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POUR QUELQUES expos de plus !

DANS L’HÉRAULT

Commençons par l’hommage, rendu jusqu’au 13 août, à la Pop galerie de Sète, à un artiste qui aura milité toute sa vie pour la gravure, l’estampe et les métiers de multiplication de l’image en général. Jean Attali (1), né à Casablanca, mais très vite figure de l’effervescence parisienne, en 1968 comme dans les années 80, lesquelles voient le retour de la figuration en France. Attali se sentait à l’aise dans la maîtrise du trait, caractéristique de cette technique accessible à toutes les bourses et, partant, populaire. Toutefois, ce n’est pas grâce à sa carrière de graveur émérite qu’il est honoré par la galerie de Pascal Saumade. D’abord, il vient de nous quitter et sa peinture est qualifiée de méditerranéenne. Ensuite, il fut un compagnon de route de Robert Combas, engagé, avec son épouse, dans la préparation de cette exposition, Jean Attali lui ayant ouvert autrefois les portes de son Atelier Utile à Tout Faire afin qu’il y performât à sa guise. Au demeurant, depuis les années 90, il s’adonnait à une peinture, à l’acrylique, qui mérite d’être découverte : elle privilégie le portrait et la joie de vivre, alors que la mort semble hanter l’œuvre gravée. Robert Combas la définit pourtant comme « optimiste ». Elle se focalise sur la femme, sujet fécond s’il en est, qu’il traite de manière originale, à partir de collages et de dislocation méticuleuse du corps. Il y avait chez Attali comme une nostalgie des couleurs de l’enfance, berceau du génie, disait le poète, que la peinture permet de retrouver. Un appétit insatiable qui allait de pair avec une ardente curiosité, un inextinguible besoin de liberté et de se confronter à ce sujet inépuisable, le corps féminin, dont on peut se demander s’il ne métaphorisait pas la peinture même, ou la mort. Il le traite de manière brute, primitive, ne s’embarrassant pas de fond perspectiviste mais le modelant à sa fantaisie, retrouvant parfois le plaisir du trait. Mais laissons un ami (dans un texte inédit : LE MYSTERE AT ALI, ALI BABA S’EN EST AU LIT), évoquer le disparu, les discours théoriques dès lors devenant superflus : « Pour vraiment apprécier la peinture de ce Jean AT ALI (qui veut dire en vieux Grivois : Jean est au lit), il vaut mieux qu’il ne soit pas dans le coin, parce qu’il ne parle pas de son travail, il ne parle que de cuisine juive, de femmes ou de vieux livres : il parle de sa vie coa ! C’est pourquoi les gens parfois ne savent pas regarder le vraiment vrai. Les artistes du Sud parlent trop et donnent mal à la tête aux spectateurs, collectionneurs, etcéra et que sera sera. Mais quand même y’en a qui travaillent. Moi, je vous dis : regardez ! et mettez des boules Quiès dans vos oreilles et vice versa et vers plein de vice et vers plein de pisse et vers sans saucisse… Ro beurre Con bas ».

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Jean Attali a in fine bien de la chance… Il faut à présent apprendre à l’écouter et surtout à l’entendre.

À MONTPELLIER,

À son accoutumée, Mécènes du Sud, nous entraîne jusqu’au 30 septembre, dans des univers dérangeants, en l’occurrence démangeant(s), sous la houlette de sa commissaire (Madelena PlaneixCrocker), puisque l’expo s’intitule Scabs, que l’on peut traduire par Croûtes, mot polysémique, ô combien. Sept artistes ont été conviés, la plupart tenus en éveil, notamment Eve G. Chabanon, sur bien des sujets brûlants (anti-capitalisme, critique du patriarcat, dénonciation du racisme et du colonialisme, redéfinition des genres sexués…) et quelque peu praticiens du langage (CAConrad, plasticien poète). La plupart semblent concernés par le multiculturalisme, sujet crucial pour les artistes de demain. HaYoung (2), concerné(e) par la marge multiplie les sculptures de pains récupérés, montés sur métal, et accédant à une seconde vie, prouvant que le rebut peut aspirer à d’autres buts. La croûte ouvre à une exploration d’espaces inédits, là où ça fait mal, et où le cœur voire le corps saigne. Les vidéos de Ndayé Kouagou nous confrontent, au premier plan, à des messages perturbants, sur fond de mise en scène socialisée, où l’artiste performe. La peinture n’est pas ignorée : notre Alésienne, Mimosa Echard, sait composer comme nulle autre, des tableaux incluant les objets et matériaux les plus improbables (préservatifs, couvercles, noyaux, fleurs de sa région autocollants, impression numérique, résine…). Elle se livre de la sorte à une expérience des limites physiques ou esthétiques. Les aquarelles de Tai Shani ne cachent pas leur attachement à la cause féminine dont elles présentent des cités idéales, utopies, cosmogonies, du moins leur seuil ou accès, ce que permet justement la croûte. Tarek Lakhrissi, enfin, passionné par la langue, puise dans sa culture et son intérêt pour la magie des installations combatives et guerrières. De quoi ne pas s’encroûter…

