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UKRAINE, UN DANGEREUX JEU DE DUPES

BANQUES FRANÇAISES + 15 MILLIARDS D’

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6 FÉVRIER 1934 : L’ARAC ACTRICE DE L’HISTOIRE

DES COMBATTANTS

Pour l’amitié, la solidarité, la mémoire, l’antifascisme et la paix

les idéaux républicains sont menacés ! rasseMBlons-nous !

Le journal des droits de tous les anciens combattants et victimes de guerre


LE RÉVEIL actualités

Pierre Bussone, secrétaire national, nous a quittés L’hommage rendu par l’ARAC et ses camarades entourant Liliane, son épouse, et toute la famille a eu lieu au cimetière de Pendé, dans la Somme, le 20 février dernier.

Nous venons de perdre un camarade, un ami, un frère de combat, un militant authentique de toutes les causes républicaines, celles qui nous rassemblent pour lutter, défendre et conquérir plus de liberté, plus d’égalité, plus de fraternité. Pierre était engagé également dans la solidarité internationale pour la survie et le bonheur de l’humanité. Joël Carliez, premier secrétaire de la Fédération de la Somme du PCF, a rappelé « combien Pierre était un homme de convictions, servant, sans jamais défaillir dans les difficultés, la cause des humbles et des opprimés, combien Pierre était un défenseur acharné de la classe ouvrière et des petites gens sur cette terre de Gracchus Babeuf et de Jean Catelas, où l’on sait, ô combien, ce que cela veut dire. Pierre faisait partie de ceux qui ont contribué à construire les grandes réformes comme la création de la Sécurité sociale, les droits à la retraite, les nationalisations, les libertés syndicales qui sont toujours au cœur de l’affrontement de classe d’aujourd’hui. » Il a également ajouté : « Ces aspects de l’engagement de Pierre sont d’actualité à 2-

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un moment où le MEDEF en appelle à la liquidation des acquis du Conseil national de la Résistance et où le gouvernement conduit une offensive d’ampleur contre le monde du travail et de la création… » À l’âge de ses 20 ans, déjà bien marqué par la guerre de 39-45, il est envoyé combattre un peuple, qui voulait vivre indépendant, après 130 ans de colonialisme français. Il y vit 24 mois une guerre qui ne sera reconnue que 40 ans après… À son retour, il adhérera à l’ARAC, en vue d’agir efficacement pour le devoir de vérité. L’un des résultats qu’il affectionnait particulièrement de ses combats inlassables menés dans l’union, sera l’obtention, enfin, de la reconnaissance officielle par le Parlement de la date du 19 mars 1962 comme Journée nationale du souvenir et du recueillement pour la mémoire des victimes civiles et militaires de la guerre d’Algérie. Pierre militait passionnément pour obtenir la condamnation des crimes d’État et des crimes contre l’humanité commis en son nom durant la guerre d’Algérie, ainsi que pour l’abrogation du décret du 23

septembre 2005, qui fait du 5 décembre une date de commémoration en hommage aux morts d’Afrique du Nord, qui n’a pas lieu d’être. Pierre a agi pour la solidarité avec le peuple vietnamien dans son combat pour sa libération et son indépendance, il participait activement au travail du comité français pour le Village de l’Amitié Van Canh où sont soignées des victimes des effets de l’agent orange. Gabriel Guiche, président de l’UDAC 93, a rappelé son apport fidèle et précieux à la défense du droit imprescriptible à réparation, dont la rente mutualiste. De nombreux porte-drapeaux de la Somme, de la Seine-Saint-Denis et de l’Ile-de-France, qu’il affectionnait tant, ont tenu à être présents : « Ils portent fièrement et haut leur drapeau pour rendre hommage à ceux et celles qui ont défendu notre pays, ses valeurs républicaines, son apport à l’émancipation humaine qui sont toujours à préserver », avait- il rappelé lors de la remise de sa distinction de Chevalier dans l’Ordre du mérite national, en novembre dernier à Montreuil. Patrice Bessac, conseiller régional, Belaide Bedreddine, conseiller général, la direction nationale de l’ARAC, ses camarades de l’ARAC de Montreuil, l’ARAC de la Somme, ont tenu, par leur présence, à lui rendre aussi reconnaissance et gratitude. Au nom de l’ARAC, nous avons exprimé à Liliane, son épouse, nos condoléances sincères et toute notre affection, à Francine, Jean- Paul, Jean-Marc, Monique, Jean-Michel, notre amitié et notre solidarité. Pierre a vécu sa dignité d’homme dans la lutte pour la dignité des autres. Nous continuons le chantier sur lequel il fut un constructeur exemplaire. Il sera de tous nos combats. Raphaël Vahé


ÉDIto LE RÉVEIL

les idÉaux rÉPuBlicains MenacÉs

sommaIRE actualités p. 4 Banques françaises : + 15 milliards d’euros . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4 Pour un 19 mars de fraternité et d’amitié . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5 Revenons-nous sous le règne des ordonnances ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5 Assurance chômage : les propositions du MEDEF. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6 Dividendes : + 43 % depuis 2009 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7 international p.8 Ukraine : dangereux jeux de dupes ! . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8 Les Etats-Unis imposent leur loi à la France. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10 Soutien aux anciens combattants des Malouines . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10 Tortures à Guatanamo . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11 France USA : le renouveau atlantiste . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12 vie de l’arac p. 21 Février 34 : quelques précisions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21 La vie des comités. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22 vos droits p. 27 Casques bleus de la FINUL et statut d’AC . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27 Augmentation du point PMI . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28 Déclaration de la commission de la carte du combattant . . . . . . . 29 Le Conseil constitutionnel dédouane le gouvernement . . . . . . . . 29 Magazine p. 31

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6 fÉvrier 1934

l’arac, témoin et actrice de l’histoire

www.le-reveil-des-combattants.fr LE RÉVEIL DES COMBATTANTS Fondé en 1931 par Henri-Barbusse mensuel de l’association républicaine des anciens combattants et victimes de guerre. commission paritaire n° 0713-a 06545 Édité par les Éditions du Réveil des combattants saRL au capital de 45 734,41 - siret : 572 052 991 000 39 2, place du méridien, 94807 Villejuif cedex téléphone : 01 42 11 11 12 télécopie : 01 42 11 11 10 reveil-des-combattants@wanadoo.fr

Gérant Directeur de la publication : Raphaël

Tirage : 60 000 exemplaires

87022 Limoges cedex 9

Vahé • Directeur délégué - Rédacteur en chef : Patrick staat • Comité de Rédaction : Brigitte canévêt, Hervé corzani, Jean-Pierre Delahaye, andré Fillère, Laurence Gorain• Service photos : Jeanclaude Fèvre • Administratrice : annick chevalier • Secrétariat de rédaction, conception graphique : Escalier D communication • Impression : RIVEt P.E. - 24 rue claude-Henri-Gorceix,

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ous vivons une période dangereuse, pleine de troubles, de confusions. Une fois de plus, lors d’évènements majeurs, l’information diffusée est à sens unique. Ils veulent conditionner l’opinion. « Les politiques », par leur comportement, leur message, tournent le dos aux peuples. Ils font le choix de la finance. Depuis des décennies, notamment depuis Sarkozy, les valeurs de la République sont rognées. C’est sur la base d’inégalités profondes, de misère, d’exclusion que se construit la place de l’extrême droite. C’est vrai en France, mais également dans de nombreux pays d’Europe, victimes eux aussi des choix de la Commission européenne. La mise en concurrence des peuples, des régions du vieux continent, les politiques d’austérité, la volonté d’élargir à n’importe quel prix l’Europe pour étendre le « marché libre et non faussé » ne conduisent qu’à des tensions, à des risques de conflits. L’ARAC est inquiète de la mansuétude de la Commission européenne, des gouvernants français, allemands, anglais, entre autres, devant la montée du fascisme. Nous faisons, forts de notre héritage, du combat contre les causes des guerres notre principale raison d’être. L’ARAC, comme en février 1934, appelle à se rassembler, à faire face aux risques fascistes et à défendre la République. Les évènements récents en Ukraine sont un avertissement. La situation est complexe, mais aucune politique partisane ne peut justifier de mettre en place des néo-fascistes. Cette démarche ne règle pas les problèmes posés aux Ukrainiens sur leurs conditions de vie, leurs aspirations démocratiques, mais est lourde de dangers pour l’Europe. Inquiétante est la similitude entre la situation d’aujourd’hui et celle de 1913-1914. Inquiétante la ressemblance avec la période 1933-1934 où, en Allemagne, pour faire face au mécontentement populaire, c’est la carte d’Hitler qui a été jouée. En France, à cette même période, les ligues d’extrême droite défilent dans la rue, le patronat préfère Hitler au Front populaire. Les peuples, eux, ont besoin que s’ouvre une nouvelle période de plus de social, de plus de démocratie, de justice, d’égalité… Mais cela est en opposition complète avec le fait que 1 % de la planète s’enrichit sur le dos des 99 % autres. Il est nécessaire de faire entendre nos voix. La République est en danger. Ses idéaux universels, Liberté, Egalité, Fraternité, sont menacés. Défendre la République, s’opposer à l’extrême droite, défendre la paix sont les combats d’aujourd’hui. Patrick Staat LE RÉVEIL - N° 801 - maRs 2014

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LE RÉVEIL ACTUALITÉS

Banques françaises 15 milliards d’euros nets cumulés en 2013 Les banques françaises mettent les années de crise derrière elles : les quatre premiers groupes français affichent 15 milliards d’euros de résultats nets cumulés en 2013. Mais les retours sur fonds propres seront plus modestes. Les banques françaises sont de nouveau en pleine forme. Après cinq ans de crise financière, puis de crise économique, elles reviennent dans le peloton des grandes entreprises françaises qui dégagent les bénéfices les plus éclatants. A eux seuls, les quatre premiers groupes français - Crédit Agricole, BNP Paribas, BPCE et Société Générale - ont affiché 15 milliards d’euros de bénéfices nets en 2013, soit l’équivalent des profits des trois premiers réseaux avant crise. Symbole de ce retour en force, le Crédit Agricole triomphe aujourd’hui en affichant le meilleur résultat 2013 des banques françaises, avec un bénéfice net de 5,14 milliards d’euros, détrônant ainsi BNP Paribas. La banque mutualiste, touchée de plein fouet en raison de ses investissements dans la banque grecque Emporiki, avait connu un an auparavant une annus horribilis. Le groupe a essuyé en 2012 une perte de 3,8 milliards d’euros et sa structure cotée, Crédit Agricole SA, une perte de 6,5 milliards d’euros. Entre 2007, date du début de la crise des « subprimes », et ce retour à meilleure fortune, les banques françaises ont dû transformer leur modèle, sous la pression de régulateurs soucieux de réduire le risque systémique. Sous l’impulsion des règles de Bâle III, les banques sont tenues de donner des gages de solidité beaucoup plus contraignants. Elles ont donc renforcé massivement leurs fonds propres et amassé en parallèle des réserves impressionnantes de liquidités. Les établissements ont paré au plus pressé, en réduisant leurs bilans via des cessions d’activités ou de portefeuilles de crédits. Aujourd’hui, ce travail pour rentrer dans les clous réglementaires est ache4-

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vé. « En 2013, s’achève la première phase de transformation du groupe », s’est ainsi félicité le PDG de la Société Générale, Frédéric Oudéa. A fin décembre, BPCE, Crédit Agricole, Société Générale et BNP Paribas affichent tous des ratios de fonds propres « durs » supérieurs ou égaux à 10 %, largement supérieurs aux attentes des régulateurs.

Dividendes Fortes de leurs bilans restructurés, les banques regardent vers l’avenir. Crédit Agricole et BNP Paribas présenteront leurs plans stratégiques en mars et Société Générale en mai. « Aujourd’hui, l’accent est mis sur la recherche de croissance rentable et moins risquée », fait valoir Xavier de Buhren, gérant chez Mirabaud. Pour renforcer leur rentabilité, elles actionnent en priorité le levier des coûts, via des plans d’économies. BNP Paribas a d’ailleurs durci son plan et porté son objectif d’économies annuelles récurrentes à 2,8 milliards d’euros (+ 800 millions) à partir de 2016. L’objectif pour les banques ? Renforcer encore la rentabilité de leurs fonds propres (ROE), essentielle pour les investisseurs. BNP Paribas vise un ratio d’au moins 10 % en 2016, contre 7,7 % hors exceptionnels en 2013. Sa concurrente Société Générale vise le même seuil dès 2015. Des ambitions modestes en regard de celles qu’elles affichaient avant crise. Mais les régulateurs ne les autorisent plus à prendre les risques des années 2000. « Les banques se concentrent aujourd’hui sur des activités matures et elles deviennent des sortes d’“utilities”. Elles prennent moins de risques, elles font moins de croissance, elles ont besoin de plus de fonds propres et

leur rentabilité est donc moins élevée. Mais elles ont une forte capacité à distribuer des dividendes. BNP Paribas veut porter son taux de distribution des bénéfices à environ 45 % en 2016 », analyse Romain Burnand, gérant chez Moneta. La Société Générale veut, elle, porter sa distribution de dividendes à 40 % en 2014. Ce qui est loin d’être une mauvaise affaire pour les investisseurs.


ACTUALITÉS LE RÉVEIL

Déclaration de l’ARAC

Pour un 19 mars 2014 de fraternité et d’amitié Le 19 mars, journée officielle de commémoration de la fin des combats d’Algérie, de Tunisie et du Maroc, est d’abord une journée d’hommage aux victimes de ces combats, les 30 000 morts militaires français et le million de morts algériens. Cette date mémorielle est déterminante car elle doit contribuer à établir des rapports solides entre la France et l’Algérie. Le 19 mars 1962, victoire de la paix, est aussi un jour de fraternité franco-algérienne qu’il faut célébrer dans notre pays. Mais il reste beaucoup à faire pour que se développent des rapports suivis de coopération et d’amitié entre les peuples algérien et français, car des obstacles importants demeurent. En effet, les générations nouvelles qui n’ont pas vécu les événements qui concernent cette guerre doivent être informées que :

- la torture qui y fut pratiquée par certaines unités de l’armée française n’est toujours pas reconnue, - de même le courage des soldats du contingent qui, avec la grève générale en France, ont permis de maîtriser le complot des généraux factieux contre la République, - aucune reconnaissance et condamnation officielle n’ont été exprimées contre cette guerre coloniale d’Algérie et celles qu’il l’ont précédée, notamment le racisme qui les a caractérisées. Il faut rappeler que le cessez-le-feu ne stabilise pas définitivement les rapports entre nos deux pays. Pour qu’ils se stabilisent, il est nécessaire que soit signé un traité de paix qui nourrisse l’amitié et le développement économique dans l’intérêt des deux pays et ouvre ainsi de nouveaux comportements entre tous les pays bordant la méditerranée. Pour

aboutir à la signature de ce traité de paix, le gouvernement doit reconnaître les responsabilités prises par ses prédécesseurs dans la guerre d’Algérie et abroger la loi du 23 février 2005 justifiant un rôle colonialiste au service des intérêts économiques et des enjeux géopolitiques de la finance. Dans la foulée, abroger aussi le décret fixant au 5 décembre de chaque année une commémoration sans rapport historique avec le cessez-lefeu qui permit la fin de la guerre d’Algérie et qui entretient la confusion dans l’opinion publique et la division dans le mouvement combattant. Que la journée du 19 mars 2014 soit un grand moment mémoriel de fraternité, d’action et de paix pour le développement des rapports de coopération et d’amitié entre la France et l’Algérie. Villejuif, le 3 mars 2014

Revenons-nous sous le règne des ordonnances ? Certaines personnalités ont la mémoire courte ! M. François Hollande a oublié que, le 8 juin 2005, alors qu’il n’était encore que député PS de la Corrèze, il interpellait le premier ministre de l’époque, M. Dominique de Villepin en ces termes : « La méthode est détestable… vous allez recourir à la procédure des ordonnances, c’est-à-dire au dessaisissement du Parlement, renoncer à la confrontation démocratique et au débat serein. » Retournement de veste, aujourd’hui. Alors que les parlementaires font leur rentrée, les ordonnances, permettant d’éviter un examen des textes devant les députés et les sénateurs, s’apprêtent à devenir l’arme secrète du Président.

