Le réveil des combattants - Mars 2012

Page 1

Présidentielle l’arac s’adresse aux candidats

droits des opex témoignages et pétition

le réveil Mars 2012 - N°781 - 5 e

algérie 50 anniversaire du cessez-le-feu e

des combattants

Pour l’amitié, la solidarité, la mémoire, l’antifascisme et la paix

ALGÉRIE

19 mars 1962 : Cessez-le-feu 2012 : Pour un traité de paix et de coopération Le journal des droits de tous les anciens combattants et victimes de guerre


LE RÉVEIL ACTUALITÉS

he Symphonie pour le C 19 avril à Amiens A l’occasion du 45e anniversaire de la mort du Che, l’ARAC est partenaire d’une initiative originale de solidarité. La symphonie pour le Che, le 19 avril 2012 à Amiens, au cirque Jules-Verne, sera jouée en première mondiale, la symphonie en hommage au Che de Julio Cesar Pardo « Mort et renaissance ». Un orchestre symphonique de 40 musiciens (formation Mozart) sera constitué pour cette soirée exceptionnelle organisée par « Musique en utopia » et « Cuba Si France ». Seront présents, la fille du Che, Aleida Guevara, les ambassadeurs de Cuba, d’Argentine, de Bolivie et du Venezuela en France, Jean Cormier biographe du Che, Albert Jacquard, Hubert Reeves et de nombreuses autres personnalités d’envergure nationale et internationale dont le célèbre photographe du Che, René Burri. Autour d’une exposition originale des 1 000 « Unes » de Charlie Hebdo, toute l’équipe de l’hebdomadaire (Charb, Cabu, Wolinski...) a été invitée à dédicacer le livre qui leur est consacré.

Prix des places : 15 euros Pour tous renseignements : Cuba Si France - Tél. 01 43 36 37 50

Voyage en Russie Dix jours de détente, de mémoire, de découverte !

Du 21 au 30 septembre 2012

Paris - Saint-Petersbourg (Léningrad) - Moscou - Volgograg (Stalingrad) Un voyage préparé par ‘ARAC, qui sera suivi par d’autres ! Un bulletin de pré-réservation disponible dans le prochain Réveil Renseignements : 01 42 11 11 11

2-

LE RÉVEIL - N°781 - MARS 2012


ÉDITO LE RÉVEIL

Et si le 19 mars devenait le jour de l’amitié franco-algérienne ?

SOMMAIRE Actualités p. 4 Présidentielles : l’ARAC s’adresse aux candidats. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4 Chiffres du chômage : nouveau record. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5 Exposition 50e anniversaire fin de la guerre d’Algérie. . . . . . . . . . . . . . . 6 Refuser la dictature des marchés.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7 International p. 9 Bruit de bottes sur l’Iran.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8 Pinochet réhabilité. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9 Sweet home Chicago.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10 L’État allemand se rebiffe.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12 Vos droits p. 21 Janvier 2012 : les « bonnes nouvelles » !. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21 Secret défense et constitutionnalité.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22 Cour des comptes : régime minceur. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23 Sécurité sociale et reconversion des militaires.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24 Commission d’attribution de la carte du combattant. . . . . . . . . . . . . . 24 Vie de l’ARAC p. 25 Droit des OPEX : témoignages et pétition. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25 Hommage à Louis Babin, fusillé par les nazis. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 26 Vie des comités.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27 Magazine p. 30

P. 13 D o ssier

ALGÉRIE 50e anniversaire du cessez-le-feu Un nécessaire travail de mémoire pour aboutir à la signature d’un traité de paix et d’amitié

LE RÉVEIL DES COMBATTANTS Fondé en 1931 par Henri-Barbusse Mensuel de l’Association républicaine des anciens combattants et victimes de guerre. Commission paritaire n° 0713-A 06545 Édité par les Éditions du Réveil des Combattants SARL au capital de 45 734,41 - Siret : 572 052 991 000 39 2, place du Méridien, 94807 Villejuif cedex Téléphone : 01 42 11 11 12 Télécopie : 01 42 11 11 10 reveil-des-combattants@wanadoo.fr

Tirage : 60 000 exemplaires Gérant Directeur de la publication : Raphaël Vahé • Directeur délégué - Rédacteur en chef : Patrick Staat • Comité de Rédaction : Brigitte Canévêt, Hervé Corzani, Jean-Pierre Delahaye, André Fillère, Laurence Gorain• Service photos : Jean-Claude Fèvre • Secrétariat de rédaction, conception graphique : Escalier D Communication • Impression : RIVET P.E. - 24 rue Claude-Henri-Gorceix, 87022 Limoges cedex 9

Il y a cinquante ans se terminait la dernière guerre coloniale menée par la France. Il y a cinquante ans, après les accords d’Évian du 18 mars signés par le gouvernement français et le gouvernement provisoire de la République algérienne, le cessezle-feu était proclamé le 19 mars 1962, validé par le peuple français lors du référendum du 8 avril. Cette journée commémorative, associative, s’est déroulée, cette année avec grand éclat, dans le recueillement et la sérénité. Elle a permis de se souvenir de tous les morts, civils et militaires - français et algériens - victimes de cette guerre dont la France aurait pu faire l’économie. N’oublions pas les années de souffrance et de deuil, subies par les deux peuples dont les histoires étaient, sont et seront toujours solidaires. Les peuples français et algérien souffrent encore des blessures mal cicatrisées. N’oublions jamais ces temps terribles où régnaient au quotidien la violence, la mort, le mensonge, la haine. N’oublions pas les jeunesses sacrifiées, les familles brisées dans cette tragédie meurtrière. Que la mémoire de tous ceux qui ont péri nous aident à trouver et à ne pas perdre les chemins de la paix, de la solidarité et de la fraternité humaine. Un récent sondage de l’IFOP précise que 81 % des Français estiment que le 19 mars 1962 devrait être commémoré en présence du Président de la République. L’ARAC a posé la question dans son adresse aux candidats aux prochaines élections présidentielles et publiera les réponses. L’exigence de commémoration officielle du 19 mars 1962, que l’ARAC a exprimée avec d’autres associations, est un acte de mémoire assumée, un acte de vérité historique. La loi du 23 février 2005, qui réhabilite le colonialisme subi par l’Algérie et d’autres pays africains, permet les tentatives de réhabilitation des revanchards et offre un terrain à ceux qui distillent la xénophobie ou le racisme. Elle doit être abrogée et réécrite. Paul Vaillant-Couturier disait en 1918 : « Si des hommes sont incapables d’avoir un idéal humain, qu’on laisse aux morts la possibilité de connaître autre chose que la vengeance, le mensonge, la haine. » Il est plus que temps qu’un traité de paix, d’amitié, de coopération soit enfin signé entre la France et l’Algérie.

Raphaël Vahé FÉVRier 2012 - N°780 - LE RÉVEIL

-3


LE RÉVEIL ACTUALITÉS

Élections présidentielles 22 avril et 6 mai 2012

L’ARAC s’adresse aux candidats Madame, Monsieur, Dans quelques jours, vous vous présenterez devant les électeurs pour briguer leurs suffrages dans le cadre de l’élection du Président de la République. Attachés que nous sommes aux valeurs de la République, aux valeurs de la Nation française, à sa souveraineté, à son rôle dans le monde, notre association l’ARAC (Association républicaine des anciens combattants) créée en 1917 par Henri Barbusse, Paul Vaillant-Couturier, Raymond Lefebvre et Georges Bruyère, tient à vous interpeller à ces propos. Nous publierons vos réponses à notre adresse dans notre journal du mois d’avril Le Réveil des combattants. Avec ceux, qui comme nous, portent le combat pour la paix, l’amitié, la solidarité, la mémoire, l’antifascisme et l’épanouissement humain, nous avons besoin de connaître vos opinions. Nous sommes conscients que les droits légitimes des anciens combattants, victimes de guerre et OPEX sont tributaires de la satisfaction des revendications de notre peuple. Nous vous demandons donc vos positions et engagements sur les questions suivantes : • Vous engagez-vous à faire appliquer une politique de souveraineté nationale, d’indépendance nationale à l’égard de l’ensemble des puissances du monde, ce qui sous-entend le retrait de la France de l’OTAN ? • Vous engagez-vous à réduire le budget des armes de guerre, à en interdire le commerce, à faire enfin cesser les interventions militaires françaises (228 depuis 1965 !), à retirer les troupes des lieux actuels de conflits (Afghanistan, Afrique, etc.), à œuvrer avec la volonté d’aboutir à la mise en place des solu4-

LE RÉVEIL - N°781 - MARS 2012

tions négociées sous l’égide de l’ONU, avec le développement d’une politique de coopération internationale d’aide économique, culturelle concrète au service des peuples concernés. • Vous engagez-vous à faire appliquer une politique économique et sociale basée sur les valeurs républicaines et démocratiques inspirées du programme du Conseil national de la Résistance afin de redresser notre pays dans tous les domaines où la casse des puissances financières a sévi (emploi, logement, santé, Éducation nationale, retraites...), en stoppant la RGPP et en mettant en place une politique publique aux services des citoyennes et citoyens stoppant le pillage financier et économique au service des banques, des compagnies d’assurances multinationales, des tenants du CAC 40, et en utilisant ces moyens financiers au service des plus démunis pour assurer le relèvement substantiel du pouvoir d’achat des familles… • Vous engagez-vous, dans le cadre du rétablissement de la liberté de la presse et

de la liberté des chercheurs, à faire développer une politique de mémoire assumée au service des véritables réalités de l’Histoire, rejetant, entre autres toute journée unique du souvenir autour du 11 Novembre ou non ? Réhabilitant les fusillés pour l’exemple de 1914-1918 ? A faire du 27 mai, date de la première réunion du Conseil national de la Résistance en 1943, une journée nationale du souvenir de la Résistance ? A abroger la loi du 23 février 2005 réhabilitant l’OAS et le colonialisme ? A interdire l’érection des stèles à la mémoire des assassins de l’OAS, cette organisation criminelle ? A faire de la date du 19 mars (1962) une journée nationale d’hommage aux morts de la guerre et du souvenir du cessez-le-feu qui permit d’ouvrir les chemins à la fin de la guerre d’Algérie ? • Vous engagez-vous à maintenir un interlocuteur ministériel doté de moyens financiers et de personnels lui permettant d’exercer véritablement son ministère du droit à réparation concernant les anciens combattants (dont les OPEX), les victimes de guerre (soit trois millions de ressortissants de l’ONAC et près de 500 000 AC OPEX) ? Le contentieux perdure en ce début du XXIe siècle sur cette importante question (dossier joint). Nous vous remercions par avance des réponses que vous porterez et des engagements que vous prendrez sur les valeurs qui fondent notre République et notre Nation. Raphaël Vahé, Président de l’ARAC Pour le Conseil national, réuni les 4-5 février 2012


ACTUALITÉS LE RÉVEIL

Anciens combattants et OPEX Les revendications de l’ARAC Nous réclamons : - un budget des ACVG autonome et totalement distinct du budget du ministère de la Défense, - la pérennité d’existence et de moyens de l’Institution nationale des invalides, de l’ONAC et de ses services départementaux, souverains, hors de leur récupération par les préfets et libérés de toute obligation de réduire drastiquement leurs personnels, ni d’avoir à s’inscrire dans des contrats d’objectifs de rendement, ainsi que le maintien des ses écoles de réinsertion professionnelle et de ses maisons de retraite dans le sein de l’ONAC, hors de toute « fondation » et autres montages.

Nous voulons : - une concertation permanente avec les associations représentatives des anciens combattants et victimes de guerre pour éliminer le contentieux qui perdure et s’est aggravé en ce début de XXIe siècle, au détriment des pensions et retraites du combattant (retard de 43 %) des anciens combattants mutualistes (relèvement du plafond majorable) en accordant la campagne double aux AC d’Algérie, fonctionnaires, travailleurs de l’État et assimilés, ainsi que la carte du combattant pour les AC ayant servi 120 jours en Algérie « à cheval » sur la date du 2 juillet 1962 alors que nous célébrons cette année le 50e anniversaire de la fin de la guerre d’Algérie. - le relèvement à hauteur du seuil de pauvreté (954e) de l’aide différentielle de solidarité pour les veuves d’AC et les AC les plus démunis, des veuves de guerre de grands invalides, des orphelins, des victimes de psychotraumatismes de tous les conflits, des victimes des irradiations des essais nucléaires français, des OPEX quant à leurs droits à réparation et leur réinsertion dans la vie civile.

Chiffres du chômage Nouveau record en décembre Le chômage a poursuivi sa hausse en décembre en France, pour atteindre son plus haut niveau depuis septembre 1999, selon les chiffres publiés le 25 janvier 2012 par le ministère du Travail et Pôle Emploi. Le nombre de demandeurs d’emploi en catégorie A (ceux n’ayant exercé aucune activité) a augmenté de 29 700 (+ 1,0 %) le mois dernier en France métropolitaine pour s’établir à 2 874 500. Sur un an, la hausse est de 5,6 %. En ajoutant les personnes exerçant une activité réduite (catégories B et C), le nombre de demandeurs d’emploi a augmenté de 0,6 %, soit 25 900 personnes de plus, pour atteindre 4 270 700. Sur un an, la hausse est de 5,6 %. Avec les départements d’outre-mer, le nombre de demandeurs d’emploi s’établit à 4 537 800, un chiffre sensible à trois mois de l’élection présidentielle. La hausse a été particulièrement vigoureuse pour les personnes âgées de plus de 50 ans et, dans une moindre mesure, pour les moins de 25 ans. En catégorie A, le nombre de demandeurs âgés de moins de 25 ans a ainsi progressé de 1,3 % (+ 2,8 % sur un an) contre 0,7 % pour les 25-49 ans (+ 3,2% sur un an) et 2,0 % pour les plus de 50 ans (+ 16,0 % sur un an). En catégories A, B et C, ce nombre a augmenté de

0,5% pour les moins de 25 ans (+ 2,5 % sur un an), de 0,4 % pour les 25-49 ans (+3,5 % sur un an) et de 1,5 % pour les 50 ans et plus (+ 15,5 % sur un an). Le nombre des chômeurs de longue durée (inscrits depuis un an ou plus) augmente autant que celui des autres demandeurs d’emploi, soit + 0,6 % pour les catégories A, B et C (+ 6,2 % sur un an) contre + 0,6 % (+ 5,2 % sur un an). En parallèle, le nombre des offres a baissé de 5,5 % en métropole. L’Insee a annoncé le 1er décembre que le taux de chômage au sens du Bureau international du travail (BIT) avait augmenté de 0,2 point au troisième trimestre à 9,3 % en métropole (9,7 % en incluant les départements d’outre-mer). Dans sa note de conjoncture publiée le 15 décembre, l’Institut de la statistique estimait que le taux de chômage pourrait dépasser 10 % sur la totalité du territoire d’ici juin 2012. En 2011, les demandeurs d’emplois sans activité sont 152 000 de plus qu’en 2010. Il faut en ajouter 225 200 de plus en comptant ceux qui ont exercé une activité réduite sur l’année.

