Livret ressource - Habiter contre la spéculation

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Habiter contre la spĂŠculation 3 exemples de stratĂŠgies



Le travail de résidence peut s’accompagner de nouvelles idées à communiquer auprès des habitants, élus, acteurs économiques et associations. Sans prétention, ce carnet permet de découvrir des mouvements innovants en matière d’habitat, au travers d’exemples français. Ces nouvelles façons d’habiter afin de lutter contre la flambée des prix du foncier et permettre l’installation d’habitants à l’année ; peuvent être des inspirations pour un futur possible à Bangor, mais ne sont en aucun cas des modèles à appliquer tels quels.

INTRO -3-


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l’habitat coopératif Source : http://www.lelabo-ess.org/l-habitat-cooperatif-une-forme-delogement.html

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L’habitat coopératif une forme de logement solidaire.

L’habitat coopératif vient en réponse à la crise du logement en apportant plus de solidarité et d’efficacité économique, sociale et environnementale. De nombreuses initiatives de logements coopératifs sont nées à travers le monde pour la promotion d’un habitat solidaire et non spéculatif. Très prisé chez nos voisins européens et transatlantiques, l’habitat coopératif permet aux citoyens de faire face à la crise du logement en concevant ensemble un habitat autour de considérations sociales, écologiques et économiques. Encore à l’échelle expérimentale en France, l’habitat coopératif n’est pourtant pas un modèle nouveau. Les premières coopératives d’habitation ont été créées au XIXème siècle par les mouvements syndicalistes.

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L’idée était alors d’aider les ouvriers à échapper aux menaces d’expulsion des propriétaires en cas de loyers impayés et de leur permettre d’accéder à la propriété d’un logement décent. Bien qu’encouragé par la Troisième République qui reconnait ses vertus fédératrices et sociales, le modèle se marginalise avant de disparaître en 1971 avec la loi Chalandon qui abolit le statut juridique de la coopérative d’habitant. Aujourd’hui, la crise économique et l’explosion des prix des logements (+140% en France depuis 1998) durcissent les conditions d’accès à la propriété : plus de 3,8 millions [1] de personnes sont mal-logées en France (sans logement, logées dans un habitat insalubre ou en grande précarité). L’espace urbain connaît par ailleurs un appauvrissement avec un phénomène de ghettoïsation qui nuit à la mixité sociale ou encore à la complémentarité du parc immobilier (quartiers de bureaux vs quartiers de logements). Un contexte qui relance l’intérêt citoyen autour des coopératives d’habitants. L’outil coopératif pour changer de pratiques sur l’habitat L’habitat coopératif impose de changer de regard sur l’habitat.

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La propriété est partagée collectivement par le biais de la coopérative qui possède l’immeuble. Les habitants détiennent quant à eux des parts sociales de la coopérative. Une organisation sous forme d’économie sociale et solidaire qui offre des avantages. Les habitants ont une double qualité locataires-propriétaires : ils doivent donc habiter sur place. La valeur des parts qu’ils possèdent dans la coopérative est déconnectée de la valeur de leur logement et il devient impossible de spéculer sur la revente. Une personne possède une seule voix, quel que soit le nombre de parts sociales qu’elle possède : chaque coopérateur est au même niveau d’égalité. Enfin, la propriété du bien immobilier est collective : le coopérateur ne paie pas au-delà du coût du projet. Les coopératives d’habitants instituent une forme de propriété collective. A leur entrée dans la coopérative les coopérateurs acquièrent des parts sociales correspondant souvent à 20% de la valeur du logement qu’ils vont occuper et du prorata d’espaces communs. Le terrain est quant à lui appréhendé en tant que « commun », placé hors champ du marché financier. La parcelle du sol sur laquelle sont édifiées les habitations appartient


