Réensauvager les territoires

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Guillaume Porcheron

Le réensauvagement, ou rewilding, vise à accompagner un espace vers un état plus sauvage, dont l’aboutissement consiste à lui permettre de retrouver son fonctionnement naturel. Il peut être mis en place à l’échelle de la ville (friches urbaines…) comme à des échelles plus vastes (forêts, réserves naturelles…). Cet espace, juridiquement non défini, est fréquemment incompris, mythifié, s’opposant a priori à la notion d’aménagement du territoire. Aujourd’hui, le réensauvagement suscite un intérêt croissant qui se heurte souvent à un manque d’outils pour être mis en pratique. Ce guide comprend à la fois un volet théorique qui permet de comprendre le réensauvagement et un volet pratique qui présente des études de cas et des propositions concrètes pour prendre en compte, développer ou recréer des espaces de nature sauvage et les intégrer pleinement dans les politiques d’aménagement et d’urbanisme. Ainsi, cet ouvrage : – définit l’espace de nature sauvage ; – fournit les clés pour qu’il soit pris en compte dans les politiques d’aménagement et détaille les formes que pourrait prendre l’expansion volontariste de ces espaces ; – propose des transcriptions possibles dans les documents d’urbanisme pour les mettre en œuvre ; – explique les bénéfices en termes de qualité de vie, d’évolution des paysages, de développement de la biodiversité que ces espaces peuvent apporter ; – expose les conséquences économiques sur le territoire. Les aménageurs, urbanistes, environnementalistes, écologistes et écologues, ainsi que le législateur qui s’intéresse de façon croissante aux problématiques environnementales y trouveront tous les outils pour comprendre, planifier et mettre en œuvre le réensauvagement.

Guillaume Porcheron Anciennement responsable du développement durable pour la ville de Vélizy-Villacoublay puis responsable de l’aménagement du territoire pour la communauté d’agglomération de Versailles Grand Parc, Guillaume Porcheron déploie le programme Petites villes de demain pour la communauté de communes Val-deGâtine. Diplômé d’un Master en développement durable et d’un Master en urbanisme et aménagement, il a enseigné en école de commerce et à l’université Paris-Dauphine.

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RÉENSAUVAGER LES TERRITOIRES Comprendre - Planifier - Mettre en œuvre

RÉENSAUVAGER LES TERRITOIRES

RÉENSAUVAGER LES TERRITOIRES

Guillaume Porcheron

ISBN 978-2-281-13523-7

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Sommaire Remerciements.........................................................................................

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Avant-propos.............................................................................................

9

Espaces de nature sauvage, espaces naturels et paysages.........................................................................................

13

Chapitre 1

Aux sources de l’espace de nature sauvage : la wilderness....

15

Chapitre 2

À quoi l’espace de nature sauvage peut-il s’apparenter ?.........

33

Chapitre 3

De l’intérêt du sauvage......................................................................

45

Partie 2

Le retour (sous contrôle) du sauvage......................................

63

Chapitre 4

Notre rapport au monde sauvage...................................................

65

Chapitre 5

Caractéristiques biogéographiques de la France.........................

79

Chapitre 6

Aires protégées en France................................................................

81

Chapitre 7

Artificialisation des sols en France.................................................

99

Partie 3

Quelle politique d’aménagement par le réensauvagement en France ?.........................................................................................

133

Chapitre 8

Aménagement du territoire..............................................................

135

Chapitre 9

Le réensauvagement, explications et applications......................

143

Chapitre 10

Réensauvagement et espaces naturels.........................................

163

Chapitre 11

Friches urbaines et réensauvagement...........................................

181

Chapitre 12

Quelle politique d’aménagement possible en France autour du sauvage ? Quels leviers d’action ?...............................

189

Conclusion générale..................................................................................

229

Index........................................................................................................

231

Table des matières.....................................................................................

241

Partie 1

5

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CHAPITRE 1 Aux sources de l’espace de nature sauvage : la wilderness