L’Argentine et le Paris-Dakar Dans un communiqué, Maître Sophie Thonon-Wesfreid, présidente de l’Association France Amérique Latine, a tenu à rappeler que la ville argentine de Mar Del Plata, point de départ du Paris Dakar, fut profondément touchée par la sanglante répression instaurée par la dictature militaire argentine de 1976 à 1983. Ainsi, les hangars de la base navale, dans lesquels véhicules et matériel ont été entreposés, servirent à l’époque de centre clandestin de tortures et de disparitions, par lequel passèrent la plupart des victimes disparues de la ville. Un procès ouvert le 23 décembre dernier au palais de justice de Mar del Plata

juge les responsables des disparitions et, en particulier, celle de cinq nouveaunés. Et un monument commémoratif à la mémoire des victimes, dont les corps n’ont jamais été retrouvés, a été élevé à l’entrée de la base navale. L’Association France Amérique Latine regrette vivement que les organisateurs aient choisi un tel lieu pour donner le départ de la course Paris-Dakar et espère que chacun des participants a su rendre hommage à la mémoire des victimes. L’ARAC s’associe, naturellement, à ce communiqué.

MARS 2012 - N°781 - LE RÉVEIL

-5


LE RÉVEIL actualités

50e anniversaire de la fin de la guerre d’Algérie Une toute nouvelle exposition à votre disposition

Elle se compose de 11 panneaux au format de 60x80 cm sur support type bâche plastifiée. Elle est expédiée dans 2 tubes carton (3,5 kg) Vous pouvez la louer au prix de 150 e la semaine plus frais d'envoi (environ 10 e) ou l'acheter au prix de 500 e. Renseignements : siège national de l'ARAC au 01 42 11 11 11

6-

LE RÉVEIL - N°781 - MARS 2012


actualités LE RÉVEIL

Dictature des marchés Refuser la soumission des peuples Situation en Grèce : Déclaration du Secrétariat national de l’ARAC du 15 février 2012 Au nom des marchés, au nom de la monnaie unique et du traité de Maastricht, une véritable dictature de la misère se construit en Grèce. Dans ce pays, berceau de la civilisation, de la démocratie, qui a subi au XXe siècle deux dictatures, deux guerres mondiales, coups d’État et occupations étrangères, qui avec courage et détermination s’est battu contre l’occupant nazi, la domination anglaise, a fait face à la dictature des colonels, l’Europe, les banquiers veulent imposer un immense recul de civilisation. A tous ceux qui voient dans l’euro l’avenir social, démocratique, économique de l’Europe, il est temps de leur dire : « Ouvrez les yeux ! » En effet, quand les retraites, le salaire minimum reculent de 30 puis à nouveau de 20 %, en attendant une nouvelle secousse encore plus drastique, la question peut se poser légitimement : « Pourquoi rester dans l’euro ? » Quand les emplois ont coulé au point qu’il n’y a quasiment plus d’activités industrielles en Grèce, quand 21 % des Grecs sont au chômage, quand l’avenir c’est la baisse du PIB et des décennies de remboursement de la dette et des intérêts, comment ne pas partager le souci de ceux qui s’interrogent à revenir à la monnaie grecque. Ceux qui aujourd’hui sont à la tête du gouvernement grec ne sont que des technocrates non élus, sortant des rangs de Goldman Sachs et des institutions européennes, c’est-à-dire au service des marchés et non du peuple grec. La dette grecque est passée de 263 milliards en 2008 à 355 milliards en 2011. Le PIB est passé de 233 milliards à 218 milliards, soit un recul de 6 % dans la même période. Le chômage est passé de 8 % à 21%. Cette fuite en avant soutenue

par Nicolas Sarkozy sous la houlette de l’Allemagne tourne le dos aux intérêts de l’ensemble des peuples de l’Europe. Après la Grèce, l’Irlande, l’Espagne, l’Italie, le Portugal, ces choix politiques ne peuvent que conduire aux mêmes conséquences sur notre économie. Quand en 5 ans, sous le gouvernement Sarkozy, la France a perdu 750 000 emplois, la question c’est d’être résolument solidaire de tous ceux qui mènent le combat de l’émancipation humaine

et refusent résolument les conséquences du traité de Maastricht et la monnaie unique. Il est temps de remettre l’économie sur ses pieds, de redonner aux États les moyens de faire face à leurs décisions, d’abroger en France la loi du 3 février 1973 qui oblige l’État à emprunter sur les marchés privés. Il faut re-nationaliser les banques sur des bases nouvelles. Pour l’Association républicaine des anciens combattants, pour l’amitié, la solidarité, la mémoire, l’antifascisme et la paix, être solidaire du peuple grec, c’est s’opposer au choix du tandem Nicolas Sarkozy et Angela Merkel. Villejuif, le 15 février 2012

Libye, combien ça coûte ? Plusieurs mois après la fin de l’intervention internationale sous l’égide de l’OTAN contre la Libye, une question se pose, surtout pour que les choses soient dites. Combien cette opération soi-disant humanitaire a coûté à notre pays et quel est donc pour le peuple libyen le résultat ? Tout d’abord sur le coût, un certain nombre de données sont classées et donc considérées par le gouvernement comme secrètes. Par exemple, le tonnage exact des bombes larguées. Cela relève du secret défense. Au total, Gérard Longuet, ministre de la Défense, annonce 360 millions d’euros tout compris. Un simple calcul mathématique nous amène déjà à 1,6 million d’euros/ jour rien que de présence, de la marine et de l’aviation dans le secteur libyen, sans compter les bombes et missiles utilisés. Sans compter non plus le carburant utilisé. Par ailleurs, on connaît le prix d’un missile SCALP, 850 000 e l’unité, une bombe de 250 kg accrochée sous les ailes des avions, 250 000 euros l’unité. Comme l’ensemble du stock militaire français de missiles et de bombes a pratiquement été utilisé, on peut considérer que la France a lancé sur la Libye pour

près de 250 millions d’euros de bombes et de missiles. Évidemment, ce chiffre ne prend pas en compte la totalité du coût de l’opération. Le budget des OPEX a littéralement explosé, l’essentiel pour la Libye et l’Afghanistan. 1 milliard 200 millions, du jamais vu. Le bilan de l’Afghanistan est connu, les Talibans ne se sont jamais si bien portés, la société afghane fait un retour en arrière de près de 40 ans. La Libye n’est pas mieux lotie, le fameux CNT, soi-disant porteur de l’aspiration de liberté des Libyens est complètement phagocyté par les puissances (États-Unis, Grande-Bretagne et France) qui lui ont permis l’accession au pouvoir. Et le peuple libyen, au-delà des milliers de morts et blessés (on avance le chiffre de 60 000 civils tués, mais cela aussi Sarkozy ne s’en vante pas), est tout simplement dépossédé de son droit sur les réserves énergétiques du secteur. Les MARS 2012 - N°781 - LE RÉVEIL

-7


LE RÉVEIL international

grands pétroliers français, anglais et américains se partagent le gâteau. La charia comme méthode de gouvernement. Enfin la reconstruction de la Libye est chiffrée à 200 milliards d’euros. Le MEDEF et les grands groupes du CAC 40 sont sur les rangs et veulent aussi croquer à pleines dents dans ce somptueux cadeau. Cela valait quand même bien que les bombes et missiles français cassent un maximum de choses et peut-être auraient-ils pu en casser un peu plus. Voilà, la réalité est celle-ci, un gouvernement libyen composé pour l’essentiel de dignitaires de l’ancien régime, un peuple dépossédé de ses biens, sous haute surveillance internationale et enfin un avenir qui sera écrit de par la volonté du dollar et de l’euro. H.C.

Courrier des lecteurs

Cher Patrick Staat, Votre article du Réveil 780 est très juste, à une omission près, dans la liste de vos idéaux, celui d’Égalité. Titrer contre les privilèges ne suffit pas, tant, dans l’opinion commune, la pauvre égalité est rognée : « des droits, des chances, du salaire hommes, femmes ». Tant elle est disqualifiée par des moues, des rejets (égalitarisme !). En revanche, avez-vous remarqué l’inflation du mot Liberté, pour clore tant de paragraphes et tant de discours ? Bref, agréez mes sentiments barbussiens et babouvistes.

8-

Régis Antoine (44)

LE RÉVEIL - N°781 - MARS 2012

Bruit de bottes sur l’Iran Les États-Unis et Israël menacent militairement l’Iran. Tout ne serait plus qu’une question de timing. Les prochaines élections US embarrassent Obama.

L

e bras de fer Téhéran, Netanyahou, Obama est-il en train de tourner à l’avantage des faucons israéliens ? La presse française s’en est fait en tous les cas l’écho. « Obama emboîte le pas d’Israël », titrait Libération au lendemain de la visite du Premier Ministre israélien à l’ami américain, début mars à Washington. Pour le Figaro : « Le président américain a renouvelé son soutien à Israël, privilégiant la diplomatie, mais n’excluant pas la force ». Le Monde, quant à lui, souligne : « accusé par le Parti républicain de faiblesse sur le nucléaire iranien, Barack Obama tente de rassurer Israël ». L’analyse la plus dure nous vient du quotidien gratuit 20 minutes, sous le titre « Obama emboîte le pas de Netanyahou », on peut lire « finie la main tendue. La politique initiée par Obama (…) a fait long feu. S’il en fallait un clair démenti le voici : « Si toutes les autres solutions échouent, les États-Unis auront recours à la force pour empêcher l’Iran de se doter de l’arme nucléaire ». Et de noter au passage que « l’Iran est un des rares pays à n’être entouré que de puissances nucléaires, avec la Russie au Nord, le Pakistan à l’Est, Israël à l’Ouest et les sous-marins nucléaires américains au Sud (…) » La veille de sa rencontre avec le Premier Ministre israélien, le locataire de la Maison-Blanche s’était rendu au congrés de l’AIPAC, le plus puissant lobby juif étasunien. Avec plus de 13 000 participants, la réunion qui s’est déroulée pendant trois jours dans l’immense centre de congrès de Washington et a reçu de nombreux « décideurs » des

partis démocrate et républicain (élections présidentielles obligent…) a été la plus importante depuis la fondation de l’organisation. Obama y a été ovationné lorsqu’il a exclu toute politique de « containment » (endiguement) et encore plus lorsqu’il a affirmé qu’Israël a le droit « souverain » de se défendre comme bon lui semble.

Obama : « je couvre Israël » Devant la communauté juive, le chef suprême des armées US, prix Nobel de la paix, a défendu son bilan : soutien dans l’affaire de la flottille turque arraisonnée alors qu’elle voulait briser le blocus de Gaza, veto à l’ONU sur la reconnaissance de l’État palestinien, sauvetage de diplomates israéliens retenus dans leur ambassade au Caire, sans oublier la coopération militaire qualifiée par les spécialistes de « la plus étroite de l’histoire récente ». L’administration Obama vient, en effet, d’octroyer à Tel-Aviv une aide de 30 milliards de dollars étalée sur dix ans qui comprend, entre autres, le développement d’un site anti-missiles baptisé « coupole de fer ». Dans les difficultés, « je couvre Israël », a affirmé Obama sous les applaudissements. Le président israélien Shimon Peres a lui-même renvoyé dans les cordes ceux qui doutent. « Merci, président Obama, pour être un ami aussi fidèle », at-il lancé. Eliott Abrams, l’architecte de la politique israélienne de George Bush, ayant jugé l’intervention d’Obama « remarquablement défensive ». Le lendemain, après ses entretiens avec


international LE RÉVEIL

Netanyahou, il répétait qu’il « gardait toutes les options » ouvertes, même si sa préférence allait à la diplomatie. Il faut aussi flatter les plus pacifistes du camp démocrate ! « Merci pour votre discours très fort d’hier », a répondu Netanyahou. « Nous sommes vous et vous êtes nous ». Il existe néanmoins, sur la stratégie à adopter vis-à-vis de l’Iran, une divergence, si faible soit-elle, qui semble tenir au calendrier et permet à Obama d’adopter un ton plus modéré. Ainsi souligne-t-il qu’il reste encore du « temps et de l’espace pour la diplomatie ». « On parle trop de guerre de manière inconsidérée », a-t-il précisé, rappelant que les services secrets américains pensaient que la bombe iranienne n’était pas envisageable avant un an. Le timing parfait ! Pile poil après les élections ! Ce qui n’a pas empêché des militaires du Pentagone, via des fuites organisées dans les médias, de révéler que les États-Unis avaient d’ores et déjà mis la dernière main à des plans d’opérations en Iran.

Tel-Aviv prête à frapper seul ? De leur côté, les responsables israéliens, considérant que discussions et négociations sont inutiles, menacent de mener une attaque « préventive » pour empêcher la naissance de la bombe atomique iranienne. Alternant virus informatiques et assassinats ciblés de scientifiques, la guerre de l’ombre menée par les services de renseignements n’a pas suffi. Et ce n’est pas la victoire des ultraconservateurs aux élections législatives iraniennes ni la résistance sino-russe à une nouvelle résolution qui plaident en faveur d’une sortie de crise. « Ma responsabilité suprême est de faire en sorte qu’Israël reste le maître de son destin », affirme Netanyahou, laissant planer une menace implicite d’action unilatérale. Selon Bruce Riedel, vétéran de la CIA reconverti en analyste à la Brookingts Institut, des frappes israéliennes pour tenter de détruire les sites nucléaires iraniens sont très possibles C’est le sentiment qu’il a exprimé dans le quotidien Libération, après la visite de Netanyahou à Washington. « L’histoire nous enseigne

qu’Israël a utilisé deux fois la force, contre l’Irak et la Syrie, pour préserver son monopole nucléaire au Moyen-Orient. Israël veut encore essayer de préserver cet avantage stratégique, il a maintenant envoyé tous les signaux en ce sens ». Dans certaines capitales européennes, on n’exclut pas la possibilité de frappes à l’été 2012. En brossant les va-t-en-guerre de TelAviv dans le sens du poil, comme il

l’a fait devant le congrès de l’AIPAC, Obama espère-t-il encore influer sur les décisions d’Israël d’attaquer seul l’Iran ? Il devrait pourtant tirer des leçons de son laxisme. En cédant sur les implantations de colons dans les territoires palestiniens a-t-il servi le processus de paix ? Jean-Pierre Delahaye

Chili

Pinochet réhabilité ? L’Union démocrate indépendante, formation de droite au pouvoir depuis les élections, accélère son projet de réhabiliter le sanglant général Pinochet et, pour le moins, de banaliser son image en l’effaçant de la mémoire des jeunes Chiliens. Dans cette perspective, le ministère de l’Éducation vient de décider de remplacer, dans les manuels scolaires, le terme de « dictature militaire » par celui de « régime militaire » ! Cette décision a créé un véritable tollé dans l’opposition et les mouvements pour les

droits de l’homme ; lesquels rappellent qu’en 1973, le général Pinochet s’était emparé du pouvoir par un coup d’État armé qui entraîna la mort du Président Allende (démocratiquement élu). Et la dictature terroriste d’État instaurée par Pinochet fut cause, officiellement, de 3 000 disparitions ou exécutions, et de la torture de près de 30 000 personnes. Un crime que la droite au pouvoir veut effacer de l’histoire, pour mener avec plus de facilité sa politique antipopulaire. MARS 2012 - N°781 - LE RÉVEIL

-9


LE RÉVEIL INTERNATIONAL

Sweet home Chicago Deux rapports accablants sur la pauvreté aux États-Unis viennent d’être publiés. Alors que la population américaine se paupérise, Obama chante le blues… Quelle image ! Dans la salle des fêtes de la Maison-Blanche entouré de musiciens prestigieux, dont Mick Jagger, le président américain, Barack Obama -hymself- donne la réplique à la légende du blues natif de Memphis, BB King dans le fameux Sweet Home Chicago. Littéralement, Chicago doux… Oh foyer ! La vidéo a fait le tour du monde, enchanté les journalistes. Fait un buzz sur la toile. Encore un peu on s’y serait laissé prendre… Retour à la réalité. Selon le rapport récent publié par le National Center on Family Homolessness, l’année dernière, 1,6 million de petits Américains se sont trouvés, a un moment, sans domicile fixe. Soit un enfant sur 45. Ces enfants se sont abrités comme ils le pouvaient, dans une voiture, un bâti-

10 -

LE RÉVEIL - N°781 - MARS 2012

ment abandonné, une station de métro ou sous une tente. Au mieux, dans des centres d’hébergement, des motels ou chez des proches. Une hausse de 38 % en quatre ans. Le rapport précise que ces enfants deviennent progressivement « une partie importante d’un tiers monde qui se dessine au sein de notre propre nation ». Ils sont plus sujets aux maladies chroniques, à l’asthme, au stress ou aux troubles émotionnels, ainsi qu’à la faim et la malnutrition. Une situation d’autant plus traumatisante que 42 % d’entre eux sont âgés de moins de 6 ans. Ils ont aussi souvent une scolarité chaotique : près d’un tiers d’entre eux ont fréquenté au moins trois écoles différentes dans l’année.

