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POLITIQUE

Casque bleu, un combat pour la paix

© AFP/Roberto Schmidt

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Le 10 mai dernier, trois soldats sont morts au Mali. Trois Casques bleus issus de la mission Minusma. Soldats Onusiens venus pour conquérir la paix, ils affrontent la guerre et subissent la mort. Zoom sur ce rôle hors du commun.

Nés des cendres d’une guerre. Les Casques bleus symbolisent un espoir de paix durable qui voit le jour suite à la Seconde Guerre Mondiale. Bras armé de l’ONU, anciennement les Nations Unies, cette force de maintien de la paix est mandatée en 1948 pour la 1ère fois en tant qu’observateur, lors du conflit Israélo-palestinien. 10 années plus tard, elle opère pour la première fois comme force militarisée lors de la crise du Canal de Suez. C’est de ce conflit armé que ces militaires, policiers et techniciens tireront leur nom, « les Casques bleus », un moyen de se différencier des autres belligérants.

72 années après la création de l’ONU, environ 3500 Casques bleus ont perdu la vie. 70 opérations dont 14 encore en cours aux quatre coins de la planète ont servi un intérêt commun. Des chiffres marquants qui masquent le travail faramineux des femmes et des hommes de l’ombre qui ont fait de la paix, leur combat.

Celhia de Lavarene Journaliste corespondante au siège de l’ONU à New-York

Quelle image aviez-vous de ces troupes avant de faire leur connaissance ?

Je n’avais pas vraiment d’image, seulement deux mots : Nations. Unies. Des Hommes au service d’une cause, qui devaient se battre pour l’intérêt du monde et des populations. Évidemment j’étais naïve. Lorsque l’on arrivait dans un pays, nous étions considérés comme des sauveurs. Et puis très vite ça se dégrade (abus sexuels qu’elle dénonce dans son livre « Les étoiles avaient désertés le ciel). On devrait participer à la reconstruction des pays, malheureusement d’autres intérêts entrent en jeu.

Quelle est leur utilité réelle sur le terrain ?

Tout dépend de la mission. En principe, les Casques bleus ne doivent pas se faire tuer et ne sont donc pas envoyés dans des pays en guerre. Au cours de sept missions que j’ai pu effectuer, notre unique but est de restaurer la paix. En 2004, je suis allée au Libéria. J’ai eu la chance inouïe de travailler avec Jacques-Paul Klein. C’était un directeur de mission qui faisait tout pour réussir, ce n’était pas un béni oui oui. Un jour, il s’est vêtu de sa tenue militaire, est monté sur un char et s’est muni d’un mégaphone pour parler aux émeutiers « nous allons vous tirer dessus, nous sommes mieux armés, c’est ce que vous voulez ? ». Étrangement, les combats se sont arrêtés. Il était border line et pas réglementaire, mais nous avons instauré la paix dans le pays. Ce sont ces individualités que vous retiendrez ?

Les personnalités que j’ai rencontrées m’ont changée. Les trois quarts des gens qui travaillent pour l’ONU sont formidables. Kofi Annan fait partie de ces magnifiques rencontres. C’est quelqu’un de fidèle qui m’a toujours écouté et qui portait en lui, les valeurs de l’ONU. Sergio de Mello était l’un d’entre eux. Avoir travaillé avec un homme qui donne tout pour la paix, y compris sa vie puisqu’il a été tué en Irak, est pour moi une fierté. Doit-on faire usage de la violence pour obtenir la paix ?

la possibilité de se défendre et de tirer si on les attaque. L’ONU a une force de frappe gigantesque avec ces 100 000 militaires et policiers venus de 120 pays différents. La réalité du terrain et non celle de la bureaucratie montre qu’il faut… avoir des couilles. Quel intérêt pour ces 120 pays d’envoyer des troupes au service de l’ONU ?

Tout d’abord, une motivation financière. Chaque pays qui envoie des Casques bleus reçoit 1 428 dollars de l’ONU par individu. Ensuite, lorsque le Rwanda ou la Bosnie ont envoyé des militaires cela signifiait que la paix était restaurée dans le pays. Cela donne une réelle légitimité diplomatique et une fierté nationale. Maintenant, envoyer des personnes avec une éthique et un respect des valeurs serait mieux... La paix n’est-elle pas qu’une simple utopie ?

L’ONU et les Casques bleus ont été créés pour que plus jamais…plus jamais. Deux millions de morts au Cambodge, 800 000 au Rwanda, 380 000 en Syrie. Je ne suis pas utopiste, j’ai perdu mes illusions. Malgré tout, je me demande ce que serait le monde sans l’ONU et tristement, je pense qu’il ne serait pas meilleur.

Propos recueillis au téléphone par Ugo Maillard

L’HISTOIRE CONTINUE La fonte des glaces révèle des trésors vikings

Comme évoqué dans un ancien numéro de Decrypt’Age, la fonte des glaces arctiques met à jour de surprenantes trouvailles, pour le meilleur comme pour le pire. Direction la Norvège cette fois où une équipe de chercheurs scandinaves a pu découvrir des vestiges vikings d’une conservation exceptionnelle. En fait, cela fait dix ans que le glacier Lendbreen révèle, en se retirant, des sites archéologiques cruciaux pour la compréhension du passé de l’Homme. Pour la première fois en ce début du mois de mai, la revue scientifique Antiquity en a fait l’inventaire. Résultat : plus d’un millier d’objets ont été répertoriés. On a découvert des restes humains, des flèches, des traîneaux ou encore des raquettes de neige.

Les trouvailles sont aussi variées qu’inattendues, comme en témoigne ce sabot de neige d’un cheval vivant au XIe siècle, resté figé dans la glace. L’analyse de tous ces items a permis aux scientifiques de révéler l’existence d’un long couloir de voyage, emprunté dès l’âge de Bronze jusqu’au Moyen-Age. La cessation d’activité sur les lieux coïncide parfaitement avec l’arrivée de la peste noire, qui a ravagé le continent européen au milieu du XIVe siècle. Une note qui fait étrangement écho à l’actualité…

© Espen Finstad

Ces récentes découvertes témoignent d’une triste accélération du réchauffement climatique. Un élément qui n’a pas manqué de contraster la joie des découvreurs, comme s’ils avaient préféré ne pas mettre à jour ces objets. Alors oui, il s’agit là d’une avancée majeure pour les sciences historiques, «mais à quel prix ?», a témoigné Lars Pilo, co-auteur de l’article «Crossing the ice: an Iron Age to medieval mountain pass at Lendbreen, Norway», paru dans Antiquity. Aujourd’hui, un large nombre d’archéologues s’attendent à une intensification des découvertes du genre, tandis qu’un consensus scientifique s’est formé quant à la probable réapparition de bactéries et virus millénaires, parfaitement conservés dans la glace. Entre espoirs d’historiens et craintes de scientifiques, l’avenir du monde moderne et la compréhension des civilisations passées se jouent probablement sous les 33 millions de kilomètres carrés de glace répartis sur Terre.

Léo Mourgeon

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