ce décret scélérat du 24 cette nouvelle année. septembre. En effet, le 13 décembre, Ce changement de millésime nous donne le privilège d’effectuer un premier bilan l’Assemblée nationale a voté l’amendede nos actions 2013. Certes les « dor- ment n°406 obligeant le gouvernement meurs » nous diront « Peut mieux faire », à faire marche arrière. C’est ainsi que le mais les militants, disons-le avec fierté, 31 décembre 2013 est paru au Journal offin’ont pas à rougir de leur dévouement ciel le décret n° 2013-1307 du 27 décembre et de leur mobilisation tout au long de rétablissant les subventions de l’État de 12,5 % à 60 % à partir du 1er janvier 2014. l’année 2013. Ensemble, l’ARAC et sa Mutuelle ont Seules l’action et la mobilisation ont peragi pour faire abroger le décret du 24 mis d’obtenir cette victoire qu’est le resseptembre 2013 diminuant de 20 % les pect du droit à réparation. subventions de l’État sur les rentes mu- Alors 2014, année de Jaurès, année du tualistes, les ramenant de 10 % à 48 %. 70e anniversaire de la Libération et tant Des courriers accompagnés d’une péti- d’autres que nous n’oublierons pas, nous tion ont été adressés au Président de la démontre que le combat continue et pour République, au Premier Ministre, aux cela il nous revient à tous la responsabiministres de la Défense, des Anciens lité de veiller à conserver une ARAC, une Combattants, députés, sénateurs. Les Mutuelle de l’ARAC à la hauteur de nos ambitions, de nos besoins. RC Annonce 210x135 2 coul_Mise 1 08/11/13 15:31 Page1 adhérents de3D l’ARAC et de en sa page Mutuelle se sont mobilisés pour faire signer cette Face à une telle situation, il nous faut pétition et des milliers de signatures nous positiver et surtout ne rien lâcher. Conti-

nuons à mobiliser les forces nécessaires et invitons la Mutuelle de l’ARAC à toutes les assemblées générales de remises de cartes 2014. Associons à toutes nos initiatives les OPEX et tous les combattant(e) s pour l’amitié, la solidarité, la mémoire, l’antifascisme et la paix. L’ARAC, malgré bientôt ses cent ans d’existence, malgré sa présence et sa combativité reconnues dans les plus grands moments de l’histoire de la France, reste encore trop méconnue en dehors du monde combattant. Pourtant, nous sommes une association citoyenne, héritière des droits de l’homme, des valeurs républicaines de liberté, d’égalité et de fraternité. A l’exemple de Mandela : « Aucun de nous, en agissant seul, ne peut atteindre le succès ». Alors, ensemble pour l’ARAC, pour sa Mutuelle. Vive notre mobilisation 2014 ! Jacques Goutorbe Vice-président de la Mutuelle, membre du Bureau national de l’ARAC

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Souscription nationale LE RÉVEIL actualités

9e liste des souscripteurs (15 janvier 2014) Arac départemental de Saône-et-Loire (71) : 150 e Abonnés Réveil : Francis Pérammant : 100 e € Allier (03) - René Merle : 50 e Bouches-du-Rhône (13) -

Merci de préciser le mode de règlement : • par chèque à l’ordre de l’ARAC, en un ou plusieurs règlements, avec les dates d’encaissement souhaitées.

Sarthe (72) - Norbert Poteloin : 50 e, Yvelines (78) - Claude Boissonnet : 100 e, Vaucluse (84) - Ghislaine Coury : 50 e, Hauts-de-Seine (92) - Maria Plantagenet : 200 e, Val-de-Marne (94) - Guy Labbé : 40 e, Conseil national - André Moisenier : 50e

André Dumont :100 e Côtes-du-Nord (22) - Éliane Piriou : 50 e Finistère (29) - Marcel Carlier : 100 e Haute-Garonne (31) - Colette Debette : 100 e, Lot-et-Garonne (47) - Jacques Chantre : 50 e, Guy Delgado : 20 e, Marne (51) - Bernard Ragouilliaux : 25 e,

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magazine LE RÉVEIL

Nos pères ennemis - Morts pour la France et l’Algérie - 1958/1959 Hélène ErlingsenCreste et Mohamed Zerouki, Ed Privat, 16,50 e

Algérie Chronique d’une guerre amnésique Patrick-Charles Renaud, 34 e

Selon l’auteur, le mutisme et la méfiance prévalent toujours lorsqu’il s’agit de solliciter des acteurs de la guerre. Notamment ces jeunes envoyés de l’autre côté de la Méditerranée pour être plongés malgré eux dans une détresse physique et psychologique sans équivalents. Peut-on parler pour autant de « guerre amnésique » ? Certains voudraient bien nous en persuader, pour mieux enterrer avec elle… notre mémoire et notre avenir.