49 millions d’Américains sous le seuil de pauvreté Les causes de cette situation : la pauvreté - 49 millions d’Américains (sur 309 millions) vivent aujourd’hui sous le seuil de pauvreté - combinée au manque de logements accessibles et aux catastrophes naturelles qui privent de toit des millions d’habitants, explique le rapport. Et surtout, « une récession dévastatrice déclenchée par la spéculation sur le marché immobilier et les marchés financiers, qui a déstabilisé l’économie du pays plus profondément que les ouragans et a remodelé le paysage ». Environ six millions de familles ont perdu leur maison du fait de saisies, lors de la crise des trois dernières années, selon le Center for Responsible Lending. Le rapport, qui étudie la situation État par État, préconise de mettre fin aux coupes budgétaires des programmes destinés à aider les familles et enfants sans logement, pour éviter une aggravation de la situation. Un autre constat dramatique pour la première économie mondiale a été dressé par les équipes d’économistes de la Maison-Blanche, mi-février. Dans le rapport économique annuel du président remis au Congrès, révélé récemment par le Monde.fr, figure ce qu'on appelle « la courbe de Gatsby le Magnifique ». Le roman de Francis Scott Fitzgerald, peinture de la vanité bourgeoise de l'Amérique des années 1920, donne son nom à un graphique où se croisent, sur un axe horizontal, les données mesurant le degré d'inégalité des revenus et, à la verticale, le lien entre le revenu du père et celui de ses descendants, baromètre de la mobilité sociale. Que montre cette courbe ? Les inégalités de richesses se mêlent à un immobilisme social que l'on pensait réservé à la


international LE RÉVEIL

veille Europe. L’Amérique se range loin derrière les pays nordiques, la France, la Nouvelle-Zélande, le Japon ou la Grande-Bretagne...

Inégalités et immobilisme social Le système éducatif américain, autrefois considéré comme le meilleur « égalisateur de société », est en partie responsable. Une étude récente du Michigan, citée par le New York Times, révèle que l'écart de performances entre les étudiants riches et pauvres a bondi de 50 % depuis les années 1980. Plus que la race, la richesse fait aujourd'hui la différence à l'école. L'espoir de prospérité d'un ouvrier américain s'amoindrit aussi. La crise et le chômage qui tendent l'un comme l'autre à comprimer les salaires n'expliquent pas tout. Car, en page 65 du même rapport, figure « l'autre graphique le plus commenté » par les experts : une courbe démontrant que, depuis les années 2000, le travail d'un Américain est de plus en plus mal rétribué alors

que les entreprises amassent de plus en plus de bénéfices. Résultat, les profits des compagnies américaines à 13 % du produit intérieur brut sont historiquement élevés, observe Evariste Lefeuvre, chez Natixis à New York. Le sujet du rapport économique, remis en pleine année électorale, ne doit rien au hasard. En insistant sur les inégalités sociales, le document offre des arguments censés être imparables aux démocrates pour défendre l'idée d'une fiscalité plus redistributive. Après avoir vanté la Règle Buffett, du nom du milliardaire américain Warren Buffett appelant à taxer davantage les super-riches comme lui, Obama a lancé fin février, une « offensive » contre les profits des entreprises. Une initiative audacieuse et dangereuse dans un pays où la liberté d'entreprendre est sacrée. Pour ne pas choquer, l'idée a consisté en façade à réduire le taux d'imposition sur les bénéfices de 35 % à 28 %. En façade seulement, car le dispositif vise aussi à

supprimer la plupart des niches fiscales utilisées par les multinationales. Le 24 février, le quotidien USA Today titrait sur l'explosion de l'extrême pauvreté aux États-Unis, indiquant que le nombre de familles vivant avec moins de deux dollars par jour avait plus que doublé en quinze ans, passant de 636 000 en 1996 à 1,5 million en 2011. Quelques mois après les manifestations des Occupy Wall Street opposant les 1 % de privilégiés qui continuent imperturbablement à s'enrichir aux autres 99 %, la question du partage des richesses est plus que jamais à l’ordre du jour. Un sondage publié par le New York Times et la chaîne de télévision CBS News soulignait, en octobre 2011, que 66 % des Américains pensent que la distribution des revenus et des richesses aux États-Unis devrait « être plus équitable ». Obama saura-t-il entendre ? Jean-Pierre Delahaye

MARS 2012 - N°781 - LE RÉVEIL

- 11


LE RÉVEIL international

L’État allemand se rebiffe Il n’est pas possible, pour tout être humain normalement constitué, d’oublier les crimes contre l’humanité commis par l’État nazi allemand, pendant la Seconde Guerre mondiale. Il est encore moins possible pour les victimes directes de ces crimes, ou les héritiers de celles-ci, de tirer un trait sur de telles abominations. Le gouvernement de l’Allemagne actuelle, inquiet de la multiplication des procédures intentées en Italie, a saisi, le 23 décembre 2008, la Cour internationale de justice de La Haye (Pays-Bas). Depuis, il ne semble pas qu’un arrêt ait été rendu par cette cour. Le litige demeure donc. Que craint le gouvernement allemand ? En fait, il conteste la mise en cause de l’immunité de l’Allemagne en tant qu’État, par des décisions judiciaires italiennes et la multiplication de ces procédures. Il tremble, en réalité, pour le coût que risque de provoquer toutes ces procédures et pour les sommes importantes qu’il devra verser aux victimes. La déléguée allemande, madame Wasum-Rainer a tenu des propos malheureux au sujet de ces procédures : « Si les juridictions nationales pouvaient rendre des décisions contre les États étrangers, cela donnerait lieu à des jugements différents, non contradictoires ; les plaignants feraient

le tour du marché pour voir quelle est la réglementation la plus favorable ». Cette déléguée allemande oublie qu’Hitler, lui, a bien fait le tour de l’Europe pour trouver la main-d’œuvre gratuite et la déporter dans ses camps de concentration : alors que madame Wasum-Rainer modère ses propos ! Il est vrai qu’est posé, en droit international, le problème de l’immunité de juridiction reconnue à l’Allemagne. La Cour internationale de La Haye doit se prononcer, et rapidement. Cependant, il est dans l’intérêt de toutes les victimes de poursuivre leurs actions devant leurs juridictions nationales afin d’obtenir des condamnations chiffrées. Par la suite, et devant cette avalanche de demandes et le montant des dommages et intérêts alloués, le gouvernement allemand aura plus de difficultés à minimiser les préjudices subis. Il ne faut pas se leurrer, c’est pour lui uniquement un problème de coût. Et c’est

pour les victimes, essentiellement, une reconnaissance de leurs souffrances morales et physiques. Décidément l’incompréhension demeure entre les victimes du nazisme et le gouvernement de l’Allemagne actuelle qui voudrait que tout le monde oublie tout. Certes, les générations actuelles des jeunes Allemands ne sont pas responsables des crimes commis par leurs pères et grands-pères. Et l’Allemagne demeurerait grandie si elle acceptait d’assumer toutes les conséquences des crimes nazis tant que des victimes seront encore là pour en témoigner. Il faut éviter que de vieilles haines ne viennent à ressurgir et, pour cela, la politique de la main tendue par l’Allemagne serait la bienvenue. Qu’elle accepte sa mise en cause en tant qu’État et tout se réglera dans le calme et la sérénité. Mais qu’elle sache également que les victimes ne baisseront jamais les bras ! Jacqueline Tabeault-Alcandre

Le réveil des Combattants - Bulletin d’abonnement

A retourner au Réveil des Combattants - 2, place du Méridien - 94807 Villejuif cedex Tél. 01 42 11 11 12 - reveil-des-combattants@wanadoo.fr Individuel

12 -

Collectivités (lycées, collèges, centres de documentation, bibliothèques…)

10 numéros - au prix de 28,00 e par an

10 numéros (5 exemplaires par parution) au prix de 100,00 e par an

Nom. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Nom (collectivité) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Prénom . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Personne à contacter . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Adresse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Adresse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

..................................................................................................

Ville . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Code postal . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Ville . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Code postal . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Téléphone . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Téléphone . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Mail . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . @. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Mail . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . @. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Ci-joint un chèque de 28 e libellé à l’ordre du Réveil des Combattants

Ci-joint un chèque de 100 e libellé à l’ordre du Réveil des Combattants

LE RÉVEIL - N°781 - MARS 2012


LE CAHIER MÉMOIRE

le réveil

N° 781 Mars 2012

des combattants

Pour l’amitié, la solidarité, la mémoire, l’antifascisme et la paix

50e anniversaire du cessez-le-feu

Bien qu’il ait fallu 39 ans pour la faire reconnaître par la France après son cessez-le-feu, la guerre d’Algérie reste encore pour certains une révolte fomentée par des ressortissants de départements français. Alors que la France, en reconnaissant les combats d’Algérie, Tunisie et Maroc de 1954 à 1962 comme une guerre, reconnaissait qu’il s’est agi d’un affrontement entre deux pays et par conséquent que chacun d’eux en porte sa responsabilité.

ÉDITO - Par Paul Markidès

ALGÉRIE

Il y a cinquante ans, le 19 mars 1962, le cessez-le-feu mettait fin aux combats en Algérie, Tunisie et Maroc. Et pourtant, au bout de ces cinquante ans, la guerre d’Algérie n’est pas encore entrée dans l’histoire.

Cela implique en conséquence la nécessité pour la France comme pour l’Algérie d’assumer leurs propres responsabilités dans ce conflit face à leurs peuples respectifs. C’est la condition nécessaire à l’ouverture de négociations ayant des chances d’aboutir à la rédaction puis à la signature d’un traité de paix et d’amitié.

Un nécessaire travail de mémoire Édité par le Réveil des combattants - 2 place du Méridien - 94807  Villejuif - Tél. 01 42 11 11 12

C’est pour contribuer à faire prendre en considération ces démarches que nous exposons les faits qui suivent dans ce cahier qui concernent la France, pays colonisateur, ceux qui concernent l’Algérie revenant aux citoyens et citoyennes algériens. MARS 2012 - N°781 - LE RÉVEIL

- 13


LE RÉVEIL dossier

France-Algérie Pour une zone de paix en Méditerranée Par Paul Markidès Au lendemain de la guerre de 1939-1945, le peuple algérien, qui avait largement participé à la victoire remportée sur l’Allemagne nazie, revendiquait le droit à la liberté qu’il avait contribué à reconquérir. L’Algérie était une colonie en 1939, elle l’était toujours en 1945 et le gouvernement de l’époque entendait bien la maintenir sous ce régime avec toutes les exigences dont il entendait obtenir la satisfaction de la part d’un pays colonisé. Les Algériens, eux, n’entendaient pas continuer à vivre sous ce régime d’exploitation et après neuf années de patience, 1945-1954, la réaction à cette situation se produisit. La guerre que le gouvernement français se refusa à reconnaître comme telle, éclata le 1er novembre 1954. Il qualifia sa réaction d’abord « d’opération de police » puis « d’intervention de maintien de l’ordre », affirmant que l’Algérie était composée de départements français, situation administrative créée auparavant par les soins de la France pour tenter de faire croire à une intégration de l’Algérie alors qu’elle n’était de fait qu’une colonie. « Le maintien de l’ordre » eut la vie dure puisqu’il a fallu attendre 39 ans après la fin des combats en Algérie, Tunisie et Maroc pour obtenir la reconnaissance de l’état de guerre par la France. La guerre d’Algérie dura 8 ans, de 1954 à 1962, une guerre véritable avec ses destructions, ses massa14 -

LE RÉVEIL - N°781 - MARS 2012

cres, ses tortures, ses exactions de toutes sortes, des deux côtés. Là encore s’est vérifié le jugement du fondateur de notre ARAC, Henri Barbusse, au lendemain de la guerre de 1914-1918 : « Deux armées qui s’affrontent, c’est une grande armée qui se suicide ». Depuis la fin de cette guerre en 1962, malgré quelques tentatives restées limitées et sans suite, voire bloquées par l’attitude particulièrement inacceptable du gouvernement français qui fit voter par l’Assemblée nationale la loi du 23 février 2005 glorifiant le colonialisme, peu ou trop peu a été tenté pour ouvrir la voie à un rapprochement des deux pays. De toutes façons, quelles que soient les modestes initiatives tentées, la France et l’Algérie, chacune pour leur part respective, ne se sont pas encore engagées à assumer pleinement cette guerre. Or, tant que l’une et l’autre n’auront pas procédé à ces retours sur le passé, le chemin du développement d’une coopération amicale entre les deux pays ne pourra pas s’ouvrir réellement. Rappelonsnous la constatation de Goethe que je cite en substance : « un peuple qui refuse de regarder en face son passé se condamne à le revivre ». Et pourtant cette démarche devient urgente, car une coopération franco-algérienne contribuerait efficacement à l’instauration de conditions plus favorables à la paix sur les rives de la Méditerranée.