à la coopérative et ne peut faire l’objet d’une vente ultérieure. Si les prix de l’immobilier augmentent, la coopérative, à l’inverse d’un bailleur privé, ne répercute pas cette hausse sur les loyers des coopérateurs. Lorsqu’un habitant quitte la coopérative, il cède ou se fait rembourser ses parts sociales à la valeur nominale, sans réaliser de plus-value. Ainsi, ce ne sont pas les logements qui sont vendus mais bien les parts sociales dont la valeur est déconnectée de la valeur du bâti, garantissant ainsi la sortie du système spéculatif. Un projet citoyen collectif d’habitat durable qui favorise le lien social Les projets sont souvent construits par les habitants euxmêmes. Des citoyens qui se reconnaissent dans le mode de gouvernance démocratique de l’habitat coopératif et recherchent la création de lien social propre à ce modèle. Les coopérateurs définissent ensemble les caractéristiques de leurs logements (architecture, recours aux énergies renouvelables, etc) mais aussi les espaces qu’ils souhaitent mutualiser. Le plus souvent, une partie du bâtiment abrite une buanderie, une chambre d’amis commune, une salle de

jeux pour les enfants ou un foyer ouvert aux associations de quartier. Des services peuvent également être mutualisés avec la mise en place de garde d’enfants ou d’autopartage afin de développer une solidarité entre voisins et de bon vivre ensemble. Les coopératives d’habitants permettent aussi une mixité sociale diffuse : avec des habitants de milieux sociaux divers aux revenus disparates, la mixité sociale est ici au cœur du modèle. L’habitat coopératif peut ainsi permettre à des personnes de revenus divers de monter un projet de vie collectif. Il permet le maintien de l’habitat dans un statut de logement accessible financièrement à des personnes de condition sociale modeste. L’implication des coopérateurs, les efforts de mutualisation de moyens et d’espaces et le souhait d’éviter les intermédiaires permettent de proposer des loyers inférieurs aux prix du marché. Par ailleurs, la redevance est adaptée aux ressources financières de chaque coopérateur. Accompagnés par les structures adéquates, les locatairescoopérateurs participent à la conception, au financement et à la réalisation d’un bâtiment durable, sans passer par un promoteur et verrouillent ainsi

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toute plus-value foncière. Ces programmes permettent d’envisager un rééquilibrage entre la sphère du politique (de la représentation, des élus), la sphère de l’expertise (architectes, ingénieurs, juristes, économiste) - qui traditionnellement agit au plus près de la première - et la sphère de la société civile (des habitants, des usagers, des « citoyens »…). Enfin, la participation de chacun aux prises de décisions dans un processus démocratique et participatif est vectrice d’intégration et de lien social. L’environnement et le souci de la préservation des ressources naturelles par la valorisation d’un habitat durable font partie du projet des coopératives d’habitants qui répondent aux enjeux actuels. La construction ou la rénovation des logements prennent en compte des critères écologiques engendrant une moindre pollution et une faible émission de gaz à effet de serre. A titre d’exemple, les habitants du Village Vertical de Villeurbanne ont fait de leur habitat un véritable laboratoire d’écologie urbaine par le choix d’installations et de matériaux écologiques. In fine, l’habitat coopératif cherche à concilier trois objectifs

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: économiques, sociaux et environnementaux. Un modèle très développé ailleurs Avec seulement 200 projets, la plupart de taille modeste – moins de 20 logements - recensés sur l’ensemble du territoire, l’habitat coopératif est encore à l’échelle expérimentale en France. Encore au stade de l’innovation sociale, ce mouvement recèle un vrai potentiel de développement au regard du poids qu’il représente dans d’autres pays. Différents travaux internationaux, initiés et relayés dans le cadre de chaire internationale Charecoop – Chair Internationale Habitait Coopératif et Coopérations Sociale - sur les continents européen et américain, montrent que des pratiques alternatives d’habitat coopératif sont portées par la société civile et permettent d’augmenter l’offre de logements abordables. L’habitat coopératif a apporté une réponse à une pénurie de logements et à la spéculation immobilière en Suède et en Norvège dès le début du XXème siècle. Ces pays bénéficient aujourd’hui d’une avance considérable par rapport à leurs voisins européens en termes de logement coopératif : en Norvège, 650 000 habitants, soit


15% du parc national est organisé uniquement en coopératives d’habitation. En Suède, le parc coopératif compte 700 000 logements, soit 17% du parc national (27% pour la ville de Stockholm).

sur le territoire- les Community Land Trust s’exportent petit à petit en Europe. Citons par exemple le Royaume Uni avec la CLT Homabaked sur le quartier ouvrier d’Anfield à Liverpool qui a été fondée.