Mais que sont exactement ces ordonnances ? Il s’agit d’une procédure autorisée et expressément prévue par l’article 38 de la Constitution de la Ve République. Cette procédure permet au gouvernement de

mettre en place immédiatement une mesure sans attendre un passage devant l’Assemblée nationale et le Sénat. Cette mesure est prise en Conseil des ministres après avis du Conseil d’État. Cependant, pour légiférer de la sorte, le Président a besoin de l’accord préalable de l’Assemblée, d’où le nom de loi d’habilitation qui précise les domaines concernés. Une fois signée par le chef de l’État, l’ordonnance entre en vigueur dès sa publication. Elle doit ensuite passer devant le Parlement. Si elle est ratifiée, elle acquiert la valeur de loi. C’est cette procédure qui est prévue par le gouvernement pour la refonte du code des pensions militaires d’invalidité. Nous sommes donc à l’ère de tous les dangers pour la défense des droits des anciens combattants et victimes de guerre. Il faudra que tous les intéressés par le code saisissent leurs représentants tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat

pour qu’ils refusent leur accord quand le Président viendra devant eux pour légiférer de la sorte. Il faudra exiger de véritables débats devant l’Assemblée et le Sénat afin que des textes de lois soient légalement votés. Il faudra remarquer l’absence d’urgence dans la refonte du code des PMI. Il faudra remarquer qu’agir de la sorte « n’est pas une bonne façon de faire et d’être soucieux des droits du Parlement », comme le clame actuellement le Président du groupe écologiste au sénat, Jean-Vincent Placé. Attention danger ! La vigilance et la résistance sont une fois de plus demandées aux citoyens. Ne laissons pas détruire par un « simple coup de baguette » ce que des générations d’anciens combattants et victimes de guerre ont réussi à conquérir pendant des décennies de lutte. Jacqueline Thabeault-Alcandre LE RÉVEIL - N° 801 - mars 2014

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LE RÉVEIL ACTUALITÉS

Assurance chômage Les propositions choc du MEDEF Dans un document transmis aux partenaires sociaux, dont Les Echos ont obtenu copie, le MEDEF dévoile ses propositions. Nombre d’entre elles sont aussi novatrices que détonantes et, par extension, potentiellement explosives : l’organisation patronale propose notamment de supprimer le régime spécifique des intermittents du spectacle, de faire obligatoirement cotiser à l’UNEDIC les contractuels de la fonction publique et d’«  adapter les droits à indemnisation au niveau du chômage  ». Faire varier les droits selon le niveau de chômage Les droits étant figés le temps de vie d’une convention d’assurance chômage (trois ans généralement), le régime est « aveugle à la conjoncture économique et à la réalité du marché du travail », déplore le MEDEF. Or la durée au chômage et le risque de perte d’emploi étant directement liés à la conjoncture, le MEDEF juge nécessaire, «  afin de mieux sécuriser les personnes dans les périodes de chômage, de faire varier les droits et la durée d’indemnisation en fonction du niveau du chômage  » : plus ce dernier serait élevé, plus les droits le seraient. Aujourd’hui, la règle est de « un jour cotisé (travaillé, donc), un jour indemnisé ». Le MEDEF propose de passer à 1,2 jour indemnisé pour 1 jour cotisé quand le taux de chômage, en France métropolitaine, dépasse 12 %, puis que ces droits diminuent avec le taux de chômage, jusqu’à 0,8 jour indemnisé pour 1 jour cotisé quand le chômage est inférieur à 9 %. Les durées d’affiliation et d’indemni6-

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sation seraient soumises à la même logique : quand le chômage dépasserait 10 %, on appliquerait les règles actuelles : il faudrait avoir travaillé au moins 4 mois pour accéder à des allocations, et la durée maximale d’indemnisation resterait de 24 mois (36 pour les seniors) ; quand le chômage repasserait sous 10 %, il faudrait avoir travaillé 6 mois et la durée maximale d’indemnisation serait de 18 mois (30 pour les seniors).

Faire payer les contractuels de la fonction publique Les autres le font, pourquoi pas la France ? Pour « rétablir l’équité entre les employeurs », le MEDEF propose que « l’ensemble des employeurs publics » soient obligés d’assurer à l’UNEDIC les quelque 800 000 à 1 million d’agents contractuels qu’ils emploient. A l’heure actuelle, ces employeurs publics peuvent soit cotiser à l’UNEDIC, soit mettre en place un régime « d’optingout » qui leur permet d’auto-assurer leurs contractuels, en leur payant alors les allocations chômage une fois leur contrat de travail arrivé à terme ou leur licenciement prononcé. Ce système permet aux employeurs publics de ne se tourner vers l’UNEDIC que quand l’auto-assurance leur coûterait plus qu’elle ne leur rapporte. Ce régime « fonctionne donc comme une subvention des employeurs privés versée aux employeurs publics, sans aucune justification économique », estime le MEDEF. Ce dernier ne va pas, au contraire de la CGPME, jusqu’à demander que l’ensemble des 5,2 millions de fonctionnaires cotise, au nom de la solidarité nationale, à l’UNEDIC, mais il y laisse la porte entrouverte, en proposant d’« étudier l’opportunité d’ouvrir une concertation avec l’État sur les conditions de sa participation financière au régime d’assurance-chômage ».

Intermittents : mettre l’État face à ses responsabilités Le MEDEF est décidé à donner un coup de pied dans la fourmilière. Une question, avance-t-il, « d’équité entre demandeurs d’emploi », qui « doit reposer sur un principe simple : à cotisations égales, indemnités chômage égales ». Ce n’est pas le cas du régime des intermittents du spectacle, qui leur permet d’être indemnisés plus et plus longtemps que les salariés soumis au régime général, ce que la Cour des comptes fustige de longue date. C’est, depuis longtemps, une manière pour l’État de faire payer par l’UNEDIC une partie du soutien à la politique culturelle. En l’état actuel du déficit, cela n’a que trop duré, estime le Medef, qui propose donc de supprimer ce régime spécial et de réintégrer les intermittents dans le régime général, et de « demander à l’État de prendre en charge, s’il considère qu’il relève de l’intérêt général de mieux indemniser les demandeurs d’emploi affiliés aux annexes VIII et X que ceux des autres secteurs, le surcoût de ce traitement plus favorable ».

Mieux inciter au retour à l’emploi en simplifiant le régime d’activité réduite C’est, de l’avis de toutes les parties autour de la table, l’un des enjeux majeurs de cette négociation. Pour le MEDEF, cette incitation « doit reposer sur un principe simple : le revenu de la personne doit toujours s’élever avec la quantité de travail », que ce revenu provienne uniquement de l’activité ou du cumul entre activité partielle et allocation. La complexité des règles actuelles de cumul entre activités et allocations fait que ce principe n’est pas toujours respecté, poussant les demandeurs d’emploi à des arbitrages tortueux et les conseillers Pôle Emploi à de très savants calculs pour définir les droits à allocation. Pour simplifier et clarifier le système en le rendant plus incitatif à la reprise d’emploi, le MEDEF propose de supprimer le seuil de rémunération de 70 % (de son ancien salaire) au-delà duquel un demandeur d’emploi ne bénéficie plus


actualités LE RÉVEIL

du régime d’activité réduite. De plus, estimant que « le régime d’assurancechômage ne doit pas favoriser l’installation dans une situation d’emploi à temps partiel ou de succession de contrats courts en devenant un revenu de complément pour les personnes et un substitut à la rémunération des salariés pour l’employeur », le MEDEF propose de plafonner le cumul entre revenu d’activité et indemnités chômage à 80 % de l’ancienne rémunération nette. Le seuil horaire de 110 heures encadrant l’activité réduite serait aussi supprimé, tout comme le plafond de 15 mois. « En conséquence », poursuit le MEDEF, « le régime spécifique des intérimaires (annexe IV) serait supprimé et les intérimaires réintégrés dans le régime général, ce dernier devant être enrichi d’un nouveau système de droits rechargeables ».

Des droits rechargeables sur la base de « un jour indemnisé pour un jour cotisé » L’instauration de droits rechargeables est prévue dans le cadre de l’accord de janvier 2013 sur la sécurisation de l’emploi. Le MEDEF propose le dispositif suivant. Un chômeur écoulerait d’abord ses droits originaux, octroyés lors de son inscription à Pôle Emploi. S’il arrive au bout de ses droits, ces derniers pourraient être rechargés, en vertu des périodes travaillées entre temps, selon la règle « un jour indemnisé pour un jour cotisé », avec « une condition de rechargement équivalente à la période de travail minimum ouvrant droit à indemnisation (soit 610 heures ou 122 jours ou 4 mois) ». Pour calculer le montant de son allocation, le Medef défend la « prise en compte du capital de droits le plus important (NDLR : entre celui à l’entrée à Pôle Emploi et le nouveau capital acquis lors des reprises temporaires d’activité) auquel s’ajoute 25 % du capital le moins important ». Derek Perotte Les Échos du 13 février 2014

Dividendes : + 43 % depuis 2009

La France 3e pays

Les dividendes ont progressé de 43 % depuis 2009 dans le monde. Les pays émergents ont enregistré la plus forte croissance. Les dividendes versés dans le monde ont dépassé la barre symbolique des 1 000 milliards de dollars. Les sommes distribuées aux actionnaires ont progressé de 43 % entre 2009 et 2013, selon une étude de Henderson sur les 3 000 plus grandes capitalisations. Et, pour 2014, la société de gestion anticipe une accélération de la croissance, tirée par les marchés développés, après une année 2013 relativement morose. En effet, l’an dernier, les dividendes n’ont augmenté que de 2,8 %, la plus faible progression depuis cinq ans. Cet accès de faiblesse s’explique par une forte baisse des paiements aux États-Unis en fin d’année, après un quatrième trimestre 2012 caractérisé par une avalanche de dividendes exceptionnels, dans l’anticipation d’un changement de fiscalité. Malgré cette baisse, les entreprises nord-américaines restent les principales contributrices aux dividendes mondiaux, avec environ 340 milliards de dollars versés en 2013, un record. Sur cinq ans, les groupes outre-Atlantique les ont augmentés de 49 %.

La France, troisième pays L’Europe, hors Royaume-Uni, arrive en deuxième position, représentant environ un cinquième des dividendes totaux comptabilisés (presque 200 milliards de dollars). Toutefois, cette zone a affiché la plus faible croissance en cinq ans (+ 8 %), sur fond de crise de la zone euro. Le document rappelle que le taux de change euro-dollar a été très volatil, ce qui a influencé la contribution en dollars de la région. La France, avec 50 milliards de dollars de dividendes en 2013, est le troisième pays dans le monde en termes

de dividendes (après les États-Unis et le Royaume-Uni) et le premier du Vieux Continent. Le recul de 1 % des coupons en masse depuis 2009 a donc fortement pesé sur la tendance européenne. Les pays émergents représentent la troisième grande zone géographique pour les dividendes. C’est là que les coupons ont connu la plus forte expansion : + 109 % depuis 2009, pour atteindre presque 126 milliards de dollars. Les BRIC (Brésil, Russie, Inde, Chine) pèsent plus de la moitié de ce poids. Mais le rythme de croissance dans les marchés émergents a été nettement moins soutenu en 2012 (+ 0,9 %) et en 2013 (+ 9,1 %) que par le passé, étant donné le fléchissement des devises de ces pays par rapport au dollar et la fin du « supercycle » des matières premières, remarquent les auteurs. Cette étude témoigne de la concentration des plus gros « payeurs » puisque les dix premiers groupes mondiaux en termes de versement de coupons représentent quasiment 10 % de la masse des dividendes. En 2013, ce Top 10 est dominé par Royal Dutch Shell, ExxonMobil et Apple. Ce palmarès compte aussi trois banques (China Construction Bank, HSBC, Banco Santander) et trois valeurs télécoms (China Mobile, Vodafone, AT&T). Malgré la crise, le secteur financier, avec près de 218 milliards de dollars, est le premier contributeur : les sommes versées ont progressé de 76 % depuis 2009. « Les valeurs financières des pays émergents ont quasiment triplé leurs paiements », souligne l’étude. Marina Alcaraz LE RÉVEIL - N° 801 - mars 2014

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LE RÉVEIL international

U k r a ine

Dangereux jeu de dupes Sur le dos des Ukrainiens, les grandes puissances se livrent à une surenchère dangereuse pour le contrôle économique et stratégique de la région. A l’heure où nous écrivons ces lignes, le bras de fer entre la Russie, les États-Unis et l’Union européenne se poursuit et il semble que l’on soit bien loin des premières préoccupations des Ukrainiens descendus dès les premiers jours occuper la place Maiden. Rappelons qu’à l’origine, le mouvement de contestation était motivé par la fracture créée entre d’un côté la grande majorité des Ukrainiens soumis à l’austérité, la misère, le chômage, la pauvreté et de l’autre l’enrichissement d’une poignée de politiciens corrompus et d’oligarques aux fortunes colossales. L’aide promise par l’Union européenne (l’Ukraine a besoin d’au moins 35 milliards d’euros pour ses budgets publics d’ici à 2016) a joué comme un miroir aux alouettes. Les aspirations à la démocratie et à la liberté ont fait le reste… Mais très vite cette révolte a été débordée par des éléments ultranationalistes, comme Pravogo Sektora (secteur droit), groupuscule fascisant, ou le parti Svoboda, ouvertement antisémite. Ceux-ci ont délibérément

cherché l’affrontement, en tirant sur les forces de sécurité. Minoritaires dans le mouvement de protestation à l’origine, ils sont devenus politiquement dominants, au fur et à mesure que la situation se dégradait et que montait la violence des affrontements. Aujourd’hui ils ont de nombreux représentants dans le gouvernement autoproclamé à l’issue des affrontements de Kiev. L’une des premières décisions de ce gouvernement, soutenue par l’Occident, est significative. La libération de l’ex-première ministre, Ioulia Timochenko, considérée par de nombreux observateurs comme le « pion de rechange » de Washington et qui avait passé des accords avec l’organisation fasciste Svoboda lors des dernières élections, devrait inquiéter quant aux choix politiques et économiques à venir. Ce changement stratégique d’alliance a inquiété Poutine, au point qu’il a ordonné l’envahissement de la Crimée afin de protéger ses forces navales et surtout de montrer qu’il n’était pas

décidé à se détourner de l’enjeu géostratégique que représente l’Ukraine, car c’est bien de cela qu’il s’agit. Depuis plusieurs années le nouveau tsar s’attache à redonner à la Russie sa puissance économique et militaire et surtout sa place de puissance incontournable dans la gestion des affaires de la planète au même titre que les USA. Il faut voir aujourd’hui dans l’attitude d’Obama et de l’Union européenne la volonté de tout faire pour affaiblir Moscou et par tous les moyens. Ils s’efforcent notamment de l’empêcher de créer un bloc économique alternatif qui comprendrait l’Ukraine, pays indispensable au développement de la Russie.