Paul Markidès est vice-président national de l’ARAC, chargé de la mémoire et de la citoyenneté

Une fois cette guerre d’Algérie assumée par la France et l’Algérie, chacune pour leur part, un traité de paix, d’amitié et de coopération pourrait être signé entre les deux pays. Non seulement cela permettrait de développer des échanges culturels, universitaires, scientifiques, industriels et commerciaux, mais encore rendrait la vie des citoyens et citoyennes de chacune des deux nations plus facile sur le territoire français. Elle ouvrirait la voie à une fraternisation qui contribuerait à favoriser la paix et susciterait son développement en Méditerranée. Et une zone de paix dans cette région du monde n’est pas à négliger. Elle est au contraire vraiment nécessaire aujourd’hui. Aboutir à ce résultat commande donc d’assumer la guerre. Mais assumer ne signifie pas, en la circonstance, soutenir, voire aider les nostalgiques de l’Algérie française comme le font certains maires, mais regarder l’histoire en face et, pour ce faire, s’appuyer sur les faits et ne pas chercher à les interpréter pour dédouaner tel ou tel acteur de l’événement. C’est pourtant ce que les auteurs de la loi de réhabilitation du colonialisme du 23 février 2005 ont fait sous l’autorité du gouvernement, à l’initiative de sa majorité parlementaire et au-delà. Ce qui a bloqué toutes les ouvertures de coopération engagées avec l’Algérie. Le président algérien ayant d’ailleurs exprimé lui-même son indignation


dossier LE RÉVEIL

devant cette action contraire à la vérité historique et donc inacceptable pour son pays. Mais là malheureusement ne s’arrêtent pas les actes qui jouent contre la reconnaissance des réalités des rapports passés entre l’Algérie et la France. Nous vivons la fin d’un quinquennat au cours duquel le Président de la République, son entourage, la plus grande partie de sa majorité n’ont cessé de réhabiliter, d’une manière ou d’une autre, le colonialisme. La dernière prestation revenant à l’ancien secrétaire général de l’Élysée aujourd’hui ministre de l’Intérieur. L’attention bienveillante que réserve depuis des années l’autorité d’État à l’égard des villes du Sud de la France qui, sous la pression d’associations de rapatriés nostalgiques de l’Algérie française, s’efforcent d’aboutir à la création de musées satisfaisant leurs partis pris. C’est ainsi qu’à Perpignan, dont le maire est Jean-Marc Pujol (UMP), de surcroît pied-noir, s’est ouvert le 29 janvier 2012 un Centre de documentation des Français d’Algérie. Cet établissement présente une collection permanente d’objets et de documents destinés à montrer, selon sa directrice : « ce que fut la vie des pieds-noirs pendant cent trente-deux années de présence française en Algérie, qui n’était pas l’apartheid que certains veulent faire croire ». Qu’en termes distingués, ces choses-là sont dites ! A Montpellier, un Musée de l’Histoire de la France en Algérie doit ouvrir ses portes en 2014. Le projet avait été lancé par le maire, décédé en 2010, Georges Frèche. Son successeur qui l’a repris affirme : « Je veux sortir du conflit des mémoires, ce musée abordera tous les aspects, l’œuvre positive de la France, mais aussi les pages moins glorieuses ». Rien n’a été divulgué sur les orientations de ce musée. Mais il faut savoir que son comité ne comprend aucun historien de la guerre d’Algérie et

Un spectacle de plein air, près de Blida : avant les « événements », une certaine douceur de vivre.

encore moins d’historiens algériens. Enfin « le comité de rédaction » chargé de la scénographie est ouvert aux associations de rapatriés et « tous les pieds-noirs de Montpellier soutiennent ce musée » nous dit Jacques Martin, l’un des pieds-noirs les plus en vue. De quoi rester inquiet sur le rôle que pourra jouer cet établissement. Et il faut ajouter Marseille, ville qui portait aussi un projet de cette nature, selon les déclarations de son maire, Jean-Claude Gaudin (UMP) en 2007. Mais depuis, silence radio. Il semble donc abandonné. Par contre, à Aix en Provence, la municipalité UMP vient de céder un terrain à une association de rapatriés, dont l’objectif est d’y construire un Centre de documentation historique sur l’Algérie afin d’y présenter « l’ensemble de l’œuvre de la France en Afrique du Nord ». De quoi entretenir une mémoire au service de la réhabilitation du colonialisme. A ces actions s’ajoutent les cérémonies d’hommage aux criminels de l’OAS condamnés par la justice de la République et les tentatives quelquefois réussies d’ériger des stèles en leur mémoire, les unes comme les autres tolérées par l’autorité d’État, voire soutenus

par certains élus de la majorité présidentielle. Et ces activités révisionnistes ne reposent pas seulement sur la bienveillance du pouvoir, elles sont aussi tolérées par une population trompée sur les rapatriés d’Afrique du Nord, à qui on a fait croire que les pieds-noirs avaient tous été chassés d’Algérie car ils n’avaient comme solution, la guerre terminée, que le fameux dilemme « la valise ou le cercueil ». Alors que la grande majorité des départs vers la France n’a été le fait que de personnes influencées par les nostalgiques de l’Algérie française, qui souvent l’ont regretté par la suite. Un chiffre retrouvé dans les archives du ministère des Affaires étrangères oblige aujourd’hui à revoir complètement le sujet : en janvier 2003, 200 000 Européens et juifs se trouvaient encore sur le sol algérien, soit 20 % de la population totale des Français d’Algérie. En rétablissant la vérité historique sur ces événements qui marquèrent l’Algérie et la France, la guerre terminée, en combattant les nostalgiques de l’Algérie française, nous apportons notre contribution au rapprochement des deux pays, nous contribuons au travail de mémoire nécessaire pour assumer la guerre d’un côté comme de l’autre de la Méditerranée. Bien évidemment, il n’y a pas que cet obstacle à franchir, loin de là, mais nous agissons aussi sur les autres fronts : les effets et les conséquences de la guerre d’Algérie, le racisme, la xénophobie, les effets de la politique néolibérale aux services des marchés financiers, la défense des valeurs républicaines et l’action pour la paix. Mais enfin, il faut le répéter, révéler la vérité historique sur la mémoire de cette guerre est une nécessité sans laquelle on ne peut que craindre le renouvellement des drames passés.

Mars 2012 - N°781 - LE RÉVEIL

>>> - 15


LE RÉVEIL dossier

Ce que j’ai vu en Algérie Par Joseph Almodovar « J’ai été incorporé le 15 juin 1955 à Castelsarrasin au 17e bataillon du génie aéroporté ; un an plus tard, après les classes en compagnie de la plupart de mes camarades, nous découvrons l’Algérie. Mes activités étaient diverses : itinérant cantonné essentiellement dans des fermes, chauffeur participant tantôt à des convois qui transportaient matériel ou troupes, tantôt à des chantiers, tels que la construction de bâtiments fortifiés ou la réalisation de pistes dans les Aurès… Nous étions toujours cantonnés dans des fermes ou bâtisses désaffectées, découvrant seulement au passage, en convoi, quelques villes ou villages. Dans les Aurès, j’ai découvert la misère des gens, des familles vivant dans des « mechtas » (cabanes en branchages de roseaux), sans le moindre confort, les occupants ne

16 -

LE RÉVEIL - N°781 - Mars 2012

Joseph Almodovar est membre de l’ARAC des Pyrénées-Orientales

parlant pas un mot de français. J’ai retrouvé la même situation dans plusieurs lieux du Constantinois. Les gens étaient terrorisés lors de nos visites. Pour réaliser une piste de communication dans les Aurès, nous avions besoin de personnel et une opération dans les « mechtas » permit d’emmener sans ménagement et sans explication une vingtaine d’hommes (au cours de cette rafle deux hommes qui tentaient de s’enfuir furent abattus devant femmes et enfants en pleurs). Ils furent logés sous une tente et nourris du même menu que la troupe. Dès leur arrivée au camp, le capitaine s’adressa au seul qui comprenait le français, lui demandant d’expliquer à ses compagnons de captivité : « Vous avez la possibilité de vous sauver, mais sachez que pour chacun d’entre vous qui se sauvera, nous en fusillerons trois ». C’est ainsi que matin et soir, avant et après le travail (assis par terre ils cassaient des pierres à coups de massettes) le nombre de détenus était vérifié. Sur le chantier de chaque jour, je tentai avec quelques rares autres soldats de communiquer avec les détenus, sans grand résultat, par gestes et regards afin de créer un climat un peu moins tendu ; c’est ainsi que, parmi eux, on découvrit un jeune apprenti coiffeur qui, le soir après le chantier, nous coupait les cheveux et recevait une pièce de monnaie en remerciement. Un soir, après avoir compté et recompté, deux hommes manquaient ; le capitaine, appelé aussitôt, donna l’ordre de sortir du groupe six hommes et de les fusiller. Pour cette sale besogne, des volontaires en surnombre surgirent, parmi lesquels des camarades de Castelsarrasin que je considérais comme des bons copains ; le peloton d’exécution étant formé, le reste de la troupe allait assister à la tuerie ; le coiffeur faisait partie du nombre à abattre ; parmi les assistants quelqu’un s’écria « Si on tue le coiffeur, qui va nous cou-

per les cheveux ? » Aussitôt, ordre du capitaine : « Changez-le ! » Le coiffeur ayant réalisé qu’il avait la vie sauve se mit à genoux et enlaça les jambes de celui qui venait de faire la réflexion qui aussitôt le repoussa à coups de pied. Au cours d’une patrouille, on ramena au camp un homme détenant une certaine somme d’argent ; il fut désigné, sans aucune preuve, comme collecteur pour le FLN. L’argent supprimé, il fut attaché avec du fil électrique chevilles et poignets joints dans le dos, gisant sur le sol. Une nuit où j’étais de garde à ce poste, je vis cet homme, qui souffrait énormément dans cette position et qui gémissait, me faire des signes de la tête. Je fouillai dans ses poches et, trouvant une boîte métallique contenant du tabac à priser, je me penchai et lui fit aspirer une prise ; à son regard, je compris qu’il appréciait. A ma deuxième faction de garde à l’aube, je découvris cet homme (toujours dans la même position) le visage tuméfié, en sang, méconnaissable ; l’auteur de cet acte, qui m’avait relevé à la garde, montrait ses mains écorchées par le nombre de coups qu’il avait donnés, prétextant que le prisonnier l’avait mordu. Le capitaine, constatant l’état de celui-ci, sans demander d’explications, donna l’ordre de l’exécuter sur-le-champ, ce qui fut fait aussitôt par le sergent chef de carrière qui lui tira une balle dans la nuque. Ayant participé à quelques convois routiers, à deux reprises j’ai assisté à des exécutions sommaires : le convoi s’arrête, deux hommes emmenés derrière un buisson sont laissés sur place, abattus de quelques rafales de fusils mitrailleurs et le convoi repart. Ces faits que j’ai vécus m’ont fait prendre conscience qu’il y a eu beaucoup de cas comme ceux-là et m’ont fait apparaître l’atrocité des guerres où le plus grand nombre des victimes ne sont pas les combattants mais les populations innocentes, hommes,


dossier LE RÉVEIL

femmes, enfants, exécutés comme j’en ai été le témoin par certains appelés qui, devant le danger, le climat de haine qu’ils subissent, sont transformés en assassins. Ils ne sont pas

à blâmer car, après avoir été libérés, certains conservent des traumatismes graves qui, bien souvent, ne sont pas reconnus. Les responsables de ces barbaries, ce sont les gouvernants qui

provoquent les guerres pour l’intérêt d’une minorité installée dans le confort et à l’abri du danger. Il est nécessaire de développer notre action contre la guerre. »

Delphine Renard rompt son silence En février 1962, il y a eu cinquante ans le mois dernier, l’OAS (Organisation armée secrète), bras armé des tenants de l’Algérie française, répandait la terreur dans et autour de Paris. Dix charges de plastic explosaient aux portes de logements d’hommes politiques, de journalistes, d’intellectuels. Parmi eux, le ministre de la Culture de l’époque, l’écrivain André Malraux, fut visé et c’est une petite voisine, Delphine Renard, âgée de quatre ans et demi qui fut grièvement blessée, perdant la vue. Dans un article publié par le journal Le Monde, Delphine Renard rompt son silence de 50 ans pour l’Association nationale pour la protection de la mémoire des victimes de l’OAS (ANPROMEVO). Après avoir souligné que la ville de Paris a été la première institution française, en octobre 2011, à témoigner officiellement sa reconnaissance à l’égard des 2 788 victimes de l’OAS en leur dédiant un monument au cimetière du Père Lachaise, Madame Renard souligne aussi que ce geste demeure isolé et que « nous assistons au contraire à une consécration de la mémoire des nostalgiques de

Delphine Renard a perdu la vue lors d’un attentat en février 1962, suite à un attentat de l’OAS contre l’écrivain André Malraux.

l’empire colonial au mépris des victimes de leurs actes odieux ». Puis elle développe son propos ainsi : « Ayant survécu à un attentat dirigé contre le ministre André Malraux le 7 février 1962 et à la suite duquel, grièvement blessée, j’ai perdu la vue, je serais non pas une victime mais une « bavure », selon une confidence récente d’un vieil activiste - pas du tout repentant – à un journaliste. J’avais jusqu’alors gardé le silence. Je choisis de le rompre ici pour dire ma révolte. Sous le couvert d’hommages a priori légitimes rendus aux morts, des stèles ont été élevées non à la mémoire mais bel et bien à la gloire de criminels de l’OAS, pourtant condamnés en leur temps par la justice française. Dans les municipalités où ces impudents cénotaphes ont vu le jour, l’idéologie extrémiste et le révisionnisme ont triomphé à la fois du sens commun et de l’esprit républicain : pas de tueurs de l’OAS, mais des combattants, des résistants, des patriotes ; et, dès lors, pas de crimes non

plus, mais des exécutions et pas de victimes, mais des traîtres ou simplement des bavures ! Le 28 novembre dernier, le chef de l’État lui-même a apporté une contribution éminente à l’excitation des passions mémorielles en remettant personnellement la plus haute distinction de la Nation au légionnaire putschiste Hélie Denoix de Saint Marc et en érigeant ainsi en modèle la rébellion contre l’autorité légitime. Peu après, le 10 janvier, lors d’une audience du tribunal administratif de Marseille liée à un recours contre l’édification d’une stèle magnifiant l’OAS dans un cimetière de Marignane, l’on a pu entendre l’avocat de la défense parler tranquillement des « prétendus assassinats » reprochés à l’organisation terroriste ! Aujourd’hui, le révisionnisme glisse vers un véritable négationnisme. A l’oubli des victimes succède la négation de la réalité des faits auxquels cette guerre sale a donné lieu de la part des ultras de l’Algérie française. Selon Elie Wiesel, « Tolérer le négationnisme, c’est tuer une seconde fois les victimes ». Il est des ressorts sur lesquels l’extrême droite s’appuie pour sa montée en régime : l’histoire nous l’a appris et elle adore bégayer. Nous sommes tous concernés par une République qui s’oublie au point de commettre des attentats à la vérité en honorant ceux qui ont eu recours à la barbarie pour tenter de renverser l’ordre démocratique. »

Mars 2012 - N°781 - LE RÉVEIL

- 17


LE RÉVEIL dossier

Une période tourmentée de ma vie Par le Père Louis Mazurier « Rappelé, je le suis en juin 1956. Après trois semaines de préparation au camp de Coëtquidan, le bataillon dont je fais partie est acheminé vers Marseille. Le 21 juin, nous embarquons pour l’Algérie sur le Ville de Marseille. Puis, le train nous amène vers Berrouaghia, petite ville du Sud algérien. Le premier contact me fait comprendre que des colons nous attendent surtout pour la protection de leurs récoltes. Je me retrouve rapidement dans une ferme des environs, lieutenant, chef de section d’une trentaine d’hommes, la plupart originaires de Bretagne. La section de commandement et les trois autres sections de la compagnie étaient installées dans cette même ferme. Nous campions sous des tentes autour de la maison du colon, propriétaire des lieux. Nous ne le verrons guère, mais les relations seront bonnes avec le gardien algérien de la ferme et Zohra ,sa petite fille .

Dans la diversité des témoignages que nous recueillons, le Père Louis Mazurier a bien voulu nous confier le sien. Jeune prêtre, il faisait partie, lui aussi, de ces rappelés du contingent envoyés en Algérie.