Essayons tout d’abord de cerner ce que recouvre cette « appellation » d’« espace de nature sauvage ». En guise d’appellation nous devrions d’ailleurs utiliser le terme anglais de wilderness qui est un peu l’« appellation d’origine protégée » de l’espace de nature sauvage, car popularisé depuis les années 1980 et porteur d’un sens difficilement traduisible en français, empreint d’une certaine spiritualité, que ne traduit pas « espace de nature sauvage ». Les anglophones utilisent également le terme de wildness qui n’est pas un synonyme de wilderness. Selon le docteur John Haudoerffer(1), la wildness est l’essence de la wilderness. La wildness est un concept où la nature sauvage est représentée dans tout, de l’herbe folle poussant à travers une fissure de la chaussée aux milliers d’hectares d’une forêt primaire(2), tandis que la wilderness est un endroit précis où s’épanouit la nature sauvage. Popularisé en Amérique du Nord, le terme wilderness ne serait pas un terme forgé aux ÉtatsUnis mais aurait pour racine l’Europe du Nord. Il proviendrait de l’association de « will », c’est-à-dire quelque chose qui n’est pas contrôlé, dans un certain état de désordre et d’autodétermination, et de « deor » qui renvoie à l’animal, à la faune sauvage. La wilderness serait donc le « lieu des bêtes sauvages » et surtout un endroit que les humains ne contrôlent pas(3). Le terme serait apparu pour la première fois dans le Manuel des forêts nationales de l’US Forest Service en 1929. C’est en 1964 qu’il trouve sa première application juridique avec le Wilderness Act. Celui-ci en explique le principe, à savoir laisser faire les processus naturels, et ce sans intervention humaine. Toutefois, ces espaces sont légitimés par le fait qu’ils répondent aux besoins humains de solitude et de récréation et qu’ils ont également une vocation de recherche, d’éducation, esthétique ou encore historique.

(1) Gavin Van Horn, Wildness, Relations of People and Place, University of Chicago Press, 2017. (2) European Wilderness Society, Vlado Vancura, « Wilderness and Wildness – What is the difference? », wilderness-society.org. (3) Christian Barthod, « Le retour du débat sur la wilderness », Revue forestière française, 2010. 15

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La wilderness recouvre donc une charge émotionnelle impossible à traduire dans les langues latines. Ainsi, en français, on utilise bien souvent le terme de « nature sauvage »(4). Un peu froid peut-être… Quoique, selon nous, il ne soit pas dénué de charge émotionnelle ou en tout cas d’un certain imaginaire. Chacun y trouvera ce qu’il souhaite… Ainsi, en français, les termes wildness ou wilderness, peuvent se traduire par « espaces de nature sauvage » si l’on s’attache donc à un espace comme le suggérerait le terme wilderness ou « nature sauvage » si l’on se réfère plus au concept que porte le terme de wildness. Le néologisme « naturalité » est aussi parfois employé. En français, il ne semble pas exister de définition établie et universelle de l’espace de nature sauvage ou de la nature sauvage. Le point focal est que ces espaces ne sont pas ou très peu impactés par l’être humain. Tentons cependant de leur donner une définition plus complète et d’en explorer tous les aspects.

1.1

Le double sens du terme « sauvage »

En français comme en anglais, le terme sauvage recouvre une multitude de significations(5) : « Se dit d’une espèce(6) animale non domestique, vivant en liberté dans la nature : Le sanglier est un animal sauvage. Se dit d’un sujet non apprivoisé d’une espèce domestique. Se dit d’un animal difficile à apprivoiser : Le merle passe pour très sauvage. Se dit d’une espèce végétale qui pousse librement dans la nature : De la menthe sauvage. Se dit d’un lieu qui est resté vierge, n’a pas été transformé par l’homme : Une région sauvage et d’accès difficile. Qui a lieu au contact de la nature : Retrouver pour quelque temps la vie sauvage. Qui s’organise en général spontanément en dehors des lois et règlements : Crèche sauvage. Faire du camping sauvage. Se dit d’une action violente, impitoyable, brutale : Une répression sauvage. » En français, le mot « sauvage » a donc un double sens : la non-intervention de l’homme, sa non-domestication des espaces ou des animaux, ainsi qu’une notion de violence, d’anarchie, car hors de contrôle par l’homme. « Wild » en anglais est également porteur de multiples significations parmi lesquelles celle de sauvage pour une espèce animale ou un espace mais aussi de désert, de région désolée ou encore d’un état de folie passagère pour un être humain, bref d’élément incontrôlé comme en français. (4) Ibid. (5) Dictionnaire Larousse en ligne, article « Sauvage », larousse.fr. (6) « Une espèce est un concept qui permet de regrouper des individus selon des caractéristiques morphologiques, génétiques et biologiques. On considère généralement que deux espèces ne peuvent pas donner de descendants fertiles et/ou viables. Les espèces sont la composante de la biodiversité la plus facile à appréhender » (Inventaire national du patrimoine naturel et Observatoire national de la biodiversité, La Biodiversité en France, 100 chiffres expliqués sur les espèces, juin 2018). 16