Les enjeux stratégiques Moscou, Washington pas plus que l’Union européenne ne sont préoccupés par le sort des habitants de cette région. En vérité ces populations sont comme prises « en otage » par les grandes puissances et leurs revendications et aspirations prétextes à ingérences. L’affaire n’est pas nouvelle ! Dès 1997, S. Brzezinski, conseiller à la Sécurité nationale de Jimmy Carter de 1977 à 1981, écrivait à ce propos dans son ouvrage de politique internationale intitulée Le grand échiquier : « Sans l’Ukraine, la Russie n’est plus qu’une grande puissance asiatique. Si la Russie reprend le contrôle de l’Ukraine, de ses 52 millions d’habitants, des richesses de son sous-sol et de son accès à la mer

Le risque de partition est réel, d'autant que les groupes nationalistes mènent souvent le bal. À gauche, l'extrême droite défile à Lviv (Ouest du pays). À Kharviv, dans l'Est russophone, les manifestants pro-russes ont investi le gouvernement régional.

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international LE RÉVEIL

Noire, elle redeviendra une grande puissance s’étendant sur l’Europe et l’Asie. » Autrement dit, l’Ukraine doit être sous domination US. Pour les États-Unis, le contrôle de l’Ukraine répond à trois principaux objectifs : renforcer l’OTAN, lutter contre l’influence croissante de la Russie, s’approprier un marché trop fermé. Cette volonté d’intégration de l’Ukraine a été maintes fois exprimée. En 2007, le Congrès américain a passé un acte par lequel il autorisait « l’aide US pour assister l’Ukraine dans la préparation d’une possible adhésion à l’OTAN ». Juste avant le sommet de Bucarest en 2008, Bush a publiquement déclaré « offrir un fort soutien à la demande de l’Ukraine de recevoir de l’OTAN un plan d’action pour l’adhésion. » Après le sommet, le Sénat américain a passé une résolution exprimant son « fort soutien » à l’idée que « l’Ukraine [...] devienne un jour membre de l’OTAN ». D’autre part, d’un point de vue économique après la chute de l’URSS, l’Ukraine est passée d’une économie largement planifiée par l’État à une économie de marché. La plupart de ses entreprises, fermes et terres agricoles ont été privatisées. Les enjeux économiques de la privatisation étaient énormes puisque l’Ukraine, le plus grand pays d’Europe, était à la fois industrialisée et considérée comme le grenier à blé de l’URSS. De plus, elle possédait une main-d’œuvre qualifiée et bon marché. Cela a naturellement attiré la convoitise de nombreux investisseurs étrangers et cela le reste aujourd’hui. Si les États-Unis s’intéressent à l’Ukraine, ce n’est pas parce que Moscou menace les droits de l’homme, parce que la presse n’y est pas libre ou parce que la démocratie y fait défaut. Si les États-Unis s’intéressent à l’Ukraine, c’est avant tout pour protéger et étendre ses intérêts économiques et géostratégiques et sa zone d’influence. Jean-Pierre Delahaye

Ukraine Un nouveau gouvernement « démocratique » ukrainien soutenu par l’Europe et les USA s’est autoproclamé. Pourquoi présenter ce gouvernement installé par la force comme une victoire de la démocratie ? Le gouvernement sortant n’a suscité par sa politique et sa corruption que dégoût et colère. La solution n’est certainement pas de mettre au pouvoir des activistes d’extrême droite. Les groupes néofascistes soutenus et financés de l’extérieur (UE-USA) ne sont pas la représentation de la population et des démocrates ukrainiens. L’Ukraine n’est pas un petit pays, n’est pas une république bananière, c’est un pays riche, fort de 50 millions d’habitants (voir article cicontre). Alors qui sont-ils ces nouveaux gouvernants qui se sont autoproclamés à Kiev ? Le nouveau Premier Ministre est le banquier Arseni lasteniouk. Favori des États-Unis, il a déjà occupé des postes clés : président du Parlement, ministre des Affaires étrangères, ministre de l’Économie, président de la Banque centrale. Il y a appliqué alors avec zèle une ligne proeuropéenne et de soumission aux diktats du FMI. Aux Affaires étrangères, Andei Dechitsia, diplomate de formation, pro-européen. A l’Intégration européenne, Boris Tarasiuk, ancien ministre des Affaires étrangères dans quatre gouvernements différents de 1992 à 2007. Pro-européen, représentant de l’Ukraine à l’OTAN. Volodimir Groysman, ancien membre du Parti des régions de Loutchenko a fait fortune dans l’agro-business et l’immobilier. Le vice-premier ministre, numéro 2 derrière Lasteniouk, est Alexander Sytch. Membre du parti fasciste Svoboda. Présidence du Conseil de sécurité nationale, organisme suprême pour la défense et l’intérieur, est confiée à Andrei Parubiy, fondateur du Parti national-social, ancêtre de Svoboda, dont il fut le leader de sa jeunesse para-militaire. L’Agriculture : Olexandr Myrni, autre membre de Svoboda. Ce millionnaire fas-

ciste a fait fortune dans… l’agro-alimentaire. L’Écologie va aussi à un membre du parti Svoboda, Andrei Mokhnyk. L’Éducation, Sergei Kvit a fréquenté dans sa jeunesse diverses organisations néonazies, dont le Trident, organisation se revendiquant des groupes collaborateurs pendant la dernière guerre. Aux sports, le voyou Dimitri Bulatov, connu pour ses liens très étroits avec le groupe ultra-fasciste Secteur Droit. A l’énergie, Youri Prodan, a déjà été ministre sous Loutchenko au même poste. Il est connu pour avoir travaillé à la création du « Marché national de l’énergie », ce qui a abouti à un partage du gâteau entre groupes oligarchiques et à une corruption généralisée. A l’intérieur, le businessman véreux Arsen Avakov, fondateur d’une banque commerciale et d’un fonds d’investissement, condamné pour prise illégale de terres, abus de pouvoir, il est sur la liste internationale d’Interpol. Le grand danger de cette situation, c’est que les aspirations à la démocratie du peuple ukrainien ne soient soldées qu’au profit d’une opération politique voulue par les États-Unis et visant à faire de ce pays la base avancée de l’OTAN. L’utilisation, la complaisance à l’égard des groupes néofascistes de la part de la France et de l’Allemagne sont graves de conséquences pour nos propres pays. Graves, car au moment de la montée de l’extrême droite en Europe, de l’expression publique dans plusieurs pays de l’Union européenne de groupes néofascistes, faire le choix pour des raisons partisanes, injustifiables de soutenir des hommes politiques porteurs de l’idéologie fasciste va peser lourd dans la situation politique de l’Europe. Le mécontentement est grand à la veille des élections européennes où l’abstention risque d’atteindre des sommets, ou dans chaque pays de l’Union, les populistes, les forces d’extrême droite vont faire leurs entrées dans le Parlement européen, faire le choix du soutien aux partis de l’extrême droite en Ukraine ne peut que susciter des risques de violences, de racisme, d’antisémitisme dans les pays de l’Union. Piètre exemple que ce soutien lourd de dangers que montrent les dirigeants européens. Jean-Michel Verneuil LE RÉVEIL - N° 801 - mars 2014

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Les États-Unis imposent leur loi à la France Business is business Barack Obama a beau avoir multiplié les témoignages d’amitié envers François Hollande et la France, les ÉtatsUnis ne font pas de sentiments sur le terrain commercial. Dernier exemple en date : le contrat Falcon Eye de satellites espions vendus en juillet dernier par EADS et Thales Alenia Space pour plus de 700 millions d’euros aux Émirats Arabes Unis va devoir être... renégocié. Parce que Washington a tout fait pour. Cette information a été révélée sur le site Les échos.fr en date du 12 février dernier. Le contrat a pourtant bel et bien été signé par les PDG français, en présence de Jean-Yves Le Drian et de cheikh Mohammed bin Zayed Al Nahyane, prince héritier du royaume et grand patron de la défense. Le ministre de la Défense français y est d’ailleurs pour beaucoup, lui qui a dû faire plusieurs déplacements sur place pour arracher l’affaire face à Lockheed Matin, soutenu par l’administration américaine. Au-delà de son montant, ce contrat signait le retour en grâce de la France dans ce pays en matière d’armement. La fête aura été de courte durée.

Le problème est venu de composants électroniques entrant dans la fabrication des satellites et fabriqués aux États-Unis. Non pas que ces composants arborent le moindre caractère sensible, ils sont même complètement banals, assuret-on aux Échos. Mais ils figurent sur la liste dite «Itar», du nom de la régulation américaine qui soumet leur exportation à autorisation de Washington. Les Français savaient évidemment qu’ils avaient besoin de cette autorisation. Mais ils ne s’attendaient visiblement pas à ce que la Maison-Blanche mette autant de temps à donner son feu vert. « Dès lors que des composants Itar entrent en jeu, cela demande des efforts de conviction vis-à-vis des Etats-Unis », résume un bon connaisseur du dossier. L’affaire est tellement sensible qu’elle est remontée à l’Élysée. Jusqu’à ce que l’administration américaine lâche la bonne nouvelle à l’occasion de la visite d’État de François Hollande.

De nouvelles négociations à prévoir Tout serait rentré dans l’ordre, sauf que le temps de donner l’autorisation,

la date de validité du contrat signé en juillet, qui comportait pourtant une marge de sécurité pour tenir compte de la réglementation, a été enfoncée. Abou Dhabi a donc logiquement résilié le contrat. Il va donc falloir en signer un nouveau. Même si ça va prendre du temps, cela devrait bien être le cas : tous les processus financiers et administratifs locaux ayant déjà été validés, la probabilité qu’Abou Dhabi lance un nouvel appel d’offres est faible. A ceci près que les Emirats, dont la réputation de négociateurs féroces n’est plus à démontrer, vont certainement en profiter pour arracher des concessions supplémentaires. Jean-Yves Le Drian va donc peut-être devoir à nouveau mouiller sa chemise. En attendant, les États-Unis ont montré toute leur puissance sur ce dossier. Non seulement ils ont obligé les Français à relancer un round de négociations, ce qui est toujours risqué. Pire, ils ont rappelé à tous les pays, Arabie Saoudite notamment, qui veulent se doter de satellites espions, qu’ils peuvent faire la pluie et le beau temps. D’autant que ce marché est appelé à fortement se développer à tel point que certains évoquent un nouvel eldorado du spatial pour lequel la France dispose d’un savoir-faire rare. Les premiers à gagner des contrats seront donc en position de force. J.P. D.

Message de soutien de l’ARAC aux combattants argentins du TOAS de la guerre des Malouines Le Bureau national de l’Association républicaine des anciens combattants et victimes de guerre (ARAC) et des combattants pour l’amitié, la solidarité, la mémoire, l’antifascisme et la paix, la plus ancienne association française et

«Nous voulons rentrer. Répondez ! »

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l’une des plus représentatives, réuni à Paris (France) le 25 février 2014, salue chaleureusement les anciens combattants argentins des TOAS (Territoire des opérations de l’Atlantique Sud), à l’occasion du 6e anniversaire de l’installation de leur campement de lutte sur la place de Mai, à Buenos Aires. Solidaire de leur juste revendication de reconnaissance du statut d’anciens combattants de la guerre des Malouines, l’ARAC soutient la légitime démarche de ces jeunes hommes précipités injustement par la junte militaire dictatoriale dans une guerre à laquelle ils n’étaient

pas préparés, mal armés, mal équipés. Victimes des tortures et des mauvais traitements des militaires de la junte des généraux fascistes, ils n’en ont pas moins tenu leur place dans la défense de la patrie et méritent à ce titre la reconnaissance de la Nation. En ce jour anniversaire, l’ARAC appuie à nouveau leur demande de reconnaissance de la qualité d’anciens combattants auprès des autorités argentines et forme le vœu le plus ardent que leur soit rendue très vite cette justice afin de leur permettre de rentrer enfin chez eux la tête haute.


INtERNatIoNaL LE RÉVEIL

usa I tortures à guantanamo De récentes révélations sur les conditions d’emprisonnement à Guantanamo sont alarmantes. Rappelons que la fermeture de ce camp d’internement était une promesse de campagne du candidat obama au cours de son premier mandat. une épine dans le pied du prix Nobel de la paix. Depuis rien n’a été fait et la condition des détenus ne cesse de s’aggraver ! Selon la presse anglo-saxonne et certains témoignages parvenus à l’extérieur, le ministère américain de la Défense utilise de la musique pour torturer certains prisonniers. Britney Spears, AC/DC, Queen ou encore Bruce Springsteen seraient diffusés à fort volume dans les cellules des détenus pour les faire craquer. Parmi les groupes choisis, on trouve le groupe de métal-électro canadien Skinny Puppy. Pour protester, la formation a envoyé au Pentagone une note réclamant des droits de diffusion, ont rapporté les quotidiens britanniques The Independant, le 31 janvier, puis The Guardian, le 7 février. Skinny Puppy réclame ainsi 666 000 dollars (484 000 euros) à la Défense américaine. « Nous leur avons envoyé une facture, étant donné qu’ils avaient utilisé notre musique à notre insu, comme une arme contre des individus », a déclaré récemment Kevin «Ogre» Ogilvie, membre fondateur de ce groupe de rock métal sur la chaîne CTV. De plus, sur les 166 détenus à Guantanamo, 86 ont été déclarés libérables ou transférables dans leur pays d’origine, mais restent prisonniers sur cette enclave située à Cuba, qui échappe au système judiciaire américain ordinaire. Selon les autorités de la prison, 100 prisonniers sont en grève de la faim pour protester contre ce maintien en détention, qui dure parfois depuis plu-

sieurs années. Certains jeûnent depuis presque un an, date à laquelle une révolte a éclaté après une fouille généralisée et décrite comme brutale dans un des camps de la base militaire. Les autorités de la prison ont décidé de nourrir de force entre 20 et 30 prisonniers, dont la santé était « jugée préoccupante ».