La Suisse a également adopté le modèle il y a plus d’un siècle et est aujourd’hui l’un des leaders du logement coopératif : les coopératives d’habitants concernent aujourd’hui une habitation sur cinq dans le pays. A Zurich, la plus grande ville du pays – 390 000 habitants- 20% des logements sont coopératifs et le modèle ne faiblit pas.

A Lyon, Habicoop, la Fédération française des coopératives d’habitants tente de combler le retard français en accompagnement les citoyens dans le montage juridique et financier de leurs coopératives. Plusieurs projets sont actuellement en cours au niveau national. Habicoop a pour vocation d’aider à la création et au développement des logements coopératifs, de participer à la création d’un réseau de coopératives d’habitants, de promouvoir ce nouveau mode d’habitat et de leur apporter conseils et services.

Aux Etats-Unis, les Community Land Trust (CLT), organisations communautaires à but non lucratives, ont été présentées comme un antidote aux nombreuses saisies immobilières opérées lors de la crise de 2008. Elles possèdent un terrain uniquement affecté à des logements bon marché et qui doivent être maintenus à des prix abordables. Instrument pour la protection des quartiers contre la gentrification et le déplacement des populations, les CLT permettent de donner le pouvoir à des communautés qui en ont historiquement été privées. Modèle adopté dans les années 1960 par les Américains, - on en compte aujourd’hui plus de 250

La loi ALUR approuvée en mars 2014 a permis la reconnaissance de l’Habitat Participatif en tant que « démarche citoyenne » (…) qui permet à des personnes physiques de s’associer (…) de participer à la définition et à la conception de leurs logements et des espaces destinés à un usage commun, de construire ou d’acquérir un ou plusieurs immeubles destinés à leur habitation ». -9-


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Cette loi a permis la création de deux types de sociétés spécifiques pour mettre en œuvre les projets d’habitat collectif : la coopérative d’habitants et la société d’attribution et d’autopromotion. Maintenant que les coopératives privilégient d’un cadre précis inscrit dans la loi, l’enjeu est désormais de créer des outils financiers permettant le développement des coopératives. Autrefois marginal, le logement participatif connaît un regain d’intérêt en France et peut prendre exemple de la réussite de ses voisins européens ou plus lointains pour combler son retard et faire de la propriété collective une 3ème voie du logement, entre propriété et location.

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Le Village Vertical de Villeurbanne, un habitat solidaire et non spéculatif La coopérative d’habitants lancée à Villeurbanne, dans la banlieue lyonnaise est une initiative sociale et environnementale. Dépassant la conception classique de propriétaire et locataire, le Village Vertical invite ses habitants à mutualiser leurs ressources pour concevoir, construire et gérer collectivement leurs futurs logements, en réponse à la crise du logement. Initié à l’automne 2005, et concrétisé en juin 2013 le Village Vertical est la première coopérative d’habitants créée en France au XXIème siècle. De par ses difficultés de réalisation mais aussi son succès, le Village Vertical a été un projet « porte-drapeau » qui a permis de faire reconnaître dans la loi ALUR en mars 2014, l’existence juridique officielle de la propriété collective non spéculative.

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Un habitat solidaire et non spéculatif Chaque habitant est coopérateur du projet immobilier : une SAS coopérative à capital variable créée en 2010. Les 30 coopérateurs (20 adultes et 10 enfants), tous d’horizons différents, sont collectivement propriétaires de l’immeuble et chaque ménage loue son logement, dans le cadre d’une gestion démocratique interdisant toute spéculation et tout profit. La coopérative d’habitant est accessible à tous, puisqu’elle propose un logement dont la redevance est adaptée aux ressources financières de chaque coopérateur. Tous les mois, les coopérateurs versent une redevance comprenant un loyer (80%) et un compte courant d’associé (prêt du coopérateur à la coopérative correspondant à 20%), en fonction de la taille de leur logement. Par exemple, pour un T3 de 66 m2, la redevance est comprise entre 700 et 750 euros. Cette redevance permet principalement à la coopérative de rembourser ses emprunts. A leur entrée dans la coopérative les coopérateurs acquièrent des parts sociales. Si les prix de l’immobilier augmentent, la coopérative, à l’inverse d’un bailleur privé, ne répercute pas - 1 2 -