Au Frac OM et au Théâtre Kiasma de Castelnau-le-Lez, on pourra se familiariser (pour ceux qui ne connaissent pas son film sur les Twin Towers impactées), avec les photos, les vidéos, les textes et les objets de Fiorenza Menini (3), témoins de son séjour new-yorkais, dans les années 90. Cette artiste, engagée pour la cause des Femmes, fut alors quasiment l’unique interprète des mises en images qu’elle a méticuleusement conçues, profitant des conditions un peu particulières de son séjour. Elle travaillait alors par séries, empruntait vêtements et maquillages des gens qui la logeaient, n’hésitait pas à se hisser sur les toits en manteau de fourrure ou à se déguiser en femme-objet, un abat-jour en guise de tête. Le mode de vie américain, surtout celui des femmes, est quelque peu fustigé dans sa série sur Misses Freeze, laquelle réduit son espace vital aux dimensions du frigo (qui devient un cadre dans le cadre) ou dans Breakfeast, limité à la cuisine. Les problèmes de la marginalité ne sont pas oubliés avec la fréquentation des hôtels un peu louches où l’artiste joue avec les moyens du bord. Ou encore des squats dont il ne reste parfois que les vêtements laissés pour compte et eux-mêmes rejetés. Ou même sa relecture de La métamorphose de Kafka dont le héros devient un cancrelat et paria, quasiment un détritus. En fait, l’artiste fait de son corps un outil de travail, comme les mannequins ou starlettes, assume son statut de femme seule en butte à un monde pas toujours bienveillant et, de toute façon, trop gigantesque, et pas toujours humain. Une affiche en abyme d’Al Pacino dans Scarface est prise selon un angle de vue qui suggère qu’il tire sur l’artiste en sa baignoire. Le danger, masculin, guette. Elle se met en danger justement dans Up, près des réservoirs en jouant les Icare et visite des lieux peu engageants comme les souterrains de Down. Les textes sont mis dans des cartouches, les photos dans des boites d’allumettes. Une plongée dans un univers qui ne ressemble pas au rêve américain ni au traditionnel way of life dont La courte vie de Marie Smith, résumée dans une boutique de fripes, toujours un lieu dans le lieu, une cabine d’essayage, donne une idée en raccourci. Une œuvre engagée dont on découvre les prémices. Son titre Walk man, walk like a woman…

Pas loin de là, toujours à Castelnau-le-Lez, dans cet inoxydable lieu qui a vu passer tant d’artistes, l’ARPAC, on humera un parfum des années 80, grâce aux portraits d’Elise Cabanes (4), infatigable animatrice, combative, des lieux d’art (Mesdames Messieurs) et d’un groupeculte (Masoch). Le temps a passé mais le souvenir demeure, celui des rencontres avec des êtres d’exception : Laurent, Isabelle et même le Diable, en petite tenue, nonchalamment alangui. Elise Cabanes oscille entre une impression de puissance, quand elle traite des sujets sombres, tourmentés ou audacieux, une certaine empathie dont témoignent les couleurs quand elle brosse ses proches, et des effets de transparence quand il s’agit de mettre sinon de la folie, du moins de la fantaisie au motif. Le corps, et les images mentales qu’il suscite, demeure un sujet de prédilection à explorer ce qui n’empêche pas l’artiste de rendre hommage à son village d’adoption, Aubais. L’emploi du brou de noix donne une tonalité mélancolique à certains portraits, ce qui est normal puisque la vie n’en finit plus de Ne plus revenir (titre d’une œuvre).