Des prisonniers gavés comme des oies Selon un document publié par Al-Jazeera, ces derniers sont attachés sur une chaise, le visage obstrué par un masque « pour éviter crachats et morsures ». Chaque prisonnier est ensuite pesé. Après une anesthésie locale, une sonde est introduite par une narine jusqu’à l’estomac, et le liquide nutritif versé. L’opération dure « habituellement 20 à 30 minutes », selon le document, et « ne devrait pas excéder deux heures ». Le prisonnier est ensuite isolé dans une cellule où il est constamment surveillé pendant soixante minutes pour s’assurer qu’il ne vomit pas. Nabil Hadjarab, un des grévistes détenu à Guantanamo depuis 2002, a expliqué, dans une lettre publiée par l’Express, les raisons de sa mobilisation et de celle de ses codétenus. Par leur geste, tous entendent désormais dénoncer leur détention illimitée, sans inculpation ni procès. Un état de fait critiqué aussi par de nombreuses associations, dont Amnesty International et Human Rights Watch. Notons que le département de la Défense n’a

jamais nié de telles pratiques… Une pétition lancée par le colonel Morris Davis, ancien procureur militaire de Guantanamo, et réclamant à Barack Obama la fermeture de la prison, a déjà recueilli plus de 200 000 signatures sur le site www.change.org. Devant le tollé suscité, le président américain a promis de redoubler d’efforts. Il s’est engagé à œuvrer de nouveau en faveur de la fermeture et précisé que son administration allait reprendre contact (?) avec le Congrès, afin d’examiner les obstacles. « Je continue à croire que nous devons fermer Guantanamo ». Mais les raisons invoquées par celui qui reçut le prix Nobel de la paix juste après son élection interrogent ! On est loin de considérations humanitaires ! D’abord le prix : selon le président américain, « cela coûte cher » et « c’est inefficace ». Le Figaro explique ainsi que la prison de Guantanamo coûte chaque année 800 000 euros par détenu au gouvernement américain. Ce qui en fait la plus chère des États-Unis. Ensuite l’image : pour Obama, l’existence de cette prison, très critiquée dans le domaine des droits de l’homme, « affecte l’image des ÉtatsUnis à l’étranger, entrave la coopération antiterroriste avec nos alliés » et constitue un « outil de recrutement pour les extrémistes ». Le défenseur des droits de l’homme tous azimuts nous surprendra toujours. Jean-Pierre Delahaye

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© Présidence de la République

France / USA

Le renouveau atlantiste En visite aux États-Unis, le président français fait allégeance à l’Empire en matière de stratégie militaire, diplomatique et économique. Une relation empoisonnée… Tapis rouge, nouvelle entente, lune de miel, réussite totale, voilà quelquesuns des commentaires utilisés par la presse et certains observateurs proches de l’Élysée pour qualifier le voyage de François Hollande aux États-Unis à la mi-février. Il faut dire que le locataire de la Maison-Blanche avait mis « les petits plats dans les grands » pour recevoir son homologue français. « Satisfait de l’engagement de Paris, le président américain sort le grand jeu pour recevoir François Hollande » titrait Libération le 12 février dernier. Tout est dit ! Aux yeux de l’opinion internationale, la visite du vassal à son suzerain se devait d’être retentissante… Car si en 2012 l’arrivée d’un « socialiste » à l’Élysée avait jeté un froid à la Maison-Blanche, il n’en est plus de même aujourd’hui. Le nouveau tandem transatlantique semble se reformer. Après la publication d’une tribune commune sous la signature des deux présidents et publiées simultanément dans Le Monde et le Washington Post, les deux présidents se sont félicité des bonnes relations entre les deux nations, notamment sur les grands dossiers internationaux. « Ce niveau de coopération était inimaginable, il y a à peine une décennie. Celle-ci n’a jamais été aussi forte » a déclaré Obama au cours d’une conférence de presse commune (…). « La France est aujourd’hui un des alliés les plus proches des États-Unis » a ajouté le président américain. Aujourd’hui, Paris et Washington revendiquent une proximité stratégique et militaire sans précédent depuis les deux guerres mondiales. Qu’il s’agisse des sanctions et des menaces vis-à-vis de l’Iran, de la « fermeté » manifestée face à Damas après la prétendue « utilisation d’armes

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chimiques » ou de la coopération militaire sur le continent africain pour protéger les intérêts occidentaux et rester maître des évolutions politiques. Les deux pays sont, pour le moment, quasiment sur la même longueur d’ondes. On est bien loin de l’attitude forte et indépendante de la France et du discours du ministre des Affaires étrangères de l’époque, Dominique de Villepin, aux Nations unies, refusant de s’aligner derrière la bannière étoilée pour faire la guerre au peuple irakien ! Comment comprendre un tel rapprochement ? Probablement un des éléments clés de ce retournement a été le retour de la France dans le commandement intégré de l’OTAN, initié par le précédent gouvernement et plus tard par « l’évolution » du gouvernement socialiste sur cette question.

Retournement atlantiste Après avoir critiqué la décision de Sarkozy, les socialistes français ont officialisé leur changement de position dans un rapport de l’ancien ministre des Affaires étrangères, Hubert Védrine, dont les conclusions positives ont été accueillies avec chaleur à Washington et ont constitué un tournant décisif. Cette nouvelle entente tient compte également du pivot vers l’Asie opérée par Obama nécessitant un besoin accru d’alliés en Europe pour faire le « job ». Or l’intransigeance de la chancelière allemande sur certaines questions (notamment l’affaire de la NSA) et le relatif effacement de la Grande-Bretagne de David Cameron, tout entier concentré sur les problèmes de politique intérieure, placent la France en partenaire privilégié… D’autant plus que Hollande

est un fervent partisan de la signature d’un accord de libre-échange entre l’Union européenne et les USA qui consacrerait la domination économique des États-Unis sur le vieux continent. Autre élément qui ravit Washington, l’interventionnisme français en Afrique. Pour les observateurs, le tournant a eu lieu au Mali l’an dernier. L’administration Obama a apprécié l’engagement résolu de Paris dans la « lutte antiterroriste dans le Sahel » et l’a fait savoir en soutenant l’opération Serval. Les États-Unis ont ainsi fourni des avions ravitailleurs, du transport logistique et du renseignement aux Français. Par la suite, ils ont accepté de leur vendre deux drones d’observation, lesquels ont depuis rejoint leur base au Niger, aux côtés de la flotte US déjà déployée sur place. Ainsi Obama délègue à la France le rôle de bras armé sur le très riche et très convoité continent africain… Enfin, le virage social libéral de Hollande opéré ces derniers mois ne peut que rassurer la Maison-Blanche. La visite aux patrons de la Silicon Valley en a été une forte démonstration ainsi d’ailleurs que la récente rencontre à l’Élysée avec des investisseurs étrangers. Obama qui s’y connaît en matière de retournement politique a d’ailleurs souligné que la France avait engagé « des réformes structurelles difficiles (…) qui vont l’aider à être compétitive ». Et surtout, surtout, le tournant du président français « vers une économie de l’offre » a été salué par le Wall Street Journal. Une consécration du temple du capitalisme. Jean-Pierre Delahaye


le caHier MÉMoire

le réveil

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DES COMBATTANTS

Pour l’amitié, la solidarité, la mémoire, l’antifascisme et la paix

L’ARAC témoin et actrice de l’histoire les ligues placent devant leurs troupes des anciens combattants de l’Union nationale des combattants (UNC) avec leurs drapeaux. Ce même jour, l’ARAC a appelé ses membres à manifester « contre le régime des profits et des scandales, contre ses mandataires, le gouvernement de M. Daladier, auteur de la révision des pensions, contre la politique impérialiste, pour l’arrestation du préfet Chiappe, contre le fascisme et la guerre ». Trois mille anciens combattants de l’ARAC sont dans la rue. Ils se battent contre les Croix-de-Feu du colonel de La Roque, soutenus par des mili-

Édité par le Réveil des combattants - 2 place du Méridien - 94807 Villejuif - Tél. 01 42 11 11 12

tants de l’UNC qui se sont joints à eux. Ils se retrouvent ensemble à défendre le palais Bourbon contre les factieux en affirmant leurs revendications. Ainsi, l’ARAC fut non seulement témoin mais aussi actrice de cet événement et des luttes antifascistes qui suivirent appelant au front unique contre les « décrets-lois » et contre le fascisme. Il n’est pas inutile de le rappeler au moment où l’on voit fleurir, ici ou là, des textes prétendument historiques dont les auteurs « arrangent » les faits à leur manière.

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Par Paul Markidès

Le 6 février 1934, Édouard Daladier présente à la Chambre des députés son gouvernement. Le pays est marqué par l’inefficacité du gouvernement précédent de Camille Chautemps, le suicide de l’escroc Stavisky qui avait des complicités dans la police, la magistrature et le Parlement. Les ligues factieuses profitent de cette situation instable pour organiser, ce jour-là, des manifestations dont la plus importante est mise sur pied à Paris, place de la Concorde, dans le but d’assaillir la Chambre des députés. Voulant tromper le monde sur leurs intentions,

ÉDITO

6 février 1934

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LE RÉVEIL dossier

Le tournant de février 1934 Jacques Girault Pour la droite, se précisent deux possibilités : la déstabilisation des institutions républicaines (c’est le but de l’extrême droite) ou le simple renversement de la majorité au Parlement. Ces deux aspirations se renforcent.

Les scandales économico-politiques Les spéculations à la limite de la légalité deviennent moins possibles en raison des difficultés économiques. Souvent elles se réalisent avec des interventions de parlementaires ou des ministres, souvent avocats d’affaires. Des scandales nationaux s’accompagnent sur le plan local de crises semblables comme la faillite d’un établissement bancaire drainant l’épargne des habitants des communes du golfe de Saint-Tropez (Var). Dans ce contexte de faiblesse gouvernementale, de crise économique et sociale, d’agitation de ligues mollement réprimée par le préfet de police Jean Chiappe, l’affaire Stavisky éclate. Alexandre Stavisky agit à Orléans puis à Bayonne. Le principe ne varie pas : le Crédit municipal prête des sommes représentant une partie des objets déposés, bijoux volés, vrais ou faux, surévalués par un expert. Le Crédit municipal émet des bons auprès d’institutions financières. Stavisky minore sur les souches du Crédit les sommes versées par les institutions et encaisse la différence grâce à des complicités. Il obtient une recommandation d’un ministre radical-socialiste pour les groupes investisseurs intéressés par les bons du Crédit. De plus, il bénéficie de l’aide du député maire radical-socialiste de 14 -

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6 février 1934 : une barricade élevée par des manifestants issus des couches moyennes

Extrait du livre de Jacques Girault, Au devant du bonheur, Éditions du Cide. Cet ouvrage est disponible aux Éditions de la compagnie internationale pour le développement de l’édition, 2 rue Georges Saché, 75014 Paris.

Bayonne. Le 2 juillet 1933, quatre bons négociables de l’UrbaineVie ne peuvent être couverts par le Crédit qui manque de fonds. Une enquête découvre l’escroquerie. Le directeur du Crédit avoue 239 millions de francs de faux bons. Après l’arrestation de deux députés radicaux-socialistes, de deux directeurs de journaux subventionnés par l’escroc (La Volonté et La Liberté), les activistes de droite exploitent l’affaire. Le 3 janvier 1934, l’Action française dénonce les complicités radicalessocialistes de Stavisky qui meurt le 8 janvier 1934 (suicide selon le ministère, assassinat par la police selon la droite). L’Action française qualifie de « chef d’une bande de voleurs et d’assassins » le président du Conseil radical-socialiste Camille Chautemps qui refuse la constitution d’une commission d’enquête. La presse de droite lui reproche aussi de couvrir la mollesse de la justice. La CGT, soutenue par les partis de la gauche non communiste et non radicale, prévoit dès le 7, une grève générale contre la menace fasciste, le lundi 12 février. Pour le Parti communiste se combinent

la défiance vis-à-vis des dirigeants socialistes et les sentiments profonds de la base, variables selon les régions. Il appelle, avec la CGTU, à manifester, le 9 février, place de la République, contre le fascisme mais aussi pour l’arrestation de Chiappe, des ministres responsables de la répression violente, désignés comme “fusilleurs”, pour un gouvernement ouvrier et paysan. En dépit de l’interdiction, des socialistes rejoignent les manifestants communistes ; les heurts avec la police font plusieurs morts. Le Parti communiste vient de démontrer ses possibilités. Le Parti communiste et la CGTU appellent à participer à la grève pour le « front unique prolétarien », tout en mettant en garde contre les dirigeants réformistes. Des intellectuels la soutiennent. Partout, le dimanche, des rassemblements se produisent et, le lundi 12, la grève réussit. Mais les différences interviennent en fonction du milieu. Par exemple, les instituteurs font grève pour la première fois de leur histoire. Dans l’Ain, en milieu rural, la grève est


dossier LE RÉVEIL

peu suivie et un militant syndical est même « assailli à coups de fusil » par des parents quand il arrive à l’école pour assurer la garderie. A Oyonnax, cité ouvrière, les instituteurs défilent avec les ouvriers, parents d’élèves, qui proclament « les maîtres sont avec nous ». Dans toutes les villes de province, des manifestations s’organisent parfois après la tenue de réunions publiques. Dans la capitale, à Paris, dans l’après-midi, deux cortèges descendent le cours de Vincennes, les communistes et les unitaires, côté nord, les socialistes, leurs sympathisants et les confédérés, côté sud. Les mots d’ordre visent à combattre le fascisme. Ils contournent lentement la place de la Nation et se retrouvent face à face. Aux cris d’« unité », les deux cortèges se mêlent. Une vague de fond ouvrière et populaire prend naissance. « À bas les voleurs » crie-t-on dans les multiples manifestations organisées dans les rues de Paris. Cette offensive politique se termine par la mise en minorité du gouvernement. Daladier forme le nouveau gouvernement et révoque Chiappe, préfet de police. Les ministres modérés démissionnent aussitôt.

