Un voyage à travers le temps
La renaissance d’une maison du XVe siècle à Peyriac-Minervois.
Au cœur des ruelles pittoresques de Peyriac-Minervois, une demeure en pierre du XVe siècle, située au 16, rue de la Ville, attire l’attention. Ce bâtiment, témoin silencieux de l’histoire, fait l’objet d’une restauration méticuleuse menée par un couple suédois passionné, fondateurs du projet husifrankrike.com.
Leur ambition, redonner vie à chaque pièce en respectant les techniques de construction historiques, tout en intégrant des éléments de confort moderne et des solution durable.
Peyriac-Minervois : un village chargé d’histoire
Situé à proximité de Carcassonne dans le département de l’Aude, au cœur de l’ancien pays cathare, Peyriac-Minervois possède une histoire médiévale riche, bien
que discrète. Son nom, issu du latin Petra (la pierre), témoigne de la présence de carrières locales qui ont joué un rôle économique important dès le Moyen Âge.
Au XIe siècle, la région est sous l’influence des seigneurs du Minervois, une terre de passage entre Carcassonne et Minerve. Peyriac devient alors un petit bourg fortifié, regroupé autour d’un château féodal aujourd’hui disparu.
Durant le XIIIe siècle, la région est profondément marquée par la croisade contre les Albigeois (ou cathares). Bien que Peyriac ne soit pas un des lieux majeurs du conflit, sa proximité avec Minerve, assiégée en 1210, laisse penser que le village a connu tensions et bouleversements. À la suite de la croisade, le pouvoir royal français renforce sa présence dans le Languedoc, affaiblissant les seigneuries locales.
L’économie médiévale de Peyriac repose sur l’agriculture, la viticulture et l’artisanat. Le bourg accueille probablement des marchés et de petits ateliers, et les maisons médiévales en pierre témoignent encore aujourd’hui de cette activité. Certaines possèdent des éléments architecturaux caractéristiques, comme des encorbellements, des fenêtres à meneaux, ou des traces de vitraux. Peyriac-Minervois conserve donc les empreintes discrètes mais persistantes d’un passé médiéval, enraciné dans les structures féodales, les bouleversements religieux, et la vie quotidienne d’un village du Languedoc. La maison en restauration s’inscrit dans ce patrimoine, offrant une immersion dans l’architecture et le mode de vie du Moyen Âge.
1498 Une maison, six siècles d’histoire
Depuis le début de notre projet de rénovation, la recherche de l'histoire de la maison est devenue une aventure passionnante et éducative. Depuis les premiers contacts avec les archives de Carcassonne jusqu'à la visite de l'archéologue médiéval Frédéric Loppe, nous avons progressivement compris que notre maison pouvait avoir été construite dès 1498. Grâce aux analyses dendrochronologiques (réalisées à l'Université de Lund), à l'histoire du village et aux avis d'experts, nous avons choisi de retenir provisoirement cette date comme point de départ de la construction.
L'année 1498 fut riche en événements, en France et dans le monde entier. En France, Louis XII monte sur le trône après la mort de Charles VIII. À PeyriacMinervois, un nouveau château est projeté et la technologie militaire se développe rapidement. Au même moment, Christophe Colomb entamait son troisième voyage vers le Nouveau Monde, Léonard de Vinci achevait La Cène et Machiavel entrait en politique. En Suède, le roi Hans (Johan II) régnait, tandis que Sten Sture l'Ancien dominait toujours la scène politique.
Vivre aujourd’hui dans une maison vieille de 520 ans ou plus et la restaurer avec soin nous remplit d’humilité et de fascination – une rencontre entre le Moyen Âge et notre époque, où chaque pierre raconte une histoire.
L’aménagement de la maison
La maison, qui s’élève sur trois niveaux, était autrefois deux fois plus grande et faisait partie intégrante de la propriété voisine (n°18). Le rez-de-chaussée comprend actuellement trois pièces ainsi qu’une petite cour.
Ces espaces seront aménagés en un hall d’entrée, une cuisine avec coin repas, et une chambre d’amis. À l’étage se trouvent un grand hall, une chambre et un petit WC. Enfin, les combles abritent une vaste pièce ouvrant sur une terrasse récemment construite.