Dans Le Gard

À l’espace culturel Jean Jaurès, de Vauvert, Jacques Barry(5) termine fin juin son exposition sur le règne animal qu’il traite avec la simplicité d’une frontalité sans arrière-plan, non sans humour, anthropomorphe, quand les cygnes jouent les Narcisse. En fait, un théâtre d’ombres chinoises et de taches colorées composent cette arche de Noé, car l’artiste privilégie les formes, variées, que l’on n’a pas l’habitude d’observer ni de considérer. Les animaux tendent à se rapprocher : les gros sont rapetissés, les petits agrandis de sorte qu’ils semblent mis sur le même plan. N’en est-il pas de même de l’homme dès lors qu’on le gratifie d’une place honorable dans le cadre d’un tableau ? Lui succèdera cet été, l’inénarrable Christian Astor (6), dans une série intitulée Le temps scellé. Des grands formats, au nombre de douze (comme l’an, ou la demi-journée), et qui se présentent en compartiments géométriques attaqués à la couleur et autres techniques graphiques. Le cloisonnement perturbe les règles focales du visiteur habitué à voir un motif se profiler. La palette, si l’on peut dire, est riche et nuancée, chaque tableau comportant un nombre de subdivisions qui mettent l’accent tantôt sur des esquisses de motifs, tantôt sur une abstraction qui va jusqu’à l’unité tonale. Si bien que l’on se demande si ces multiples tableaux dans le tableau sont des couleurs qui finissent par suggérer des paysages ou des paysages mentaux exprimés par la couleur. Le projet d’Astor est ambivalent en ce sens qu’il se mesure à la démesure de l’univers, dont l’expansion le fascine… et en même temps, il se sert de la toile pour y loger son parcours, qu’il appelle son errance colorée, à la modeste échelle de la matière, du geste humain et du corps étréci dans sa finitude foncière. Le temps scellé, ce sont ces divers moments de peinture qui se juxtaposent et dont le tableau détermine les contours.

Dans une ville taurine comme Nîmes, tout mythe impliquant un taureau ne saurait laisser indifférent. La Galerie 4, Barbier (7) s’est laissé convaincre, du côté de Barcelone, de se confronter jusqu’à la fin août, au mythe d’Europe, cette maîtresse forcée de Zeus à l’origine de la civilisation minoenne, et qui fut métamorphosée en constellation. Ça tombe bien pour Clarbous qui voue sa production de plusieurs décennies au CIEL, concept qu’il décline dans toutes les configurations et matériaux possibles, en l’occurrence ici à partir de disques, en bois peint en blanc, assortis d’un trombone démesuré, d’une constellation stellaire et de sa vision ajourée de l’Enlèvement. Cinq artistes ont été en effet sélectionnés pour se confronter au sujet, très prisé des peintres, de L’Enlèvement d’Europe Certains le traitent grâce à la figure, d’autres en jouant sur de subtils rapports d’équilibre. Tel Bruno d’Abrigeon qui transforme ironiquement un vélo en bête noire, charrette de torero, avec le drapeau d’Europe arboré avec fierté. Il ne faut en outre pas oublier la dimension politique puisque ce nom été attribué à notre continent dont certains voudraient bien s’approprier les richesses comme d’autres autrefois ont pu s’approprier par le viol une reine, un mode de vie, une esthétique. Les femmes ne pouvaient qu’être sensibles à cette thématique qui oppose la puissance sanglante et la virginité violée, transfigurée en étoile comme dans le mythe, ce que fait Béatrice Bonhomme sur une peinture compartimentée, style BD, rappelant vers le bas la scène antique et effectuant un gros plan sur le visage de l’héroïne associée au billet de 20 euros. Elisabeth Krotoff qui devrait traiter le sujet en peinture dans un triptyque et Denis VingtDeux, complètent le quintet. Mais… surprise !

