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PRIX public : 3 500 F CFA | Zone europe : 4.0 € | Maroc : 45 dh

N° 16 • octobre-novembre-décembre 2015

Crowd funding une aubaine pour les start-up africaines

Dr. Ibrahim Abouleish Fondateur de Sekem Holding

business case

‘‘L’ agriculture biologique, un levier incontournable pour résoudre des problèmes sociétaux ’’

sekem. Le développement durable, tremplin vers l’emergence Enseignement supérieur. L’Afrique se connecte aux Mooc


Pensez à vos cadeaux d’entreprise de fin d’année !

Avec Managentsia, ID. manager diffuse une information synthétique de qualité avec des outils qui permettent aux chefs d’entreprise de réfléchir et d’agir autrement.


Destination… Changement ! À la veille de son cinquième anniversaire, «African Business Journal» évolue pour être encore plus pratique et utile. Nous avons ainsi créé de nouvelles rubriques, car beaucoup de nos lecteurs et annonceurs souhaitaient une plus grande lisibilité tant la matière est riche. C’est ainsi que nous avons opté pour une réorganisation de votre revue autour de 7 nouveaux Cahiers : «African Entrepreneurship Journal», «African Technology Journal», «African International Journal», «African Management Journal», «Les Transforma@teurs», «African Sectoral Journal» et «African Finance Journal». Les autres rubriques sont maintenues en l’état. Gageons que cette nouvelle organisation rencontrera et répondra à vos attentes.

Alioune GUEYE

Sekem en tant que modèle de transformation illustre pratiquement ce à quoi peut ressembler la transformation durable du continent

Dans ce dernier numéro de l’année 2015, nous vous gratifions d’un «Business Case» exceptionnel d’une entreprise emblématique égyptienne qui illustre ce que doit être la transformation en Afrique. Fait exceptionnel, le fondateur de Sekem, Dr Ibrahim Abouleish, nous a accordé en exclusivité un grand entretien qui vous aidera à décrypter les clefs de succès de Sekem. L’intérêt de cette success-story est multiple. En premier lieu, il démontre que l’on peut réussir en Afrique dans l’agriculture (entrepreneuriat agricole) ; en second lieu, il confirme la réplicabilité du modèle ; et enfin, mais surtout, il illustre pratiquement ce à quoi peut ressembler la transformation durable du continent. Sur ce dernier point, Sekem est un modèle de transformation qui repose non seulement sur l’appropriation des codes de marché et l’insertion dans les chaînes de valeur mondiales, mais aussi sur le principe de ne rien renier de nos dynamiques sociologiques qui prônent l’équilibre et la responsabilité tant individuelle que collective dans la préservation de l’environnement. En cela, il incarne parfaitement l'esprit de la théorie de «l’encastrement» de l’économiste hongrois, Karl Polanyi, selon laquelle l’économie est encastrée dans les institutions sociales. Le «copier-coller» de modèles importés a atteint ses limites... Nous consacrons également un dossier complet à la question du crowfunding comme modèle alternatif de financement, notamment pour les startups, TPE et autres auto-entrepreneurs qui sont bien souvent pénalisés par le manque de fonds de démarrage. Tout au long de ce numéro, vous prendrez la mesure de la vitesse du changement qui n’épargne aucun pan de l’économie. ABJ change aussi pour mieux vous accompagner. 

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PUBLICATION TRIMESTRIELLE N°16 | Octobre-Novembre-Décembre 2015

Le Magazine de l’Afrique en mouvement en couverture

Directeur de la publication Alioune Gueye agueye@africanbusinessjournal.info Rédacteur en chef Elimane Sembène esembene@africanbusinessjournal.info Secrétaire de rédaction Saloua El Hachami Rédaction centrale (Maroc) Baye Sakho, Moussa Camara, Babacar Seck, Elimane Sembène Correspondants Maimouna Dia Ndour (Sénégal) Bachir Sylla (Guinée Conakry) Fortuné Sossa (Bénin) Mohamed Dagnoko (Mali) Sylvio Combey (Togo) Cathy Koum (Cameroun) Jean Bosco Nzosaba (Burundi) Boureima Balima (Niger) Carmen Soraya Merheb (Côte d'Ivoire) Albert-Baudouin Twizeyimana (Rwanda) Pamela Koumba (Afrique du Sud) Correcteur Narcisse Laamrani Maquette Insolite Communication contact@insolite-communication.com +212 665 24 05 48 Photos Laurent Laveille (ABJ) AFP Editeur Afrique Challenge 11, Cité Air France, Ouest Foire , Dakar Tél: +221 33 820 74 44 Fax: +221 33 820 74 46 abj@lafriquequiose.com Abonnement & Publicité Ibrahima Thiam Mob.: +212 668 69 73 19 Bur.: +212 522 36 04 18/20 it@regienordsud.com Périmètre de distribution Bénin, Burkina Faso, Côte d'Ivoire, Guinée Bissau, Mali, Niger, Sénégal, Togo, Cameroun, Centrafrique, Congo, Gabon, Guinée, Equatoriale, Tchad, RDC, Maroc, Tunisie, Algérie, Mauritanie, France, Belgique, Suisse

crowdfunding

Une aubaine pour les start-up africaines Le financement participatif plus connu sous le nom de crowdfunding s’impose de plus en plus comme une réelle alternative dans le monde du financement. Plusieurs start-ups ont recours à des plateformes dédiées pour récolter des fonds et développer leurs projets. Dans son rapport annuel sur les tendances du crowdfunding dans le monde publié début 2015, «Massolution» révèle l’existence de plus de 1.250 plateformes de crowdfunding actives dans le monde en 2014, dont la majorité en Europe occidentale et en Amérique du Nord. Aujourd’hui, le marché est en plein boom. La croissance est exponentielle ; elle est passée de 2,7 milliards de dollars en 2012 à 16,2 milliards en 2014, soit une hausse de plus de 13 milliards. D’après ces prévisions, 34,4 milliards devraient être investis en 2015, quasiment le double par rapport aux sommes récoltées en 2014.

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u  Sur le fil 04 > Nigéria: Buhari, président et ministre du Pétrole Café: l’Ouganda, premier producteur en Afrique Énergie: le Sénégal vise un taux d’électrification rural de 60% d’ici 2017 Agriculture: le Mozambique construit la plus grande pépinière d’Afrique 06 > Banques : le Japon soutient le secteur privé africain Innovation: l’île Maurice, 1er en Afrique Croissance: et les pays les plus compétitifs en Afrique sont… 08 > Emploi: l’agriculture, 1er pourvoyeur d’emplois pour les femmes en Afrique Côte d’Ivoire: prêt de 2 milliards de dollars de la Banque mondiale d’ici 2019 Kenya:le gouvernement éponge la dette des producteurs de sucre u  Conjoncture

ISSN : 2230-1933 Impression Imprimerie OKAD EL JADIDA 5, avenue Hassan II. Quartier industriel Vita 10050 Rabat- Maroc Tél. : +212 537 79 69 70/71/73 Fax: +212 537 79 85 56 Email: okad@menara.ma Copyright © ABJ - La reproduction, même partielle, des articles et illustrations de ABJ est strictement interdite, sauf avec l’accord de l'éditeur. Ce numéro a été tiré à 20 000 exemplaires.

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10 > Cameroun: une banque pour les PME 12 > Gabon: pour une meilleure implication des sociétés locales dans l’industrie du pétrole

14 > Guinée: la société minière de Boké mise sur le Bauxite 16 > Relance économique au Mali: réalité ou chimère ? 18 > Guinée: GUICOPRES conforte son leadership dans le secteur des BTP 20 > Burundi: L’industrie du sucre surfe sur les vagues de succès 22 > Afrique du Sud: redresser ESKOM pour consolider l’économie


u  Perspectives

24 > Vers un redécollage des activités du secteur aéroportuaire au mali ? 26 > Mali: pleins feux sur le secteur touristique 28 > Cameroun: pour une transformation locale des fèves de cacao 30 > Internet: le Cameroun multiplie les bandes passantes pour plus de fluidité et un meilleur coût 31 > Burundi: un Turc investit dans la restauration en dépit de la crise u  le grand entretien

33 > Dr. Ibrahim Abouleish: "L’ agriculture biologique, un levier incontournable pour résoudre des problèmes sociétaux" u  les transformacteurs

u Business Case 62 >Sekem: le développement durable, tremplin vers l’émergence 63 >L'agriculture biodynamique, un choix stratégique 64 >Formation: l’amélioration continue, une priorité 66 >Enseignement supérieur: l'université Héliopolis, tremplin vers l’excellence 67 >Innovation: La R&D au cœur du processus

68 >Business Model: s’aligner sur les normes internationales 69 >Personnel: promouvoir l’égalité des chances 70 >Énergies renouvelables: investir dans le développement durable 71 >Gestion des Ressources Humaines: la Coopérative des employés de Sekem comme locomotive 72 >Perspectives: vulgariser davantage l’agriculture biologique

u african entrepreurshipjournal

94 > Financement: Teranga Capital, nouveau bras financier des PME sénégalaises 95 > Incubation: Cofina StartUp House se positionne dans le marché africain 96 > Entretien avec Ndèye Absa Gningue: «Former les plus jeunes à devenir des leaders» 97 > Côte d’Ivoire: faire des PME de véritables champions nationaux u african financial journal

u african sectoral journal

40 > Adil Douiri : "Le niveau d’optimisme des opérateurs marocains pour l’Afrique n’a jamais été aussi élevé" u  Focus

42 > Le Crowdfunding: une réelle alternative dans le monde du financement 44 > La finance pour tous ! 45 >Modèles de financement 46 > Entretien avec Vincent Ricordeau : «Nous prévoyons d’installer une filiale en Afrique francophone» 48 > Financement: différents mécanismes au menu 50 > Entretien avec Thierry Barbaut : «Le crowdfunding est parfaitement adapté à l’Afrique» 52 > Afrique: le crowdfunding se développe timidement, mais sûrement 53 > Entretien avec Arnaud Pinier: «Devenir un réseau d’acteurs du crowdfunding en Afrique du Nord et Afrique centrale» 54 > Entretien avec Eric Marty: «Notre volonté c'est d’avoir une plateforme à l’échelle africaine» 57 > Entretien avec Charlotte Dhenaux: «La population africaine est jeune et innovante» 58 >Tontines africaines : l’ancêtre du crowdfunding 59 >Quand la diaspora s’y met…

74 > Innovation: les étudiants africains se connectent aux MOOC 75 >Enseignement: Les MOOC, une aubaine pour les universités africaines 76 >Entretien avec Mejdi Ayari: «Sensibiliser nos professeurs aux apports des MOOC» 78 >Entretien avec Abdelatif Miraoui: «Innover pour construire l’université africaine de demain»

98 > Sénégal: bon démarrage pour la BNDE 99 > Acquisition: Saham Finances rachète 53,6% des parts de Continental Reinsurance 100 > Financement: Attijariwafa bank souhaite accompagner les TPE marocaines 101 > Finance islamique: la Côte d’Ivoire émettra un sukuk de 150 milliards FCFA

80 > La technique des «Quick Wins»: les petits succès qui appellent les grands 84 >Comment élaborer ou faire évoluer le Business Model d’une organisation ? 88 >Valoriser l’immatériel pour… quoi ?

102 >Investissement: I&P investissent dans deux PME en Afrique de l’Ouest

u african managementjournal

u african technology journal

u african international journal

u green business

104 > Solaire: GreenWish va construire une centrale de 20 MWau Sénégal u bloc-notes

106 > Bienvenue dans le monde du «Followership» u livres du trimestre

90 > Entretien avec Got'liebe Bataba:

«Permettre aux entrepreneurs des Tech en Afrique de raconter leurs vraies histoires» 91 >Kenya: le visa numérique voit le jour 92 >Burundi: spectaculaire pénétration des TIC 93 >Lagos: les taxis proposent du WiFi gratuit

108 > Quand l’Afrique réinvente la téléphonie mobile sous la direction de Alain Kiyindou, Kouméalo Anaté et Alain Capo-Chichi u post-scriptum

108 > Forums en Afrique : des rendez-vous en trompe-l’œil ? AFRIcan business journal | N°16 | 3


sur le fil

Nigéria Buhari, président et ministre du Pétrole

Café

L’Ouganda, premier producteur en Afrique Le nouveau leader africain du café se nomme l’Ouganda. Ce pays d’Afrique de l’Est a détrôné son voisin l’Éthiopie qui a été pendant longtemps le premier producteur en Afrique. L’Ouganda a produit environ 2,24 millions de sacs (1 sac = 60 kg) lors de la campagne 2014/2015. Ce nouveau leadership devrait être consolidé grâce à la subvention de 1,3 milliard de shillings (850.000 $) que le pays a reçue dans le cadre de l’initiative «Feed the future», lancée par l’agence américaine pour le développement international (USAID). Quelque 20.000 agriculteurs bénéficieront de ce financement qui s’étalera sur deux ans. 

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Être à la fois président et ministre est-ce possible? Oui, répondrait Muhammadu Buhari. Selon Femi Adesina, porte-parole de la présidence nigériane, l’actuel Chef d’État de la première puissance économique du continent a déclaré en marge de l'Assemblée générale de l'ONU (qui s’est tenue fin septembre à New York) qu’il allait devenir ministre des Ressources pétrolières. Cette décision s’inscrit dans sa volonté de lutter contre la corruption qui gangrène l’économie nigériane, notamment dans le secteur du pétrole. En effet, 250.000 barils de pétrole brut sont volés chaque jour au Nigeria, soit plus de 10% de la production nationale.

Énergie Le Sénégal vise un taux d’électrification rural de 60% d’ici 2017

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Le Sénégal souhaite atteindre un taux d’électrification rural de 60% d’ici 2017. Pour ce faire, le gouvernement compte mettre en œuvre deux grands projets ; la phase 2 du «Projet Inde» d’un coût total de 27,5 millions de dollars qui permettra l’électrification de plus de 17.000 ménages situés dans 216 villages dans les régions de Thiès, Diourbel (centre) et Casamance (Sud). L’autre projet vise à électrifier 70 villages qui abritent 50.000 personnes dans la région de Matam (Nord). Pour rappel, le Sénégal est passé d’un taux d’électrification de 5% en 1999 à 29% en 2014.

Agriculture

Où se trouve la plus grande pépinière en Afrique ? Bon nombre d’entre nous le localiseraient dans les grands pays du continent. Détrompez-vous. Elle se trouve au Mozambique. Cette structure qui a été inaugurée début septembre devrait produire chaque année 12 millions de plants d’eucalyptus ; elle a été réalisée grâce à un investissement de 7 millions de dollars du groupe portugais Portucel Soporcel et la Société financière internationale (SFI). Cette usine qui occupe 7,5 hectares du district d’Ile située dans la province du Zambèze s’inscrit dans le cadre d’un projet plus large qui verra dans les neuf prochaines années la construction d’une usine de pâte à papier dans le district voisin de Mocuba. Ce projet permettra la création de 7.000 emplois et la production d’électricité à partir de la biomasse et devrait générer environ un milliard de dollars à l’économie mozambicaine. 

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Le Mozambique construit la plus grande pépinière d’Afrique


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sur le fil

Banques

Le Japon soutient le secteur privé africain

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Le Japon a accordé un prêt concessionnel de 300 millions de dollars à la Banque africaine de développement (BAD) pour soutenir le secteur privé en Afrique. La convention a été signée le 8 septembre à Abidjan ; elle entre dans le cadre du programme Assistance améliorée au secteur privé en faveur de l’Initiative pour l’Afrique (EPSA) lancé en 2005 et qui vise à mobiliser des ressources et à mettre sur pied des partenariats de développement appuyant la stratégie de la banque pour le développement du secteur privé. «Le Japon est un partenaire très stratégique de la BAD et un partenaire commercial majeur pour l'Afrique. Votre soutien a permis à notre banque de décupler son portefeuille de prêts au secteur privé», s’est réjoui Akinwumi Adesinale nouveau président de la BAD.

NEWS

L’île Maurice est le pays le plus innovant en Afrique. C’est ce qu’a révélé le classement mondial des pays les plus innovants Global Innovation Index 2015 (GII 2015) publié conjointement le 17 septembre par l’Université américaine Cornell, l’école de commerce Insead et l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI). Cette île de l’océan Indien occupe le 49e rang mondial dans ce classement qui passe en revue 141 économies du monde entier, en se basant sur 79 indicateurs qui mesurent notamment la valorisation du capital humain et l’investissement dans la recherche. 

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Croissance Et les pays les plus compétitifs en Afrique sont… © D.R.

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Innovation L’île Maurice, 1er en Afrique

L’île Maurice est le pays le plus compétitif en Afrique, d’après les résultats du rapport sur la compétitivité mondiale 2015-2016 réalisé par le Forum économique mondial (WEF) publiés le 30 septembre à Genève. Le pays occupe le 46e rang au niveau mondial. En Afrique, elle est suivie par l’Afrique du Sud (49e), le Rwanda (58e), le Botswana (71e), le Maroc (72e), la Namibie (85e) et l’Algérie (87e). La Côte d’Ivoire (91e), la Tunisie (92e) et la Zambie (96e) complètent le Top 10 africain.  


sur lefilfil sur le

Emploi

des auteurs du rapport, «les femmes africaines nourrissent le continent et peuvent aussi nourrir le monde. Si l’Afrique veut parvenir à une transfor-

mation économique complète, il faudra résorber l’énorme écart dans les salaires et les rendements agricoles entre hommes et femmes».

Côte d’Ivoire Prêt de 2 milliards de dollars de la Banque mondiale d’ici 2019

Kenya Le gouvernement éponge la dette des producteurs de sucre

Le groupe de la Banque mondiale a signé fin septembre un accord de partenariat avec la Côte d’Ivoire pour la période 2015-2019. Sa filiale dédiée au secteur privé, la Société financière internationale (SFI/IFC), envisagent de déployer un programme de prêts et d’investissements pouvant atteindre jusqu’à 1 milliard de dollars pour chacune des deux branches du groupe. Au total, les prêts accordés jusqu’ici par la Banque mondiale à la Côte d’Ivoire comprennent 14 projets (dont trois d’envergure régionale), 750 millions de dollars, contre 1,23 milliard de dollars pour l’IFC.  

Le pays a annulé les dettes des producteurs de sucre au Kenya qui s’élevaient à 381 millions de dollars pour faciliter la reprise de ces entreprises. Cette mesure entre dans le cadre d’un processus visant à céder 75% du capital de cinq compagnies sucrières publiques. «...Aider le secteur sucrier à retrouver sa santé financière et à préserver les niveaux de vie de nos populations. En retour, j’attends de la diligence et une gestion transparente de ceux qui bénéficient de ces mesures», a indiqué le Président Uhuru Kenyatta. 

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Selon un rapport de la Banque africaine de développement (BAD), 62% des femmes actives exercent dans l’agriculture dont elles constituent plus de la moitié de la main d’œuvre totale. La BAD précise que dans certains pays comme le Burkina Faso ou le Rwanda, la main-d’œuvre agricole est essentiellement féminine avec des taux pouvant atteindre plus de 90% de la population agricole totale. Toutefois, beaucoup d’entre elles sont sous-payées, manquent d’accès aux financements et surtout n’ont pas droit à la propriété foncière. «Les femmes représentent 75% de la main-d’œuvre dans la production de café, mais ne perçoivent que 34% des revenus», indique l’étude. Selon Géraldine Fraser-Moleketi, envoyée spéciale de la BAD sur le genre et un

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L’ agriculture, 1er pourvoyeur d’emplois pour les femmes en Afrique

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conjoncture Reconduction AGOA

Bien, mais peut mieux faire Le Congrès américain a autorisé la reconduction de l’African Growth and Opportunity (AGOA) jusqu’en 2025. La valeur totale des exportations africaines est estimée à 25,6 milliards de $ en 2014. Quelque 69% des exportations sont des produits pétroliers. Par Baye Sakho

bre 2015, mais le Congrès a décidé de le reconduire pour dix années supplémentaires. L’AGOA est une loi adoptée en 2000 par les ÉtatsUnis qui exempte des droits de douane plus de 70 % des produits en provenance de 39 pays d’Afrique Subsaharienne.

Pétrolier ....

Dans notre dernier numéro, nous avions publié les propos de Gail Strickler, responsable de la branche textiles et habillement au département américain, qui avait affiché un grand optimisme pour le renouvellement de l’African Growth and Opportunity, une reconduction

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qui permettra à l’Afrique de «quadrupler ses exportations de produits textiles vers les États-Unis sans beaucoup de difficultés, ce qui permettra de créer 500.000 nouveaux emplois dans le secteur». Il avait vu juste. Ce programme devait en principe prendre fin le 30 septem-

69 % des exportations sont des produits pétroliers Quel est le montant de ces exportations africaines? D’après une étude publiée par le service de recherche du Congrès en avril 2015, les produits pétroliers se taillent la part du lion, avec 69 % des exportations en 2014. L’or noir provient principalement du Nigéria, du Tchad, le Gabon et le CongoBrazzaville. Les exportations hors hydrocarbures sont estimées à 4,4 milliards avec comme exportateurs respectifs l’Afrique du Sud (3,1 milliards de $), Kenya (423 millions de $), Lesotho (289 millions de $), Ile Maurice (227 millions de $), et le Swaziland (77 millions de $). Selon ce rapport, seule la moitié des pays africains ont exporté moins de 1 million de $ en 2014. La valeur totale des exportations est estimée à 25,6 milliards de $ en 2014.


Les produits pétroliers se taillent la part du lion avec 69% des exportations en 2014.

Le fait que l’AGOA ne prenne pas en compte plusieurs produits notamment ceux du secteur de l’agro-industrie, handicape les pays non producteurs de pétrole, de produits textiles, etc. Autant d’aspects à revoir pour une relation commerciale gagnantgagnant.

© Photo Département d'État / public domaine

Toutefois, des observateurs remettent en cause l’efficacité et la réciprocité de l’AGOA. Et pour cause. Les échanges commerciaux entre les États unis et les pays africains bénéficiaires de ce programme s’élevaient à 50 milliards de $ en 2014, loin derrière les 170 millions de $ entre la Chine et l’Afrique subsaharienne en 2013. De même, le Congrès pointe du doigt l’absence de contreparties dans cette relation commerciale contrairement au mode opératoire développé par d’autres organisations comme l’Union européenne, avec notamment les Accords de partenariat économique (APE) contractés avec plusieurs pays africains avec des clauses contenant des avantages tarifaires réciproques qui pourraient désavantager les entreprises américaines vis-à-vis de leurs homologues européennes.

Le discours d'ouverture d'African Growth and Opportunity Act (AGOA) par la Secrétaire d'Etat Américaine Hillary Rodham Clinton à Washington DC, le 14 Juin , 2012.

AFRICAN GROWTH AND OPPORTUNITY ACT La Loi sur la Croissance et les Opportunités en Afrique (AGOA) a été signé le 18 mai 2000 en tant qu'article de la Loi sur le commerce et le développement de l'an 2000. La loi offre des incitations tangibles pour les pays africains à poursuivre leurs efforts pour ouvrir leurs économies et construire des marchés libres .

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conjoncture

Cameroun

Une banque pour les PME La Banque camerounaise des PME (BC-PME S.A.) est officiellement en service depuis le mois de juillet. Pour le patronat camerounais, c’est un grand pas pour le développement de l’économie du pays.

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Par Cathy Koum

Usine de l’Unapac. Cette association interprofessionnelle forme au respect des normes phytosanitaires en vigueur dans l’Union européenne. Résultat : 1000 tonnes d’ananas ont été exportées vers le vieux continent en 2012 par un groupe d’horticulteurs camerounais.

«L’accès au financement des PME n’est plus un rêve». C’est le slogan de la Banque camerounaise des PME (Petites et moyennes entreprises), un établissement public financier d’un capital de 10 milliards de FCFA, qui se donne pour mission d’accompagner et soutenir les petites et moyennes entreprises et les artisans du pays. La BC-PME qui a ouvert ses portes le 20 juillet 2015 à Yaoundé,

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capitale camerounaise, offre un package de services et produits «structurés et adaptés aux besoins des PME». Il s’agit de sept services spécifiques, en dehors des services bancaires classiques: le financement des bons de commande et contrats, les avances sur factures certifiées, le financement facilité garantie à 100%, la caution sur marché, le financement des commerçants, le financement des actifs et celui des professions libéra-

les. Les crédits sont octroyés trois mois après l’ouverture des comptes. Et ici, on insiste sur le fait que «même si on a son entreprise dans une mallette, on a sa place à la BCPME qui a pris des dispositions pour sortir les patrons des PME de leur sac pour leur donner un siège.» Les statistiques du patronat camerounais révèlent que le pays compte plus de 400.000 entreprises dans l’informel et parmi celles-ci 99% sont des PME.


conjoncture

Pour encourager ces entreprises à sortir du bois, la structure applique un taux d’intérêt de principe de 11 %, avantageux par rapport à d’autres établissements financiers qui pratiquent des taux d’intérêt prohibitifs. Toutefois, «ce taux devient négociable lorsque le montant du crédit est très élevé», indique le chef d’agence de Yaoundé, Félix Sonny Oundi. La BC-PME qui a pour siège Yaoundé a également une filiale à Douala, la capitale économique. Les populations résidant hors de Yaoundé et Douala devront faire le déplacement dans ces villes pour un début, mais «dans un délai raisonnable», la BC-PME va nouer des partenariats avec certaines microfinances dans les différentes régions du pays, pour satisfaire cette clientèle. Le secrétaire permanent du groupement des PME camerounaises, Martial Mbema, se réjouit de l’ouverture de la banque. «C’est

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01- Ndoumbè Mandeng : nouvelle directrice de la Banque Camerounaise des PME 02- Tadu Dairy Cooperative Ltd au cCameroun 03- Dans la zone de Bonabéri, se trouve BB Corp. (Bogne Blaise), une entreprise qui recycle depuis bientôt trois ans, des déchets plastiques post industriel et post consommation. 04- Ouvrier agricole 05- Pj-in-factory, petite entreprise des produits laitiers 06- Ouvrières travaillant manuellement le riz

une banque que nous attendons depuis longtemps. Nous avons jusque- là eu beaucoup de difficultés à avoir des crédits ailleurs, parce qu’il fallait des garanties hors de portée et les taux d’intérêt étaient très élevés pour nous. Son ouverture est un grand soulagement pour beaucoup de nos membres qui pourront désormais mener à bien leurs activités». Depuis l’ouverture de la banque, plus de 300 comptes ont été ouverts par les responsables des PME «ce qui témoigne de l’intérêt que notre cible porte à la banque», fait savoir Félix Sonny Oundi. Au sein du patronat camerounais, on laisse entendre que la BC-PME devrait faire gagner au Cameroun quelques points de croissance, les PME représentant plus de 90% des entreprises du pays avec une contribution de 34% au PIB. Il y en a tout de même qui sont moins enthousiastes : «les chan-

ces de cette banque de réussir sont très faibles parce qu’elle s’adresse à une clientèle dont la durée de vie se situe autour de trois ans», déclare l’économiste Dieudonné Essomba. Au siège à Yaoundé, on laisse croire que les dispositions ont été prises pour que la BCPME ne connaisse pas le même sort que plusieurs banques camerounaises ruinées par la mal gouvernance et le peu de rigueur «La BC-PME travaille avec l’agence camerounaise de promotion des PME qui va assurer le renforcement des capacités des structures et des acteurs pour que les projets présentés au financement soient à 75% bancables. Par ailleurs, les crédits accordés aux artisans ne sont pas donnés à une entreprise. Il y a un regroupement qui se porte garant du prêt pris par une PME. Donc, le tamis sera préalablement fait par ces regroupements qui ne voudront pas être dépossédé de leurs biens. C’est une bonne garantie», indique-t-on. 

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conjoncture

Gabon

Pour une meilleure implication des sociétés locales dans l’industrie du pétrole Les entreprises gabonaises de sous-traitance dans ce secteur sont estimées à 20%. Le gouvernement, à travers le concept de contenu local, prend des mesures favorisant un meilleur partenariat entre les PME locales et les compagnies pétrolières et para-pétrolières installées au Gabon. Par Cathy Kouma, de retour de Libreville

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et locaux au sein du secteur pétrolier et gazier sur toute la chaîne de valeur» ; «Création de partenariats internationaux locaux: renforcer les capacités en répondant aux besoins du secteur avec des compétences locales».

Le premier ministre gabonais, Daniel Ona Ondo

Un meilleur partage de richesses issues de l’exploitation des hydrocarbures, c’est ce que prône le gouvernement gabonais à travers son concept de contenu local. Et pour mieux faire passer le message, le ministère du Pétrole et des hydrocarbures, en partenariat avec Gabon Oil Company, la société nationale des hydrocarbures, et le Global Local Content Council, a organisé en juillet dernier un fo-

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rum sur le contenu local au Gabon. Les patrons des multinationales présentes au Gabon, des sociétés pétrolières gabonaises, des PME spécialisés dans le secteur des hydrocarbures, et le gouvernement ont mis sur la table des thématiques telles: «Tirer profit des champs pétroliers du Gabon pour développer le contenu local et maximiser l’investissement»; «Développer un réseau de fournisseurs nationaux

C’est que, selon le constat fait par les PME et même les pouvoirs publics, les multinationales ne sont pas toujours disposées à travailler avec les locaux : «Il y a des clients (multinationales) qui refusent d’ouvrir la porte à la compagnie (PME gabonaise) sous prétexte que la compagnie n’a pas subi l’audit pour pouvoir être listée en tant que fournisseur, pourtant il y a bon nombre de compagnies de services internationales qui viennent au Gabon, sans avoir subi d’audit, mais qui ont des contrats en très peu de temps. Elles n’ont pas de bureaux, pas d’infrastructures, mais le client va le leur fournir», indique Ghislain Moundounga, PDG de GM Energy, PME exerçant au Gabon. Allant dans le même sens, le premier ministre gabonais, Daniel Ona Ondo, recommande de promouvoir les entreprises gabonaises liées à l’in-


conjoncture

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Un chantier de Gabon Oil Company

dustrie pétrolière, d’impliquer, dans une démarche citoyenne, les populations locales à travers des projets sociaux et autres activités génératrices de revenu. Daniel Ona Ondo insiste également sur la formation des cadres desdites entreprises, gage d’un développement économique durable. Préférence nationale Au préalable, des réformes ont été prises dans le pays qui ont abouti à la création de la société nationale des hydrocarbures du Gabon (GOC) et en 2014, à la promulgation de la loi sur le secteur des hydrocarbures. Des actes que le ministre des hydrocarbures considère comme des avancées qui entrevoient pour les années à venir une meilleure vocation pour les PME et PMI. Le contenu local connaît déjà une certaine mise en œuvre selon les témoigna-

ges de deux majors du secteur pétrolier opérant au Gabon «Depuis plusieurs années, nous travaillons avec des entreprises telles que Mika Service, GM Energy, Sigma, SGPRB, pour une enveloppe de 300 milliards de FCFA. C’est notre façon de contribuer au développement économique du Gabon», déclare Godson Njoku, directeur général de Shell Gabon. À Total Gabon, la pratique du contenu local se caractérise par la promotion de Gabonais aux postes de responsabilité, dont Henri-Max Godson Ndong Nzué, premier Gabonais à occuper le poste de directeur général de la société, et «le partenariat avec les PME locales, aussi bien naissantes que bien implantées». Le Gabon compte sept majors et une dizaine de juniors dans le secteur des hydrocarbures. Beaucoup reste à faire.

C’est que, selon le constat fait par les PME et même les pouvoirs publics, les multinationales ne sont pas toujours disposées à travailler avec les locaux.

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conjoncture

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Le gouvernement guinéen envisage de porter l’exportation de la bauxite de 17 millions de tonnes actuellement à près de 40 millions de tonnes d’ici 2024, d'après le Ministre des Mines et de la Géologie.

Guinée

La société minière de Boké mise sur lA Bauxite La Société minière de Boké (SMB), associée au Consortium chinois Winning Group (China Hongqiao Group, Winning International Group et Yantai Port), a commencé à exporter depuis juillet ses premières tonnes de bauxite à partir du nouveau port fluvial de Katougouma, près de Boké, dans la partie septentrionale de la Guinée. Par Bachir Sylla

La mise en œuvre de cet important projet de bauxite a été accélérée malgré la crise sanitaire liée à la présence de l’épidémie d’Ebola, qui a conduit la plupart des miniers à réduire drastiquement et même, pour certains, à suspendre leurs activités en Guinée. «Certaines sociétés minières ont arrêté leurs activités sous prétexte de forces majeures»,

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a déploré le Président guinéen à la cérémonie inaugurale, avant de louer les efforts de la SMB et ses partenaires pour le respect de leurs engagements contractuels vis-àvis de la Guinée. Dès lors, il estime que «la Guinée saura tirer les conséquences». Ce qui sonne comme une menace à l’encontre des miniers qui ont fui le pays pour cause d’Ebola.

«Les investissements doivent servir à la Guinée, avec pour obligation de construire des ponts, des routes, des écoles et des centres de santé, afin de permettre à la population environnante de profiter des richesses de sa région», a toutefois martelé Alpha Condé, qui promet de veiller à ce que le Consortium chinois réalise en Guinée ce qu’il a pu faire ailleurs.


conjoncture

Kerfalla Yansané, le ministre d’État guinéen aux Mines et à la géologie, affirme que la SMB a réalisé toutes les études nécessaires, avant d’avoir eu droit à un permis d’exploitation sur un gisement de 100 millions de tonnes. «Elle envisage d’exporter 5 millions de tonnes dans les 12 prochains mois, avec un objectif de 10 millions de tonnes les années suivantes. La production sera exportée à partir de ce port d’une capacité annuelle de 30 millions de tonnes», précise-t-il.

premières tonnes de bauxite de la SMB, a vanté les mérites de sa société spécialisée dans la construction et l’exploitation des ports. «Nous sommes en Afrique pour la première fois, mais le soutien dont nous bénéficions ici nous rend optimistes pour suivre notre expérience dans ce beau pays», a-t-il déclaré. Contribuer au développement de la Guinée Même son de cloche chez le coordinateur général du Consortium, qui promet de tout mettre en œuvre pour contribuer à aider à la prospérité socio-économique de la Guinée. «Nous regardons l’avenir, nous avons encore un long chemin à parcourir», prédit-il. Pour Ahmed Kanté, le directeur général de la Soguipami (Société guinéenne de patrimoine minier), l’exemple de la SMB, qui lance la production semi-industrielle de la bauxite en Guinée, est à encourager, étant d’un type nouveau. «En peu de temps, se réjouit-il, elle a construit un port flottant, qui va transporter la bauxite à partir des

Vers la création de 3.000 emplois La société, confie le ministre d’État, prévoit dans un premier temps d’investir environ 120 millions de dollars américains, avec une possibilité d’augmentation des investissements qui seront entièrement financés par le Consortium chinois. Selon M. Yansané le projet de la SMB est un système intégré de la production à la consommation finale. Il révèle que les revenus directs attendus par l’État guinéen, pour les 10 prochaines années, sont estimés à 575 millions de dollars américains, soit environ 50 millions par an.

barges vers les grands paquebots». «À travers ses engagements pris, la SMB est partie sur de bonnes bases et ne pourra pas nous tromper. Elle a réalisé convenablement les études d’impacts environnemental et social. Nous avons une équipe environnementale qui suit les sociétés minières sur le terrain. À chaque fois que nous trouvons des failles, nous tenons à ce qu’elles soient corrigées aussitôt», estime pour sa part la ministre de l’Environnement, Kadiatou N’Diaye. Natif de Boké, le général Mathurin Bangoura a exprimé sa fierté de voir sa région abriter un nouveau projet minier. Après Guinea Alumina Corporation, la Compagnie des bauxites de Guinée, il espère que la SMB fera le bonheur des populations locales, à travers le bénéfice qu’elles tireront des infrastructures et les investissements faits. Il plaide surtout pour que des leçons soient tirées des erreurs du passé pour ne pas tomber dans les mêmes travers. 