Une vie ordinaire de « rappelé » Commencent ces quelques mois où, personnellement, je suis resté dans la même optique qui se résume ainsi : on m’a envoyé dans ce pays pour une mission de pacification, pour la protection des personnes et des biens, pour « empêcher les gens de se tuer ». J’ai essayé d’entretenir dans les mêmes sentiments les gars de ma section. Nos journées se passaient à assurer l’entretien du campement, à protéger les ouvriers envoyés aux moissons, à maintenir les liaisons avec les sections envoyées dans les fermes d’alentours, à monter aussi quelques embuscades sans grand résultat. Nous ne fûmes pas engagés dans des opérations d’envergure. Le séjour se passa donc dans un calme relatif. L’ennui n’était pas absent de nos journées. Ordonné prêtre quelques mois avant le rappel, j’assurais les offices religieux de la compagnie et dans les autres compagnies du bataillon. La compagnie fut ensuite transférée à la ville de Berrouaghia, en protection des services du bataillon et pour la participation à des opérations de plus grande envergure. Héliportages, opérations de plusieurs jours, séjour dans le djebel, embuscades, fouilles, arrestations… Sentiment d’être en danger, mais aucun coup vraiment dur.

L’atrocité de la guerre d’Algérie Installés ensuite dans une ferme abandonnée, nous avons été appelés à assurer des missions de protection et de liaison. Devenu commandant de compagnie à la suite du départ du 18 -

LE RÉVEIL - N°781 - MARS 2012

commandant lieutenant d’active, mis en face de responsabilités pour lesquelles je n’avais pas été préparé, j’ai alors connu l’atrocité de la guerre d’Algérie. Ayant envoyé une section pour la protection d’ouvriers débroussaillant le sommet d’un col tout proche, j’ai entendu, quelque temps après son départ, le bruit d’un feu nourri venant de ce col et j‘ai compris que la section était tombée dans une embuscade. Effectivement, les fellaghas l’attendaient à la descente des camions. Je me suis précipité avec quelques hommes et j’ai trouvé sur les lieux dix de nos camarades massacrés et horriblement mutilés. Des représailles furent organisées dans le cadre du bataillon. Je ne veux pas en parler ; des innocents payèrent. Huit jours après cette embuscade, nous étions rapatriés. On a beaucoup parlé de la torture pendant cette guerre d’Algérie. Je n’en ai pas été acteur, ni même témoin. Le chef de bataillon m’a demandé un jour de conduire « une corvée de bois ». (NDLR / Terme qu’employaient entre eux les militaires pour l’exécution sommaire de prisonniers algériens). J’ai refusé sans hésiter. La torture était bien pratiquée, mais comme j’étais prêtre, on me la cachait. J’ai cependant entendu les cris des torturés et les réflexions au mess des officiers ne me laissaient aucun doute. Je serai toujours contre la torture ! Mais je dois avouer que la vue des cadavres de camarades a pu m’amener à comprendre le pourquoi de certains comportements… Dans cette période tourmentée de ma vie, un souvenir agréable que je garde de cette période, c’est celui de la camaraderie régnant dans la section. Une camaraderie qui dure puisque les survivants se retrouvent tous les ans en quelque coin en Bretagne.


dossier LE RÉVEIL

Témoignage Par Auguste Bechler « Appelé sous les drapeaux, deux jours avant Noël 1955, j’ai fait mes classes avec mes copains de la 55/2C, dans les forces françaises en Allemagne (RFA), à Fribourg-en-Brisgau (Pays de Bade), au 40e bataillon de transmissions. Je n’avais pas, alors, réellement conscience de la gravité de ce que les autorités et les médias appelaient les « événements d’Algérie ». Classé soutien indispensable de famille, j’avais la naïveté de croire que je serais dispensé d’effectuer mon service de l’autre côté de la Méditerranée. Comme beaucoup de gens, j’avais placé ma confiance dans la majorité de la gauche issue des élections de janvier 1956 pour parvenir à une solution négociée. Mais voilà qu’en mars, le gouvernement Guy Mollet décide de maintenir sous les drapeaux les libérables de juillet 1956 et décembre 1957 ainsi que le rappel des disponibles. En mai, nous sommes affectés à la 634e compagnie des câbles hertziens (634e CCH) et recevons l’ordre d’embarquer pour Alger. Le cœur déchiré, je laisse mon épouse et notre fiston de six mois pour l’inconnu. Deux jours après notre arrivée à Alger, nous faisons route pour Sidi Moussa, à 25 km à l’ouest, dans la Mitidja. Là, nous sommes commis d’office au « maintien de l’ordre » dans la plantation d’un gros colon. J’avoue avoir été impressionné par l’immensité et la luxuriance californienne de cette propriété. « C’est mieux qu’en cinémascope », m’étais-je dit. Dans une lettre à ma mère, pour la rassurer, je me souviens de ce commentaire : « Pas étonnant que certains Français s’accrochent à cette terre… Le proprio est milliardaire. » Nous devions à sa « magnanimité » d’être logés dans un appentis d’ordi-

naire réservé au matériel agricole. De l’eau, ses orangers, mandariniers, citronniers en avaient tout leur saoul, alors que nous, qui risquions la déshydratation durant les patrouilles de jour sous un soleil de plomb, nous étions réduits à la lui quémander. Quant au cauchemar vécu pendant les gardes de nuit, il n’en avait strictement rien à cirer, lui, bien calfeutré dans l’opulence de sa villa spacieuse. Nous, on se les caillait. L’obsédant bruissement du vent dans l’abondant feuillage des agrumes exacerbait les bourdonnements dans nos oreilles et nos tempes. Nous étions taraudés par la peur de l’attaque surprise de ceux d’en face. Un vrai danger qu’on était pour nos camarades de la relève. Un soir, l’un de nous, les nerfs à bout, incapable de discerner le mot de passe, craqua et ouvrit le feu. Ça pétaradait de partout. Le caporal de garde se prend une rafale dans la cuisse gauche, mais, grâce à son sang-froid, les dégâts ont pu être limités à cet accident. Imaginez l’état d’excitation qui régnait dans notre compagnie. Non vraiment, on n’était pas faits pour ce boulot-là. Le 12 juin, sans regret, nous quittons la plantation. Tlemcen sera notre nouvelle destination. Afin que nul ne l’ignore, « l’action psychologique des armées » nous a présenté cette ville qui fut la capitale du Maghreb central du XIIIe au XVIe siècle, berceau d’art et de culture, comme un « carrefour du terrorisme », un haut lieu de la « barbarie ». Ainsi briefés, et dans l’attente de notre redéploiement technique en stations terminales et relais, nous prenons notre cantonnement dans un stade qui avait été inauguré en 1934 par Albert Lebrun, alors président de la République.

Auguste Bechler est membre de l’ARAC de Zillisheim (HautRhin) Extrait du témoignage paru dans l’ouvrage « L’Algérie, nous y étions » - Éd. du Réveil - Préface Paul Markidès

Il est vrai que les actions de guérilla de l’ALN (Armée de libération nationale) dans ce secteur étaient fréquentes et violentes. En retour, la répétition des opérations de l’armée française, sa puissance de feu déployée et l’appui de l’aviation, ne laissaient aucun doute quant au caractère de la guerre. Ça n’avait plus rien à voir avec les promesses de paix par voie de solution négociée. Pour nous persuader de sa justification, nous avions droit quotidiennement, au rapport, aux récits sur les atrocités et les exactions commises par les « rebelles » contre la population civile et les gars du contingent. Le journal L’Écho d’Oran les étalait sur toute la largeur de ses colonnes. Comment ne pas être impressionné, choqué, voire indigné, dans ces conditions ? Dans ce contexte encore, je dois à des copains rappelés de n’être pas tombé dans le piège. Et comme si les dangers de la guerre ne suffisaient pas, il nous fallait à nous, transmetteurs, subir en plus les sévices de notre capitaine issu de l’infanterie coloniale. Celui qui se vantait d’avoir fait casser du Viet en Indo avec son unité de marsouins s’était mis en tête de nous aguerrir, nous, les bidasses de

Mars 2012 - N°781 - LE RÉVEIL

- 19


LE RÉVEIL dossier

salon… Qu’on en juge. Un jour, nous refuserons de manger un ragoût de mouton baignant dans un océan de graisse, à vous faire gerber les tripes. Ça l’a mis en transe, lui qui carburait au Pernod sec. Le voilà qui nous impose illico une séance de « pelote » : sacs à dos remplis de sable, tours de stade en plein cagnard, jusqu’à écroulement. Un autre de ses traitements sadiques consistait à nous faire monter la garde de nuit, en avant-poste, une grenade dégoupillée à la main. Ce comportement d’abruti heurtait de plein fouet notre sensibilité d’appelés. Personnellement, j’ai grandi dans une famille ouvrière, dont le père, mineur de potasse, m’avait inculqué le respect « sacré » de la vie humaine. Avec plusieurs copains, aidés là encore par des copains rappelés, plus expérimentés que nous, nous nous sommes insurgés contre ces pratiques avilissantes. Nous avons interpellé les différents groupes de l’Assemblée nationale. Il y eut enquête suivie de sanction : le capitaine baroudeur a été muté à Dakar. Et nous, pas rancuniers pour un sou, on s’est cotisé pour lui offrir une canne à pêche. On n’était pas peu fiers d’avoir obtenu la condamnation des atteintes à notre dignité personnelle. C’était évidemment modeste, comparé à l’attitude, dans des circonstances beaucoup plus graves, de la majorité des appelés et des militaires de carrière qui, avec le soutien des forces démocratiques de la métropole, ont fait échouer le putsch des officiers félons en avril 1961. Mais quand même, de l’un à l’autre de ces faits, on retrouve une démarche tendant à garantir les valeurs de la République. Après cet épisode qui n’est pas passé inaperçu dans la région militaire d’Oran, je fus chargé avec deux autres transmetteurs d’installer un relais de câbles hertziens (CCH) dans un phare situé sur les hauteurs du petit port de Nemours à la frontière algéro-marocaine. Là, nous étions en détachement en 20 -

LE RÉVEIL - N°781 - MARS 2012

zone opérationnelle, au sein d’une demi-brigade de fusiliers marins (DBFM). Notre séjour dans ce petit port actif, ses plages sympas, dans un décor exotique souligné par les aloès, aurait pu être des plus chouette, n’était la guerre. Nous partagions avec les « matafs » un certain confort matériel, inconnu dans les autres unités. Et jusqu’à un certain 17 septembre 1956, nous n’avions pas trop à nous plaindre. Malheureusement, ce jour-là, un violent cyclone s’abattit sur la région de Nemours, laissant derrière lui deuils, souffrances et dévastations. Le plus dur pour moi, ce fut la perte de mes deux camarades de station avec lesquels nous formions une équipe solidaire et fraternelle. Les éléments déchaînés les ont précipités en bas de la falaise où on les a retrouvés désarticulés et atrocement défigurés, à la limite du reconnaissable. J’en fus atterré. Jamais, je n’avais ressenti une douleur d’injustice comme celle-là. Dans des conditions précaires et entouré de la sollicitude de mes amis fusiliers marins, j’ai réussi à rétablir une liaison VHF avec l’état-major de la 634e CCH. Je ne me doutais pas que d’autres épreuves m’attendaient. Vers la fin octobre, les opérations navales, aéroportées, en appui à celles de l’armée de terre, s’intensifièrent à la frontière, près des côtes Un marché dans une oasis du sud algérien

algéro-marocaines, dans un contexte politique marqué par deux événements aggravants : l’interception de l’aviation avec Ben Bella et des dirigeants du FLN (Front de libération nationale) et, quelques jours après, l’expédition franco-anglaise de Suez condamnée par l’assemblée générale de l’ONU. Nervosité, tension dans les conversations à table. On nous confirme, témoignages à l’appui, les pratiques systématiques des « ratissages », « nettoyages » et autres « expéditions punitives ». Une spécialité navale consistait à « délester » des prisonniers emmenés sur des bateaux au large des côtes. Et ce qui ailleurs s’appelait « corvée de bois » s’appelait ici « corvée de falaise ». J’ai personnellement vu exécuter une dizaine d’Algériens civils, les mains liées au dos. Abattus, ils furent jetés à l’abrupt de la falaise. La vue de cette scène, prolongée quelques jours après par la vision des corps déchiquetés, ballottés au gré des vagues, m’avait profondément ébranlé psychiquement, au point de me replier sur moi-même, rempli de honte. J’ai peu à peu repris le dessus grâce à un copain fusilier marin avec lequel j’assumais conjointement des vacations VHF (…).


vos droits LE RÉVEIL

Janvier 2012 I Les « bonnes nouvelles » ! SMIC 9,22 e brut de l’heure, soit 1 398,37 e brut par mois.

Revenu de solidarité active

Revalorisation de 1,7 % pour 2012. De 446,99 e par mois pour une personne seule, il passe à environ 474 e.

Allocations

Revalorisation de 1 % des plafonds de ressources ouvrant droit aux prestations familiales. Ainsi le plafond pour la PAJE (Prestation d’accueil du jeune enfant) est porté à 45 068 e annuels pour un couple avec un enfant et deux salaires. Les prestations familiales sont revalorisées au 1er avril.

« charte des droits et devoirs du citoyen français ».

Logement

Les recours devant les tribunaux administratifs fondés sur le droit au logement opposable (DALO) sont désormais ouverts aux demandeurs de logements sociaux victimes d’un délai d’attente anormalement long.

Énergie

- Électricité : pas de changement des tarifs réglementés. - Gaz : hausse de 4,4 % des tarifs réglementés pour les particuliers et les entreprises. Revalorisation du tarif social : la réduction sur les factures de gaz des bénéficiaires augmente de 1 %.

Mutuelles complémentaires

Alcool

Il faut s’attendre à une augmentation à verser de l’ordre de 4,7 % à la suite du doublement de la taxe sur les contrats de santé.

Immobilier

Santé-Sécurité sociale

- Création d’un jour de carence pour les fonctionnaires en arrêt maladie. - Les indemnités journalières d’arrêts maladies remboursées par l’assurance maladie baissent pour les salaires supérieurs à 2 450 e brut, soit 1,8 smic, si l’entreprise ne compense pas. - Le salaire plafond de la Sécurité sociale qui sert de référence pour diverses cotisations et prestations, passe de 2 946 à 3 031 e. - Le plafond de revenus ouvrant droit à la complémentaire santé (ACS) qui aide les ménages les plus démunis à souscrire un contrat d’assurance maladie complémentaire (mutuelles, assurances) augmente de 3,5 %.

Justice

Mise en place des pré-plaintes en ligne : ce dispositif permet donc à une victime « d’atteintes aux biens » (vols, dégradations, escroqueries) dont elle ignore les auteurs, d’effectuer une déclaration sur Internet et d’obtenir un rendez-vous pour déposer officiellement sa plainte.

Immigration

Les étrangers devenant Français par naturalisation devront signer une

Augmentation de la taxe sur les alcools titrant plus de 18 degrés. - Baisse de la réduction d’impôt pour un investissement dans un logement neuf destiné à la location (loi Scellier) de 22 % à 13 % pour les logements neufs. - Pour les investissements dans les résidences étudiantes, de loisirs et de santé (Censy-Bouvard), la réduction d’impôt passe de 18 % à 13 %. - Le prêt à taux zéro ne concernera plus que l’accession à la propriété dans du neuf. - Revalorisation forfaitaire de 1 % des APL (Aides personnelles au logement).

Transports en Ile-de-France Augmentation de 1,5 % des tarifs, conséquence de la hausse de la TVA.