Le mouvement Amsterdam-Pleyel crée des comités locaux, dont celui d’un quartier de Gennevilliers, qui organise une sortie champêtre à Feugerolles (Seine-et-Oise) en août 1934

attaques conduites par les adhérents de Solidarité française qui ne parviennent pas à leurs fins. Ils se poursuivent pendant la nuit sur les grands boulevards. Selon les données fournies par le rapport de la commission d’enquête parlementaire, on dénombre 15 morts, dont un parmi les forces de l’ordre et 1 435 blessés, dont 780 parmi les gardiens de la paix. Dès le lendemain, la presse de droite accuse le gouvernement qui vient de faire massacrer des Français honnêtes. La gauche socialiste crie à la menace de coup d’État. En fait, les ligues et les anciens combattants, aux programmes forts divers, ont été utilisés par la droite pour obtenir la démission du gouvernement. Malgré le vote massif de la Chambre en sa faveur, Daladier constate qu’il ne peut vraiment compter sur la Justice, sur l’autorité militaire et sur la police. Lâché par ses proches, par le président de la République, il démissionne le 7 février. L’ancien président de la République, Gaston Doumergue,

constitue un gouvernement d’Union nationale avec des radicaux (Herriot, Sarraut), des représentants de la droite (Tardieu, Pierre Laval, Philippe Pétain). Reproduisant le scénario de 1926, la droite revient au pouvoir. La gauche semble divisée, le Parti communiste manifestant, le Parti socialiste SFIO se montrant désireux de défendre la République. Dans l’immédiat, tous deux votent à la Chambre contre Doumergue. Mais des organisations syndicales et politiques du mouvement ouvrier, des mouvements s’inscrivant dans la tradition de la gauche socialisante réagissent. Chacun à sa manière dénonce la menace fasciste sur les libertés républicaines. Dans le même temps, s’activent des regroupements unitaires de lutte contre le fascisme, jusqu’alors de faible rayonnement : Amsterdam-Pleyel ou le Front commun animé par l’ancien radical Gaston Bergery. Pourtant, l’unité n’est pas prévisible tant les stratégies de chacun sont éloignées.

Le 6 février Daladier présente son gouvernement à la Chambre ; les ligues et les anciens combattants (Union nationale des combattants et Association républicaine des anciens combattants) manifestent séparément sur les Champs Élysées. Les mots d’ordre diffèrent, mais une convergence s’établit autour de trois thèmes : contre les « voleurs », contre Chiappe, contre Daladier. Les forces de l’ordre interdisent de franchir la Seine vers le Palais Bourbon. Des heurts violents se produisent sur le pont de la Concorde lors des LE RÉVEIL - N°801 - MARS 2014

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L’ARAC, témoin et actrice Le Réveil des Combattants, février-mars 1934 L’ARAC a participé activement à la contre-manifestation du 6 février, où les adhérents de l’UNC ont servi de pantins aux forces fascistes qui opéraient derrière eux. Le 8 février, le Bureau du Comité central a proposé au Comité national de lutte, auquel notre association est adhérente, le manifeste suivant, dont les grandes lignes fixent l’orientation de front unique : « Association républicaine des anciens combattants et associations affiliées (1) (8 organisations, 11 fédérations) Comité Central, Paris - 226 rue Lafayette Contre-offensive immédiate Appel pour l’organisation de toutes les forces antifascistes de France. » Les événements des 6, 7 et 8 février soulignent avec une netteté tranchante que les classes dirigeantes du pays évoluent à une très grande vitesse vers un régime fasciste. Le double jeu, d’une part, de mesures gouvernementales prises pour « défendre » le régime républicain et, d’autre part, l’organisation des hordes fascistes, alterneront et se combineront. L’échéance plus ou moins lointaine ? Ce sera le fascisme avec ses victimes et ses dupes ! L’expérience de l’Allemagne a démontré que la défaite des travailleurs aurait pu être évitée si le Front unique avait pu se réaliser dès le commencement des menées hitlériennes. Nous connaîtrons irrémédiablement le même sort que les travailleurs allemands si nous demeurons divisés dans les entreprises, les associations, les syndicats, les faubourgs, les villages. Nous subirons le même destin si nous ne constituons pas de grandes organisations de défense où doivent prendre place tous les travailleurs, sans distinguer leurs tendances. Un tel mouvement est nécessaire et son organisation dépend uniquement de 16 -

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nous. Sans lui nous serons conduits inévitablement à une nouvelle boucherie mondiale qui sera préparée plus activement par un régime qui se fascise et le fascisme dont les fins ne peuvent être que meurtrières. Peut-on accepter plus longtemps de vivre aujourd’hui pour périr demain, entre des cloisons où nous sommes parqués et impuissants ? Voulons-nous tolérer davantage les mannequins de la politique démocratique qui nous livrent pieds et poings liés au fascisme ? Les anciens combattants que nous sommes, toujours à l’avant-garde depuis 1918, vous appellent de toute la force de leurs poumons à forger votre front unique. Il sera invincible, si nous savons en prendre l’initiative en accomplissant tout notre devoir. Il s’organisera avec une force indestructible si nous groupons tous les antifascistes de France. Il balaiera les hordes fascistes et le régime de boue, de sang, de misère et d’exploitation. Travailleurs des villes et des villages ! Anciens combattants de toutes associations ! Jeunes gens ! Il vous appartient de répondre immédiatement à notre appel en prenant vous-mêmes les initiatives nécessaires, sans autre considération dans l’usine où vous travaillez, dans le quartier où vous habitez, dans le village où vous cultivez, dans l’organisation où vous militez. Faites un appel public ! Réunissez-vous ! Formez de suite votre comité ! Donnez-lui une direction indépendante !

(1) Association républicaine des anciens combattants et ses associations affiliées : Amicale des Alpes, Association nationale des cheminots AC, FOPC, Union des AC des TCRP, SOP du Nord, Fédération autonome d’Alsace-Lorraine, FOPI, etc.

Au moment où les chefs fascistes freinent eux-mêmes le développement de leur propre action en faisant confiance à l’Union nationale chargée d’appliquer leur programme, il nous appartient de passer à la contreoffensive, qui doit prendre les proportions d’une grande vague populaire contre le fascisme. A bas le régime de la croix gammée ! Vive le front unique des travailleurs de France !

Proposition d’un manifeste au Comité national de lutte contre la guerre et le fascisme Bureau du Comité central de l’ARAC Paris, le 8 février 1934 A bas le fascisme ! Anciens combattants rescapés de la dernière Organisez votre Front unique Le Réveil des Combattants, févriermars 1934 Nous avons fait la guerre, nous a-ton dit, pour « une civilisation plus élevée », pour « défendre le droit » et « vivre libres ». Quinze années se sont écoulées depuis le cessez-lefeu du 11 novembre 1918. Que sont devenus les buts pour lesquels des millions d’hommes sont morts ou ont été affreusement mutilés ? Les profiteurs de guerre ont accru leurs odieux bénéfices en rançonnant les travailleurs, en trafiquant des ruines et des cadavres, en mettant à l’encan le patrimoine national et en organisant le pillage de l’épargne publique. Voila la civilisation plus élevée qui nous a été promise ! A la guerre de la « destruction du militarisme » a succédé, au nom du « droit » des généraux et des capitalistes, la paix armée jusqu’aux dents. Nos fils et nos familles risquent une guerre plus sauvage que celle que nous avons faite. Voilà ce qui reste du « droit » et de la « Paix » pour lesquels nous avons combattu !


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Les « victorieux » que nous sommes chôment par milliers et meurent de faim, nos commerces écrasés d’impôts attendent la faillite, les terres que nous cultivons ne nous permettent plus de vivre et sont menacées de saisie. Et, pour organiser notre liberté, le fascisme des Tardieu, Coty, La Rocque, Weygand, Rossignol, Daudet, Chiappe, instruments payés par la haute finance et le gros capital, enrichis par la guerre, s’apprête à nous imposer le régime de l’huile de ricin et de la croix gammée ! Nous n’avons pas fait 52 mois de tranchées pour en arriver là !

Le fascisme a tenté son premier assaut Profitant de la corruption installée dans le régime et de l’indignation générale, les hordes fascistes, à la solde des profiteurs de guerre, comprenant dans leurs rangs une majorité d’embusqués de la « dernière » et de jeunes gens de l’aristocratie, ont tenté un premier coup de main le 6 février. Les hordes fascistes, pour masquer leur mauvais coup, avaient placé en avant les drapeaux tricolores de l’UNC et une masse d’anciens combattants avec leurs médailles, tandis qu’elles opéraient derrière avec les revolvers. Ainsi, nos camarades de l’UNC, dupés, ont joué le rôle de pantins dont les ficelles étaient tirées par les chefs fascistes et la haute volée des profiteurs du régime, prêts à la curée. L’organisation des Croix-de-Feu en accord avec la camelote royale, les séides de Cory et les jeunesses patriotes, dirigeaient militairement les opérations. Croix-de-Feu ? Oui, dans les sections pour la couverture ! Mais dans les formations d’assaut des officiers, des jeunes bourgeois, le tout placé sous la présidence d’honneur du général Weygrand, non titulaire de la carte du combattant ! A ce premier assaut, la classe ouvrière a répondu magnifiquement,

six jours durant, l’ARAC et les anciens combattants aux premiers rangs !

L’ARAC vous alerte ! La mobilisation nationale antifasciste, pour être effective, a besoin du concours des millions d’anciens combattants de ce pays non disposés à accepter la trique fasciste et la terreur du régime de la croix gammée. Anciens combattants de toutes les associations, formez votre front unique antifasciste ! Camarades qui êtes restés chez vous jusqu’ici, sortez de votre isolément et prenez rang dans notre mouvement ! Aidez et soutenez l’ARAC dans le grand effort d’organisation qu’elle entreprend. Participez, avec un cœur résolu, à l’action qu’elle engage ! Le front unique des anciens combattants étouffera le fascisme !

Défendons nos revendications ! Ce n’est pas le nouveau gouvernement d’ «Union sacrée» qui nous évitera le fascisme. Bien au contraire, il prendra des mesures fascistes, comme Brüning en Allemagne, en juillet 1931, supprimant les pensions des invalides dont les taux de mutilations étaient égaux ou inférieurs à 30 %. Pour mieux réaliser les grandes opérations projetées contre les anciens combattants et les victimes de la guerre, le gouvernement de la “Sacrée Union” a pris un otage dans les rangs mêmes des anciens combattants, en faisant ministre des Pensions Rivollet, secrétaire général de la Confédération. En face de cette situation, nous devons défendre plus que jamais les revendications des anciens combattants et des victimes de la guerre, dont le devoir de front unique est toujours plus précieux : Abrogation de la loi sur la révision des pensions ! Révision des scandaleux rejets de pensions dont ont été victimes des

Place de la Madeleine, la manifestation d’extrême droite s’étire boulevard des Italiens, le 6 février 1934

milliers de combattants du front ! Droit d’instance pour toute nouvelle demande de pension, sans catégorisation ! Prorogation de la loi sur les emplois réservés pour les mutilés ! Application de la loi sur l’emploi obligatoire ! Droit à la carte et à la retraite du combattant pour tous les combattants de la zone rouge et tous les prisonniers de guerre sans distinction ! Rétablissement de la présomption d’origine pour les après-guerre. Maintien intégral des droits acquis par les fonctionnaires et assimilés anciens combattants. Paiement de l’indemnité de vivre et d’entretien aux anciens combattants de guerre. A blessure égale ou dommage égal, réparations égales. Le Comité Central de l’ARAC et des associations affiliées

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A gauche, vers l’Unité populaire Jacques Girault Le succès de la grève du 12 février 1934 fortifie les aspirations à l’unité, d’autant plus que le gouvernement prend de nouvelles mesures contre les salariés. Le succès des nombreuses manifestations du 1er Mai à Paris et dans diverses villes confirme les potentialités de lutte. L’aspiration antifasciste, de nature fort diverse, grandit notamment chez les intellectuels. Le mouvement Amsterdam-Pleyel et l’Association des écrivains et artistes révolutionnaires étant considérés comme trop proches des communistes, des personnalités, avec le soutien du Syndicat national des instituteurs, appellent à la formation du Comité de vigilance des intellectuels antifascistes, le 5 mars. Les initiateurs mettent en évidence les trois forces de gauche, il s’agit de l’ethnologue Paul Rivet, socialiste SFIO, du philosophe Alain, de sensibilité radicale, et du physicien Paul Langevin, membre du Front commun et proche des communistes. Des centaines d’intellectuels répondent dans la France entière. Le comité annonce 10 000 signataires au début de l’été 1936. Outre les oppositions entre communistes et socialistes, les griefs anciens entre radicaux et socialistes persistent. Les premiers reprochent aux seconds leurs surenchères et leur soutien sans participation en 1924 et en 1932. Les seconds jugent que les premiers, en s’alliant à la droite, l’ont remise au pouvoir. Finalement la ligne de gauche défendue par Daladier l’emporte dans le parti radical. Les difficultés internes des partis qui se réclament du mouvement ouvrier trouvent des 18 -

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Extrait du livre de Jacques Girault, Au devant du bonheur, Éditions du Cide. Cet ouvrage est disponible aux Éditions de la compagnie internationale pour le développement de l’édition, 2 rue Georges Saché, 75014 Paris.