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Le sauvage, outre sa pleine « naturalité », aurait donc, que le terme soit en français ou anglais, une dimension incontrôlable voire violente pour l’homme ; un double sens qui pourrait déjà apporter une première approche sur la considération que porte l’homme à l’espace de nature sauvage et à la manière dont il le considère dans l’aménagement du territoire. Cependant, prenons en considération d’où l’on écrit : l’espace de nature sauvage des uns n’est pas celui des autres. Lâchez-moi en Amazonie ou sur la banquise arctique et je serai dans un espace de nature sauvage au sein duquel ma survie ne dépassera pas, très certainement, quelques jours, alors que l’Amérindien Wayana de Guyane ou l’Inuit du Grand Nord canadien seront dans leur environnement quotidien. Vous l’aurez compris, nous nous positionnons selon un regard plutôt européen pour définir l’espace de nature sauvage et en décrire ses caractéristiques, et tout à fait français lorsque nous aborderons l’aménagement du territoire qui peut y être lié.

1.2

Une pluralité de définitions, concernant l’espace de nature sauvage, pour des caractéristiques communes

Les termes « sauvage » et « wild » portent en eux une dimension incontrôlable par l’homme. La wildness porte le concept de la nature sauvage, au-delà des espaces, tandis que la wilderness s’attache aux espaces. Wilderness étant le mot le plus usité, institutionnalisé et répondant le mieux à notre sujet, qu’en est-il de sa définition officielle ? Le rapport technique édité en 2013 par la Commission européenne, Guidelines on wilderness in Natura 2000 – Management of terrestrial wilderness and wild areas within Natura 2000 network, a relevé diverses définitions de la wilderness que nous traduisons donc par « espace de nature sauvage » dans cet ouvrage. L’US Wilderness Act de 1964(7) évoque « une nature sauvage », en contraste avec ces espaces où l’homme et son empreinte dominent le paysage, qui est reconnue comme un site où la terre et ses communautés de vie ne sont pas perturbées par l’homme et où l’homme luimême n’est qu’un visiteur de passage. Un espace de nature sauvage est également un espace qui conserve ses caractéristiques primaires, sans infrastructures ou habitations humaines, qui est protégé et géré afin de préserver ses cycles naturels et qui : 1. apparaît être façonné par les forces de la nature avec une empreinte humaine indétectable ; 2. offre de remarquables opportunités pour la solitude ou les divertissements primitifs et non confinés ; 3. comporte au moins 2 000 hectares (5 000 acres) de superficie ou une superficie suffisamment vaste pour rendre possible sa conservation et son utilisation dans un état intact ; 4. peut également renfermer des caractéristiques écologiques, géologiques ou autres caractéristiques de nature scientifique, éducative, paysagères ou de valeur historique.

(7) Traduction. 17

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Réensauvager les territoires

L’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN)(8) stipule qu’« un espace sauvage est un vaste espace terrestre et/ou maritime non modifié, ou bien à la marge, conservant ses caractéristiques et influences naturelles sans habitat humain significatif qui est protégé et géré pour conserver sa condition de fonctionnement naturelle ». Autre définition portée par des chercheurs de l’université de Leeds(9) : « Un espace sauvage est un espace (landscape) intégralement constitué d’éléments biophysiques indigènes où les forces naturelles prévalent comme les propriétés géomorphologiques du site telles que l’eau, la géologie et le relief. » The Wild Foundation(10) stipule quant à elle que « les espaces sauvages sont les espaces naturels les plus intacts, non perturbés de notre planète. Ceux-ci étant véritablement des espaces sauvages que les humains ne contrôlent pas où ils n’ont pas développé de routes, pipelines ou autres infrastructures industrielles. Le cœur de cette dimension étant son cycle biologique intact ». Pour l’European Wilderness Working Group (2011)(11), « les espaces de nature sauvage sont des espaces naturels, non ou très peu modifiés, gouvernés par des processus naturels, sans intervention humaine, infrastructure ou habitat permanent, lesquels devraient être protégés afin de préserver leurs conditions d’évolution naturelle et d’offrir aux gens l’opportunité d’une expérience spirituelle de la nature ». Autre définition, cette fois-ci donnée à Vienne en 2010, par l’European Wilderness Working Group : « Les espaces de nature sauvage sont de vastes espaces libres de toute intervention et habitation humaine, gouvernés par des processus naturels où les gens peuvent faire l’expérience de la qualité spirituelle et du sentiment d’appartenance portés par des espaces laissés intacts pour les générations futures, lesquels représentent un élément vital de l’héritage naturel et culturel européen. Les zones de nature sauvage peuvent également apporter une importante contribution économique, sociale et environnementale aux communautés locales. » Le Protected Area Network (PAN Parks), initié en 1997 par le WWF et le groupe Molecanten, visant à établir un réseau européen d’aires protégées alliant protection de la nature et tourisme durable, définit les espaces de nature sauvage comme « de vastes territoires sans interférence humaine importante, ce qui permet aux processus naturels de s’épanouir et à la vie sauvage de se développer dans leur milieu naturel. La zone de protection est constituée d’une aire de nature sauvage d’un seul tenant, d’au moins 10 000 hectares où aucune activité d’extraction n’est permise et où les seules politiques d’intervention sont celles qui contribuent à maintenir ou à restaurer les processus naturels et l’intégrité écologique du site »(12).

