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Guerre et Paix

C ourtoisie: Claude Cossette

Guerre et paix forment une paire d’idées inséparables. Sur ce thème, le grand écrivain russe Léon Tolstoï a écrit un chef-d’œuvre, Guerre et Paix. De ces deux mots, le romancier Gilbert Cesbron a plutôt constitué une paire morbide: «La guerre, écrit-il, c’est quand on attend la mort du dehors; la paix, c’est quand on l’attend du dedans».

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LA GUERRE DANS LES NOUVELLES

Les drames forment la trame quotidienne des médias, traditionnels ou numériques. Ce sont les meurtres, viols et autres tragédies (de même que les anecdotes du spectacle ou du sport) qui suscitent l’intérêt des citoyens ordinaires. La paix éveille peu d’attention. La recherche a révélé que plus les gens suivent les nouvelles, plus ils pensent les tragédies imminentes et plus ils se sentent en insécurité. Le journaliste Johan Norberg rapporte: «Une étude réalisée à Baltimore montre que 73 de ceux qui regardent le téléjournal tous les jours ne sortent jamais en ville le soir [par peur]. Presque tous ces répondants pensent que le nombre de crimes augmente». Les accros des nouvelles nourrissent leur anxiété avec les drames qui se produisent. Pourtant, le monde est beaucoup plus sécuritaire maintenant que jadis. Les Nations Unies rappellent: «À l’échelle mondiale, le nombre absolu de victimes de la guerre n’a cessé de diminuer depuis 1946 ». Dans La Part d’ange en nous, le linguo-psychologue montréalais Steven Pinker rappelle: «Au cours des quatre dernières décennies, le taux annuel de viols a baissé de 80, passant de 250 à 50 par 100 000 personnes. En réalité, ajoute-t-il, la baisse a peut-être été plus importante dans la mesure où il est quasiment certain que les femmes sont maintenant davantage disposées à signaler les agressions à caractère sexuel». Même 50 viols, c’est trop. Néanmoins, il faut arrêter de penser que le mal progresse. C’est la paix qui progresse, pas la guerre. Il y a moins de guerres transnationales et moins d’hostilités sociales. En Europe, par exemple, le taux d’homicide est passé annuellement de 100 par 100 000 habitants au 14e siècle, à 10 au 17e siècle et à un seul de nos jours, rapporte Pinker. Dans le monde de nos parents, la violence était endémique alors que maintenant, c’est la paix qui se répand. Lentement mais sûrement… comme le parfum du lilas au printemps.

LA PAIX DANS LES CŒURS

Pourquoi y a-t-il moins de violence et plus de paix? Pinker démontre de manière convaincante que c’est dû «à l’essor de la démocratie, aux échanges entre les peuples, à l’appartenance à des organisations internationales, au fait que la guerre ne suscite plus l’admiration, au respect croissant des droits de la personne, aux bienfaits de l’éducation et à l’influence accrue des femmes». Même si cette dernière reste encore insuffisante, ajoute-t-il. Il reste toujours du travail à faire pour que la paix gagne du terrain et perdure. On peut y œuvrer au sein des opérations de paix des Nations Unies, mais on peut surtout — et facilement! — travailler à la paix des cœurs, à ce que la paix se raffermisse dans son propre entourage en agissant avec prudence et en œuvrant à la conciliation. On peut encore travailler à être en paix avec soimême. Il ne sert jamais à rien de se tourmenter, s’engueuler, se déprécier, se détester. Il vaut mieux investir dans l’avenir: viser à être plus juste plutôt que se blâmer d’avoir été injuste, planifier des gestes de générosité plutôt que se morfondre d’avoir été égoïste, s’entraîner au respect des personnes plutôt que se flageller d’avoir été grossier. Travailler sur soi, c’est aussi travailler à la paix à laquelle tous les humains rêvent. Dans un texte qui a été maintes fois transformé et également mis en chanson, le poète et dramaturge Paul Fort a évoqué le rêve de paix qu’entretiennent tous les humains:

«Si toutes les filles du monde voulaient s’donner la main Tout autour de la mer, elles pourraient faire une ronde Si tous les gars du monde voulaient bien êtr’marins Ils f’raient avec leurs barques un joli pont sur l’onde. Alors on pourrait faire une ronde autour du monde Si tous les gens du monde voulaient s’donner la main.»

CLAUDE COSSETTE

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