Le réveil des combattants - février 12

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Village de l’amitié une belle initiative

le massacre de sétif

Charonne il y a 50 ans

le réveil FÉV 2012 - N°780 - 5 e

des combattants

Pour l’amitié, la solidarité, la mémoire, l’antifascisme et la paix

Mettre

fin

aux privilèges Une nécessité pour le pays Un devoir pour la planète

Le journal des droits de tous les anciens combattants et victimes de guerre


Sous cription nationale

Assurez l’avenir de l’ARAC La bataille financière est lancée !

Appel aux comités départementaux et locaux, aux adhérents, aux amis

Tous ensemble, il nous faut gagner. A cinq ans du 100e anniversaire de la création de l’ARAC, c’est l’exigence de son avenir. Votre soutien est un élément déterminant, il permet aux objectifs de notre combat de s’inscrire dans la vie.

Le contexte politique et social d’aujourd’hui nous fait porter haut les valeurs républicaines de l’ARAC. Chaque jour, la Nation, la souveraineté sont mises à mal par les choix du Président de la République qui aligne de plus en plus la France sur la politique et les intérêts économiques des États-Unis. Pire, la référence continuelle à l’Allemagne, dans la bouche du Président Sarkozy, ne peut que développer de légitimes inquiétudes pour tous les républicains, tous les démocrates. La France, c’est le siècle des Lumières, une terre d’accueil, le pays des droits de l’homme. La France, c’est les progrès du Front populaire (1936), la lutte contre le fascisme, la Résistance, les innovations sociales du Conseil national de la Résistance (1945). C’est grâce à ces innombrables acquis sociaux qui ont été durement conquis, que les salariés, les retraités pouvaient se soigner, manger, partir en vacances et payer l’éducation à leurs enfants. Les attaques du gouvernement contre les acquis s’accélèrent. Notre association doit plus que jamais prendre ses responsabilités pour ouvrir des perspectives politiques et démocratiques dans notre pays, au moment où tout est remis en cause. L’ARAC contribue à donner du sens républicain à la nation française, aux citoyens, jeunes et moins jeunes. L’ARAC. a toujours pris ses responsabilités, avec courage et détermination, sur le terrain de la paix, de la lutte contre le fascisme, contre les inégalités, pour le progrès social et humain. Notre association doit continuer à rassembler les femmes et les hommes de notre pays qui prennent leur vie en main, qui résistent, qui ne cèdent à la peur et la résignation. Après 95 ans de combat, ensemble, donnons les moyens financiers afin que l’ARAC poursuive le combat dont nous pouvons, hier, aujourd’hui et demain, être fiers.

Souscription nationale

ARAC 2012

Je souhaite faire un don à l’ARAC et je coche le montant souhaité : 50 e

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Merci de préciser le mode de règlement : • par chèque à l’ordre de l’ARAC, en un ou plusieurs règlements, avec les dates d’encaissement souhaitées. • par prélèvement bancaire, avec le montant de votre prélèvement (mensuel ou trimestriel) : dans ce cas merci de joindre un RIB. Dès réception de votre règlement, nous vous adresserons une attestation de contribution et un reçu fiscal. Renvoyez vos dons à l’aide de l’enveloppe T ci-jointe. A retourner à : ARAC 2 place du Méridien - 94800 Villejuif

Permettre à l’ARAC de poursuivre ses combats La situation politique et sociale en France, la situation du monde posent la question du

renforcement de l’action de notre organisation. Même si le renforcement de l’ARAC constitue une aide financière non négligeable, les enjeux d’aujourd’hui nécessitent de créer les conditions d’un développement sans précédent de notre organisation, de nos moyens, du rayonnement de notre journal Le Réveil des combattants, de la création de notre site Internet. Soyons responsables Il serait impensable de ne pas assurer la pérennité de notre ARAC, au moment où les valeurs républicaines et la souveraineté de la France sont menacées. Tous ensemble, adhérents et lecteurs, amis de l’ARAC, nous en avons la responsabilité. Les temps sont durs, aussi nous ne pouvons compter que sur nous-mêmes, les adhérents, les amis de l’ARAC. Votre participation, aussi modeste soit-elle, contribuera efficacement à l’expression et à la prise d’initiatives. Soyez de ceux qui veulent une ARAC pérenne. Il y a tant à faire • Résister aux mauvais coups du gouvernement, réagir contre les injustices, les atteintes aux droits, à la défense de l’indispensable travail de mémoire, • Travailler au rassemblement de notre peuple autour des valeurs républicaines que nous défendons, des progrès humains portés par le programme du Conseil national de la Résistance. • Combattre pour la paix, faire aboutir les légitimes revendications des anciens combattants et victimes de guerre. Nous ne sommes pas résignés mais le temps presse : assurer la pérennité de l’ARAC est certes une question financière, mais c’est d’abord un problème de conscience et d’engagement pour beaucoup d’entre nous. Aujourd’hui, nous appelons à une nouvelle mobilisation pour que nous puissions continuer notre rôle de « haut-parleur de la vérité » comme le disait Henri Barbusse. Conseil national, 4 et 5 février 2012


ÉDITO LE RÉVEIL

Mettre fin aux privilèges

SOMMAIRE Actualités p. 4 Promenades d’un économiste solitaire. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4 Charonne, un massacre d’État.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5 Quand le CAC 40 soigne ses actionnaires. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6 Que penser de la RGPP ?.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7 International p. 9 Iran : la guerre est-elle proche ?.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8 Pourquoi occupons-nous l’Irak ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9 USA : les crimes politiques.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10 Argentine : à la mémoire des 20 Français assassinés. . . . . . . . . . . . . . . 11 Salah Hamouri est rentré à la maison.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12 Pologne : à l’heure de la désespérance sociale. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21 Vos droits p. 21 Budget 2012 : rejet des amendements du Sénat. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22 ONAC : discrimination des travailleurs handicapés ?. . . . . . . . . . . . . 23 Label Bleuet de France et maisons de retraite.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24 Vie de l’ARAC p. 25 Village de l’Amitié : une initiative pour la paix. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 26 Bouches-du-Rhône : chapeau... l’expo !. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27 19 mars 1962 : le message de l’ARAC.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29 Magazine p. 30

P. 13 D o ss i e r

Mai 1945 Le massacre de Sétif Une page d’histoire longtemps gardée sous silence

LE RÉVEIL DES COMBATTANTS Fondé en 1931 par Henri-Barbusse Mensuel de l’Association républicaine des anciens combattants et victimes de guerre. Commission paritaire n° 0713-A 06545 Édité par les Éditions du Réveil des Combattants SARL au capital de 45 734,41 - Siret : 572 052 991 000 39 2, place du Méridien, 94807 Villejuif cedex Téléphone : 01 42 11 11 12 Télécopie : 01 42 11 11 10 reveil-des-combattants@wanadoo.fr

Tirage : 60 000 exemplaires Gérant Directeur de la publication : Raphaël Vahé • Directeur délégué - Rédacteur en chef : Patrick Staat • Comité de Rédaction : Brigitte Canévêt, Hervé Corzani, Jean-Pierre Delahaye, André Fillère, Laurence Gorain• Service photos : Jean-Claude Fèvre • Secrétariat de rédaction, conception graphique : Escalier D Communication • Impression : RIVET P.E. - 24 rue Claude-Henri-Gorceix, 87022 Limoges cedex 9

F

évrier 2012 où planent de nombreux nuages sur nos têtes, celles de nos enfants, des femmes et des hommes épris de justice et de paix dans le monde. La campagne présidentielle prend forme. Une réalité apparaît, les candidats déclarés ont du mal à prendre à bras-le-corps les aspirations, les besoins et les attentes des couches populaires (ouvriers, employés, agriculteurs, actifs retraités, chômeurs…), de ceux qui vivent de leur travail, de ceux qui subissent de plein fouet la fracture sociale, les conséquences de la crise. Que chacun prenne ses responsabilités : répondre aux besoins des plus défavorisés, de ceux qui subissent le plus durement la loi des marchés, augmenter le pouvoir d’achat, c’est directement peser sur la dynamique économique du pays, c’est créer les conditions de son développement et de sortir de la crise. Ce manque de réponse ne peut que favoriser le repli sur soi, la colère, la rancœur et nourrir la recherche de solutions extrêmes, nourrir l’abstention ou le vote du FN. C’est le moment où le président Sarkozy tente de rallier l’extrême droite que la référence prononcée à l’Allemagne se fait de plus en plus forte et ne peut développer que de légitimes inquiétudes pour les républicains et les démocrates. Il faut résolument répondre aux attentes de ces millions de Français, leur redonner confiance et faire reculer le désespoir. Je sais, parler de l’état de la société peut paraître ringard, mais quand en France il y a 8 millions d’ouvriers, 4,5 millions de familles qui habitent des logements sociaux, 8 millions de salariés qui gagnent moins de 1 000 euros par mois, quand des centaines de milliers de retraités vivent avec le minimum vieillesse, quand des milliers d’agriculteurs sont au bord du gouffre, quand le salaire mensuel moyen est à 1 500 euros, parler de l’état de la société, c’est parler d’eux, c’est parler de la majorité des Français. Je peux comprendre que l’on nous considère comme des utopistes à l’ARAC, mais nous le revendiquons car nous avons toujours été les porteurs des aspirations de ceux qui souffrent, de ceux qui rêvent d’un monde meilleur. Nous voulons, à l’ARAC, être avec ceux qui rêvent d’un monde de paix, de fraternité, de liberté. Utopistes et fiers de l’être, nous sommes pour que l’on s’attaque à ce 1 % de privilégiés sur la planète qui accaparent 80 % des richesses.

Patrick Staat FÉVRier 2012 - N°780 - LE RÉVEIL

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LE RÉVEIL ACTUALITÉS

Promenades d’un économiste solitaire La zone euro semblait connaître un moment de répit en cette première moitié de janvier 2012. Les taux d’intérêts qui étaient encore très élevés à la fin du mois de décembre avaient baissé, en particulier sur l’Italie et l’Espagne. L’Espagne avait pu emprunter le jeudi 12 pour le double des sommes espérées, tandis que l’Italie, le vendredi 13, avait placé des obligations à 2 ans à moins de 5 %, taux inconnu et pour tout dire inespéré après les catastrophiques émissions du début de décembre. Mais, à la mijournée, en ce vendredi 13 (tiens, tiens, aurions-nous des raisons d’être superstitieux… ?), tombait l’annonce de la dégradation de la note de la France et de l’Autriche. Ainsi, la France avait fini par perdre le AAA qui symbolisait la politique financière menée par le Président Sarkozy. L’explication de l’amélioration conjoncturelle de la situation, qui ressemble fort à ce que les Romains appelaient dans l’antiquité le « mieux de la mort », est simple. C’est l’injection importante de liquidités réalisée par la Banque centrale européenne à la fin du mois de décembre 2012 qui a permis cette détente des taux d’intérêts. En élargissant les contreparties que les banques commerciales sont autorisées à lui apporter et en étendant ses lignes de crédit, elle a apporté à ces banques plus de 450 milliards d’euros. Les effets se sont fait sentir sur les marchés obligataires, du moins à court terme. Ceci explique pourquoi les émissions de bons du Trésor tant italiennes qu’espagnoles ont été des succès. Mais les problèmes de fond ne sont toujours pas réglés. Les banques commerciales européennes, en effet, se précipitent immédiatement pour déposer les titres qu’elles ont achetés auprès de la Banque centrale européenne. Ce mécanisme dit de « prise en pension », leur permet de se refinancer à des taux très faibles. Il signifie qu’il n’y a toujours pas de marché interbancaire en Europe, un problème récur4-

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rent depuis la fin du mois d’octobre. La BCE a pu soulager temporairement les banques, elle n’a nullement réglé le problème. Aujourd’hui le montant total de ces « prises en pension » est d’ailleurs impressionnant : 489 milliards d’euros, auxquels il convient d’ajouter les plus de 200 milliards d’euros de dettes souveraines des pays « à risque » qui ont été rachetés aux banques par la BCE. Par ailleurs, la situation reste très préoccupante dans plusieurs pays. Ainsi, l’Espagne se débat-elle toujours dans une crise très grave des finances locales. La montée des impayés publics se poursuit et, aujourd’hui, les régions ne trouvent plus de préteurs si ce n’est à des taux usuraires : la Catalogne a été obligée d’emprunter à plus de 9 %. Cette montée des impayés a d’ores et déjà des conséquences graves dans le secteur privé, où les impayés se manifestent à leur tour. C’est un processus que l’on a connu en Russie de 1995 à 1998. Chaque vague d’impayés publics engendre une vague encore plus grande d’impayés privés, qui à leur tour provoquent des impayés fiscaux, qui vont à leur tour provoquer de nouveaux impayés publics. Une mauvaise nouvelle ne venant jamais seule, on apprenait, pratiquement simultanément, que les négociations pour la restructuration de la dette grecque était suspendue et que, de toute évidence, les pays de la zone euro devraient encore contribuer à hauteur de plusieurs dizaines de milliards à un nouveau plan de sauvetage de la Grèce. Enfin, en Italie, les rumeurs se multiplient quant à un retour de M. Berlusconi, dont le nom seul fait désormais l’effet d’un chiffon rouge agité sous l’œil des banquiers. Cette incapacité des pays européens à trouver des solutions viables n’est pas une nouveauté. La gestion de la crise, depuis l’automne 2009, a été en effet marquée par des solutions partielles et temporaires, des bricolages ad hoc et des

effets d’annonce se dégonflant rapidement. Avec une constance digne d’une meilleure cause, on a toujours refusé de prendre au sérieux cette crise et de lui apporter les solutions qui s’imposent, soit une avancée vers le fédéralisme européen soit une dissolution ordonnée de la zone euro.

Mais tout se paye Les pays de la zone euro sont désormais confrontés à l’heure de vérité. Connaissant les (mauvais) réflexes des politiciens, on doit s’attendre à ce qu’ils repoussent encore les décisions, dans l’espoir de gagner quelques mois, voire quelques semaines. Le fait que nous soyons en année électorale en France et que certains des candidats, Marine Le Pen et Nicolas Dupont-Aignan pour ne pas les nommer, font campagne sur le thème de la sortie de l’euro, va certainement contribuer largement à ce processus. Comme Anne Boleyn sur l’échafaud, nous pouvons presque les entendre dire « encore une minute, monsieur le bourreau ». Mais les marchés financiers pourraient se révéler autrement plus intraitables qu’un bourreau humain. Il n’est pas sûr qu’ils laissent au gouvernement français la possibilité d’aller à l’élection présidentielle de mi-avril sans qu’une catastrophe ne se produise d’ici là. Jacques Sapir Le 17 janvier 2012 Jacques Sapir est un économiste français, il enseigne à l’EHESS-Paris et à l’École d’économie de Moscou (MSE-MGU). Spécialiste des problèmes de la transition en Russie, il est aussi un expert reconnu des problèmes financiers et commerciaux internationaux. Il est l’auteur de nombreux livres dont le plus récent est La Démondialisation (Paris, Le Seuil, 2011). Source : histoireetsociete.wordpress.com


ACTUALITÉS LE RÉVEIL

Charonne

Il y a cinquante ans, un massacre d’État 2012, c’est le cinquantième anniversaire de la fin de la guerre d’Algérie. C’est aussi le cinquantième anniversaire de la manifestation du 8 février 1962 - pacifique et pacifiste - contre cette guerre et contre les attentats de l’OAS, où la police, dirigée par le préfet Papon, tuait neuf manifestants au métro Charonne et en blessait des centaines.