Après quatre (4) mois, la pose de la première pierre du port fluvial de Katougouma (Boké), le président de la République, professeur Alpha Condé a procédé le lundi 20 juillet 2015 à la cérémonie d’inauguration dudit Port, situé dans le district de Katougouma, sous-préfecture de Tanènè, dans la préfecture de Boké. Il a été axé surchargement des premières tonnes de bauxite du consortium China Hongquiao groupe limited (UMS) United Manning SupplyWinning, WAP, Yantai Port Group, et la SMB (société minière de Boké).

La SMB, souligne-t-il, s’est engagée à payer toutes les taxes minières dès les premières tonnes de bauxite exportées pour être conforme au Code minier guinéen. Il est également attendu du projet la création de 3.000 emplois en phase de construction et 1.000 en phase de production. «Pour le ministère des Mines, SMB est considérée comme un projet pilote en raison de son caractère semi-industriel, à ce titre il fait l’objet d’une attention particulière», résume Kerfalla Yansané.

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Le président du Yantai Port, Zhou Bo, qui a assisté au chargement des

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conjoncture

Relance économique au Mali

Réalité ou chimère ? Par Mohamed Dagnoko

Avec le parachèvement de la signature de l’Accord de paix, le 20 juin dernier, les autorités maliennes sont résolument tournées vers la relance économique du pays. Même si la paix n’est pas de retour à 100%, la croissance de 7,2% enregistrée en 2014 reste un acquis à pérenniser. plusieurs programmes avec des incidences sur l’économie nationale.

Bamako, capitale du Mali

«Les voyants sont au vert». Cette phrase du ministre de l’Économie et des Finances, Mamadou Igor Diarra, témoigne de la santé financière actuelle du Mali. Les recettes des Impôts et des Douanes vont pour la première fois dépasser le seuil de 100 milliards pour atteindre 180 milliards de francs CFA. Avec 80 milliards dans les caisses du Trésor public, la dette intérieure du Mali est inférieure à 4 milliards. La crois-

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© Jonathan Taibo/ Panoramio

Les réformes en profondeur Pour arriver aux résultats actuels affichés par l’économie malienne, l’État a initié un certain nombre de réformes. Il s’agit, entre autres, de la consolidation des dépôts de l’État au niveau du système bancaire, de la réduction du train de vie de l’État, d’une forte mobilisation des appuis budgétaires sous forme de prêts et dons ainsi que la restauration du climat de confiance avec le Fonds monétaire international et la Banque mondiale.

sance enregistrée l’année dernière est de 7,2%. Le pays compte rééditer l’exploit. Et pourtant, ça n’a toujours pas été aussi reluisant. En janvier 2012, avec le déclenchement de crise sécuritaire au Nord suivie d’un coup d’État, l’économie était au plus mal. Les sanctions prises par les institutions de Bretton Woods, la rupture avec certains partenaires au développement comme l’Union européenne, ont entraîné l’arrêt de

Il a aussi été question pour le gouvernement d’adopter un collectif budgétaire pour mieux prendre en charge les priorités du pays et relancer la croissance économique. Cette dernière mesure s’est concrétisée par la prise en charge du début de la mise en œuvre de l’Accord d’Alger pour un montant de 11 milliards de francs CFA, le renforcement des équipements et conditions de travail et de vie des Forces armées nationales (FAMA) pour un montant de 88 milliards, l’amélioration des conditions des travailleurs sur la base des accords UNTM (Union nationale des travailleurs du Mali) pour 24 milliards, le renforcement de la mécanisa-


conjoncture tion de l’agriculture avec l’équipement des producteurs en 1.000 tracteurs, la création des meilleures conditions pour accueillir le Sommet Afrique-France, prévu à Bamako en 2016 et enfin le lancement du processus de réhabilitation des infrastructures existantes dont certaines routes. Premier pays réformateur de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA), selon le dernier rapport «Doing Business», le Mali, troisième puissance économique de l’Union monétaire, transpose 60% des normes communautaires. Avec un financement de l’économie nationale à hauteur de 1.400 milliards, les banques aussi contribuent à la bonne santé financière actuelle du Mali. Secteur privé à la traîne… Cette embellie risque d’être tirée vers le bas par un secteur privé peu dynamique et habitué à vivre aux dépens de l’État. Avec seulement 500 unités de transformation contre 6.000 et 3.000 respectivement au Sénégal et en Côte d’Ivoire, dont seulement une centaine dans le secteur formel, le déficit de la balance commerciale du Mali se chiffre à plus de 400 milliards de FCFA en moyenne ces trois dernières années. Soit l’équivalent de l’aide publique au développement (prêts concessionnels + subventions). Selon Cyril Achkar, président de l’Organisation patronale des industries du Mali (OPI), «seuls 76% des industries au Mali sont en activité. Les 24% qui restent sont liquidés ou à l’arrêt». Avec une perspective de transformation de 20% de la production cotonnière du pays à l’horizon 2020, contre 2% aujourd’hui et une lutte plus accrue contre la fraude, le secteur espère améliorer son poids dans le PIB, qui est passé de 10 à 5%. 

Cette embellie risque d’être tirée vers le bas par un secteur privé peu dynamique et habitué à vivre aux dépens de l’État.

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conjoncture

Guinée

Guicopres conforte son leadership dans le secteur des BTP Le Groupe Guicopres S.A ne cesse de se développer en Guinée et d’étendre ses tentacules dans les pays voisins, notamment dans le secteur du Bâtiment et des Travaux publics (BTP), qui symbolise beaucoup plus sa réussite. Mais l’ambition de cette jeune entreprise non encore cotée en Bourse est d’aller plus loin pour se hisser au niveau des compétences internationales dans ce domaine. Par Bachir Sylla

Pour son PDG, Kerfalla Person Camara, la matérialisation de ce rêve nécessite plus d’efforts, d’abnégation et de progrès techniques et technologiques de la part de son groupe. M. Camara alias KPC assure que le groupe qu’il a fondé dans les années 2000 a déjà développé un réseau de relations et de partenariats avec des leaders mondiaux spécialisés dans la fabrication et la fourniture d’engins de travaux publics, de matériaux de construction, d’équipements techniques et de marchandises diverses permettant à son groupe de fournir une gamme variée et diversifiée de services. Selon un grand connaisseur de Guicopres, le chiffre d’affaires de ce groupe avoisinait les 65 millions d’euros en 2010. Ce montant résulte, dit-on, des estimations des parts de marchés publics que Guicopres avait décrochées sous la junte militaire (2009-2010). Cette source, qui a requis l’anonymat, souligne toutefois que ce chiffre d’affaires aurait connu des hauts et des bas ces dernières années, compte tenu des rapports tumultueux entre le PDG de la Société et le Chef de l’État guinéen.

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Peu après sa victoire à la présidentielle de 2010, le Président Alpha Condé avait commandité un audit international qui a permis de geler momentanément la quasi-totalité des marchés publics obtenus de gré à gré, dont la plupart étaient détenus par Guicopres. La proximité de KPC d’avec le Général Sékouba Konaté, alors ministre de la Défense de la junte puis Président de la Transition guinéenne, ayant lourdement pesé dans l’attribution de ces marchés. Acquisition de nouveaux marchés En 2011, le Président Condé avait tancé le patron de Guicopres, qui lui avait soumis un projet de reconstruction de la Paternelle, un ancien immeuble de 15 étages situé à quelques pas du Palais Sékhoutouréah. «Il faut être fou pour imaginer un tel projet !» s’était offusqué le Président guinéen, qui disait ne pas comprendre qu’on veuille construire un tel immeuble à usage commercial surplombant le palais présidentiel. La brouille passée, les relations entre KPC et Alpha Condé

se sont normalisées au fil du temps. Ce qui a permis à Guicopres de reprendre du souffle et d’acquérir de nouveaux marchés. Parmi eux, il y a le marché de construction en cours de la voie express 2X2 SonfoniaKagbelen, à la sortie de Conakry ; la réalisation de transversales et de voiries secondaires de la capitale guinéenne. Récemment encore, le groupe a décroché, avec deux autres entreprises guinéennes, le marché de viabilisation du Centre directionnel de Koloma où l’État guinéen envisage de transférer le quartier administratif de Conakry en y érigeant les sièges de certains ministères et d’institutions républicaine tel que celui de l’Assemblée nationale. Entre 2009 et 2010, Guicopres s’était particulièrement illustrée dans la réalisation d’infrastructures militaires et universitaires. Il s’agit, entre autres, de la construction du Camp Camayenne (anciennement Camp Boiro, où des milliers de Guinéens ont péri pendant le premier régime de la Guinée indépendante).


© optorg.com

© Groupe GUICOPRES

conjoncture

Chantier routier de Guicopres

Des actions à l’international Guicopres a profité de sa traversée du désert en Guinée pour conquérir le marché international des BTP. Le groupe a ainsi réussi à décrocher un marché de bitumage d’une trentaine de kilomètres de route dans les villes de Kono et de Kabala en Sierra Leone. Le groupe se prévaut également d’actions au Ghana, au Maroc, en Chine et en France. Pour mener à bien ses actions, cette entreprise guinéenne, qui s’illustre à travers sa capacité de préfinancement de projets, noue des partenariats tous azimuts. C’est le cas par exemple du protocole d’accord de représentation qu’elle a signé en mars 2015 avec la société 10 Rajeb, un des fleurons de l’industrie marocaine de luxe. Il en est de même de la signature récente de l’accord de sous et de co-traitance entre Guicopres S.A et la société française Ma-

Kerfalla Person Camara, Pdg du groupe Guicopres

tière, spécialisée dans la construction de ponts métalliques et en béton armé. Par ailleurs, le Groupe s’est attaché les services du Cabinet FFA pour redynamiser ses activités et renforcer les capacités de ses quatre filiales (Nalou Transit S.A, Kakandé Immo, Guico Multiservices International et Guicopres BTP). Tous ces efforts conjugués contribuent à faire de ce groupe une société qui compte dans le monde des affaires en Guinée et à l’étranger. Ce n’est pas pour rien que son fondateur a été choisi pour être le vice-président de la Confédération patronale des entreprises de Guinée. KPC est, par ailleurs, mécène et président du légendaire Hafia Football Club de Conakry, qui continue de jouer les premiers rôles dans le championnat de Ligue 1 en Guinée. 

Récemment encore, le groupe a décroché le marché de viabilisation du Centre directionnel de Koloma où l’État guinéen envisage de transférer le quartier administratif de Conakry.

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conjoncture

Burundi

L’industrie du sucre surfe sur les vagues du succès Après des années de passage au creux de la vague, l’industrie sucrière est à son meilleur niveau historique au Burundi.

La production va crescendo depuis quelques années et le marché local est largement couvert alors qu’il était toujours inondé par le sucre d’origine asiatique pendant plusieurs années. Ces trois dernières années, la production de l’unique entreprise sucrière du pays (Société sucrière de Moso, SOSUMO) est passée de 19 à 25.000 tonnes. Elle avait rarement dépassé le cap de 18.000 tonnes. «Cette embellie est essentiellement due à la bonne gestion de l’entreprise et au renouvellement de l’outil de production et de la variété de cannes à sucre», susurre sous couvert d’anonymat un haut cadre de la SOSUMO.

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Placée sous tutelle du ministère du Commerce, de l’industrie et du tourisme, cette entreprise publique placée au sud-est du pays, à quelques encablures de la frontière tanzanienne, exploite en régie 3.000 hectares de plantations avec des variétés améliorées importées de l’Île Maurice dont 1.582 hectares dans les bas-fonds, 331 hectares dans les fonds inondables, 743 hectares dans les plateaux ou collines et 372 hectares dans les piedmonts. «Le rendement en champ est de 70 tonnes hectares de cannes fraîches tandis que celui à l’usinage est de

Après le record historique de 2012, la Sosumo vient de franchir la barre des 25.000 tonnes de sucre produits à Gihofi, soit plus de 10% de plus que ses prévisions initiales. Quand on combine un bon management et l’abnégation des travailleurs, cela paie …

11,5%. La production moyenne annuelle est de 25.000 tonnes avec un chiffre d’affaires de 25 milliards de francs burundais», explique l’ingénieur Joachim Ndikuryayo, cadre à la SOSUMO. La production locale du sucre permet une économie de devises de l’ordre de 22,5 millions de $ US et

une participation au PIB de 3,0%. Les possibilités d’extension des superficies de cannes et des capacités d’usinage offrent par ailleurs de réelles chances d’amélioration substantielle des résultats de la filière. L’écho de la bonne gestion de cette entreprise sucrière dépasse les frontières nationales. En 2013, Audace Bukuru, alors directeur général de


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Champ de cannes à sucre au Burundi.

la société sucrière de Moso, recevait à Paris, le prix «Oscar du leadership des managers africains» qui lui a été décerné par le Conseil international des managers africains (CIMA). Cette distinction a consacré son engagement en faveur de la bonne gouvernance économique et son leadership dans son secteur. «J’ai été primé pour avoir bien géré la société sucrière de Moso en lui permettant de booster la production alors qu’elle était au bord de la banqueroute au début des années 2010», explique Audace Bukuru, ancien directeur général de la SOSUMO. Cette distinction lui a aussi valu des félicitations du Chef de l’État, à son retour de Paris. «C’est un cadeau que Dieu vient de donner au Burundi», a déclaré le Président burundais. La SOSUMO est l’une des rares entreprises publiques qui engrangent des bénéfices au Burundi. Nombre d’observateurs s’accordent sur le fait que le pays devrait miser sur un bon management de son tissu industriel pour booster les exportations et ne pas continuer à compter sur l’unique filière agricole. «Jusqu’ici, plus de 80% des recettes d’exportations sont générées par le café et le thé et plus de la 90% de la population vi-

La SOCIETE SUCRIERE du MOSO (SOSUMO S.M) est une société de culture de canne à sucre, de production et de commercialisation du sucre. Elle est active en province de Rutana au Sud-Est du pays en bordure de la frontière avec la Tanzanie. Le complexe est implanté sur une zone qui se trouve entre les rivières Muyovozi, Mutsindozi et Maragarazi, formant frontière avec la Tanzanie. La rivière qui alimente le complexe étant la Mutsindozi.La zone dans laquelle se trouve le complexe est une zone de terres basses très accessible et qui est desservie par une route bitumée la joignant à la capitale Bujumbura (160 km) et bon nombre de Chefs lieu de province (MURAMVYA, GITEGA, RUTANA, MAKAMBA, RUYIGI). Il y a lieu d’y avoir accès par avion également.

vent de l’agriculture avec de petites superficies arables, il est difficile de continuer à compter sur cette unique filière», explique Albert Muganga, ancien ministre du Commerce. Il va sans dire que le fisc se frotte les mains face à cette bonne santé de l’industrie du sucre. «Au cours de ces trois dernières années, la SOSUMO a déboursé plus de 51 milliards de francs burundais pour les impôts et les taxes. Cette entreprise compte plus de 550 employés et plus de 300 travailleurs saisonniers», fait remarquer le directeur général de la SOSUMO, Audace Bukuru. En période de campagne de production, les effectifs atteignent 4.000 travailleurs pendant six mois. C’est grâce aux financements de la Banque africaine de développement (BAD) et de la Banque arabe pour le développement économique (BADEA) que le Burundi a mis sur pied, en 1989, sa première et unique industrie publique de sucre. Au fur et à mesure que la production du sucre s’accroit, le Burundi lorgne le marché d’écoulement. «Nous pensons essentiellement aux pays de la sous-région», indique le directeur général de la SOSUMO. Il s'agit principalement du Rwanda et de l'est de la République démocratique du Congo (RDC).

Même l'Ouganda et la Tanzanie sont déficitaires en sucre, malgré une importante production nationale. «Il faut savoir que dans un rayon de 500-600 km autour de Bujumbura, il n'y a pas d'usine de production de sucre, sauf au Rwanda – Kabuye Sugar Works avec une production maximum de 4.000 tonnes par an, et la sucrerie de Kiliba près d'Uvira en RDC d'une capacité de 20.000 t/ an, mais à l'arrêt (abandon) de plus de dix ans et en très mauvais état», fait remarquer Phillippe Minani, ingénieur agronome. Voilà qui explique pourquoi l’industrie burundaise du sucre occupe une place stratégique dans cette région de l'Afrique, au milieu d'une zone à haute densité de population allant de 30 à 40 millions d'habitants. En considérant une consommation de sucre actuellement très basse de l'ordre de 2-3 kg/personne/an, le marché potentiel est de 60.000 t (hypothèse basse) à 120.000 t (hypothèse haute) de sucre par an. Le défi pour la SOSUMO est de saisir ces opportunités intéressantes.  Jean Bosco Nzosaba

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conjoncture

Afrique du Sud

Redresser Eskom pour consolider l’économie

sud-africaine de l’électricité, Eskom, est un lourd fardeau pour l’économie du pays. En effet, Eskom a plongé la nation arc-en-ciel dans un cycle de délestage qui affecte aussi bien les hommes d’affaires que les citoyens moyens. Le cycle actuel des délestages a un effet catastrophique sur le secteur minier.

Par Pamela Koumba

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Un lourd fardeau pour les ménages Les conséquences sont entre autres la baisse de la production manufacturière engendrant une perte de gain. Les petites et moyennes entreprises assistent à une chute de leur chiffre d’affaires. Le citoyen sud-africain est également affecté dans son quotidien. Les coupures de courant endommagent les appareils électroménagers, gaspillent les aliments congelés et créent des embouteillages monstres pour les usagers de la route avec les feux de circulation éteints. À cela s’ajoute une surfacturation des prix d’électricité. Le NERSA, le régulateur sudafricain de l’énergie, a autorisé une hausse tarifaire de 12,7% des prix d’électricité au premier semestre

de l’année. Il est encore confronté à une autre demande de 9.5% qu’il réfute. L’impact de la crise d’Eskom se ressent sur tous les domaines de la vie. Mais les Sud-Africains nantis, pourvus de revenus élevés, sont de moins en moins dépendants d’Eskom parce qu'ils peuvent subvenir à leurs besoins énergétiques grâce à des sources d'énergie alternatives comme les énergies renouvelables, chauffe-eau solaire, le gaz et les générateurs diesel maison. Par contre, les ménages les plus pauvres ne peuvent pas se le permettre. Ils absorbent les coûts élevés de l'électricité ou vivent tout simplement une qualité de vie réduite. Conséquences drastiques sur l’économie Eskom a vu ses bénéfices chute de 49% depuis l’année passée et son bénéfice net pour son année fiscale 2014/2015 s'établissait à 3,6 milliards de rands, contre 7,1 milliards de rands, en 2014. Depuis qu’Eskom a révélé en janvier que les coupures de courant devaient se produire à70% au cours des trois prochains mois, les économistes se sont attelés à une évaluation diverse des implications pour le taux de croissance de l’Afrique du Sud. Hugo Pienaar, économiste principal au Bureau de recherche économique, estime qu’il faut revoir à la baisse les prévisions

© Eskom

La compagnie

Après avoir été paralysé par une grève de 6 mois, ce secteur est l’un des plus durement frappés par les déboires d’Eskom. Plusieurs mines ont dû fermer laissant des milliers de mineurs sans emplois. La filiale sudafricaine de Anglo American Platinum a du libérer près de 400 postes de hauts cadres. Lomnin a, pour sa part, supprimé 3.500 emplois. L’industrie lourde ainsi que les petites et moyennes entreprises ne sont pas épargnées. Elles sont frappées très durement d’autant plus qu’Eskom demande à tout business de réduire sa consommation d’électricité en plus des délestages déjà imposés.


conjoncture de croissance 2015 du PIB de 2,9% à 1,9%. Johann Els, économiste principal du group Old Mutual Investment, beaucoup plus indulgent, table sur une vision de croissance de 2,5% et une histoire positive à raconter. Els pense que la chute du prix du pétrole pourrait entraîner un revirement-surprise dans l'économie sud-africaine et être le début d'un cycle budgétaire positif.

du PIB de 2,5% à 2,2%. Au premier semestre de l’année en cours, Mandla Maleka, l'économiste en chef de la trésorerie d'Eskom, a également révisé à la baisse ses prévisions de croissance du PIB de 2,5 à 2,2%, en partie à cause des délestages. Le nucléaire comme alternative Le cycle actuel de délestage a un effet catastrophique sur l'économie

La station est située à proximité de Ermelo à Mpumalanga. Première unité de Camden a été mise en service en Avril 1967. Huit unités de la station ont été mises en veilleuse en 1990. En raison d'une forte augmentation de la demande d'électricité, le Conseil Eskom d'administration a pris une décision finale en 2003 pour le retour de service (RTS) des trois centrales, Camden, Grootvlei et Komati, qui ont été mis en veilleuse à la fin des années 1980 et au début des années 1990.

Mais cet optimiste est difficile à soutenir d’autant plus que la Reserve Bank, la Banque centrale d’Afrique du Sud et Eskom ont d’emblée réduit leurs prévisions de croissance à cause de l’épineux problème de l'approvisionnement en électricité. En effet, malgré une réduction de ses perspectives d'inflation à 3,8% pour 2015 liée à la chute du prix du pétrole, contre initialement 5,3%, la Banque a également revu à la baisse ses prévisions de croissance 2015

sud-africaine, avec aucune fin en vue pour le moment. La compagnie nationale sud-africaine d’électricité a tenté d’alléger ses dépenses en se détachant de quelques centaines d’employés, mais sans succès. Eskom dont les centrales essoufflées datent d’une trentaine d’années s’est engagée dans la construction de nouvelles infrastructures : Medupi et Kosile. Ce projet très ambitieux a requis un endettement de 3,75 milliards de dollars auprès

de la Banque Mondiale. La dette est très lourde pour une compagnie pratiquement en faillite, mais d’une importance capitale pour un pays sous perfusion électrique. Toutefois, cela n’a pas permis d’accélérer la livraison Medusi. D’une puissance de 4.800 mégawatts cette centrale est victime d’une naissance retardée par des grèves des ouvriers, des défauts de systèmes de contrôle pour ne citer que cela. Au bord du gouffre, le gouvernement sud-africain a dû venir à la rescousse d’Eskom en injectant des fonds à valeurs de 23 milliards de rands. Malgré cela, la nationale de l’électricité ne parvient pas à sortir de sa crise. Le gouvernement qui était obligé de vendre 13,91% de ses parts dans le groupe Vodacom afin de soutenir Eskom, se dit limiter dans ses fonds et entend se lancer vers le nucléaire. L’énergie nucléaire serait une alternative louable pour la crise d’Eskom, mais le problème de financement enrage les sud africains. D’aucuns pensent qu’il serait d’abord sage d’aider Eskom à se relever au lieu de chercher à construire huit centrales nucléaires dont le coût avoisinerait le milliard de rands. Le statut économique de l’Afrique du Sud ne permet pas aux autorités et encore moins à Eskom de faire une telle folie. De plus, ce projet pourrait faire grimper les coûts d’électricité dans un premier temps et la première usine ne pourra être opérationnelle qu’en 2023. Si le gouvernement sud-africain prend du recul dans son projet d’énergie nucléaire, Eskom pourrait avoir une chance de recevoir encore des financements qui lui permettront de terminer ses nouvelles centrales et par conséquent régler le problème d’électricité qui pénalise l’économie sud-africaine. 

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© Frank Pámar/ Panoramio

perspectives

Vers un redécollage des activités du secteur aéroportuaire au mali ? Avec le label RA3 de la société d’assurance aéroportuaire ASAM-SA acquise en début de ce mois d’août, l’aéroport international Bamako-Sénou est le premier de la sous-région ouest-africaine à pouvoir exporter le fret et les produits postaux dans l’ensemble des États de l’Union européenne (UE). Par Mohamed Dagnoko

Le Mali et les régions du Nord, plus particulièrement, ont payé un lourd tribut à la crise qui a éclaté en 2012. L’arrêt du trafic aérien sur des régions pendant des mois a mis du plomb dans l’aile des activités aéroportuaires. Mais aujourd’hui, les choses semblent

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aller dans la direction souhaitée par les responsables de la structure depuis quelques années. De 528.666 passagers en 2012, la destination Mali a atteint 573.000 passagers en 2013 pour atteindre 615.977 passagers l’année dernière. Si le trafic a repris, la récente

validation de l’agrément RA3 de la société d’assistance aéroportuaire ASAM-SA, faisant de la plateforme de Bamako la première en Afrique de l’Ouest à pouvoir exporter vers les pays de l’Union européenne, est un gage de cette bonne santé.


perspectives

Une grande opportunité Dominique Dreuil, directeur général de ASAM-SA, s’exprimant dans un journal local, s’en réjouit: «l’activité de l’aéroport basée à 90% sur l’importation (7.500 tonnes par an), va se rééquilibrer au profit de l’exportation, principalement d’œuvre d’art, d’or et de produits de l’agro-industrie». Cette labellisation est une véritable opportunité dans la mesure où les activités de fret aérien africaines, dont la croissance est estimée à +715% d’ici 2050, sont parmi les plus fortes au monde, selon le Forum international des transports. L’espoir de voir doubler le nombre d’opérateurs (Air France Cargo, Cargo Lux et Royal Air Maroc Cargo…) est réel. 

Trois questions

à Dominique Dreuil, DG d’ASAM-SA

«La plateforme de Bamako-Sénou est totalement autonome» 1- L’agrément RA3, de quoi s’agit-il ? Cet agrément signifie qu’ASAM-SA respecte les standards les plus élevés en termes de sécurisation du fret à l’exportation vers les destinations de l’Union européenne (UE). C’est une validation attribuée par des experts mandatés de l’Union européenne qui ont estimé que la plateforme de Bamako obéissait à ses exigences pour permettre d’exporter vers l’UE. 2- Qu’est-ce qui va changer ? Ce qui va changer ? C’est que désormais la plateforme de Bamako-Sénou, via l’ASAM-SA, qui est récipiendaire de la validation, sera totalement autonome et ne dépendra pas des compagnies aériennes. L’autre chose, ça va permettre le développement et l’arrivée de nouvelles compagnies cargo qui souhaiteraient se développer vers Bamako. © D.R.

Aussi paradoxal que cela puisse paraître, le Mali est le premier pays de l’Afrique de l’Ouest autorisé à exporter du fret et des produits postaux vers l’Union européenne. Cela, grâce à l’agrément RA3 acquis par la société d’assistance aéroportuaire (ASAM-SA). Le label RA3 (agent habilité d’un pays tiers) valable pour cinq ans est le fruit d’une série d’évaluation qui a conclu à la capacité de l’aéroport de Bamako d’assurer la sécurité du fret. «Grâce à cette validation RA3, ASAM-SA est donc désormais partie intégrante de la chaîne de sûreté du fret et est à même d’assurer le flux ininterrompu de colis de ses clients vers l’ensemble de l’Union européenne», précise le communiqué de presse de la structure. Pour que de telles mesures soient prises par l’Union européenne, il a fallu qu’en 2009-2010, au Yémen, un usager remplace l’encre d’une cartouche d’imprimante par de la drogue.

3- Quelles sont les mesures prises pour mériter la confiance de l’UE pour 5 années, voire renouveler l’agrément ? ASAM-SA n’est pas la seule concernée, elle a travaillé en étroite collaboration avec les autres secteurs de la plateforme que sont : l’autorité, l’aviation civile, les Aéroports du Mali, les douanes, la police et la gendarmerie. C’est un travail en coopération où chaque partie a pu déployer les moyens qu’il a. On va maintenir cette cohésion et aussi les équipements et la formation. C’est une fierté puisque ASAM a été la première société d’escale et Bamako le premier aéroport de la sous-région à être validés RA3. Propos recueillis par M.D.

Créée en 2007, la société d’assistance aéroportuaire du Mali (ASAM-SA) opère depuis plus de 8 ans sur l’aéroport international Bamako-Sénou et les aéroports du Mali. Elle regroupe les activités d’opérations, de piste et de services aux passagers de l’ensemble de ses compagnies aériennes clientes ainsi qu’une activité de maintenance en ligne.

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perspectives

Mali

Pleins feux sur le secteur touristique Un des principaux moteurs de l’économie malienne, le tourisme n’est plus que l’ombre de lui même depuis quelques années. Secteur sensible aux situations de crise, les détonations d’armes lourdes, les prises d’otages ne sont pas de nature à faire revenir de sitôt les touristes. Par Mohamed Dagnoko

© Amit and Alexandra

Frappés de plein fouet par la crise de 2012, les hôteliers rencontrés admettent tous se débattre sans grand succès. Même constat chez les promoteurs d’agences de voyages. À Mopti, l’une des plus importantes villes touristiques du pays, au carrefour de Djenné et le Pays Dogon, deux sites classés Patrimoines de l’UNESCO, sept agences sur 10 ont mis la clé sous le paillasson au moment où, plus au Nord, à Tombouctou, Gao et Kidal aucune n’existe, regrette M. Keïta.

Le Musée National du Mali à Bamako

Avec des recettes de plus de 50 milliards de francs CFA, le secteur du tourisme est le troisième pilier de l’économie malienne après l’or et le coton. Mais ça, c’était avant l’éclatement de la crise. Commencée en 2009 avec les prises d’otages, la crise va atteindre son paroxysme en 2012 avec la crise politico-sécuritaire qui secoue encore aujourd’hui le pays. L’activité touristique étant sensible à des situations de crise, la destination Mali sera déconseillée par les chancelleries occidentales à leurs ressortissants. Avec 250.000 touristes par an avant la crise, le Mali va se retrouver avec 50.000 touristes en 2012. Ce qui va occasionner une perte de plus de 70 milliards. Le Musée national du

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Mali, l’un des sites les plus visités du pays avec 40 à 50.000 visiteurs, s’est retrouvé avec seulement 15.000 touristes en 2012. Cette crise a frappé de plein fouet le secteur de l’hôtellerie. Si un léger mieux s’est fait sentir au niveau de certains établissements hôteliers au lendemain de l’élection présidentielle, avec la venue en nombre des agents de la Mission des Nations unies pour la stabilisation du Mali (Minusma) et des congressistes, seuls des hôtels de Bamako en ont bénéficié, selon Sidy Keïta, directeur général adjoint de l’Office malien de l’hôtellerie et du tourisme (OMATHO). Cette situation n’a pourtant pas sorti le secteur de l’ornière.

Bamako n’y échappe pas entièrement. Ce promoteur d’agence de voyages, qui a requis l’anonymat, a licencié l’essentiel de son personnel à cause de la crise. Il rappelle notamment s’être passé des services des guides et avoir vu ses recettes divisées par cinq. Acteurs du secteur, les guides et les artisans qui constituent des maillons de la chaîne sont, eux aussi, dans le désarroi. «C’est vrai que moi j’arrive à avoir quelques clients qui sont pour la plupart des amis, mais dans l’ensemble, ça ne va pas. Les guides chôment depuis bientôt 6 ans», peste Malick Koïta, guide professionnel. Ils se sont reconvertis, selon Sidy Keïta, directeur général adjoint de l’OMATHO, pour leur majorité dans des secteurs comme l’aviculture et l’agriculture. Ce qui pourrait, selon lui, constituer des problèmes à l’avenir, car la de-


La grande mosquée de Djenné, le plus grand édifice du monde en terre crue située dans le nord du pays.

perspectives

Les alternatives ? Face à la crise cyclique, le département de la Culture avait adressé déjà en 2011 une requête au département de l’Énergie et de l’eau et celui des Finances pour un moratoire de paiement des factures d’eau, d’électricité et d’impôts des entreprises qui croulaient sous les dettes. Appliquée en 2011 et 2012, le département a transmis la même requête l’année dernière et attend son application, compte tenu de la persistance de la crise. En vue de diversifier les offres et de s’affranchir de la forte dépendance du tourisme extérieur, les techniciens du secteur comptent proposer «le tourisme domestique» au cours de futures concertations régionales sur la relance du secteur. Il s’agira de réfléchir à la manière d'amener les Maliens à visiter les sites touristiques du pays.

© Markabel

Les objets d’art, généralement vendus à prix d’or aux touristes, sont bradés au Centre des artisans de Bamako, situé en plein cœur du Grand Marché. Le principal problème repose sur la panne du segment «tourisme de loisir». C’est ce dernier segment qui, à l’opposé du tourisme d’affaires, crée de l’emploi et donne au secteur toute sa vigueur.

© Werner Daehler

mande est désormais plus forte que les espaces arables notamment dans le Plateau Dogon.

Malgré la situation d’instabilité, ils sont quelques touristes à braver le danger. C’est le cas de Massato Amikura, venu du Japon sur invitation de son ami et guide Malick Koïta pour visiter les merveilles du Mali. Si Malick affirme qu’ils ne dépasseront pas la région de Mopti pour s’aventurer dans le Grand Nord, Massato est, lui, content d’être au Mali et de savoir que la situation n’est pas aussi chaotique que veulent le faire croire certains médias. 

Dogon Village

© Jmpmali

Superbe vue au pays du Dogon

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perspectives

Cameroun Ferme agropastorale de Manmenyie

pour une transformation locale des fèves de cacao La structure à capitaux camerounais veut booster la transformation de cette culture de rente qui se chiffre à près de 15% de la production nationale. Par Cathy Koum

La Ferme agropastorale de Manmenyie (Fapam), située dans la ville de Mbalmayo, à une trentaine de kilomètres de Yaoundé, la capitale camerounaise, est un espoir pour cette localité de plus de 100.000 âmes, essentiellement agricole et même pour le Cameroun. L’agroindustrie qui occupe les installations de l’ancienne gare routière de Mbalmayo s’est spécialisée dans le broyage des fèves de cacao pour produire du beurre, de la poudre et de la masse de cacao. «Jusque-là, l’essentiel de la production nationale de cacao était exporté sous forme de fèves. En dehors d’une usine qui existe à Douala, jusqu’à présent on n’avait pas eu une unité industrielle d’envergure et digne de ce nom qui transforme le cacao pour pouvoir exporter au moins un produit fini», explique Anatole Nkodo Ze, PDG de Fapam Industry S.A. Créée en 2012, la Ferme agropastorale de Manmenyie entre dans sa phase de production en 2013. La transformation, effectuée par la Ferme est de 3.000 tonnes par an. «Nous avons mis quelques produits sur le marché pour tester. La réaction a été très positive. Mais ce n’était pas un cycle commercial en bonne et due forme. Donc à partir de

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septembre nous entrons dans cette phase et nous serons présents tant sur le marché local qu’international. Nous allons lancer un certain nombre d’initiatives pour favoriser la consommation locale du beurre et du cacao», explique le promoteur du projet. Réduire le seuil de pauvreté Le projet Fapam est un bénéficiaire des différentes initiatives du gouvernement en faveur des structures de transformation locale du cacao. Objectif final, passé d’une transformation d’environ 15% de la production nationale au double. Le montant alloué au projet et qui s’élève à 1,4 milliard FCFA permet à la structure de se projeter à 16.000 tonnes de fèves de cacao à transformer chaque année. L’investissement total dans le cadre de cet agropole est évalué à 4,6 milliards de francs, dont 3,2 milliards apportés par les promoteurs. Parmi eux, la mairie de Mbalmayo qui a investi 300 millions de FCFA qui lui valent actuellement 30% des parts de cette agro-industrie 100% camerounaise. Il est prévu une extension de la structure pour transformer Fapam en une unité industrielle de

standard international capable de broyer 30.000 tonnes de fèves de cacao par an. Le projet porte toute une philosophie : «Il est question de mettre autour de cette usine un cercle de producteurs de cacao qui acceptent certains principes que nous édictons sur la qualité, la manière de sécher le cacao et qui consentent à travailler selon les normes techniques que nous leur proposons, et en échange, nous améliorons les conditions de vie des planteurs qui nous fournissent la fève et bien sûr nous donnons une valeur ajoutée à nos fèves», explique Anatole Nkodo Ze. En termes de vision, le projet compte, entre autres, réduire le seuil de pauvreté du Cameroun de 40,2 à 39,9% De même, le choix de la localité de Mbalmayo n’est pas un fait du hasard : «Nous avons voulu rapprocher les centres de production des richesses des paysans pour qu’ils ne soient pas les laissés pour compte du développement et Mbalmayo qui est à un jet de pierre des principales plantations de cacao. Mbalmayo est une ville carrefour. Nous sommes dans une position où nous pouvons recevoir le cacao des régions de l’Est et du Sud de même que celles du centre.». 


perspectives

Quatre questions à

Anatole Nkodo Ze, PDG de Fapam Industry S.A.