TVA

Le taux réduit de TVA passe de 5,5 % à 7 % sauf pour les cantines scolaires et les produits de première nécessité. Sont spécialement concernés la restauration, l’hébergement, les travaux à domicile, les services à la personne, les livres (avec un délai). Amis lecteurs de ces « bonnes nouvelles », je vous souhaite quand même une bonne et heureuse année ! Avec le projet de notre Président « de mener à bien les réformes de structure », « d’affranchir le pays des funestes principes posés à la Libération dans le programme du Conseil national de la Résistance »… et le sieur Brunet, auquel le chef de l’État a remis la Légion d’honneur sur le contingent du ministre de la culture le 1er janvier. Oui, Sarkozy continue son propos destructeur, oui, Sarkozy détricote la France, oui il détricote l’esprit de la Résistance. Nous le savions déjà malheureusement, et ces projets, plus que funestes, doivent faire réfléchir chaque Français ! Les anciens combattants et victimes de guerre ont, dans leur vie, dû faire face à des démons encore plus dangereux et menaçants. Mais il leur faut mener ce combat en « temps de paix » pour que celle-ci perdure et que les générations futures n’oublient pas ce que leurs ancêtres ont fait et puissent vivre décemment sur cette planète Terre. J.T.A.

Revendiquer ou améliorer ? Les deux, et avec force La langue française est suffisamment riche pour que chacun de ses mots soit utilisé avec précision, tant au fond que sur la forme. Ainsi, le droit à réparation a été obtenu par nos anciens, dès la loi du 31 mars 1919. Dans ces conditions, avons-nous à « revendiquer » nos droits acquis ? Non, mais nous avons à les défendre avec force contre toutes les atteintes gouvernementales visant à les mettre en cause. C’est une exigence, pas une revendication.

Par contre, ce droit à réparation « de base » est souvent devenu trop restrictif au fil des guerres et il a fallu l’améliorer, donc revendiquer des droits nouveaux et légitimes, en toute justice. Bref, comme chantait Jean Ferrat : « Tout seul, en ligne ou en procession, je manifeste », j’exige mon dû, le respect de mes droits, je revendique leur amélioration... Et je conspue ce gouvernement qui prétend nous rogner ailes, droits et mémoires ! « Et tu verras, Nicolas, qu’la Commune n’est pas morte ! » Le Per’Siffleur MARS 2012 - N°781 - LE RÉVEIL

- 21


LE RÉVEIL vos droits

Secret défense et constitutionnalité Le Conseil constitutionnel, qui avait été saisi par les familles des victimes de l’attentat de Karachi, vient de censurer les règles relatives aux lieux classés secret défense ; mais il vient, en même temps, de juger conformes à la Constitution les dispositions encadrant la classification des documents.

Annonce

Il convient de rappeler que la loi du 29 juillet 2009 a étendu le secret défense (qui concernait auparavant des documents) aux locaux les abritant. C’est ainsi que, par un décret non publié au Journal officiel, Matignon a classé secret défense une vingtaine de lieux, et notamment les services de renseignement et de contre-espionnage. Les sages du Conseil constitutionnel ont noté que la classification d’un lieu secret défense empêche les magistrats d’accéder à ce lieu et que l’accès à d’éventuelles preuves est inaccessible tant qu’une autorisation administrative 210x135n’est 4G pas COPY:Mise page 7/10/11 délivrée,en ce qui est1contraire à la Constitution. Jusqu’à cette décision,

Si vous êtes intéressé(e) et si vous souhaitez recevoir une documentation plus complète, adressez le coupon ci-dessous à : Mutuelle de l’Arac - 2, place Méridien 94807 Villejuif cedex - Tél : 01 42 11 11 00 mutuarac@mutuarac.com

qui est entrée en vigueur le 1er décembre 2011, le ministère concerné était libre d’autoriser ou non une perquisition après la demande du magistrat et l’avis consultatif du président de la Commission consultative du secret de la défense nationale (CESDN). C’est ainsi qu’à l’époque, le premier ministre, François Fillon, avait refusé au juge Renaud Van Ruymbeke, l’autorisation de perquisitionner la DGSE à Paris dans l’affaire Karachi. C’est une avancée très importante qui vient d’être obtenue. Pour le président du groupe socialiste au Sénat, François 14:26 Page 1 censure « est un désaveu Rebsamen, cette cinglant pour le gouvernement et un espoir

de vérité pour les familles des victimes ». Le syndicat de la magistrature s’est félicité de cette décision « qui vient rappeler avec force le principe de séparation des pouvoirs et mettre un sévère coup d’arrêt à la volonté croissante du pouvoir actuel de se soustraire à l’action de la justice ». C’est réellement un grand pas en avant qui vient d’être effectué ; mais il faudra qu’en 2012, le législateur aille au-delà et se prononce favorablement sur la déclassification secret défense des documents eux-mêmes ! Nous ne sommes plus à l’époque de la lettre de cachet et heureusement ! Mais, par certains côtés, les veto opposés par les gouvernements successifs sur la classification secret défense de certains documents, permettent à des citoyens, non pas d’être arrêtés sans motif, mais de demeurer impunis de façon tout à fait inique et injuste. Le combat doit continuer ! J.T.A.

Vous êtes Ancien Combattant titulaire de la Carte du Combattant et/ou du Titre de Reconnaissance de la Nation (TRN), veuve, orphelin, ascendant de “Mort pour la France”.

Je souhaite recevoir des renseignements sur la rente mutualiste. Nom : Prénom : Date de naissance : ........../........../.......... Adresse : Code Postal :

Vous désirez protéger votre famille comme vous-même en transformant votre épargne en une rente mutualiste d’avenir.

Ville : Tél.:

La Mutuelle de Retraites de l’Association Républicaine des Anciens Combattants est faite pour

E-mail : Cochez les cases correspondantes :

� Carte du Combattant. Date de délivrance : ........../........../.......... � Titre de Reconnaissance de la Nation. Date de délivrance : ........../........../.......... � Veuve, Orphelin, Ascendant, de “Mort pour la France” à titre militaire. � 1939-1945 � ATM (1952-1964)

Agissant en tant qu’intermédiaire entre les adhérents et la Caisse Nationale de Prévoyance, la Mutuelle de Retraites de l’A.R.A.C. permet de se constituer une rente :

Campagnes : � Indochine � Conflits modernes

vous

RC

• Non imposable et revalorisée chaque année • Subventionnée par l’Etat de 12.50 à 60% • Cumulable avec toute autre pension ou retraite • Avec des versements déductibles en totalité de vos revenus imposables • La garantie de votre placement vous est assurée par la CNP (Caisse Nationale de Prévoyance) • Le capital constitué pourra être reversé à votre décès, au(x) bénéficiaire(s) que vous aurez désigné(s) • Versements à votre convenance


vos droits LE RÉVEIL

Régime minceur pour la Cour des comptes Gardienne du bon usage des deniers publics, la cour des comptes va s’imposer le principe de bonne gouvernance qu’elle prône pour les autres ! Elle envisage la suppression de sept de ses chambres régionales, lesquelles seront fusionnées avec des chambres plus importantes. Est-ce la bonne solution ? Pour Didier Migaud, premier président de la Cour, cette décision et réorganisation « à moyens et effectifs constants s’annonce comme un gage d’efficacité ». Concrètement, la liste de 6 des 7 CRC (Chambres régionales des comptes) qui seront supprimées, est déjà arrêtée par le premier président de la Cour, même si elle doit ensuite être validée par un décret du gouvernement. Il s’agira des chambres d’Auvergne (ClermontFerrand), de Champagne-Ardenne (Châlons-en-Champagne), de Franche-Comté (Besançon), du Limousin (Limoges), de Picardie (Amiens), de Poitou-Charentes (Poitiers). Une incertitude demeure en Normandie, quant à laquelle des deux chambres de la région, Bénouville (près de Caen) ou Rouen accueillera l’autre. Le premier président de la Cour, Didier Migaud, souhaite que « le décret soit pris dans les semaines qui viennent » avec une mise en œuvre effective des regroupements autour du 1er septembre 2013. « L’idée étant de faire en sorte que chaque chambre régionale ait une taille critique minimale » précise le premier président. Les Chambres régionales des comptes contrôlent les collectivités territoriales (régions, départements, communes…) ainsi que les établissements publics locaux (hôpitaux, collèges, lycées…). Cela représente une tâche très importante pour les magistrats qui rendent près de 700 rapports chaque année. La réforme ne concernera qu’une cinquantaine d’entre eux, ainsi qu’environ 130 fonctionnaires. Mais quelques grincements de dents commencent à se faire entendre du côté du personnel et des élus locaux. Le syndicat des juridictions financières estime (à juste raison) que cette réforme va nuire « au bon fonction-

nement de la démocratie locale ». Et, comme toujours, cette réforme doit être faite à vitesse « grand V », sans consensus ni participation des différents partenaires. Dans cette réforme, il est intéressant de le préciser, deux CRC font figure d’exception. Elles comptent, tout comme

celles qui vont être supprimées, La chambre de Corse « pour des raisons politiques de reconnaissance de la spécificité insulaire » et celle de Strasbourg « ville européenne »… seraient donc conservées ? Pas question non plus de toucher aux 5 chambres d’Outre-Mer. Ces exceptions vont également soulever des « cris d’indignation » et il est à craindre que cette réforme ne se fasse pas dans la plus grande sérénité. Depuis cinq ans, la France est soumise à ce genre de transformation… Mais dire qu’elle l’accepte et s’y habitue serait une contre vérité !

Arcachon

M. Laffineur aux abonnés absents ! Le secrétaire d’État aux AC, M. Laffineur se démène beaucoup en ce début d’année et va tendre la main aux ACVG aux quatre coins de l’Hexagone. Des ACVG convoqués par le préfet… souvent seulement quelques jours avant et dans la précipitation. En Gironde, c’était le 3 mars dernier, à « l’invitation » du préfet de région Aquitaine, préfet de Gironde, Patrick Stefanini : rendez-vous à Arcachon avec M. Laffineur qui, après la cérémonie, dialoguera avec les ACVG au Palais des congrès. Le jour dit, 28 drapeaux, un piquet de l’armée de l’air, 80 personnes environ… mais pas de M. Laffineur (empêché par les conditions climatiques !) et pas de super préfet non plus. Il faut les comprendre, les pôvres ! Nicolas Sarkozy (le Président ou le candidat ?) tenait meeting ce même jour à Bordeaux ! Ils ne pouvaient pas louper ça, non ? C’est donc un préfet (inconnu au bataillon) qui, après 3 dépôts de gerbes, a lu le discours de généralités (de 14-18 à l’Algérie) de M. Laffineur, avec tout de même - la moindre des choses ! - des évocations des Résistants fusillés au camp de Souge, emprisonnés au fort du Hâ, les martyrs de la ferme Richemont…

La réunion prévue au Palais des congrès a été maintenue... Et les camarades de l’ARAC, écœurés à juste raison du mépris manifesté envers les ACVG par ces absences et ce caractère électoraliste d’utilisation des monuments aux morts, ont refusé d’y participer en l’absence de M. Laffineur. Qui aurait répondu à leurs questions ? Et au nom de qui, alors que le candidat Sarkozy de 2007 n’a pas honoré ses engagements écrits envers les ACVG… et que le candidat Sarko 2012 est reparti pour promettre à nouveau la lune ! Faut-il vous rappeler à la dignité, Messieurs qui vous croyez grands ? Les monuments aux morts ne sont pas et ne doivent pas devenir des artifices électoralistes. Respectez les noms qui y sont gravés. Ne les annexer pas pour vos visées, ils ne vous appartiennent pas. Ils sont l’Histoire de la France, la vraie, populaire et souveraine, pas la vôtre. Celle de Guy Môquet, René Sahors, des martyrs de la Résistance et du programme du Conseil national de la Résistance. Que vous foulez aux pieds… « Oui tu verras, Nicolas, que la Commune n’est pas morte… »

MARS 2012 - N°781 - LE RÉVEIL

- 23


LE RÉVEIL vos droits

Sécurité sociale et reconversion des militaires La Sécurité sociale va-t-elle financer la reconversion des militaires ? Dans un texte distribué aux personnels des écoles de réinsertion professionnelles de l’ONAC, la CGT-ONAC s’inquiète quant à cette orientation possible, sur laquelle elle ne peut obtenir aucun éclaircissement actuellement. « L’accueil des militaires dans les écoles de reconversion professionnelle de l’Office national des anciens combattants, demandé par les anciens combattants, rejoint l’orientation initiale de nos écoles (…) Aujourd’hui, admis en budget annexe, ces militaires reçoivent une formation, mais ne dépendent pas des Agences régionales de santé (ARV). Le financement de leur formation n’est pas pris en charge par la Sécurité sociale. Si un plus grand nombre de militaires venaient à être admis dans les ERP, se poserait le problème du financement de leur formation. Sauf, comme il a été évoqué, de faire prendre en charge ces militaires,

en les faisant reconnaître travailleurs handicapés (TH) par les Maisons départementales de personnes handicapées (MDPH), et donc de faire financer leur reconversion par la Sécurité sociale. Nous avons posé la question de l’avancement de cette réflexion à la Direction générale. Il nous a été répondu que cette question n’était pas du ressort du CTEP. Nous pouvons donc penser qu’il existe bien des négociations sur ce point. En l’attente d’une réponse officielle, nous ne pouvons qu’alerter sur ce point : il existe un projet ONAC de faire financer par la Sécurité Sociale des formations de militaires en retour d’opérations extérieures.