Illustration : Léonard Thoyer

On a du mal à imaginer le climat de violence entretenu à l’époque par le pouvoir (c’est de Gaulle qui est chef de l’État depuis 1958) et l’OAS avec ses vagues d’attentats contre les forces de gauche, les syndicats et la grande majorité de la population qui refuse la guerre. Déjà, le 17 octobre 1961, les Algériens de la région parisienne manifestent, à l’appel du FLN, contre le couvre-feu qui leur est imposé. La police se déchaîne et la manifestation tourne au carnage : des hommes sont battus, tués par balle, d’autres, très nombreux, sont jetés dans la Seine, pieds et poings liés, à Paris, Argenteuil ou dans le canal de l’Ourcq. Combien de morts ? On ne le saura jamais. Des femmes, des enfants sont arrêtés et conduits à l’hôpital Sainte-Anne : le personnel, alerté, va réagir immédiate-

ment pour les soustraire à la police et leur permettre de quitter l’hôpital par des sorties non surveillées. L’OAS, mouvement factieux d’extrême droite qui agit pour l’Algérie française, multiplie les attentats, en Algérie comme en métropole. Le 7 février 1962, dix charges de plastic secouent Paris en plein après-midi, faisant des blessés graves. Sont visés, par ces attentats, des intellectuels, des journalistes, des enseignants qui ont pris des positions pour la fin du conflit en Algérie (André Malraux, Wladimir Pozner, écrivain, membre du PCF, Raymond Guyot, sénateur communiste, Serge Bromberger du Figaro, le doyen Vedel de la Faculté de droit...) La manifestation du 8 février était une protestation contre ces attentats, contre le fascisme et pour la paix.

Le 13 février ont lieu les obsèques des neufs de Charonne au cimetière du Père-Lachaise : à Paris et dans toute la France, des millions d’hommes et de femmes manifestent leur indignation et expriment leur solidarité. Moins de deux mois après étaient signés les accords d’Évian.

Au nom de la civilisation Le 50e anniversaire, c’est l’heure du souvenir mais c’est aussi, au regard de ce drame, le moment de souligner qu’il est nécessaire de rester vigilant : la machine à diviser les hommes et les peuples fonctionne toujours. Les villages incendiés, la torture banalisée, la discrimination institutionnelle faisant des Algériens des étrangers dans leur propre pays, tout avait été justifié par le colonialisme au nom de la supériorité de la civilisation française et européenne. Les sinistres propos du ministre de l’Intérieur, opposant les civilisations entre elles, alimentent cette machine à diviser qu’il faut résolument combattre. Au nom des morts de Charonne. FÉVRier 2012 - N°780 - LE RÉVEIL

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LE RÉVEIL actualités

Transport aérien La droite s’attaque au droit de grève Cinq ans après le « service minimum » à la SNCF et à la RATP, la droite s’apprête à instaurer le « service garanti » dans les transports aériens.

Quand le CAC 40 soigne ses actionnaires Les grands patrons et les actionnaires ne connaissent pas la crise : en 5 ans, les salaires des grands patrons ont augmenté de 34 % et les dividendes versés aux actionnaires ont connu une hausse de 31 %. Les entreprises du CAC 40 devraient verser 37,3 milliards de dividendes au titre de 2011, puis 41,7 milliards l’année suivante, selon les analystes. Au final, 2011 sera à peine moins fructueuse que 2010 qui avait été une année record avec 40,2 milliards d’euros perçus par les actionnaires du CAC 40. Seul bémol, comment annoncer ces chiffres sans choquer un public français meurtri par la crise et ce, à moins de deux mois de la présidentielle ? Car malgré les bons résultats des quarante plus grandes sociétés françaises, la création d’emplois n’est pas pour demain. Dans le détail, vingt entreprises du CAC 40 devraient faire progresser leur dividende et onze les stabiliser. Si elles peuvent se permettre de soigner leurs actionnaires, c’est d’abord parce que les résultats ont bien résisté en 2011. 6-

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Les analystes prévoient des bénéfices récurrents agrégés autour de 86 milliards d’euros en 2011, quasiment stables d’une année sur l’autre. Total (qui ne paie pas d’impôts en France) reste le plus gros contributeur en volume, avec un dividende attendu à 5,3 milliards d’euros. Selon les prévisions publiées récemment par le quotidien économique Les Échos, dix champions français tiennent le haut du tableau pour le versement de dividendes à leurs actionnaires : - Total : 5,38 milliards d’euros, - France Telecom-Orange : 3,71 milliards d’euros, - Sanofi-Aventis : 3,48 milliards d’euros, - GDF-Suez : 3,38 milliards d’euros, - EDF : 2,13 milliards d’euros, - BNP Paribas : 1,98 milliard d’euros, - Vivendi : 1,81 milliard d’euros, - Axa : 1,63 milliard d’euros, - LVMH : 1,22 milliard d’euros, - L’Oréal : 1,17 milliard d’euros. Le moins que l'on puisse dire est que ces chiffres contrastent avec la situation des Françaises et des Français, dans un pays entré en récession et dont le taux de chômage est au plus haut depuis 12 ans. B.C.

Thierry Mariani, ministre des Transports, a annoncé dans les colonnes du Parisien qu’une proposition de loi du député UMP Eric Diard, soutenue par le gouvernement, sera examinée à l’Assemblée nationale. Après les onze jours de grève des agents de sûreté du secteur aérien, le gouvernement avait annoncé son intention de légiférer en début d’année. Cette annonce avait provoqué le dépôt d’un préavis de grève des pilotes (du 4 au 9 février 2012). Ceuxci souhaitent ainsi défendre le droit de grève. La proposition de loi du député Eric Diard vise à encadrer le droit de grève dans l’aérien en y instaurant un « service garanti » : tout salarié serait alors tenu de se déclarer gréviste ou non quarante-huit heures à l’avance. Une sanction disciplinaire serait prévue à l’encontre de ceux qui ne se plieraient pas à la nouvelle obligation. Le texte sera ensuite débattu début février au Sénat.


actualités LE RÉVEIL

Que penser de la RGPP ? Du mal, répondent les rapports officiels ! Le gouvernement, qui ne manque pas, une nouvelle fois, de se décerner un « satisfecit » quant à la réalisation et au bien-fondé de la RGPP (Révision générale des politiques publiques), se voit subitement soumis au feu des critiques, avec, en dernier lieu, un rapport parlementaire au vitriol. Les auteurs de ce rapport, les députés François Cornut-Gentille (UMP) et Christian Eckert (PS), n’hésitent pas à écrire : « Le bilan budgétaire de la RGPP… demeure dans l’ensemble une énigme, tant les informations, difficiles à obtenir sur ce sujet, semblent discutables et parcellaires ». Lancée en 2007, la RGPP demeure symbolique par le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, règle dite du « un sur deux ». Lors d’un séminaire réuni à Bercy, le Premier Ministre François Fillon en a encore vanté les mérites (il faut essayer de sauver le navire !) soutenant « qu’elle permettra à l’État d’économiser plus de 15 milliards d’euros entre 2009 et 2013. » Les auteurs du rapport, plus que sceptiques - et on le serait à moins - doutent de cette présentation avantageuse. Le 22 novembre, le Conseil économique et social et environnemental (CESE) avait préconisé une « suspension temporaire de la RGPP avant une réorientation assise sur l’examen sérieux de ses résultats ». Auparavant, la Cour des comptes, avait indiqué que les économies « n’étaient pas à la hauteur des attentes », les chiffrant à une centaine de millions d’euros en 2009, alors que 400 millions étaient attendus ! A l’actif de la RGPP, les deux députés avancent qu’elle « a concouru à une plus grande efficacité du fonctionnement de l’État, conduit à une légère baisse de sa masse salariale dans son budget 2012 et permis de lancer des réformes administratives restées dans les cartons pendant des années ». Mais au passif, ces deux mê-

mes députés notent que la maîtrise de la masse salariale est « difficilement évaluable avec précision », et regrettent « l’absence de véritable implication et consultation des agents et des usagers du service public », jugeant même que « sans évolution, le processus est intenable à terme ». La RGPP, assènent-ils, agit « comme un repoussoir, même si un consensus est désormais acquis sur la nécessité de réformer l’État. » D’après le député Cornut-Gentille « la RGPP a conduit à une approche comptable beaucoup plus pointue que les évaluations à la louche qui existaient jusque-là (…). Les syndicats critiquent la RGPP, mais ils reconnaissent que la réforme de l’État doit se poursuivre, même si c’est d’une autre manière ». Son collègue, le député Eckert, dénonce pour sa part « une réforme conduite de manière très verticale et systématique, sans réflexion préalable sur les missions qui devaient être réservées à l’État, transférées ou externalisées ». Parlant de « bilans financiers d’une rare opacité », le député de Meurthe-et-Moselle souligne que « les chiffres fournis par Bercy ne sont pas toujours en concordance avec ceux fournis par Matignon ou les ministères eux-mêmes. » Dans l’avis critique du député Christian Eckert, il est facile de retrouver les critiques émises par le monde ancien combattant à l’encontre des réformes effectuées depuis plusieurs années concernant le ministère des Anciens Combattants, la destruction des directions interdépartementales et des centres de réforme, le projet de “ mise à jour ” du code des pensions, qui cache

en réalité une refonte totale de celui-ci au mépris, comme toujours, du droit à réparation des anciens combattants et victimes de guerre. La charte de 1919 est menacée, comme sont menacés les droits des anciens combattants et victimes de guerre, droits que le secrétaire d’État s’est récemment permis de qualifier de « niches fiscales ». Il s’agit du droit à réparation, droit absolument “ sacré ” pour ceux qui ont donné leur vie et leur sang pour la patrie. Que personne ne l’oublie ! J.T.A.

Sarkozy du Fouquet’s aux Restos du cœur

Nicolas Sarkozy est vraiment prêt à tout pour gommer son image bling-bling de début de mandat (Fouquet’s, yacht de Bolloré, niches fiscales…), jusqu’à oser se rendre au centre logistique des Restos du cœur dans le Val-de-Marne. Une véritable provocation qui n’aurait sans doute pas été du goût de Coluche. Alors que les bénévoles des restos ont servi pendant la saison 2010/2011 quelque 109 millions de repas pour 860 000 bénéficiaires (un nombre en hausse de 25 % sur les trois dernières années). Une véritable escroquerie également quand on sait que Bruxelles veut supprimer les subventions octroyées aux associations (Secours populaire français, Croix rouge, la Banque alimentaire française) qui bénéficient d’un répit jusqu’en 2013. Mais, dès l’an prochain, 75 % de ces aides devraient déjà disparaître, soit 400 millions d’euros.

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LE RÉVEIL international

Iran I La guerre

est-elle proche ?

Américains et Européens renforcent les sanctions économiques contre l’Iran. Israël mène une guerre souterraine. Téhéran menace. Les ingrédients nécessaires à l’explosion s’accumulent. « J’applaudis les mesures prises par nos partenaires de l’Union européenne d’imposer de nouvelles sanctions à l’Iran en raison de l’échec persistant du régime à respecter ses obligations internationales liées à son programme nucléaire », a déclaré Obama dans un communiqué daté du 23 janvier 2012. Dans la foulée, le Trésor américain et le département d’État ont « salué » les nouvelles dispositions prises par l’UE, rappelant « l’engagement » des États-Unis et de leurs partenaires pour empêcher l’Iran de se doter de l’arme nucléaire. Les Vingt-Sept (l’Union européenne) viennent, en effet, de durcir les sanctions contre la banque centrale iranienne et de décider d’un embargo pétrolier qui doit démarrer le 1er juillet 2012. Des restrictions très graves pour un pays qui écoule près de 20 % de son brut vers l’Europe. La lecture qu’ils font du rapport de l’Agence de l’énergie atomique (AIE), publié en novembre dernier, les amènent à affirmer que l’Iran poursuit sa quête de l’arme atomique. D’où une multiplication des pressions sur Téhéran depuis plusieurs mois pour obliger l’Iran à abandonner ses activités d’enrichissement d’uranium. La tension monte, chaque jour un peu plus, entre la république islamique, les puissances occidentales inféodées à Washington et son inconditionnel allié, Israël, qui, malgré une opinion publique perplexe, multiplie les déclarations et les actes belliqueux.

Jusqu’où ira-t-on ? Aux menaces iraniennes de bloquer le 8-

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détroit d’Ormuz, par où transitent 35 % du brut mondial, répond une véritable guerre clandestine ponctuée d’assassinats en territoire iranien. Après Massoud Ali Mohammadi, Majid Shahriari et Darioush Rezai, Mostefa Ahmadi Roshan, spécialiste du nucléaire sur le principal site d’enrichissement d’uranium (8 000 centrifugeuses), a été « liquidé » le 12 janvier dernier dans l’explosion de sa voiture. Les autorités iraniennes ont tout de suite accusé les autorités israéliennes… qui d’ailleurs ne s’en cachent pas ! « Faire disparaître les scientifiques est l’une des manières de rendre les choses plus difficiles et de gagner du temps. On aurait dû commencer plus tôt », commentait récemment Efraim Inbar, de l’université Bar-Ilan à Jérusalem et directeur du centre d’études stratégiques Bégin-Sadate. Selon Le Figaro, « l’assassinat d’experts nucléaires n’est que l’une des facettes de cette guerre de l’ombre qui s’appuie aussi sur des attaques informatiques, des sabotages et des exfiltrations de transfuges. L’an dernier, le virus informatique Stuxnet, en infectant plus de 30 000 ordinateurs, a suffisamment endommagé les centrifugeuses pour retarder le programme iranien pendant six mois ». Le tout serait orchestré par le redoutable service secret israélien, le Mossad, dont même à Washington, selon des sources proches de la MaisonBlanche, on estime qu’il en fait trop… Aujourd’hui, de nombreux experts redoutent une issue militaire à cette escalade. Pour Gary Sick, ancien conseiller à la Maison-Blanche sous les présidents Ford et Carter, professeur à l’université

Columbia, les sanctions américaines et européennes équivalent à un « acte de guerre ».