« Le soutien du gouvernement est efficace dans le secteur de l’agro-industrie »

Le président-directeur général de la Ferme agropastorale de Manmenye livre ses impressions concernant la politique agro-industrielle du Cameroun et revient sur les ambitions de sa structure. Propos recueillis par Cathy Koum

Pourquoi avoir choisi d’investir dans la transformation des fèves de cacao ? Mon choix a été motivé par le fait que la transformation du cacao est un secteur qui est très porteur en termes de débouchés et de développement de notre pays. Nous avons jusqu’à ce jour un certain nombre de cultures de rente destinées exclusivement à l’exportation. Nous pensons donc qu’en transformant localement, nous allons augmenter la richesse nationale par l’accroissement de la valeur ajoutée dégagée et nous pouvons continuer à faire des exportations qui nous rapporteront davantage. En opérant au moins la première transformation du cacao sur place, nous sommes sur la bonne voie pour lancer les bases d’une industrialisation soutenue de notre pays. Fapam Industry S.A. a signé une convention avec le gouvernement camerounais en 2014, une convention qui devrait permettre de transformer annuellement au moins 16.000 t de fèves de cacao. Qu’en est-il aujourd’hui de l’application de cet accord ? Nous entrons en production en mi-septembre 2015. Au moment où nous avons signé cette convention avec le ministère de l’Économie, nous avions déjà investi sur une ligne de production de 500 kg/h. Cette ligne de production nous a posé quelques petits soucis en installation. Nous avons donc, au cours de l'année, acheté de nouveaux équipements pour améliorer la qualité et le fonctionnement de cette première ligne. Nous projetons l’agrandissement de cette usine par l’acquisition de nouvelles lignes de production en Europe. Elles seront livrées au deuxième semestre 2015. Donc, dès 2016 nous serons en production pour atteindre les lignes évoquées plus haut En quels termes se décline l’apport du Fapam dans l’économie camerounaise ? Cet apport est multiforme. Nous avons du personnel, des bâtiments que nous construisons, des investissements se

chiffrant à des milliards, nous avons une liste importante de jeunes camerounais sortant des grandes écoles – des ingénieurs, des informaticiens et des juristes qui travaillent avec nous. Dans ce sens, nous apportons déjà quelque chose à l’économie camerounaise. Nous sommes aussi un consommateur d’électricité, d’eau et d’Internet. Nous entrons en phase de production et l’apport ici est beaucoup plus important que ce que je viens de citer. Cet investissement va donner du travail à un demi-millier de personnes de manière directe ou indirecte, sans compter les paysans que nous encadrons, qui vont produire le cacao que nous recueillons industriellement. Nous avons une politique ressources humaines dans l’entreprise qui consiste à encourager les jeunes cadres qui vont faire l’agriculture au niveau du cacao pour que nous puissions avoir des fèves de qualité à travers des partenariats Quelle est votre appréciation de la politique agroindustrielle du Cameroun ? Les autorités camerounaises font de grands efforts en termes de soutien à la production agricole notamment dans le secteur du cacao. Il y a beaucoup d’institutions qui interviennent : la Société du développement du cacao, le ministère de l’Agriculture et du développement rural, le Fonds de développement des filières cacaocafé. Il y a un certain nombre d’interventions qui sont efficaces. Mais le secteur qui nous concerne davantage est celui de l’industrie. Le soutien du gouvernement est efficace dans le secteur de l’agro-industrie, mais sa lenteur pèche. Lorsque des mesures sont prises, il y a de la lenteur pour les mettre en œuvre et c’est incompatible avec les exigences d’une production industrielle, parce que nous sommes en compétition avec des gens qui sont dans notre pays, en Afrique et dans le monde. On ne peut pas avoir des projets qui trainent parce qu’on attend qu’une décision déjà prise par le gouvernement soit mise en œuvre. Ça coûte cher à l’investisseur. C’est très gênant ! 

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perspectives

Internet le Cameroun multiplie les bandes passantes pour plus de fluidité et un meilleur coût

Par Cathy Koum

Le pays vient de procéder au lancement du chantier du troisième point d’atterrissement de câble sous-marin. Un autre projet du même genre est en voie d’être lancé. Objectif : favoriser un accès de meilleure qualité sur la toile et à moindre coût aux populations du pays.

© IT News Africa

vité des points d’atterrissement des câbles sous-marins. C’est finalement en juillet 2014 que MTN consent à rétrocéder l’infrastructure à l’État camerounais, après un audit des coûts. Il est inauguré en juillet 2015. À ces trois infrastructures il faut ajouter la construction prochaine du point d’atterrissement du câble sousmarin à fibre optique African Coast to Europe (ACE), qui sera exploitée par la filiale au Cameroun de l’opérateur télécoms français Orange, selon une convention signée avec le gouvernement, le 9 juin 2015 à Yaoundé. Huawei Marine Installe le Nigeria-Cameroon Submarine Cable System

Nigeria to Cameroon Submarine Cable System (Ncscs). C’est la dénomination du câble sous-marin à fibre optique qui devra relier sous peu le Cameroun et le Nigeria. Le premier mètre de cette infrastructure de communication électronique a été posé à Kribi dans le sud du pays, début août, par le ministre camerounais des Postes et télécommunications, Jean-Pierre Biyiti bi Essam. Ce projet d’un coût de 32 millions de dollars américains devrait permettre au Cameroun de disposer d’une capacité supplémentaire de 40 gigabits extensibles, dès sa mise en service prévue au plus tard en octobre, soit une vitesse d’exécution de 3 térabits par seconde. Il est le troisième point d’atterrissement de câble sous-marin au Cameroun.

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En 2002, le Cameroun fait ses premiers pas dans ce domaine, avec la mise en service du point d’atterrissement du câble sous-marin Sat-3 à Douala dans la capitale économique. Les capacités de la bande passante sont vite saturées au vu de la demande croissante des internautes camerounais. En 2009, l’opérateur de téléphonie mobile sud-africain MTN, qui a une filiale au Cameroun construit le Wacs (West Africa Cable System), le deuxième point d’atterrissement sous-marin à Limbe, dans le sudouest du pays. Capacité : au moins 30 fois supérieure à celle du SAT3. Mais il n’en sera pas utilisateur. Une loi votée à l’Assemblée nationale octroie à l’État camerounais l’exclusi-

Au bout du compte, explique le ministre des Postes et télécommunication, Jean-Pierre Biyiti bi Essam : «l’objectif de notre pays de disposer d’un accès large bande à des prix abordables vise à garantir notre compétitivité sur le plan international dans un monde globalisé en constante mutation. Il s’agit de promouvoir la disponibilité des capacités d’accès bon marché, pour permettre l’accès généralisé des populations des zones urbaines et rurales à la connaissance, et d’accroître les chances de réussite de leurs entreprises». En outre, le Cameroun pourra renforcer sa position stratégique dans la sous-région Afrique centrale, comme zone de transit pour les pays voisins enclavés et offrir le service de restauration/secours aux autres câbles sous-marins actuels et futurs.


perspectives

Burundi Un Turc investit dans la restauration en dépit de la crise

Par Jean Bosco Nzosaba

A priori, rien ne semblait prédestiner Yavuz Sirin à cette aventure burundaise. «J’ai découvert le Burundi par hasard, j’y suis venu pour la première fois en 2013 comme employé de l’Ambassade des États-Unis au Burundi quand je suis rentré chez moi une année après je n’ai pas résisté à l’envie de revenir», déclare à Anadolu, les yeux pétillants, ce jeune turc plein de vie et d’ambition.

© Erick Prince

Pour avoir pris goût à la vie au Burundi, Yavuz Sirin, un ressortissant de la Turquie, refuse d’en démordre et décide d’investir au Burundi au moment où d’autres se pressent de quitter ce pays en proie à une crise politique. En juin dernier, il a ouvert une place gastronomique à Bujumbura, Istanbul Turkish Kebab Restaurant.

Yavus Sirin découpant de la viande pour prépérer un kebab

Venu au Burundi par hasard, il y reste donc par amour du climat et des Burundais. «J’aime le climat, la nature et la courtoisie des Burundais, sinon la crise politique passera et elle ne me concerne même pas», explique-t-il à Anadolu.

traditionnels turcs. «Je suis naturellement tourné vers la gastronomie et comme j’avais remarqué qu’il existe, à Bujumbura, des menus traditionnels de plusieurs cultures étrangères comme les plats chinois, indiens, italiens, camerounais, etc., j’ai décidé d’y ajouter les menus turcs et c’est super apprécié ici», poursuit-il. Yavuz n’est pas le seul turc qui a pris goût à la vie au Burundais. D’autres lui ont précédé et l’ont, dans une certaine mesure, encouragé à planter sa tente au Burundi. «J’ai des amis, compatriotes, qui sont dans les affaires au Burundi, ils sont d’ailleurs parmi mes clients, on les trouve dans des secteurs variés comme le commerce, le Magasin Carrefour de Bujumbura est tenu par un Turc, les matériaux de construction, la vitrerie, la penture, la mécanique, etc.», déclare-t-il à Anadolu.

Son unique ambition est aujourd’hui de faire découvrir et aimer les plats

Le principal allié de Yavuz, Gabriel Bintunimana, burundais, est

Istanbul Turkish Kebab est situé dans le quartier de Kamenge, en mairie de Bujumbura, à quelques encablures d’un Snack Bar appartenant au général Adolphe Nshimirimana, ancien patron de la Documentation (Service des renseignements) et bras droit du Président de la République, Pierre Nkurunziza.

confiant. «Je suis avec lui dès le début, comme je suis burundais, et que je m’y connais dans la restauration, je l’aide dans les contacts, c’est aussi grâce à moi qu’il a trouvé ce bâtiment qui abrite les activités de restaurations», a-t-il confié à Anadolu. Pour attirer grand monde dans un contexte de crise économique, Yavuz pratique des prix concurrentiels. «Les prix du restaurant tournent autour de 2 dollars (3.000 francs burundais, ndlr) pour manger et boire, c’est à la portée de toutes les bourses», conclut-il. Depuis le début des manifestations contre le troisième mandat de Nkurunziza, plusieurs activités ont été perturbées ou suspendues à Bujumbura et dans le reste du pays. Cette situation a également contraint nombre d’investisseurs à quitter le pays. Yavuz, imperturbable et optimiste, fait figure d’exception. 

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© sekem

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le grand entretien

Dr. Ibrahim Abouleish Fondateur de Sekem Holding

«L’ agriculture biologique, un levier incontournable pour résoudre des problèmes sociétaux» Entretien réalisé par Elimane Sembène

En 1977, le Dr. Ibrahim Abouleish a créé en Egypte l’entreprise Sekem. Son objectif : faire du développement durable une véritable locomotive de l’émergence éonomique du pays des pharaons. Après presque quatre décennies d’existence, Sekem jouit d’une grande notoriété tant en Égypte qu’à l’échelle internationale. Sekem est passé du statut de PME au rang de Holding qui figure parmi les leaders du marché de la production biologique en Afrique et dans le monde. Dans cet entretien accordé à ABJ, il revient notamment sur les raisons qui ont motivé la naissance de ce projet, l’impact du développement durable dans l’économie africaine, les difficultés rencontrées par certains pays africains dans le marché de l’export, ainsi que le rôle de l’entrepreneuriat agricole dans la lutte contre le chômage des jeunes.

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le grand entretien

Dr. Ibrahim Abouleish. Sekem a été créé dans le but de promouvoir le développement durable et de valoriser ainsi la terre. L'agriculture biodynamique est l'un des piliers du développement durable que nous utilisons afin d’entretenir de manière durable la terre. Il est un concept holistique qui inclut le développement culturel, l'économie et la vie sociale. Lors de mon séjour au pays en 1975, j'ai pu constater les circonstances difficiles auxquelles l'Égypte faisait face. J'ai ainsi développé SEKEM en partant de ma propre vision ; mon inspiration spirituelle est le fruit de cultures très différentes, une synthèse entre le monde islamique et la spiritualité européenne. Miser sur le développement durable pour garantir un avenir où chaque être humain peut déployer son potentiel individuel; où l'humanité vit ensemble dans les formes sociales qui reflètent la dignité humaine ; et où toute l'activité économique est conduite conformément aux principes écologiques et éthiques. Votre père disposait d’une fabrique de savon et de confiserie, votre grand-père était négociant en engrais chimiques. Les influences familiales ont-elles été déterminantes dans la création de Sekem? Mon père et mon grand-père ont suscité en moi l'esprit d'entreprise, et mes parents ont pris en charge mon éducation à l'étranger, mais l'idée de Sekem je l’ai développée à partir de mon expérience internationale et mon engagement pour le développement humain.

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«Miser sur le développement durable pour garantir un avenir où chaque être humain peut déployer son potentiel individuel où l'humanité vit ensemble dans les formes sociales qui reflètent la dignité humaine et où toute l'activité économique est conduite conformément aux principes écologiques et éthiques.»

© sekem

Sous votre impulsion, le projet Sekem, basé sur les principes de l’agriculture biodynamique, a vu le jour en 1977 en Égypte. Quelles sont les raisons qui ont motivé sa naissance ?

Entre 1977 et 2015, Sekem est passé du statut de PME au rang de Holding qui figure parmi les leaders du marché de la production biologique en Afrique et dans le monde. Vous attendiez-vous à une telle réussite quand vous aviez lancé ce projet ? Quand j'ai commencé à mettre en place Sekem, j'avais pour objectif de le développer à l’échelle internationale. Non seulement en traitant

les sols d'une façon responsable et en faisant la promotion des produits biologiques, mais en épousant un concept holistique qui inclut le développement culturel, une économie basée sur l'amour et la vie en société. Ce que les gens appellent le succès est une partie de notre mission. En effet, la mise en œuvre de notre vision du développement durable consiste à construire avec succès les institutions culturelles, à intégrer la recherche ou à promou-


le grand entretien voir une économie responsable, respectueuse et réussie.

«Nous travaillons avec une approche holistique axée sur quatre dimensions (l’écologie, la vie sociétale/régime politique, la vie culturelle et économique). Dans l'enseignement Sekem, la recherche et la santé, par exemple, bénéficient de la même prise de conscience que les intérêts écologiques ou économiques.»

© sekem

La formation, la transformation industrielle, l’innovation technologique, l’export, la RSE, et les énergies renouvelables. Autant de produits développés par votre groupe à travers ses six entreprises. Pourquoi cette approche multisectorielle ? Quand je réfléchis à nos problèmes actuels de façon approfondie, je me rends compte qu'ils ne peuvent être considérés séparément comme étant des problèmes indépendants les uns des autres, qu’ils sont tous liés. Nous avons besoin d'une nouvelle prise de conscience de la réalité et ceci peut être fait par une nouvelle compréhension scientifique de la vie et des différents systèmes de vie comme le système sociétal et écologique. Cette nouvelle prise de conscience aura un impact énorme sur les sciences, l'économie et la politique. La diversité de l'entreprise est souvent mal comprise. La diversité c’est la vie et le développement durable. Nous travaillons avec une approche holistique axée sur quatre dimensions (l’écologie, la vie sociétale/régime politique, la vie culturelle et économique). Dans l'enseignement Sekem, la recherche et la santé, par exemple, bénéficient de la même prise de conscience que les intérêts écologiques ou économiques. Cette diversité est très importante pour une communauté vivante et apprenante, et pour l'ensemble de l'humanité. Nous ne pouvons changer et développer le monde que si nous accordons à ces quatre dimensions le même niveau de prise de conscience et si nous avons une chaîne de valeur de proximité qui nous permet non seulement d’élaborer des produits de haute qualité, mais aussi de nous assurer que toutes les conditions sont réunies pour que les opérations soient effectuées de manière durable.

C’est ce que nous faisons, pour développer l'être humain, la nature et la société. En 1977, vous êtes revenu investir en Égypte après vos études de chimie et de médecine en Autriche. Aujourd’hui, l’agriculture polarise environ 70  % de la population dans beaucoup de pays en Afrique. N’est-il pas temps de promouvoir l’entrepreneuriat agricole pour réduire les taux de

chômage élevés chez les jeunes ? L'esprit dont a besoin l’entrepreneuriat est le plus important. Quelqu'un qui est capable de conduire un processus depuis la matière première jusqu'au produit final n’a pas seulement besoin de compétences très précises, mais aussi d’une âme généreuse, d’une bonne éducation et d’un sens culturel élevé. Ceci est un énorme processus qui commence déjà dans

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© WolfgangSchmidt

le grand entretien

BIOEXPRESS Né en Egypte, dans une famille bourgeoise, Ibrahim Abouleish reçoit une éducation ouverte sur le monde par son père, qui l'incite à s'intéresser à l'Europea. Il fréquente une école française puis une école égyptienne. Les influences de sa famille déterminent sa carrière : un grand-père négociant en engrais chimiques, un père qui avait créé une fabrique de savon et une autre de sucrerie, un oncle lettré qui l'incite à la lecture. Alors qu'il est adolescent, à la suite de la découverte des « Souffrances du jeune Werther» de Goethe, il prend la décision intérieure de poursuivre ses études en Europe. En 1956, Ibrahim Abouleish déménage en Autriche où il commence ses études de chimie et de médecine, à l'université de Graz. Il passe son doctorat en 1969 dans le domaine de la pharmacologie, travaille ensuite dans la recherche pharmaceutique et dépose des brevets pour un certain nombre de nouveaux médicaments, en particulier contre l'ostéoporose et l'artériosclérose. Durant cette période, la réflexion d'Ibrahim Abouleish trouve son inspiration chez des penseurs européens, tels que Johann Wolfgang von Goethea, ou Rudolf Steiner et son mouvement anthroposophique d'influence chrétienne. Son passage en Europe l'a marqué et, comme il le dit lui-même : «Depuis, je porte la culture européenne en moi.». Au cours d'une visite en Égypte en 1975, il est accablé par les conditions déplorables, économiques et sociales, de son pays d'origine (crise de l'éducation, surpopulation, pollution). En 1977, Ibrahim Abouleish y retourne avec une vision claire d'un projet de communauté intégrée où il veut faire pousser des aliments biologiques. Il veut associer lier les aliments sains au développement communautaire et agricole en Egypte. En 1979, il fonde SEKEM (un projet global de développement).

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l'enfance et suppose un développement continu. À Sekem, nous essayons depuis plus de 30 ans de sensibiliser à l'importance de l’éducation culturelle et des compétences sociales nécessaires, en plus de la pensée économique et la qualité, pour créer un esprit entrepreneurial gagnant. Nous essayons d'encourager l'esprit d'entrepreneur de nos agriculteurs égyptiens qui travaillent sous contrat en tant que fournisseurs. Jusqu'à aujourd'hui, Sekem a pris en charge via l'Association égyptienne biodynamique plus de 400 agriculteurs dans la transformation de leur entreprise agricole conventionnelle en une entreprise agricole biodynamique. De notre expérience, nous pouvons dire que ce qui est nécessaire pour promouvoir l'esprit d'entreprise agricole est un énorme processus qui a besoin d’être développé sur plusieurs générations, des siècles durant. Plusieurs pays africains peinent à exporter leurs productions à cause des législations internationales contraignantes et qui ne prennent pas souvent en compte certaines réalités. Au niveau de Sekem, vous avez commencé l’export depuis 1981, notamment vers les États-Unis et l’Europe. Selon vous, quelles sont les techniques de production à adopter et les chaînes de valeurs que ces pays doivent privilégier pour que leurs produits soient plus compétitifs sur le marché international? Nous n’exportons pas des matières premières, mais des produits manufacturiers. À Sekem, nous avons une chaîne de valeur de proximité qui nous permet de mettre sur le marché un produit totalement transparent, qui rassure le client qu'il achète de façon responsable. Ce qui empêche de nombreux pays et entreprises d’exporter ce n’est pas la qualité de la matière première, mais les ca-


le grand entretien

«Nous ne pouvons changer et développer le monde que si nous avons une chaîne de valeur de proximité qui nous permet non seulement d’élaborer des produits de haute qualité, mais aussi de nous assurer que toutes les conditions sont réunies pour que les opérations soient effectuées de manière durable.»

pacités limitées des personnes et le manque de main-d’œuvre qualifiée. The World of Organic Agriculture révèle dans son rapport 2014 qu’en 2012, il y avait 1,9 millions d'exploitations agricoles certifiées biologiques dans 164 pays, 37,5 millions d'hectares bio, et un marché mondial évalué à 63,8 milliards de dollars US. Quelle place occupe le biologique dans l’agriculture africaine ? Nous croyons que l'agriculture biologique n’est pas seulement importante pour l'Afrique, mais qu'elle est la solution pour un grand nombre de problèmes auxquels le monde est confronté. L'agriculture biologique assure seulement une protection très précieuse des sols dont nous avons besoin de toute urgence, par exemple pour assurer la sécurité alimentaire, mais constitue aussi un levier incontournable pour résoudre des problèmes sociétaux : en créant des emplois, en fournissant un environnement de travail sûr et sain et des revenus équitables, l'agriculture biologique aidera l’Afrique parmi tant d'autres dans la lutte contre la pauvreté. Alors que 10 millions d'hectares de terres sont perdus chaque année du fait de pratiques agricoles non durables, l'agriculture biologique

a démontré d'énormes avantages comme l'augmentation de la fertilité des sols et donc la productivité sur le moyen/long terme ; l’amélioration de la structure du sol et sa capacité à retenir et à filtrer l'eau, ce qui se traduit par des besoins en irrigation plus faibles et un impact limité des sécheresses et des inondations ; la réduction de la pollution de l'eau et le lessivage des nitrates dans les eaux souterraines ; la réduction de l'érosion par le vent, l'eau et le surpâturage ; l’augmentation de la séquestration du carbone dans le sol et donc, une plus grande contribution à l'atténuation du changement climatique, tout en étant intrinsèquement adaptée au changement climatique. Globalement, les avantages combinés des pratiques biologiques – y compris la non-utilisation d'engrais synthétiques, a permis de réduire les émissions d'oxyde d'azote dans les exploitations agricoles, et la séquestration du carbone dans le sol – ont un potentiel de réduction des émissions de GES (gaz à effet de serre) de 5,1 à 6,1 équivalents de CO2 GT. Cela signifie qu’une conversion globale à la gestion organique éviterait à l'agriculture d'être la principale cause du changement climatique, tout en la transformant en une activité neutre en carbone qui est plus résistante contre les intempéries de plus en plus imprévisibles.

Souvent, lors de ses interventions dans les médias Pierre Rabhi, icône et fervent défenseur de l’agriculture biologique, déclare que les organismes génétiquement modifiés (OGM) sont «un crime contre l’humanité». Êtes-vous du même avis ? Absolument ! Les conséquences vont de rendements défaillants à d'innombrables impacts sur la santé jusqu’à la perte de la biodiversité et de la résistance aux pesticides des mauvaises herbes suivies par les applications de toxine plus fortes. Lorsque le génie génétique est appliqué, les séquences transgéniques entrent dans l'approvisionnement en semences pour les variétés de cultures traditionnelles. Les véritables bénéficiaires des OGM ne sont ni les agriculteurs, ni les sociétés pauvres et affamées, mais la grande biotechnologie qui profitent de façon récurrente de la dépendance des agriculteurs à leurs produits. Le modèle économique de Sekem ressemble plus ou moins aux méthodes du centre Songhaï* du Bénin. Existe-t-il un partenariat basé sur des échanges d’expérience entre les deux structures? Non, malheureusement. Le 18 novembre 2007, vous avez publié aux éditions Aethera le livre «Sekem, une communauté durable dans le désert égyptien». Est-ce une manière pour dévoiler les facteurs de succès de Sekem et inciter à la duplication de votre modèle ? Nous l'espérons bien ! Nous voulons partager nos expériences et démontrer que ce qui semblait impensable quelques années auparavant est devenu une réalité. En racontant mon histoire, je veux donner aux gens le senti-

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le grand entretien ment que nous sommes toujours en mesure d'initier des changements peu importe les difficultés rencontrées. Le concept holistique qui a été construit par Sekem est quelque chose que les gens peuvent apprendre. Je veux donner une impulsion à l'adoption de l'approche des quatre dimensions qui construisent le fondement d'un avenir durable.

Nous sommes ouverts et accueillons très favorablement l'introduction de «think tank» au sein de l'Université Héliopolis pour le développement durable, où nous permettons aux jeunes d’être les champions du développement durable dans les différentes sphères de la vie. Nous offrons un espace où les nouvelles idées trouvent un terrain fertile pour la recherche et l'apprentissage. L'approche de l'éducation combine l’enseignement, la recherche et la pratique d'un programme de développement humaniste unique en son genre. En plus, nos professeurs travaillent également sur des modèles de «think tanks». En 2003, vous avez reçu le Prix Nobel alternatif. Des entreprises de Sekem Holding ont remporté de nombreuses récompenses au plan national et international. Que représentent ces trophées pour vous ? Pendant plus de 25 ans, Sekem s’est développé sans faire de bruit, voire de manière silencieuse. En 2003, cela a brusquement changé. Nous avons été honorés et récompensés pour

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© sekem

Aujourd’hui, après presque quatre décennies d’existence, Sekem jouit d’une grande notoriété tant en Égypte qu’à l’échelle internationale. Pensez-vous mettre en place un think tank pour consolider votre leadership ?

«Nous essayons d'encourager l'esprit d'entrepreneur de nos agriculteurs égyptiens qui travaillent sous contrat en tant que fournisseurs. Jusqu'à aujourd'hui, Sekem a pris en charge via l'Association égyptienne biodynamique plus de 400 agriculteurs dans la transformation de leur entreprise agricole conventionnelle en une entreprise agricole biodynamique.»

notre approche durable et pour la première fois nous avons ressenti la valeur de Sekem et aussi la responsabilité de mener cette impulsion à l’échelle mondiale. Le phénomène de la reconnaissance internationale montre que Sekem n’est pas perçue comme un vase clos par les personnes

directement impliquées, mais nous donne la chance de propager notre vision du développement durable par l'intermédiaire d'un vaste réseau en direction du monde.  *Auquel nous avons consacré un Business Case dans ABJ N°8


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les transform@cteurs

Entretien

Adil Douiri

Directeur général de Mutandis

«Le niveau d’optimisme des opérateurs marocains pour l’Afrique n’a jamais été aussi élevé» Mutandis est tantôt considérée comme un fonds d’investissement tantôt comme un groupe industriel ? Qu’en est-il réellement ? Mutandis est un groupe industriel intégré avec 6 usines, 3.000 salariés. Nous sommes présents dans quatre secteurs d’activité qui sont les détergents, les produits de la mer, les bouteilles alimentaires et la distribution automobile. Nos entités se développent en faisant elles-mêmes des acquisitions. Nous avons l’ambition d’être un petit «Unilever» régional. Quand nous avons créé le groupe fin 2008, il n’y avait rien, par la suite la société d’investissement a acheté ou fusionné des entreprises (usines en marche ou à l’arrêt et des marques) entre elles, elle les a développées, les a changées d’où le nom latin «Mutandis» qui renvoie à la mutation. Le nom de votre groupe industriel «Mutandis» provient de l’expression latine «Mutatis mutandis» qui signifie littéralement «ce qui devait être changé ayant été changé». Concrètement, quels sont les changements apportés par votre groupe dans le secteur industriel au Maroc ? Mutandis a mis en avant, avec beaucoup de force, la valeur et l’importance d’une marque. Nous sentons devoir relever un challenge

40 | AFRIcan business journal | N°16

qui est qu’historiquement les marques fortes n’appartiennent pas aux pays en voie de développement, elles appartiennent aux multinationales. Nous pensons que ces pays passent par une phase où leurs industries ne sont que des sous-traitants, sans marques, et dans une seconde phase, ils développent des industries qui ont des relations directes avec le consommateur final. Notre groupe a essayé et continuera de faire cela avec des marques qui lui appartiennent où celles dont nous sommes partenaires. Par exemple dans le secteur de l’automobile, nous développons des marques partenaires, par contre dans les détergents et les produits de la mer ce sont nos propres marques. La moitié de notre activité produits de la mer qui sont des conserves de poissons est exportée en Afrique et l’autre moitié est vendue en Europe (40%) où nous n’avons pas de marques, nous vendons aux marques des grandes surfaces des supermarchés et hypermarchés en Allemagne, en Scandinavie, au Benelux, et en Grande-Bretagne. Mutandis envisage une introduction en Bourse avant fin 2015. Vous prévoyez de soumettre votre dossier au Conseil déontologique des valeurs mobilières (CDVM) pour

une validation attendue au quatrième trimestre. Où en êtes-vous ? Nous travaillons avec les banques-conseils pour évaluer à la fois l’état de la Bourse, l'évaluation potentielle de ce qu’elle pourrait donner aujourd’hui à Mutandis, la taille et la structuration de l’opération (tranches, petits porteurs, institutionnels, étrangers…). Nous prévoyons de déposer une notice à valider par CDVM pendant l’été pour avoir une validation au début de l’automne. Les introductions en Bourse dépendent toujours de l’état de la Bourse ; il faut qu’elle reste dans un état correct et convenable pour qu’on appuie sur le bouton qui déclenche l’introduction en Bourse au quatrième trimestre de l’année 2015. Pourquoi avoir pris cette option et non l’ouverture de votre actionnariat à d’autres investisseurs ? Notre actionnariat est très ouvert à d’autres investisseurs ; il n’a pas cessé de s’ouvrir. J’étais le seul au début, ensuite quinze actionnaires l’ont fondé collectivement, et aujourd’hui nous sommes au tour de 60 actionnaires. Donc nous avons régulièrement ouvert notre capital aux actionnaires qui le souhaitaient en 2008 et 2011. Depuis 2011, nous nous sommes concentrés sur les indus-


les transform@cteurs

© Brahim Taougar

en Mauritanie et au Mali pour une phase de lancement. Nous voulons qu’au moins 15 ou 20% de notre chiffre d’affaires actuel dans les détergents s’ajoutent à l’export.Pour les bouteilles alimentaires, nous sommes déjà à fond sur l’export, car 20% des bouchons et environ 10% des bouteilles sont vendus en dehors du Maroc avant même l’ouverture du bureau de Nouakchott et d’autres partenariats industriels que nous étudions en Afrique de l’Ouest.

tries pour les développer et le transformer, ce qui fait que nous n’avons pas ouvert notre capital ni changé notre actionnariat. Nous avons un capital permanent et perpétuel qui finance le développement du groupe, donc il est important de le faire respirer, qu’il y ait de nouveaux actionnaires qui rentrent, que certains qui sont rentrés il y a cinq ou six ans puissent réévaluer leur plus value, d’où notre projet d’entrée en Bourse par augmentation de capital. Le nouveau capital que Mutandis va collecter lui permettra de se développer plus vite, notamment de réaliser des acquisitions en Afrique.

niques pour régler les machines et pour que le produit fini se fasse pour le mieux. Notre première unité en dehors du Maroc sera installée à Nouakchott en Mauritanie et se spécialisera dans le métier des bouteilles alimentaires.

Quelle sera votre stratégie développement en Afrique ? Elle se fera en deux étapes. Il s’agira dans un premier temps de connaitre les marchés et le consommateur. Nous allons signer des contrats de distribution avec des distributeurs ou des partenariats industriels avec des industriels locaux et on exporte. Certaines de nos activités l’ont entamé depuis longtemps l’export tandis que d’autres viennent de commencer. Dans la deuxième phase, nous étudions assez rapidement la possibilité de produire localement.

Votre groupe industriel est présent dans l’emballage plastique de boissons, les détergents et produits ménagers, la conserve de poisson et la distribution automobile. Quel secteur comptez-vous privilégier dans votre stratégie d’export en Afrique ? Nous avons un métier qui est historiquement très fort en Afrique qui est celui des produits de la mer, 50% de notre chiffre d’affaires est réalisé en Afrique, essentiellement au Cameroun, au Congo et en Angola. Notre stratégie c’est de compléter les territoires et de renforcer de nos marques, car pour ne pas avoir des prix volatiles qui dépendent de l’offre et de la demande il faut qu’il y ait une marque qui soit reconnue comme différente par le consommateur avec une différenciation des attributs et une qualité spéciale qui lui permet d’avoir un prix relativement constant. Par contre, les volumes globaux vendus en Afrique ne vont pas beaucoup augmenter parce que les produits de la mer dépendent de la ressource, le volume de la pêche. Nous sommes passés de 25.000 tonnes à 40.000 par an. Pour les détergents, nous avons signé quatre contrats de distribution au Sénégal, en Côte d’Ivoire,

Avez-vous en ligne de mire des projets de joint-venture ? Nous avons des projets de joint-venture dans le métier des bouteilles alimentaires. On a un projet qui est de créer des bouteilles et des bouchons en partenariat avec des embouteilleurs. La bouteille et le bouchon représentent environ 20% du coût d’une boisson alimentaire. Nous concevons ensemble une bouteille, un format, une esthétique, une technologie de bouchon et ensuite nous les produisons ensemble avec des équipes tech-

Pourquoi la Mauritanie ? Parce que c’est le marché qu’on a le plus vite connu et compris, le nombre d’embouteilleurs n’est pas très important, les partenariats locaux sont faciles à construire, et il n’y a pas de producteurs. C’est un marché qui permettra aussi de servir les embouteilleurs du Sénégal et du Mali. C’est juste une première étape.

Dans votre carrière, vous avez été notamment ministre du Tourisme du Maroc entre 2002 et 2007. Aujourd’hui, vous évoluez dans le milieu financier au sein d’une structure privée. Quel est le point commun entre le grand commis de l’État et le chef d’entreprise ? C’est le développement. Les deux doivent être développeurs et optimistes. Le ministre du Tourisme est un développeur de projets et de capacités hôtelières nouvelles. Le chef d’entreprise et le ministre développent du business pour stimuler la création d’emplois. Le Maroc a mis en place une stratégie pour renforcer la coopération Sud-Sud avec les pays d’Afrique subsaharienne, en témoignent les dernières visites de Sa Majesté le Roi Mohammed VI. Ce nouveau projet de Mutandis, n’est-ce pas un pas supplémentaire dans cette diplomatie économique orchestrée par le Royaume ? Sa Majesté le Roi a impulsé cette diplomatie économique avec dix pays africains ce qui nous permet de comprendre la dynamique et la logique et de nous engager dans le même chemin avec le concours de la règlementation marocaine notamment l’Office des changes. Nous avons aussi en face de nous des pays qui sont réceptifs aux projets d’investissement, qui ont une relation amicale avec le Maroc, et qui ont compris qu’ils peuvent s’inspirer parfois de certaines choses dans l’expérience marocaine. Il existe cette complicité entre les gouvernements dont les opérateurs économiques bénéficient. Il y a un niveau d’optimisme des opérateurs marocains pour l’Afrique qui n’a jamais été aussi élevé. Ils n’hésitent pas à investir dans le continent et s’échangent même des informations sur leurs projets. C'est un nouvel état d’esprit chez l’entrepreneur marocain qui franchit un palier et je suis content que Mutandis s’inscrive dans cette dynamique.

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crowd une aubaine pour

Le financement participatif plus connu sous le nom de crowdfunding s’impose de plus en plus comme une réelle alternative dans le monde du financement. Plusieurs start-ups ont recours à des plateformes dédiées pour récolter des fonds et développer leurs projets. Dans son rapport annuel sur les tendances du crowdfunding dans le monde publié début 2015, «Massolution» révèle l’existence de plus de 1.250 plateformes de crowdfunding actives dans le monde en 2014, dont la majorité en Europe occidentale et en Amérique du Nord. Aujourd’hui, le marché est en plein boom. La croissance est exponentielle ; elle est passée de 2,7 milliards de dollars en 2012 à 16,2 milliards en 2014, soit une hausse de plus de 13 milliards. D’après ces prévisions, 34,4 milliards devraient être investis en 2015, quasiment le double par rapport aux sommes récoltées en 2014.