cette hausse sur les loyers des coopérateurs. Lorsqu’un habitant quitte la coopérative, il cède ou se fait rembourser ses parts sociales à la valeur nominale, sans réaliser de plus-value. Ainsi, ce ne sont pas les logements qui sont vendus mais bien les parts sociales dont la valeur est déconnectée de la valeur du bâti, garantissant la sortie du système spéculatif. Antoine Limouzin, est l’un des moteurs du projet du Village Vertical en 2005. Ne trouvant pas de logement répondant à ses désirs de solidarité et de non spéculation, ce père de famille a décidé de l’inventer à plusieurs. Après la création de l’association, il commence à chercher des partenaires : bailleurs, élus, structures d’insertion, citoyens militants, etc. C’est ainsi qu’il croise la route d’Habicoop, la Fédération française des coopérations d’habitants qui choisit le Village Vertical comme projet pilote à partir de 2006. Habicoop a pour objectif d’aider à la création et au développement des logements coopératifs, de participer à la création d’un réseau de coopératives d’habitants, de promouvoir ce nouveau mode d’habitat et de leur apporter conseils et services.


Né d’une initiative privée, le projet s’est néanmoins construit dans le cadre d’un partenariat institutionnel, sans lequel il n’aurait pu exister. Les collectivités locales ont cédé le terrain sur lequel le projet a pu voir le jour au prix d’un terrain pour logements sociaux. La coopérative HLM Rhône Saône Habitat a quant à elle porté la maîtrise d’ouvrage de la construction. Allier écologie et social Á 15 minutes du centre de Lyon, répartis sur une surface totale de 3 hectares, le Village Vertical comprend 14 logements, dont 9 logements sociaux et 4 logements très sociaux pour des jeunes en insertion. Principe phare des coopératives d’habitants, la mutualisation d’espaces et de moyens permet aux habitants de vivre mieux à moindre coûts. Ainsi, le Village Vertical comprend un jardin, 4 chambres d’amis, une salle commune (où sont distribués les paniers d’Arbralégumes le jeudi, une AMAP fonctionnant avec des petits producteurs locaux), une terrasse, une buanderie, comme espaces collectifs. Ces derniers permettent de développer la convivialité en diminuant les échanges marchands (gardes d’enfants, courses, prêt de matériel, achats collectifs, etc).

L’une des ambitions de la coopérative d’habitants est de développer la solidarité entre voisinage ainsi que la mixité sociale. Laboratoire d’écologie urbaine dans sa conception les habitants mettent un point d’honneur à modérer autant que possible leur impact sur l’environnement dans leurs modes de vie : gestion des déchets, limitation de la voiture en ville, achats groupés, échanges de services entre voisins. Le Village Vertical c’est aussi une citerne de 7000 litres d’eau de pluie, un toit photovoltaïque, la récupération des calories pour préchauffer l’eau, un compost d’immeuble, une chaufferie à granulés, etc. Au-delà des avantages sociaux, économiques ou environnementaux, le processus démocratique qui intervient dès sa conception permet au projet de prendre une toute autre ampleur. La participation de chacun devient la clef du succès. Il s’agit d’organiser un vrai partage de la maîtrise du projet, avec des décisions prises de manière consensuelle dans le cadre d’un « conseil de village », une rotation des responsabilités et la gestion collective des tâches. Chaque habitant devient acteur et partie prenante d’un projet

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collectif d’habitat dans lequel la solidarité, l’écologie, le lien social et le pragmatisme économique sont permis. Trois ans après, les projets de coopératives d’habitants restent encore à l’échelle expérimentale en France avec seulement 200 projets, la plupart de moins de 20 logements, recensés en France alors que le mouvement représente 17% du parc immobilier en Suède avec pas moins de 700 000 logements coopératifs. La marge de progression de la France reste encore considérable pour combler son retard, il semblerait cependant qu’aujourd’hui les citoyens aient les clés en mains pour devenir acteurs de leur habitat.