La
salle
de bains une alliance de tradition et de modernité
Autrefois hall d’entrée, cette pièce a été transformée avec soin en salle de bains. Le sol est revêtu d’un carrelage artisanal réalisé sur mesure, et une douche élégante a été installée, avec un receveur en pierre locale. La plomberie, en fonte encastrée, est équipée de mitigeurs au design sobre et intemporel.
Les murs sont enduits de tadelakt, une ancienne technique marocaine qui crée une surface imperméable et naturellement élégante. Les équipements sanitaires, parmi les plus performants d’Europe, sont conçus pour minimiser la consommation d’eau. Un chauffe-eau importé de Chine, doté d’une pompe à chaleur, permet de réduire considérablement la consommation énergétique.
La cuisine un retour aux sources culinaires
La cuisine, en cours d’achèvement, reflète une authenticité soignée. Le sol est habillé d’un carrelage en terre cuite, posé au mortier de chaux avec des joints en sable et chaux, selon des techniques traditionnelles.
Les armoires et les portes d'armoires seront fabriquées en chêne suédois, tandis que les linteaux en bois anciens ont été soigneusement restaurés. Les finitions sont réalisées à la chaux, sans ajout de plastifiants modernes.
Un lustre en fer forgé, de style médiéval, vient compléter l’atmosphère chaleureuse et intemporelle de la pièce. Une armoire murale encastrée, datant du début des années 1900, a été soigneusement restaurée dans le respect de son caractère d’origine.
La chambre du rez-de-chaussée à la sobriété et au confort médiévaux
La chambre du rez-de-chaussée a été rénovée avec soin. Le sol est revêtu d’anciens carreaux en terre cuite, tandis que les murs seront revêtus d’un enduit teinté d’un sable jaune chaleureux, laissent apparaître par endroits la pierre d’origine, ajoutant du caractère à l’ensemble.
Une fenêtre des années 1950 et une porte donnant sur la cour, datant des années 1920, ont été restaurées avec attention, témoignant des différentes époques de transformation de la maison. Le plafond présente de nouvelles poutres apparentes qui seront peintes à l'huile dans une teinte brun chêne,renforçant l’atmosphère chaleureuse et authentique de la pièce.
Le premier étage avec la salle médiévale revisitée
Au premier étage, le grand hall de 20 m2 (représentant la moitié de la surface d'origine avant la division de la maison) accueille les visiteurs dans une atmosphère chargée d'histoire.
Elle est décorée de magnifiques poutres apparentes de la fin du XVe siècle, de murs en pierre brute et de maisons à colombages typiques de l'architecture médiévale. Plusieurs marques de maître se retrouvent sur les poutres, témoins silencieux du passage du temps. Une tapisserie de style médiéval viendra bientôt enrichir l'ensemble et souligner encore davantage le caractère historique du lieu.
Au cours de nos travaux, nous avons découvert une vieille fenêtre murée avec un banc en pierre : un vestige rare du Moyen-Âge. Nous prévoyons de le restaurer soigneusement et d'installer des vitraux pour lui redonner sa gloire d'antan.
Une petite salle de bain sera également rénovée, dans le même esprit que celle du rez-de-chaussée, avec des matériaux nobles similaires. Il sera discrètement dissimulé derrière une porte peinte en trompe-l'oeil, préservant l'esthétique harmonieuse de l'espace.
Enfin, à l'étage se trouve une chambre chaleureuse, avec un parquet en douglas récemment posé selon les techniques traditionnelles, avec des clous en fer forgé. Des murs blanchis à la chaux et un plafond peint –
représentant un ciel étoilé traversé par les signes du zodiaque locaux – donneront à cette pièce une atmosphère poétique et intemporelle.
Le grenier et la terrasse : une touche du XVIIIe siècle
Le grenier, situé au deuxième étage, sera aménagé dans un style du XVIIIe siècle avec des couleurs vives. Il comprendra une chambre principale spacieuse et un espace bureau. Le sol en plancher de peuplier, très ancien (peut-être du XIVe siècle), sera partiellement couvert pour corriger son inclinaison, tout en laissant une fenêtre de 1 m² pour admirer le sol d’origine.