DANS LES BOUCHES-DU-RHÔNE

Pendant ce temps, à Arles, la Fondation Van Gogh (8), toujours dans la perspective d’honorer l’œuvre du peintre, maudit en son époque et si apprécié aujourd’hui, à l’aune des créations contemporaines avec qui il se trouve en lien direct, mobilise les œuvres de 80 Femmes dans l’Abstraction (1940-1970). Cinq Peintures du maître ont été sélectionnées pour la qualité de son geste expressif et sont mises en perspective avec 130 œuvres, essentiellement picturales, mais également chorégraphiques (Trisha Brown, Martha Graham) ou performatives. Si certaines des artistes sont reconnues depuis belle lurette, telles Vieira da Silva, Helen Frenkenthaler, Joan Mitchell ou Niki de Saint Phalle, la plupart demeurent méconnues du grand public, même si Ana Mandieta est fêtée actuellement à la Panacée, et si Yayoi Kusama a régulièrement les honneurs de la presse spécialisée. L’exposition aura donc un double intérêt : prouver et approuver l’importance ou le rôle des femmes, sur le plan international, pendant trois décennies cruciales de l’Histoire de l’art, moderne et contemporain (1940-1970), qui auront vu l’essor puis le triomphe de l’art gestuel comme action émancipatrice et libératoire, notamment du côté féminin ; de l’autre le rôle de référence tutélaire qu’a pu jouer, avec ses modestes moyens et sa foi, son obstination et ses errements, « l’arlésien » Vincent, pour des pratiques ultérieures qui, consciemment ou pas, émanent de son expressivité, et de la puissance décisive de son geste. On découvre ou re-découvre, jusqu’au 22 octobre, ces artistes femmes de tous pays, engagées dans l’art abstrait, corporel ou calligraphique parmi lesquelles se glissent les cinq toiles moins connues de la période arlésienne de Vincent, dont deux peintes à St-Rémy-de-Provence, de dramatique mémoire.

DANS LE VAUCLUSE

Comme chaque été, la Villa Datris, à L’Isle-sur-la-Sorgue, nous offre une exposition de prestige s’articulant autour du volume et de la sculpture en général, cette année autour de Mouvement et Lumière, jusqu’au 1er octobre. Celle-ci résonne comme un triple hommage, dix ans après : au co-créateur de cette Fondation Datris, incluant au demeurant son prénom (DAniele Marcovici et TRIStan Fourtine) ; à deux mouvements-phares des années 50-60 (cinétique et optique) ; enfin à Soto qui fête ses 100 ans. L’un de ses Pénétrables nous accueille d’ailleurs à l’entrée. Le parcours comprend sept étapes et mêle les figures historiques (Julio Le Parc, Carlos Cruz-Diez, Agam…) aux générations plus jeunes (Philippe Decrauzat, Laurent Pernot, Andréa Bowers…). On passe ainsi des travaux sur les équilibres naturels, à l’instar de Susumu Shingu ou Calder, aux Lumières de la ville telles que les suggère Dan Flavin dans ses néons ; des reflets et éclats d’un Miguel Chevalier à l’œil moteur d’Ivan Navarro choisi pour l’affiche ; des hypnoses géométriques d’Angéla Bulloch (9) aux œuvres in situ d’Olafur Eliasson (biosphère), Manuel Mérida (installation hypnotique) ou Marina Apollonio (variations circulaires). Les jardins, dits mouvementés, accueillent entre autres Piotr Kowalski, Francisco Sobrino ou Gabriel Sobin. En tout, 60 artistes dont certains de renommée internationale, tels Vasarely ou Pol Bury, Morellet ou Takis, Carsten Höller ou Jenny Holzer, Keith Sonnier etc. Au-delà des grands noms, il faut considérer la variété des propositions qui jouent avec la lumière, le mouvement, la couleur à partir de matériaux modernes et appropriés. Mais surtout avec la façon dont notre esprit et notre corps se situent par rapport à ce que l’on a du mal à concevoir : la 5ème dimension de l’immatérialité. Dès lors, se rendre compte que ces phénomènes lumineux, enrichis par la technologie, ont toujours fasciné les artistes, notamment les aïeux ou bisaïeux déjà ! Et aujourd’hui encore… Scénographie de Laure Dezeuze, il importait de le dire…