Le 12 février 34, des militants de la « Littérature prolétarienne » manifestent aux côtés des communistes et des militants de la CGTU sur le cours de Vincennes.

solutions. Dans le Parti socialiste SFIO, les néo-socialistes, qui souhaitaient redéfinir le projet socialiste, ont été exclus et les courants de gauche de la Bataille socialiste et de la Gauche révolutionnaire poussent à l’action. Dans le Parti communiste, la stratégie centrée sur la défense de la révolution soviétique et la rupture avec le courant réformiste s’accompagne d’avancées dans le domaine culturel, dans la lutte pour la paix et contre le fascisme (Mouvement Amsterdam-Pleyel). Des situations nouvelles débloquent certains freins à l’union. Ainsi le pacte d’assistance mutuelle entre l’URSS et la France, en mai 1935, entraîne une vision nouvelle de la défense nationale pour les communistes français. Jusqu’alors, au nom d’un antimilitarisme fondamental et d’une condamnation du militarisme français qui préparerait une fu-

ture guerre contre l’URSS, ils refusaient les politiques de défense nationale. Maintenant leur hostilité retombe puisque cette dernière pourrait servir la lutte contre le fascisme dans le monde. L’image de l’URSS dans l’opinion se modifie. Mais la politique extérieure inquiète (affaire d’Éthiopie). A la lumière de l’échec en Allemagne de la tactique communiste, un changement stratégique s’esquisse dans l’Internationale communiste pour engager une lutte élargie contre le fascisme dans le monde. En France, lors de la conférence d’Ivry (26 juin 1934), Thorez propose une « unité syndicale dans une seule CGT », permettant une alliance antifasciste avec les couches moyennes pour la défense de la démocratie. Il invite aussi ses camarades à aimer « leur pays ». Cette initiative apparaît comme le point de


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départ du rassemblement populaire. Le rapport de Georges Dimitrov au congrès de l’Internationale communiste en juillet-août 1935 officialise cette ligne antifasciste dont la France devient le terrain expérimental. Dans le domaine politique, des rapprochements se produisent entre le Parti communiste et le Parti socialiste SFIO, où des militants, notamment dans la Fédération de la Seine, manifestent une attitude plus unitaire. En province, dans le Var en particulier, des actions communes s’esquissent entre socialistes et communistes, notamment pour défendre les intérêts des travailleurs et pensionnés de l’État touchés par les décrets-lois. La prise en compte de la situation française par l’Internationale communiste et l’aspiration à l’unité des ouvriers français ouvrent la voie à un pacte d’unité d’action, le 27 juillet 1934, signé entre les directions du Parti communiste et du Parti socialiste SFIO. Il met fin aux agressions réciproques et libère les énergies communes contre le fascisme, le danger de guerre et les décretslois, conséquences de la politique déflationniste du gouvernement. La première manifestation de ce nouvel état d’esprit honore la mémoire de Jean Jaurès, deux jours plus tard. Durant cette période, les ligues ne cessent de se renforcer. Leurs activités inquiètent et prennent un ton de plus en plus agressif au fur et à mesure que la riposte de la gauche s’organise. Le Parti communiste propose de constituer un « Front populaire de la liberté, du travail et de la paix » (24 octobre 1934), à la veille du congrès radical-socialiste. Cette perspective d’une alliance avec les classes moyennes arrive au moment où les radicaux, attaqués par la droite, envisagent de se rap-

procher de la gauche. Ces changement permettent des succès lors des élections cantonales (octobre 1934) et municipales (mai 1935), consécutifs aux désistements réciproques à gauche. Particulièrement marquante apparaît la victoire de l’animateur du Comité de vigilance des intellectuels antifascistes, Rivet, dans le quartier Saint-Victor (Ve - arrondissement de Paris).

En juin 1935, dans le Var, dans l’ancienne circonscription du socialiste Renaudel, décédé, un ouvrier communiste de l’arsenal maritime de Toulon, ancien dirigeant syndical de la CGTU, Jean Bartoloni, devient le premier député élu par une majorité se réclamant du Front populaire.

La puissante démonstration de l’ARAC aux Champs-Élysées L’Humanité, février 1934 Au Châtelet, dans les rames de métro qui sont pleines de manifestants révolutionnaires dès 8 heures, les cris renouvelés partent « Chiappe en prison ! » Les cris reprennent lorsque les agents, à des stations avant la Concorde, montent ou descendent. Les manifestants, où l’élément ouvrier domine avec, par-ci par-là, un bourgeois exhibant la légion d’honneur ou la croix de guerre, se groupent vers 20 h 30 sur l’avenue des Champs Élysées au-delà du rond-point. Sur le côté droit, en montant vers l’Etoile, tout est noir de monde. On entend tout en haut, vers l’Etoile, monter une puissante Internationale. En arrière, venant de la Concorde, monte à nouveau le cri : « Chiappe en prison ! » Puis encore plus fort : « Les Soviets partout ! » Des milliers et des milliers de voix tout le long de l’avenue lancent le même appel révolutionnaire. Les manifestants crient : « C’est la lutte finale ! Les Soviets partout ! Chiappe en prison ! Vive l’armée rouge ! » Ce sont les ouvriers, les travailleurs groupés derrière l’ARAC, par milliers, qui manifestent.

Les camelots du roi, les J.P. et autres fascistes disséminés ne manifestent pas leur présence à ce moment-là. A droite en montant, voici l’hôtel Claridge, la demeure somptueuse du « pauvre » Chiappe. La porte de fer est enfoncée, les portes d’acajou et de fer sont brisées aussi. Chiappe a eu sa « visite » ! Plus haut, en montant vers l’Arc de Triomphe, les cris révolutionnaires reprennent. Nous sommes partis à trois colonnes depuis la Concorde, nous dit un camarade que nous rencontrons. Ce fut magnifique. Les autres colonnes se sont maintenant retrouvées, passant par la droite de l’avenue, la grande manifestation rouge se poursuit. La riposte aux excitations fascistes a été rigoureuse ! Les manifestants de l’ARAC sont bientôt 3 000 ; ils ont suivi le parcours suivant : Étoile, boulevard Haussmann, Saint-Lazare, Trinité, place Clichy. Ce n’est que rue Lepic que des camions de flics réussissent, en chargeant sauvagement, à disperser nos camarades.

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Lors des obsèques d’une des victimes des journées de février 34, à l’église Saint-Augustin, des militants de la ligue Solidarité nationale défilent et saluent à la romaine.

Le témoignage d’Arthur Ramette Le 6 février au début de la soirée, j’ai quitté le Palais Bourbon avec Renaud Jean et Berlioz. L’ARAC avait appelé ses adhérents à se rassembler au rond-point des Champs Élysées et à se tenir prêts à toute éventualité. Il s’agissait de ne pas laisser les ligues factieuses, qui agissaient au nom des anciens combattants, maîtresses de la rue. Nous voulions donc tenter de joindre nos camarades qui avaient répondu à l’appel de l’ARAC. Nous avions traversé la place de la Concorde qui offrait un paysage d’après émeute : pavés arrachés, candélabres démolis, autobus incendiés, grilles brisées, débris de toute sorte jonchant le sol. Il y avait déjà eu des rafales de tir et des morts. Nous avions retrouvé le groupe de l’ARAC à l’entrée des 20 -

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Extrait du livre de Francis Crémieux et Jacques Establet, Sur le parti, 19391940 - Paris, Ed. Messidor, 1983

Champs Élysées vers les chevaux de Marly. Ils étaient quelques centaines, très indécis, ne voulant évidemment pas se mêler aux manifestations des Croix de Feu et finalement ne sachant que faire. J’ai proposé d’aller en cortège sur les boulevards et de contremanifester dans la mesure de nos forces. L’idée m’est venue en voyant le désarroi de nos camarades devant l’ampleur de l’émeute fasciste. Nous avons contourné les rassemblements factieux et nous avons atteint les boulevards. Une heureuse surprise nous y attendait. Les ouvriers arrivaient par groupe des banlieues, spontanément, alarmés à la sortie des usines par la gravité des événements. Il y avait beaucoup de monde sur les trot-

toirs et il régnait dans Paris une atmosphère extraordinaire faite de fièvre, d’excitation, d’inquiétude. La confusion était extrême. Nous avons tout de suite vu le parti que nous pouvions tirer de la situation. J’ai pris la parole avec Renaud-Jean et Berlioz. Nous avons tenu un meeting improvisé. L’accueil a été formidable. La plupart des ouvriers se joignaient à notre manifestation. Nous avons répété ces prises de parole tout au long des boulevards. Rapidement, nous avons été des milliers à défiler au chant de l’Internationale et en scandant des mots d’ordre antifascistes. Nous avons voulu nous rendre à l’Humanité, rue du Croissant. La police nous en a empêchés au prix de charges violentes. Mais jusque tard dans la soirée nous avons poursuivi notre manifestation qui avait pris une ampleur considérable. Nous avons fait entendre ainsi la seule note antifasciste de cette journée.


Vie de l’arac LE RÉVEIL

Février 1934 I Quelques précisions... La Nouvelle Vie Ouvrière et l’Humanité ont commémoré les événements du 6 février 1934 dans leurs pages « Histoire ». Ces deux dossiers ont amené la direction nationale de l’ARAC à faire deux mises au point et à s’adresser aux deux directions. Vous trouverez ci-joints des extraits des deux courriers. Ainsi que la mise au point de l’ARAC. Les faits L’ARAC a appelé ses adhérents anciens combattants et leurs compagnons de tranchées à manifester : « contre le régime des profits et des scandales, contre ses mandataires, le gouvernement de M. Daladier, auteur de la révision des pensions, contre la politique impérialiste, pour l’arrestation de Chiappe, contre le fascisme et la guerre ». Trois mille membres de l’ARAC sont dans la rue. Ils se battent contre les Croix-de-Feu du Colonel de La Rocque soutenus par des militants de l’UNC(1). C’est là une des grandes pages de l’histoire de l’ARAC. Après ces émeutes, l’ARAC appelle au front unique contre les « décrets-lois », contre le fascisme qui monte dans notre pays. (1) UNC : Union nationale des combattants, une organisation de droite encore aujourd’hui.

Article du Réveil des Combattants de février 1934, extraits « Les événements des 6, 7 et 8 février soulignent avec une netteté tranchante que les classes dirigeantes du pays évoluent à une très grande vitesse vers un régime fasciste. Le double jeu, d’une part, de mesures gouvernementales prises pour « défendre » le régime républicain et, d’autre part, l’organisation des hordes fascistes, alterneront et se combineront. L’échéance plus ou moins lointaine ? Ce sera le fascisme avec ses victimes et ses dupes ! » « L’expérience de l’Allemagne a démontré que la défaite des travailleurs aurait pu être évitée si le Front Unique avait pu se réaliser dès le commencement des menées hitlériennes. Nous connaîtrons irrémédiablement le même sort que les travailleurs allemands si nous demeurons divisés dans les entreprises, les associations, les syndicats, les faubourgs, les villages. Nous subirons

« Monsieur Patrick Le Hyaric L’Humanité 5, rue Pleyel - Immeuble Calliope 93528 Saint-Denis cedex Monsieur le Directeur, « Au nom de l’ARAC, nous tenons à manifester notre stupéfaction à la lecture du dossier « 6 février 1934 » paru le 6 février 2014 dans l’Humanité. Le journal du combat contre la guerre, contre le fascisme, peut-il laisser dire de tels mensonges par des historiens ? L’ARAC, créée en 1917, association de Paul Vaillant-Couturier, Raymond Lefebvre, Georges Bruyère, Henri Barbusse, Jean et Jacques Duclos et bien d’autres militants intellectuels de l’époque »... « La défense des valeurs républicaines de la Nation est le fil rouge de l’action de l’ARAC, de 1917 à nos jours »… Raphaël Vahé Patrick Staat Président Secrétaire général

le même destin si nous ne constituons pas de grandes organisations de défense. Sans lui nous serons conduits inévitablement à une nouvelle boucherie mondiale qui sera préparée plus activement par un régime qui se fascise et le fascisme dont les fins ne peuvent être que meurtrières. »… « Il nous appartient de passer à la contreoffensive qui doit prendre les proportions d’une grande vague populaire contre le fascisme. A bas le régime de la croix gammée ! Vive le front unique des travailleurs de France ! »

« Madame Agnès Naton Directrice de NVO 263 rue de Paris - Case 600 93516 Montreuil cedex Villejuif, le19 février 2014 Chère amie, « Dans le numéro de la Vie Ouvrière daté du 7 février 2014, vous avez réalisé un papier « idée historique » page 48-49 sur février 34. Cette période mérite d’être traitée, surtout au regard des enjeux actuels et de la montée de l’extrême droite en France. Mais, nous ne pouvons laisser passer une quelconque ambiguïté quant à la position de l’ARAC, l’association créée en 1917 par Henri Barbusse, Paul Vaillant-Couturier, Georges Bruyère et Raymond Lefebvre. Dès 1917, l’ARAC se positionne par un appel ardent à tous ceux des anciens combattants de cette guerre qui croient à la République et qui la veulent : « les principes républicains sont de tous côtés ou trop attaqués ou trop mal défendus. Il faut veiller sur la République. C’est à vous entre tous et avant tout qu’incombe ce devoir, survivant de la guerre des hommes, contre les oppresseurs. » « Nous nous permettons de revenir vers vous car une mise au point précise de l’attitude de l’ARAC à cette période nous semble nécessaire. »… Patrick Staat Secrétaire général de l’ARAC

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LE RÉVEIL Vie de l’arac

Loire-Atlantique (44) La section ARAC de Sainte-Luce-surLoire a honoré Martine Conan, fille de Renée Losq, résistante et déportée, adhérente de notre ARAC. Quand sa mère est décédée en 2003, Martine a repris le flambeau. Militante active, elle participe aux réunions, aux commémorations, à toutes les manifestations pour la paix, elle collecte pour le Bleuet de France. Le 14 février, le président Jean-Noël Badaud lui a remis la médaille d’honneur de l’ARAC. Martine symbolise notre nouvelle génération de militants dans une ARAC ouverte à tous ceux qui partagent nos valeurs : anciens et jeunes, femmes et hommes qui combattent pour l’amitié, la solidarité, la mémoire, l’antifascisme et la paix. Merci Martine nous sommes fiers de t’avoir parmi nous.

Ivry-sur-Seine (94)

Hommage aux 94 Ivryens morts à Auschwitz Dimanche 26 janvier, hommage solennel au parc Maurice-Thorez. Au terme de la 11e semaine de la mémoire du génocide des juifs et des Tsiganes, Ivry-sur-Seine commémorait la libération des camps d’Auschwitz à l’occasion du 69e anniversaire de cet événement. A 10 h 30, devant une centaine de personnes, élus et représentants de formations politiques ont procédé à un dépôt de gerbe au pied de la stèle dédiée aux victimes du nazisme et du fascisme. Un temps de recueillement a été ob-

servé en mémoire des disparus. Le cortège s’est ensuite dirigé vers l’hôtel de ville, où les chorales du Moulin et Jacintas Zingers ont entonné plusieurs chants. Les noms des 94 habitants morts en déportation dans les camps d’Auschwitz ont été prononcés avant la clôture de la cérémonie.

Le Parisien du 27 janvier 2014

Cagnes-sur-Mer (06) La section de l’ARAC de Cagnessur-Mer a tenue son assemblée générale en janvier dernier sous la présidence de Marcel Innocenti et en présence du maire Louis Nègre. « Nous sommes là pour défendre les intérêts des anciens combattants et victimes de guerre, veuves et orphelins », a rappelé le président de l’assistance tandis que le trésorier Daniel Zaccure présentait les comptes de l’association.

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VIE DE L’ARAC LE RÉVEIL

Val-de-Marne (94) Fusillés pour l’exemple Samedi 8 février, plusieurs dizaines de personnes se sont retrouvées autour du thème des fusillés pour l’exemple, à l’invitation de l’ARAC du Val-de-Marne, de la Libre pensée et avec le soutien du Conseil général. Après la projection du film Blanche Maupas, en présence de l’auteur Alain Moreau, un débat de près de deux heures a eu lieu. La discussion a mis en évidence la volonté des deux associations de réussir à obtenir la réhabilitation collective de ces hommes qui ont été injustement condamnés. Dans l’assistance, on pouvait noter la présence de Mme Rabardel, viceprésidente du Conseil général, de Marie-Andrée Corcuff, directrice des Archives départementales et de JeanJacques Fromont, président de l’UDAC du Val-de-Marne.