© Getty Images

Cependant, l’Afrique tarde à prendre ses marques. Le crowdfunding n’est pas encore très développé en Afrique. Le faible taux de bancarisation et de pénétration d’internet en sont les principaux freins. Autre contrainte et pas des moindres, l’inexistence d’une législation qui régit le secteur comme c’est le cas notamment en France. Plusieurs entrepreneurs africains sollicitent l’accompagnement de plateformes européennes comme Kisskissbankbank pour financer leurs projets. D’autres plateformes comme Afineety ont même décidé de s’implanter en Afrique pour attirer ces jeunes pousses. Des portails africains comme le site ghanéen Slicebiz et le marocain Smala & Co essaient de tisser leur toile devant cette rude concurrence.

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Réalisé par Elimane Sembène

funding

affrontements post-électoraux meurtriers (3.000 morts) entre 2010 et 2012, la Côte d'Ivoire sous le nationale, avec l’ambition de devenir une économie qui émerge à l’horizon 2020. Retour sur 60 ans que ivoirien", la crise du modèle économique (Capitalisme d’Etat) dans les années 80 et 90, sur la crise rités gouvernementales ivoiriennes, le Plan National de Développement 2012-2015.

les start-up africaines

Le crowdfunding est souvent méconnu du grand public. C’est pourquoi nous avons donné la parole à des acteurs clés du secteur en Afrique et dans le monde pour vulgariser ce concept à savoir Vincent Ricordeau, co-fondateur de Kisskissbankbank, Thierry Barbaut, responsable Internet & Communication à l'Agence des Micro Projets, Arnaud Pinier, président et co-fondateur de Smala & Co, Eric Marty, directeur général d’Afineety, et Charlotte Dhenaux, rédactrice en chef du site «Goodmorning Crowdfunding». Dans ce focus, nous allons voir que le crowdfunding existe en Afrique depuis belle lurette avec notamment le système de «tontines» initiées par la gent féminine. Outre sa vocation sociale, elle procure une sécurité financière à ses adhérents. La tontine a un rôle économique puisqu’elle permet aux participants de réaliser des investissements à court ou moyen terme, ou à bien organiser un évènement familial comme les baptêmes et les mariages. En dépit de son caractère informel, elle les initie également aux rouages de la finance élémentaire à travers la mobilisation d’épargnes, le versement périodique des cotisations, etc. Même des femmes africaines de la diaspora s’y mettent. Au Cameroun, on assiste à la bancarisation des tontines avec la naissance des «tontibanques», des projets initiés par des plateformes de microfinance comme les Mutuelles communautaires de croissance (MC²) lancées par le Dr Paul Fokam, fondateur de Afriland First Bank, ou CECICAMEU (Société coopérative d‘épargne et de crédit d’investissement du Cameroun-Epargne utile). 

Réalisé par Elimane Sembène

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© D.R.

FOCUS

La finance pour tous !

Le financement participatif plus connu sous le nom de crowdfunding s’impose de plus en plus comme une réelle alternative dans le monde du financement. Plusieurs start-ups ont recours à des plateformes dédiées pour récolter des fonds et développer leurs projets. Le saviez-vous ? La célèbre statue de la Liberté qui illumine New York a été construite grâce à une opération de crowdfunding réalisée entre 1875 et 1880. Une pareille expérience, peu connue du grand public, démontre que l’avènement de ce mode de financement ne date pas d’aujourd’hui. Le financement participatif aurait vu le jour au 18e siècle ; sous l’impulsion d’associations caritatives qui faisaient des dons pour soutenir ceux qui ne pouvaient pas accéder aux services bancaires. Trois siècles plus tard, le crowdfunding gagne ses galons, une expansion fulgurante portée par internet, et au premier chef les réseaux sociaux. Les particuliers le considèrent comme un tremplin efficace pour réaliser des rêves, les startups le voient comme une réelle alternative pour contourner le manque de financement des banques. D’autant plus que le principe est simple : poster son projet dans des plateformes de financement et lancer sa campagne à travers les réseaux sociaux comme Facebook, Twitter, LinkedIn, etc.

Un marché qui pèse 16,2 milliards de dollars Aujourd’hui, le marché est en plein boom. La croissance est exponentielle ; elle est passée de 2,7 milliards de dollars en 2012 à 16,2 milliards en 2014, soit une hausse de plus de 13 milliards. Dans son rapport annuel sur les tendances du crowdfunding dans le monde publié début 2015, «Massolution» révèle que cette forte hausse est notamment due à la montée en puissance du financement participatif en Asie ou les volumes ont atteint les 3,4 milliards de dollars, soit une hausse de plus de 320%, devant l’Europe (3,26 milliards de dollars). Le système de financement via prêt connu sous l’anglicisme «crowdlending» a dominé le marché avec 11,08 milliards de dollars amassés. «Les projets d’affaires et d'entrepreneuriat ont été les catégories de crowdfunding les plus populaires, ils ont récolté 6,7 milliards de dollars en 2014, ce

qui représente 41% du volume total de crowdfunding. Les causes sociales (3,06 milliards de dollars), les films et les arts de la scène (1,97 milliard), l'immobilier (1,01 milliard), et la musique et d'enregistrement des arts (736 millions) complètent les cinq premières catégories», indique le rapport. On dénombrait également plus de 1.250 plateformes de crowdfunding actives dans le monde en 2014, dont la majorité en Europe occidentale et en Amérique du Nord. Cette forte hausse ne serait que l’ébauche d’une embellie en gestation. Selon les prévisions «Massolution», 34,4 milliards devraient être investis en 2015, quasiment le double par rapport aux sommes récoltées en 2014. Le magazine «Forbes», pour sa part, table sur un marché de 1.000 milliards en 2020. Autant d’ingrédients financiers qui aiguiseront forcément les appétits. 

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FOCUS

Modèles de financement

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1. Le Don Les individus effectuent une contribution financière à un projet sans aucune attente de rendement financier en contrepartie de cette contribution. La principale force motrice derrière les contributions individuelles dans ce modèle est un désir personnel d’appuyer le développement et la réalisation d’un projet, lequel est d’une certaine façon utile pour le contributeur. Les projets et les plateformes qui ont recours au modèle du don utilisent habituellement aussi un système de récompenses ou de mesures incitatives pour aider à stimuler les contributions.

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2. Le Prêt • Une entente de prêt traditionnelle : les modalités standard sont utilisées et l'on s'attend à un remboursement monétaire sous la forme d'intérêts. Dans ce cas, les prêts peuvent être garantis ou non, selon la plateforme de financement participatif utilisée.

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• Un prêt à remboursement conditionnel : les contributions sont remboursées au prêteur seulement si une des deux conditions suivantes est respectée : si et quand le projet commence à générer des revenus, ou si et quand le projet commence à créer un profit. • La prévente : le produit fini est promis en échange de la promesse de financement du contributeur. Dans le cas d’un modèle de prêt de type prévente, le montant des contributions est déterminé selon une évaluation de la juste valeur marchande du produit. De plus, les contributions plus importantes sont habituellement accompagnées d’une promesse d’un plus grand nombre d’exemplaires du produit, équivalant à la valeur du montant de la contribution.

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3. L’Investissement Cela ressemble à une participation standard au capital, où un particulier reçoit une part d’équité sous forme de titres ou d’intérêts d’une entité moyennant du financement. Il existe deux sous-catégories de financement participatif selon le modèle de l’investissement :

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Modèle de participation au capital – des actions de l'entreprise sont achetées par des investisseurs. Dans ce modèle, les contributeurs achètent des droits de propriété de l'entreprise mère ou des droits dans un projet. Modèle de partage des profits ou des revenus – une part des revenus ou des profits du projet est acquise par les investisseurs, contrairement à des actions dans la société de production. Cela est également connu sous le nom de «modèle d'investissement collectif». Avec le site spécialisé crowdfunding.cmf-fmc.ca

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FOCUS

Entretien

Vincent Ricordeau

co-fondateur de Kisskissbankbank

«Nous prévoyons d’installer une filiale en Afrique francophone»

© Marion Barat

leurs produits soient mieux présentés, leur donner un maximum d’outils et de conseils pour réussir leur collecte de fonds, car notre plateforme ne se rémunère que si les collectes de fonds sont réussies. Quand le projet se fixe un objectif de 10.000 euros et qu’il en collecte 6.000, on rend l’argent aux internautes gratuitement parce qu’on considère que le projet n’a pas pu être financé comme il a été promis. Dans ce cas, on ne touche pas de commissions. Toute l’équipe est formée et forme les créateurs de projets pour se donner un maximum de chances de réussir les collectes de fonds puisque c’est l’intérêt de tout le monde.

Kisskissbankbank fait partie des plateformes de crowdfunding les plus actives dans le monde. De quoi s’agit-il concrètement ? Nous avons lancé Kisskissbankbank en 2009, nous avions commencé à écrire le projet en 2007. Le mot crowdfunding n’existait pas à l’époque, donc nous faisons partie des pionniers. Aujourd’hui, on est leader français et européen, et nous sommes troisième mondial derrière les deux gros américains Kickstarter et Indiegogo pour ce qui est des dons. Nos projets sont majoritairement culturels, artistiques ou technologiques. Quels types d’accompagnements proposezvous aux porteurs de projets ? Nous avons une équipe de six personnes qui accompagnent les projets, nous essayons d’interagir avec les porteurs de projets pour que

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Quels sont les critères pour bénéficier de votre accompagnement ? Il faut d’abord accéder à la plateforme et s’inscrire, ensuite sur la base des informations que vous avez fournies à la plateforme il sera décidé si le projet est éligible ou pas en fonction de trois grands critères : sa crédibilité, sa maturité et sa légitimité par rapport à l’environnement. Dans le dialogue avec les porteurs de projets, nous essayons de vérifier ces trois points. Si ces trois critères sont réunis, le projet est validé et il peut entamer sa campagne de collecte de fonds. Peut-on avoir des statistiques sur le montant total des financements que vous avez récolté depuis le début de vos activités ? Nous avons collecté 37 millions d’euros depuis l’ouverture de la plateforme pour à peu près 16.000 projets. En 2014, nous avons lancé un deuxième projet «Hellomerci» qui est une plateforme de microfinance sur des prêts solidaires qui sont capés à 10.000 euros maximum

sans taux d’intérêt, et on a monté en janvier 2015 «Lendopolis» où les PME françaises de plus de deux ans viennent emprunter entre 10.000 et 1 million d’euros auprès du grand public en le rémunérant avec des taux d’intérêt allant de 5 à 12% par an. Nous avons collecté presque 4 millions d’euros sur les deux nouvelles plateformes.

Notre plateforme ne se rémunère que si les collectes de fonds sont réussies.

Quelle est la part des start-ups africaines dans vos projets ? C’est très faible pour l’instant avec un pourcentage de 0,25%. Plusieurs créateurs préfèrent mettre leurs projets dans des plateformes africaines. Nous avions accompagné une dizaine voire une douzaine en Afrique, mais aujourd’hui nous n’avons pas une équipe sur place. Nous sommes actuellement en train de prospecter en Afrique parce qu’on a eu quelques beaux exemples de projets, et nous avons des réseaux dans quelques pays africains dans les milieux artistiques et culturels. On y va d’ici quelques années. Nous prévoyons d’installer une filiale en Afrique francophone dans les deux ou trois prochaines années.


FOCUS Evolution des projets présentés

Statistiques KissBank depuis mars 2010 57432 projets crées 16760 projets présentés 609 projets en cours 681853 KissBankers 39537531953 € collectés

Les sites de crowdfunding africains

Carte des projets

SliceBiz Samasource Startme Crowdseed FundFind Crowdfunding.co.za

Ceux spécialisés dans des projets de microcrédit Babyloan Mail for Good Arizuka

Catégories des projets

Top 10 des sites de crowdfunding dans le monde selon Forbes

Taux de réussite des collectes Année

2010

2011

2012

2013

2014

2015

Collectes réussies

34 %

45 %

52 %

55 %

56 %

58 %

Projets lancés

58

374

1319

3911

6146

4872

Kickstarter Indiegogo Crowdfunder RocketHub Crowdrise Somolend Appbackr AngelList Invested.in Quirky

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FOCUS

Financement

Différents mécanismes au menu

Les 1.250 plateformes de crowdfunding répertoriées dans le monde n’interviennent pas toutes dans les mêmes domaines et ne se basent pas sur le même modèle économique. Décryptage.

la durée de la campagne de financement. Le cas échéant, elles remboursent les contributions amassées. Les défenseurs de la seconde option semblent plus généreux, car ils acceptent de reverser les sommes récoltées au propriétaire du projet que l’objectif soit atteint ou non.

© D.R.

Le Crowdfunding n’a jamais été aussi simple.

http://itsaboutmyafrica.com

Les porteurs de projets n'ont que l’embarras du choix ; ils peuvent déposer leur projet dans une multitude de plateformes web en fonction de la nature de celui-ci. Généralement, on distingue trois principaux types. D’abord les plateformes dédiées qui, comme le nom l’indique, sont uniquement spécialisées dans des secteurs déterminés, notamment dans le secteur industriel, l’enregistrement de musique, les jeux vidéo et la télévision indépendante. Ensuite, il existe des plateformes axées sur des activités telles que les projets créatifs,

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technologiques, culturelles, etc. Et enfin, celles plus généralistes, dont les campagnes varient en fonction de la nature du projet proposé. Autre élément distinctif, la répartition des fonds, autrement dit, le système d’attribution des fonds aux porteurs de projet. Si certaines optent pour le modèle «tout ou rien», d’autres privilégient l’option «gardez ce que vous possédez». En clair, pour la première option, les plateformes attribuent l’argent au porteur de projet si l’objectif initial est atteint ou dépassé au cours de

Même si les services de ces plateformes ressemblent à bien des égards à du bénévolat, ils sont loin des gratuits. En effet, elles se rémunèrent soit à travers les commissions (souvent entre 2 % et 5 % en général) prélevées sur les sommes récoltées par le projet, soit en proposant un système d’abonnement mensuel ou annuel pour accueillir le maximum de projets via un prix fixe, soit à travers les frais fixes déboursés par le porteur de projet pour le service d’hébergement. 


FOCUS

En décembre 2014, il y avait plus de 1250 plateformes de financement participatif actives dans le monde, dont la majorité était située en Europe occidentale et en Amérique du Nord.

Il y a eu environ 1,1 million de campagnes de financement participatif réussies partout dans le monde en 2012, dont la majorité provenait de l’Amérique du Nord.

Environ 375 plateformes de financement participatif sont actuellement basées en Amérique du Nord.

En 2014, le modèle le plus actif de financement participatif a été celui du prêt, représentant 68 % de tous les fonds amassés à l'échelle mondiale.

La catégorie «film et arts de la scène» a été la troisième catégorie la plus active de projets en 2014, représentant plus de 12 % de toutes les activités de financement participatif.

En 2014, 9,46 milliards de dollars américains ont été amassés en Amérique du Nord, représentant plus de 58 % de tous les fonds amassés à l'échelle mondiale.

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FOCUS

Entretien

Thierry Barbaut

Responsable Internet & Communication à l'Agence des Micro Projets

«Le crowdfunding est parfaitement adapté à l’Afrique» Microprojets.org figure sur la liste des plateformes de crowdfunding qui s’activent en Afrique. Vous vous définissez comme «incubateurs d’initiatives innovantes et solidaires». Concrètement, que recouvre ce concept ? Thierry Barbaut : La plateforme microprojets.org n’est pas un site de crowdfunding solidaire comme les autres. Microprojets.org est la plateforme de financement participatif de l’Agence des Micro-Projets http://www.agencemicroprojets. org/ qui soutient les microprojets depuis plus de 30 ans. Nous sommes une ONG qui instruit plus de 500 dossiers par an et qui en finance une centaine. Chacun des microprojets qui nous sont soumis est étudié et proposé à un jury composé d’experts interne et externe, les dotations vont par projet jusqu’à 15.000 euros et nous allons jusqu’à évaluer les projets sur le terrain après leur mise en œuvre. Nous allouons 600.000 euros par ans. Nous proposons logiquement et dans une démarche d’innovation depuis 2014 la plateforme microprojets.org avec deux objectifs précis et désormais atteint : mieux communiquer sur ces incubateurs qui parfois travaillent dans l’ombre, mais réalisent de merveilleux projets avec une grande efficience en présentant de manière simple leurs actions, et permettre à ces structures de collecter des fonds complémentaires avec un système simple

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de collecte par carte bleue en ligne et disponible pour le grand public avec l’avantage de bénéficier d’un reçu fiscal. Quels types d’accompagnements proposez-vous aux porteurs de projets et aux investisseurs ? Pour les porteurs de projets nous proposons toutes une gamme de prestations, de l’entretien gratuit permettant de comprendre les enjeux et le montage des microprojets, des formations spécifiques comme sur la recherche de financement, le suivi évaluation ou la communication et la valorisation des actions sur Internet. Nous mettons également à disposition un moteur de recherche de financement externe avec une base de 350 contacts, une cartographie interactive des microprojets avec plus de 1.300 projets et un observatoire avec une médiathèque également en ligne avec des études, des fiches de bonnes pratiques et de nombreuses publications thématiques. Nous organisons et participons régulièrement à des évènements comme le forum Convergences à Paris en septembre, le salon des solidarités et/ou la COP 21. Quels sont les critères pour bénéficier de votre accompagnement ? Il faut avoir une association française de plus de deux ans, disposer de moins de 250.000 euros de

ressources annuelles et avoir un partenaire local ou le microprojet va s’implanter. Nous sommes extrêmement attentifs au fait que le besoin soit exprimé localement, c’est un facteur clef de la réussite du projet. Nous soutenons toutes les thématiques sauf l’urgence et nous organisons deux sessions de dépôt de projet, une de printemps qui clôture le 30 mars et une en automne le 30 septembre, cette année une session spéciale «Développement durable» à l’occasion de la COP 21 sera ouverte durant le mois d’octobre avec 100.000 euros de dotations. Pourquoi avoir choisi l’Afrique pour y développer ce projet ? L’Afrique représente 74% des projets que nous soutenons et nous souhaitons logiquement mettre en avant les initiatives de tous les porteurs de projets que nous suivons. C’est aussi une manière de montrer à quel point l’Afrique peut innover avec des projets incroyablement pertinents alliant technologies, culture et développement. C’est à ce titre que nous nous définissons comme «incubateur d’initiatives solidaires». L’Afrique est aujourd’hui en pleine croissance, mais avec des contrastes saisissants selon les pays, il faut porter les initiatives et accompagner ceux qui en ont besoin de la manière la plus équitable possible. Il n’est par exemple pas rare que nous apportions notre


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Peut-on avoir des statistiques du montant total des financements que vous avez récolté depuis le début de vos activités ? Quels secteurs ? Quelle en est la part des start-ups ou associations africaines ? Sur le site microprojets.org, nous observons trois principaux types de partenaires : les donateurs «grand public» qui sont des internautes qui donnent avec un don moyen de 40 euros par projet et cela représente quelques dizaines de milliers d’euros par an, ce qui représente déjà une somme intéressante pour les microprojets. Viennent ensuite les mécènes ou les PME qui font des dons compris entre 2.000 et 10.000 euros à un ou des projets en particulier, ils sont sensibles à une région ou à une thématique et veulent parfois rester anonymes. Et ensuite les entreprises qui utilisent la finance participative un peu à la manière du «team building» pour fédérer une action collective et solidaire et ainsi porter un projet ou une collecte avec un objectif précis. Quels sont vos projets majeurs en cours de financement ? Sur la dernière session nous avons eu des projets autour de la culture du Moringa, une plante qui pousse facilement et dont les feuilles se récoltent tous les 45 jours et se commercialisent facilement, elles possèdent des vertus médicinales impressionnantes. Également beaucoup de projets de forage, d’électrification, d’éducation et d’entrepreneuriat avec un fort pourcentage en Afrique de l’Ouest ou centrale.

© Microprojets.org

appui à des outils internet permettant de diffuser de l’information sur des thématiques d’agriculture ou d’éducation. Néanmoins la majorité de nos projets concernent la santé, l’éducation, l’agriculture ou l’entrepreneuriat.

Thierry Barbaut avec des femmes africaines ayant bénéficié de l'aide de Micro-Projet

Est-ce que vous effectuez un suivi des projets que vous avez accompagnés ? Non seulement les associations ayant reçu des fonds doivent déposer en ligne un bilan de leurs activités au bout de la première année, mais nous allons ensuite évaluer les projets sur le terrain afin de rencontrer le partenaire local, les bénéficiaires et ainsi rendre des comptes aux différents acteurs. Ce processus que nous menons depuis plus de 30 ans nous permet de n’avoir que 4% de taux d’échec sur les microprojets soutenus par l’Agence des Micro Projets. Selon vous, le crowdfunding estil très développé en Afrique ? Le crowdfunding est parfaitement adapté à l’Afrique, premièrement il permet à tous de s’informer sur les projets soutenus et ainsi de savoir à qui s’adresser, et de consulter des cartes interactives ce qui représente une vraie révolution digitale. Ajouter le fait que les porteurs, les bénéficiaires et les bailleurs sont plus transparents dans leurs actions et le fait de récolter des dons 24/24 et partout dans le monde et vous mesurez ainsi le pouvoir de ces nouveaux systèmes. C’est une révolution totale. La possibilité offerte à tous de proposer

des services, des marchandises, des produits et bien sur des projets en ligne et pour tous. C’est une ouverture au monde qui ressemble un peu à la révolution que nous avons eue en France avec Internet en 1997 et tout ce qui a suivi comme le e-commerce, le digital ou maintenant la dématérialisation. L’Afrique est déjà un hub des nouvelles technologies avec le Kenya, Le Caire, Lagos ou Dakar. Nous assistons au développement d’application ou services sur mobile qui permettent aux agriculteurs de tous pays d’Afrique de recevoir un SMS chaque matin avec le cours des matières premières qu’ils cultivent, les études récentes sur lesquelles je participe prouvent qu’ils réussissent à augmenter leurs revenus de 22% en moyenne. Ces applications sont couplées à des informations météo qui elles aussi permettent de mieux gérer la précieuse ressource. Les deux milliards d’habitants en 2050 que comptera le plus grand continent du monde feront certainement de l’Afrique le plus grand marché mondial des nouvelles technologies et non des matières premières. Et la solidarité comme l’aide au développement feront partie des acteurs de ce développement passionnant.

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Afrique Le crowdfunding se développe timidement, mais sûrement Le crowdfunding n’est pas encore très développé en Afrique. Le faible taux de bancarisation et de pénétration d’internet sont les principaux freins. Au moment où les plateformes de crowdfunding se développent de plus en plus en Europe, en Amérique du Nord et en Asie, l’Afrique peine à prendre ses marques. Cette pratique ne fait pas encore légion dans le continent, seule une poignée de sites essaie de développer cette pratique. L’un des plus célèbres est sans nul doute le portail ghanéen SliceBiz qui souhaite développer un nouveau type de crowdfunding en Afrique. En 2013, l’entreprise figurait parmi les trois lauréats du concours «Apps4Africa» financé par le département d’État américain et la Banque mondiale qui lui avait permis de récolter 10.000 dollars. Cette compétition récompense des innovateurs africains pour leur permettre de développer des solutions technologiques afin de résoudre des problèmes que rencontre leur localité. Un développement marginal Le concept de SliceBiz est le suivant : les entrepreneurs expliquent leurs projets aux investisseurs potentiels via des présentations vidéo d’une durée de 30 secondes. Les investisseurs débourseront entre 250 et 100.000 dollars et les petites sommes peuvent être envoyées par téléphone. Ces derniers détiendront des parts dans les entreprises. C’est en quelque sorte le modèle de l’equity crowdfunding (voir page 47). «Les start-ups et les PME constituent à bien des égards la colonne vertébrale de l’écono-

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mie africaine, mais elles continuent pourtant à affronter des défis, dont un des principaux est l’accès à la finance», indique la plateforme ghanéenne. On note également la présence d’autres plateformes telles que Samasource, Startme, Crowdseed, FundFind, et Crowdfunding.co.za. Au Kenya, le service m-Changa s’inspire des tontines familiales «Harambee» pour proposer une application opérant via un enregistrement facile et gratuit, et des modalités de suivi transparentes qui permettent aux clients d’opérer des levers de fonds via leur téléphone portable. Sa particularité: permettre des dons via les transferts mobiles ou par carte bancaire. En outre, m-Changa propose aux utilisateurs non connectés d’initier et de gérer leurs levers de fonds par SMS. Le faible taux de bancarisation (environ 12% en moyenne en Afrique) et le faible taux de pénétration d’internet constituent de réelles entraves. Selon Thierry Barbaut responsable Internet & Communication à l’agence des Microprojets, le faible accès à internet constitue un obstacle majeur pour le développement du crowdfunding en Afrique. «De nombreux pays d’Afrique interdisent encore les paiements par carte bleue, où Internet n’est parfois tout simplement pas accessible au grand public, des entraves subsistent,

mais les choses évoluent significativement et dans quelques années le crowdfunding sera parfaitement démocratisé». Charlotte Dhenaux confirme ses propos. D’après la rédactrice en chef de «Goodmorning Crowdfunding», «les moyens de communication n'étant pas tous développés en Afrique, l'activation du crowdfunding peut prendre plus de temps, car la quasi-totalité des actions mises en places se fait via Internet et est relayée par l'ensemble des réseaux sociaux». Autre contrainte et pas des moindres, l’inexistence d’une législation qui régit le secteur comme c’est le cas notamment en France. «Les principaux freins relevés depuis un an sont de deux types : d’une part, ceux ayant trait aux lois (loi sur l’appel au don, loi sur les établissements de crédit et les systèmes de paiement, loi sur le change) et, d’autre part, ceux culturels (habitudes de paiements en ligne, charité vs solidarité, usage des réseaux sociaux)», explique Arnaud Pinier, président co-fondateur de Smala & Co. À en croire Charlotte Dhenaux, «un bon début serait de développer la législation facilitant l’insertion du crowdfunding dans le continent et d'étoffer les moyens de paiement. La mise en place du financement participatif en Afrique prendra peut-être plus de temps, mais devrait constituer les bases solides du développement d'une économie solidaire, porteuse de nouveaux rapports humains et financiers».


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Entretien

Arnaud Pinier

Président co-fondateur de Smala & Co

«Devenir un réseau d’acteurs du crowdfunding en Afrique du Nord et Afrique centrale»

Concrètement, quels types d’accompagnements proposez-vous aux porteurs de projets et aux investisseurs ? Nous leur proposons un accompagnement plus ou moins outillé et densifié en fonction des formules. Par principe, le porteur de projet qui le souhaite est libre de réaliser sa campagne en complète autonomie. Il ne lui en coûtera donc rien. Nous remettons à tous les porteurs de projets, dont le projet est accepté, un guide du crowdfunding ainsi qu’un manuel d’utilisation afin qu’ils soient autonomes. Pour ceux qui souhaitent un accompagnement de notre part, nous proposons des premières à 750 ou 1.200

dirhams/HT qui offrent un accompagnement personnalisé ainsi que la possibilité de réaliser 3 workshops ou entretiens au cours desquels la campagne est décortiquée pour être mieux préparée. Pour les formules plus élaborées, nous pouvons prendre en charge la quasi-totalité de la réalisation de la campagne. Peut avoir des statistiques sur le montant total des financements que vous avez récolté depuis le début de vos activités ? Quels secteurs ? Plus de 150.000 dirhams essentiellement sur les secteurs sociaux en priorité, puis environnementaux et culturels. Comment se porte le crowdfunding au Maroc ? C’est un marché encore non constitué dans lequel officient 4 plateformes : 1 en equity, 1 sur le modèle des cagnottes, 2 sur le modèle du don. Les deux premières officient encore dans une zone grise de la loi. Le marché marocain global en 2014 représente seulement 300.000 euros. C’est un marché très dynamique (300% de croissance) néanmoins qui doit encore se développer. Tout cela s’accompagnera d’un apprentissage de ces nouveaux outils par le grand public, mais également une adaptation progressive du modèle aux spécificités du modèle collaboratif dans les pays comme le Maroc. Quels sont vos projets en cours de financement ? Nous avons terminé avec succès une campagne pour une auberge écologique et culturelle dans la région d’Ouezzane. Nous sommes sur le point de lancer deux nouvelles campagnes pour des projets culturels et artistiques cette fois, en lien avec le théâtre et la danse.

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Si vous devez nous présenter le projet Smala & Co que diriez-vous? À l’origine, Smala & Co a été la première plateforme de crowdfunding dédiée au Maroc. Elle est progressivement la première plateforme de crowdfunding d’Afrique du Nord, dédiée aux projets à fort impact social et environnemental. Elle bénéficie par ailleurs depuis peu d’un nouveau statut de «crowdfunding non-profit». En effet, nous avons considéré que l’échange de valeurs avec les porteurs de projet ne résidait pas dans l’utilisation de la plateforme, mais plutôt dans l’accompagnement que nous leur offrons. De plus, le système de rémunération à la commission ne permet pas d’accompagner comme il faut tous les porteurs de projets. Nous sommes donc désormais une plateforme de crowdfunding non-profit, qui ne prélève pas de commission propre sur les fonds collectés. Dans les prochains mois, Smala & Co ambitionne de devenir un réseau ouvert d’acteurs du crowdfunding en Afrique du Nord et Afrique centrale.

Est-ce que vous effectuez un suivi des projets que vous avez accompagnés ? Oui, dans la mesure du possible, nous essayons de les suivre et notamment de réaliser un reportage quelques mois après sur leur activité et leur expérience. Est-ce que vous comptez étendre vos activités dans d’autres pays africains ? Oui, nous souhaitons développer un réseau d’acteurs indépendants, d’abord en Afrique du Nord et en Afrique Centrale. En fonction des ressources dont nous disposerons nous pourrons accélérer la cadence d’ouverture. L’appel à candidature est d’ailleurs lancé et nous invitons les personnes ou organismes intéressés à nous contacter : contact@smalaandco.com 

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Entretien

Eric Marty Directeur général d’Afineety

«Notre volonté c'est d’avoir une plateforme à l’échelle africaine» Vous avez lancé le projet Afineety en janvier 2014. Pourriez-vous nous expliquer ce concept ? En 2011, nous avons monté une équipe et ensemble nous avons créé en France un cabinet de conseil en stratégie pour accompagner nos grands clients sur des problématiques de transformation. En menant ce projet, nous avions aussi la volonté de ne pas être seulement conseilleurs, mais acteurs de nos propres projets. Nous avons commencé en 2012 à accompagner quelques start-ups en France et notamment une qui lançait l'une des premières plateformes d’équity crowdfunding. Nous avions dans notre équipe des personnes originaires du continent africain ou qui avaient longtemps travaillé dans un certain nombre de pays et nous avions la volonté de mener un projet en Afrique. Assez vite, nous avions constaté qu’une des problématiques majeures, notamment en termes de croissance économique, était la difficulté pour les PME de trouver du financement. En plus, en 2013, il n’y avait pas réellement d’acteurs du crowdfunding dans le continent, donc nous avons décidé de lancer cette plateforme qui est opérationnelle depuis le 1er janvier 2014. Nous avons voulu travailler en amont, comprendre

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et nouer des partenariats avec les acteurs de la création et de l’accompagnement de l’entreprise, pour mettre en place un écosystème et préparer l’arrivée des projets sur la plateforme. Afineety c’est une plateforme d’equity crowdfunding c’est-à-dire que sur la plateforme les personnes investissent dans les entreprises et y prennent une participation en contrepartie de leur investissement. La plateforme permet la rencontre, met à la disposition de l’ensemble des acteurs les moyens et les ressources nécessaires pour que les entrepreneurs aillent à la rencontre des investisseurs et qu’il y ait un lien direct qui se crée entre les deux, une affinité d’où le nom «Afineety». Pourquoi avez-vous choisi de vous installer au Maroc pour y développer ce projet de financement participatif ? Cette nouvelle catégorie à laquelle on s’adresse est particulièrement bien représentée au Maroc, cela nous semblait assez logique et cohérent de commencer dans ce pays. Notre volonté c’est d’avoir une plateforme à l’échelle africaine puisque dans le plan de développement, nous prévoyons d’être présents dans au moins huit pays dans les deux prochaines années.

Est-ce que vous comptez étendre vos activités dans d’autres pays du continent ? Nous avons déjà commencé à travailler sur la Côte d’Ivoire, au mois de novembre nous organisons un évènement au Sénégal en partenariat avec le Salon Hub Africa. Nous avons des porteurs de projets sénégalais et ivoiriens qui sont en train de préparer leur montée sur la plateforme. Le Kenya, le Ghana, le Gabon, le Burkina Faso, le Mali, l’Algérie et la Tunisie sont aussi en ligne de mire. Autant on peut faire du crowdfunding sur internet en Europe et en Amérique, autant en Afrique il faut être présent sur le terrain. Nous avons une centaine de membres sur la plateforme qui sont des personnes potentiellement intéressées à investir dans des projets dans le continent africain. C’est en juin 2015 que nous avons commencé à monter les premiers projets dans la plateforme avec deux entrepreneurs marocains, nous en avons deux autres qui vont bientôt apparaitre sur la plateforme, le premier au Sénégal et le second en Côte d’Ivoire. Contrairement à d’autres plateformes comme Kisskissbankbank, les projets que vous accompagnez ne sont pas visibles sur votre site. Qui est-ce qui explique cela ?


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Eric Marty répondant aux questions d'un confrère de Widoobiz en marge des activités de Hub Africa 2015.

Il y a un certain nombre de réglementations notamment au Maroc qui font qu’une opération de levée de fonds ou d’augmentation de capital doit conserver une certaine confidentialité ; il existe des dispositions sur l’appel public à l’épargne qui est interdit dans le Royaume, et d’autres barrières qui ne nous permettent pas de fonctionner comme en Europe ou aux États-Unis où la législation a bien avancé. Quels sont les secteurs d’activité que vous privilégiez dans votre plateforme ? Nous n’avons pas de secteurs d’activités privilégiés. Traditionnellement, le crowdfunding concernait au départ les entreprises technologiques. Aujourd’hui, vous trouvez sur ces plateformes des entreprises de tous les secteurs : les technologies, les services, l’agrobusiness, la science, l’industrie, etc. Le crowdfunding peut concerner des entreprises en phase de démarrage ou en croissance. Au début, nous voulions favoriser les entreprises

avec un réel potentiel de croissance, alors même qu’en Afrique bon nombre d’entreprises et de projets de développement ne sont pas forcément des projets avec une finalité business direct, mais plutôt des projets à vocation sociale. On avait exclu ce type de projet de la plateforme parce qu’on considérait que cela avait moins d’intérêt pour un investisseur qui cherche d’abord une rentabilité pour son investissement. Après avoir échangé avec la communauté des investisseurs, on s’est rendu compte qu’il y a une catégorie, des investisseurs privés ou institutionnels, qui souhaite investir dans des projets d’entrepreneuriat social. Nous sommes en train de prévoir sur la plateforme une catégorie spécifique de projets économiquement viables et qui ne privilégient pas la rentabilité. Un investisseur sur une plateforme de crowdfunding c’est quelqu’un qui, bien entendu, cherche une rentabilité, mais c’est d’abord et avant tout quelqu’un qui a la volonté de s’associer au dévelop-

Nous n’avons pas de secteurs d’activités privilégiés.

pement de l’entreprise, de faire bénéficier l’entrepreneur de son expérience et son expertise. C’est aussi des personnes qui veulent investir dans des projets qui leur racontent une histoire qu’ils auraient peut-être voulu réaliser. Si on veut que le crowdfunding se développe en Afrique, et si on veut que des investisseurs africains investissent sur des projets en Afrique, il faut aussi, à l’instar de ce qui se fait aux États-Unis ou en Europe, qu’il y ait des incitations fiscales pour qu’ils investissent dans les entreprises en phase de création.