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Fiche d’identité Maîtrise d’ouvrage : Le Village Vertical SAS coopérative Maîtrise d’œuvre : Arbor & Sens, mandataire Période : Entre 2006 et 2013

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SCI d’Accession Progressive à la propriété

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Source : https://www.faire-ville.fr/habitat-participatif/modes-daccession/ Le montage en SCIAPP est un montage innovant permettant à des personnes qui n’ont pas accès au crédit bancaire, du fait de leurs revenus ou de leur âge, d’entrer dans un processus d’accession progressive à la propriété, par acquisition planifiée de parts sociales de la SCI propriétaire de leur immeuble.

La SCIAPP permet en quelque sorte une capitalisation (épargne), sur l’effort mensuel (loyers) pour se loger. À l’achèvement de la construction de l’immeuble, l’opérateur HLM créé avec les « accédants » une Société Civile Immobilière d’Accession Progressive à la Propriété (SCIAPP) de forme coopérative, à laquelle il apporte l’immeuble réalisé. À la création de la SCIAPP, les “associés” font un apport individuel en fonds propres -17-


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équivalent à 2% environ de la valeur de leur futur logement (soit 2000 € à 4000 € selon la taille du logement ) qui leur permet de faire l’acquisition des premières parts sociales. Les accédants sont à la fois membres associés de la SCI, dont ils détiennent chacun des parts sociales, et locataires individuellement de cette SCI. Par le paiement de la mensualité due à la SCI, les accédants font ensuite l’acquisition progressive du groupe de parts sociales attachées à leurs logements encore détenues par la société HLM. Ces parts sont cessibles à tout moment et transmissibles en succession. Mensualité La mensualité due par l’accédant, qui est comparable à un logement HLM augmenté de 20% environ, comprend : une part permettant le remboursement des emprunts (coût de l’immeuble), les coûts de gestion, les charges “locatives” habituelles, l’acquisition des parts sociales. Cette mensualité permet également à la SCI de faire des provisions lui permettant de prendre en charge les travaux

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de gros entretien sur l’immeuble quand cela sera nécessaire. Rôle de l’opérateur HLM La société HLM assure pour le compte de l’ensemble des associés la gestion de la SCI (gestion locative, comptabilité) et tous les services que voudra lui confier la SCI. La société HLM reste détentrice des emprunts contractés pour financer la construction de l’immeuble qu’elle a apporté à la SCI. En contrepartie, la SCI se trouve redevable à la société HLM d’une dette équivalente aux annuités du remboursement de cet emprunt. La SCI, qui recouvre les « mensualités » versées par les locataires-associés procède au remboursement régulier de cette dette, avec les intérêts correspondants, afin de permettre à la société HLM de régler ses annuités d’emprunt. Acquisition des parts sociales et durée d’acquisition L’ acquisition progressive des parts sociales de la SCI se fait sur une durée de 40 ans, qui correspond à la durée de l’emprunt contracté par la société HLM.


Cette acquisition se fait de façon solidaire, par le versement de la mensualité due à la SCI pour l’occupation du logement, et ce au même rythme pour tous les locataires-associés, à proportion du logement qu’ils occupent. Il n’est pas possible pour un locataire-associé qui le voudrait d’accéder plus rapidement à la propriété de son logement au cours du processus. Tous les coopérateurs conservent donc leur statut de locatairesassociés sur toute la durée du processus d’acquisition, ce qui est indispensable pour une bonne gestion collective de l’immeuble. À échéance de ces 40 ans, les locataires-associés auront racheté à l’opérateur HLM l’ensemble des parts de la SCI. L’opérateur HLM se retire alors de la SCI et les habitants en restent les seuls associés. Les associés auront alors la liberté de choisir la forme juridique de leur propriété. Ils pourront conserver la forme d’une SCI, ou procéder à un transfert de propriété de chaque logement à chacun des associés pour constituer une copropriété classique.