Vigneux (91)

Essonne (91) Un espace « 19 mars » à Evry Sur proposition du maire d’Evry, Francis Chouat (PS), le conseil municipal de la « capitale » de l’Essonne a décidé à l’unanimité de donner au secteur du parc des Coquibus sur lequel est élevé le mémorial départemental des anciens combattants en Afrique du Nord, le nom « d’Espace du 19 mars 1962, cessezle-feu de la guerre d’Algérie ». Située à l’entrée du vaste emplacement occupé par le mémorial départemental et complétée par le rappel de l’ordre du jour du général Ailleret du 19 mars 1962, cette plaque a été inaugurée le

Assemblée générale de l’ARAC de Vigneux, le 8 février

samedi matin 15 février en présence du ministre Manuel Valls, du maire d’Evry, du préfet de l’Essonne, de Jérôme Guedj, député, président du Conseil général 91 et de nombreuses personnalités, dont le directeur du service départemental de l’ONAC. Plus de 50 drapeaux associatifs, dont ceux de l’ARAC, et plus de 500 personnes ont assisté à cette initiative de mémoire qui s’est prolongée en mairie par la remise de la Croix de chevalier de l’ONM à Guy Le Saux, président départemental de la FNACA, par le Ministre.

Initiative pour leVillage de l’Amitié Van Canh, le 1er mars. LE RÉVEIL - N° 801 - mars 2014

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LE RÉVEIL Vie de l’arac

Malakoff (92) Hommage à Georges Bruyère Comme chaque année à l’issue de son Comité Départemental, une délégation de l’ARAC 92, en présence de Raphaël Vahé, président national de l’ARAC, a rendu hommage à Georges Bruyère, l’un des fondateurs de notre ARAC, le 8 février dernier, au cimetière parisien de Bagneux.

Vaillant-Couturier et Raymond Lefebvre, en 1917, qui vous amènera à rendre visite à Henri Barbusse et a créer l’ARAC pour défendre les soldats, combattre la guerre, l’impérialisme, le capitalisme et la bourgeoisie régnante. Merci à toi Georges. Paul Vaillant-Couturier disait en parlant de toi : « Il est ma conscience prolétarienne ». Nous sommes fiers d’être tes successeurs » Jean-Claude Fèvre

Extraits de l’allocution de Michel Bassot président de l’ARAC 92 : « Salut à toi Georges, toi Georges Bruyère. Toi qui pendant des jours, des semaines, des mois a vécu cet enfer, de boue de feu, de sang. Toi, amoureux de la vie, toujours gai, bout en train remontant le moral de tes camarades. Mais c’est trop - la boue colle à la peau - les rats grouillent, les poux, la mitraille, les ordres de tous ces officiers obnubilés par la défense de ce monde capitaliste et cela malgré le prix que devront payer les hommes. C’est alors qu’un cri monte du fond de ta gorge, fort, vibrant, bravant ces officiers si prompts à fusiller. « Guerre à la guerre ! » Toi l’ouvrier, l’ajusteur tu as osé, rien ne pourra t’arrêter. Ta rencontre avec Paul

Hommage à Raymond Fassin

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LE RÉVEIL - N° 801 - mars 2014

A l’invitation de Madame le Maire Catherine Margaté, l’ARAC de Malakoff avec les autres organisations d’anciens combattants de la ville, en présence de son fils, ont commémoré le 69e anniversaire de la mort de Raymond Fassin, enseignant à Malakoff, officier de l’armée de l’air, avec le grade de lieutenant, ayant refusé la reddition de Pétain livrant la France à l’Allemagne fasciste et parti pour Londres rejoindre la France libre. Il revient en France, parachuté avec Jean Moulin dont il deviendra l’un de ses principaux collaborateurs, comme responsable et agent de liaison pour la région nord de la France. Arrêté à Paris le 2 avril 1944, il ne pourra apercevoir son garçon né en prison que quelques instants avant d’être déporté au camp de concentration Nevengamme, où il décèdera le 12 février 1945.


LE RÉVEIL Vie de l’arac

Fourques-sur-Garonne (47) La cinquante-septième assemblée générale de la section locale de l’ARAC de Fourques-sur-Garonne s’est tenue le samedi 8 février, sous la présidence

de Pierre Faure, en présence de Guy Dubourg, président départemental, de Jacques Bilirit, maire, de Raymonde Villabona, président de la section mar-

mandaise et Gilbert Bacqué, président de la FNACA à Samazan. Une minute de silence a été observée en mémoire de Jean Castagnet, vice-président de la section, disparu en novembre dernier. Le président Pierre Faure a cédé son poste au vice-président Jean Birepinte (notre photo).

Villeneuve-de-Berg (07)

Assemblée générale

Var en hommage ! Raoul Ugolini, notre adhérent fidèle depuis 1947 est décédé. Il avait résisté tout d’abord au STO d’où il s’était évadé. Il avait rejoint un groupe de résistants dans le Haut-Var, dont il était originaire, éprouvé, blessé au combat, il s’est naturellement engagé dans la vie civile comme maire-adjoint de Callian, et puis comme intervenant dans les collèges du

Var pour modestement raconter son douloureux passé et son combat contre le nazisme et les milices pétainistes. Nous ne pouvons que lui rendre hommage, il restera dans notre mémoire. Encore toutes nos condoléances à sa famille. L’ARAC était présente à cette cérémonie.

L’assemblée générale de la section de Villeneuve-de-Berg s’est déroulée au centre social. Le président Daniel Roche a adressé aux membres de l’association « le vœu collectif de rassembler et d’aller vers toujours plus de justice, de liberté, d’égalité et de fraternité ». Il a rappelé que cette année débute le cycle des commémorations nationales du centenaire de la Première Guerre mondiale dont la violence de masse a été sans précédent.

LE RÉVEIL - N° 801 - mars 2014

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LE RÉVEIL Vie de l’arac

Mémoire résistante I Arsène Tchakarian Ancien compagnon de Missak Manouchian Dernier survivant des commandos de l’Affiche rouge, Arsène Tchakarian témoigne inlassablement du courage des résistants FTP- MOI, morts il y a exactement 70 ans. Arsène Tchakarian vient d’avoir 97 ans. Il mélange un peu les dates et hésite parfois sur un nom, mais le regard reste vif et le vieil homme est toujours prêt à exposer, dans le moindre détail, l’histoire des commandos de l’Affiche rouge dont il est le dernier survivant. « Vous avez le temps ? », demande-t-il, ingénument. « C’est que, je suis bavard. » Pendant cinq heures d’affilée, oubliant une bronchite tenace, il raconte sa jeunesse, la Résistance, les travaux d’historien qu’il mène inlassablement pour témoigner. « Je suis en train d’écrire une

biographie des Arméniens qui ont participé à la libération de la France », précise-t-il. Son bureau est installé au sous-sol d’une petite maison de Vitry-sur-Seine. L’espace est encombré de plantes vertes, de livres et de documents sur la Seconde Guerre mondiale et sa patrie de cœur, l’Arménie. Né en 1916, en Turquie, d’une famille arménienne qui devra fuir, il arrive en France en 1930. Les premières années sont faites de petits boulots avant que la guerre ne l’entraîne dans le tourbillon de l’histoire. Il connaît déjà Missak Manouchian : tous deux ont participé, au début des années 1930, à une campagne d’aide aux enfants de l’Arménie soviétique. Lorsque Manouchian le contacte en 1942 pour entrer dans la Résistance, Arsène Tchakarian le suit sans hésiter. Le premier coup d’éclat a lieu le 17 mars

1943. Arsène, Missak et Marcel Rayman attaquent une formation de gendarmes allemands à Levallois-Perret. Dans les mois qui suivent, les résistants FTPMOI(1) multiplient sabotages et attentats, désorganisant la mécanique de l’occupation nazie. Arsène Tchakarian raconte ces faits dans un ouvrage publié en 2012(2). L’arrestation d’une partie du groupe en novembre 1943 et l’exécution de 22 résistants le 21 février 1944 vont mettre fin à ses activités. Arsène Tchakarian en réchappe et poursuit la lutte jusqu’à la libération du pays. Soixante-dix ans après les faits, Arsène continue de raconter cette histoire pour faire œuvre de mémoire et rendre hommage aux combattants de l’Affiche rouge. VDM 309 (Magazine du CG 94) Février 2014 - Didier Berneau (1) Francs-tireurs et partisans - Main-d’œuvre immigrée. (2) Les commandos de l’Affiche rouge, écrit avec Hélène Kosseian-Bairamian. Éd. du Rocher.

NOS PEINES mars 2014 Le Réveil des Combattants adresse aux familles et aux amis de nos camarades décédés ses sincères condoléances. AISNE (02) Saint-Quentin : Jean-Jacques BUART, AC ATM. ALLIER (03) Commentry : Henri COLLARD, 95 ans, Résistant. Georges DEMAY, 76 ans, AC ATM. Meillard : Edmond MALLEY, 80 ans, AC ATM. BOUCHES-DU-RHÔNE (13) La Fare-les-Oliviers : Pierre CAFFARATI, AC ATM. Saint-Marcel : Khatchik HATCHIKIAN, AC ATM. René MAUFFREY, AC ATM. CHARENTE (16) Ruelle-Isle-d’Espagnac : Guy GENTIL, 91 ans, AC 39-45. CHER (18) Argent-sur-Sauldre : Marcel LEGRAND, 92 ans, AC 39-45. Vierzon : Lucien DEZALIS, 78 ans, AC ATM.

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LE RÉVEIL - N° 801 - mars 2014

CORREZE (19) Clergoux : Mme Marie JOLY, 95 ans. Vigeois : Louis CONDAT, AC 3945. Jean VERGNE, AC 39-45. CÔTES-D’ARMOR (22) Saint-Nicolas-de-Pelem : Mme Simone AUFFRET. DRÔME (26) Valence : Abel GUIGON, réfractaire au STO entre dans la Résistance. Arrêté par la milice sur dénonciation, il réussit à s’échapper et rejoint l’Etat major FTPF puis FFI en Ardèche. Croix du Combattant Volontaire de la Résistance, Médaille Bronze de l’ORMCM. HÉRAULT (34) Lodève : Pierre VAREA, 79 ans, AC ATM, secrétaire général du comité, président d’honneur de la section. Montpellier : Mme Andrée TALI, 93 ans, AC 39-45, Résistante, Croix du Combattant Volontaire de la

Résistance, Médaille de l’ORMC, secrétaire adjointe du comité. Sète : Vincent MORA, AC 39/45.

SEINE-ET-MARNE (77) Esbly : Gaston CIVIDINI, AC ATM.

ISÈRE (38) Bourgoin-Jallieu : Gilbert DONNET, 89 ans, AC 39-45.

VAR (83) Saint-Raphaël : Raoul UGOLINI, AC 39-45, Résistant.

LOIRE (42) Saint-Chamond : Roger DESCOMBRIS.

HAUTS-DE-SEINE (92) Bagneux : Gilbert CHANDOUINEAU, AC ATM. Malakoff : Raymond MEYNIAC, AC ATM.

LOIRET (45) Fleury-les-Aubrais : Clotaire BEAULIEU, 95 ans, Résistant ayant participé au débarquement en Normandie. NORD (59) Feignies : Adolphe DELVALEE, 91 ans, Résistant, AC 39-45. Daniel DUHOT, AC ATM. PUY-DE-DÔME (63) Clermont-Ferrand : Mme Marguerite CHASSAIGNON.

SEINE-SAINT-DENIS (93) Bagnolet : Michel HUVE. VAL-D’OISE (95) Méry-sur-Oise : Daniel AYRAL, 76 ans, AC ATM. Mme Rose GARCIEL, 81 ans.


VOS DROITS LE RÉVEIL

Casques bleus de la FINUL et statut d’ancien combattant Michelle Demessine (ancienne ministre et sénatrice du Nord) a posé une question orale, le 21 janvier dernier, à Kader Arif, ministre délégué aux Anciens Combattants. La sénatrice du Nord rappelle tout d’abord que, depuis la création de la FINUL, 158 militaires français ont perdu la vie au Liban, parmi les 296 casques bleus qui y sont morts. Elle souligne le rôle de protection des populations civiles joué par les soldats français de la FINUL lors de l’invasion par Israël du Sud-Liban en 1978. Elle note que, lors de la nouvelle invaAnnonce 210x135 3D COPY:Mise en page 1 sion du Liban par Israël en 1982, ces militaires français du 420e détachement

de soutien logistique (DSL) ayant pris la relève de la 11e division de parachutiste, se sont retrouvés dans une situation particulièrement périlleuse, sous la menace des forces d’occupation israéliennes et de leurs milices. Or, constate Mme Demessine, ces anciens soldats français n’ont pas le statut d’anciens combattants et se sentent exclus de la reconnaissance de la Nation. Elle demande donc que soient mis en œuvre de nouveaux critères permettant l’attribution de la carte du combattant à ces soldats de la FINUL. Dans sa réponse, le ministre délégué aux Anciens Combattants, Kader Arif, reconnaît que : « Certaines compagnies du 420 DSL n’ont pu, faute d’éléments 7/10/11 11:08 Page 1 attestant une exposition au feu suffisante sur la base des critères de l’époque, être

reconnues combattantes que du 31 mai au 27 juillet 1980 et du 14 août au 12 septembre 1986 ». Comprenant l’attente des militaires concernés, Kader Arif s’est déclaré « favorable à une réflexion sur l’évolution des critères d’attribution de la carte du combattant au titre des OPEX, afin d’en simplifier et d’en clarifier le processus ». Il a donc demandé à ses services « d’examiner les conditions de faisabilité d’une application à toutes les OPEX d’un critère uniforme de 4 mois de présence, tel qu’il existe aujourd’hui dans le cas des opérations effectuées en Algérie, Tunisie et Maroc ». L’ARAC se réjouit de cette position qu’elle défend depuis des années (4 mois de présence consécutifs ou non sur l’ensemble des OEPX) et ne peut qu’insister pour que cette mesure soit concrètement et rapidement mise en œuvre, pour l’égalité de traitement du droit à réparation de tous les OPEX menée depuis des décennies.

Vous êtes Ancien Combattant titulaire de la Carte du Combattant et/ou du Titre de Reconnaissance de la Nation (TRN), veuve, orphelin, ascendant de “Mort pour la France”.