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Got'liebe Bataba

Initiateur du projet Afropreneur

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Vous avez lancé, du 29 juillet au 7 août 2015, une campagne de crowdfunding à travers la plateforme kisskissbankbank pour financer ce projet. Ce qui vous a permis de récolter 14.000 euros. Pourquoi avoir choisi ce mode de financement ? En réalité, la campagne de crowdfunding nous a permis de lever bien plus. Nous avons réussi à collecter plus de 23.000 euros ce qui représentait près de 166% du montant que nous espérions avoir à la base (les 14.000 euros). Cela démontre tout l’intérêt et l’engouement de notre cible envers ce projet et cela nous encourage encore plus. D’ailleurs, nous profitons de cette tribune pour remercier encore une fois toutes ces personnes qui croient en ce projet et qui nous ont soutenus. Une des raisons pour lesquelles nous avons utilisé ce mode de financement est qu’avec ce type de campagne, en plus des fonds que nous pourrons collecter auprès de notre communauté et de nos lecteurs, cela représente un puissant vecteur de communication. Et ce n’est d’ailleurs pas le seul mode de financement que nous avons choisi. Les fonds demandés lors de la campagne de crowdfunding ne représentent que 35% du budget global qu’il nous faut pour le documentaire. Comment avez-vous vécu ce suspens ? Ces fonds pourront-ils couvrir vos frais durant cette aventure ? Comme vous vous en doutez surement, nous sommes passés par toutes les émotions : le doute, la confiance et beaucoup d’enthousiasme. Nous demandions un montant assez élevé surtout pour un projet culturel. Il nous fallait donc mettre en place une stratégie efficace pour y arriver. Encore à une semaine de la fin, ce n’était pas gagné, mais comme généralement, ce sont pendant les derniers jours que se joue souvent une campagne de crowdfunding, nous avons mis les bouchées doubles pour mobiliser le maximum de personnes. Comme je disais, ces fonds ne font que 35% du budget total qu’il nous faut. Nous comptons financer le reste par des sponsors et partenaires. 

Ndèye Absa Gningue

Présidente de l’association «JEADER» et initiatrice de «Graines d’entrepreneurs»

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L’organisation d’une colovac exige d’importants moyens financiers. Lors d’une conférence de presse de présentation de l’évènement qui s’est tenue à Dakar, vous aviez indiqué avoir récolté 9.800 euros, soit environ 6 millions de FCFA à travers un site web néerlandais. Pourquoi avez-vous opté pour le crowdfunding pour financer cette activité ? Des sponsors et autres partenaires ont-ils désisté ? À l’origine, nous travaillions avec des sponsors, qui par la suite, ont préféré se tourner vers des canaux classiques tels que les Navétanes, les concerts ou encore le Concours général qui cible les élèves de Première et de Terminale uniquement. C’est ainsi que nous avons jugé plus sage de lancer la plateforme Crowdfunding sur le site web néerlandais «One per cent club», au cas où personne ne viendrait en aide à ces enfants. Ces 9.800 euros ont non seulement été un record pour la plateforme, qui n’a jamais enregistré une telle somme, mais avec plus de 200 participants à travers le monde, nous devenions les premiers à déployer une initiative de la sorte en Afrique, requérant plus de 40 intervenants dont la plupart devaient quitter Dakar, pour être sur Saly le matin même et repartir l’après-midi. Le restant du financement a été un investissement personnel, car à l’origine, ce programme n’est rien d’autre que la duplication, de ce que mon défunt père faisait pour moi pendant les vacances, en m’initiant à l’entrepreneuriat, à travers des thèmes plus divers les uns que les autres. C’est un investissement lourd, mais je juge que chaque Graine d’entrepreneur aura la possibilité de grandir et d’être bénéfique pour sa communauté, sa région. Et justement parce que j’ai investi, je compte bien faire le suivi de cet investissement, car «JEADER» va s’enquérir du devenir de chaque participant, de commun accord avec le ministère de l’Éducation, et avec la complicité des chefs d’établissement que nous avons tenu à décorer, de même que les écoles. 

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Entretien

Charlotte Dhenaux

Rédactrice en chef de «Goodmorning Crowdfunding»

«La population africaine est jeune et innovante»

Selon vous, ce nouveau concept qu’est le financement participatif est-il assez vulgarisé dans les médias ? On y vient, tout doucement. La définition du crowdfunding auprès du grand public semble relativement acquise et l'engouement est palpable. Les médias aiment relayer les projets insolites et farfelus et se penchent de plus en plus sur les enjeux relatifs aux changements d'habitudes de la population, par exemple sur le rapport que suscite le crowdfunding avec les banques, qui craignent de voir leur modèle économique démodé, même si on n'y est pas encore. L'idéal serait de réussir à générer une forme d'automatisme dans l'inconscient collectif, afin que le crowdfunding devienne un vrai réflexe, ce qui n'est pas encore le cas. Mais l'espoir est là, on voit de plus en plus de projets, de trophées et de concours mettant à l'honneur les start-ups et le crowdfunding. Vous aviez initié le programme «Carnet de voyage», une étude en ligne pour découvrir des projets d’entrepreneuriat dans plusieurs pays à travers le monde. Dans quel but ? Il s'agit simplement d'une étude en ligne du secteur, basée sur une veille autour du

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Le  projet  «Goodmorning  Crowdfunding» (GMCF), de quoi s’agit-il ? Charlotte Dhenaux : GMCF est un blog indépendant créé au début de l'année 2013 avec pour objectif de mettre en avant toutes les initiatives en faveur du crowdfunding en France et à l'international. Nous nous efforçons de publier quotidiennement du contenu de qualité, de toucher le plus grand nombre de personnes, de sorte à démocratiser le crowdfunding. Parfois, nous avons des débats un peu plus philosophico-économiques au sein de nos bureaux, ce qui donne lieu à des Éditos enclins aux échanges et aux questionnements relatifs à l’évolution du secteur, on joue un peu à Madame Irma et on adore ça !

crowdfunding dans le monde. L'objectif avant tout était d'établir un état des lieux de l'avancée du crowdfunding dans le monde. Nous avons décidé d'axer notre étude sur l'Afrique donc, mais aussi sur l'Océanie, l'Amérique, l'Asie et enfin l'Europe. Cela nous a permis de dresser le portrait de chacun des continents, en fonction de son positionnement face à l'émergence du financement participatif. Quels sont les enseignements majeurs à retenir sur l’entrepreneuriat en Afrique ? La population africaine est jeune et innovante, ce qui peut permettre à de nombreux projets de voir le jour, mais le problème reste le manque d'accès aux prêts et aux crédits mis en place par les banques relativement frileuses au sujet des start-ups. Le taux de bancarisation reste malheureusement plutôt faible (peu d’Africains possèdent une carte de crédit), demeurant un frein majeur à l'investissement. Le financement participatif en Afrique semble plus marqué dans

L'idéal serait que le crowdfunding devienne un vrai réflexe. les pays nord-africains, région émergente. On connait déjà les plateformes comme Zoomaal par exemple. Il y a aussi m-Changa, plateforme Kényane qui permet de faire des dons via un mobile, objet plus utilisé dans certaines zones d'Afrique. Écofund ou encore OnePercentClub sont relativement bien implantées dans le paysage africain. Du fait de la réticence des banques, l'esprit du crowdfunding trouve tout à fait sa place dans ce système économique, qui favorise l'entraide et permet ainsi au continent d'envisager un avenir plus ambitieux en termes d'innovation. 

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Tontines africaines

L’ancêtre du crowdfunding La tontine, une pratique très répandue en Afrique, ressemble à bien des égards au crowdfunding. Outre sa vocation sociale, elle procure une sécurité financière à ses adhérents.

Réunion des femmes d'une tontine à Dakar

Qui ne connait pas la tontine en Afrique ! Durant notre adolescence, nous étions des témoins oculaires des réunions entre les voisines d’un même quartier durant lesquelles chacune d’entre elles remettait des liasses d’argent à une dame qui inscrivait minutieusement sur son cahier leurs noms et les versements. Ces regroupements féminins ressemblaient souvent à nos yeux à des palabres stériles, ces cotisations avaient peu d’importance à nos yeux. Que nenni ! C’était méconnaitre les moult avantages des tontines, ces parapluies financiers véritables ancêtres et probables sources d’inspirations du crowdfunding moderne.

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considère comme des «Associations rotatives et de crédit» (AREC). D’après lui, «les tontines sont des associations regroupant des membres d'un clan, d'une famille, des voisins ou des particuliers, qui décident de mettre en commun des biens ou des services au bénéfice de tout un chacun, et cela à tour de rôle». Si selon certains historiens la tontine existe en Asie plus précisément au Japon et en Corée («Kye») depuis le 11e siècle, c’est en Afrique qu’elles ont véritablement gagné leurs lettres de noblesse.

Quand l’on convoque l’histoire, on apprend que le mot «tontine» a été utilisé pour rendre hommage au banquier napolitain Lorenzo Tonti qui a inventé en 1653 ce système de banque solidaire. En clair, la tontine est une association d’individus qui se regroupent en fonction des liens familiaux, amicaux, professionnels, ou autres, qui se réunissent à des périodes prédéterminées (chaque mois en général) pour mettre en commun leur épargne afin de résoudre des problèmes personnels et collectifs. F. Bouman, l’un des rares chercheurs à s’intéresser à cette pratique au début des années 1970, les

Une vocation sociale Les tontines africaines offrent plusieurs avantages. Elles présentent de réelles garanties. En général, tous les membres d’une tontine se connaissent et entretiennent souvent de bonnes relations familiales ou amicales cimentées par la moralité, la confiance et la solidarité. C’est aussi en quelque sorte une caisse de prévoyance, car en adhérant à la tontine, les participants disposent d’un parapluie financier pour faire face à d’éventuelles difficultés familiales ou professionnelles. Un membre d’une tontine qui perd un proche parent pourrait obtenir une somme pour gérer les frais liés aux obsèques de celui-ci. La tontine a un rôle économique puisqu’elle permet aux participants de réaliser des investissements à court ou moyen terme, ou à bien organiser un évènement familial comme les baptêmes et les ma-


FOCUS

Trois principales formes En général, dans l’univers tontinier africain, il existe en général trois principales formes de tontines. D’abord les tontines mutuelles qui sont d’ailleurs les plus répandues. Le procédé est simple : un nombre déterminé de personnes verse un certain montant durant une période donnée. La totalité des sommes sera disponible chaque mois pendant 12 mois de suite. Cet argent sera distribué tour à tour à un membre qui est souvent désigné par tirage au sort. Par exemple, si 10 personnes se réunissent et versent chacune 10.000 FCFA, chaque fin du mois l’une d’entre elles recevra 100.000 FCFA. Si tout le monde perçoit son dû, le processus est renouvelé de manière tacite. Ensuite, nous avons les tontines commerciales. Un grand commerçant, un homme d’affaires très connu ou simple retraité se transforme en banquier ambulant en proposant à des connaissances de lui confier au quotidien une somme d’argent, et il s’engage à rembourser chacun au bout d’une période fixée d’un commun accord (un mois par exemple) après avoir récupéré les 31 versements. Il passe chez chacune d’entre elles et il leur remet une carte de visite avec son nom, adresse et parfois même sa photo avec 31 cases numérotées. Chaque fois qu’un client lui verse une somme (1.000 FCFA par exemple), il coche une cache de sa carte. Le lendemain du dernier verse-

Quand la diaspora s’y met… La tontine africaine s’exporte dans l’hexagone. À Paris, 12 femmes françaises, d’origine gabonaise, marocaine, métissée franco-béninoise, algérienne, bretonne, congolaise, israélienne, guinéenne, normande et chinoise âgées de 30 à 45 ans ont lancé un projet dénommé «la Tontine des tigresses». Elles se retrouvent une fois par mois dans un appartement et s’assoient autour d’une table. Chacune dépose 100 euros sur la table et à la fin, l’une des jeunes femmes empoche la somme totale de 1.200 euros. «Nous occupons différents métiers : consultante en entreprise, agent de voyage, assistante de direction, responsable formation, juriste, chargée d’assistance, DRH, hôtesse de l’air, régisseur spectacle, conseillère référente emploi, assistante de gestionnaire en copropriété, assistante de fabrication», indique l’une d’entre elles sur le blog lancé par le groupe. Ce groupe a L'une des femmes fondatrice de la Tontine des Tigresses même fait l’objet d’un reportage dans le magazine «Capital» diffusé par la chaîne française M6. © D.R.

riages. En dépit de son caractère informel, elle les initie également aux rouages de la finance élémentaire à travers la mobilisation d’épargnes, le versement périodique des cotisations, etc. Cet aspect revêt ici toute son importance si l’on sait que l’épargne est négligée par de nombreuses populations du continent.

Dans un reportage publié sur son site le 5 septembre 2007, le Monde révélait l’existence de tontines dans les cités en France. Cette pratique initiée par les femmes d’Afrique de l’Ouest. «Les femmes du groupe appartiennent souvent à la même ethnie, au même village. Je connais des personnes qui viennent de Mantes-la-Jolie (78) pour remettre leur argent à Évry, explique Adoulé Ankrah. On se retrouve autour d'un repas. C'est l'occasion de parler du pays», a déclaré Adoulé Ankrah, de l'association «Génération femmes à Évry.» D’après la journaliste qui a signé ce reportage, ces tontines peuvent prendre plusieurs formes notamment des cotisations en pagnes pour la constitution d'une ample garde-robe ou en or pour la fabrication de bijoux.

ment, il remettra 30 fois 1.000 F et non 31 fois 1.000 F, car il y prend un intérêt estimé en général à 3%. Enfin, les tontines financières. Elles sont principalement pratiquées au Cameroun par l’ethnie «Bamiléké», au Bénin, au Burkina Faso et en Centrafrique. Ici, les cotisations déposées par les membres sont mises aux enchères

selon des modalités bien définies ; le plus offrant paie un intérêt et emprunte l’argent de la tontine. Cet intérêt diminue au fur et à mesure que les tours se succèdent puisque les candidats deviennent de moins en moins nombreux. Par la suite, les produits des enchères sont répartis entre les différents membres quelle que soit leur propre enchère.

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La tontine Siguidia sise au quartier Académie à Kita, Mali

Quand les tontines deviennent des «tonti-banques» En Afrique, les tontines disposent d’un bureau piloté par un président qui est souvent l’initiateur du projet, des vice-présidents qui veillent au respect de la moralité et du règlement intérieur, un secrétaire gardien des archives, un trésorier qui gère la comptabilité, un commissaire aux comptes qui supervise les comptables et qui veille à la bonne répartition des intérêts aux membres dans le cas d’une tontine financière, et enfin le censeur qui veille au respect de la discipline lors des réunions et autres séances. Au Cameroun, on assiste actuellement à la bancarisation des tonti-

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nes avec la naissance des «tontibanques», des projets initiés par des plateformes de microfinance comme les Mutuelles communautaires de croissance (MC²) lancées par le Dr Paul Fokam, fondateur de Afriland First Bank ou CECICAMEU (Société coopérative d‘épargne et de crédit d’investissement du Cameroun-Epargne utile). Les MC² proposent aux populations locales des techniques financières modernes assujetties à des valeurs socioculturelles. Concrètement, ce symbole signifie que la «Victoire sur la pauvreté (VP) est possible à condition que les Moyens (M) et les Compétences (C) de la Communauté (C) soient mis ensemble. D’où la formule : VP = M x C x C = MC2». Actuellement,

on dénombre 105 mutuelles MC² au Cameroun. En 20 ans, ces établissements de microfinance ont investi 145 milliards de FCFA (221 millions d’euros) dans l’économie locale et revendiquent avoir aidé 1 million de personnes à sortir de la pauvreté grâce notamment à leur système de prêt. Quant à la CECICAM-EU, la constitution de son capital initial a nécessité la cotisation des membres de chaque association pour un montant équivalent à un tour de tontine. Ces agences proposent des opérations de collecte de l’épargne, de gestion des comptes courants, de domiciliation de salaires, de remises de chèques, et les opérations de transfert de fonds.

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FOCUS


FOCUS Finance institutionnelle et finance informelle. Banque

Usurier

Tontinier

Tontine mutuelle

• Grand nombre de débiteurs et de créanciers qui ne se connaissent pas • Présence d'un intermédiaire

• Nombre limité de débiteurs qui ne se connaissent pas • Présence d'un créancier qui les connaît bien

• Nombre limité de créanciers qui ne se connaissent pas • Présence d'un débiteur qu'ils connaissent bien

• Nombre limité de débiteurs ou de créanciers qui se connaissent parfaitement • Pas d'intermédiaire

• Relations de concurrence • Toujours codification légale

• Relations de monopole • Souvent interdiction légale • Codification sociale + droit coutumier

• Relations de concurrence • Jamais de codification légale • Codification sociale + droit coutumier

• Pas de marché • Rarement codification légale • Codification sociale + droit coutumier

• Accumulation possible selon volume des crédits et dépôts accentuée par le taux d'intérêt • cependant fixé par le marché et plafonné par la loi

• Accumulation possible selon volume des crédits accentuée par le taux d'intérêt • non plafonné par marché ou loi souvent exorbitant

• Accumulation faible selon volume des dépôts • Intérêt toujours limité

• Accumulation négligeable • Rotation des positions • Absence d'intérêt

• Echéance souvent reportée en fonction des besoins

• Echéance parfois reportée du fait de l'intérêt excessif

• Echéance toujours proche règlement intervient toujours

• Echéance toujours proche règlement intervient toujours

• Offre service de crédit, service de dépôt • Relation entre les deux au niveau global entraîne création de monnaie

• Offre service de crédit parfois branché sur une banque; dans ce cas transforme monnaie scripturale en monnaie fiduciaire

• Offre service de dépôt parfois branché sur une banque dans ce cas transforme monnaie fiduciaire en monnaie scripturale

• Offre service dépôt-crédit associés; aucune relation avec banques; accroît la vitesse de circulation de la monnaie fiduciaire qui n'est pas transformée en monnaie scripturale

> Offre la liquidité

> Engendre la spoliation

> Offre la sécurité

> Favorise la solidarité

Source: L'Entrepreneurial en Afrique francophone. Ed. AUPELF-UREF. John Libbey Eurotext. Pans © 1990, pp. 45-63.

LES TONTINES DANS DIFFERENTS PAYS AFRICAINS. Sénégal Gambie

Nath

Piye

Bakary

Sere

kele

Kondiani

Guinee Sierra Leone

Asussu

Liberia

Esussu Diari

Wari

Côte d’Ivoire Ghana

Susu

Bénin

Le tableau ci-contre nous montre tout d'abord la grande diversité des tontines africaines, et le fait qu'on les rencontre parfois sous la même appellation dans des pays différents.

Nanemei Sokoue

So

Togo

Susu

adassi

So

Nigéria

Esussu

Dashi

Bam

Oha

Niger

Adjolou

Asussu

Omo

Adashi

Mali

Dashi

Pari

Ton

Burkina Faso

Adossa

Pare

Naam

Tchad R.C.A.

Pare

Keita Tintani Tchackin

Likelemba

Cameroun

Djanggi

Mandjoun

Gabon

Ntsuia Sokode

Congo Zaire

Likelemba

Rwanda

Ibilemba

Kitemo

Moziki

Kitemo

Osassa

Bandal

Yama

Franga

égypte

Gameya

Soudan

Khatta

Sanduk

éthiopie

Ekub

Edir

Ouganda

Chilemba

Kenya

Obilimba

Harambee

Malawi

Chilemba

Katapila

Zambie

Chilemba

Zimbabwe

Chilemba

Madagascar AfriqueduSud

Dambele

Osussu

Omosanjiro

Chilezolama

Fokontany Stokfel

Mahadisama

Chitu

Chita

http://www.gdrc.org/icm/french/matthieu/section-2.html

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© Sekem

business case Sekem

Réalisé par Elimane Sembène en collaboration avec Sekem

Le développement durable, tremplin vers l’émergence Dr. Ibrahim Abouleish est né en Égypte en 1937. Quand il avait 19 ans, il a réalisé son souhait d'étudier dans le vieux continent et a passé plus de 20 ans dans les pays européens. Il a été impliqué et très intégré à la culture européenne. Quand il revint ensuite en Égypte dans les années 1970, il trouve le pays dans de très mauvaises conditions. Les systèmes sociaux, culturels, écologiques et économiques étaient peu développés. L'Égypte faisait face à des défis énormes : pauvreté, pollution environnementale, pénurie d'eau, un système éducatif complètement surchargé... Une vision lui vint à l'esprit : « Au milieu du sable et du désert, je me voyais debout puisant de l’eau. Soigneusement, je plante des arbres, des herbes et des fleurs et mouille leurs racines avec les précieuses gouttes. L'eau fraiche du puits attire les êtres humains et les

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animaux pour se rafraîchir et presser le pas. Les arbres donnent de l'ombre, la terre devient verte, les fleurs odorantes fleurissent, les insectes, les oiseaux et les papillons montrent leur dévotion à Dieu, le Créateur, comme s’ils récitaient la première sourate du Coran. L'homme, percevant l’éloge caché de Dieu, se soucie et voit tout ce qui est créé comme un reflet du paradis sur terre. Pour moi, cette idée d'une oasis au milieu d'un environnement hostile est comme une image de la résurrection à l'aube, après un long voyage à travers le désert nocturne. Je l'ai vu devant moi comme un modèle avant que ne commence le travail réel dans le désert. Mais en réalité, j’ai désiré même plus. Je voulais que le monde entier se développe ». Ainsi, la vision Sekem a été élaborée : le développement durable vers un avenir où chaque être hu-

main peut déployer son potentiel individuel ; où les humains vivent ensemble dans les formes sociales qui reflètent la dignité humaine ; et où toute l'activité économique est réalisée en conformité avec les principes écologiques et éthiques. Le concept de Sekem est fortement influencé par la vie intellectuelle, y compris la philosophie, les arts, la culture et la science que Dr Ibrahim Abouleish a appris à connaître en Europe. Il a expérimenté le fait que le développement a besoin d'une approche holistique – la vie culturelle et sociale devrait faire l’objet de la même prise de conscience que les points de vue économiques et législatifs. Et bien sûr, toutes ces dimensions sont intégrées à l'écologie qui est le fondement précieux de tout. 


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L'agriculture biodynamique, un choix stratégique Le sol est un organisme vivant, il est l'habitat d'innombrables organismes et offre une stabilité pour les racines des plantes. Le sol est la base fondamentale pour la production alimentaire. À l'avenir, la surface globale ne pourra plus produire assez de nourriture pour tous les êtres humains que si nous préservons sa fertilité, évitons l'érosion et permettons une capacité de stockage d'eau suffisante. Nous voulons non seulement réduire notre «empreinte écologique», mais contribuer à une condition meilleure et plus saine de la terre et les populations avec qui nous travaillons. Ceci est la seule façon de créer et de maintenir les meilleures conditions pour notre planète. Pour maintenir et créer ce sol vivant vital, nous croyons en une approche holistique, que nous voyons se concrétiser par des principes biodynamiques agricoles. L'agriculture biodynamique a beaucoup en commun avec d'autres approches organiques du fait qu'elle insiste sur l'utilisation des engrais et des compostes et exclut l'utilisation de produits chimiques artificiels sur le sol et les plantes. Ces méthodes uniques à l'approche biodynamique comprennent l'élevage des animaux, les cultures et le sol comme un système unique ; l'accent étant mis depuis le début sur les systèmes de production et de distribution locaux ; le recours aux méthodes traditionnelles et le développement de nouvelles races et variétés locales ; et l'utilisation de l’ensemencement astrologique et du calendrier des semis.

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Sekem est convaincu que le sol vivant est le fondement essentiel de la vie et du développement.

Favoriser une capacité de stockage d'eau plus élevé Plus de 90 % de l'Égypte est une terre de désert et le seul sol fertile naturel va le long de la rivière du Nil et jusqu’à quelques oasis». Ainsi, seulement 6% des terres sont inhabitées et 3 % utilisées pour l'agriculture. Comme les précipitations sont très rares en Égypte, l'irrigation artificielle est nécessaire (85 % de la consommation d'eau est utilisée dans l'agriculture). La population du pays augmente rapidement (environ 30 millions dans les années 1960, plus de 90 millions aujourd'hui). Les ressources hydriques du Nil ne sont pas suffisantes pour assurer l'approvisionnement alimentaire de la croissance démographique en cours. Ainsi, l'Égypte vit dans la pé-

nurie d'eau et dépend étroitement des importations alimentaires. En récupérant et en cultivant la terre par des méthodes biodynamiques, le sol contient beaucoup plus de matières organiques qui conduisent par exemple à une capacité de stockage d'eau plus élevé (le sol organique peut garder jusqu'à 40 % plus d'eau que le sol classique). En appliquant l'agriculture biodynamique, Sekem a intrinsèquement réduit les émissions de CO2, ce qui a par exemple un impact énorme sur le réchauffement climatique. Parmi d'autres, le «100 % bio Égypte», étude qui a été faite par Sekem et sa société partenaire «Soil & More International», montre de grands avantages de l'agriculture biologique. 

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Formation

L’amélioration continue, une priorité

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Tous les employés du Sekem, peu importe qu'ils soient agriculteurs, employés ou gestionnaires usine, participent constamment à des activités culturelles plusieurs fois durant l’année. Une gamme d'activités allant de la musique ou du théâtre aux beaux-arts en passant par des cours de formation.

L'approche est basée sur la conviction que la combinaison de sentiments, la volonté, la pensée ainsi que les sens humains peuvent être abordés et développés. Sekem est exposé à une multitude d'influences culturelles et religieuses et soutient cette diversité culturelle et spirituelle. Outre les activités de développement culturel offertes aux salariés, sous la forme de cours ou de présentations artistiques hebdomadaires, Sekem Holding fait du développement personnel de ses employés une priorité majeure. D'une part, les employés participent à des réunions hebdomadai-

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res en présence du fondateur de l’Initiative Sekem, pour discuter de questions critiques se rapportant à leur vie professionnelle, afin de dépeindre, expliquer et transmettre la vision de base du développement holistique. D'autre part, les employés sont impliqués dans des activités de développement constant en leur fournissant une formation spécifique directement liée à leurs tâches professionnelles et aux défis à relever. La formation dispensée dans les différents domaines tels que la production agricole et les compétences professionnelles nous donne un aperçu de la variété des activités de formation de Sekem Holding.

Afin d'adapter la formation dispensée aux besoins individuels des employés, des plans de formation individuelle à long terme sont élaborés par le département des ressources humaines de Sekem Holding. Les cours et les résultats de chaque année servent de base à une évaluation détaillée des besoins. C’est seulement à travers la pensée holistique et l’action qu’une société matérialiste peut être transformée en une société culturelle guidée par des valeurs significatives. Par conséquent, l'éducation gratuite et le développement spirituel de tous les êtres humains doivent être prioritaires. L'avancement de chaque individu est un défi permanent dans les domaines de l'éducation, de la science, de l'art, de la religion et de la spiritualité. Sans une bonne compréhension du monde qui les entoure, les gens ne seront pas en mesure de vivre en harmonie avec la nature et les autres êtres. Développement social L’approche de Sekem dans le développement durable englobe donc la culture. Ainsi, Sekem a créé la Fondation Sekem pour le développement (SDF) dont la mission est d’améliorer la qualité de la vie des gens à travers la sensibilisation, la conscientisation ainsi que l'amélioration des conditions de vie. Cet accent mis sur le lien entre l'amélioration des conditions de vie et le renforcement de la conscience de soi est le principe de base et doit


business case être accompagné d'une amélioration du moral et de la culture des gens pour être efficace. Au cours des deux dernières décennies, la Fondation a élargi son programme d'activités à partir des initiatives éducatives de base initiales, et il met actuellement en oeuvre une variété de projets et de programmes dans le domaine du développement social, des soins de santé, de l'éducation et de l'écologie. Les écoles Sekem (garderie, maternelle, primaire, préparatoire et secondaire, école communautaire, école pour les enfants ayant des besoins spéciaux) dispensent aux élèves, filles et garçons, un enseignement holistique. La connaissance théorique est toujours combinée à l'expérience pratique. Outre les sujets de fond, les élèves Sekem reçoivent des leçons à thèmes écologiques tels que la connaissance agricole appliquée, l'artisanat ou des cours artistiques, tels que l'eurythmie ou le dessin. Le programme s’inspire fortement de la pédagogie de Rudolf Steiner Waldorf. Lutter contre le chômage Un deuxième programme de formation à Sekem est le système de formation professionnelle et technique. L'objectif est de développer chez les jeunes des compétences professionnelles utiles, et dont la demande sur le marché du travail local est élevée. Le programme technique de trois ans porte sur l’«apprentissage par la pratique et la pratique apprenante», ainsi que sur les emplois, les pratiques de formation et les techniques de recherche d'emploi. Le SDF gère également le centre médical de Sekem. Il fournit soins de santé et services médicaux aux employés ainsi qu’aux habitants des villages voisins. Chaque personne ayant des compétences individuelles est la bienvenue et a sa place au

Près de 40 ans d'existence

Le secret d’une longévité Le plus grand défi auquel nous sommes confrontés dans le processus du développement durable est de trouver un équilibre entre les différentes dimensions, car elles sont évidemment opposées les unes aux autres. Par exemple, la perspective sociétale veut que nous offrions à nos employés les meilleurs avantages, y compris un salaire élevé. D'autre part, la perspective économique nous force à être axés sur le chiffre d'affaires et les dépenses les plus basses. Cela signifie que le développement durable nous oblige toujours à équilibrer les différentes dimensions et les objectifs. Un des secrets de notre pérennité est que nous sommes conscients du fait que le développement durable est un processus continu. À ce dernier continu, il faut avoir l'idée de la réalisation d'un objectif ultime. Selon notre expérience, il est crucial de viser quant à l'équilibre des dimensions économiques et sociétales pour un développement holistique et durable. Enfin, faut-il être conscient que le succès d’aujourd’hui ne peut être forcément celui de demain. Cela dit, il y’a lieu de se remettre en cause et de se réinventer. Une entreprise durable ne peut réussir que si on est conscient du fait que nous devons toujours tout remettre en cause et par la suite sensibiliser à ce sujet. sein de la communauté. Grâce à «L'économie de l'amour» (aussi connu comme FairTrade), une part équitable pour chacun est donnée et en appliquant la fleur sur le développement durable, il est assuré que la chaîne de valeur, les activités culturelles et sociales ainsi que les méthodes agricoles sont saines et contribuent à l'amélioration des conditions personnelles et professionnelles. Sekem croit au développement durable par une approche holistique. À commencer par l'agriculture (c.-à-Sekem pour la bonification des terres, Balance ou El Mizan), aller vers les entreprises produisant des produits semi-finis, les entreprises (Lotus) et enfin produisant des produits pour le marché consommateur final (Isis organique, Atos Pharma, NatureTex) – Sekem couvre toute la chaîne de valeur qui nous permet non seulement de produire des biens de meilleure qualité en

toute transparence et de la traçabilité, mais aussi pour assurer la durabilité d'un produit. La philosophie de la responsabilité sociale Nous pronons l'agriculture biodynamique comme solution compétitive non seulement pour les défis environnementaux, mais aussi pour les défis sociaux du 21e siècle. Nous soutenons le développement individuel par l'éducation holistique et les soins médicaux. Nous créons des lieux de travail reflétant la dignité humaine et en soutenant le développement des employés. Nous construisons des modèles commerciaux performants conformément aux principes écologiques et éthiques. Nous innovons pour le développement durable grâce à la recherche en sciences naturelles et sociales. Nous préconisons localement et globalement une approche holistique du développement durable. 

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Enseignement supérieur

L'Université Héliopolis, tremplin vers l’excellence L'Université Héliopolis pour le développement durable (HU) a ouvert en 2012 sous le patronage de Sekem avec une approche holistique comparable. HU est la première université à but non lucratif dans le Moyen-Orient affichant le développement durable comme principe directeur général.

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qui est conçu pour éveiller chez les étudiants «la créativité individuelle, la capacité à travailler en équipe, la capacité d'innovation et aider à développer un sens de la responsabilité sociale et le désir de servir la société. Il permet aux étudiants de transformer les modes de pensée anciens en des processus d’action créatifs. Cette formation implique à la fois le coeur, la tête et les mains. Grâce à l'auto-réflexion et l'auto-expression, les étudiants se développent dans la confiance. Une fois ses études terminées, l'étudiant est maintenant équipé de compétences nécessaires pour résoudre les problèmes. Cet etablissement est pionnier en matière de présentation du concept de développement durable aux etudiants et communautés, à travers une compréhension renouvelée intégrant l'enseignement, la recherche, l'apprentissage et la pratique. L'université a adopté le concept «Project Competence Degree», dont le couronnement est l'entrelacement de la théorie avec les besoins des entreprises. En outre, HU vise à former des entrepreneurs sociaux capables d'affronter et de surmonter les défis de demain par l'innovation, la collaboration et la technologie. Au cours de leurs études, les étudiants travailleront sur des projets avec des entreprises partenaires en adoptant une approche de résolution de problèmes. Ainsi, ils acquièrent de nouvelles aptitudes à travers l'étude et

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l'application de compétences inédites dans un environnement réel. Cela permet également aux étudiants de se concentrer sur un domaine de leur choix, en gardant une motivation élevée tout au long de leurs études. Sur le long terme, cela permettra à la réussite personnelle d’être significativement liée à la réussite des entreprises. Quatre principales filières Le diplôme obtenu s'appuie sur une formation académique solide couplée avec des expériences pratiques qui répondent simultanément aux besoins d'affaires et inspirent les élèves à penser de façon innovante. HU a commencé en 2012 avec trois facultés : la Pharmacie, l'Ingénierie et l’Économie d’entreprise. HU offre un programme de base obligatoire

Le programme de base comprend quatre volets : Nature et Communauté : Concilier la nature intérieure et extérieure à travers la découverte de l'écologie profonde, l'écologie sociale et de la psychologie. Sciences sociales et Innovation : Élargissement des connaissances par l'apprentissage de la politique, des droits de l'homme, la philosophie et la recherche sociale. Arts : Approfondir le développement personnel par l'engagement dans la musique, et la parole par intérim, l'eurythmie, les beaux-arts, l'architecture et le design. Langues, Communication et Entreprise : La compréhension des cultures par le biais de l'étude de l'anglais, de l'allemand, de l'arabe et de l'entrepreneuriat. 


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Innovation

La R&D au cœur du processus À Sekem, la Recherche & Développement joue un rôle crucial depuis le début, car nous pensons que nous devrions nous développer et nous réinventer en permanence, et que les défis et les besoins de la communauté changent aussi constamment. Par conséquent, nous poursuivons en permanence la R&D dans la dimension agricole. Autrement dit, nous sommes à la recherche de systèmes d'irrigation plus efficaces, dans la dimension culturelle, c'est-à-dire lancer des projets pour améliorer la qualité de vie, de l'éducation et de la celle de la santé dans les zones environnantes, dans la dimension sociétale, grâce à la Stratégie de genre, ou la dimension économique, soit par le biais de pionniers sur le marché égyptien avec des produits biologiques, le développement de nouvelles lignes de produits, etc. Les entreprises travaillent en étroite collaboration avec l'Université d'Héliopolis. Ainsi, SEKEM réunit des chefs d'entreprise et des universitaires et les pousse à mobiliser tout leur potentiel .

Le pari de l’export Lorsque Sekem a commencé à produire ses premiers biens de consommation finale, il n'y avait pas du tout de marché biologique en Égypte. Sekem fut pionnier en introduisant sur le marché égyptien les produits biologiques. Pendant ce temps, Sekem a commencé à exporter une partie de ses produits à ses partenaires et réseaux de par le monde. Les produits de Sekem sont compétitifs sinon comment auraient ils pu les exporter? Depuis le début, cela a été une priorité pour Sekem de produire pour le marché local. Par conséquent, le Sekem s’efforce de maintenir un pourcentage global de 75 % à 25 % de

ventes locales à l'exportation. Cela a varié au fil des ans, mais normalement pas plus de +/-3 %. L'entreprise alimentaire, particulièrement Sekem Isis Organique, est très connue en Égypte, c'est le leader du marché de Thé Infusion, et leader du marché et pionnier du secteur Organique en Égypte. Vous pouvez trouver des produits Sekem, fabriqués principalement par Isis Organique, dans presque chaque supermarché, pharmacie, kiosque ou ailleurs en Égypte. Les entreprises de Sekem exportent aussi vers le marché africain, mais pas au point que les produits y soient trés connus , en raison de la pratique de l'etiquettage "blanc" qui est parfois pratiqué. 

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Business Model

S’aligner sur les normes internationales En tant que source d'information pour toutes les parties prenantes de Sekem (clients, employés, clients, investisseurs, partenaires d'affaires, des médias, etc.), Sekem a développé le concept de "Fleur de la durabilité" dans un réseau d'organisations internationales du mouvement biodynamique organique, qui collaborent sous l'égide de l'Association internationale du Partenariat pour l'écologie et le commerce (IAP). Il aide à diffuser le concept Sekem en tant que société responsable et, ainsi, permet à Sekem de servir de modèle pour les autres organisations qui visent à instaurer un développement durable.

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l'application du tableau de bord du développement durable. Toutes les entreprises Sekem mènent leurs activités d'une manière responsable et éthique. Nous visons la qualité la plus élevée du produit basée exclusivement sur les matières premières organiques.

La «Fleur de la durabilité» représente un outil de gestion, d'évaluation et de communication symbolisant le concept de développement durable dans ses quatre dimensions : économique, sociale, culturelle et écologique. Il aide à aligner l'organisation à sa vision, sa mission et ses politiques. Plus important encore, il prend en charge la gestion à fixer des objectifs, de mesurer les progrès et d'identifier les possibilités d'amélioration. La performance de Sekem est résumée dans le tableau de bord du développement durable. La contribution des entreprises individuelles Sekem au développement global durable de Sekem Holding devient plus claire et plus transparente après

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Systèmes de gestion certifiés Nous prenons toujours une perspective à long terme envers notre développement et accordons une haute priorité à la préservation de la nature pour les générations futures. Nos objectifs forts ne peuvent être atteints que par l'établissement de partenariats durables tout au long de notre chaîne d'approvisionnement. C’est pourquoi nous sommes engagés à soutenir nos fournisseurs à satisfaire nos exigences qualitatives, sociales et environnementales afin qu'ils puissent donc recevoir leur quote-part dans la création de valeur. Les systèmes de gestion de la qualité des entreprises Sekem sont certifiés selon la norme ISO 9001. Les exigences de cette certification comprennent l'amélioration continue du contrôle de la qualité et de tous les processus qualitativement pertinents, ainsi que l'amélioration de la satisfaction de la clientèle. Pour ce qui est du niveau du produit, nous nous conformons à une série de normes comme Fairtrade, les Normes internationales Demeter et Global Gap.

Notre monnaie ne se réduit pas à des chiffres financiers. Nous mesurons le succès dans toutes les dimensions de la «Fleur de la durabilité». Chaque dimension de la «Fleur de la durabilité» se compose de plusieurs aspects de la performance, définis en détail grâce à des indicateurs de performance. Ils sont, autant que possible, applicables et liés à la norme internationale pour les rapports sur la durabilité, la GRI G3.1 de la Global Reporting Initiative. Durant les dernières années, nous avons beaucoup appris grâce à l'application de ce concept à notre travail ; aussi lesquels aspects de performance sont faciles à évaluer. Dans la dimension «Vie économique», Sekem reflète le genre de produits qu'il vend et la manière avec laquelle elle partage la valeur aux parties prenantes, tout au long de la chaine. Dans «Vie sociétale», il prend en compte non seulement la protection et la réglementation des droits humains, mais aussi toutes les autres relations humaines, y compris une gouvernance responsable et durable. La «Vie culturelle» se concentre sur la question de savoir comment soutenir le développement personnel des individus. Ces trois domaines de la société sont entourés par les six sous-dimensions de «L’écologie» : les sols, les plantes, les animaux, l'énergie, l'air et l'eau ; de manière à comprendre l'impact positif et négatif sur l'environnement. 


business case

Personnel

Promouvoir l’égalité des chances Par exemple, Sekem a récemment lancé une «Stratégie Genre pour une société équilibrée» complète même si l'égalité des sexes est déjà incluse dans notre vision. Mais, puisque les femmes en Égypte ne sont pas prises en charge pour accéder à l'indépendance économique et sociale, en particulier dans les zones rurales, d'où sont originaires la plupart de nos employés, Sekem a développé une Stratégie genre avec les lignes directrices portant sur la manière de soutenir les femmes dans l'éducation et au travail et ainsi assurer leurs droits humains et renforcer leur rôle sociétal vers un équilibre entre les sexes dans la société égyptienne. Même le sens de l'égalité des sexes est déjà pris en compte dans la mission Sekem, la Stratégie genre vise à résumer les efforts et l'engagement d'une manière officielle, ce qui est tout à fait unique en Égypte. Nous ne le faisons pas seulement pour promouvoir l'égalité des sexes, mais pour notre mission principale qui est celle d'assurer un avenir durable. Autonomisation des femmes En coopération avec la GIZ (coopération allemande au développement), un partenaire de longue date de Sekem, une foule d'activités et de projets se sont déroulés dans les différentes institutions de Sekem afin de sensibiliser au sujet et à l'autonomisation des femmes pour parvenir à une société équilibrée. Ainsi, Sekem soutient la participation des femmes dans la vie publique en promouvant le concept de l'égalité des sexes toutes les composantes des activités de Sekem: dès l'ecole où les filles

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Au sein de notre développement constant dans toutes les dimensions, nous avons des activités actuelles qui soutiennent toujours notre vision.

et les garçons sont éduqués et formés de manière à les préparer à occuper les mêmes postes , puis à l’université où ils se concentrent sur l'organisation de différents ateliers et discussions en ce qui concerne le rôle des femmes dans la société et les avantages spéciaux destinés aux employés. Sekem permet à tous les collégues masculins comme féminins de prendre un mois de congé sans solde consécutive et soutient ses employés en payant une partie des frais de scolarité pour les enfants fréquentant les écoles Sekem. En plus, Sekem offre des aménagements de travail variés pour des femmes en facilitant des heures de travail réduites ou flexibles, le bureau à do-

micile, le travail à temps partiel et le partage de postes pour les encourager à garder à leurs emplois tout en leur permettant de faire face à leurs responsabilités familiales. Comme le soin et l'attention du père sont de la plus grande importance pour un enfant, Sekem et HU permettent jusqu'à un mois le congé parental non rémunéré aux pères dans la première année après la naissance d'un enfant. Sur le long terme, le Sekem ambitionne d'atteindre un quota de 50% de femmes employées au sein de toutes les entités de la holding, par des mesures incitatives comme l'engagement des directeurs à recruter un certain pourcentage de femmes comme une condition pour leurs bonus annuels. 

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business case

Énergies renouvelables

Sekem se concentre sur la promotion des énergies renouvelables dans toutes les institutions de la holding, vu qu'ils perçoivent ce sujet comme prioritaire pour un avenir durable. Le groupe est déjà engagé pour les énergies renouvelables depuis de nombreuses années et a intégré le sujet dans tous les segments de ses activités : dans les établissements  d'enseignement, dans le domaine agricole, dans les usines et même dans son centre médical. Après l'installation de la plus grande pompe à eau solaire cette année sur le domaine d’activité agricole Sekem Wahat dans le désert occidental, est l'un des pionniers de l'Égypte dans le domaine des énergies solaires. Dans le Héliopolis Université le Sekem met en œuvre un grand nombre de recherches en ce qui concerne les énergies renouvelables. Ainsi, il existe un système photovoltaïque placé sur le toit qui non seulement alimente une partie des bâtiments de l'université en électricité, mais sert également des étudiants et des organisations

© Sekem

Investir dans le développement durable

partenaires avec différents types de panneaux solaires pour stimuler les recherches. Depuis l'année dernière, le Centre de formation professionnelle Sekem offre une formation pour les soudeurs spécialisés dans les technologies d'énergie renouvelable. Les diplômés contribueront non seulement aux futures installations solaires de Sekem, mais cela aidera

dans l’ensemble l'Égypte à promouvoir le recours à l'énergie solaire. Sekem est confiant quant au passage de tout l'approvisionnement en énergie dans le domaine agricole bientôt en énergies renouvelables et sur le long terme Sekem a pour but de fournir des énergies renouvelables pour tous les établissements. 

L’acquisition de terres

Un grand obstacle La vision de Sekem de promouvoir le développement durable à travers un concept holistique est un défi quotidien. Il y a 38 ans lorsque le Dr Ibrahim Abouleish planifiait de récupérer des terres de désert pour cultiver des méthodes biodynamiques il était perçu comme

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un fou. Non seulement parce qu'il voulait construire sa ferme au milieu du désert, mais aussi parce que l'agriculture biodynamique et même biologique était complètement inconnue en Égypte. Aujourd'hui, Sekem est connu comme le pionnier bio dans le

Moyen-Orient et est leader sur le marché des produits biologiques en Égypte. Cependant, non seulement la remise en état des terres est un défi en soi, mais aussi les conditions auxquelles les entreprises égyptiennes sont confrontées. Il n'y a pas de soutien par le gou-


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Gestion des ressources humaines

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La Coopérative des employés de Sekem comme locomotive

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La Coopérative des employés de Sekem a été fondée promouvoir le travail dans un environnement sain, sûr et à dimension humaine. L'Union coopérative gouvernementale des affaires sociales supervise ses activités.

vernement et Sekem doit lutter contre un grand nombre d'oppositions. Il y a toujours des processus et des négociations avec les organismes publics ainsi que les populations autochtones. Il y a des processus longs et semés d'embûches et des négociations ardues avec des administrations et des populations autochtones sur les questions foncières. De plus, la révolution égyptienne en 2011 a été et est toujours un défi, mais SEKEM a su relever ce défi grâce à son réseau tentaculaire de partenaires et de supporters partout dans le monde , sans oublier l'engagement fidèle des travailleurs. 

L'objectif est de parvenir à la justice sociale et à une vie décente pour tout le monde à l'Initiative de Sekem. Les activités actuelles de la Coopérative sont la pharmacie dans les principaux locaux Sekem, la bibliothèque, la cafétéria qui offre des repas sains aux employés chaque jour et le transport des travailleurs. Actuellement, la Coopérative compte 220 membres sur la base de la répartition des actions. En plus de cela, les employés Sekem sont encouragés à prendre part aux activités syndicales, ce qui permet de promouvoir ses activités dans les locaux de l'entreprise à tout moment. Les employés de SEKEM sont motivés par un environnement de travail décent qui comprend non seulement un lieu de travail propre et sain, mais ils bénéficient également de formations et d’activités culturelles régulièrement.

Le «cercle du matin» tous les jours, qui est obligatoire pour tous les employés, se déroule dans chaque société de l'institution est censée entamer la journée avec le sentiment de faire partie d'une communauté dans laquelle tout le monde a les mêmes droits et valeur quels que soient son poste, ses croyances et ses origines. En travaillant dans cet esprit qui favorise la coopération, les employés visualisent parfaitement que chaque unité est intrinséquement liée aux autres. Le grand cercle qui se déroule tous les jeudis sur la principale ferme de Sekem a une signification identique. Les employés Sekem de toutes les différentes sociétés se rencontrent et se serrent la main, soit avec le Dr Ibrahim Abouleish soit avec son fils Helmy Abouleish, PDG de Sekem avant de se quitter pour le week-end.

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© Sekem

business case

Perspectives Vulgariser davantage l’agriculture biologique SEKEM n’est pas une entreprise qui planifie ou qui évolue sur la base de projets. C'est une initiative œuvrant en s'appuyant sur quatre dimensions avec la vision de promouvoir le développement durable.

Cela signifie que Sekem travaille dans le développement continu pour éveiller, par exemple, dans les établissements d'enseignement la même prise de conscience que celle accordée aux activités culturelles ou économiques. Bien sûr, l'une des activités principales est la remise en état des terres désertiques qui constitue le fondement de toutes les autres activités. Par conséquent, cela est un «projet» qui sera toujours d’actualité.

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En plus, Sekem continue à sensibiliser aux avantages de l’agriculture biologique. A ce propos, Sekem publie une mise à jour des études biologique d’Égypte réalisée par l'un de ses partenaires «Soil & More International» en 2010. L'étude biologique 100 % compare le coût total de développement de la production des sept principales cultures égyptiennes en deux scénarios différents : Business as Usual (BAU) et pratique l'agricul-

ture durable (SFP). Pour les sept récoltes, les coûts complets de production ont été calculés pour la période de dix ans et pour des raisons de simplicité, seulement des extérieurs durs, tels que l'énergie, l'évolution des prix des engrais, l'empreinte carbone et de l'eau ont été pris en considération. L'étude montre par exemple que chaque année, plus de 1,25 à 1,8 % de l'engrais synthétique doivent être appliqués dans des systèmes


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Sekem,

lauréat du prix de la Terre 2015

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«Life Award»

BAU pour maintenir le même rendement «Efficacité des engrais». La moyenne annuelle de séquestration de carbone des systèmes durables est d'une tonne de carbone par hectare. Enfin, il montre que les coûts réels, par exemple pour les pommes de terre et de blé biologique, vont augmenter beaucoup moins par rapport à celles conventionnelles. Les coûts de production de pommes de terre sont déjà moins chers maintenant, si la vraie comptabilité analytique est appliquée.

Sekem a décroché cette année le prix «Land for Life Award» vu sa contribution remarquable dans la lutte contre la dégradation des sols, un prix décerné par le CCD (Convention des Nations unies sur la lutte contre la désertification). En remportant ce prix, Sekem bénéficie d’un soutien individuellement adapté qui comprend : la mise en réseau des organisations intéressées, le profilage de leurs initiatives au niveau national et international ainsi que la possibilité de mettre en valeur les actions à l’occasion d’événements nationaux et internationaux. À cet égard, Sekem sera aussi «un porte-parole» pour porter le concept de Neutralité de la dégradation des terres auprès des autorités publiques.

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african sectoral Journal Innovation

Les étudiants africains se connectent aux MOOC MOOC. Ces quatre lettres sont en train de bouleverser carrément les méthodes d’apprentissage habituelles. Avec elles, la connaissance se démocratise, le savoir se généralise. Mais au fond, de quoi s’agit-il ? Les MOOC qui signifient en anglais Massive Open Online Course ou formations en ligne ouvertes à tous (Flot), cours en ligne ouverts et massifs (Clom) sont des cours gratuits dispensés par des professeurs de grandes universités dans le monde. Ce modèle a été développé pour la première fois en 2008 par des universités américaines telles que Stantford et Harvard. Par la suite, ce nouveau mode opératoire s’est largement répandu en Europe et sur d’autres continents. Certains sites à l’instar de Coursera et Khan Academy surfent sur cette vague ascendante en proposant des programmes similaires pour les apprenants. L’engouement des étudiants et des travailleurs africains pour ces cours est un secret de Polichinelle. Pour eux, c’est une véritable aubaine, car ils offrent plusieurs avantages : la possibilité de suivre des formations qui les intéressent et qui ne sont

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Les Massive Open Online Course plus connus sous l’acronyme «MOOC» ont complètement révolutionné l’enseignement supérieur en Afrique et dans le monde. Ces cours en ligne sont très suivis par des étudiants et travailleurs africains grâce aux multiples avantages et opportunités qu’ils offrent.

Des étudiants connectés à CFI, l’agence française de coopération médias, ayant conçu et réalisé un MOOC pour journalistes et développeurs web en Afrique.

pas proposées par leurs universités, suivre gratuitement des cours en vidéos sans bouger de son fauteuil, et enfin et surtout, ne plus fréquenter les amphithéâtres surpeuplés ou toutes les conditions pour un apprentissage de qualité ne sont pas réunies. L’autre avantage, c’est la possibilité de décrocher une certification payante après avoir validé les modules. D’ailleurs, plusieurs d’entre eux sautent sur cette opportunité pour booster leurs CV et séduire les recruteurs. L’École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL), considérée com-

me le leader des MOOC en français, accueille bon nombre d’inscrits africains. On dénombrait plus de 40.000 inscrits pour une trentaine de MOOC, dont 13.073 étudiants africains. En 2014, plus de 20% des 11.300 inscrits au MOOC «Gestion de projet» de l’École Centrale de Lille provenaient de l’Afrique. Conscient de cet engouement, l’EPFL propose dans son offre académique un cours sur la «Ville africaine». Elle envisage de signer des partenariats avec des universités africaines pour accroitre le nombre d’étudiants avec comme objectif : 100.000 inscrits. 


african sectoral journal

Enseignement

Les MOOC, une aubaine pour les universités africaines

Les universités africaines veulent surfer sur la vague des MOOC, sûrement inspirées par les établissements américains et européens. Mais si chez ces dernières la révolution est déjà en marche, ce n’est pas encore le cas en Afrique. Les programmes de MOOC sont absents des cursus de formations des universités. Seule une poignée essaie de briser la glace. Parmi elles, l’Institut de management et des technologies d’Abidjan en Côte d’Ivoire, une institution privée qui a lancé en 2014 un MOOC sur la finance. Mais, pour l’heure, l’exemple le plus abouti au niveau continental, c’est sans nul doute celui de l’Université Cadi Ayyad de Marrakech (UCA) qui a lancé depuis 2013 son projet de cours gratuits en ligne «UC@Mooc». La réussite de cette formation a poussé le ministère de l’Enseignement supérieur du Maroc à solliciter l’UCA pour la duplication de projets similaires dans d’autres universités du Royaume. Une réelle alternative pour améliorer l’enseignement supérieur Un diagnostic de l’enseignement supérieur africain permet de constater aisément que les Moocs sont d’une grande utilité pour le continent, une réelle alternative pour éviter le surpeuplement de nos universités. À titre illustratif, le nombre d’étudiants au niveau continental est passé de 200.000 en 1970 à 5 millions en 2014, avec une progression de 9% par an des effectifs, soit deux fois plus vite

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Conscientes de l’énorme impact des MOOC sur le système éducatif, certaines universités africaines développent des programmes pour ne pas rester en marge, mais le manque d’électricité et l’insuffisance d’infrastructures freinent leurs ambitions.

Pr. Khalid Berrada assure des cours en Optique Géométrique sur la plate-forme UC@Mooc de l'Université Cadi Ayyad de Marrakech

que dans le reste du monde. L’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (UCAD), qui dispose d’une capacité de 50.000 places, reçoit 80.000 étudiants. Au Cameroun, chaque année, 50.000 nouveaux bacheliers frappent aux portes des huit universités publiques et deux universités virtuelles. À cela, il faut ajouter les problèmes d’infrastructures et l’insuffisance du corps professoral et de chercheurs qui préfèrent souvent rejoindre les universités européennes ou américaines pour mieux mener leurs travaux. Autant de facteurs qui confirment la nécessité de ces cours 2.0. «L’Afrique va devoir faire face au

doublement de sa population. Le rythme auquel elle pourra construire des infrastructures et former des enseignants sera toujours en retard sur l’afflux croissant de nouveaux étudiants. Les MOOC sont une innovation technologique dont elle doit se préparer à tirer profit pour répondre au double défi de l’explosion de la demande et de l’inégalité d’accès à l’enseignement», a indiqué le professeur et philosophe sénégalais Souleymane Bachir Diagne dans son discours inaugural prononcé lors de la Conférence sur les enjeux du numérique pour l’enseignement supérieur en Afrique, organisé les 6 et 7 mai dernier par l’Unesco à Paris.

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african sectoral journal Electricité et Internet, deux équations à résoudre Les enjeux sont donc immenses et les acteurs de l’écosystème éducatif l’ont bien compris. L’on constate de plus en plus la création d’universités virtuelles dans certains pays africains comme le Cameroun et le Sénégal. Leur aînée, l’Université virtuelle africaine a vu le jour en 1997. La création de ces structures peut servir de tremplin pour instaurer des MOOC made in Afrique, à condition de les doter de moyens adéquats pour leur permettre de relever ce challenge. Le développement des MOOC requiert des préalables : un ordinateur et une bonne connexion Internet. Deux choses qui manquent dans de nombreuses localités du continent, y compris dans les universités. En Côte d'Ivoire et au Mali par exemple, les universités parviennent à satisfaire uniquement 10% de leurs besoins en accès à Internet. Toutefois, il est heureux de constater que certaines d’entre elles commencent à développer des projets de connexion sans fil (WiFi) dans leur campus. Pour se connecter à Internet, faudrait-il encore avoir de l’électricité, un jus qui manque terriblement dans plusieurs pays africains plongés dans des délestages intempestifs. L’autre entrave, c’est le manque de culture numérique chez certains enseignants. Beaucoup d’entre eux semblent être allergiques aux technologies de l’information (TIC) et de la communication, préférant se cantonner dans leurs méthodes traditionnelles. L’ordinateur portable constitue aussi un luxe pour beaucoup d’étudiants qui n’ont pas souvent les moyens pour l’acheter. Pour résoudre ces équations, l’Union économique et monétaire ouestafricaine (UEMOA) a lancé un projet de développement des TIC dans certains pays africains avec comme objectif l’installation de 2.000 ordinateurs dans chaque campus et 16 km de fibre optique pour élargir la bande passante. 

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Entretien

Mejdi Ayari

Spécialiste des MOOC à l’Agence universitaire de la francophonie Les «MOOC» prennent de plus en plus une place importante dans les programmes académiques en Afrique. L’Agence universitaire de la francophonie (AUF) a d’ailleurs lancé un programme de formation sur le numérique pour des universités de l’Afrique francophone. Quels sont les grands axes de ce projet ? Tout d'abord, il faut rappeler que l'Agence universitaire de la francophonie a commencé à œuvrer dans le domaine du numérique éducatif depuis plus d'une vingtaine d'années. Notre engagement se concrétise via la création d'un ensemble de campus numériques francophones se trouvant dans tous les pays africains francophones. Ces structures offrent des actions de sensibilisation et de formation à l'usage du numérique éducatif. L'AUF soutient aussi un ensemble de Formations ouvertes et à distance (FOAD) : plus que 80 formations diplômantes (Licence et Master) totalement à distance et dont une grande partie sont issues des pays du Sud. À côté de ces FOAD, l'Agence est tout à fait consciente que les MOOC ou CLOM (Cours en ligne ouverts et massifs) présentent une opportunité pour nos pays du Sud afin d'avoir plus de visibilité à l'échelle internationale et assurer une solution au problème de la massification. L'Agence, depuis l'année dernière, a soutenu 6 projets de MOOC/CLOM et soutient aussi 5 autres projets pour cette année. Nous sommes tout à fait conscients qu'il faut doter nos universités de compétences humaines les rendant autonomes dans le domaine du numérique éducatif. Plusieurs thématiques sont abordées dans ces ateliers, dont comment scénariser un MOOC/CLOM, comment animer et piloter un MOOC/CLOM, l'usage d'une plateforme pour l'intégration du contenu d'un MOOC/CLOM... Ces différents chantiers sont menés en étroite collaboration avec un ensemble de partenaires du Nord tels que France Université Numérique (FUN), l'École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) et Centrale Lille.

Combien d’universités bénéficient de ce programme ? Toutes nos universités membres (qui dépassent les 800 dans le monde et dont une centaine se trouvent au Maghreb) peuvent bénéficier de nos actions dans le domaine du numérique. Des appels à candidatures sont lancés : il suffit de postuler et, une fois le dossier évalué positivement, l'Université bénéficiera du soutien de l'Agence. À titre indicatif, l'appel à projets lancé cette année pour soutenir des MOOC développés par des Universités du Sud a permis de sélectionner 5 projets dont 2 sont issus d'un consortium d'Universités maghrébines et soutenus par le Bureau Maghreb de l'AUF. Ces 5 nouveaux projets viennent rejoindre une première vague de 6 projets de MOOC/CLOM soutenus l'année dernière. Ces MOOC/CLOM une fois accessibles en ligne permettent facilement de toucher pas moins de 3.000 apprenants par MOOC/CLOM, et par session. Nous avons un MOOC/CLOM sur l'écotourisme de l'Université de Jendouba (Tunisie) qui a permis à plus que 3.000 apprenants, dont plus de la moitié sont issus d'Afrique francophone, de se former à l'écotourisme et dont presque une centaine se présenteront à un examen de certification pour avoir une reconnaissance de leurs compétences dans ce domaine. Par ailleurs, l'Agence a lancé, depuis cette année, un programme de formation de formateur en conception et développement des MOOC/CLOM : 3 premiers ateliers, organisés au Maghreb, ont permis de former 25 formateurs par atelier de formation. Ce même programme sera déployé dans les autres régions (Afrique centrale, Afrique de l'Ouest, Moyen-Orient...) dans les jours à venir. Et pour compléter notre offre, nous venons de lancer en partenariat avec l’Unesco et le Réseau international francophone des établissements de formation de formateurs (RIFEFF) le MOOC CERTICE SCOL (certification des compétences TIC des enseignants).


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african sectorial journal

«Sensibiliser nos professeurs aux apports des MOOC» CERTICE SCOL vise à former puis à certifier les enseignants du primaire, du secondaire et leurs encadrants aux usages des technologies de l’information et de la communication en éducation. Quels sont les avantages de ces cours massifs et gratuits pour l’enseignement supérieur africain ? D'abord et comme son nom l'indique il s'agit de cours massifs qui répondent très bien au problème de massification auquel l'enseignement supérieur africain est confronté. Deuxième avantage c'est que cette modalité de formation fait appel à de nouvelles approches pédagogiques telles que la pédagogie par les pairs et par les projets ainsi que le recours aux réseaux sociaux pour un apprentissage collaboratif. Toutes ces approches pédagogiques innovantes incitent les apprenants à s'engager davantage dans la formation. Par ailleurs, il ne faut pas négliger l'apport des MOOC/CLOM dans la visibilité internationale de nos universités africaines ; les premiers MOOC/ CLOM développés en Afrique ont bien montré

l'engouement autour des connaissances et des savoirs africains et cela ne peut être que bénéfique pour la visibilité de nos universités et surtout de nos enseignants africains. Selon vous, quelles sont les principales entraves qui freinent le développement des «MOOC» en Afrique ? Tout d'abord, il faut bien sensibiliser nos professeurs aux apports des MOOC/CLOM. Il est tout à fait normal qu'il y ait une résistance de leur part à ce nouvel «intrus», mais ils doivent bien comprendre qu'avec le numérique on ne va pas les déposséder de leur pouvoir ni réduire leurs heures de cours, mais ils seront plutôt amenés à innover dans leurs méthodes pédagogiques. Pour pallier ce problème, les décideurs ont un rôle important à jouer : ils doivent encourager toute initiative d'enseignant désirant utiliser le numérique et valoriser les expériences pilotes. Deuxième élément à prendre en considération, et qui est relatif à toutes les activités qui se font en ligne, est la qualité de la bande passante. Il existe une disparité flagrante entre les différents pays africains par rapport à la

bande passante utilisée. Cela présente un vrai handicap d'autant que le contenu des MOOC se base essentiellement sur des capsules vidéo. Pour essayer d'atténuer les conséquences de ce problème d'ordre technique, il faut que les concepteurs des MOOC/CLOM orientés vers un public africain prennent en considération cet aspect et proposent du contenu adapté à leur public cible. Le modèle économique des MOOC/CLOM présente aussi un éventuel frein pour leur développement : Comment arriver à financer le développement et l'animation d'un MOOC/CLOM alors que la formation est gratuite ? Pouvonsnous nous limiter aux recettes engendrées par les certifications pour faire vivre un MOOC/ CLOM ? Et est-ce que nos apprenants africains sont prêts à payer des certifications alors qu'ils sont habitués à payer des frais de scolarité dérisoires ? Tous ces questionnements doivent être pris en considération afin de garantir la pérennité d'un MOOC/CLOM et créer un modèle adapté à l'Afrique. Malgré ces différentes entraves, nous pensons qu'il faut bien avancer dans cette voie et cela pour l'intérêt de l'Afrique et de sa jeunesse rattachée à l'usage des TIC.

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Entretien

Abdelatif Miraoui

Président de l’Université Cadi Ayyad de Marrakech

«Innover pour construire l’université africaine de demain » L’Université Cadi Ayyad a lancé en 2013 son projet de cours gratuits en ligne «UC@Mooc». Quels sont les principaux objectifs de ce programme ? Le dispositif Mooc lancé par l'Université Cadi Ayyad (UCA) était la première initiative de ce genre en Afrique. Comme vous le savez, notre établissement, à l’instar des autres universités marocaines, doit composer avec un taux d’encadrement pédagogique et administratif très faible tout en continuant à accueillir un flux d’étudiants en constante progression. Cette situation a des conséquences multiples sur les conditions et l’environnement de travail, la qualité de l’enseignement et de l’encadrement ainsi que sur la gestion administrative et financière au sein de l’établissement. À l’Université Cadi Ayaad, nous sommes conscients de la complexité de la situation et de l’ampleur des défis à relever. Nous sommes néanmoins convaincus qu’il est possible d’affronter et de dompter ces contraintes pour améliorer l’enseignement dans nos structures. Nous sommes également persuadés que l’innovation est la voie à suivre. Nous devons repenser notre modèle pédagogique et de gestion afin de mieux l’adapter aux conditions actuelles. Au niveau pédagogique, le projet Mooc est l’un des piliers de cette «politique de l’innovation» que nous poursuivons. Les Mooc permettent aux étudiants d’avoir accès aux cours dans de meilleures

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conditions et avec plus de flexibilité. Les Travaux dirigés ainsi enregistrés touchent un plus grand nombre d’étudiants qui auraient été incapables de les suivre dans les conditions physiques des salles de cours et des amphithéâtres surpeuplés. Par ailleurs, la contrainte du volume horaire étant un handicap au bon encadrement des étudiants, les Mooc permettent aux enseignants de mieux mettre à profit le temps en présentiel pour interagir avec les étudiants et approfondir leurs connaissances. En donnant un accès gratuit et illimité aux cours, TD et TP, les Mooc peuvent également contribuer à résoudre la problématique de l’abandon et de l’échec universitaire. Le Mooc tel que nous l’avons développé répond au contexte spécifique de notre université et de notre pays. C’est un dispositif hybride dont l’objectif n’est pas de remplacer les cours en présentiel, mais de les compléter. Ces cours sont destinés exclusivement aux étudiants de l’Université ou sont-ils ouverts à d’autres, notamment des chercheurs ? Nous visons bien entendu en priorité nos propres étudiants, mais les cours enregistrés dans le cadre des Mooc sont disponibles gratuitement en ligne pour tous les étudiants, chercheurs ou toute personne désirant en tirer profit. Nous sommes une université publique et notre vocation première est l’enseignement et la diffusion du savoir.

La mise en place de projet numérique a sûrement nécessité d’importantes dépenses en matériels audiovisuels. Qu’en est-il de ces coûts ? Nous avons effectivement investi, et continuons à investir, dans du matériel audiovisuel pour le lancement et pour le développement du projet Mooc. Néanmoins, le véritable investissement a été humain. Ledit projet a nécessité l’engagement et l’implication de ressources humaines importantes, d’abord dans l’ingénierie et la conception du dispositif. Ensuite pour la mise en œuvre du projet à travers la formation à la scénarisation et l’enregistrement des cours. Et enfin pour la mobilisation des enseignants autour de ce projet et la sensibilisation à l’intérêt de cette approche pédagogique innovante. Afin d’évaluer l’investissement consenti pour ce projet, il est important d’internaliser les coûts en termes de matériel et d’équipement ainsi qu’en ce qui a trait aux ressources humaines impliquées. À titre indicatif, le lancement du projet a coûté un peu plus de 1.000.000,00 DH hors coût des enseignants chercheurs. La contribution de ces derniers s’est faite sur la base du volontariat et leur mobilisation massive autour de ce projet est un gage de réussite pour notre Université. Votre Mooc a réalisé 112 heures de contenu disponibles en ligne dont 10 conférences. Un bilan satisfaisant pour cette phase de lancement ?


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Aujourd’hui, certaines grandes écoles européennes effectuent des examens et proposent même des certifications aux internautes à travers leurs Mooc. Comptez-vous adopter ultérieurement cette approche ? Notre université a lancé un projet pilote au niveau du Maroc. Ce projet consiste en la conception et la réalisation d’une formation payante en temps aménagé et qui serait sanctionnée par un diplôme. Nous sommes en phase d’enregistrement et les résultats sont pour l’instant extrêmement prometteurs. Comme précisé, ceci est un projet pilote, si les résultats sont concluants, et je pense qu’ils le seront, nous pourrons envisager de dupliquer l’expérience à d’autres formations continues. La flexibilité que permet l’utilisation des cours en ligne étend les champs d’application et nous permet, entre autres, de proposer des réponses plus adaptées aux besoins des étudiants et des entreprises.

Statistiques de juin 2015 • Lancement : décembre 2013. • 220 unités de cours mises en ligne. • 112 heures de contenu disponibles en ligne dont 10 conférences (+2 en montage), 3 TD, 3 TP. • 38 cours et 32 enseignants impliqués (+ conférenciers). • 1.610.000 vues, plus de 6.500.000 minutes visionnées. • Plus de 8.600 abonnés, plus de 2.300 partages. • Plus de 800 commentaires, et plus de 3.600 «J'aime».

Ces chiffres forts prometteurs (voir encadré) traduisent l’intérêt des étudiants et des enseignants pour le produit Mooc et donc sa pertinence. Il s’agissait dans un premier temps d’introduire le Mooc dans les mœurs et les pratiques des professeurs et des étudiants. Nous nous sommes appuyés pour cette première phase sur des pro-

fesseurs volontaires convaincus par ce concept et qui, par leur engagement, lui ont donné vie. Notre objectif pour cette année serait l’enregistrement de tous les cours de S1 et S2 et leur mise en ligne. Aujourd’hui, le défi est d’atteindre la vitesse de croisière et de généraliser l’enregistrement des cours, des TD et des TP.

Selon vous, quelles sont les principales entraves qui freinent le développement des Mooc en Afrique ? Je pense que la plus grande contrainte est d’ordre humain. Il ne s’agit pas d’introduire les nouvelles technologies, mais d’abord de changer de paradigme. Une fois cette étape franchie, le reste est plus facile. Le vrai défi à mon sens est d’opérer un changement dans les mentalités et d’amener les enseignants et les décideurs à accepter de repenser leurs approches et leurs méthodes. Souvent, le plus dur est d’entamer le changement. Il est vrai, par ailleurs, que le stress constant que subissent nos institutions universitaires ne permet pas d'avoir le temps et le recul nécessaires à la réflexion et à la prise de décision stratégique, mais paradoxalement c’est aussi à cause de ce stress qu’il est aujourd’hui urgent de réfléchir à la pertinence de nos systèmes et de nos approches et d’innover pour construire l’université africaine de demain. 

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Modèle & Outils de management

La technique des «Quick Wins»

Les petits succès qui appellent les grands

«Changer ou disparaitre» Un postulat partagé par l’ensemble des dirigeants et managers d’entreprises. Le terme changement est devenu en effet le maître mot des communications en matière de management des organisations. Un terme souvent associé à la notion de rupture : «Pour qu’il y ait changement, il faut qu’il y ait une rupture significative des modes de fonctionnement de telle manière que nous soyons contraints à un effort d’adaptation.»(1)

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Dans le cas de grands projets de transformation, les efforts d’adaptation sont souvent considérables afin de lutter contre des comportements, des habitudes et des réflexes bien ancrés. Ce qui rend le changement difficile. D’autant plus qu’il nécessite de nouvelles compétences à acquérir et à mettre en œuvre durablement. En outre, le changement n’est pas naturel, car l’homme a tendance à s’accrocher à sa zone de confort

évitant ainsi les risques auxquels les projets de changement l’exposent. Le besoin en conduite du changement devient ainsi un des facteurs clés de succès des projets de transformations des organisations. Bien qu’elle se limite généralement à des actions de communication et de formation, la conduite du changement est un processus beaucoup plus complexe qui nécessite


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la combinaison de plusieurs leviers, méthodes, outils et techniques. Les «Quick Wins» sont une technique particulièrement recommandée dans la conduite de projet de transformation des organisations. Mme Oufaa Fahlaoui, directrice métier au pôle Prévoyance de la CDG, précise dans ce sens : «les projets de transformation sont des projets complexes qui nécessitent beaucoup d’investissement et beaucoup d’efforts. De fait, quand les résultats tardent à apparaitre, les frustrations et les déceptions risquent de se propager rapidement dans les équipes». Concrètement, la technique consiste à jalonner le chemin du changement par des livrables concrets, des réalisations visibles et des petites victoires. Pour tirer un meilleur profit des «Quick Wins», K. Limamy, inventeur du modèle TPAM (2) (Total Performance & Agilitity Management), propose la démarche suivante :

Planifier l'ensemble des "Quick Wins" qui vont jalonner le chemin du changement Montrer le chemin à parcourir pour attiendre le prochain "Quick Win" Canaliser les efforts vers l'attiente du "Quick Win" le plus proche Piloter les réalisations jusqu'à la validation du "Quick Win"

Célébrer et fêter la réussite

Empêcher le retour en arrière en modifiant les processus

Démarche des «Quick Wins»

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Modèle & Outils de management

Étape

Objet

Montrer le chemin à parcourir pour atteindre le prochain «Quick Win».

Un diagramme des jalons est établi précisant l’ensemble des résultats intermédiaires concrets et visibles à produire pour arriver au livrable final du projet de changement.

Étape

Objet

Canaliser les efforts vers l’atteinte du «Quick Win» le plus proche.

Tout en le situant dans le projet global de changement, les managers poussent leurs équipes à concentrer leurs efforts sur l’atteinte du prochain jalon.

Étape

Objet

Piloter les réalisations jusqu’à la Validation du «Quick Win» visé.

Le processus de suivi et de pilotage se fait par rapport à l’atteinte du «Quick Win» visé. Une validation formelle est organisée pour approuver l’atteinte du «Quick Win» et montrer le chemin parcouru.

Étape

Objet

Célébrer et fêter la réussite.

Les succès sont célébrés pour maintenir l’enthousiasme. L’excès de célébration est toutefois à éviter pour ne pas laisser penser qu’une pause est bien méritée et casser la dynamique et le rythme des efforts.

Étape

Objet

Empêcher le retour en arrière en modifiant les processus.

Empêcher le retour en arrière en modifiant les processus

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Modèle & Outils de management

John P. Kotter dans son ouvrage «Leading Change» précise dans ce sens que le fait de négliger les résultats à court terme est parmi les motifs de l’échec des grands changements. L’auteur ajoute qu’en l’absence de signes tangibles de progrès fournissant des preuves de réussite, les acteurs du changement risquent de perdre la crédibilité nécessaire pour mener à terme leur projet. Une situation qui a une forte probabilité de se produire, car préoccupés par les transformations en profondeur, les managers ont tendance à négliger les résultats à court terme. L’auteur conseille vivement de démontrer des résultats à court terme et de bâtir sur les premiers résultats pour accélérer le changement. Ce qui nécessite de planifier à l’avance les résultats partiels à mettre en valeur et les moments opportuns pour le faire. 

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Une technique qui a rapidement montré son efficacité et qui s’est transformée en une véritable règle dans la conduite du changement au PP CDG. L’impact positif de la technique des «Quick Wins» a été également signalé par plusieurs chercheurs et praticiens.

Le besoin en conduite du changement devient ainsi un des facteurs clés de succès des projets de transformations des organisations.

(1) David Autissier Jean-Michel Moutot, «Méthode de conduite de changement», DUNOD, 3e édition, 2013 (2) K. Limamy, «Le modèle TPAM», Afrique Challenge Éditions, 2015.

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Guide pratique du manager

Comment élaborer ou faire évoluer

le Business Model d’une organisation ?

Émergence de la nouvelle économie, développement des réseaux, apparition de nouveaux métiers et de nouveaux modèles de revenus…, autant de raisons qui ont poussé les entreprises à chercher à réinventer leurs stratégies et leurs manières de fonctionner. En effet, constatant le déclin rapide et constant du potentiel de développement de leurs offres de produits/ services, les entreprises ont fini par admettre que les stratégies classiques sont arrivées à leurs limites. Elles ont alors cherché à réinventer leur conception du développement et de renouveler les composantes de leur chaine de valeur.

Cela nécessite toutefois de nouveaux modèles mieux adaptés et des schémas d’analyse plus appropriés pour intégrer les grandes mutations de leur environnement et les bouleversements du paysage économique.

puis sa création. Aujourd’hui, plusieurs variantes coexistent. Nous vous présentons dans ce guide pratique une variante proposée par Alexader Osterwalder et Yves Pigneur dans leur ouvrage «Business Model nouvelle génération».

C’est dans ce contexte que le concept de Business Model (BM) a émergé au milieu des années 90. Souvent confondu à tort avec le Business Plan (voir tableau) le Business Model a plutôt pour objet de définir l’approche et la logique selon laquelle «une organisation crée, délivre et capture de la valeur». Le concept ne cesse d’évoluer de-

Les auteurs présentent un BM conçu en 9 blocs (voir fig.1) qui «décrivent l’économie d’une entreprise, la façon dont elle envisage de gagner de l’argent». Un canevas à la fois simple et puissant qui vous permettra de faire évoluer votre modèle économique et de réinventer votre conception de la valeur.

Ne confondez pas Business Model et Business Plan Business Model • Présente la logique globale du projet • Explique comment l’entreprise va créer de la valeur et générer des revenus.

Business Plan • Présente de façon détaillée la stratégie de l’entreprise, l’analyse du marché et de la concurrence ainsi que la situation financière prévisionnelle basée sur différentes hypothèses. • Constitue la déclinaison élaborée, opérationnelle et chiffrée du Business Model.

• Permet de vérifier la cohérence du projet, en particulier la cohérence entre votre façon de créer de la valeur et de gagner de l’argent et les autres composantes du projet.

• Permet de vérifier la rentabilité et la viabilité du projet d’entreprise.

• Conçu selon une vision systémique permettant d’articuler différentes parties du projet.

• Conçu selon une vision analytique en se focalisant sur chaque partie appréhendée de façon singulière.

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Guide pratique du manager

Fig 1 : La matrice du Business Model

Segment de clientèle Les clients sont au cœur de tout modèle économique. Le Business Model est conçu à partir d’une parfaite compréhension des besoins et attentes des clients. Définir la clientèle conduit souvent à distinguer plusieurs segments. Selon les auteurs du «Business Model nouvelle génération», des groupes de clients constituent des segments différents lorsqu’ils présentent des spécificités manifestes au niveau des : • Besoins et attentes. • Canaux de communication et/ou de distribution. • Type de relations. • Valeur perçue de l’offre. • Niveau de rentabilité.

Proposition de valeur Une proposition de valeur est une combinaison d’éléments qui permettent d’apporter une solution à un problème ou de satisfaire un besoin spécifique à un segment de clientèle. Parmi les éléments classiques qui contribuent à la création de valeur, on peut citer : • Nouveauté : nouvelle offre répondant de façon inédite à un besoin. • Personnalisation : adaptation à un besoin particulier d’un segment. • Marque/Statut : on peut trouver de la valeur dans le fait de porter une marque qui symbolise des valeurs. • Commodité/Ergonomie : la va-

leur peut être perçue à travers l’aspect pratique d’un produit ou service. • Prix : proposer un prix inférieur est sans doute le moyen le plus classique pour créer de la valeur. Canaux de distribution/ Communication Les canaux de distribution/communication constituent l’interface qui permet de : • Faire connaître l’offre de produit/service auprès du segment cible. • Acheminer la valeur créée jusqu’au segment concerné. • Assister le client pour mieux apprécier la valeur qui lui est adressée. • Accompagner le client en vue d’optimiser la valeur créée.

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Relation clientèle L’entreprise doit choisir un type de relation le plus approprié au segment de la clientèle et le plus cohérent avec les autres composantes du Business Model. Plusieurs catégories de relations peuvent être envisagées en vue de fidéliser la clientèle, d’optimiser les ventes et d’acquérir de nouveaux clients. Les conseillers de clientèle offrent la possibilité d’offrir un type de relation plus personnalisé. Certaines entreprises optent pour les communautés d’utilisateurs pour créer et entretenir des échanges permettant de suivre de manière dynamique leurs marchés. Flux de revenus Cette composante du BM renvoie à la trésorerie de l’entreprise et aux cash-flow dégagés. L’entreprise choisit le mécanisme qui lui permettra de générer de façon optimale et cohérente des flux de revenus. Parmi les mécanismes les plus classiques, on peut citer : • Vente de bien : c’est le flux de revenu le plus courant. • Abonnement : consiste à vendre un accès continu à un service. • Licensing : revenus associés à l’autorisation d’exploiter une propriété intellectuelle ou industrielle. • Publicité : consiste à louer ou vendre des espaces de communication et de publicité. Ressources clés Les ressources clés permettant à l’entreprise de créer et d’acheminer la valeur aux clients et les parties prenantes peuvent être de plusieurs catégories :

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• Humaines : l’offre de valeur peut exiger des compétences et des expertises clés. • Financières : les ressources financières peuvent constituer une composante essentielle du BM. • Intellectuelles : les marques, les brevets et les propriétés intellectuelles et commerciales sont source de valeur. • Physiques : emplacement, site de fabrication, lieu de vente, équipements pointus sont autant de sources de valeur sur lesquels repose l’offre de valeur de plusieurs entreprises. Activités clés Selon le modèle économique choisi, les activités clés jugées indispensables pour créer et délivrer la valeur peuvent être liées à différents niveaux de la cartographie des processus de l’entreprise et à différentes composantes de la chaîne de valeur de l’organisation : • Production • Logistique • Résolution de problème • Technologie • Marketing… Partenaires clés Les entreprises développent des partenariats de différentes formes (alliance stratégiques, joint-ventures…) en vue d’optimiser leur business model respectifs. Il s’agit d’établir des relations win-win pour : • Acquérir des ressources • Réduire les coûts • Réaliser des économies d’échelle • Réduire les risques • Mutualiser les compétences • Conjuguer les avoirs-faire…

Structure des coûts La structure des coûts intègre plusieurs catégories de coûts. Il s’agit en particulier des : • Coûts fixes : ne varient pas en fonction des volumes produits • Coûts variables : elles sont proportionnelles aux quantités et volume de l’offre en produits et/ou services. • Coût de mobilisation : cout subi par la mobilisation de certaines ressources. Plus qu’un simple outil de description d’un modèle existant la matrice présentée est un véritable outil qui «favorise la compréhension, l’échange la créativité et l’analyse». Il force à reconfigurer les composantes de la création de valeur de façon à assurer la cohérence et à faire les synergies de façon optimale. Pour exploiter toute la puissance de la matrice, nous vous conseillons de la construire en équipe pluridisciplinaire travaillant en atelier de créativité. 


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2 JOURS D’OPPORTUNITÉS D’AFFAIRES ET DE FINANCEMENT

2 E ÉDITION UN FORUM DÉDIÉ AUX CHAMPIONS AFRICAINS

17 - 18 NOVEMBRE 2015

NAIROBI - KENYA - SAFARI PARK HOTEL Derniers sponsors :

w w w. a f r i c a - s m e c h a m p i o nAFRIcan s .c o m business journal | N°16

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Valoriser l’immatériel pour… quoi ? Par Paul Mauhin

Que nous le voulions ou non, nous sommes en crise. La crise financière que traversent l’Europe et la Chine n’est que la pointe émergée de l’iceberg. Les soulèvements au Burundi ou Nigéria aussi. Ce sont des conséquences, et pas une cause. Il y en a d’autres. Plus sournoises. Discrètes. Dont on parle souvent entre les lignes. Que l’on justifie peu. Voilées derrière une croissance mondiale atone, souvent lissées par les disparités entre les pays. Leurs noms : sociale, générationnelle, environnementale. Nous les ressentons par les effets collatéraux qu’elles ont dans la société. Est-ce une fatalité ? Pouvonsnous changer nos habitudes ? Continuer à croître comme nous l’avons fait durant les 30 dernières années ne peut que mener à des conséquences dramatiques : révolte sociale, chômage à la hausse… Les générations Z et alpha sont demandeuses d’une gestion différente. D’une manière de penser différente. Trouver des solutions passe par la reconnaissance du monde en transition dans lequel nous avons la grande chance, et opportunité, de nous trouver. Les déferlantes technologiques et humaines apportent des changements radicaux dans notre manière de communiquer, interagir, consommer. Les défis que nous rencontrons sont connectés entre eux. Fini la résolution linéaire, l’heure est à la solution systémique. En Europe, diminuer le coût de la sécurité sociale, véritable bombe à retardement en plus de celui des pensions, passera non pas par des médicaments moins coûteux, mais par une prévention accrue ! Modifier le comportement

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des personnes à la source. Être proactifs, plutôt que réactifs. La solution se trouve dans toutes les entreprises. Ce qu’il faut, c’est un autre regard sur la valeur. Aujourd’hui, les actifs immatériels composent jusqu’à 100% des capitalisations boursières. Quelque 87% en moyenne. Qu’est-ce qui vous rend unique ? Quels sont les éléments différenciateurs de votre société, ville, région, pays ? Ce ne sont pas les machines, les bâtiments ou encore les véhicules. Tous ces éléments sont des commodités. Facilement interchangeables. Sous-estimer, ne pas reconnaître ses actifs immatériels, crée des frictions diminuant les performances financières de vos entreprises ! Comment identifier les actifs immatériels ? Les valoriser ? Les activer ? Un actif immatériel, lui, est unique! Il est dépendant d’un contexte particulier. Son unicité en fait un élément différenciateur pour votre entreprise. Leur somme en fait la majorité de la valeur de votre entreprise. Déconstruire le «goodwill», c’est déjà le rendre tangible. Ne pas les considérer, ce sont

autant de leviers en moins pour piloter son entreprise. À titre de comparaison, c’est se limiter à piloter à vue, «intuitivement». Ennuyant quand l’incertitude, la volatilité et la complexité du monde actuel mènent plus souvent à du pilotage dans le brouillard. Un actif immatériel n’est reconnu que par sa capacité à produire des bénéfices économiques. De la même manière qu’il n’y a moyen de détecter les trous noirs que parce qu’ils absorbent ce qu’il y a autour d’eux. La valeur n’est plus uniquement matérielle et financière. Elle est à 7 niveaux : Bien commun & Tendances sociétales  Connaissances  Communication  Émotions  Processus  Matériel/Financier 


african management journal Nous avons développé un canevas simple, pratique et structuré qui permet au décideur, son comité de direction et ses employés, de valoriser leurs actifs immatériels. Trois grandes étapes : 1/Contexte et prospectives nationales, continentales et mondiales Comprendre 2/Diagnostic immatériel - Identifier 3/Stratégie financière - Activer 1. Comprendre Peu de dirigeants s’accordent une pause dans leur opérationnel quotidien. Pourtant, ce n’est qu’à ce prix qu’ils pourront se poser les bonnes questions sur les perspectives de la société, ses marchés et plus spécifiquement, son opinion sur le monde dans 5 ou 10 ans. Ce que nous constatons dans nos recherches et missions sur le terrain, c’est le court-termisme dont font preuve de nombreux dirigeants. Ils anticipent… à 6 mois ou 1 an. Rarement plus ! Leur succès est au prix de la réflexion sur les grands changements sociétaux et leurs impacts sur son Business Model. Lire, rencontrer, partager, interroger sont autant de verbes permettant de mettre en place des actions pour définir notre vue du monde dans les prochaines années. 2.Identifier La valorisation des actifs immatériels se fait autour de 3 axes de base, tirés de l’économie systémique : I- La contribution du projet au Bien commun : Quelle est la raison d’être de mon entreprise ? En traduisant son produit/ service comme une solution à un problème concret de société. Cet article me donne l’occasion de vous faire part d’un secret. Vous le savez, un bilan doit être en équilibre. Actif, passif. Très classique.La vue unique, optimiste et différenciatrice, c’est de voir le passif comme du potentiel ! Le dirigeant capable de met-

tre le doigt sur un passif dans un des bilans immatériels peut prendre des actions correctrices et créer de la valeur !

l’activation de ses actifs immatériels. Cette activation se fera en choisissant l’une ou l’autre stratégie financière. In fine, c’est de cela qu’il est question ici. Transformer ses connaissances en résultats financiers. Le plan financier sera donc adapté en fonction des actifs immatériels en ma possession et les plafonds de verre détectés qui doivent être soulevés pour accélérer la croissance de mon entreprise. Cela a des effets bénéfiques multiples, dépassant les murs de l’entreprise. Augmenter la confiance des par-

Niveau Immatériel

Description

Bien commun & Tendances sociétales

La mission de l’entreprise, les tendances du marché Est-ce que nous contribuons ? Quels sont les dégâts collatéraux de notre activité ? CEO Et le marché ? Taille ? Croissance ? Composition ? Drivers de sa dynamique ?

Connaissances

La tête de l’entreprise Qu’est-ce que je sais ? Qu’est-ce que je ne sais pas et que devrais-je savoir ?

CEO

Communication

La voix de l’entreprise Quelle est la qualité de ma communication ? Est-ce que nous communiquons au bon moment, vers la bonne cible, avec le bon message et le bon outil ? Ou au contraire, communiquonsnous mal, au mauvais moment ? Autant en interne qu’en externe.

CMO, Sales Manager

Émotions

Le coeur de l’entreprise Mon personnel est motivé, passionné, dépressif ? Mes clients sont engagés ?

HRO

Processus

La transformation des ressources en énergie Efficaces ? Durables ? Circulaires ? Ou au contraire, inefficaces ? Non durables ? Linéaires ?

COO, CTO ou Product Manager

Matériel & Financier

L'énergie vitale de l’entreprise Qu’est-ce que j’ai ? Qu’est-ce que je n’ai pas ?

CFO

Terre

Le terreau de l’entreprise Qu’est-ce que je prends à mon biotope ? Qu’est-ce que je lui rends ?

CSR Officer

III-L’écosystème des parties prenantes au projet L’économie linéaire est terminée. Place à la 3D ! Autour de mon entreprise gravitent de nombreuses parties prenantes avec des besoins et des ressources. Identifions ces partes prenantes, leurs besoins et leurs ressources. Si j’arrive à combler un de leurs besoins, autant matériels qu’immatériels, je pourrai accéder à leurs ressources. 3. Activer Pour augmenter ses performances financières, ou en avoir tout simplement, cela passe obligatoirement par

Personne-clé

ties prenantes ! Ce changement de posture fera, en outre, glisser l’entreprise d’une position de suiveur à celle de leader. Capable d’anticiper, d’être flexible, agile et performante; autant d’atouts nécessaires pour se mettre sur la carte. Les pays africains ont cette chance inouïe de prendre une voie différente de celle de l’Europe et des États-Unis pour avoir une croissance économique performante, durable économiquement et humainement. Ils sont pleins de ressources. D’envie. De passion. D’ingéniosité. Ne la laissons pas passer ! Prenons compte de l’immatériel comme levier de performance financière . 

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african technology journal Entretien

Got'liebe Bataba

Initiateur du projet Afropreneur

«Permettre aux entrepreneurs des Tech en Afrique de raconter leurs vraies histoires»

Vous avez lancé avec quatre autres collègues le projet «Afropreneur». Concrètement, de quoi est-il question ? Le projet est né de l’envie de permettre aux entrepreneurs des Tech en Afrique de raconter leurs vraies histoires, leurs défis et leurs succès afin d’inspirer d’autres et de montrer que de belles choses se font dans le numérique en Afrique. Quand nous avons lancé notre site TechOfAfrica, il y a de cela deux ans, très peu d’informations étaient disponibles sur les nouvelles technologies en Afrique francophone parce que les grands médias ne s’y intéressaient pas encore vraiment. Ce documentaire rentre dans nos objectifs qui sont de produire un maximum de contenus différents pour mettre en avant aussi bien les inventions et les idées qui transforment l’Afrique grâce au digital que ceux qui portent ces projets. Il s’agira donc d’un film/documentaire de 52 min dans lequel la parole sera donnée à ces innovateurs et porteurs de projets afin qu’ils nous racontent quelles sont leurs motivations, comment ils ont créé leurs entreprises, quelles sont les difficultés auxquelles ils sont confrontés et comment ils les ont résolues.

nous avons choisi de parler de start-ups spécialisées dans les Tech. Quels sont vos principaux objectifs à travers cette initiative ? Nous espérons avec ce projet faire découvrir au monde ce qui se fait en Afrique en matière de nouvelles technologies. Mais pas seulement au monde. Ce que nous avons pu remarquer, c’est que beaucoup de personnes au Sénégal par exemple ne savent pas ce qui se fait en Côte d’Ivoire. Beaucoup au Bénin, ne connaissent pas les applications ou les projets qui se développent au Togo. Et ainsi de suite. Donc un des objectifs principaux aussi sera de montrer à travers des diffusions du documentaire dans tous les pays où nous passerons ce que le voisin fait et s’il y a moyen de le reprendre dans un autre pays. Nous voulons également à travers ces différentes histoires, inspirer d’autres qui hésitent encore à se lancer. Huit villes réparties dans sept pays ont été choisies pour la réalisation de ce périple entrepreneurial. Qui est-ce qui explique ce choix ? Nous avons choisi pour cette première version du projet de visiter les pays de l’Afrique franco-

Pourquoi avez-vous ciblé exclusivement les start-ups spécialisées dans les Tech ? Le projet Afropreneur est porté par le webzine TechOfAfrica.com qui est un média traitant essentiellement de l’actualité Tech d’Afrique ainsi que de startups dans les nouvelles technologies. Du coup, c’est tout naturellement que

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phone. Ne pouvant pas tous les visiter en fonction des moyens que nous avons, nous avons dû choisir un certain nombre de villes où nous remarquons que les scènes et écosystèmes start-up sont les plus dynamiques. Il n’est donc pas exclu que nous visitions d’autres villes si nous arrivons à trouver assez de sponsors pour financer le projet. Qu’en sera-t-il de l’après-Afropreneur ? Nous comptons diffuser le documentaire auprès un maximum d’internautes à travers le monde. Cela se fera de trois manières différentes : la diffusion sur nos grands médias partenaires ainsi que sur des médias locaux dans les pays africains, dans des incubateurs partenaires aussi bien en Afrique qu’en France, dans des écoles et universités des pays où nous passerons. Le documentaire sera donc traduit en différentes langues pour permettre un accès beaucoup plus large. Aussi, TechOfAfrica est un média traitant de l’actualité sur les nouvelles technologies en Afrique. Nous allons donc continuer à proposer à nos lecteurs divers contenus toujours plus dynamiques et plus créatifs. Nous pensons déjà notamment à Afropreneur 2 pour découvrir les entrepreneurs du numérique dans les pays anglophones. 


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Kenya

Le visa numérique voit le jour Le Kenya a lancé depuis septembre le visa électronique pour faciliter les procédures aux touristes et autres voyageurs. Une innovation qui entre dans le cadre de son projet de gouvernance numérique. Une bonne nouvelle pour les touristes et hommes d’affaires qui souhaitent fouler le sol kenyan. Plus besoin d’aller dans les représentations diplomatiques kenyanes pour effectuer des demandes de visa, vous pouvez effectuer les démarches en ligne. Depuis le 1er septembre 2015, le gouvernement kenyan a lancé la procédure d’obtention du e-visa pour désengorger les ambassades et consulats, mais aussi et surtout alléger les procédures aux ressortissants de 132 pays notamment les hommes d’affaires et les touristes.

numérique lancé par le gouvernement kenyan afin de faciliter les procédures à ses citoyens et aux étrangers. 

La procédure est simple. Le demandeur se connecte sur le site www.ecitizen.go.ke pour scanner des documents essentiels comme les lettres d’invitation et les envoyer en ligne avec la demande d’obtention du visa numérique. Les frais de visa sont réglés via une carte de crédit. Si la demande est approuvée par le département des Migrations, le demandeur reçoit un mail qu’il va imprimer et présenter aux officiers de l’immigration lors de son entrée sur le territoire kenyan. Cette innovation entre dans le cadre du projet de gouvernance

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african technology journal

Burundi

spectaculaire pénétration des TIC La courbe d’implantation des Techniques d’Information et de Communication (TIC) affiche une évolution spectaculaire au Burundi. Le taux de pénétration est en effet passé de 6 à 27% en l’espace d’une décennie. Alors qu’elles étaient considérées comme une affaire de quelques privilégiés, les TIC ne cessent en effet de se démystifier et de se vulgariser au fil des ans vis-à-vis du citoyen lambda.

Du téléphone mobile à l’ordinateur en passant par bien d’autres gadgets électroniques, les TIC révolutionnent progressivement le vécu quotidien de la population jusqu’au fin fond du pays. En la matière, le téléphone mobile reste l’outil largement vulgarisé jusqu’au fin fond du Burundi. C’est sans nul doute le secteur le plus attrayant pour les investisseurs. Bien des paramètres concourent à ce dynamisme. «Le dynamisme de ce secteur se traduit, notamment, par l’afflux massif des investisseurs privés, ainsi que l’engouement du public pour les différents services offerts», explique Anatole Ndimubandi, cadre à l’Office burundais des télécommunications (Onatel). Selon le ministère des Finances et de la Planification économique, les plus importants investissements enregistrés ces dix dernières années sont évalués à 1,7 million de dollars américains (investissements directs étrangers, IDE). Ces investissements ont été drainés par la libéralisation, dans les années 2000, de la filière de téléphonie mobile. Comme le pays est fortement enclavé, ancré dans la tradition orale, avec une population majoritairement rurale et analphabète, le téléphone mobile est venu faire sauter beaucoup de verrous. «Il a réduit

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Par Jean Bosco Nzosaba

Petites villageaoises utilisant aisement le téléphone portable

les distances et depuis la campagne, un simple bip suffit pour apostropher un fils, cousin ou ami situé en ville, même les femmes d’un certain âge les utilisent», fait remarquer Marc Niyongere, sociologue. «Cet engouement de la population pour le téléphone justifie son coût accessible à toutes les bourses alors qu’au départ le téléphone était pour une poignée de gens aisés», indique l’ingénieur Constaque Hakizimana. Le pays dispose de quatre lignes téléphoniques fixes pour 1.000 habitants, principalement dans les zones urbaines où vivent 90% des abonnés.

Le téléphone mobile reste l’outil largement vulgarisé jusqu’au fin fond du Burundi.

La densité téléphonique est de 2,5 lignes pour 100 habitants (fixe et mobile combinés). En ce qui concerne l'Internet, les estimations indiquent 14.000 utilisateurs


african technologie journal au Burundi, cinq utilisateurs par 1.000 habitants. Les fournisseurs de services Internet comprennent CBINET, USAN Burundi, ONATEL et U-Com. 50% d’abonnés mobile et fixe en 2014 Selon les données de l’Agence burundaise de régulation et de contrôle des télécommunications (ARCT), 50% des Burundais étaient abonnés au téléphone (mobile et fixe confondus) en 2014, contre moins de 1% en 2007. Aujourd’hui, cinq opérateurs économiques se partagent le marché burundais du téléphone à savoir U-Com, Onatel Burundi, Econet Wireless, Lumitel et Lacell SU. «Il est aujourd’hui difficile de s’en passer même au village le plus reculé du pays, regardez comme le téléphone mobile est à la portée de toutes les bourses, au village, les paysans qui n’en n’ont pas n’hésitent pas à en emprunter pour biper qui un enfant, qui un cousin, etc. c’est aussi cela les TIC», explique Constaque Hakizimana, Ingénieur TIC à l’Agence burundaise de régulation et de contrôle des télécommunications (Arct). Depuis trois ans, le gouvernement organise une foire nationale des TIC. «Il s’agit de mettre la population burundaise au courant de ce qui se passe dans les TIC, c’est aussi une excellente opportunité de vulgariser les TIC, notamment auprès des jeunes qui en raffolent. Les visiteurs, soit des citoyens ordinaires ou des entrepreneurs, peuvent prendre connaissance de leurs produits commerciaux, en visitant les diverses expositions», fait remarquer Roger Ouedraogo, directeur général de GLICE Burundi. Cet événement brasse fournisseurs d’accès internet et de téléphonies mobiles; les banques, maisons d’assurance, sociétés de vente de matériel informatique etc. 

Lagos

Les taxis proposent du WiFi gratuit Du WiFi gratuit dans les taxis en Afrique ? Oui, cela existe. Et Lagos est un cas d’école.

À Lagos, capitale économique du Nigéria, l’innovation est bien une réalité dans le secteur des transports. L’installation de WiFi gratuit dans les taxis en est un parfait exemple. Ce projet a été lancé par la firme Metro-Taxi en partenariat avec Smile Communications Nigeria Limited. D’après la société de télécoms, l’objectif est de proposer une nouvelle offre de service aux clients des taxis, au regard de l’accroissement de l’internet mobile dans le pays. Pas moins de 200 taxis ont été équipés. Les initiateurs rassurent les clients : l’usage de ce service n’aura pas d’impact sur les tarifs des courses. Ce «WiFi à bord» n’est pas le premier du genre à Lagos. Depuis plus d’un an, la société Easy Taxi Nigéria (filiale de l’entreprise brésilienne Easy Taxi), dirigée par le jeune Nigérian Bankole Cardoso, âgé de 26 ans, a lancé une application mobile gratuite pour permettre aux clients de réserver un taxi à Lagos et à Abuja depuis leur Smartphone. Des chauffeurs ont été sélectionnés et formés sur l’usage de cette application. L’entreprise leur prélève 10% de la course. Outre cette application, l’usager peut aussi faire sa réservation via SMS ou en contactant un centre d’appels. Le Nigéria, à l’image du Kenya, développe plusieurs projets de smart city «villes intelligentes», plus particulièrement dans le secteur des transports, pour un meilleur usage des moyens de locomotions. 

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african Entrepreneurship journal

Financement

Teranga Capital, nouveau bras financier des PME sénégalaises Teranga Capital, c’est le nom du premier fonds de capital-risque sénégalais. Son objectif : financer les start-ups pour renforcer leurs activités. Selon les statistiques, 40% des Petites et moyennes entreprises (PME) tombent en faillite après l’entame de leurs activités faute de financements. Teranga Capital veut lutter contre ce triste phénomène. Ce premier fonds de capital-risque sénégalais a été récemment lancé par Omar Cissé, ancien directeur de CTIC Dakar, et le Belge Olivier Fundelle, consultant spécialisé dans le financement des start-ups et PME africaines. Ce véhicule souhaite «fournir un financement à long terme aux petites PME à fort potentiel de croissance, en investissant dans leur capital (fonds propres et quasifonds propres) afin de partager les risques et bénéfices, livrer une assistance managériale et technique rapprochée aux PME pour accélérer leur développement, assurer un accompagnement de proximité

aux dirigeants de PME dans la formalisation de leur activité et dans la mise en œuvre (progressive) de bonnes pratiques de gouvernance, sociales et environnementales». Ces deux entrepreneurs ne sont pas seuls dans ce projet, ils sont épaulés par d’autres partenaires tels que le Fonds français Investisseurs & Partenaires qui a financé depuis 2002 plus de 50 PME dans 12 pays africains (dont une douzaine au Sénégal), le fonds souverain d’investissements stratégiques (Fonsis) un organisme sénégalais, ainsi que de grandes entreprises sénégalaises et françaises. Teranga Capital envisage de soulever 3 milliards de FCFA soit 4,6 millions auprès de ces souscripteurs pour les mettre à la disposition des entrepreneurs d’ici 2020. 

PME ciblées • TPE & PME à haut potentiel de croissance, actives dans tous les secteurs d’activité (hors illicites) et toutes les régions du Sénégal, dont les besoins en financement se situent entre 50 et 200 millions de FCFA. • TPE & PME disposant d'une activité existante (produit ou service déjà commercialisé), ou en phase de start-up. Formalisée ou en capacité de le devenir. • Intérêt particulier pour les entreprises qui contribuent au renforcement de leur filière (transformation agricole, par exemple).

Source : Teranga Capital

• Prise de participation minoritaire au capital avec sortie après 5 à 6 ans. • Prêts d’actionnaires de long terme sans garantie. La rémunération du prêt d’actionnaire dépend de la performance de la PME, dans une logique de partage des risques et des profits. • Participation à la gouvernance : conseil d’administration et assemblée générale. • Contribution directe à la réflexion stratégique et aux décisions importantes. • Formalisation des accords : un pacte d’actionnaires signé avec l’entrepreneur détermine les conditions d’entrée et de sortie de Teranga Capital. • Recherche de structuration de montage flexible adaptée à la vision de chaque entrepreneur.

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Source : Teranga Capital

Mode d’intervention


african Entrepreneurship journal

Incubation

Cofina StartUp House se positionne dans le marché africain Le groupe Cofina a lancé «Cofina StartUp House», un incubateur qui vise à faciliter l’hébergement, l’accompagnement et le financement des PME du continent. L’univers des incubateurs du continent accueille un nouveau membre: Cofina StartUp House, une initiative du groupe Cofina, spécialisé dans le secteur de la mésofinance en Afrique. Lé mésofinance cible les PME dont les besoins de financement sont trop importants pour les institutions de microfinance, mais qui disposent d’une structure entrepreneuriale insuffisamment formelle pour bénéficier des services des banques commerciales.

© Africatopsuccess

L’incubateur a déjà ouvert deux bureaux à Dakar et à Abidjan. Son mode opératoire : héberger et accompagner les entrepreneurs sélectionnés dans ces deux capitales. «Nous contribuons au rayonnement de l’écosystème africain de l’innovation à travers quatre missions : l’accompagnement et le développement de start-ups innovantes, la mise en relation des start-ups et des grands comptes, l’organisation d’événements business fédérateurs pour les start-ups/entrepreneurs et l’expérimentation de solutions innovantes et la promotion de l’innovation et de la culture de l’agilité au sein du Groupe Cofina», indique le groupe.

Jean-Luc Konan, président-directeur-général du groupe Cofina.

Concrètement, l’incubateur cible prioritairement les projets en phase d’amorçage et des entrepreneurs qui ont initié des projets à Dakar ou Abidjan et qui ambitionnent d’étendre leurs activités dans un des six pays ou le groupe est implanté. La période d’incubation dure 12 mois. «La Cofina Startup House accueillera des projets de services ou de produits, qui ne s’appuient pas sur une techno-

logie lourde en investissements R&D (plusieurs brevets) dans des domaines très variés», précise-t-il. Parmi les domaines ciblés : l’expérience client, le management des données personnelles et smart data, le paiement mobile, l’e-commerce, l’agrobusiness, l’entreprise digitale, services et technologies Cloud, etc. 

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african entrepre'ship journal

entretien

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Ndèye Absa Gningue Présidente de l’association «JEADER» et initiatrice de «Graines d’Entrepreneurs»

«Former les plus jeunes à devenir des leaders» Votre association «JEADER» a organisé du 23 août au 7 septembre 2015 un camp de vacances dénommé «Graines d’Entrepreneurs». Concrètement, que recouvre ce concept pour vous ? «Graines d’Entrepreneurs» est un programme qui vise à former les plus jeunes à devenir des leaders par le biais de l’entrepreneuriat et grâce au mentorat. À travers ce nouveau programme, JEADER s’inscrit en ligne droite dans sa mission de former la prochaine génération de leaders, et ce dès l’âge de 8 ans. L’initiative a pris forme à travers un partenariat avec le ministère de l’Éducation et plus précisément, la Direction de l’enseignement moyen & secondaire, par lequel les chefs d’établissement et les inspections d’Académie devaient demander à leurs meilleurs élèves de répondre à un sondage intitulé «Quand je serai grand…». Plus de 200 jeunes apprenants se sont prêtés à l’exercice, en donnant leurs modèles, et en spécifiant le métier qu’ils voudraient exercer lorsqu’ils seraient grands.

meilleurs atouts, et nous avons fait intervenir des critères tels que : la moyenne, le genre, la localisation géographique, et bien entendu la disponibilité de l’enfant à la période où le camp était organisé.

Les 40 meilleurs élèves en provenance de neuf régions du Sénégal ont participé à cette 1re édition. Comment s’est opéré ce choix ? En réalité, 9 régions ont participé au sondage «Quand je serai grand...», mais ce sont finalement 40 brillants élèves de 7 régions du Sénégal qui ont pu prendre part à cette première en Afrique et au Sénégal. La raison est simple, les Inspections d’Académie ont proposé leurs

Les moyennes étaient entre 15,09 et 18,72 et les participants entre la sixième et la Terminale. Cet écart au niveau des classes a été fait sciemment dans le but de permettre un partage en vertical de l’information relative aux classes et au contenu pédagogique, ayant mené à ce que les élèves fassent eux-mêmes l’introspection des acquis, et jugent par eux même de la discontinuité des informations relatives à leur orientation. Ils ont , donc, pu savoir quelle fi-

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De fait, les régions représentées étaient: Dakar, Thiès, Matam, Kaffrine, Diourbel, Tambacounda & Sédhiou. Avec une participation de 25 filles contre 15 garçons. Il est également à noter que les lycées et établissements choisis ne sont pas des plus connus. Au contraire, certains participants venaient de localités extrêmement reculées, et la plupart venaient à Dakar pour la première fois de leur vie. Certains ont témoigné de leur esprit entrepreneurial en parcourant des kilomètres pour avoir leur autorisation parentale certifiée, d’autres, comme Hapsatou Thiam du lycée Hamady Ounare de Matam, en classe de première S1, ont personnellement parcouru plusieurs kilomètres pour avoir un certificat de visite/contre-visite en bonne et due forme et pouvoir ainsi participer au camp.

lière menait à quels débouchés, et comprendre les notions de séries littéraires et scientifiques. Quelles sont les principales activités auxquelles ils ont été initiés ? En tout, ce sont un peu plus de 50 ateliers pratiques de 1 h 30 min maximum, que les enfants ont eu à parcourir. Chaque session contenait 10 ateliers d’entrepreneuriat en sus du camp de vacances normal, ce qui fait que les enfants avaient la possibilité de définir chacun à titre personnel, le rôle qu’ils avaient à jouer en tant qu’agent de changement dans le Plan Sénégal Émergent, et dans leurs localités respectives. Prenant la session «Agriculture-Elevage-Energie & Environnement» par exemple, il s’agissait de les initier à l’importance des cultures locales avec des intervenants tels que le riz «Rixel» qui leur a expliqué le parcours du riz, de la Vallée au Bol de Midi. Ils ont également fait une étude de marché pour s’enquérir des différents prix de vente et d’achat des légumes au niveau du Marché de Saly, et ont appris que le Sénégal concevait des Biodigesteurs avec le Programme national de biogaz. La session «Technologie» a créé des adresses électroniques pour l’ensemble des colons, et a été initiée à la cybercriminalité, ou comment protéger le Sénégal Émergent grâce à la technologie avec la session «Mon projet IT pour le Sénégal». La session «Restauration», a visité entre autres le plus vieux restaurant de Saly : le «Bistrot», pour comprendre comment tenir un restaurant, et a été initié à l’art de la table, aux différents menus, et à la cuisine des


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Côte d’Ivoire

céréales locales entre autres… La session «Art & Lettres», a également refusé du monde, côté intervenants, avec d’illustres Hommes de Lettres et de Combattants des droits civiques, tels qu’Elimane Kane, représentant d’Africa 2.0 au Sénégal, le Dr Bakary Samb (ndlr, politologue et spécialiste de l’Islam», ou encore le Pr Oumar Gueye, historien. Prévoyez-vous d’effectuer un suivi pour accompagner ces futurs entrepreneurs en herbe ? Le premier suivi consiste à les réunir autour du site web : www.grainesdentrepreneurs. org. Ensuite, les parents et proches des Graines d’Entrepreneurs vont se réunir pour discuter des évolutions de leurs poulains respectifs, mais aussi s’investir pour donner l’année prochaine la chance à d’autres enfants de participer. Enfin, notre collaboration avec le Ministère n’était pas fortuite. Nous comptons justement sur le ministère de l’Éducation pour faire de ces 40 enfants des références dans leurs localités respectives. En marge du Camp de Vacances, nous nous préparons également, pour un suivi à proximité, d’entamer une caravane à travers les 14 régions du Sénégal. Ce qui permettra non seulement de rencontrer à nouveau nos différentes Graines d’Entrepreneurs dans leurs localités, mais surtout d’identifier de nouveaux talents, mais aussi de sensibiliser les enfants à l’entrepreneuriat. Peut-on s’attendre à une deuxième édition en 2016 ? Nous ne pourrons pas toujours répéter le crowdfunding, c’était excellent pour une première fois, mais à l’avenir, il nous faut les fonds privés surtout qui pourraient voir en cette caravane et en ce camp un moyen raisonnable d’investir en l’avenir de ces enfants, soit à travers des kits, soit via des bourses scolaires, ou en mettant simplement à disposition des biens en nature, comme «Rixel» qui a fini par nous offrir 100 kg de riz cultivés au Sénégal. 

En Côte d’Ivoire, 30% des marchés publics inférieurs à 100 millions de FCFA seront attribués aux PME locales. Une décision gouvernementale qui pourrait stimuler leur croissance.

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Faire des PME de véritables champions nationaux

La RTI présente ‘’RTI POUR TOUS’’, une offre tarifaire destinée aux PME/PMI

En Afrique, il n’est pas rare de voir les secteurs privés nationaux dénoncer l’attribution de marchés publics à des entreprises étrangères. Selon eux, cette réalité risque de freiner leur activité et ne stimule guère l’économie locale. Le gouvernement ivoirien semble l’avoir compris. Il a décidé d’octroyer aux PME locales 30% des marchés publics inférieurs à 100 millions de FCFA suite à une proposition de Abdourahmane Cissé, ministre chargé du Budget. L’objectif est de créer des champions nationaux qui pourraient rivaliser avec d’autres entités dans le marché de l’export. En outre, l’État prévoit de leur faciliter l’accès aux crédits bancaires. D’après la direction générale des impôts, le pays compte officiellement 60.000 petites et moyennes entreprises. Selon cet organisme, ces statistiques n’intègrent pas les quelque 150.000 PME qui exercent dans le secteur informel. Les PME ivoiriennes représentent 80% de l’activité économique et produisent 12% du PIB national. Un taux qui pourrait être revu à la hausse avec l’acquisition de nouveaux marchés publics. En Côte d’Ivoire, la loi considère comme PME toute entreprise qui emploie moins de 200 personnes et qui dispose d’un chiffre d’affaires annuel inférieur à 1 milliard de FCFA. 

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Bon démarrage pour la BNDE

Thierno Seydou Nourou lors de l'ouverture d'une succursale de la banque

La Banque nationale de développement économique, basée à Dakar, a réalisé un bilan total de 56 milliards de FCFA fin 2014, soit une hausse de 26 milliards par rapport à l’exercice de 2013. La Banque nationale de développement économique (BNDE) du Sénégal affiche une bonne santé financière. Dans un communiqué publié le 18 septembre, la dernière née des institutions bancaires au Sénégal revendique un bilan total de 56 milliards de FCFA fin 2014 soit une hausse de 26 milliards de FCFA par rapport à l’exercice de 2013 où elle avait réalisé un bilan de 30 milliards de FCFA. Elle compte 1.400 clients

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dont plus de la moitié (66%) sont des Petites et moyennes entreprises (PME) ou Petites et moyennes industries (PMI). Le volume de crédit est passé de 3 milliards à 19 milliards de FCFA durant la même période, soit une hausse de 16 milliards. Selon Thierno Seydou Nourou Sy, la Banque ambitionne de créer 50.000 comptes bancaires pour 3.000 clients d’ici 2018.

Pour rappel, la BNDE a démarré ses activités depuis le 27 janvier 2014. Elle a pour principale mission de financer, d’accompagner et d’assurer la restructuration et l’expansion des PME sénégalaises qui représentent 85% du tissu économique, assurent 30% des emplois et qui contribuent à hauteur de 30% dans le PIB. Au Sénégal, on estime à 500 milliards de FCFA les besoins en financements des PME. 


Saham Finances rachète 53,6% des parts de Continental Reinsurance L’assureur marocain Saham Finances a racheté 53,6% du capital de Continental Reinsurance PLC, une compagnie de réassurance basée au Nigéria. Saham Finances, filiale assurances du groupe marocain Saham, poursuit son expansion en Afrique subsaharienne. Dans un communiqué publié le 16 septembre 2015, l’assureur marocain a annoncé l’acquisition de 53,6% des parts de la compagnie nigériane Continent Reinsurance, spécialisée dans la réassurance, auprès de la firme de private equity Emerging Capital

Partners (ECP Fund II), qui détenait cette entreprise depuis 2007. Le montant de la transaction n’a pas été dévoilé. Ce n’est pas le premier investissement de Saham Finances dans le marché nigérian ; déjà en 2014, elle avait racheté des parts pour entrer dans le capital de la société nigériane Unitrust Insurance.

Cette nouvelle acquisition consolide la présence de l’assureur marocain déjà présent dans vingt-six pays en Afrique subsaharienne. Continent Reinsurance PLC est actif dans 44 pays africains où elle appuie 200 compagnies d’assurances à travers ses bureaux implantés au Nigeria, Kenya, Cameroun, Côte d’Ivoire, Tunisie et en Afrique du Sud. 

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Hassan Bertal, Directeur Général Adjoint en charge du marché de l'entreprise du groupe Attijariwafa bank

Financement

Attijariwafa bank souhaite accompagner les TPE marocaines Le groupe Attijariwafa bank a lancé le programme «Ana Maak» pour financer 20.000 TPE marocaines en 2015.

Attijariwafa bank a présenté, le 9 septembre 2015 à Casablanca, son nouveau programme dédié aux Très petites entreprises (TPE) marocaines. D’après le groupe bancaire marocain, l’objectif de ce projet dénommé «Ana Maak» est de proposer à ces 2,5 millions d’entreprises marocaines «une offre complète de produits et services, une gouvernance de proximité, un engagement de financement et une communication novatrice». Cette année, la banque prévoit de débourser 5 milliards de dirhams pour accompagner 20.000 TPE à travers plusieurs activités : «multirisques professionnelles, prévoyance en cas d’incapa-

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cité de travail suite à une maladie ou à un accident, assurance hospitalisation, valorisation de l’épargne, retraite complémentaire, etc.». En outre, elle met à leur disposition des centres d’expertise, d’écoute et de conseil pour des services d’assistanat, d’écoute et de conseils. Au cours de la conférence de presse de présentation de ce nouveau programme, les responsables d’Attijariwafa bank ont annoncé l’organisation de tournées régionales dans tout le Royaume courant septembre par le biais de caravanes d’agences mobiles. 


La Côte d’Ivoire émettra un sukuk de 150 milliards FCFA La Côte d’Ivoire émettra en novembre prochain son premier emprunt sous forme de Sukuk (obligations islamiques). Une levée de fonds estimée à 150 milliards de FCFA. La finance islamique connait un développement assez soutenu au niveau mondial. D’après les statistiques du Forum islamique économique mondial (WIEF), son industrie dépasserait actuellement les 2.000 milliards de dollars et devrait atteindre les 4.000 milliards de dollars en 2020. L’Afrique qui dispose pourtant de réelles potentialités en la matière traine les pieds avec seulement 1% du volume total, car peu de pays ont intégré la finance islamique dans leur système financier. La Côte d’Ivoire souhaite faire bouger les lignes, elle et prévoit d’émettre son premier sukuk (obligation islamique) en novembre 2015, une levée de fonds d’un montant de 150 milliards de FCFA.

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Pour favoriser la réussite d’une telle opération, Abidjan a signé le 17 septembre dernier une convention avec la Société islamique de développement (SID), la filiale de la Banque islamique de développement (BID) dédié au secteur privé. Ce premier emprunt n’est que la première phase d’un programme financier avec comme objectif l’émission de 300 milliards de dollars entre 2015 et 2020. Cet accord a été conclu en marge du premier Forum sur la finance islamique en Afrique qui s’est déroulé les 17 et 18 septem-

Plateau d'Abidjan

bre à Abidjan. Concrètement, à travers cet investissement, le gouvernement ivoirien ambition-

ne de faire du pays un hub de la finance islamique en Afrique de l’Ouest. 

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Finance islamique


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I&P, la société de gestion créée en 2002 par Jean-Michel Severino

Investissement

I&P investissent dans deux PME en Afrique de l’Ouest La société de gestion Investisseurs & Partenaires a réalisé deux nouvelles prises de participation dans deux PME d’Afrique de l’Ouest. Objectif : les épauler dans leur stratégie de développement. Investisseurs & Partenaires (I&P) poursuit sa stratégie de prise participation dans les petites et moyennes entreprises (PME) du continent. Fin septembre, la société de gestion créée en 2002 par Jean-Michel Severino révèle dans un communiqué avoir acquis 35% du capital de la PME ivoirienne Enval Laboratoire. Avec cet investissement, elle veut permettre à cette entreprise d’étendre ses activités aux analyses minières à travers la construction d’un laboratoire minier à Yamoussoukro et de renforcer ses capacités d’analyse physicochimiques. «Cette ambition répond aux tendances observées sur le marché des métaux et minéraux en Côte

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d’Ivoire et dans la sous-région, au potentiel minier important et sous-exploité. Les laboratoires d’analyses minières indépendants et accrédités étant encore très rares dans le pays, Enval se place sur un marché particulièrement porteur en Côte d’Ivoire», annonce I&P. La société révèle aussi une prise de participation minoritaire dans le capital de PEG Africa, une PME spécialisée dans la distribution de panneaux solaires dans les communautés rurales et périurbaines d'Afrique de l'Ouest. Cet apport permettra à cette entité, qui a démarré ses activités au Ghana, de toucher d’autres pays de la sous-région. Pour rappel, I&P, à travers sa filiale (I&P Development), a déjà réalisé des investissements dans les entreprises Cofipeche, Viseo, Afrique Émergences & Investissements et Conergies en Côte d’Ivoire, de même qu’au Ghana chez Voltacar Rental Services en fin 2014 et Eden Tree début 2015. 


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E-commerce

Mara Group s’intéresse au marché africain

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Le groupe Mara Group basé à Dubaï prévoit de mobiliser 100 millions de dollars «la plus importante plateforme» de e-commerce en Afrique. L’annonce a été faite par son fondateur Ashish Thakkar à «Wall Street Journal». Cette nouvelle plateforme dénommée «Mara Sokoni» devrait lancer ses activités en 2016, avec une présence effective dans 10 pays de la région, dont le Nigéria et le Kenya, avant de se déployer «les trois ans et demi sur l’ensemble des pays africains». À en croire les promoteurs, Mara Sokoni sera à la fois une plateforme de vente de produits à destination de l’Afrique, mais aussi un lieu qui permettra aux producteurs africains de vendre leurs produits sur le marché international. Le fondateur de Mara Group Ashish Thakkar

Égypte

Une entreprise saoudienne investit dans la production de légumes et céréales

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L’entreprise saoudienne Zamil Industrial a annoncé fin septembre qu’elle installera une grande plateforme logistique en Égypte, plus précisément dans le gouvernorat de Qena. D’après Khaled Hanafy, ministre égyptien des approvisionnements, cette infrastructure s’étendra sur 50 feddans et disposera d’une capacité de stockage de 18.000 tonnes, destinée aux légumes et aux céréales. Ce projet devrait renforcer les exportations des fruits et légumes du pays des pharaons, des exportations qui ont franchi le cap des deux millions de tonnes au cours de cette saison, selon les autorités égyptiennes. Révolutionner l'agriculture en Haute-Égypte.

Avec cet investissement, I&P veut permettre à la PME ivorienne Enval Laboratoire la construction d’un laboratoire minier à Yamoussoukro AFRIcan business journal | N°16 | 103


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Solaire

GreenWish va construire une centrale de 20 MW au Sénégal

Par Babacar Seck

La société d’investissement français GreenWish prévoit de construire une centrale photovoltaïque de 20 mégawatts à Saint-Louis, au nord du Sénégal. Près de 200.000 personnes devraient bénéficier de cette énergie. GreenWish a choisi le Sénégal pour y développer son premier projet énergétique en Afrique. La société d’investissement français va construire une centrale photovoltaïque d’une puissance de 20 mégawatts à Bokhol dans la région

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de Saint-Louis (nord du Sénégal). Ce projet dénommé «Senergy II» devrait être opérationnel à la mi2016 ; les travaux de construction débuteront en novembre 2015. Selon l’entreprise française, ce projet «donnera accès à l’électricité

à près de 200.000 personnes […] avec un coût au kilowatt-heure inférieur d’environ 50 % au prix du mix énergétique actuel. Sur la durée du contrat de 20 ans, cela représente une économie de près de 90 millions d’euros pour l’État».


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Ile Maurice

Les chauffe-eaux solaires ont la cote Les chauffe-eaux solaires attirent de plus en plus les Mauriciens. Et pour cause. Les autorités ont décidé de subventionner le produit à hauteur de 125 à 250 euros par famille en fonction des revenus, soit entre le quart et la moitié du prix moyen. Selon le quotidien mauricien «Le Matinal», plus de 20.000 personnes se sont présentées aux guichets de la Banque de développement de Maurice pour déposer leur dossier pour bénéficier de ces subventions. Actuellement, 58.000 familles utilisent les chauffe-eaux solaires dans cette île. Fort de cet engouement, le gouvernement prévoit de débloquer 25 millions d’euros, soit 9 millions de plus que le budget initial, pour satisfaire cette forte demande. Énergies renouvelables

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Le Ghana sollicite les investisseurs indiens

Cette centrale dont le cout est estimé à 25 millions de dollars sera financée par le véhicule d’investissement GreenWish Africa REN qui a pu obtenir 15 millions d’euros – sur un objectif de 50 millions d’euros pour fin 2015 – grâce à des levées de fonds réalisées auprès d’investisseurs, notamment la Caisse de dépôts et de consignations, et la Banque africaine de développement. Le raccordement de cette centrale au réseau électrique sénégalais est prévu pour juillet 2016. D’après GreenWish, ce projet n’est qu’une première étape, car outre le Sénégal, elle prévoit la construction et le financement de 150 mégawatts dans d’autres pays en Afrique subsaharienne notamment au Cameroun, au Tchad et au Bénin dans les deux prochaines années.

Le Ghana fait les yeux doux aux entreprises indiennes pour qu’elles investissent dans des énergies renouvelables. D’après Kwame Ampofo, président de l’Energy Commission of Ghana, «Avec ses 27 millions d’habitants, le Ghana a une capacité installée de plus de 3.000 MW, et prévoit de l'augmenter à plus de 5.000 MW dans les cinq prochaines années». Il indique, en outre, que dans son pays l’électricité ghanéenne provient à 64% de l’hydroélectrique, le reste est issu du thermique. À l’en croire, ces investissements permettront de répondre à la demande nationale et offriront à ces entreprises l’opportunité d’exporter dans les pays voisins. Kenya

Construction d’une centrale photovoltaïque de 50 MW Exim Bank of China envisage de financer la construction d’une centrale solaire photovoltaïque de 50 mégawatts non loin de la ville de Garissa au Kenya. Selon l’institution bancaire, ce projet qui est actuellement en phase de planification devrait être lancé rapidement. Pour rappel, le gouvernement kenyan a annoncé en janvier 2015 un objectif d’investissement de 1,2 milliard de dollars dans la production d’énergie solaire en partenariat avec des entreprises du secteur privé.

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d’Alioune GUEYE bloc-notes

Bienvenue dans le monde du «Followership» Pas une journée, pas un magazine, pas une émission de télévision qui ne déplorent le manque de «Leadership», en cette période de turbulences accélérées comme s’il fallait attendre un surhomme providentiel pour répondre aux préoccupations de l’heure. Nous oublions trop souvent que ce sont les situations exceptionnelles qui révèlent les hommes et les femmes hors du commun capables d’inverser le cours de l’histoire. Aurions-nous un Mandela s’il n’y avait pas l’apartheid, Gandhi aurait-il émergé sans les injustices de la colonisation britannique, voire un Kagame sans les horreurs du génocide rwandais ? L’histoire est jalonnée du «surgissement» de leaders situationnels commandé par les événements. En revanche, ce dont nous avons grandement besoin en ces temps d’émergence, c’est également du followership. On pourrait définir le «followership» comme la discipline d’exécution consécutive à la formulation d’une stratégie claire, et toutes les actions consistant à implémenter la vision stratégique avec loyauté, persévérance, civisme et intelligence collective. Un follower serait donc doté des mêmes capacités d’un leader, à la différence qu’il est capable de brimer son «ego» et d’accepter de rester dans l’ombre du leader. Derrière tout leader se cache bien souvent un follower, sherpa, ou homme de l’ombre duquel l’histoire ne se souviendra certainement pas et qui aura pourtant fortement contribué à formuler la vision du chef, voire à la transformer ou même à l’implémenter pratiquement. Nos pays ne manquent pas d’intelligences individuelles, mais ils manquent cruellement d’intelligence collective, seule à même de transformer structurellement mentalités et comportements pour faire basculer nos pays dans le monde des contrées prospères et développées. Du degré de followership dépend le succès et pas seulement de son leadership. Ce qui est valable à la tête d’une Nation l’est tout autant à la direction générale d’une multinationationale, d’une PME ou encore d’une grande université ou d’une ONG. Évoquer le followership c’est également reconnaitre qu’il y a des communautés plus promptes à «suivre» les orientations données que d’autres. Nous considérons que si les pays d’Asie notamment ont pu rapidement enclencher le processus d’émergence économique, c’est que leurs populations ont été plus «suiveuses». Dans certains cas, c’est toute la culture «pays» qui a évolué et qui s’est alignée sur la vision du pays pour se développer. L’Ère meiji au Japon qui s’est étalée de 1868 à 1912, en est la démonstration la plus emblématique. Culture, Stratégie et Performance sont étroitement liées. Anthropologues et sociologues trouveront là un champ de recherche fécond qui permettrait de comprendre à quel point la question «de la culture» est le déterminant essentiel dans toute stratégie de développement. Naturellement, l’absence conjuguée de leadership et de followership mène au mieux au surplace, au pire à l’anarchie. Leadership sans followership reviendrait à formuler une vision claire sans espoir d’implémentation sur le terrain. Followership sans leadership dénote d’une prédisposition à réussir la mise en œuvre, mais sans savoir où l’on va. En définitive, il ne faut pas simplement être en attente béate d’un messie ou fustiger le leadership en place ; car il n’y a pas de performance globale et pérenne sans followership. C’est de la combinaison harmonieuse des deux que jaillira l’étincelle du développement et de la transformation. 106 | AFRIcan business journal | N°16


destination Malaisie et Singapour

African Business International ABI vous invite à prendre part à ses Voyages d’Etudes MultiSectoriels qu’il organise en Malaisie et à Singapour. Ces deux pays sont sans conteste la plate forme incontournable des investissements en Asie du Sud-Est ont su transformer ces flux financiers en infrastructures avec tous les effets d’entraînement sur les autres secteurs (construction, banque et finance, énergie, automobile...). La clairvoyance de ses dirigeants, des politiques fiscales avisées, un capital humain de qualité, des hôtels de classe mondiale, des infrastructures de standard international, un taux de corruption en régression constante, font de la Malaise et de Singapour des champions en matière d’attraction des investissements étrangers et ce, dans les secteurs traditionnels de l’agri-business tout comme dans les secteurs de pointe. Avec un programme sur mesure de conférences, de rencontres professionnelles, de visites, vous allez décrypter les facteurs clés de succès de la stratégie malaisienne et singapourienne en matière de promotion des investissements étrangers. Nous vous ouvrirons les portes du plus grand parc d’activités en technologies de l’information, Cyberjaya où vous pourrez rencontrer des entrepreneurs. Des rendez vous pourront être pris pour vous avec des entreprises présentes. Nous sommes convaincus que ces voyages renouvelleront votre vision de l’Asie et vous ouvrira de nouveaux horizons.

agenda 2016

Voyage d’étude Des Ports performants au service de la transformation et de l’émergence économique du 25 au 30 Janvier 2016 - Malaisie / Singapour Voyage d’étude Développement territorial et intelligence urbaine du 28 mars au 02 Avril 2016 - Malaisie / Singapour Master class Les douze leviers de la diplomatie économique du 25 au 30 Juillet 2016 - Singapour Voyage d’étude Malaisie pionnière de la finance islamique : benchmarking et retour d’expérience du 12 au 17 Décembre 2016 – Malaisie Voyage d’étude Singapour au cœur de la finance asiatique du 05 au 10 Décembre 2016 – Singapour


livres du trimestre Quand l’Afrique réinvente la téléphonie mobile sous la direction de Alain Kiyindou, Kouméalo Anaté et Alain Capo-Chichi «La téléphonie mobile est un dispositif qui se diffuse largement : on compte aujourd’hui plus de cinq milliards d’utilisateurs dans le monde. De par sa facilité d’utilisation, elle joue un rôle important dans l’accompagnement des processus d’épanouissement individuels et collectifs. Entre hybridation et réinvention, les pratiques communicationnelles liées à la téléphonie mobile offrent des perspectives de recherche stimulantes. Pour les opérateurs de téléphonie, il s’ouvre un réel champ, où d’observation en expérimentation, se créent de nouvelles offres. Au-delà des chiffres inespérés, on voit se dessiner des pratiques inattendues : Happy Snapping, crowd-funding, m-commerce, mobile learning. On peut aussi évoquer les usages de la téléphonie mobile dans les pratiques religieuses – avec des “maraboutages” à distance –, dans la lutte contre les fraudes électorales, et dans la mobilisation sociale, notamment lors des manifestations à caractère politique. Les articles rassemblés dans cet ouvrage interrogent la contribution réelle de la téléphonie mobile au développement économique et social des populations, ses modes d’appropriation, les formes de socialisation qu’elle induit et les innovations qui la caractérisent ou qu’elle suscite. La technologie n’étant pas neutre, il s’agit de penser les modalités de son intégration et ses conséquences sur le système social.». 

Les économies émergentes d'Asie, entre État et marché de Jean-Raphaël Chaponnière, Marc Lautier

Pour mieux amarrer l'Afrique noire à l'économie mondiale globalisée de Mamadou Lamine Sylla

La Théorie économique africaine : L'alternative à la crise du capitalisme mondial de Mbog Bassong

«Alors que la reprise se fait attendre en Europe et aux ÉtatsUnis où l’on redoute une stagnation séculaire, les économies émergentes d’Asie – de Séoul à Delhi – continuent de progresser. Quels sont les ressorts de ces dynamiques ? Existe-t-il un “modèle” asiatique de développement ? La montée en puissance de la Chine empêchet-elle tout rattrapage ? La trajectoire de l’Inde illustre-t-elle l’existence d’une alternative à l’industrialisation ? Quels défis rencontre désormais la poursuite de la croissance en Asie ? Après avoir replacé l’émergence de l’Asie dans la longue durée, cet ouvrage présente son socle institutionnel qui, inspiré des expériences d’industrialisation tardive du XIXe siècle, encadre le dynamisme du marché pour atteindre les objectifs de l’État. Il analyse les changements de spécialisation industrielle qui fondent le “vol des oies sauvages” et l’irruption de l’Asie dans l’économie mondiale. Les auteurs examinent ensuite les processus d’intégration régionale et de creusement des inégalités liées à ces développements, les plus rapides de l’Histoire.»

«Ce livre pose un regard sans complaisance sur l’évolution en cours de l'Afrique noire dans l’économie mondiale globalisée. Il incite à une sortie graduelle et programmée des sillons économiques tracés par la colonisation, c’est-à-dire principalement de l’économie des matières premières, de manière à inscrire le continent noir dans une dynamique de production qui capture et écrème des composantes ciblées de sa propre consommation intérieure. Dr Mamadou Lamine Sylla est un Sénégalais vivant au Canada. Consultant et analyste financier ayant rejoint la fonction publique canadienne. Il fut récipiendaire d'une bourse d'excellence de la francophonie, qui l'a conduit à la maîtrise en développement régional à l'Université du Québec à Rimouski (UQAR). Il est également titulaire d'un PhD en Sciences politiques (économie politique) de l'Université du Québec à Montréal (UQAM), d'un certificat en finance de l'École des hautes études commerciales (HEC) de Montréal et d'un Graduate Diploma (DESS) en management (option finance) de McGill University de la même ville.»

«Nous sommes désormais fondés à penser une théorie économique africaine capable de suggérer à l’humanité postmoderne, une somme de connaissances susceptibles de conjurer le chaos que préparent l’économie de marché, la polarisation mondiale du capital et la destruction de l’ordre écologique à l’échelle planétaire. Il y a trois raisons à cela : 1- La question de la valeur trouve sa solution dans la pensée économique africaine. La présente contribution a pour but d’en dévoiler l’identité symbolique, la signification matérielle, la portée scientifique et la puissance de la forme. 2- Le communautarisme africain et son corollaire, le primat de la valeur, laissent entrevoir une lutte efficace contre le désordre social, politique, économique et écologique induit par la raison économique et l’individualisme méthodologique de l’Occident. 3- L’Afrique doit renouer avec son humanisme ancestral porteur d’un développement avec épanouissement sinon elle ne sera plus face à la misère structurelle, au chômage, au pillage de ses ressources naturelles et à la corruption sans cesse croissante de l’élite politique à la solde d’intérêts matériels et immatériels opposés à son épanouissement.»

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 rendez-vous Du 21 au 24 octobre 2015 à Casablanca (Maroc) 7e édition du Salon Pollutece La septième édition de Pollutec Maroc, un salon international des équipements, des technologies et des services de l'environnement, se déroulera du 21 au 24 octobre 2015 à la Foire internationale de Casablanca. Lors de l’édition 2014, le salon a enregistré 7.854 visiteurs et la présence de 300 exposants dont 56% internationaux venus de neuf pays. Trois conférences et la signature de conventions ministérielles avaient également eu lieu. «Pollutec Maroc propose un programme riche de conférences et d'ateliers techniques, avec ses partenaires experts du marché de l’environnement et des organismes professionnels du Royaume et d’Europe, un contenu informatif de haut niveau sur des sujets d’actualité en phase avec les besoins et priorités du pays», annoncent les organisateurs. Du 27 au 30 octobre 2015 à Dakar (Sénégal) 4e édition du Salon international de l’emballage au Sénégal LLes spécialistes de l’emballage se donnent rendez-vous du 27 au 30 octobre 2015 à Dakar à la quatrième édition du Salon international de l’emballage au Sénégal (SIES). Ce rendez-vous constitue une occasion pour «cibler les opportunités stratégiques en Afrique dans un marché en plein essor avec un certain retour sur l'investissement étranger, initier et développer de nouveaux produits et technologies, évaluer la position de vos concurrents dans la région pour une concurrence saine, découvrir et pénétrer de nouveaux marchés et offrir des produits inédits à de nouveaux utilisateurs, apporter de nouvelles opportunités et établir une plateforme d'affaires en Afrique aujourd'hui», indiquent les organisateurs. Du 17 au 18 novembre 2015 à Nairobi (Kenya) 2e édition du Africa SME Champions La deuxième édition du Africa SME Champions Forum se dé-

roulera les 17 et 18 novembre 2015 à Nairobi au Kenya. Ce forum permet aux PME d’accéder aux financements à travers les banques, les fonds d’investissements, fonds de garantie, fondations et Business Angels, d’accroître leurs réseaux d’affaires et de bénéficier des meilleurs conseils grâce aux experts spécialisés en développement des PME présents à travers des tables rondes de haut niveau, des master classes thématiques, des business sessions sectorielles, un espace de conseil personnalisé, des rencontres B2B et un Programme de Mentoring. C’est aussi l’occasion de primer les meilleures PME du continent et les institutions financières qui les accompagnent. Selon les organisateurs, Africa SME Champions Forum, ce premier forum exclusivement consacré au financement des PME africaines, est organisé en partenariat avec le cabinet de conseil en management AfricSearch, le fonds de garantie African Guarantee Fund, la SFI, la banque panafricaine Ecobank et la Banque africaine de développement (BAD). Son objectif: permettre aux PME Africaines à forte croissance de devenir les champions de demain, tel est le leitmotiv de ce rendez-vous continental. Dakar avait abrité en novembre 2014 la première édition qui avait accueilli près de 500 participants. Du 19 au 21 novembre 2015 à Brazzaville (Congo) Forum «Investir au Congo-Brazzaville» Brazzaville sera l’hôte de la première édition du Forum «Investir au Congo-Brazzaville» (ICB 2015). Cet évènement sera placé sous le signe de l’industrialisation, la diversification et la modernisation du Congo. Les organisateurs indiquent, en outre, qu’«à l’heure où l’Afrique détient une part croissante dans les échanges internationaux, le Congo aspire à tirer parti du dynamisme de son économie, de ses richesses naturelles et de sa position stratégique en tant que porte naturelle de l’Afrique centrale pour accélérer son développement». Près de 800 participants, notamment des décideurs, des experts, des consultants et des investisseurs, sont attendus lors de cette édition.

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Post-scriptum

Elimane Sembène

esembene@africanbusinessjournal.info

Forums en Afrique

Des rendez-vous en trompe-l’œil ? Si l’organisation de conférences et de forums était une compétition, l’Afrique ferait partie des champions. Ces dernières années, les rencontres politiques et économiques se succèdent un peu partout dans le continent, certaines d’entre elles comme le Libreville Africa Forum (nouvelle appellation du «New York Africa Forum») sont financées par des gouvernements à coups de millions d’euros, d’autres exigent des frais de participation souvent très élevés. Les modes opératoires diffèrent, l’objectif reste le même – du moins dans les discours – : être des réservoirs d’idées pour l’émergence économique de l’Afrique. Mais à y regarder de plus près, on constate aisément que le principal but de certains organisateurs c’est avant tout de réaliser du business. Les rencontres BtoB en sont une parfaite illustration. L’autre fait étonnant, c’est la multiplication de rendez-vous qui visent presque les mêmes objectifs, plus particulièrement ceux dédiés à l’entrepreneuriat. Réelle volonté de contribuer à

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l’essor du continent et d’attirer les éventuels investisseurs ? Pas sûr. Simple effet de mode ou du suivisme aux objectifs inavoués ? Probable. Ces évènements constituent également une tribune pour certains dirigeants qui souhaitent redorer leur blason ou enfiler le costume de visionnaire de la future Afrique dont la croissance oscille entre 5 et 17 % dans une trentaine de pays, selon la Banque mondiale. Si ces forums et conférences sont de belles occasions pour réaliser des rencontres, d’échanger avec de grandes personnalités et des experts de différents domaines, surtout pour les journalistes, cependant leur crédibilité reste à prouver, leur succès demeure mitigé, d’autant plus que les chartes ou autres recommandations formulées lors des séances de clôture sont souvent ignorées par les sphères politiques et économiques. Ne faudrait-il donc pas mesurer l’impact de certains forums ou conférences ? Ces faramineuses sommes que certains États consacrent à l’or-

ganisation de ces grand-messes ne pourraient-elles pas être investies dans  d’autres  projets   prioritaires plus rentables ? N’est-il pas plus opportun de développer des mécanismes de financement pour les jeunes entrepreneurs africains au lieu d’organiser des rencontres où la théorie supplante largement la pratique ? Aujourd’hui, l’Afrique est confrontée à plusieurs problématiques. Les défis sont immenses, les attentes énormes. Toute initiative visant à favoriser son émergence doit être crédible et rentable et reposer sur une vision claire et précise. Le temps des beaux discours est révolu. Place au pragmatisme ! 


AGENDA 2016 FORUM FIJE : Forum Interafricain des Juristes d’Entreprise La direction juridique de demain: Vers un nouveau paradigme du droit dans l’entreprise Du 19 au 23 janvier 2016 à Dakar FIASGA : Forum Interafricain des Achats, Services Généraux et Approvisionnement Performance et création de valeur dans la fonction achats: Maîtrise des risques, pilotage financier et SI Achat Du 23 au 27 février 2016 à Casablanca FIRH : Forum Interafricain des Ressources Humaines Marketing RH et Marque employeur: les nouveaux enjeux RH Du 29 mars au 02 avril 2016 à Paris FISAD : Forum Interafricain des Secrétaires et Assistant(e)s de Direction Faciliter au quotidien la prise de décision de votre Manager : Outils de Gestion Intégrée du Secrétariat Du 26 au 30 avril 2016 à Casablanca FICOM : Forum Interafricain de la Communication Les nouveaux canaux alternatifs de communication au service de l'entreprise africaine Du 24 au 28 mai 2016 à Dakar

FISI : Forum Interafricain des Systèmes d’Information Les tableaux de bord de la DSI: Pilotage, performance et benchmarking du système d'information Du 26 au 30 juçillet 2016 à Casablanca

CIF : Congrès Interafricain de la Finance L'audit interne et contrôle de gestion dans le management des risques Du 06 au 10 septembre 2016 à Casablanca


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