(8) IUCN, Guidelines for applying protected area management categories, 2008 (traduction), disponible sur portals.iucn.org. (9) M. Fisher, S. Carver, Z. Kun, R. McMorran, K. Arrell, G. Mitchell, Review of Status and Conservation of Wild Land in EUROPE. Report: The Wildland Research Institute, p. 148, University of Leeds, 2010 (traduction). (10) wild.org (traduction). (11) A Working Definition of European Wilderness and Wild Areas and its application. Discussion draft, 8 novembre 2011. (12) PAN Parks, As nature intended. Best practice examples of wilderness management in the Natura 2000 network, 2009. 18

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Mais attention, « espace de nature sauvage » ne veut pas dire absence d’être humain. Celui-ci a tout loisir de s’y promener, c’est son empreinte qui doit être la plus réduite possible, par l’absence d’infrastructures et un comportement adéquat. Ainsi l’ASPAS (Association pour la protection des animaux sauvages), connue en France pour ses créations de Réserve de vie sauvage®, autorise dans sa charte(13) « la promenade non motorisée, sur les voies déjà existantes et dans le respect absolu de la faune et de la flore sauvages ». Ainsi, entre autres caractéristiques communes, ce qui fait la particularité de l’espace de nature sauvage est la non-intervention de l’homme et une empreinte la plus réduite possible de celui-ci (ce qui ne signifie pas absence : l’homme y a sa place, comme toute autre espèce vivante mais il ne doit pas, pour que l’espace soit considéré comme sauvage, l’aménager pour son propre confort, prélever, chasser, etc.). Cependant, nombre d’auteurs tels qu’Emma Marris et Christian Lévêque cités plus loin dans cet ouvrage, soulignent le fait que l’espace réellement sauvage n’existe plus et n’a probablement jamais existé depuis l’apparition de l’homme, car celui-ci y aurait, depuis le Néolithique, modifié en profondeur ces espaces, de l’Australie à la Sibérie, en passant par l’Amazonie. La nature originelle n’existerait d’ailleurs pas, car, outre les interventions humaines, les « catastrophes » naturelles, sur des temps plus ou moins longs (incendies, tremblements de terre, changements climatiques…), ont de tout temps modifié les écosystèmes. Il n’existe donc pas de temps zéro auquel se raccrocher pour retrouver une nature primitive et sauvage. Ce qui remet en cause la notion « d’état intact » définie par l’US Wilderness Act de 1964 ou de The Wild Foundation. La définition donnée par les universitaires de Leeds se rapproche plus d’une réalité, affirmant que ce sont des espaces « où les forces naturelles prévalent, comme les propriétés géomorphologiques du site telles que l’eau, la géologie et le relief ». C’est-à-dire que ce sont des espaces qui ne sont pas figés mais que les changements sont d’ordre naturel et non d’origine humaine. L’espace de nature sauvage signifie donc bien un espace en mouvement qui peut être sujet à des modifications très profondes liées à des événements naturels mais un espace non transformé par l’homme d’une manière directe(14). Nous ne rentrerons pas ici dans le débat lié à la hiérarchisation des valeurs : pourquoi un bouleversement lié à des forces naturelles aurait plus de valeur ou serait moins grave que celui lié aux activités humaines ? En effet, la nature n’est ni bonne, ni mauvaise (sauf peutêtre pour les adeptes de l’hypothèse Gaïa), elle « est », tout simplement. Une remarque cependant, entre ce qui pourrait distinguer les transformations liées à l’activité humaine et les bouleversements ou changements d’origine naturelle, ces derniers sont peutêtre moins systématiques et ont lieu bien souvent sur des temps longs (à l’échelle humaine).