Commission nationale d’attribution de la carte du combattant Préparée le 10 janvier 2012 par son groupe spécial de travail, la Commission nationale d’attribution de la carte du combattant s’est réunie le 11 janvier à l’ONAC, à Paris. André Fillère en est l’un des rapporteurs. La commission a d’abord fait le point sur le fonctionnement du logiciel KAPTA, lequel s’améliore et a permis la délivrance de plus de 10 000 cartes au cours de l’année 2011. • Le BCAM (Bureau central des archives militaires), devenu le CAPM (Centre des archives des personnels militaires) sous l’autorité du Service historique de la Défense (SHD dépendant de la DMPA (Direction pour la mémoire, le patrimoine et les archives, service de la Défense), est opérationnel et a traité 4 000 dossiers de demandes par mois d’octobre à décembre 2011. • L’attribution de la retraite du combattant devrait, dans les 2 mois, être efficiente à 100 %. 24 -

LE RÉVEIL - N°781 - MARS 2012

• Seule l’attribution du TRN « coince » toujours, tant au niveau de son envoi individuel que de l’information de son attribution, de son expédition et de sa réception par l’intéressé qu’au plan de l’information des services départementaux de l’ONAC. Sur ce plan précis, la Commission a émis le vœu que, dès que possible, cartes du combattant et TRN soient adressés aux services départementaux de l’ONAC, avec mission pour cellesci de les remettre personnellement à leurs titulaires. • OPEX : l’arrêté relatif au Kosovo serait signé et en attente de publication. Comme pour « Daguet », il traiterait globalement la qualification des unités, de

On est donc en droit de se poser la question de négociations dont la transparence est plus qu’opaque, en tout cas pour les syndicats et les personnels. Faire payer par la Sécurité sociale des travailleurs la reconversion des militaires (qui ne cotisent pas à la Sécu) en même temps que la prise en charge des travailleurs (qui, eux, cotisent), semble un projet avancé, ou en cours de discussion. Nous n’avons pas eu de démenti quant à son existence. Il nous a simplement été signifié qu’il nous était impossible d’en discuter. Sans préjuger des conséquences de telles décisions sur le droit à réparation des militaires, nous dénonçons l’existence même de telles intentions. Au vu des mutations en cours au niveau des mutuelles, de fin de prises en charge par la Sécurité sociale de soins, de médicaments et de la reconversion professionnelle des TH, l’orientation des ERP vers une prise en charge des militaires par la Sécurité sociale des travailleurs ne serait pas acceptable. » 1999 à 2004, leur attribuant ainsi des bonifications et un nombre d’actions de feu ou de combats très important. • La Commission a ensuite examiné 4 021 dossiers, pour lesquels elle a prononcé 1 714 avis favorables (1939-1945 : 34, Indochine : 51, Algérie : 1 152, Maroc : 67, Tunisie : 62, OPEX : 358) et 2 307 avis défavorables (1939-1945 : 385, Indochine : 38, TOE : 1, Algérie : 947, Maroc : 31, Tunisie : 21, OPEX : 884). Les rejets OPEX sont dus, essentiellement, au fait que les unités dans lesquelles ont servi les demandeurs n’ont pas encore été examinées et qualifiées « unités combattantes ». Il leur appartiendra donc, après parution des listes et périodes les concernant, de faire un recours demandant le réexamen de leur demande. La Commission a également examiné 4 cas particuliers et procédé à 3 attributions de la carte du combattant au titre 1939-1945, Indochine et OPEX, puis à un retrait de carte attribuée par erreur à un appelé en Algérie fin 1962.


vie de l’arac LE RÉVEIL

OPEX - Témoignages

Des jeunes engagés meurtris par la guerre Attirés par la pub des armées sur les valeurs maritales et humanitaires, des jeunes s’engagent sur différents champs de bataille auxquels la France participe. Certains comme Nicolas en reviennent brisés. Côte d’Ivoire, Liban, Somalie ou Afghanistan, les OPEX, ces soldats français engagés dans les opérations extérieures aux côtés de forces internationales comme l’ONU ou l’OTAN, se retrouvent en première ligne au milieu de combats dont ils ne mesurent pas toujours la violence et les drames humains. « Nicolas était agent commercial dans une concession automobile », raconte Yannick Chouan, son papa.

Il allait sauver des vies Séduit par la publicité de l’armée et des copains militaires, il s’est engagé, persuadé qu’il allait sauver des vies, faire du sport à haut niveau et réaliser des actions humanitaires. Sans préciser qu’on allait lui donner une arme et qu’il aurait à s’en servir ! Après sa formation à l’école des sous-officiers de Saint-Maixent, il rejoint le 126e régiment d’infanterie à Brive-la-Gaillarde, spécialisé dans les OPEX. Une mission en Guyane puis deux en Côte d’Ivoire en 2002, au moment des élections où des affrontements violents ont tourné à la guerre civile. « Imaginez des jeunes de 20 ans qui patrouillent dans les rues au milieu des cadavres mutilés, des membres éparpillés, des têtes coupées. Et pas moyen d’en parler, d’évacuer tout ce stress. De retour au casernement, il faut faire avec. » Fragilisé psychologiquement, Nicolas sera tout de même envoyé en Afghanistan en juillet 2006. « Mais le suivi médical n’a pas été à la hauteur », ajoute Jacqueline sa maman. « Il est resté en dépression, sans soins, jusqu’à son rapatriement. Il a fait ensuite deux tentatives de suicide dont la dernière l’a laissé lourdement handicapé. Pendant tout ce temps, nous n’avons jamais été informés de l’état de santé de notre fils ». Depuis, le couple se bat afin de faire reconnaître par l’armée et la justice des droits de leur fils.

Encore de grands enfants Anne, maman d’un autre jeune engagé témoigne. « A 20 ans ce sont encore des grands enfants ! Ils ne sont pas préparés à la guerre. Sous couverture de l’OTAN, ils se croient tout permis, ont tous les droits. Sur le terrain, ils entrent dans les maisons en fracassant les portes, se servent en nourriture aux étalages… L’inverse de toute l’éducation qu’on leur a donnée. Le retour à la vie civile, à la normalité, est souvent difficile et totalement ignoré par l’armée ».

Ouest France, 25/26 février 2012

Pétition Lors de la conférence de presse de l’ARAC du Finistère, le vendredi 24 février à Quimper, Jean Salaud, président de l’ARAC du Finistère, membre du Bureau national, et Patrick Staat, secrétaire national et directeur du Réveil des combattants, ont lancé avec les parents de Nicolas Chouan - Yannick et Jacqueline - et la maman d’un autre OPEX, le comité de soutien de Nicolas.

Pour que Nicolas Chouan retrouve ses droits Les cas de dépressions, de psychotraumatismes se multiplient parmi les soldats des opérations extérieures notamment ceux de retour d’Afghanistan. L’ampleur est telle, que le gouvernement vient de mettre en place, à Chypre, un lieu de décompression avant le retour des soldats en France. Cette situation concerne des milliers de jeunes OPEX de notre pays. Parmi les soldats rapatriés, il y a Nicolas Chouan, rapatrié par anticipation en raison de son état dépressif. Aujourd’hui, l’Etat refuse une pension militaire à laquelle il a droit. Je soutiens l’engagement et la bataille de Nicolas Chouan et de ses parents qui ont saisi la Cour d’appel pour le rétablissement de Nicolas dans ses droits, notamment sa pension militaire. Nom, prénom

Profession

Signature

MARS 2012 - N°781 - LE RÉVEIL

- 25


LE RÉVEIL VIE de l’arac

70e anniversaire du docteur Louis Babin Fusillé par les nazis à La Blisière A l’initiative du Conseil municipal d’Arpajon (91), notamment de son maire Christian Béraut et d’Élisabeth Taunay, conseillère municipale délégué, la ville a rendu un solennel hommage à la mémoire du docteur Louis Babin, interné à Châteaubriant et fusillé le 15 décembre 1941 à La Bisière, avec huit de ses camarades dont trois autres médecins communistes. Le 17 décembre 2011, le PCF comme le Comité local pour le souvenir de Louis Babin se sont joints à cet hommage qui prolongeait la cérémonie tenue au Croisic sur la tombe de Louis Babin, puis à Châteaubriant. Le maire d’Arpajon ayant tenu à ce que ce rassemblement ait lieu en donnant la priorité de paroles à l’ARAC, André Fillère, président départemental, rappela devant la maison où vécut, exerça et fut arrêté Louis Babin, dans la rue qui porte son nom, qui fut ce patriote et quelle est l’actualité de son exemple. AC 14/18, grièvement blessé et gazé, croix de guerre avec sept citations, Louis Babin rejoignit l’ARAC dès sa création, puis le tout jeune Parti communiste français dès sa fondation. Conseiller municipal communiste d’Arpajon, conseiller cantonal, le « bon docteur Babin » - le médecin des pauvres, qu’il ne faisait pas payer et à qui il donnait de l’argent pour acheter les médicaments - fut aussi un homme de progrès social : création des camps de plein air et de colonies de vacances, d’écoles, de centres aérés, du club d’aviation populaire Les Libellules de l’Orge... En 1939, l’ARAC dissoute, le PCF interdit, Louis Babin les reconstitue et engage l’ARAC clandestine dans le combat contre l’occupant nazi. Dénoncé, arrêté par la police

26 -

LE RÉVEIL - N°781 - MARS 2012

française, on connaît la triste suite. Dans son intervention, André Fillère rappelait l’actualité des combats de Louis Babin et de ses camarades, même si les situations ne sont plus les mêmes. Il déclarait notamment : « Souvenons-nous que par son étincelle à lui, comme par celles de milliers de rebelles comme lui, la Résistance allait se dresser, le Conseil national de la Résistance se créer en 1943, son programme Les jours heureux voir le jour en 1944, et son application dès la libération redressera une France pourtant exsangue et ruinée ». Et s’il était là aujourd’hui ? Ne s’interrogerait-il pas, comme des millions d’entre nous, sur ce qu’est l’exercice des valeurs républicaines de liberté, d’égalité, de fraternité aujourd’hui ? Ne s’interrogerait-il pas comme des millions d’entre nous, sur ce qu’est devenue la France libre, la France terre d’asile, berceau des droits de l’homme ? Sur ce qu’il en est de notre souveraineté nationale ? Des acquis sociaux et des avancées mises en œuvre par le programme du Conseil national de la Résistance ? Évoquer la mémoire de Louis Babin et ses engagements, ce n’est pas nous enfermer dans le passé de l’histoire, mais nous interroger sur l’actualité de son héritage, sur l’actualité des valeurs qui ont animé son combat, sur les espoirs qu’il avait pour nous avec ses camarades. Alors, face à la situation critique que vivent tant de gens au quotidien chez nous, face à toutes ces guerres, toutes ces famines, ces épidémies qui ravagent tant de pays, l’ARAC de Louis Babin ne saurait demeurer passive, pas plus que lui ne l’est resté en son temps. Pas plus que ne le sont restés Jules Vercruysse, AC 14/18,dirigeant de l’ARAC, fusillé

à Châteaubriant, ni René Sahors, AC 14/18, secrétaire général de l’ARAC clandestine, fusillé au Mont-Valérien. Leur mémoire ne nous conte pas leurs souffrances, elle nous dit les espoirs qu’ils avaient pour nous, les idéaux qui animaient les espoirs qu’ils avaient pour nous, les espoirs qu’ils portent encore pour nous. Leur mémoire nous appelle à l’union. Ainsi, honorer sa mémoire c’est déjà résister, encore résister, car les valeurs qui étaient leur sont plus que jamais d’une brûlante actualité. En agissant au service des hommes et contre ceux qui veulent les broyer au nom des profits de quelques-uns, l’ARAC et ses anciens combattants, ses victimes de guerre, ses jeunes adhérents et adhérentes venus à elle pour lutter contre le fascisme, le racisme et pour la solidarité, ces adhérents font vivre Louis Babin et ses compagnons, poursuivent leur combat et sont fiers d’être leurs héritiers, leur relève. En honorant leur mémoire, nous affirmons qu’ils sont toujours à nos côtés. C’est pourquoi nous sommes ici, aujourd’hui, pour appeler à l’union et à l’action tous ceux qui souffrent, qui périrent. Et, pour prolonger leurs luttes, nous répondons à l’appel de leurs noms. Louis Babin : « Présent, camarade ! »

Romainville (93) Le 18 février dernier, la section de l’ARAC de Romainville en Seine-SaintDenis réalisait sa journée conviviale annuelle de début d’année. Près de 50 personnes y participaient avec, parmi elles, une importante délégation d’élus municipaux dont Madame le Maire. Le matin, un large débat conduit par Paul Markidès, président de la section, clôtura la réflexion des participants et participantes sur le bilan des activités de l’année, les projets pour 2012 et particulièrement les actions à mener pour la défense des valeurs républicaines, de la mémoire et des cérémonies patriotiques. Après le pot de l’amitié, l’assistance poursuivit ses échanges au cours d’un repas fraternel.


vie de l’arac LE RÉVEIL

Villejuif (94)

Hommage à Daniel Féry C’est autour du 50e anniversaire du cessez-le-feu qui mit fin à la guerre d’Algérie que s’est tenue, le 12 février dernier, l’assemblée générale de l’ARAC Villejuif avec une trentaine de militants. Après les traditionnels rapports d’activité et des finances, a débuté une discussion très nourrie sur la guerre d’Algérie, ses causes et ses conséquences, mais aussi sur le nombre de conflits existant encore aujourd’hui dans le monde parce que ceux qui possèdent la puissance et les armes n’hésitent pas les utiliser pour sauver leurs privilèges. Jacques Goutorbe, président du comité départemental de l’ARAC du Val-de-Marne, ainsi que Gilles Delbos, conseiller général et membre de notre section, participaient à ce vif débat où nombre de nos camarades sont intervenus. Et c’est à l’appel de l’ARAC et la municipalité de Villejuif qu’une centaine de personnes se sont rassemblées au gymnase Daniel-Féry,

pour rendre hommage au plus jeune de nos neuf camarades assassinés au métro Charonne le 8 février 1962, véritable massacre d’État dirigé par le préfet Papon. Après le dépôt de gerbes des différentes

organisations, suivi des prises de paroles, notamment par Philippe Lebris, 1er maire-adjoint de Villejuif, la cérémonie s’est achevée autour du verre de l’amitié suivi d’un repas fraternel. Jean-Claude Fèvre

Fréjus, Saint-Raphaël

Les anciens combattants, toujours résistants A la Maison du combattant s’est tenue l’assemblée générale de l’Association républicaine des anciens combattants (ARAC). L’association, qui compte 70 membres sur Fréjus et Saint-Raphaël, a déploré que « le budget qui nous est attribué est en baisse de 3,8 % ». Outre son combat pour la reconnaissance du statut d’ancien combattant aux soldats mobilisés dans les opérations extérieures de la France, l’ARAC tient à sensibiliser davantage le jeune public. « Le devoir de mémoire est primordial, il est nécessaire que l’Éducation nationale s’engage davantage, mais certainement pas en supprimant des cours et des professeurs d’histoire », explique Marcel

Brulefert, président de la section. L’association cherche avant tout à délivrer un message pacifiste. Elle n’hésite pas à réclamer le retour du contingent français d’Afghanistan, cette « guerre qui ne glorifie pas la France et qui lui coûte des sommes à fonds perdus » et à appeler à « démilitariser les relations internationales ». Ainsi, Gérard Vallée, secrétaire départemental de l’ARAC, critique le « budget va-t-en-guerre du gouvernement, le seul en augmentation pour 2012 » et confirme que l’association met « en accusation les fauteurs de guerre et nous persistons de le faire sans complaisance en continuant à nous indigner ». Le

message semble clair. Du moins pour ces combattants qui encouragent certains à changer leur fusil d’épaule. Var Matin - DC

MARS 2012 - N°781 - LE RÉVEIL

- 27


LE RÉVEIL vie de l’arac

Il y a 15 ans, André Davergne nous quittait

Adieu Claude, Vinci soit-il…

Son humanisme, son amour des gens en faisait tout naturellement un militant, un dirigeant, attaché à tous les combats pour la paix et la solidarité Internationale. Trésorier général puis vice-président national de l’ARAC, il était de toutes les luttes, pour la paix en Indochine, la paix en Algérie, pour aider le Vietnam à se reconstruire. Il fut vice-président puis président de l’UDAC des Hauts-de-Seine jusqu’à sa mort en 1997. Militant pacifiste, porteur des idéaux de la République, il nous a laissé un message mobilisateur en ces temps où la guerre fait des ravages dans trop de pays du monde parce que ceux qui possèdent la puissance économique, politique et aussi celle des armes n’hésitent pas à les utiliser pour sauver ou augmenter leurs privilèges.