Vers un conflit majeur. Dans une interview publiée par le quotidien Libération, cet observateur averti observe que, si les Iraniens ne peuvent plus vendre leur pétrole, alors ils n’auront plus rien à perdre en prenant des mesures extrêmes. Il ne faudra pas être surpris si l’Iran répond vigoureusement à un moment ou à un autre. Téhéran pourrait alors attaquer les ports et raffineries sur l’autre rive du Golfe avec ses missiles de croisière, réduisant considérablement les exportations de pétrole, les siennes et celles de l’Arabie Saoudite ou du Koweït. Le prix du baril bondirait à plus de 200 dollars (153 euros), avec un effet considérable sur les économies occidentales. « On parle aujourd’hui des sanctions comme si elles étaient sans risques. On peut harceler l’Iran jusqu’à un certain point, mais si on coupe sa principale ressource, il faut s’attendre à une réponse forte, très coûteuse pour tout le monde. Les Européens doivent être au moins conscients que cela pourrait déclencher une guerre », estime l’ex-conseiller à la Maison-Blanche, soulignant qu’Obama en pleine année électorale est dans la surenchère… pour ne pas avoir l’air faible face à l’Iran et satisfaire les puissants lobbys américains soutiens d’Israël. Pour François Géré, directeur de l’Institut français d’analyse stratégique, qui s’est exprimé dans un article publié dans Le Monde, « le scénario de guerre est possible, l’escalade a atteint un point critique ». Analysant les différents enjeux, il souligne que pour le pouvoir iranien « ce serait l’occasion de renforcer une unité nationale entamée en plaçant au second plan le mécontentement général d’une mauvaise gestion économique qui, aggravée par les sanctions, rend difficiles les conditions de vie (…) Un affrontement direct permettrait de rompre l’isolement diplomatique régional dû à la crainte de l’arme nucléaire et à la dynamique des changements de pouvoir dans le monde arabe qui favorise le sunnisme. Se présenter comme le seul État


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qui ose défier la suprématie américaine se révélera payant ». Concernant l’attitude américaine qui, pour une part, conditionne celle des Occidentaux, François Géré estime, lui aussi, que le président Obama est sous la pression des républicains mais aussi de nombreux parlementaires démocrates soucieux de la protection d’Israël. « Il est temps pour l’administration américaine de faire preuve de fermeté au-delà des mots, même si l’option de l’endiguement a sa préférence (…). Il faut aussi rassurer les alliés régionaux et donner plus de consistance à cette stratégie d’endiguement, mise en œuvre depuis deux ans, fondée sur le redéploie-

ment des troupes d’Irak et d’Afghanistan vers la péninsule arabique, la défense antimissiles et, plus discrètement, la garantie nucléaire. Enfin, calmer les impatiences belliqueuses du gouvernement israélien ». Le directeur de l’Institut français d’analyse stratégique conclut : « Après 10 ans de vaines négociations, l’épreuve de vérité approche . Mais quelle vérité ? » A l’heure où nous écrivons ces lignes, le président Ahmadinejad s’est dit prêt à reprendre le dialogue. Selon lui, « un pays qui est rationnel et dans son bon droit ne craint pas les négociations ». Un sursis ? Jean-Pierre Delahaye

Pourquoi occupons-nous l’Irak ? Cet article est paru dans le supplément Manière de voir du Monde Diplomatique daté de décembre 2011/janvier 2012. Signé par Howard Zinn (voir encadré) nous publions quelques extraits significatifs des vrais motifs de la guerre en Irak, tant au plan de la politique internationale américaine que sur le plan intérieur, comme nous l’avions déjà montré dans un précédent dossier sur le Patriot Act. L'Irak n'a pas été libéré, il a été occupé. Cela est une évidence. Désormais, les occupants, c'est nous (l’Amérique NDLR). Certes nous avons libéré l'Irak de Saddam Hussein, mais pas de nous. De même que nous avions libéré Cuba, en 1898, du joug espagnol, mais pas du nôtre. La tyrannie espagnole fut vaincue, mais les États-Unis transformèrent l'île en base militaire, à l'image de ce que nous faisons en Irak. Les grandes entreprises américaines s'implantèrent à Cuba, comme Hechtel, Halliburton et des entreprises pétrolières s'implantent en Irak. Les États-Unis rédigèrent et imposèrent, avec des complices locaux, la Constitution qui devait régir Cuba, tout comme notre gouvernement a élaboré, avec l'aide de groupes politiques locaux, une Constitution pour l’Irak. Non, cela n'a rien d'une libération. C'est bel et bien une occupation. (…) Et c’est une sale occupation (…) La chaîne CBS News rapportait, dès le 19 juillet 2003, bien avant la découverte des cas avérés de torture dans la prison d'Abou Ghraib à Bagdad : «Amnesty International examine un certain nombre de cas de

torture présumée commis en Irak par les autorités américaines. Dont l'un est l'affaire Khraisan Al-Aballi. La maison de M Al-Alballi a été rasée par des soldats américains qui ont débarqué en tirant dans tous les coins ; ils l'ont arrêté, ainsi que son vieux père de 80 ans. Ils ont atteint et blessé son frère... Les trois hommes ont été emmenés... M Al-Aballi dit que ses interrogateurs l'ont mis entièrement nu et l'ont maintenu éveillé pendant une semaine, soit debout, soit à genoux, pieds et poings liés, la tête recouverte d'un sac (…) Les officiels américains n'ont guère répondu aux multiples demandes qui leur ont été faites pour discuter de cette affaire... » (…) Mais il existe une occupation d'encore plus mauvaise augure que celle d'Irak, c'est l'occupation des États-Unis. Je me suis réveillé ce matin ; j'ai lu le journal, et j'ai eu la sensation que nous étions nous-mêmes un pays occupé, qu'une puissance étrangère nous avait envahis. (…) Ces vingt millions de gens qui vivent aux États-Unis, qui n'ont pas le statut de citoyens et qui, en conséquence et en vertu du Patriot Act (la loi patriote), sont susceptibles d'être jetés

hors de leurs maisons et détenus indéfiniment par le FBI, sans aucun droit constitutionnel - ces gens, selon moi, ne sont pas des étrangers (…) Nombre d'Américains se sont pris à penser, au fil de la guerre, que ce pays ne ressemblait pas à l'image que nous nous en faisions. Chaque jour apportait son lot de mensonges sur la place publique. Le plus monstrueux de ces mensonges étant que tout acte commis par les États-Unis devait être pardonné parce que nous sommes engagés dans une « guerre contre le terrorisme ». Passant outre le fait que la guerre elle-même est du terrorisme ; que faire irruption chez des gens, emmener des membres d'une famille et les soumettre à la torture, c'est du terrorisme ; qu'envahir et bombarder d'autres pays ne nous apporte pas plus de sécurité, bien au contraire (…) La prétendue « guerre contre le terrorisme » est non seulement une guerre contre un peuple innocent dans un pays étranger, mais aussi une guerre contre le peuple des États-Unis. Une guerre contre nos libertés, une guerre contre notre mode de vie. La richesse du pays est volée au peuple pour être redistribuée aux super riches. On vole aussi la vie de nos jeunes gens. Howard Zinn Howard Zinn est un historien et politologue américain, professeur au département de science politique de l’Université de Boston durant 24 ans. Pendant la 2nde guerre mondiale, il s’engage dans l’armée de l’air et est nommé lieutenant bombardier naviguant. Cette expérience sera le déclencheur de son positionnement politique pacifiste qu’il élève au rang de devoir de désobéissance civile. Il deviendra un acteur de premier plan du mouvement des droits civiques et du courant pacifiste aux USA. Auteur de vingt livres dont les thèmes (monde ouvrier, désobéissance civile et « guerre juste » notamment) sont à la croisée de ses travaux de chercheur et de son engagement politique, il est particulièrement connu pour son bestseller, Une histoire populaire des ÉtatsUnis, qui « l’a consacré comme l’un des historiens les plus lus, bien au-delà des campus américains ».

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USA

Les crimes politiques Au nom de la lutte contre le terrorisme international, le président américain soutient des programmes d’assassinats, renforce le pouvoir de la CIA, des militaires et signe des lois liberticides Le 2 mai 2011, sur ordre de la MaisonBlanche, un commando des forces spéciales américaines assassinait le terroriste Oussama Ben laden en territoire pakistanais s’en même en avoir informé le gouvernement de ce pays. Obama, Hillary Clinton et quelques chefs militaires suivaient la scène en direct, minute par minute, depuis le bureau ovale à Washington. Quelques mois plus tard, le 30 septembre au Yémen, Anouar Al-Aulaqui, un iman radical, citoyen américain et yéménite connaissait le même sort, cette fois liquidé par un drone. Chef de la branche d’al-Qaida au Yémen, il était à l’origine de plusieurs attentats meurtriers, notamment celui perpétré sur la base militaire de Fort Hood (13 morts) au Texas en 2009. Ces liquidations sommaires ne sont pas isolées. Chacun connaît aujourd’hui le rôle des services spéciaux dans la guerre de « libération du peuple libyen » et le lynchage de Kadhafi. De nombreux observateurs sont d’accord pour affirmer que sous l’administration Obama, les États-Unis ont considérablement intensifié l’utilisation des drones en Afghanistan, au Pakistan, en Irak, au Yémen et récemment en Libye, pour tuer toute personne qui serait qualifiée de « militant » ou de « terroriste ». Un sixième pays vient d’être ajouté à la liste, la Somalie. 10 -

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Une machine criminelle L’administration américaine ne s’en cache pas et même revendique ces actions. Il y a quelques mois, elle a révélé sa « stratégie nationale de contre-terrorisme », qui décrit une politique « d’assassinats ciblés » partout où les États-Unis identifieraient une menace contre leurs intérêts. En présentant cette démarche criminelle, le conseiller John Brennan, a déclaré : « Notre meilleure offensive ne sera pas toujours de déployer de grandes armées à l’étranger, mais parfois de mettre une pression ciblée, chirurgicale, sur les groupes qui nous menacent ». Ce qui fut dit fut fait et va se poursuivre… En réalité, sous prétexte de guerre contre le terrorisme, le locataire de la MaisonBlanche a élargi les bases légales permettant les assassinats ciblés. Les chiffres sont là pour le démontrer. A titre d’exemple, depuis son élection, 255 tirs de drones ont été ordonnés sur le seul Pakistan, soit 5 fois plus que pendant les deux mandats du texan G.W. Bush. Si l’on en croit la New America Foundation, le nombre de morts consécutifs aux attaques a également quintuplé. En fait, il semble que l’administration Obama ait construit un vaste appareil d’élimination par le meurtre, opéré par la CIA et le Pentagone et en dehors de tout contrôle du Congrès américain. Selon le Washington Post, ce « programme drones » comprendrait des dizaines de sites secrets et de bases clandestines dans six pays sur deux continents… Le quotidien a publié des listes de « sujets à assassiner » compilées par la CIA et le Joint Spécial Opération Command (JSOC) de l’armée US sans que les critères utilisés pour la sélection des personnes ciblées soient rendus publics…

Une loi liberticide Et ce n’est pas tout ! Il y a quelques semaines le président américain a signé le National Defense Autorisation Act, loi de programmation budgétaire de l’armée US. Celle-ci précise que toute personne suspectée de terrorisme pourra être arrêtée sur le sol américain et être détenue de façon illimitée sans procès. Une mesure totalement contraire au droit international et au droit américain. Pour Geneviève Garrigos, présidente depuis 2009 d’Amnesty International, interrogé dans l’Humanité du 22 janvier 2012 , « c’est dramatique. Si demain, l’armée américaine estime que vous, moi ou quelqu’un d’autre peut être un terroriste, elle peut vous arrêter pour une durée illimitée et sans aucun recours possible. Par ailleurs, cette loi durcit les conditions d’accueil dans les pays étrangers des détenus libérés de Guantanamo et interdit leur transfert via les États-Unis, y compris pour être jugés. On est dans une impasse. Au début, le président Obama avait dit qu’il opposerait son veto à cette loi et donc qu’il ne la signerait pas. La semaine dernière, il l’a pourtant signée. Pour nos collègues américains, c’est assez effrayant. Si on commet des crimes, il faut en subir les conséquences mais ce n’est pas parce que l’on est un criminel que l’on n’a plus de droits ». Une nouvelle fois Obama s’est renié. On est bien loin des intentions officiellement annoncées par le candidat « démocrate » et surtout des déclarations du président élu à l’occasion de la remise à Oslo du prix Nobel de la paix en 2009 : « Même si nous sommes confrontés à un ennemi malfaisant qui n’applique aucune règle (…) les États-Unis d’Amérique doivent garder un comportement exemplaire dans la conduite de la guerre (…) c’est ce qui nous rend différents de ceux que nous combattons ». Cela reste à prouver. Jean-Pierre Delahaye


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Argentine

A la mémoire des 20 Français assassinés par l’État terroriste (1972-1983) Dans le cadre de la Journée mondiale des droits de l’homme, le Collectif argentin pour la mémoire a organisé, le 8 décembre 2011 au Sénat, un colloque international à la mémoire des vingt Françaises et Français assassinés par les responsables de la dictature d’État, d’abord Isabel Martinez de Peron, 3e épouse de Juan Péron, qui lui succéda à la Présidence de la République de juillet 1974 à mars 1976 (avec déjà 600 assassinats et 500 disparitions sous son mandat) puis le général Videla et ses sbires, de 1976 à 1983. André Fillère, invité, y a assisté au nom de l’ARAC. Ouvert par Aldo Ferrer (ambassadeur de la République d’Argentine en France) et Alicia Bonet-Krueger (présidence du Collectif), ce colloque fut animé notamment par Gabriel Péries (docteur en sciences politiques), qui traita de « l’origine de l’état terroriste et la disparition forcée en Argentine » et maître Sophie Thonon-Wesfreid (avocate au Barreau de Paris) qui relata son travail pour que se tiennent des « procès en France contre les responsables des disparitions forcées des Français en Argentine ». Rappelons que plus de 30 000 Argentins connurent le même sort terrible sous cette dictature, auxquels s’ajoutent les rapts d’enfants arrachés à leur mère et confiés à des bourreaux. Rappelons également la terrible responsabilité des gouvernements français et de certains officiers de l’armée française (les colonels Laschesroy, Aussares, Trinquier entre autres) qui formèrent des officiers argentins dès 1958 en France et au centre d’instruction contre la guerre subversive d’Arzen, durant la guerre d’Algérie, avant de les assister directe-

ment en Argentine après 1962 (école militaire de Buenos-Aires, délégation militaire permanente en Argentine, etc.), prenant ainsi une part capitale dans l’instauration de l’État terroriste de Videla et sa politique de terreur collective, se faisant de fait complices de crimes contre l’humanité. La projection du film documentaire La Santa Cruz fut l’un des grands moments d’émotion, avec la relation de l’enlèvement, au sein de cette église, de deux religieuses françaises (Léonide Duquet et Alice Domon) ainsi que de femmes argentines fondatrices du mouvement des « Mères de Mai » réclamant le retour de leurs filles, fils, maris, familles, enlevés et disparus. Autres instants terribles, le témoignage de six membres des familles de disparus : le neveu et la sœur des religieuses Léonide Duquet et Alice Domon, la sœur de Marianne Erize (assassinée à 24 ans), un ami du père Gabriel Longueville, le mari survivant de Célia Rothenberg (assassinée à 21 ans), le frère de Yves Domergue (22 ans)…

L’avocat Horacio Mendez Carreras évoqua à son tour son combat pour les « procès en Argentine contre les responsables des disparitions de Français en Argentine », puis lui succéda maître Martin Rico, membre du secrétariat du comité de la Ligue des droits de l’homme argentine. Pour conclure, Cécilia Ayendi, responsable de coordination de l’Équipe argentine d’anthropologie légiste (EAAF), expliqua les méthodes de travail du « processus d’identification des corps » de la religieuse Léonie Duquet, identifiée le 29 août 2005, après que son corps (disparu le 10 décembre 1977) ait été rejeté sur une plage de l’océan, et de Yves Domergue, disparu le 26 septembre 1976 et retrouvé au cimetière de Melincué (près de Santa Fe en Argentine), grâce au remarquable travail de mémoire (en 2003) du professeur Juliana Cagrandi et de ses élèves de lycée. Dernier moment d’intense émotion, l’appel des vingt noms des disparus français avec, pour chacun, l’assistance du colloque debout répondant d’une même voix « Présente » ! FÉVRier 2012 - N°780 - LE RÉVEIL

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Une démarche extraordinaire pour « maintenir la mémoire vivante, pour transmettre l’histoire et éveiller les consciences, de sorte que ces faits ne se reproduisent plus jamais, ni en Argentine, ni en France, ni ailleurs »(1). Nous formulons le vœu que ce colloque international dédié à la mémoire des Français assassinés en Argentine par la dictature d’État terroriste serve à poursuivre le combat pour

que soit « élucidée » la mort des 30 000 Argentins disparus, leurs dépouilles retrouvées pour le deuil des familles, et que, par le châtiment des coupables, justice soit rendue à une génération entière, engagée dans la vie politique pour un monde meilleur … et qui a été radicalement « rayée de la carte » ! Séquestrés, torturés, assassinés… 30 000 ! Nunca mas ! Plus jamais !

1 - Telle est la raison d’être de ce colloque et du Collectif argentin pour la mémoire 1 passage Monténégro 75019 Paris colecti8.argentin@gmail.com

Rencontre avec Salah Hamouri et sa famille, à son domicile le 24 janvier dernier. Patrice Leclerc, Conseiller général et Mohamed Bellouch, maire adjoint de Gennevilliers, lui remettent la médaille d'honneur de la ville de Gennevilliers (93) qui l'avait fait citoyen d'honneur.

Salah est rentré à la maison ! Après 6 ans, 9 mois et 15 jours de prison, Salah Hamouri est enfin libre depuis le 18 décembre dernier ! Il n’aurait pas dû faire une seule journée de prison, tant aucun acte n’a pu lui être reproché par un tribunal pourtant d’occupation. Rien. Dossier totalement vide. Pourtant, emprisonné à 20 ans, il aura fait près de 7 ans de prison. Naturellement nous sommes heureux et fiers d’avoir contribué grandement à sa libération. Et l’ARAC n’a pas été en reste, votre journal, Le Réveil en témoigne, dans cet effort de mobilisation que nous avons mené. Pourtant des questions se posent clairement aujourd’hui. Pourquoi donc un Franco-Palestinien, en prison pour rien, n’a-t-il pas eu, et c’est un euphémisme, le soutien déterminé des autorités françaises pour obtenir sa libération ? Dans tous les autres cas, et je ne parle pas 12 -

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seulement du caporal franco-israélien Guilad Shalit, les autorités de notre pays se sont mobilisées fortement. Jusqu’à créer une crise diplomatique avec le Mexique… La réponse à cette question est malheureusement limpide, mais aussi triste pour notre pays et son rayonnement international. Dès le début où nous avons connu son cas et que nous sommes intervenus, un seul et unique « argument » nous a été servi : il y a une procédure judiciaire et nous ne pouvons pas intervenir dans le cours de celle-ci qui se tient en Israël. Mais, et ce n’est pas aux lecteurs du Réveil que je vais apprendre qu’un tribunal militaire c’est tout, sauf la justice. Un tribunal militaire est au service de la force occupante. On n’est jamais innocent devant lui mais toujours coupable. Il y a 4 500 prisonniers palestiniens dans les prisons israéliennes.

C’est la « loi » d’une force militaire occupante : on emprisonne à tour de bras. Et les autorités françaises nous ont dit et redit : « C’est la justice, on ne peut rien faire ». Cela signe un fait terrible de la politique actuellement suivie par le Président : l’acceptation, dans les faits, de l’occupation israélienne. Je dis bien « dans les faits » car, dans les mots, on parle autrement ! Voilà la question majeure qui est posée et qui jaillit clairement derrière ce qui est arrivé à Salah Hamouri. Mais il est aussi une seconde leçon : si nous avons eu face à nous un mur pour obtenir la libération de Salah, force est de reconnaître que, en faisant preuve de patience et de rassemblement, nous y sommes parvenus. C’est une seconde leçon majeure de cette affaire. Et cela va plus loin que le « cas » tragique de Salah qui a trouvé un réconfort énorme dans notre action. Si on veut que la France retrouve un rôle attendu au Proche-Orient, le lieu central où jaillissent les bruits de guerre mondiale, alors il faut se mobiliser et agir. Salah est libre ! Reste plus qu’à libérer la Palestine de l’occupation. Et à libérer du même coup le monde du spectre d’une guerre mondiale. Jean-Claude Lefort Président de l’Association France Palestine Solidarité et coordinateur du Comité de soutien à Salah Hamouri


LE CAHIER MÉMOIRE

le réveil

N° 780 Février 2012

des combattants

Pour l’amitié, la solidarité, la mémoire, l’antifascisme et la paix

8 mai 1945 : manifestation à Sétif pour fêter la victoire, où les Algériens exprimèrent leur espérance de liberté.

Édité par le Réveil des combattants - 2 place du Méridien - 94807  Villejuif - Tél. 01 42 11 11 12

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ÉDITO - Par Paul Markidès

Mai 1945 Le massacre de Sétif

Le 8 mai 1945, l’armée nazie signait sa reddition sans conditions à Berlin. C’était le jour de la victoire des troupes alliées symbolisée par la présence des généraux français, anglais, américains et soviétiques, de la Résistance de tous les peuples d’Europe et des peuples originaires des colonies françaises qui avaient pris part aux combats libérateurs. Parmi eux, les peuples du Maghreb dont de nombreux Algériens. C’était la victoire de la liberté à laquelle les combattants algériens avaient payé un lourd tribut, nombre d’entre eux y ayant sacrifié leurs vies. Ce jour-là en Algérie, beaucoup de combattants rentrés chez eux, beaucoup de familles qui avaient perdu certains des leurs, voulaient exprimer leur volonté de profiter de la liberté reconquise et avaient décidé de le dire en manifestant leur espérance tant à Sétif qu’à Guelma. Mais c’était sans compter avec les colons, qui voyaient dans ces manifestations la mise en cause de leurs privilèges. De là naquirent les provocations. Et comme la violence appelle la violence, les conséquences en furent dramatiques : notre ami Georges Ploteau évoque ces événements avec une grande retenue en même temps qu’une grande volonté de présenter la vérité des faits corroborés par les témoignages qui suivent. Le Réveil qui combat le colonialisme et ses séquelles, qui sont malheureusement encore nombreuses, ne pouvait pas taire ces événements de Sétif et Guelma. A vous de juger.

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LE RÉVEIL dossier

Soumission d’une tribu rebelle dans la région de Kherrata, apr ès les émeutes de mai 1945.

Les massacres de Sétif en mai 1945 Une page de l’Histoire longtemps gardée sous silence Par Georges Ploteau

8 mai 1945 ! Après des années de guerre meurtrière, ce nazisme qui prétendait dominer le monde pour 1 000 ans avait enfin signé sa capitulation. La Seconde Guerre mondiale n’était pas totalement terminée, elle continuera jusqu’en septembre, en Asie et Océanie, contre l’impérialisme japonais et ses complices. Mais, dans les villes et villages de France et des nations alliées, c’était la liesse ! L’Algérie et les Algériens avaient contribué à cette victoire. En avril 1956, donc dans les premières années de ce qui deviendra la guerre d’Algérie, notre Réveil du Combattant rappelait dans son titre de première page: « Tant d’amis nord-africains sont tombés pour libérer la Provence, le Jura ou l’Alsace ». En effet, 138 000 Algériens s’étaient engagés à partir de 1942 14 -

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dans l’armée française. Comme l’a rappelé le film Indigènes : Algériens, Marocains, Tunisiens se retrouvèrent aux premiers rangs dans les combats meurtriers de la Libération : en Italie (notamment Monte Cassino), en France, en Allemagne… Des dizaines de milliers de ces hommes, venus de ces troupes coloniales d’Afrique, d’Asie laisseront leur vie ou en re-

Georges Ploteau est membre du Bureau national de l’ARAC et de la commission nationale Mémoire

viendront blessés en combattant avec les forces de la liberté. Parmi ces Algériens qui se battirent alors sous le drapeau français, il est significatif de rappeler quelques noms, entre autres : Ahmed Ben Bella, Krim Belkacem, Mohamed Boudiaf, Mostefa Ben Boulaïd … On les retrouvera plus tard parmi les fondateurs du FLN. On oublie fréquemment que l’Algérie avait été un point important dans cette guerre. En novembre 1942, les troupes américaines et anglaises débarquaient à Sidi Ferruch et, avec le concours décisif de la Résistance locale, Alger se libérait des collaborateurs de Vichy. Tout ne sera pas clair avec l’administration de Darland et d’anciens pétainistes


dossier LE RÉVEIL vite reconvertis. Rappelons rapidement que, malgré la pression américaine, sous l’impulsion du général de Gaulle et des forces de la Résistance, Alger deviendra la capitale provisoire de la France libre. En avril 1943, les prisonniers communistes et une partie des nationalistes algériens avaient enfin été libérés, d’autres leaders, notamment Messali Hadj, fondateur du Parti populaire algérien demeuraient en assignation à résidence. Le 23 avril 1945, celui-ci était arrêté et déporté à Brazzaville au Congo. Ferhat Abbas (originaire de Sétif) avait créé, en mars 1944, l’Association des amis du manifeste de la liberté : « L’opinion musulmane veut être associée au sort commun autrement que par de nouveaux sacrifices ». Son signal d’avertissement s’amplifiait depuis le printemps 1945. Le 1er mai, dans des rassemblements (parfois sévèrement réprimés), des cris s’élevaient pour que les promesses faites par le pouvoir français aux Algériens soient respectées. Avec des motivations différentes, le PPA, l’AML, le mouvement des oulémas voulaient rappeler les revendications des populations arabes et berbères lors des manifestations fêtant la Libération. Dans le port d’Alger, ce 8 mai 1945, les premiers tirailleurs algériens débarquaient du croiseur “ Gloire ”;  la foule algéroise dans sa diversité se pressait dans la rue pour les acclamer. Cependant, à Alger comme dans plusieurs villes, en plus des drapeaux français et alliés, des emblèmes algériens sortaient de la foule se rendant vers les monuments aux morts.

Sétif et Guelma allaient vivre un « autre 8 mai 1945 » A Sétif, la manifestation avait été autorisée à condition qu’elle n’ait pas un caractère politique,

qu’aucun drapeau autre que celui de la France ne soit déployé, qu’aucune arme, bâton ou couteau ne soit entre les mains des manifestants et que tout slogan anti-français soit interdit. Vers 8 heures le matin, une manifestation qui aurait rassemblé environ 7 000 à 8 000 personnes se mit en route. Un hymne nationaliste était chanté, quelques pancartes demandaient la libération de Messali Hadj, d’autres disaient clairement : « A bas le colonialisme ! ». La majorité des historiens s’accorde pour dire qu’à son départ, elle n’avait pas un caractère violent. Une équipe de scouts musulmans ouvrait la marche vers le monument aux morts de Sétif, avec des gerbes de fleurs. L’un d’eux avait brandi le drapeau du PPA, le même que le drapeau actuel de l’Algérie. La manifestation arrivait dans le quartier des Européens quand soudain le commissaire de police tenta de s’emparer de ce drapeau ; dans la bousculade, il fut jeté à terre. Un jeune scout de 26 ans reprit et déploya ce drapeau symbolique, un policier français l’abattit sur le champ. Entre manifestants, forces de police et, certains l’ont affirmé, civils européens, les coups de feu claquaient. Sous les tirs, la foule des manifestants se dispersa, mais dans les heures qui suivirent des groupes s’en prirent aux habitants des quartiers européens. Le maire socialiste qui tentait de s’interposer fut abattu comme 26 autres Européens et 47 blessés (souvent gravement). Du côté des familles arabes, les chiffres demeureront évidemment moins précis, on pleurait également des dizaines de morts et de blessés. A 13 heures, le couvre-feu était instauré puis à 20 heures, l’état de siège. L’armée intervenait pour escorter les forces de police et de gendarmerie et occuper les quartiers arabes. FÉVRier 2012 - N°780 - LE RÉVEIL

Sur les massacres de Sétif, Guelma, Kherrata,

ils ont écrit : • Kateb Yacine, écrivain, témoin : « Les automitrailleuses, les automitrailleuses, les automitrailleuses, y en a qui tombent et d'autres qui courent parmi les arbres, y a pas de montagne, pas de stratégie, on aurait pu couper les fils téléphoniques, mais ils ont la radio et des armes américaines toutes neuves. Les gendarmes ont sorti leur side-car, je ne vois plus rien autour de moi. » Nedjma (1956), Éditions Le Point • Mehana Hamrani « Entendue la cause des victimes algériennes du 8 mai 1945 ? Elle ne l’était point pour le discours français de 1945, et même des années après, qui se servait du mot massacre pour désigner exclusivement les victimes européennes. Quant aux victimes algériennes, elles n’étaient, quand il fallait en parler, que réprimées. » Le 8 mai 1945. Les discours français sur les massacres de Sétif, Kherrata et Guelma, L’Harmattan (2010) • Albert Camus « Il faut… qu’on applique au peuple arabe les principes démocratiques que nous réclamons pour nous-mêmes… » « Le peuple arabe existe, il n’est pas inférieur sinon par les conditions où il se trouve. » « C’est la force infinie de la justice, et elle seule, qui doit nous aider à reconquérir l’Algérie et ses habitants. » Combat du 13 au 23 mai 1945 • Alain Ruscio, citant l’Humanité du 19 mai 2011 Les passages entre parenthèses correspondent aux lignes supprimées par la censure d’État, l’ensemble a pu être retrouvé par ce chercheur sur un tract (archives du PCF).

« Le communiqué du 15 mai du ministère de l’Intérieur relatait une centaine de morts au cours des tragiques événements qui ensanglantent les régions de Sétif et Guelma. Malheureusement, ce

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LE RÉVEIL dossier chiffre est très loin de correspondre à la réalité. (On compte effectivement une centaine de morts européens ; mais un officier d’état-major a estimé à plus de six mille les victimes musulmanes de la plus bestiale répression qu’ait connue l’Algérie.) Sur une distance de cent cinquante kilomètres, de Sétif à la mer, la loi martiale est proclamée, (les tribunaux d’exception fonctionnent sans arrêt). Les musulmans des campagnes qui n’ont pas pris la moindre part aux agissements d’une poignée de tueurs à gages dont les chefs sont connus comme mouchards de Berque, directeur des Affaires musulmanes, sont pourchassés (comme des bêtes - faire feu sur le burnous, tel est le mot d’ordre officiel). La légion étrangère, les tirailleurs sénégalais et marocains, l’artillerie, la marine, l’aviation, mènent une vaste opération de représailles, (semant dans les villages la terreur et la dévastation ; cependant que les civils européens - dont tous les vichystes - sont armés, ont le droit de tirer à leur gré sur tout musulman qu’ils rencontrent). »

Ces évènements furent connus rapidement dans l’Algérie. Des émeutes éclatèrent en petite Kabylie, dans l’Algérois et dans l’Oranais, elles s’amplifièrent surtout dans une partie du Constantinois. Le soir à Guelma, une manifestation se forma, or le sous-préfet local (pourtant ancien résistant) ordonna de tirer sur les manifestants algériens : un homme fut abattu, six autres furent blessés. Aux alentours de Sétif et plusieurs points de cette région, une colère s’abattit avec violence contre la population européenne, ces déchaînements causeront dans les jours qui suivirent 102 morts, des femmes violées, plus d’une centaine de civils blessés et mutilés dans des actes d’une extrême violence (le secrétaire du Parti communiste de Sétif aura les deux mains tranchées) .

Les communistes et les massacres du Constantinois (mai-juin 1945), Alain Ruscio, Vingtième Siècle. Revue d'histoire 2/2007 (no 94), p. 217-229.

Une terrible répression allait s’abattre

www.cairn.info/revue-vingtieme-siecle-revued-histoire-2007-2-page-217.htm

• Charles de Gaulle, une seule phrase dans ses Mémoires « En Algérie, un commencement d'insurrection survenu dans le Constantinois et synchronisé avec les émeutes syriennes du mois de mai a été étouffé par le gouverneur général Chataigneau. » • Houari Boumediene « Ce jour-là, j’ai vieilli prématurément. L’adolescent que j’étais est devenu un homme. Ce jour-là, le monde a basculé. Même les ancêtres ont bougé sous terre. Et les enfants ont compris qu'il faudrait se battre les armes à la main pour devenir des hommes libres. Personne ne peut oublier ce jour-là. » Cité par Wikipedia : Massacres de Sétif et Guelma

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A la demande de l’administration coloniale, le 11 mai, le général de Gaulle, chef du gouvernement provisoire ordonnait l’intervention des forces militaires. En plus de la Légion étrangère (2 000 hommes) vinrent s’ajouter les troupes coloniales : tirailleurs sénégalais et aussi algériens, tabors marocains, spahis tunisiens… Commandées par le général Duval, de vastes opérations de représailles s’abattirent contre l’ensemble de la population algérienne appelée “ musulmane ” et plus particulièrement dans les villages qui semblaient suspects : mechtas incendiées, tirs à la mitrailleuse sur les populations, tortures, femmes violées par des légionnaires. Avec le concours de l’administration locale, des milices de colons européens avec souvent des anciens pétainistes se constituèrent. Ils ne tardèrent pas à utiliser leurs propres armes puis celles que leur distribua l’armée, LE RÉVEIL - N°780 - FÉvRier 2012

des exécutions sommaires s’en suivirent. L’armée de l’Air et la Marine nationale intervinrent à leur tour : 18 avions de l’armée de l’Air rasèrent les villages, mitraillant ou bombardant les populations jusque dans les montagnes où elles tentaient de se réfugier. De la baie de Bougie, le croiseur Duguay-Trouin et le contre-torpilleur Le Triomphant tireront des centaines de coups de canon sur les régions côtières et les douars de la montagne kabyle. Des suspects faits prisonniers, parfois avec femmes et enfants, seront fusillés sur le champ. Les corps des victimes seront parfois enfouies dans des puits ou des fours à chaux, brûlés en place publique (Kef ElBoumba) ou jetés dans des gorges comme à Kherrata. Une justice expéditive se mit en place. Les dirigeants politiques algériens nationalistes ou musulmans furent arrêtés et condamnés à de lourdes peines de prison. Sous la pression, une partie d’entre eux sera cependant libérée au fil des années, mais d’autres y resteront jusqu’en 1962. Après environ six semaine de « chasse aux Arabes », l’armée et l’administration organiseront des cérémonies de soumission. Les hommes devaient se prosterner devant le drapeau français, parfois proclamer leur haine contre les leaders algériens tel Ferhat Abbas.

Quel sera le bilan de cette furie meurtrière ? Le nombre de victimes fait toujours aujourd’hui débat. Dans le climat de terreur que nous venons d’évoquer, les familles cachaient plutôt leurs morts. Le 18 juillet (seulement) le ministre de l’Intérieur Tixier indiquera un bilan de cette répression : 1 165 tués parmi les musulmans (14 dans les troupes françaises) et 99 condamnations à mort ; ces chiffres seront


dossier LE RÉVEIL toujours contestés. Le consul des États-Unis à Alger estimera à 40 000 le nombre des victimes, base que reprendront le PPA puis le FLN pour citer 45 000 morts. Les chercheurs partent d’une fourchette dont le seuil le plus bas serait de 8 000 victimes « au minimum ». Les témoins ont parlé aussi des drames vécus par les « rescapés » : les blessures physiques, les traumatismes, la maladie, la faim. Même en métropole, beaucoup des familles souffraient toujours en 1945 de graves pénuries alimentaires. Les épidémies, la famine qui sévissaient alors dans l’Algérie frapperont dans la région de Sétif des milliers de familles. Elles seront traquées, dans la misère, ayant perdu leur toit, leur petite exploitation agricole, leur travail. Beaucoup ne pourront plus par peur (ou ne voudront plus) demander un quelconque secours à la France coloniale.

Les réactions et les silences dans cette France de 1945 Dans toute la France, des centaines de milliers de familles pleuraient leurs morts. Des régions entières venaient d’être bombardées, les prisonniers de guerre et les déportés revenaient. Pour pouvoir manger, il fallait des cartes de ravitaillement. La vie politique, la dénonciation des collabos… tout cela occupait les esprits. Les journaux étaient soumis à une véritable censure officielle. Mais tout ce climat ne peut excuser aujourd’hui le silence de la grande majorité des hommes politiques français et de la presse, celle-ci n’informera souvent ses lecteurs que dans un court entrefilet et sur les « massacres d’Européens ». Dans tout ce qui a été écrit depuis ces années, deux principales exceptions sont fréquemment relevées dans la presse française de métropole : Combat avec les arti-

cles d’Albert Camus et l’Humanité (le journal communiste avait un très grand nombre de lecteurs). Dans les semaines, voire les jours qui suivirent, il est intéressant de noter leurs changements d’analyse (comme pour Alger Républicain). Vraisemblablement, les informations relevées par des témoins locaux contrecarraient les communiqués officiels transmis à Paris par les responsables militaires et politiques… comme celles du gouverneur général Chataigneau (pourtant homme de gauche, SFIO). Dans les premiers jours l’opinion d’Albert Camus dans Combat sera très nuancée, mais par la suite il écrira de plus en plus courageusement sur la condition des populations musulmanes et leurs droits dont celui de gérer leur pays. L’Humanité ne verra d’abord (cela a été souvent relevé ) que « des troubles d’inspiration hitlérienne ». Dans les exemplaires qui suivirent, une dénonciation claire de cette répression apparaît régulièrement malgré les nombreuses lignes interdites par la censure. « Donner du pain et non des bombes ! » Avec le recul, cette année 1945 est significative des diverses attitudes face au colonialisme. En caricaturant à peine, un propos résumait une opinion qui tiendra jusque dans les années 60 : « Ces gars-là, il faut les mener à coups de bâton ! » A l’opposé, tout un courant progressiste défendra, et c’était important, les conditions de vie des peuples colonisés et leur dignité bafouée. Le mouvement qui montait pour l’autonomie voire l’indépendance sera lui, plus difficilement perçu.

Les conséquences seront lourdes Par-delà Sétif, face au refus de solution politique, une idée montera dans les peuples colonisés : « Pour s’en sortir, il faut prendre les armes ! ». La France repartira ainsi dans des années de guerres coloniales : la guerre d’Indochine commencera un an plus tard, des révoltes à Madagascar (1947) et dans d’autres pays d’Afrique seront noyées dans le sang. Le Maroc, la Tunisie se battront pour obtenir leur indépendance. Après les massacres de la région de Sétif, le général Duval avait déclaré au pouvoir français en Algérie : « Je vous donne la paix pour dix ans, à vous de vous en servir pour réconcilier les deux communautés. Une politique constructive est nécessaire pour rétablir la paix et la confiance ». Neuf ans plus tard, le 1er novembre 1954, le FLN prenait les armes pour l’indépendance. Bouzid Saâl, sur une fresque en mosaïque à Sétif. Première victime de la tragédie du 8 mai 1945, ce jeune de 26 ans qui tenait un drapeau algérien, fut abattu par un policier.

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Sétif : le passé, le présent Par Jean-Michel Parizot L’histoire de l’Algérie est très riche et commence, pour sa partie récente, à l’arrivée des Romains et aux conflits avec les royaumes locaux. Pour le peuple algérien, cette année 2012 verra le cinquantième anniversaire de l’indépendance du pays. On a coutume de faire démarrer le 1er novembre 1954 avec les événements tragiques qui ont précédé cette indépendance. En fait, d’autres tragédies ont ponctué, avant, l’histoire algérienne. Sétif et le 8 mai 1945 en font partie. Une actualité cinématographique récente a ravivé le souvenir de cet événement en France. En revanche, ce souvenir est toujours resté vivace en Algérie et tout spécialement dans l’Est algérien. Le jumelage entre Rennes et Sétif fait que, citoyens rennais, nous ne pouvons pas ignorer ce qui se passa à Sétif en mai 1945 (ainsi qu’à Guelma et Kherrata) et tous les ans un hommage est rendu à Rennes aux victimes.

Mais qu’en est-il de Sétif ? J’ai personnellement découvert l’Algérie en 1967 alors que, jeune coopérant militaire, j’enseignais à Constantine. A l’époque, Sétif était une ville poussiéreuse que l’on traversait en allant à Alger. Depuis elle s’est développée et constitue une des très grandes cités algériennes, avec de grandes artères. Elle est devenue une ville plaisante et animée où je reviens avec plaisir, assuré d’un accueil chaleureux. Sans doute, les Sétifiens y retrouvent-ils tous les problèmes des grandes villes mais, pour ma part, je n’y ressens pas la tension de certaines autres métropoles. 18 -

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Jean-Michel Parizot est président de l’Association Rennes-Sétif

La ville est fière de se retrouver derrière son équipe de football, l’ESS et les jours de match ponctuent la vie sétifienne. En cas de victoire, les supporters se retrouvent devant la célèbre fontaine d’Aïn El Fouara datant de 1898. Sa particularité : être surmontée d’une statue sans doute unique en son genre - une femme dévêtue - léguée par le régime colonial (sculpteur Francis de Saint-Vidal -1898), mais adoptée sans réserve par les habitants. Plus sérieusement, au mois de mai débute une série de manifestations commémoratives du 8 Mai 1945 avec une forte composante culturelle. La cérémonie la plus significative est le défilé du 8 mai

avec la participation des scouts musulmans, déjà présents dans cette tragédie. Ce défilé s’achève devant la stèle de Saal Bouzid, première victime des événements de 1945. En 2012, ce sera également le trentième anniversaire du jumelage entre Rennes et Sétif. Cela permettra de relancer les échanges entre les deux cités avec peutêtre la venue d'une délégation de la Mairie de Sétif. Il faut signaler que Rennes a déjà reçu en 2011 une autre délégation : celle d'une vingtaine de collégiens et d'enseignants d'un établissement de cette ville. Nous espérons d'autres échanges.

Square de Sétif

Pour rappeler la mémoire, la solidarité et la paix A Rennes, chaque après-midi du 8 mai, l’Association de solidarité algérienne locale et l’Association Rennes-Sétif organisent un rassemblement Square de Sétif, pour rappeler la mémoire de « cet autre 8 mai 1945 » et rendre hommage aux victimes. L’Action culturelle des Berbères de Bretagne, l’ARAC, le MRAP, le Mouvement de la Paix, la Ligue des droits de l’homme entre autres, invitent également les Rennais dans leur diversité à participer. Des représentants du consulat algérien de Nantes y participent fréquemment, ainsi qu’à titre personnel des élu(e)s du Conseil général d’Ille-et-Vilaine et du Conseil municipal de Rennes. Avec le soutien de la FOPAC, de l’ANCAC, de l’ANACR, l’ARAC d’Ille-et-Vilaine participe chaque année avec son drapeau et l’un de ses représentants intervient pour rendre hommage aux victimes de ce massacre et celles qui tomberont plus tard dans cette guerre d’Algérie. Nos amis anciens combattants sont aussi heureux de participer ensuite aux conférences organisées par l’ASA, l’aprèsmidi. Les échanges se terminent dans l’amitié avec le dessert et le thé offert par les familles rennaises venues de l’Algérie. Publié sur www.setif.info/article3350.html


dossier LE RÉVEIL

Chaque année à Sétif, le 8 mai 1945 est célébré.

Les habitants de Sétif avec des voyageurs lors du circuit « Le temps de la fraternité » organisé en mai 2011 par l’hebdomadaire La Vie. Comme le père Louis Mazurier, à droite sur la photo, qui fut un ancien combattant appelé, le passé et l’Algérie d’aujourd’hui sont à redécouvrir.

Un monument de Sétif, la Fontaine d’Aïn El Fouara (1898) et sa statue. Tout un symbole : l'eau et la vie ont traversé les années et les drames. FÉVRier 2012 - N°780 - LE RÉVEIL

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LE RÉVEIL dossier

Sétif, mai 1945 : j’avais 8 ans L’écrivain Bachir Hadjadj a obtenu en 2007 le prix Séligmann, « contre le racisme, l’injustice et l’intolérance » et le 37e prix ADELF (Association des écrivains de langue française) pour l’Afrique - Méditerranée - Maghreb. Pour les lectrices et lecteurs du Réveil, nous partageons un extrait de son ouvrage (1) afin, comme il l’écrit, « que la somme d’histoires individuelles permette d’approcher la grande histoire. » «… Les écoles aussi avaient été réquisitionnées, et donc, comme les autres enfants, je n’allais plus en classe. C’est ainsi que j’ai pu assister, aux premières loges, aux tragiques événements de mai 1945. J’avais huit ans. Le 8 mai, des manifestations avaient été préparées pour fêter la signature de l’armistice qui mettait fin à la Seconde Guerre mondiale. Le mouvement nationaliste organisa son propre défilé sous ses propres mots d’ordre : sa démonstration tourna à l’émeute, puis à l’insurrection. Une trentaine d’Européens furent abattus, à Sétif et dans les localités alentour, ce à quoi l’armée française ne tarda pas à répliquer (note de l’auteur : Au motif de rébellion, la répression coloniale fit des dizaines de milliers de victimes civiles) : la rumeur disait qu’elle fusillait tous les Arabes qu’elle trouvait au centre-ville et que le sang arrivait « jusqu’aux genoux ». Avec mes frères, j’étais cependant plutôt agité et curieux de savoir ce qui se passait : pour nous empêcher d’aller dans la rue, M’ma et Fatima, en l’absence de mon père, durent fermer à double tour la porte principale. Mais elles ne cédèrent pas à la panique. Je me souviens que notre voisine, Mme Schmidt, une femme de chemi20 -

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not qui se trouvait seule chez elle, vint se réfugier chez nous : une fois que cette imposante blonde eut troqué sa robe d’été à fleurs contre une robe kabyle, M’ma la rassura en lui expliquant que les éventuels émeutiers n’oseraient jamais pénétrer dans une maison où il y avait des femmes arabes. Elles plaisantèrent et rirent ensemble. Elles ne tardèrent cependant pas à s’inquiéter, ma mère pour mes grands frères, Rochdi et Samaï, tous deux membres des Kechafa (scouts musulmans) qui devaient participer aux manifestations prévues et qui ne rentraient pas, Mme Schmidt pour son mari et pour son fils qui travaillaient en ville et qui ne donnaient pas plus signe de vie. L’angoisse dura plusieurs jours. Le couvre-feu avait été instauré, de jour comme de nuit. Les avions survolaient à basse altitude les quartiers arabes de Sétif et tous les petits villages aux alentours : leur bruit assourdissant en rase motte au-dessus des toits me terrifiait. Des patrouilles militaires, accompagnés de civils européens, peut-être des inspecteurs de police ou bien des membres de la milice européenne, procédèrent à la fouille des maisons arabes, à la recherche d’armes et de suspect. Mes mères suivaient leur progression aux coups de feu iso-