Le statut du locataire-associé Les statuts de locataires et associés de la SCI sont étroitement liés. C’est la détention de parts de la SCI qui ouvre le droit d’en être locataire, et inversement nul ne peut être membres de la SCI s’il n’occupe pas un logement. Il est donc impossible de rester « propriétaire » via la détention de parts sociales en mettant son logement en location. Tout départ du logement doit entraîner le départ de la SCI et la cession des parts détenues. Cession des parts sociales Chaque associé peut quitter la SCI APP à tout moment, s’il souhaite déménager. La cession des parts détenues à un nouvel accédant, qui habitera le logement, se fait à un prix négocié avec lui. Le nouvel entrant devra remplir trois conditions : avoir des revenus inférieurs aux plafonds HLM (éligibilité HLM) et lui permettant de faire face au loyer (solvabilité). Il devra également obtenir l’agrément des associés de la SCI. - 1 Dans 9-

le cadre des statuts de la


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SCIAPP, la société HLM a par ailleurs une obligation de rachats des parts sociales détenues par le locataire-associé si celui-ci ne parvient pas à trouver un remplaçant. Dans ce cas-là, le rachat se fait à la valeur nominale non indexée (valeur d’achat des parts).

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Les Bogues du Blat : une autre façon d’habiter en milieu rural Projet initié dans le cadre de l’action Nouveaux commanditaires et du programme «Habitat, développement social et territoires» de la Fondation de France. Avec le soutien de l’État, de la Région Rhône-Alpes, du Département de l’Ardèche et la participation du Parc naturel régional des Monts d’Ardèche dans le cadre du Fonds européen agricole pour le développement rural (Leader). Avec le concours de Michel Méry, ancien président du comité Habitat de la Fondation de France, Stéphane Gruet pour le montage juridique et la programmation participative, PACT 07 pour le montage financier, Local à louer compagnie d’architectures pour l’animation et la constitution du groupe d’habitants.

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Un projet mené avec des habitants de la commune A Beaumont, en Ardèche du Sud, les commanditaires sont les membres du conseil municipal et les artistes sont les architectes Patrick Bouchain et Loïc Julienne. Dans cette région, la pression touristique fait monter les prix du foncier : jeunes actifs et familles ont plus de mal à se loger et la population vieillit. Pour enrayer ce phénomène et assurer le maintien de l’école, la commune souhaitait créer un habitat social rural en phase avec les traditions locales, sous la forme d’un hameau. «En élaborant notre Plan local d’urbanisme (PLU), nous avons eu la chance de rencontrer Valérie Cudel, médiatrice de l’action Nouveaux commanditaires de la Fondation de France. La démarche nous a intéressés et a permis que cette expérience ait lieu » raconte Pascal Waldschmitt, maire de Beaumont. Dans le cadre d’une réflexion commune, il a été acté que ce projet immobilier se voulait aussi un acte artistique et citoyen ! Valérie Cudel a pris contact avec Patrick Bouchain, qui accorde une place majeure à la participation active des citoyens à ses projets. Avec son atelier, Construire, ils ont opté pour une démarche associant étroitement les futurs occupants des lieux. - 2 2 -

« Des échanges réguliers ont eu lieu autour de maquettes à grande échelle, des recherches de matériaux ont été faites en commun, et le chantier lui-même a été ponctué de plusieurs temps forts collectifs (pique-niques, etc.) » précise-t-elle. Un hameau de six maisons habité en commun Une première tranche de 3 maisons pionnières a été inaugurée en septembre 2013. Une seconde tranche de 3 maisons a été finalisée en janvier 2017. Les 6 maisons sont aujourd’hui habitées par des familles avec leurs enfants. Il s’agit de logements sociaux en location-vente : au fur et à mesure du paiement de leurs loyers, les occupants peuvent acquérir des parts jusqu’à devenir entièrement propriétaires. Et pour que le projet conserve son âme, une association veille : l’association des « Bogues du Blat ».


Fiche d’identité Maîtrise d’ouvrage : La commune de Beaumont Maîtrise d’œuvre : Agence Construire, mandataire Période : Entre 2010-2017

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Fiducie foncière communautaire Source : https://chairecoop.hypotheses.org/7517

3.