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Campagnes : ❏ Indochine ❏ 1939-1945 ❏ Conflits modernes ❏ ATM (1952-1964) - 27 LE RÉVEIL - N° 801 - mars 2014

RC


LE RÉVEIL Vos droits

Augmentation du point d’indice PMI à 13,94 euros Un arrêté du 28 janvier 2014, paru au J.O. du 12 février, majore de 2 centimes la valeur du point PMI, compte tenu de la variation de l’indice d’ensemble des traitements bruts de la fonction publique de l’État. Cette revalorisation du point PMI porte celui-ci à 13,94 euros (au lieu de 13,92) à compter du 1er juillet 2013. De ce fait, les pensions militaires d’invalidité, la retraite du combattant et le plafond majorable des rentes mutualistes AC vont légèrement augmenter. Ainsi, la retraite du combattant (indice 48) sera désormais réglée sur la base annuelle de 669,12 euros (soit 334,56 euros par semestre). S’ajoutera au prochain versement le rattrapage dû depuis le 1er juillet 2013, soit de 48 à 96 centimes selon la date à laquelle l’intéressé perçoit la retraite du combattant. Alors, en attendant le « champagne pour tout le monde ! », rappelons que, selon nous, l’État ne nous verse depuis 1989, que la moitié de ce qui nous est dû. Le point PMI devrait en effet être de 20,114 euros (44,9 % de retard), soit 965,47 euros par an, au lieu de 669,12. Les gouvernements successifs refusent depuis des décennies, d’ouvrir sur ce sujet la concertation.

Conjoint(e)s survivant(e)s Allocation de solidarité 2014 Le plafond de ressources pour percevoir l’allocation différentielle de solidarité destinée aux conjoint(e)s survivant(e)s a été « relevé » à 932 euros à compter du 1er janvier 2014. Rappelons que dans le montant des ressources prises en compte pour l’attribution de l’ADCS doit figurer obligatoirement le montant du RSA (Revenu de solidarité active, sans activité professionnelle) pour les personnes âgées de moins de 65 ans, et le montant de l’ASPA (Allocation de solidarité aux personnes âgées) pour les plus de 65 ans. • Au 1er janvier 2014 : - le montant du RSA pour une personne seule est de 433 euros/mois, - le montant de l’ASPA pour une personne seule est de 787 euros/mois. Par conséquent, au 1er janvier 2014 :

- Ressources égales à 787 e (ASPA) ADCS = 932 e - 787 e = 145 euros/ mois, - Ressources comprises entre 788 et 932 euros ADCS : 932 e moins le différentiel entre 788 et 932 euros. Le montant ci-dessus de l’ADCS pour les 65 ans et plus restera valable jusqu’au 31 mars 2014, le montant de l’ASPA pouvant être revalorisé à la date du 1er avril. Après cette date, l’ADCS fera l’objet d’un nouveau calcul prenant en compte le montant relevé de l’ASPA.

- Ressources à 433 e (RSA) ADCS = 932 e - 433 e = 499 euros/ mois,

Adhérents à la rente mutualiste Anciens combattants de l’ARAC Comment et quand sera appliqué le nouveau décret relatif aux subventions de l'Etat ?

• Le décret du 27 décembre 2013 s'applique à compter du 1er janvier 2014 mais n'abroge pas celui du 24 septembre 2013. Il n'y aura donc aucun réajustement quant aux 20 % de subventions d'État rabotés pour la période du 26 septembre au 30 novembre 2013. • Compte tenu des délais serrés entre le 1er janvier 2014 et les prochains arrérages de paiements :

LE RÉVEIL - N° 801 - mars 2014

• 65 ans et plus

• De 60 à 65 ans :

Suite à la demande de notre Mutuelle, la CNP, organisme officiel qui gère nos contrats mutualistes, nous a fourni les précisions suivantes :

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- Ressources comprises entre 434 et 932 euros ADCS = 932 e moins le différentiel entre 434 et 932.

- l'échéance du 1er mars 2014 sera encore réglée aux taux réduits (10 à 48 %, décret du 24 septembre 2013, - une régularisation prendra en compte les taux rétablis de subventions (12,50 à 60 %) en avril 2014, - l'application de ces (re)nouveaux taux se fera à partir du 1er juin 2014, date à laquelle nous percevrons, en plus, le rappel des régularisations pour la période du 1er janvier au 28 février 2014. Donc pas d'impatience, au 1er juin nous aurons récupéré les taux initiaux... plus le rappel du "manque à gagner" du début d'année.


VOS DROITS LE RÉVEIL

Cartes du Combattant Déjà 1 632 cartes ATM « à cheval » attribuées au 5 février 2014

Déclaration de la Commission nationale de la carte du combattant Le 24 février 2014 L’article 109 de la loi de finances pour 2014 (loi 2013-1278 du 29 décembre 2013) a modifié les critères d’attribution de la carte du combattant pour l’Afrique du Nord. Depuis le 1er janvier 2014, les services accomplis après le 2 juillet 1962 en Afrique du Nord peuvent être pris en considération pour le calcul des 120 jours de présence, à condition que les demandeurs aient été présents au plus tard le 2 juillet 1962 et que les services permettant de compléter à concurrence de 120 jours la durée de présence des intéressés soient effectués sans interruption après cette date. Les membres de la formation restreinte de la Commission nationale de la carte du combattant se réjouissent qu’au cours de leur réunion du 5 février 2014, soit un mois après la date d’application de la mesure, ils aient prononcé un avis favorable pour 1 632 « cartes à cheval » que l’Office national des anciens combattants et des victimes de guerre délivrera vers la fin du mois de février. Dès réception de leur carte, les bénéficiaires pourront déposer leur demande de retraite du combattant dans le service départemental (http://www.onacvg.fr/fr/carte) de l’ONACVG de leur lieu de résidence. L’effort sera poursuivi pour que toutes les demandes déposées dans les services départementaux soient étudiées dans les meilleurs délais. Office National des Anciens Combattants et Victimes de Guerre Direction générale Hôtel national des Invalides, 75700 Paris 07 www.onac-vg.fr

Le groupe spécial de travail de la commission plénière s’est réuni le 5 février 2014 à l’ONAC, aux Invalides. André Fillère y participait. Le groupe, examinant l’article 109 de la loi de finances 2014 a pris note que : - pour bénéficier de la carte du combattant avec 120 jours de présence en Algérie, le demandeur devait être arrivé sur place au plus tard le 2 juillet 1962, - cette mesure concerne également les intéressés servant, à l’époque, en Tunisie et au Maroc, - le TRN est attribué automatiquement dès lors que la carte du combattant est attribuée. Par ailleurs, le groupe de travail a salué les efforts mis en manœuvre par les services départementaux et le service de Caen ayant permis, à peine un mois après la publication de la loi de finances, d’attribuer déjà 1 632 cartes du combattant « à cheval » sur le 2 juillet 1962. • Le groupe de travail a examiné 4 879 dossiers, dont 6 retraits pour doublon de carte.

Les 4 873 dossiers restants ont droit à la carte et concernent : - 16 AC en Indochine, - 16 AC 39/45, - 2 582 dossiers AFN dont 1632 « à cheval », - 2 259 OPEX. Parmi ces derniers, 1 318 pour l’Afghanistan, 525 pour l’ex-Yougoslavie, 151 pour le Tchad, 83 pour la Côte d’Ivoire, 56 pour la Libye (opération Harmattan), 35 pour la République du Liban et d’Israël, 27 pour le Liban, 16 pour la région du Golfe persique et d’Oman, 15 pour la République Centrafricaine, le reste étant réparti entre le Gabon (7), Haïti territoires de la République (7), Kossovo (1), République de Somalie (1), République démocratique du Congo (4), Rwanda (8), Somalie (4), Somalie opération Atalanta (1). • Prochaines réunions - Groupe de travail : 1er avril, 3 juin, 16 septembre, - Commission plénière : 17 septembre.

Le Conseil constitutionnel dédouane le gouvernement ! La loi de finances pour 2014, votée par l’Assemblée nationale, comprenait pour les ACVG huit articles. Les premiers concernaient l’un, l’attribution de la carte du combattant pour 120 jours de présence en AFN à cheval sur le 2 juillet 1962, et l’autre, les pensions de veuves de grands invalides à partir de l’indice 10 000 (au lieu de 11 000). Les autres articles (112 à 116), bien qu’adoptés par les députés, ont été déclarés « non conformes à la Constitution par décision du Conseil constitutionnel ». Selon ces articles, le gouvernement devrait remettre au Parlement, avant le 1er juin 2014, des rapports détaillés sur : - l’action sociale de l’ONAC, l’attribution de l’ADCS aux anciens combattants et les subventions d’aide sociale attribuées aux associations d’ACVG, - les mesures à prendre pour attribuer

réellement le bénéfice de la campagne double aux ATM, - l’opportunité de reconnaître le statut d’anciens combattants aux casques bleus de la Force intérimaire des Nations unies au Liban, - l’opportunité et les modifications du décret d’application sur l’indemnisation des victimes des essais nucléaires français , - l’indemnisation des orphelins. En clair, le Conseil constitutionnel en “gommant” ces rapports auxquels aurait été contraint le gouvernement… a libéré celui-ci de toute obligation aux droits à réparation des ACVG. De bien mauvais “conseils” imposés par une Constitution - celle de 1958 - des plus nocives ! Et qu’il serait temps de déclarer “non conforme” à la démocratie.

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Exposition

Dans le cadre du centenaire de la Première Guerre mondiale Barbusse, combattant de la paix et du progrès social, auteur du Feu, Prix Goncourt en 1916 et fondateur de l’ARAC en 1917 avec Paul Vaillant-Couturier, Georges Bruyère et Raymond Lefebvre.

• 9 panneaux, format 85 X 160 cm • A commander au siège de l’ARAC - Tél. 01 42 11 11 12 • Achat : 700 e • Location : 150 e la semaine • Frais de port : 10 e L’exposition est consultable sur le site : www.le-reveil-des-combattants.fr

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magazine LE RÉVEIL

Charlotte Delbo, une inconnue ?

Charlotte Delbo, biographie de Violaine Gelly et Paul Gradvohl, Ed Fayard, 19 e

Paradoxalement, Charlotte Delbo, née et enterrée à Vigneux (91), est célèbre aux USA et mal connue en France. Aux États-Unis, elle est considérée comme l’équivalent de Primo Lévi. En France, son œuvre littéraire et théâtrale est lue et jouée depuis plus de 40 ans. Morte en 1985, qui connaît vraiment cette femme d’exception ? Secrétaire de Louis Jouvet, Charlotte (communiste), quitte en 1941 la troupe théâtrale en tournée en Amérique Latine, où elle est à l’abri, pour rejoindre la Résistance et combattre aux côtés de son mari Georges Dudach, lui aussi communiste. Ce dernier, avec Elsa Triolet, Louis Aragon, Pierre Villon, Georges Politzer, Jacques Salomon, Jacques Decour, œuvre dans le secteur des intellectuels avec l’édition clandestine de La pensée libre. Le 2 mars 1942, Charlotte et Georges sont arrêtés par la police française tandis que Pierre Villon parvient à s’échapper. Elle a 28 ans et c’est dans une cellule de la prison de la santé, le 23 mai 1942, qu’elle dit adieu à Georges, fusillé ce même jour au Mont Valérien. Déportée, Charlotte fait partie du convoi du 24 janvier 1943, le seul à avoir envoyé des femmes politiques à Auschwitz. Sur les 230, seules 49 reviendront après 27 mois de déportation dans l’horreur des camps de la mort. Charlotte, survivante, se jure alors de témoigner de l’incroyable fraternité qui a uni ces déportées et a permis à certaines de survivre. Elle écrit en prose, en vers pour dire et célébrer le courage et l’héroïsme de ces femmes. Elle est de toutes les actions pour les droits de l’homme et ne cessera de combattre l’injustice, de secourir les

plus faibles. A travers la trilogie Auschwitz et après *(Aucun de nous ne reviendra, Une connaissance inutile, Mesure de nos jours), Charlotte Delbo évoque les souffrances subies avec un degré d’intensité tel qu’il ne reste que l’inconscience ou la mort. C’est une voix chuchotante, déchirante, à fleur de vie et d’horreur. Un chant témoignage, un chant de lutte poignant comme Guernica ou Nuit et brouillard. L’œuvre de Charlotte Delbo, c’est la conscience du siècle, un appel à agir, à réagir : « Je vous en supplie / faites quelque chose / (…) parce que ce serait trop bête / à la fois / que tant soient morts / et que vous viviez / sans rien faire de votre vie » Un appel qu’ont repris nos camarades de l’ARAC de Vigneux (91) où est enterrée Charlotte, qui ont organisé sur sa tombe, puis en ville, une manifestation d’hommage à cette grande dame. *L e convoi du 24 janvier et Auschwitz et après , aux Éditions de Minuit.

La Caste cannibale Sophie Coignard et Romain Guibert, Éditions Albin Michel

Comment l’école de Chicago, qui a réinventé le libéralisme, a-t-elle transformé la gauche, de Mitterrand à Hollande ? Par quel mécanisme pervers nos impôts financent-ils ce qu’il y a de plus toxique dans la salle des marchés ? Le grand patron de Renault, Carlos Ghosn, sait-il vraiment ce qui se passe dans son entreprise ? Pourquoi le forum de Davos censure-t-il un grand banquier ? Dans quelles conditions trois hauts fonctionnaires français, tous de gauche, ont-ils accéléré la mondialisation financière ? Que fait Nicolas Sarkozy avec le

Washington Speakers Bureau ? Que cachent parfois les décisions stratégiques de certains grands patrons ? Dans cette enquête qui mêle reportage et analyse, Sophie Coignard et Romain Guibert, grands reporters au Point et auteurs de L’Oligarchie des incapables, nous racontent comment, de Londres à Washington en passant par Francfort, Bercy ou Chicago, l’alliance contre nature entre un État immoral et un capitalisme cupide a produit un système cannibale qui peut à tout moment se retourner contre chacun d’entre nous.

Dans l’ombre de Charonne Désirée et Alain Frappier, préface de Benjamin Stora, Ed. Mauconduit, 18,50 e

Maryse, miraculée des victimes de la répression policière de Papon et de ses sbires OAS, au métro Charonne à Paris, le 8 février, finit (50 ans plus tard) par raconter son histoire à Désirée et Alain Frappier. Ils en ont fait une superbe BD, un roman graphique, touffu, documenté, ludique. Un livre pour l’histoire. Charonne, huit victimes sur le pavé, tous CGT, dont 7 communistes. Un neuvième succombera deux mois plus tard. A l’heure où l’histoire est prise en otage pour écrire un roman national erroné, cette BD participe intelligemment à la construction de notre mémoire et souligne un nombre incroyable de points communs entre ce qui se disait à l’époque sur les Algériens et ce qui se dit sur eux aujourd’hui. En clair, la criminelle OAS est la racine du front de la haine, le FN. Et cette BD poignante vous étreint la gorge, le passé remontant en larmes et en poings serrés. La justice est toujours en attente et le combat aujourd’hui continue. LE RÉVEIL - N° 801 - mars 2014

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