1- Les voleurs de rêves - Cent cinquante ans d’histoire d’une famille algérienne . Bachir Hadjadj, préface de Jean Lacouture, Éditions Albin Michel, 2007, 22 e

lés ou aux rafales de mitraillette qu’elles entendaient, se griffant le visage ou se frappant la poitrine à chaque détonation ; elles avaient des parents et des amis dans ces quartiers-là, elles avaient peur pour eux. Enfin, au bout de presque une semaine, mes frères réapparurent, ainsi que le mari et le fils de Mme Schmidt qui put, toute souriante et soulagée, retourner chez elle sous les « Mabrouk » de ma mère (note de l’auteur : Mabrouk, celui qui a la baraka. Ici il signifierait plutôt : « Dieu soit loué ! »). Dans les jours qui suivirent, elle nous rendait visite ostensiblement, certainement pour faire passer le message aux patrouilles militaires qui continuaient à fouiller les maisons que c’était une maison « amie ». Brave Mme Schmidt, c’était sa façon de vouloir nous protéger… Échange de bons procédés, en somme... »


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Pologne

A l’heure de la désespérance sociale Leader de la très libérale et pro-européenne Plate-Forme civique (PO), vainqueur de l’élection législative 1, Donald Tusk a été reconduit dans ses fonctions de Premier Ministre. Il promet une cure d’austérité à un pays qui, avec son près de 4 % de croissance en 2010, faisait figure de bon élève de l’Union européenne ! 51,13 % d’abstention ! Pour Bruno Drweski, maître de conférences à l’Institut national des langues et civilisations orientales de Paris, spécialiste de la Pologne, c’est le fait marquant de la récente élection législative, qui interpelle d’autant plus que « le taux d’abstention augmente à chaque élection ». Comme si les citoyens polonais manifestaient ainsi une certaine défiance à l’égard des partis politiques dans lesquels ils ne se retrouvent pas. « Ici, plus qu’ailleurs, ne pas aller voter est un acte politique. C’est une tradition qui remonte à l’entre-deux-guerres, à l’époque des Colonels », observe-t-il. Une façon aussi peutêtre de manifester sa nostalgie de la Pologne populaire ? « Sans doute aussi dans la mesure où cet électorat n’a pas d’organisation pour qui voter. » Le Parti communiste polonais reste à l’état de « groupuscule ». Quant à l’Alliance de la gauche démocratique (SLD), héritière directe du Parti ouvrier unifié polonais (POUP) au pouvoir jusqu’en 1989, un temps minée par la corruption de ses dirigeants, elle « se réclame aujourd’hui d’une social-démocratie qui s’apparente plutôt à du sociallibéralisme. A leurs yeux, Blair est un dangereux gauchiste ».

Nostalgie d’un état protecteur ? Même le très conservateur et anti-européen Parti droit et justice (PIS) de Jaroslaw Kaczynski surfe sur la vague de la nostalgie de la Pologne populaire. Dans un pays où, selon des rapports officiels, un tiers de la population vit dans la pauvreté et des milliers d’enfants sont sous-alimentés, le PIS s’y emploie d’une façon « bien entendu hypocrite mais intelligente ». Anticommuniste par essence, il s’appuie sur la force relative de l’Église pour faire passer son message. Ces personnes âgées qui cherchent

dans les poubelles de quoi se nourrir, ces salariés travaillant parfois sept jours sur sept mais souvent privés d’assurance santé ou de congés payés, ces milliers de laissés-pourcompte de la restauration capitaliste peuvent être séduits par un discours qui « se veut largement plus social que celui du PO, son rival libéral au pouvoir. Celui-ci est dans une logique de culpabilisation des pauvres en leur assénant que s’ils ne réussissent pas, ce n’est pas la faute du système, mais bien la leur parce qu’ils ne travaillent pas assez ! » Un discours culpabilisateur qui sert au final une logique de casse des acquis sociaux déjà en partie broyée par la thérapie de choc imposée, dès 1990, par les amis de Lech Walesa passés d’un idéal autogestionnaire au libéralisme le plus échevelé.

Logique de culpabilisation Aujourd’hui, les dirigeants « expliquent qu’il s’agit de donner un ultime coup de

collier pour que la Pologne parvienne au niveau des pays les plus développés d’Europe. L’exercice de la présidence de l’Union européenne et l’organisation du championnat d’Europe de football en 2012 sont la preuve pour les libéraux que la Pologne va dans la bonne direction et qu’elle est reconnue par l’extérieur ». Pour Bruno Drweski, le « mythe de la réussite exemplaire est appelé à se fissurer dans la mesure où nous avons affaire à une croissance factice qui s’appuie sur des investissements à court terme. Et aussi parce que le pays va être rattrapé par la crise. C’est d’une réindustrialisation dont aurait besoin la Pologne ». Un pays qui a aussi massivement recouru à l’émigration vers la Grande-Bretagne et l’Irlande à partir de 2004. Indéniablement, ces départs ont fait chuter le taux de chômage. L’émigration a agi comme une soupape de sûreté pour éviter l’explosion sociale. Dans un pays où, en vingt ans, les inégalités se sont creusées de façon abyssale, le nouveau tour de vis voulu par le gouvernement aurat-il l’effet inverse ? Jacques Kmieciak Liberté, du 9 au 15 décembre 2011 (1) Le 9 octobre dernier, avec 39 % des voix, le PO a devancé le PIS (Droit et Justice) de Jaroslaw Kaczynski (29 %), le Mouvement Palikot (10 %), le Parti paysan polonais (8 %) et l’Alliance de la gauche démocratique (8 %).

Piotr Ikonowicz et le fléau des expulsions Journaliste de 55 ans, Piotr Ikonowicz a été député à la Diète de 1993 à 2001. Il se revendique d’une gauche marxisante. A ce titre, cet ancien partisan de Solidarnosc milite « en faveur de la défense des services publics et auprès des couches sociales marginalisées ». Aujourd’hui, Piotr Ikonowicz est particulièrement actif dans un mouvement de défense des locataires menacés d’expulsion. « Pour le moment, l’unique mouvement social dynamique, c’est le mouvement des locataires », observe cet ancien candidat à la Présidentielle. Et pour cause ! Un million de familles seraient concernées par ce fléau. Bon nombre habitent dans des appartements d’an-

ciennes usines d’Etat, aujourd’hui privatisées. « Ils sont chômeurs ou travaillent dans des conditions précaires. Ils sont tenus de payer un loyer au prix du marché. Économiquement, c’est impossible… La Pologne vit une crise sociale très profonde », s’émeut-il. Aussi Piotr œuvre à l’unification des mouvements de contestation qui se situe dans le giron d’une gauche radicalement sociale. « Notre objectif est de réussir un mouvement très vaste avec beaucoup d’associations. Quand cette organisation sera stabilisée et consolidée, nous nous présenterons aux élections » annonciatrices peut-être alors de lendemains qui rechanteraient enfin ?

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Budget 2012

Rejet des sept amendements votés par le Sénat ! Comme il fallait hélas s’y attendre, la majorité gouvernementale a rejeté, fin décembre dernier, en 2e lecture, les sept amendements adoptés par la nouvelle majorité de gauche au Sénat, le 24 novembre 2011. Le budget 2012 restera donc conforme à la rigueur voulue et imposée par le Président Sarkozy, ses relais gouvernementaux et sa députation. Ceci étant, cet épisode montre ce que pourrait être, en cette année 2012, une autre politique au service de la France et de ses ACVG… avec un autre Président de la République, un autre gouvernement et une majorité à l’Assemblée nationale semblable à celle de l’actuel Sénat. Nous publions ci-dessous le courrier que nous a adressé Cécile Cukierman, sénatrice communiste, suite aux débats

budgétaires. Qu’elle en soit ici bien vivement remerciée. « Madame, Monsieur, Suite à la deuxième lecture de la loi de finance ce mardi 20 décembre au Sénat, je me permets de m’adresser à vous pour vous faire état de l’évolution de la mission Anciens combattants, mémoire et lien avec la nation. Au Sénat, j’ai porté la défense des revendications des anciens combattants et victimes de guerre, convaincue qu’elles sont justes et légitimes. Dans ce sens, j’ai défendu au nom de mon groupe et voté sept amendements en 1re lecture au Sénat le 24 novembre dernier. Je regrette que l’Assemblée nationale n’en ait nullement tenu compte. La majorité à

l’Assemblée nationale est restée sourde aux propositions faites par la majorité sénatoriale. Des propositions qui, loin d’être ambitieuses, sont indispensables pour relever les revenus bien faibles à ce jour des anciens combattants et victimes de guerre. Au nom de la rigueur et de la crise, les anciens combattants et victimes de guerre subissent les coupes franches budgétaires voulues par le gouvernement et soutenues par la majorité à l’Assemblée nationale. Pourtant, le débat budgétaire au Sénat l’a montré, il y a d’autres recettes possibles pour notre pays, des recettes basées sur la justice sociale qui permettrait une meilleure redistribution des richesses dans notre pays au service des anciens combattants et victimes de guerre entre autres. Sachez que je reste à votre disposition sur ce dossier comme sur d’autres. Recevez l’expression de mes sentiments les meilleurs. Cécile Cukierman. »

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ONAC

ONAC

La CGT, libre… Vers une discrimination de se taire ! de travailleurs handicapés ? Dans une lettre adressée à tous les présidents d’associations d’ACVG et aux administrateurs sortants de l’ONAC, la CGT exprime ses craintes que la politique de mise en œuvre en matière de « projet institutionnel commun » aux maisons de retraite de l’ONAC… ne nuisent aux deux parties et débouchent, notamment, sur une « discrimination des travailleurs handicapés ». Ce courrier, accompagné de l’intervention que n’avait pu prononcer Danielle Bernal, secrétaire générale CGT-ONAC, lors du conseil d’administration ONAC du 26 octobre 2011, s’alarme de « la volonté de l’ONAC de renforcer le rôle médicopsycho-social des écoles de réinsertion professionnelle (ERP) de l’ONAC ». La CGT rappelle que 18 réunions (rassemblant plus de 700 participants) ont conclu à la volonté des personnels de maintenir pour les travailleurs handicapés une formation diplômante (en priorité sur les autres formations) et la volonté d’accueillir tous les publics orientés par les maisons départementales pour personnes handicapées (MDPH). Or, la CGT constate que l’ONAC, refusant de prendre en compte cette volonté, entend imposer un projet institutionnel commun aux ERP et aux maisons de retraite. A partir d’une base de renforcement du rôle médico-psycho-social, les ERP seraient appelées à sélectionner un public les amenant à rejoindre les maisons de retraite dans un ensemble commun consacré au même milieu de vie de la dépendance. Or, souligne avec force la CGT, l’accès à la formation diplômante est la garantie réelle d’une véritable égalité des chances, garante de l’emploi, garante de non discrimination des travailleurs handicapés. Ce dont ont besoin les travailleurs handicapés, ce n’est pas de se voir ouvrir les portes de lieux de solidarité aux plus dépendants. C’est de formation profes-

sionnelle diplômante, c’est de l’accès à l’emploi, c’est de la solidarité de tous à l’ensemble des travailleurs handicapés. La CGT en appelle donc à la responsabilité morale de chacun envers les travailleurs handicapés et au refus du plan ONAC qui aboutirait à fermer la porte des ERP aux accidentés de la vie et… également aux militaires. Pour conclure, en réaffirmant son opposition à la RGPP (et aux contrats d’objectifs et de moyens), la CGT maintient son opposition à la Fondation (prévue par l’ONAC) qui serait nuisible aux intérêts des personnes âgées, à la reconversion professionnelle des travailleurs handicapés et au service public.

Dans le cadre de la modification du conseil d’administration de l’ONAC, réduit à 40 membres au lieu de 70, à compter de février 2012, la CGT a été priée de se taire. Comment faire pour que la CGT, première centrale reconnue officiellement par les élections syndicales nationales, ne vienne pas « faire de vagues » dans la nouvelle formation promise aux « Contrats d’objectifs performants » ? Élémentaire, mon cher Watson ! Parmi les syndicats représentatifs à l’ONAC, la CGT figurant en 3e position… rien de plus facile que de décider que seuls les deux premiers siégeront au conseil d’administration de l’ONAC… Et, « passez muscade », le tour est joué. Certes, l’ARAC a protesté - la seule association d’ACVG ? - et le pouvoir a fait un pas : la CGT pourra assister au CA de l’ONAC, en quelque sorte en « auditrice libre »… Libre de se taire, oui. Cela la réduira-t-elle au silence pour autant ? N’y comptez pas trop ; « O, Ministres intègres, Conseillers vertueux », car cette voix ne s’est jamais laissée bâillonner, en aucun cas. Les personnels savent lire et vos oreilles n’ont pas fini de siffler. Le Per’Siffleur

Dernière minute Renouvellement du CA de l’ONAC Un arrêté du 27 janvier 2012 a renouvelé pour quatre ans la composition (réduite) du Conseil d’administration de l’ONAC. Parmi les 39 membres désignés par le secrétaire d’État aux Anciens Combattants figure André Fillère au titre d’ancien combattant de la guerre d’Algérie. Ce qui, par rapport au conseil précédent, réduit de moitié le nombre des membres de l’ARAC siégeant à cette instance. Autre absence à souligner, celle de la CGT/ONAC alors que figurent FO et la CFDT. Nous y reviendrons dans le prochain Réveil.