(13) Voir ASPAS, Réserve de vie sauvage®, « Charte des RVS », aspas-reserves-vie-sauvage.org. (14) Nous verrons un peu plus loin que l’impact dû aux activités humaines, notamment la pollution atmosphérique ou le changement climatique, concerne tous les espaces, même les plus sauvages. 19

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Comme le souligne l’European Wilderness Working Group, « les espaces de nature sauvage sont des espaces naturels, non ou très peu modifiés, gouvernés par des processus naturels, sans intervention humaine, […] lesquels devraient être protégés afin de préserver leurs conditions d’évolution naturelle ». Qui dit conditions d’évolution naturelle, ne dit pas statu quo. Ainsi, nous pourrions qualifier les espaces de nature sauvage comme des espaces non perturbés par les activités humaines directes mais des espaces dynamiques soumis aux perturbations naturelles. Les perturbations naturelles peuvent néanmoins avoir une cause humaine, tel le dérèglement climatique, car l’influence humaine, même sans aménagement ou prélèvement in situ, est globale. EN RÉSUMÉ

Les points communs de ces définitions sont : – une empreinte humaine la plus réduite possible signifiant l’absence d’infrastructures ; – la non-intervention humaine dans les processus naturels dans des espaces néanmoins dynamiques pouvant être soumis à des perturbations, parfois profondes, d’ordre naturel ; – des espaces assez vastes et non fragmentés permettant aux cycles naturels de bénéficier de leur plein équilibre et de l’ensemble de leurs fonctionnalités ; – les valeurs proprement humaines qui sont attribuées à ces espaces, telles qu’une dimension spirituelle, une sorte de retour aux sources rousseauiste.

1.3

À quelles notions se référer pour identifier un espace de nature sauvage ?

Les définitions que nous avons rapportées font des espaces de nature sauvage des sites où l’être humain ne doit pas intervenir afin de laisser s’exprimer les dynamiques naturelles, et ce sur un espace assez vaste et non fragmenté permettant aux cycles naturels de bénéficier de leur plein équilibre et de l’ensemble de leurs fonctionnalités. L’homme y a sa place mais en tant que contemplateur. Au-delà de ces « généralités » tentons d’en préciser les caractéristiques. Y a-t-il un canon des espaces de nature sauvage ? Ont-ils des particularités qui les distingueraient des autres espaces naturels ? 1.3.1

Caractéristiques écologiques de l’espace de nature sauvage

Un espace de nature sauvage est un espace de pleine naturalité (donc sans intervention humaine) qui englobe la flore, la faune, les habitats et les interactions entre tous ces éléments. La faune, la flore et les habitats sont la résultante d’une évolution unique due à l’environnement abiotique local(15). Ils constituent un écosystème qui est un ensemble formé par une

(15) En écologie, les facteurs abiotiques représentent l’ensemble des facteurs physico-chimiques d’un écosystème ayant une influence sur une biocénose donnée. C’est l’action du non-vivant sur le vivant. Opposables aux facteurs biotiques, ils constituent une partie des facteurs écologiques de cet écosystème (Wikipedia.org, article « Facteur abiotique »). 20

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communauté d’êtres vivants (biocénose)(16) en interrelation avec son milieu (biotope)(17). Les composants de l’écosystème développent un dense réseau de dépendances, d’échanges d’énergie, d’information et de matière permettant le maintien et le développement de la vie. La notion d’écosystème regroupe toutes les échelles : de la terre au simple caillou en passant par la flaque d’eau, la prairie, la forêt ou même les organismes vivants. Chacun constitue un écosystème à part entière. Les zones de transition entre deux écosystèmes sont nommées écotones(18). Un espace de nature sauvage peut donc représenter un écosystème en soi (étendues herbacées, zones humides, etc.) ou une multiplicité d’écosystèmes réunis dans un espace défini. Cela nous amène à la notion de taille. À partir de quelle taille un espace peut-il être considéré comme sauvage ? 1.3.2

Une notion de taille

Selon les Guidelines on wilderness in Natura 2000, pour que les écosystèmes de l’espace considéré et les espèces qu’ils abritent puissent évoluer à leur gré, il est nécessaire de prendre en compte l’échelle spatiale et temporelle dans laquelle ils évoluent. En effet, l’espace minimum nécessaire à un fonctionnement normal des espèces et des écosystèmes diffère selon celle-ci. Toujours selon les Guidelines on wilderness in Natura 2000, un espace sauvage devrait être assez vaste pour assurer le fonctionnement des processus naturels en toute autonomie. