Retrouver la paix

Le 3e cabinet du gouvernement

Trudeau a pris forme cet automne, et un vent de fraîcheur a soufflé sur le ministère de la Défense nationale. Une nouvelle ministre et un nouveau chef d’état-major (CEMD) ont été attitrés. Le député fédéral conservateur Pierre Paul-Hus souligne qu’il était grand temps. Lorsqu’un changement de culture s’impose, l’exemple à suivre ne peut venir que d’en haut.

Depuis février 2020, 11 dirigeants militaires, retraités ou en service font face à différentes allégations d’inconduites sexuelles. Certains occupaient des positions de prestige au sein de la Défense, notamment le général Vance, ancien CEMD. Il devenait difficile pour M. Trudeau de maintenir en poste l’ancien ministre, Harjit Sajjan. Les scandales se sont multipliés sous sa gouverne au cours des deux dernières années. Sa crédibilité a été durement mise à l’épreuve, sa promiscuité avec le général Vance souvent questionnée. Le premier ministre a également été critiqué sur la gestion de cette crise. Il devait faire un geste politique important, surtout dans un contexte de gouvernement minoritaire. Nouvellement choisie, la ministre de la Défense Anita Anand envoie un message annonciateur de changement. Sa prise de position ne s’est pas fait attendre. Elle applique l’une des recommandations de l’enquête indépendante sur le harcèlement et l’inconduite sexuels au sein des forces armées canadiennes (FAC). C’est l’ancienne juge de la Cour suprême, Mme Arbour, qui avait le mandat de mener cette investigation. Cette dernière indique que les enquêtes doivent être menées de façon indépendante, en dehors du système de justice militaire, ceci afin de favoriser une plus grande transparence et minimiser l’ingérence de la chaîne de commandement. Le député fédéral conservateur Pierre Paul-Hus voit d’un bon œil la nomination de la nouvelle ministre. «C’est une femme brillante. Elle a l’expérience requise pour bien comprendre et diriger la transition complexe du système légal d’enquête militaire vers les tribunaux civils», explique le député en entretien téléphonique avec La Quête1 . Il s’interroge toutefois à savoir si elle saura diriger adéquatement les aspects militaires de son ministère. «Est-ce qu’elle va être une bonne ministre de la Défense au niveau de la défense pure, ça, c’est une autre histoire». Bien que les scandales d’inconduites aient monopolisé les manchettes, il reste beaucoup de dossiers importants à régler. «L’institution est maganée», ajoute-t-il.

UNE SOLUTION À DEUX VOLETS

La ministre doit pouvoir s’appuyer sur un leadership militaire fort si elle souhaite redresser la barre avec succès. M. Paul-Hus mentionne «qu’avec le cas du général Vance, la chaîne de commandement a eu un problème d’éthique, de comportement. Ça s’est mis à descendre et là, le politique n’a pas été capable de reprendre le contrôle de tout ça.» Afin d’apporter les changements requis, deux aspects sont à prendre en considération. D’abord, le volet politique pour lequel Mme Anand est responsable. Les premiers mois de son mandat vont donner le ton en ce qui a trait aux directives qui seront mises de l’avant. Ensuite, le volet militaire. Il sera de la responsabilité du général Eyre d’appuyer les politiques mises en place. Il aura aussi à faire passer le message aux membres des FAC. La confiance des militaires envers leur leadership sénior est fortement ébranlée. Les deux derniers CEMD ont été incapables de prêcher par l’exemple. Un malaise difficile à gérer. Reste à voir si cet apport de sang neuf pourra faire une différence. Il serait peut-être temps de tourner la page, de permettre aux membres de cette organisation de travailler à nouveau en paix.

PHILIPPE FORTIN

«C’est la débandade pas mal là. Il y a beaucoup de monde qui démissionne. Ils sentent qu’il n’y a plus beaucoup de cohésion dans l’organisation», partage Pierre-Paul-Hus, député fédéral conservateur.

1Au moment de l’entretien téléphonique avec le député fédéral, il n’y avait pas encore eu de nomination au poste de CEMD. Le 25 novembre dernier, le général Wayne Eyre est nommé. Il occupait déjà le poste de façon intérimaire depuis presque un an.