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Le label Bleuet de France pour douze maisons de retraite La Commission nationale de l’ONAC chargée de l’attribution du label Bleuet de France à des maisons de retraite s’est réunie le 14 décembre 2011 pour examiner les dossiers de demandes reçues. Au terme de ses travaux, auxquels André Fillère participait, elle a retenu douze établissements qui pourront donc se réclamer du label en question. Rappelons que celui-ci est décerné en fonction du respect de la signature d’une charte, laquelle prend en compte les qualités de vie, d’hébergement, de nourriture, d’hygiène et de sécurité classiques... auxquelles s’ajoutent des conditions spécifiques aux anciens combattants et victimes de guerre : réservations de lits, animations mémoire, partenariat avec les associations d’ACVG, accueils d’expositions, cérémonies, etc. Cet accord de labellisation n’est réalisé qu’après l’avis favorable donné par la direction du service départemental de

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l’ONAC concerné et de son conseil départemental.

les (Meurthe-et-Moselle), 4 rue de la Gare, 54170. • Korian-l’Esconda, Thonon-les-Bains Les douze établissements retenus (Haute-Savoie), 8 avenue de Thuyset, • Villa Sainte-Marie, Aurillac (Cantal), route d’Evian, 74200. 23 rue du Général-Destaing, 15000. • La Doyenne - Les Myrtilles, Passy• Les Prés Verts, Reilhac (Cantal), 2 rue Chedde (Haute-Savoie), 55 chemin Henri-Mondor, 15250. des Écureuils, 74190. • La Sumène, Ydes (Cantal), 1 rue de la • Florentine Carnoy, Warloy-Baillon, 15 Mine, 15210. rue du Général-Leclerc, 20300. • Les Résidentiels, Tonnay-Charente Ce sont donc 85 établissements répartis (Charente Maritime), 3 bis rue du Co- dans 45 départements qui vont porter le label du Bleuet de France, à l’image de la teau, 17430. • Villa Rediciano, Redessau (Gard), 6 résidence Clair Logis à Sinceny (Aisne) où vient d’être faite cette inauguration rue du 19 Mars 1962, 17430. • Cos Villa Pia, Bordeaux (Gironde), 52 en présence, notamment, de MM. JeanLuc Lanouil (vice-président du Conseil rue des Treuils, 33082. • Belle Croix, Floirac (Gironde), avenue général), Odelot (directeur du service départemental de l’ONAC) et de notre Pierre-Mendès-France, 33270. • La Clairière des Bernardins, Torigni- camarade Antoine Crestani, président sur-Vire (Manche), 5 rue des Bernar- de l’ARAC de l’Aisne, membre du Bureau national de l’ARAC et secrétaire dins, 50180. • Les grands Jardins, Colombey-les-Bel- général adjoint de sa mutuelle.


vie de l’arac LE RÉVEIL

Un lecteur nous écrit

19 Mars

Proposition de loi socialiste au Sénat Maigre l’initiative d’Alain Néri, le groupe socialiste au Sénat a déposé une récompense… Aproposition de loi visant à faire du 19 mars de chaque année, la jourSuite à l’article du Réveil sur l’évolution de la retraite du combattant, je viens de la recevoir et j’ai mis le nez dans mes comptes. Je vous les livre… Selon le gouvernement, la retraite du combattant n’est pas un droit à réparation mais… une « récompense » ! Et celle-ci honorerait largement les anciens combattants que nous sommes. Pensez + 36,15 % entre 2007 et 2011. C’est Byzance ! Voire… En novembre 2007, ma retraite du combattant s’élevait à 499,26 e par an. En novembre 2011, elle est de 609,40 e. Soit, plus 110,14 e en 5 ans, c'est-à-dire + 22,028 e par an, 1,835 e par mois. Le rêve quoi… Alors, qu’ai-je pu acheter de plus, avec ce pactole, en 2011 ? En novembre 2007, nous allions, avec ma femme, cinq fois par mois garnir notre caddie dans une grande surface du coin. Moyenne sur 5 achats : 132,84 e. En novembre 2011, nous n’y allons déjà plus que 4 fois par mois, finances obligent. Donc nous nous privions déjà. Par ailleurs, chaque caddie nous coûte désormais en moyenne 244,78 e. Soit un surcroît de dépenses de 112,14 e par mois en moyenne, + 45,81 %. A volume, quantité et qualité égales, le constat est clair : le compte n’y est pas ! D’où l’exigence des ACVG de rattraper au moins le retard pris par les pensions d’invalidité, les rentes mutualistes et la retraite du combattant, soit 43 % détournés du fait des agissements des gouvernements ! Comment ne pas aspirer à des changements fondamentaux en 2012, dans ces conditions ? Et surtout y travailler… Alfred Le Borgne (91)

née officielle de souvenir et d’hommage pour toutes les victimes de la guerre d’Algérie. Après l’exposé des motifs, cette proposition se décline en 2 articles : • Article 1er La République française institue une journée nationale de recueillement et de mémoire en souvenir de toutes les victimes de la guerre d’Algérie, des combats en Tunisie et au Maroc et de tous les drames.

• Article 2e Cette journée, ni fériée, ni chômée, est fixée au 19 mars.

Le groupe socialiste espère fermement faire voter cette proposition de loi par le Sénat avant le 19 mars 2012. Resterait alors à la faire ratifier par l’Assemblée nationale. Là comme ailleurs, il faudra que le changement s’impose. Aux ACVG et à tous ceux pour qui histoire et mémoire sont indissociables de vérité et d’anticolonialisme… de faire le nécessaire.

OPEX I Campagne simple La campagne simple est une bonification qui, lors du calcul de la retraite professionnelle de la fonction publique, des travailleurs de l’État et assimilés, permet de doubler le temps pris en compte spécifiquement. Deux décrets, en date du 4 janvier 2012 attribuent, l’un (n° 2012-4) la campa-

gne simple jusqu’au 31 décembre 2013 aux militaires en service en Afghanistan, pays et eaux avoisinantes. L’autre (n° 2012-5), aux militaires en service sur le territoire de la Jamahiriya arabe libyenne, du 1er mars 2011 au 14 mars 2011.

Situation en Syrie

Déclaration de l’ARAC Le sang du peuple syrien coule. La guerre s’y installe, porteuse de mort et de désolation. Si des problèmes réels existent en Syrie, l’ARAC condamne les violences et les tueries d’où qu’elles viennent, de même que les campagnes en cours pour des interventions militaires extérieures. Elle refuse l’investissement militaire de la France, de l’Angleterre et des Etats-Unis, déjà en place dans la zone.

Elle soutient par contre toutes initiatives politiques, notamment à l’ONU, qui peuvent contribuer à ce que le peuple syrien trouve rapidement le chemin d’une solution démocratique, pacifique, tout en mentionnant une possibilité réelle de stabilité au Proche-Orient, afin d’éviter une escalade aux conséquences catastrophiques.

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Saint-Vallier (Saône-et-Loire)

Village de l’Amitié : une initiative pour la paix et la fraternité 17 octobre 2011 : à l’occasion de l’exposition de l’ARAC sur les conséquences de la guerre chimique au Vietnam et sur le Village de l’Amitié de Van Canh, l’ambassadeur du Vietnam Duong Chi Dung a accepté l’invitation des organisateurs et de la municipalité de Saint-Vallier. L’ambassadeur a été accueilli à l’ECLA par le maire Alain Philibertet, Raphaël Vahé, président national de l’ARAC, Alain Richard, membre du bureau national français du Village de l’Amitié, Raymond Rey, président de l’ARAC de Saône-et-Loire. L’accueil fut très cordial, le maire se disant « heureux d’accueillir un ambassadeur à Saint-Vallier pour la première fois ». Il remercia tous les présents, les élus, Nathalie Vermorel de Almeida, conseillère régionale, et les organisateurs de la très belle exposition. Pour sa part, l’ambassadeur dit combien il a été sensible à l’invitation, dit qu’il était là en tant qu’ami, remercia tous ses hôtes pour le soutien moral et matériel apporté au peuple vietnamien et, anticipant un peu sur le débat qui allait suivre, affirma son désir de justice pour le Vietnam et insista sur le symbole fort que représente le Village de l’Amitié de Van Canh. La visite de l’exposition très parlante sur les atrocités dues à la propagation « d’orange » (nom donné à un défoliant à base de dioxine contenue dans des fûts « ornés » de bandes oranges) déversé par l’armée américaine sur le territoire vietnamien, d’une part, et sur les activités du Village de l’Amitié de Van Canh, village situé à Hanoï et composé d’un hôpital, d’une école et de structures sociales, d’autre part. Et de souligner : « Les conséquences de cette guerre chimique sont énormes, catastrophiques, et depuis 50 ans, continuent à 26 -

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handicaper et à tuer. 80 millions de litres de ce poison violent ont été répandus sur le Vietnam, poison qui est le plus violent que l’on connaisse. Cet un aspect de la guerre du Vietnam qui reste méconnu. 50 ans plus tard, ce poison, présent dans les sols, l’eau, les aliments, continuent de briser la vie de milliers d’enfants. » Le Vietnam demande réparation mais les autorités américaines demandent des « preuves scientifiques » après avoir cependant reconnu de nombreuses pathologies liées à l’agent orange et dédommagé « leurs » vétérans de la guerre du Vietnam et les enfants de

ceux-ci ». Raymond Rey insiste : « Cette guerre chimique et ses conséquences sont un recul de civilisation, il nous faut développer la paix. Aussi il est nécessaire, il est indispensable de bannir les guerres quels que soient leurs caractères, leurs objectifs. Il n’existe pas de guerre humanitaire, il n’existe pas de guerre propre, il n’existe pas de guerre chirurgicale. Toutes les guerres sont sources de profits fabuleux pour une poignée d’hommes qui ne les font pas, ne les subissent pas. Les guerres apportent aux peuples malheur, misère, désolation, deuils, en un mot, c’est un recul des civilisations… Pour faire reculer les guerres sous toutes leurs formes, développons une culture de paix, d’amitié, de solidarité permettant que chaque être humain puisse s’épanouir sur la terre ». Dans le Village de l’Amitié sont soignés 170 patients, un quart sont des vétérans vietnamiens et le reste sont des


vie de l’arac LE RÉVEIL

enfants et des adolescents pour qui est demandée réparation. Au cours du débat très animé, la nombreuse assistance trouva réponses à ses interrogations. Raphaël Vahé expliqua aussi le rôle et l’organisation du Village et précisa que le coût par jour pour un enfant soigné et formé était de 2 euros. Ces enfants qui arrivent dans des états physiques et moraux terribles reçoivent des soins

Bouches-du-Rhône

Chapeau… l’expo ! Le 12 janvier dernier, à Septèmesles-Vallons, l’ARAC départementale a présenté, dans les salles du Foyer Missak Manouchian, l’exposition réalisée par ses soins afin de toujours mieux populariser l’ARAC, sa Mutuelle, le Réveil, leur action et leur nécessaire renforcement. Sous la présidence de Jacques Delaubier et en présence d’une nombreuse assistance, parmi laquelle le maire, des élus, des représentants d’associations dont notre ami Marcadet pour l’ANACR... Patrick Saintenoy et sa collègue Eve présentèrent treize panneaux souples illustrant, en ce 95e anniversaire de l’ARAC et le 50e anniversaire de la fin de la guerre d’Algérie, l’action permanente de l’ARAC appuyée sur ses valeurs républicaines. Action contre la guerre, contre le fascisme, dont Georges Doussin dira dans son intervention « qu’elle est née dès la venue du fascisme et qu’elle ne cessera qu’avec sa disparition », action pour la mémoire, le civisme, cette exposition traite de l’ARAC par période : 19141918 (la guerre), 1919 (le droit à réparation, combats pour la vie, des voix pour l’espoir), 1935-1936 (lutte contre le fascisme, victoire du Front populaire), 1939-1945 (la 2e guerre mondiale,

l’ARAC dans la tourmente), 1946-1954 (la guerre d’Indochine), 1952-1962 (guerre d’Algérie, combats du Maroc et de Tunisie), deux panneaux extrêmement importants pour qui se souvient que Marseille était le port ouvert sur la guerre et le camp Saint-Marthe un point de passage obligé. Au chapitre des innovations heureuses, parce qu’en prise sur l’actualité, un panneau entier consacré aux OPEX (y compris avec le rôle des femmes soldats au plan de la solidarité avec les populations sur le terrain), et deux panneaux complets sur la Mutuelle de l’ARAC d’hier à aujourd’hui. Les journaux de

appropriés menant à des améliorations visibles et leurs souffrances allégées. Mais on ne soigne dans ce Village que 170 personnes sur plus d’un million de demandeurs. Le combat pour la vie doit continuer. Il donna d’autres exemples de possibilités d’aide avec notamment le développement du tourisme solidaire. Extraits d’un article de Montceau-News l’ARAC (du Combattant anti guerrier de 1920 au Réveil des Combattants de 2012) et le rappel des dirigeants et congrès nationaux de l’ARAC viennent illustrer, en clôture, la permanence des luttes de l’ARAC pour ses idéaux républicains. Saluée tour à tour par Georges Doussin et André Fillère, qui soulignèrent combien, loin d’être un regard passéiste, cette initiative s’inscrivait avec acuité et modernisme dans nos combats d’aujourd’hui. Cette exposition doit s’avérer un outil précieux de communication avec la population des Bouchesdu-Rhône. Présentée dans les villes et les villages, les établissements scolaires, les maisons de la culture... elle se veut outil de dialogue, de communication, de persuasion, d’adhésion et d’élargissement de l’action. Une excellente initiative qui mérite un grand coup de chapeau à l’ARAC des Bouches-du-Rhône.

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LE RÉVEIL vie de l’arac

Gagnants de la loterie de Noël - Réveil des combattants N° Gagnant de la VOITURE : 37653 M. BOULINGEZ - LOCON (62) TV ECRANS PLATS 000906 PAPAIN - MARSEILLE (13) 039471 SUSS Claudette - MASSY (91) 056555 JOUENNE Edgard NOISY LE GRAND (93) 087483 CHANDELON Jacques PONT DU CHÂTEAU (63) 147101 ANDRE Bernard - SAINT FIRMIN (58) PORTABLES 030486 BARY Raymond - WISSOUS (91) 073262 MARCO - VITROLLES (13) 025776 DURAND Emilienne - RENNES (35) 139620 PEYROUSE Marc VALLON PONT DARC (7) APPAREILS PHOTO 071724 BAILET Maurice ST MARTIN DU VAR (6) 130603 SANTOYO Manuel - NIMES (30) 068792 TALI André - MONTPELLIER (34) 138570 JUILLARD Raymond BUSSIERES (71) LECTEURS DVD 015093 LE DANTEC Guy - GOUESNOU (29) 144582 ANTOINAT Michel - BASSENS (73) 069863 BUONO René - ST MANDRIER (84) 082833 SEVERAC André - BLAGNAC (31) CADRES NUMERIQUES 148165 ALLIOD Jean - MONTANAY (69) 107637 LEPEE Henri - VILLEJUIF (94) 033184 FAYOLLE Guy - SARTROUVILLE (78) 088055 FONTAINE Paul - BOURGES (18)

BONS CADEAUX 063855 CANVEL René - PARIS 12e (75) 136822 CUZIN René - BOUCHET (26) 034501 VANBESUN - MASSY (91) 128113 MISSUD Pierre - OGNES (13) 058982 MULLER Jean - LA COURNEUVE (93) 129555 THIEL Nicolas - SAUSSET/PINS (13) 149077 GROSSET Mireille LES CONDAMINES (74) 139503 COURBIS Roger VAlLON PONT D’ARC (7) 071291 MICHELET - NICE (6) 014494 VULPIANI Charles - TONNEINS (47) 052574 MAIREAUX Claude - REIMS (51) GRILl TOUTS PAINS 096963 BHER Georges FONTENAY/BOIS (94) BAINS DE PIEDS 099062 BARETGE Georgette - TORCY (77) 011912 SALA Jean - RIVESALTES (66) CUITS VAPEURS 053652 ALVO Maurice - MONTREUIL (93) 141763 COLOMBANI Félix - GRENOBLE (38) MIXEUR 017291

LE NOBLE Madeleine BORDEAUX (33)

034736 064523

JOUANNY - EPINAY/SEINE (91) CUKIERMAN Paul - CANNES (6)

COFFRET PERCEUSES 083134 SAINT DENIS Marc - ST MARTIAL (3) 053151 GEORGES Albert MONTMORENCY (95) 028150 MASSON Guy - CONLIE (72) 068397 VILLEDIEU Paul - CANNES (6) COFFRET TISANIERE 131101 BERGERON André - VALREAS (84) SAC TROLLEY 086612 GUEROT Gisèle - TALMAY (21) KIT MULTI USAGE 035573 LE FORESTIER Jean SAULT LES CHARTREUX (91) FONDUE MINI FRITEUSE 041411 LEFEBVRE J.P. - LE HAVRE (76) CAFETIERE DUO 074992 ROATINO Pierre - FUVEAU (13) SET BOUGIES PARFUMEES 034055 BARIERE Lucien - EPINAY/SEINE (91) PALETTE DE MAQUILLAGE 017771 DANIEL Jeanine - SCAER (29) DEFROISSEUR 005131 DAVAUX Georges - PERIGuEUX (24)

CAFETIERE 002993 FAURE André - MALEMORT (19)

SET A HUITRES 135024 FERREIRO Henry - ST CYR/MER (83)

KITS PERCAGE 047550 MAREUSE Francis - ST QUENTIN (2) 083444 CATALOT Robert CLERMONT FERRAND (63) 129122 BERBON André - LE MARTINET (30)

NOS PEINES Février 2012 Le Réveil des Combattants adresse aux familles et aux amis de nos camarades décédés ses sincères condoléances. ALLIER (03) Commentry : Fernand BOUCHARD, AC 39-45 Gannat : Jean RATINIER, AC 39-45 BOUCHES-DU-RHÔNE (13) Marseille centre : Antoine ANGELINI. Jacques HEBRARD, AC ATM. Jacques PELLE, AC ATM Rognac : Lucien MAZIERE, AC ATM. Rousset : René SUZANNE, AC Indochine, porte-drapeau de la section.