Claude Vinci nous a quittés, sans bruit. Je n’entendrai plus sa voix grave me dire « Allo… André ». Claude c’était un ami, un frère de plus de 40 années de chaleur et d’engagements. Ancien combattant en Algérie, il avait tout plaqué pour rentrer en France, après avoir assisté, impuissant, au massacre des villageois d’un douar aux « Portes de Fer ». Qu’il dénonça avec force dans sa chanson Voilà pourquoi j’ai déserté. Combattant de toutes les causes anticolonialistes (guerre d’Algérie, Palestine au côté d’Henri Curiel, etc.) il a chanté partout dans le monde, notamment à Cuba. Militant communiste, responsable CGT du syndicat des artistes, intime d’Yves Montand, Signoret, Piccoli, de Ferrat, et des plus grands, ses tours de chant étaient toujours des engagements contre l’injustice, l’exploitation, les dictatures et les faiseurs de guerre. Mem-

J.C.F.

bre de l’ARAC, Claude avait chanté à plusieurs reprises pour l’association, notamment en 1977 pour le 15e anniversaire de la fin de la guerre d’Algérie, puis lors de la partie récréative du Congrès national de l’ARAC. En 2007, il avait été l’un des principaux artisans et la présentation sur scène et en scène, du spectacle organisé par l’ARAC de l’Essonne, à l’occasion du 40e anniversaire de sa création (décentralisation de la scène) lors de son congrès départemental à Grigny. Passeur de mémoire au service des idéaux de la Résistance, de la liberté, des droits des exploités, il avait découvert avec l’ARAC la séquence républicaine des ACVG, traduite par sa chanson J’ai vu Verdun, qui se terminait par « et moi qui n’est pas tellement l’esprit ancien combattant… maintenant je les comprends », tête baissée, poing gauche levé.

NOS PEINES mars 2012 Le Réveil des Combattants adresse aux familles et aux amis de nos camarades décédés ses sincères condoléances. ALLIER (03) Saint-Yorre : Marcel PORTES. ARDÈCHE (07) Vallon-Pont-d’Arc : Jean MEJEAN, 87 ans, Résistant. BOUCHES-DU-RHÔNE (13) Berre-l’Étang : Clovis CALMES, AC ATM. René GOUGOT, AC 39-45. Roquefort-la-Bédoule : Mme Berthie MARTY, amie. Saint-Barnabé : Joseph BROCHENIN, Résistant, agent de liaison de Jean Moulin et du colonel ROLTANGUY, arrêté par la Gestapo, évadé. Vellutini : Henri MONTREDON, AC ATM. FINISTÈRE (29) Brest : Jean ANDRÉ, 90

28 -

LE RÉVEIL - N°781 - MARS 2012

ans, AC 39-45. Jean LE GALL, AC ATM. GARD (30) Nimes : Jean SALTEL, 90 ans, Combattant Volontaire de la Résistance, rescapé du plateau des Glières. GIRONDE (33) Bordeaux 1er : Michel MARMANDE, AC ATM. HÉRAULT (34) Balaruc-les-Bains : Mme Monette PEYRAT, amie. René ROUANET, AC ATM. ISÈRE (38) Bourgoin-Jallieu : René DURAND, AC 39-45 Saint-Égrève : Henri CHAVENEAU, 88 ans. LOIRE-ATLANTIQUE (44) Orvault : Armand AUBIER, 92 ans, AC

39-45, Résistant. Médaille d’engagé volontaire, décoré par Roosevelt en 1945. LOT-ET-GARONNE (47) Fourques-sur-Garonne : Pierre LAFFARGUE, ami. MOSELLE (57) Yutz : Humbert MARCHETTI, 78 ans, AC ATM NIÈVRE (58) Fourchambault : Louis BERGERON, AC 39-45. Mme Gisèle GAGNEVIN, veuve. Mme Lucienne LALLEMAND, veuve. NORD (59) Feignies : Mme Marie-Antoinette TROUSSET-LABALETTE, Résistante. Somain : Mme Anne-Marie DESTRAY Solre-le-Château : Daniel MOUCHERON, 84 ans, ami.

RHÔNE (69) Mions : Auguste PERRIN, 86 ans, AC 39-45 Oullins : Roger GUILLON, 86 ans, AC 39-45 Saint-Priest : Robert MARECHAL, 76 ans, AC 39-45 SAVOIE (73) Feissons-sur-Isère : Maurice CHAUDAN, AC ATM. HAUTE-SAVOIE (74) Thonon-les-Bains : Charly DONATI, 74 ans, AC ATM, membre du bureau, président de l’ANACR. Maurice FONTY, 84 ans, ami. Mme Marie-Claire GENOUD, 91 ans, veuve 14-18, trésorière et secrétaire de la section pendant 20 ans. Paul PETRIGNANI, 80 ans, AC ATM. Yves SACHE, 87 ans, AC 39-45.

PARIS (75) 19e : Guy DOUCET, 86 ans. SEINE-ET-MARNE (77) Compans : Jean TABOGA, 77 ans. Esbly : Roger SAVRY, 88 ans. Provins : Gérard LE BOURHIS, 78 ans, AC ATM. ESSONNE (91) Les Ulis : Guy GRAVET, 73 ans, AC ATM. SEINE-SAINT-DENIS (93) Montreuil : Olindo TORTI, AC ATM. VAL-DE-MARNE (94) Alfortville : Mme MarieLaure MILLET, amie. Arcueil : Eric CORBIN, 50 ans, ami. Choisy-le-Roi : Marcel MORTIER


vie de l’arac LE RÉVEIL

André Fillère représentait l’ARAC nationale et de l’Essonne lors de ses obsèques au cimetière du Père Lachaise à Paris, où Claude donna son dernier tour de chant, l’assistance (nombreuses personnalités de la chanson dont Francesca Solleville, du PCF, de la CGT, anticolonialistes dont Henri Alleg, Alban Liechti, historiens dont Alain Ruscio, etc.) applaudissant avec émotion à l’écoute de ses chansons. L’ARAC partage la douleur des siens et s’associe à leur peine. Que Anne, son épouse, et ses enfants trouvent ici notre soutien fraternel et notre hommage à Claude. Salut camarade. André Fillère

Décès de Roger Goguet Savigny-sur-Orge (91) : Roger Goguet, 94 ans, employé des PTT, AC 19391940, résistant à Ribérac (Dordogne), puis de septembre 1944 au 1er mai 1945, participe, en tant que maréchal des logis chef, à la libération d’Angoulème, de Mortagne-sur-Gironde, Saintes, Marennes, Boucefranc et enfin l’île d’Oléron. Après avoir intégré la nouvelle armée française, il en démissionne fin 1945 en dénonçant les conflits coloniaux. Retraité en Essonne, il sera de longues années trésorier de l’ARAC de Savignysur-Orge et président de l’ANACR de cette ville. Militant CGT et PCF, responsable de France-URSS, il fut en 1990, avec René Rabier et Gilbert Brunet, l’un des pionniers du travail de mémoire avec les lycéens de la ville et l’initiateur des voyages sur les lieux de sacrifices et de douleur des deux guerres mondiales. Jusqu’à son dernier souffle, il demeura fidèle à ses engagements pour la paix et l’amitié entre les peuples. Toutes nos condoléances à Jacqueline son épouse et aux siens. A. F.

Gard I 50e anniversaire du drame de Charonne Mercredi 8 février à 17 heures 30, à l’appel de huit associations - Association des Algériens du Languedoc Roussillon et de l’Aveyron, ARAC comité du Gard, Coup de soleil Languedoc-Roussillon, France-El Djazair, France Palestine solidarité Nîmes, Institut d’histoire sociale de la CGT-Gard, Mouvement de la paix Nîmes, Solidaires 30 - la lecture d’un communiqué commun par le président du comité du Gard de l’ARAC a été suivie du dépôt d’une gerbe sur les grilles du palais de justice, puis une minute de

silence a été observée. Cette cérémonie entre dans le cadre des manifestations organisées dans le Gard à l’occasion du 50e anniversaire de la fin de la guerre d’Algérie, qui ont commencé par la commémoration du 17 octobre 1961, se poursuivra par le colloque historique des 10 et 11 mars, la commémoration du 19 mars et se terminera au mois de juillet par la célébration organisée par nos amis Algériens de l’indépendance de leur pays.

Villejuif (94) I Secours populaire Le Secours populaire de Villejuif (94), avec qui l’ARAC nationale a des liens étroits, a inauguré ses nouveaux locaux le samedi 18 février 2012 en présence de nombreuses personnalités (élus locaux, départementaux), mais aussi des militants, des citoyens venus lever le verre de l’amitié autour d’Irène De Santis, présidente dévouée depuis de nombreuses années. En ces temps difficiles pour beaucoup d’entre nous, la solidarité est plus que jamais indispensable. Le comité de Villejuif a vu le jour il y a 31 ans et il est toujours là pour aider les plus fragiles à faire face au quotidien avec ses 32 bénévoles, il accueille 228 familles et 4 028 bénéficiaires, distribue 18,5 tonnes de denrées alimentaires, organise des activités ludiques et culturelles. Son rôle plus que jamais indispensable

face aux difficultés économiques, sociales, face à une austérité impitoyable, au sabotage des acquis, tel le droit à une retraite décente, le droit au logement, à l’emploi, à la santé ainsi qu’au respect des valeurs républicaines. L’ARAC, le Réveil des Combattants, la Mutuelle étaient présents et souhaitent que le comité de Villejuif du Secours populaire puisse s’approprier ses nouveaux locaux et continuer ses actions de solidarité comme il l’a toujours fait.

MARS 2012 - N°781 - LE RÉVEIL

- 29


LE RÉVEIL magazine

A notre ami Jean Amblard Jean Amblard, artiste-peintre - 1911-1989 Carnets patrimoniaux du Puy-de-Dôme, n° 10. Hôtel du département, 24 rue StEsprit, 63033 Clermont-Ferrand - 10 e

« Jean Amblard est un artiste qui, dans notre siècle, ne ressemble à personne. Il ne se rattache à aucun des courants dominants dans l’art de notre temps (…). Il se rattache (à) la tradition française du parler clair qui, de vague en vague, s’en vient baigner aux rives de notre temps, cohabitant sans s’y mélanger avec les divers courants qui forment l’art contemporain ». C’est en ces termes que son camarade de toujours, Boris Taslitzky, présentait l’exposition Hommage à Jean Amblard, à Saint-Denis en 1990. Jean et Boris, nos camarades inséparables. Jean, « le peintre des maquis »,

combattant volontaire de la Résistance, amputé en 1945, Chevalier de la Légion d’honneur, membre du Comité directeur du Front National pour la libération, l’indépendance et la renaissance de la France… Jean, le peintre syndicaliste CGT, Jean le peintre communiste, Jean, l’homme de la lutte pour la paix, Jean aux multiples facettes toutes humanistes et généreuses, de l’inoubliable illustration « Et Paris brisa ses chaînes ! », après avoir dénoncé Guernica (1937) … avant d’exiger la libération d’Henri Martin (1955). Et nulle mieux que sa fille, ma camarade Hélène Amblard que j’embrasse affectueusement, ne saurait mieux définir son père : « Humilité, force, lucidité, humanité… Le tout en un seul homme et autant d’autres qui peupleront la Terre… tant qu’hommes et femmes oseront le simple courage de propager le bonheur d’aimer. » A.F.

Pour que votre univers reste lumineux • ENTRETIEN D’IMMEUBLES • REMISE EN ÉTAT • TOUS DÉBARRAS • NETTOYAGE PARKING • NETTOYAGE VITRES

Entreprise de Propreté et de Services

56, rue Louis Blanc • 75010 PARIS • Tél. : 01 46 07 53 17 • Fax : 01 42 05 97 88 • Email : scotnet@scotnet.fr


dossier LE RÉVEIL magazine

ches d’un théâtre parisien pour y jouer leur propre rôle dans un spectacle sur… l’Europe ! Rêve cocasse et pourtant sérieux dans sa méditation très documentée sur l’histoire. Le présent des choses passées, le présent des choses présentes et le présent des choses futures, sous le rêve, présentant une vérité latente à découvrir. Un livre à la fois révolté, audacieux et drôle…

Vietnam, un pays presque mien

Daniel Guilmet, Ed. de Fallois, 20 euros

Les rêves de l’Histoire

Corinne Aguzou, Ed. Tristan, 19 euros

Imaginez Margareth Thatcher atterrissant à Paris, bien décidée à démontrer que la « révolution libérale » a encore un avenir… Imaginez que Janis Joplin revit sur le port d’un transatlantique direction Le Havre et que Rosa Luxemburg, en provenance de Pologne, reprend la révolution marxiste là où elle l’avait laissée en 1919 lors de son assassinat en Allemagne. Deux fantômes et une vivante conviés à monter sur les plan-

Un témoignage de qualité marqué par une affection vraie, intense pour le Vietnam que l’auteur connaît bien pour y être né à Hanoï et y avoir vécu une partie de sa vie. Daniel Guilmet, né en 1932, est un des plus éminents français en chirurgie cardio-vasculaire. Son père enseignait les mathématiques et, de 1935 à 1941, la famille va vivre la douce vie des « coloniaux ». De famille socialiste, antiraciste, anticolonialiste bien que « coloniale », l’auteur reçoit une solide éducation républicaine. Il nous raconte la guerre et l’occupation japonaise, la collaboration du gouverneur l’amiral Decoux, la répression du pouvoir pétainiste, puis la guerre d’Indochine. Étudiant en France, Daniel Guilmet adhère

au PCF pour lutter contre cette guerre coloniale. Il le quittera discrètement plus tard, irrité par le stalinisme. Mais il rend un hommage chaleureux à Hô Chi Minh, l’oncle Hô. Que le « presque » du titre ne rebute personne. C’est une marque de pudeur, d’affection aussi et d’attachement envers ce pays où il a vu le jour, envers un peuple dont sa famille a partagé les luttes, les espoirs, les souffrances. Son attachement au Vietnam ne se dément pas et il a acquis, par-delà ce livre, le droit de dire que, fraternellement, ce pays est (presque) sien.

Exposition 1940-1942 - Les messages secrets du général de Gaulle De 1940 à 1942, le général de Gaulle, à Londres, écrira des notes, enverra des messages à ses compagnons, aux dirigeants de la France libre, à ses chefs militaires (les généraux Catroux, Koenig, Larminat, Leclerc, les amiraux d’Argenlieu, Muselier), mais aussi à Churchill naturellement et à Staline. Ces documents ont été conservés par Marie-Thérèze Dessergnat, responsable alors de l’équipe de dactylos, rédactrices et télégraphistes de l’équipe entourant de Gaulle. Elle a conservé, sur ordre du général, un dossier contenant 313 messages manuscrits du chef de la France

libre qu’elle avait eu à charge de mettre en forme, dactylographier, coder et télégraphier à leurs destinataires. Ces messages témoignent des vues « gaulliennes » de l’époque : contrôle des territoires de l’empire colonial français, seule base territoriale sur laquelle il pouvait s’appuyer, désir d’y recruter des hommes pour poursuivre le combat… mais aucune adhésion à des promesses d’émancipation future. Méfiance à l’égard des USA, trop enclins à chercher des compromis avec Pétain, à diviser la Résistance, à préparer la mainmise sur la France protecto-

rat libéré (message à Cassin, Palewski et Pleven). Rapprochement avec l’URSS (chaleureux messages à Staline, en novembre 1942, pour le 25e anniversaire de la création de l’URSS) dont il dira à Catroux : « Nous sommes actuellement plus près d’elle que d’aucune autre puissance ». Ces messages sont présentés à Paris, par une exposition intitulée : « 200 messages entre victoires et désastres », au musée des Lettres et Manuscrits, 222 boulevard Saint-Germain à Paris, jusqu’au 12 mai 2012 (entrée 7 euros). MARS 2012 - N°781 - LE RÉVEIL

- 31



Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.