Dans Le Tarn

Le Lait, à partir d’Albi, organise des expositions dont l’une sur les berges du Tarn, au pied du palais de la Berbie. David Coste(10), qui investit également le Frigo, revendique l’isolement insulaire en occupant des espaces végétaux en cœur de ville et invite les gens à un parcours inattendu. Pour ce faire, il propose des constructions, des abris de fortune et y associe des impressions numériques, de manière à conserver l’ambiguïté Réalité/Fiction. Non seulement ses interventions renvoient les promeneurs à un type de vie naturel, dont il n’a sans doute pas conscience, mais elles peuvent jouer les lanceurs d’alerte imaginaire, et préparer à l’éventualité de tester ses capacités de survie, dans un cadre moins urbain plus autonome. Il s’agit aussi de détourner l’image publicitaire à des fins artistiques. Toujours est-il que Les Îles voyagent elles aussi, et les interventions de l’artiste en sont comme les équivalents. Seules les montagnes ne se déplacent pas et encore. Qui connaît l’œuvre de David Coste sait qu’il serait bien capable de les mettre en mouvement. Au Château du Cayla, Romain Gandolphe(11), invite jusqu’au 15 septembre, le visiteur à se faire lecteur d’un volumineux livre d’images et de textes, en lequel il doit s’immerger physiquement. Cet artiste performatif joue depuis longtemps avec parole, transmissible, dans son rapport à la mémoire plus ou moins lointaine : il confie des secrets, raconte les événements de la veille, se remémore les décors de l’an révolu… À Andillac, il sollicite ses lectures d’auteur(e)s fondamentaux, essentiellement des femmes, dont Virginia Woolf et Virginie Despentes, et les fait tou(te)s dialoguer dans une perspective prospective, et souvent critique. Pour nous faire entrer dans Le corps du texte. Et en ressortir tout imprégné, ébranlé, peut-être tatoué. Peut-être dé-livré… Omniprésente cet été dans notre région (Villeneuve-lèz-Avignon, Les Matelles, Galerie Barrès il y a peu…), Lucie Laflorentie(12) révèlera jusqu’au 15 septembre, les œuvres réalisées en résidence au Musée des Métiers du Cuir de Graulhet. On sait que son travail s’articule autour de sa conception d’une matière associée à un geste, qui finissent par construire un paysage. La douceur des coloris semble une constante chez elle et prend des tonalités nostalgiques. Il sera intéressant de voir comment sa perception contemporaine se conjugue à une activité avant tout artisanale et quels aspects, grain, couleur, format ou fonction de l’objet, ont retenu son attention. Par ses origines, Lucie Laflorentie est sensible aux témoignages d’un passé qui parfois se perd et qu’elle contribue à ranimer.

Au Musée d’Histoire naturelle de Gaillac, Laurent le Deunff(13) (vu au Mrac), s’est mesuré aux collections, tout en rendant hommage jusqu’au 5 novembre, à son créateur, Philadelphe Thomas, au Livre de la Jungle et aux Monty Python. L’artiste recrée, sous forme de Cabinet de curiosités, des parodies d’objets ou animaux, totems ou grosses pierres, plus vraies que nature (colliers de dents, trompe d’éléphant nouée, champignonnière de pierres…) et nous plonge dans une relecture de notre passé le plus archaïque non sans humour. L’hybridité des associations d’idées le lui permet. Les sculptures sur bois confinent au totem et paraissent plausibles tandis que le carton-pâte rappelle les décors de cinéma et donc la fiction. Ainsi le visiteur sera confronté aux sciences naturelles et à ses aspirations à la vérité absolue d’un côté, tandis que Le Deunff invite, dans les salles temporaires, à une autre vision du monde, relative, qui n’a pas de prétention à l’universalité mais celle de distraire, de relativiser, de brouiller les cartes. Et de témoigner des obsessions et interrogations de son temps, de l’intérêt de l’art pour les autres disciplines, lesquelles après tout ont beaucoup à nous apprendre, ne serait-ce que sur le concept de Collection. Les enfants, et ceux qui le sont restés, seront sensibles à ces propositions, décalées, d’un univers qui se prête à l’imaginaire comme il se prêta jadis, aux temps des bisons et des mammouths, à l’enfance de l’art : ours mal dégrossi, castor ce grand bâtisseur avec sa queue de sirène, chauve-souris à corps d’écureuil… Les sujets d’étonnement ne manquent pas…■

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