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Velaux : Mme Rose BONNET Vellutini : Roger BRUCHE, Résistant.

HÉRAULT (34) Balaruc-les-Bains : René ROUANNET, 78 ans, AC ATM.

CHER (18) Argent-sur-Sauldre : Roger JOULIN, 69 ans, AC ATM. Ernest RAIMBAULT, 98 ans, AC 39-45, Résistant.

ILLE-ET-VILAINE (35) Rennes : Mme Armande MENTEC, 92 ans, veuve.

HAUTE-GARONNE (31) Lévignac : Antoine XAUSA, 80 ans, AC ATM, Médaille militaire, Croix Engagé volontaire, viceprésident de la section.

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LOIRE (42) Saint-Étienne : Pierre THOMAS. HAUT-RHIN (68) Mulhouse : Lucien SCHULTZ, 88 ans, AC 39-45.

SARTHE (72) La Suze-sur-Sarthe : Mme Madeleine GALBRUN. Lucien LAURE. Raymond NIEPCERON. PARIS (75) RATP : Julien LE NAVENEC. 19e : Guy DOUCET, 86 ans. Jacques MECHAIN, AC ATM. VIENNE (86) Chatellerault : Jacques CROCHU, Résistant, interné à Poitiers puis à

Compiègne, déporté à Auschwitz-Birkenau puis à Buchenwald, Chevalier de la Légion d’honneur. ESSONNE (91) Chilly-Mazarin : Raymond BARRIAS, AC ATM. VAL-DE MARNE (94) Villejuif : Mme BESSEADAM Jane, 87 ans, AC Indochine. CONSEIL NATIONAL Herserange : Mme Cécile ROBERT


vie de l’arac LE RÉVEIL

Brest I Le porte-drapeau Jean Moal

mis à l’honneur

Après avoir énoncé les mérites du récipiendaire, le responsable du comité brestois, Pierre Robin, a également rappelé le vœu de l’association, récemment réitéré par courrier adressé au maire, de voir une rue de Brest porter le nom d’Ambroise Croizat, le fondateur de la Sécurité sociale. Cette demande a été faite conjointement avec l’ANACR.

Fouesnant

De gauche à droite, Jacqueline Héré, Jean Salaud, Jean Moal et Pierre Robin.

Courant janvier, plusieurs adhérents et sympathisants se sont retrouvés à Kergoat pour un goûter républicain. Lors de ces retrouvailles, Jean Moal s’est vu gratifié d’un diplôme d’honneur remis par

Jacqueline Héré, adjointe au maire, et d’une médaille d’argent en sa qualité de porte-drapeau de l’ARAC depuis 13 ans, en présence de Jean Salaud, responsable départemental de l’association.

La section de l’ARAC de Fouesnant, qui a tenu son assemblée générale en janvier 2012 en présence de Joseph Coroller, président de la section et de Jean Salaud, président départemental, a rappelé l’attachement de l’ARAC au maintien du 19 Mars comme date commémorative de la fin de la guerre d’Algérie. D’autre part, l’association entend se mobiliser pour faire reconnaître les OPEX (opérations extérieures).

Message de l’ARAC

50e anniversaire du 19 Mars 1962

Fin de la guerre d’Algérie Il y a 50 ans, le 19 Mars 1962, le cessez-le-feu proclamé officiellement sur le terrain ouvrait la porte à la fin de la guerre d’Algérie. Les accords d’Évian du 18 mars étaient approuvés par un référendum adopté par 91 % des Françaises et des Français. Ainsi, la très grande majorité des citoyennes et citoyens voyaient enfin finir un cauchemar pour les peuples de France et d’Algérie. En ce jour anniversaire, n’oublions pas tous les morts de cette guerre, les 28 000 militaires français tués, les centaines de milliers revenus blessés ou malades, toutes les victimes algériennes (civiles ou combattantes) et tous les déracinés par l’histoire. Rendons hommage à tous les soldats du contingent, à tous les officiers et sous-officiers républicains qui ont sauvé la République en refusant de suivre les généraux putschistes et leurs complices, lors de la tentative de coup d’État d’avril 1961 pour empêcher le processus qui a mené à la paix. L’exigence de commémoration officielle du 19 Mars 1962, que nous exprimons constamment avec d’autres associations, est un acte de mémoire et de vérité qui concerne aussi bien l’histoire présente de la France que celle de l’Algérie.

Dans ce sens, il est nécessaire de rappeler notre exigence d’abrogation de la loi du 23 février 2005, qui veut banaliser et réhabiliter aux yeux des gens le colonialisme subi par l’Algérie et d’autres pays africains. Aujourd’hui encore, les anciens combattants en Algérie, au Maroc et en Tunisie, toutes celles et tous ceux qui sont attachés aux valeurs républicaines, de liberté, d’égalité et de fraternité doivent s’unir pour s’opposer à la réhabilitation des criminels de l’OAS, à leurs complices revanchards d’aujourd’hui que certains présentent comme des héros et, d’une manière plus générale, s’opposer à tous ceux qui tentent de semer et d’entretenir la haine, le mépris, le racisme et la xénophobie. Cinquante ans après la fin de la guerre d’Algérie, il est grand temps que les peuples français et algérien entretiennent des relations de paix, d’amitié et de solidarité. Il est grand temps qu’un traité d’amitié et de coopération soit enfin signé. Au nom du souvenir de tous les morts, bâtissons ensemble une ère de paix à laquelle aspirent tous les peuples du monde.

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LE RÉVEIL magazine

Pour l’anniversaire du cessez-le-feu en Algérie

Trois livres au cœur de nos débats pour refus d’obéissance le 19 novembre 1956. Sa décision n’a pas été sans susciter interrogations et discussions. L’affaire des « soldats du refus » reste un des épisodes marquants et toujours controversés de l’histoire de la lutte contre la guerre en Algérie et particulièrement de l’attitude des communistes français. Nous ressortons ce document dans le cadre des 50 ans des Accords d’Évian.

Le Temps des cerises publie trois ouvrages à l’occasion du 55e anniversaire du cessez-le-feu en Algérie. Deux des auteurs seront présents dans nos initiatives commémorant cet anniversaire : • dans la Maison des syndicats de Créteil, le 24 mars 2012 de 11h à 17h pour notre Fête de la fraternité France-Algérie • à l’Hôtel de ville de Paris, salle des Conférences, le 3 avril de 9h30 à 17 h pour notre Rencontre de réflexion sur les thèmes suivants : - la France se doit d’assumer la guerre d’Algérie, - les deux Nations française et algérienne se doivent d’engager une coopération qui contribuera à l’installation de la paix en Méditerranée. Le troisième ouvrage a été écrit par un écrivain algérien malheureusement décédé en 2012, mais nos amis algériens témoigneront pour lui.

Mur de Sable brûlures d’Algérie

Mario Urbanet, préface de Gérard Noiret, Collection poésie poche, 11 e, réédition, janvier 2012.

Mario Urbanet a été appelé en Algérie et y a fait son service de 1956 à 1958. Quarante ans plus tard, ce qui n’avait pas été dit ni écrit remonte à la surface. Ce qu’il nous livre aujourd’hui n’est pas un simple récit de souvenirs. Ici, le témoignage prend la forme d’un grand poème non seulement pour raconter ce qui a été, mais pour essayer de comprendre comment des jeunes « normaux » ont pu être entraînés dans la machinerie de la guerre et sa barbarie. Interrogation d’autant plus actuelle que l’histoire paraît se répéter avec entêtement… 30 -

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Le Refus

Alban Liechti, Collection essais, 21 e, réimpression, janvier 2012.

En juillet 1956, le jeune Alban Liechti (21 ans) reçoit son ordre de mission pour être envoyé en Algérie et « participer aux opérations du maintien de l’ordre ». Ayant contribué à la mobilisation contre la guerre d’Indochine et pour la libération d’Henri Martin, Alban ne veut absolument pas prendre part à cette nouvelle guerre coloniale. Après discussion avec ses camarades et sa famille, il décide d’écrire au président de la République pour lui signifier son refus. Emprisonné dès son arrivée en Algérie, il est convoqué devant le Tribunal militaire et condamné à deux ans de prison

L’As

Tahar Ouettar, Collection Roman des libertés, traduit de l’arabe par Bouzid Cousa, parution mars 2012.

L’As (peut-être le chef d’œuvre de Tahar Ouettar, qui prend place dans la littérature révolutionnaire aux côtés de La Mère de Gorki ou de Gouverneurs de la rosée de Roumain) raconte la guerre d’Algérie, vue du côté des combattants algériens, et plus précisément à travers le regard de l’As, personnage principal et sorte d’idiot du village. Il raconte la répression et les tortures, mais aussi un épisode jusque-là tabou : la liquidation de maquis communistes par l’aile droite du mouvement nationaliste. L’As a été publié en arabe à Alger en 1974. Tahar Ouettar est considéré comme l’un des principaux écrivains algériens arabophones, connu et étudié dans tout le monde arabe. Il a participé à la révolution algérienne et a connu, avec Boumediene, la prison pendant la lutte de libération nationale. Celui-ci président, Tahar fut l’un des rares cadres marxistes du FLN. Il a été, ensuite, directeur de la radio nationale. Ses romans et ses nouvelles n’ont cessé d’interroger la société algérienne. Il est mort à Alger durant l’été 2010.


dossier LE RÉVEIL magazine

A ne pas manquer ! La disparue de San Juan - Argentine, octobre 1976 Philippe Broussard, Les documents Ed. Stock, 22 euros

Suite à ma rencontre à Buenos Aires avec les soldats « non reconnus » de la guerre des Malouines, et notre premier article dans le Réveil, Alicia BonetKrueger (présidente du Collectif argentin pour la mémoire en France) les a visités à son tour. Et surtout, rentrant à Paris, elle m’a vivement recommandé, si je voulais comprendre la période de terreur du dictateur Videla, de lire cet ouvrage… Ce que j’ai fait et qui m’a profondément interpellé.

Philippe Broussard est rédacteur en chef du service Enquête de l’Express. Ancien grand reporter au Monde (19892005), il a reçu le prix Albert Londres en 1993. En novembre 2000, il a rencontré à Buenos Aires la mère de Marie-Anne Erize, née d’une famille française vivant en Argentine, enlevée le vendredi 15 octobre 1976 à San Juan et jamais retrouvée à ce jour. Elle avait 24 ans et, durant près de trente ans, Philippe Broussard va se livrer à une enquête minutieuse, tant en France qu’en Argentine, pour aider Françoise (sa mère) à connaître la vérité, à tenter de retrouver sa dépouille, à faire son deuil. Ce livre, c’est surtout l’échange émouvant de lettres qu’il adresse à Françoise, chacune d’elle étant « ouverte » par des chapitres plus moins longs, situant politiquement et historiquement la situation en Argentine, son évolution, en même temps que le contexte familial et les sentiments des Erize. Il « rend compte », en quelque sorte, des épisodes de son enquête, de son impact émotionnel sur ses propres sentiments, ses espérances d’aboutir au châtiment des bourreaux, ses désillusions douloureuses avec, malgré tout, l’évolution des événements qu’elle entraînera jusqu’à l’emprisonnement du tortionnaire. Marie-Anne avait un physique de mannequin et des utopies de rebelle solidement ancrées sur sa solidarité chrétienne et sa conscience de la situation dans laquelle la dictature plongeait le peuple argentin. Grandie dans la jun-

gle du nord de l’Argentine, elle ira des bidons-villes de Buenos Aires aux quartiers chics de Paris, des coulisses de la mode à celles de la guérilla. L’avenir aurait pu lui sembler radieux. Top modèle faisant la « une » du journal Siété dios, côtoyant des célébrités, réalisant des spots publicitaires, tel celui encore visible aujourd’hui sur Internet pour les cigarettes Jockeys (You tube : Jockey Soley Soley, magnifique en blanc, foulard autour du cou, avec deux autres jeunes femmes), elle a flirté avec cet univers aisé, aimé quelques hommes à cœur perdu… et a tout laissé pour rejoindre les pauvres, les opprimés, belle et rebelle… jusqu’à ce jour où des militaires en civil l’ont enlevée, dans cette dictature qui fit plus de 30 000 victimes ! Philippe Broussard, parti sur les traces de La disparue de San Juan, a interrogé des dizaines de témoins, exhumé des archives et tenté d’assembler peu à peu le puzzle des multiples vies de MarieAnne. A travers elle, à travers le destin de migrants venus de la France et de l’Italie jusqu’à la Pampa, puis à Wanda (pas loin des chutes d’Iguaçu, magnifiques, au Nord, à la limite du Paraguay) et enfin Buenos Aires, Broussard nous faire connaître cette famille de cathos plutôt rigides, chez qui les apparences… sauf pour Marie-Anne, qui fréquente le bidonville voisin, la « villa » du Bajo Belgrano. Peron, les jeunes Montonéros en lutte, les EAR (Armée révolutionnaire du peuple) et les FAR (Forces armées révolutionnaires), les curés du Tiers monde qui prêchent dans les villas miserias… à l’indignation de l’Église consunontrice !

Marie-Anne jeune, catho qui veut un monde meilleur, s’engage… spécifiquement et aussi par amour pour Daniel, « Pancho », « El Flaco »… Traqués, ils fuient jusqu’à San Juan (petite ville de l’Ouest argentin, à 1000 km de Buenos Aires au pied de la Cordillère des Andes) jusqu’à ce 15 octobre 1976. La terreur, après le coup d’État… Et pourtant, les parents, enfermés dans leur intégrisme, ne comprennent pas : « Que les militaires enlèvent les communistes, c’est normal. Mais Marie-Anne, pour Marie-Anne ? » Sans doute parce qu’elle, elle avait compris qu’il fallait briser les barrières et lutter. Philippe Broussard mène certes une enquête. Mais son livre est plus qu’un témoignage du drame vécu par les Argentins, par cette jeunesse généreuse et assassinée, par tous les exilés ayant dû fuir leur pays, par nos amis du Colectivo argentin pour la mémoire, toujours révoltés et toujours en lutte pour la justice, pour que soient enfin jugés les bourreaux, tel ce Jorge Oliviera, officier d’extrême droite, sans doute meurtrier de Marie-Anne après l’avoir violée, torturée et fait disparaître du centre de tortures de La Marquesita (faubourg de San Juan). Aujourd’hui, avocat, il est impliqué dans une cinquantaine de dossiers judiciaires. Arrêté en Italie en l’an 2000 et relaxé, les temps ont changé. Il était, fin décembre 2010, incarcéré à « Campo de Mayo ». Sera-t-il jugé un jour ? Philippe Broussard le croit-il ? Nous, nous l’espérons, pour que Françoise Eriza puisse faire son deuil et que nous, nous puissions croire encore en la justice.

FÉVRier 2012 - N°780 - LE RÉVEIL

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