Pouvant être référencées à la théorie des Commons ou Biens communs, les Community Land Trusts ou fiducies foncières communautaires, répondent à trois objectifs principaux. Le maintien de l’habitat dans un statut de logement abordable ; le respect des aspirations démocratiques des membres du groupe coopératif ; la préservation des ressources naturelles.

la société canadienne d’hypothèques et de logement, traduit le concept de Community Land Trusts, sous l’appellation de « fiducies foncières collectives ». Catégorie juridique qu’elle définit de la manière suivante : « Les fiducies foncières collectives sont des organismes locaux privés sans but lucratif, qui achètent un terrain, dont elles détiennent le titre de propriété pour en faire bénéficier la collectivité et fournir des logements abordables à ses résidents à faible revenu. -25-


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L’achat de la propriété foncière est financé principalement par des dons et des subventions provenant de sources diverses. La plupart de ces fiducies se consacrent à l’achat et à la rénovation de propriétés existantes et utilisent un modèle d’occupation mixte, selon lequel le terrain est loué à long terme et les bâtiments sont vendus aux locataires. Quelques-unes d’entre elles ont étendu leurs activités à la production de logements et à la gestion de coopératives, de logements en copropriété, de refuges et de studios, tout en demeurant propriétaires des terrains et en continuant de protéger l’accessibilité des logements». Précisons ici que les CLT (ou fiducies foncières collectives) entendent faciliter « le développement de logements abordables en séparant les deux éléments du coût : le prix courant du terrain d’un côté et le coût de construction de l’autre »

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Le cas de Gigha Heritage Trust, Ecosse Quand son propriétaire défaillant met l’Île de Gigha sur le marché en août 2001, les résidents constituent un groupe coopératif, afin d’envisager le rachat communautaire de l’Ile. A la fin de l’année 2001, le « Fonds pour la Terre D’Écosse » (The Scottish Land Fund) apporte son assistance pour l’étude de faisabilité et un groupe d’insulaires se porte caution. La communauté emprunte 1 million de £ au « Fonds pour la Terre D’Écosse » et lève un nouvel emprunt 3 millions de £ pour compléter l’achat. L’achat inclut 41 des 67 maisons de l’île. Gigha Trust met en outre en vente six propriétés, pour des propriétaires-occupants et met en location sociale 18 maisons avec le concours actif de la Housing Association, « Fyne Homes ». Il constitue un consortium de construction avec « Fyne Homes

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» et trois constructeurs locaux, pour effectuer des améliorations de confort, dans les vieilles propriétés et construire de nouvelles maisons. Un groupe d’apprentis maçons est constitué et une petite carrière de l’Ile fournit les matériaux. Sources. « Isle of Gigha Heritage Trust ». An innovation History. Sabine Hielscher. 2013. En octobre 2004. Le Trust communautaire crée également le premier parc éolien communautaire d’Écosse, connu sous l’appellation « The Dancing Ladies », qui commence aussitôt à produire de l’électricité avec ses trois turbines de 40 mètres de haut. (Puissance de 675 KW). La consolidation du prêt de 400,000 £ pour le projet d’énergie renouvelable est garantie. La vente de l’électricité produite à « Scottish And Southern Energy » et à différents opérateurs privés, a généré à son tour, un bénéfice annuel de 150,000 £. En 2004, le prêt d’1 million de £ est entièrement remboursé. Les produits financiers générés par la vente de l’électricité verte, viennent consolider les autres programmes communautaires. Les dividendes cumulés nets qui ont bénéficié à l’ensemble de la communauté de Gigha, sont évalués à plus de 800.000 £. L’endettement de « Isle of Gigha

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Heritage Trust » est à ce jour de 2,7 millions de £, pour un actif total de 7,5 millions de £. Dès 2009, 29 habitations ont ainsi été entièrement rénovées. 18 nouvelles habitations destinées à de la location sociale, ont été construites. Une quatrième éolienne est installée courant 2016. Le Trust communautaire assure la gestion coopérative d’un hôtel dans l’île, de résidences secondaires et de trois fermes laitières. La population de l’île de Gigha, désormais en augmentation pour la première fois, depuis des décennies, est passée de 98 à 170 personnes. L’école a été agrandie et il y a maintenant une liste d’attente de gens qui veulent venir s’installer à Gigha Island…. Le 15 Mars 2012, les dix ans de Gigha Heritage Trust ont été fêtés par la population locale. “We have now created a new normality, when people take control of their own destiny, run their own affairs, build their own future, create the opportunities for their children instead of having a big house which dominates proceedings over all who live under it.”


Fiche d’identité Maîtrise d’ouvrage : Isle of Gigha Heritage Trust, Ecosse Période : Entre 2001 - auj Statut : Développement communautaire

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