J’ai voulu voir (lettres d’Algérie) Gilles Caron, Ed Calmann-Lévy, 22,50 e

Gilles Caron, fondateur de l’agence Gamma avec Raymond Depardon et Hubert Henrotte, reporter pour Paris-Match, L’Express, Life, New-York Times... a disparu au Cambodge en 1970 sur la route N°1, menant au Vietnam. En 1960, appelé chez les Paras du 3e régiment d’infanterie de marine, il participe à la guerre d’Algérie. Sa mère et lui ne cessent de s’écrire. Il raconte, opérations, insoumissions, manifestations à Paris, attente des combats.

Un appel à la réconciliation des enfants victimes de la guerre d’Algérie. Clovis Creste a été tué en 1958 lors d’une embuscade dans le djebel Tacheta-Zouggara. Ibrahim Zerouki a disparu dans l’Ouarsenis en 1959. Son corps n’a jamais été retrouvé. Hélène, née en 1952, fille de Clovis, est journaliste diplômée de l’Institut des hautes études de la Défense nationale et de l’Institut national des hautes études de sécurité. Mohamed, né en 1943, a combattu avec l’ALN au côté de son père. Autodidacte, il a quitté l’Algérie en 1968 et devient directeur de maisons de jeunes et de la culture. A travers ce livre commun, ils nous transportent au plus intime de cette guerre : le courage de ces deux hommes face à leurs engagements militaires, l’amour de leur pays, leur crainte de

mourir au combat et de ne plus revoir leur famille. Mais ce livre c’est aussi, et avant tout, un appel à la réconciliation des enfants victimes de la guerre d’Algérie. Ils portent tous deux en eux une même et indélébile douleur, celle des orphelins de « cette ignoble guerre (…) qui aurait pu être évitée ». Une même question préoccupe Hélène et Mohamed : « Dans un autre contexte, tous ces hommes que l’on faisait se battre les uns contre les autresw auraient-ils pu s’estimer, se respecter… devenir amis ? » Et ils répondent sans hésiter par l’affirmative. Cinquante ans après la fin de la guerre d’Algérie, ce livre est un acte courageux au moment où certains nostalgiques, certains héritiers de la haine et du colonialisme cherchent toujours à raviver le racisme et les plaies de la guerre d’Algérie. Et il s’achève sur ces lignes d’une brûlante actualité : « Même si la blessure n’est toujours pas totalement cicatrisée, les héros d’antan sont fatigués. Il est temps de se tendre la main ».

La Résistance dans l’Aisne La guerre des partisans Alain Rice, Edition à compte d’auteur. A commander chez lui, 9 rue de la tour du Pin, 02250 Bosmont-sur-Serre, 46 e

Notre ami Alain Rice (cégétiste) nous propose tout au long de ces 500 pages, comportant de nombreuses illustrations et des documents inédits, une histoire des francs-tireurs et partisans, une histoire de la Résistance ouvrière et populaire dans l’Aisne. Des prémices de la Résistance (1940) jusqu’aux combats de la Libération, des pans entiers et souvent méconnus de la Résistance sont révélés. 1941, attentat à Courmelles. 1942, le groupe Beck. 1943, vie et mort des détachements FTP. 1944, attaque de la prison de Laon, l’opération maquis des Ardennes, de Menevret, Braine, Missy-aux-Bois, Nouvion, les combats de Vadencourt.

Un hommage sans complaisance, passant en revue aussi bien les sabotages que les attaques de fermes ou les exécutions sommaires de « collabos », épurant avant l’heure et parfois de façon dramatique. Car, à côté des patriotes se sont aussi parfois infiltrés de véritables chefs de bande qui, sous couvert de Résistance, se livraient au pillage comme de véritables brigands. Ils n’étaient qu’une minorité, mais rien n’est occulté. Et ce livre rend hommage à tous les combattants de l’ombre qui, loin d’être tous communistes, étaient fiers d’être FTP et n’avaient qu’un seul idéal : libérer la France du joug et de l’occupant nazi. Pour que leur mémoire demeure.

LE RÉVEIL - N° 800 - février 2014

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