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Avoir la paix… à quel prix ?

Sacre-moi la paix. J’veux la paix Je me sens en paix. La Sainte Paix. Ces expressions font partie du langage courant. Si ces dernières ponctuent autant notre langue, c’est parce que cette fameuse option de paix comporte de nombreuses facettes. Que ce soit en référence à la conservation d’un équilibre intérieur ou à une relation interpersonnelle saine, la recherche de la paix se fait conjointement avec les autres et avec soi-même.

La pandémie et les confinements à répétition ont mis la santé de plusieurs personnes à rude épreuve. Les listes d’attentes qui n’en finissent plus, couples séparés, pertes d’emplois et les réorientations de plus en plus fréquentes: dans toute l’effervescence du présent, Louis-Pierre Tessier, enseignant de la technique de méditation pleine conscience, insiste sur l’importance d’être en contact. Au lieu de s’attarder à ce qui divise, il faut plutôt axer le regard «sur ce qui nous unit», précise-t-il. Cette idée fait écho à trois besoins fondamentaux que mentionne Geneviève Beaulieu-Pelletier, psychologue: l’autonomie, le sentiment de compétence et l’appartenance. Alors que se refermer sur soi-même lors d’une épreuve pour se protéger est courant, il faut plutôt prendre conscience des mécanismes qui nous poussent à nous replier. Chercher à développer un sentiment de communauté. La pandémie a amené de nombreuses personnes à ralentir leurs rythmes de vie, et ce tempo, plus lent nous permet de choisir avec qui partager les bons moments.

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LA TYRANNIE DU POSITIF

Toutefois, «la réalité n’est pas parfaite», indique Mme Beaulieu-Pelletier. Les connotations péjoratives associées aux émotions comme la peur et la tristesse peuvent engendrer un refus de les vivre. La psychologue souligne que ce sont des signaux essentiels pour une expérience entière de la réalité. L’adage ce qui ne nous tue pas, nous rend plus forts, bien que surexploité, fait écho à la résilience. Faire face aux obstacles permet un avancement personnel. Cette tyrannie du positif est aussi observable sur les médias sociaux. La culture de performance du bonheur — être heureux, c’est réussir sa vie — entraîne une surenchère du bien-être. Une publication mettant en scène un couple heureux accompagné d’une déclaration d’amour, image banale et courante, mais qui transmet cette idée que de montrer notre bonheur aux autres le rend tangible. Selon la psychologue, la comparaison nous «vide de l’essence des relations». Certaines personnes décident ainsi de délaisser les réseaux sociaux afin de se reconnecter avec autrui, au lieu d’entrer dans une éternelle comparaison biaisée et néfaste pour l’estime de soi.

ÉLIZABETH JEAN-ALLARD

CULTIVER SA PAIX

Entre bonheur surreprésenté et malheur relégué aux oubliettes, la recherche d’un équilibre et de la paix intérieure passe par l’incorporation de toutes les émotions. La méditation préconisée par Louis-Pierre Tessier [la méditation pleine conscience] consiste sommairement à «ramener l’attention sur un objet». Souvent portée sur la respiration, l’attention peut aussi être orientée sur l’instant présent. La méthode dite pleine conscience se veut une technique pour «être conscient de l’instant présent», indique M. Tessier. Pour se sortir de l’anxiété et du stress, habituer son esprit à se concentrer sur certaines choses plutôt que d’autres. La pandémie a aussi permis de normaliser le besoin d’aller chercher de l’aide auprès de professionnels de la santé. Ce n’est pas la crise sanitaire qui a créé toute cette détresse, mais elle a plutôt facilité la réalisation que le malêtre était déjà trop bien incrusté dans le quotidien. Il y a possibilité de voir cette période comme une opportunité de changement positif. La quête de la paix intérieure est une expérience personnelle. Elle se cultive par l’entremise de la notion de plaisir. Est-ce que danser dans la cuisine, lire un livre ou monter le son de la musique peut faire une différence? La pandémie a été intense en changements, et aussi en réflexion. Pour apaiser le chaos interne, les petites choses font la différence. LouisPierre Tessier et Geneviève Beaulieu-Pelletier s’entendent pour dire que la paix se trouve dans un équilibre entre l’intérieur et l’extérieur, le personnel et le social.

: Antonio Lopez pour Pixabay Crédit photo

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