Après l’achat de notre maison, l’idée de créer un patio a commencé à germer doucement. Ce désir s’est affirmé au fil du temps, notamment après que nos amis vivant sur la côte atlantique nous ont partagé à quel point un espace extérieur leur était précieux.
Nos premiers échanges avec les services du patrimoine (STAP) nous ont appris qu’une terrasse ouverte était strictement interdite dans le centre historique de notre village. En revanche, la possibilité d’un pigeonnier ou d’une loggia pouvait être envisagée.
Trois mois plus tard, nous avons reçu une réponse à notre demande. Grâce aux magnifiques dessins réalisés par notre ami architecte suédois, deux versions élégantes ont été proposées… et, à notre grande joie : le projet a été accepté !
Au printemps 2016, nous avons fait appel à un ami artisan d’Apex, expert en techniques médiévales et en construction durable. Son devis dépassait légèrement notre budget initial, mais restait en phase avec nos ambitions. Fidèles à notre engagement pour un chantier éco-responsable, nous avons choisi de construire la structure entièrement en bois médiéval réutilisé, récupéré sur l’ancienne toiture. Le résultat est une œuvre singulière, profondément enracinée dans l’histoire du lieu et en parfaite harmonie avec l’esprit de la maison.
Une stratégie durable et locale avec matériaux organiques et locaux
Nous privilégions l'utilisation de matériaux provenant de fournisseurs locaux et respectueux de l'environnement tels que la chaux, les tuiles en terre cuite, l'ardoise
locale et la pierre de taille. Tous les bois proviennent de forêts voisines ou recyclés à domicile, exclusivement non traités ou traités avec des produits naturels tels que la cire ou l'huile végétale, sans solvants ni plastiques.
Les matériaux produits biologiquement comme le chanvre offrent d'excellentes propriétés thermiques et hygroscopiques, des détails intérieurs écologiques, des couleurs naturelles sans solvants pétrochimiques ni métaux lourds, favorisant la régulation de l'humidité et une meilleure qualité de l'air intérieur. Absence totale de PVC.
Tous les appareils électroménagers et sanitaires installés sont conformes à la nouvelle classe énergétique européenne A (très haute efficacité).Les matériaux utilisés proviennent majoritairement de fournisseurs locaux et sont durables, chaux aérienne, tomettes, ardoises locales, pierres de taille, bois des forêts voisines recylé de la maison.
Utilisation seulement de bois non traité, finitions à la cire ou huile naturelle, sans solvants ni plastiques. Pas de PVC et suelmet des peinture eco. tous les appareils électroménagers et sanitaires de classe A de l'UE.
Une maison où l’histoire s’anime
A l'occasion des prochaines fêtes médiévales de Peyriac-Minervois, notre ambition est que notre maison s'inscrive dans les événements et se transforme en un véritable lieu de vie dédié à la rénovation historique et au tourisme durable. Il incarne un modèle vivant de restauration du patrimoine où les matériaux soigneusement sélectionnés respectent les traditions locales et interagissent harmonieusement avec le savoir-faire des artisans de la région.
Grâce à des recherches et une documentation historiques en cours, et éventuellement avec le soutien de la réalité augmentée (AR), les visiteurs pourront suivre l'histoire vivante d'un site antique, réinvestie, pour une immersion totale au Moyen Âge. Ce projet se veut un acte à la fois anthropologique, éducatif et communautaire, transformant la maison en un centre d’inspiration, une vitrine de techniques patrimoniales authentiques et un lieu de rencontre enrichissant.
Nous espérons que le résultat sera un véritable voyage dans le temps où l’architecture patrimoniale prendra vie et s’inscrira dans une démarche collective, offrant une expérience mémorable pour tous.
Sources: Husifrankrike.com en suèdois mais ici à découvrir en Google français
Mon village entre les deux guerres la vie quotidienne à Peyriac-Minervois
Le castrum de Peyriac-Minervois article scientifique du Dr. Frédéric Loppe
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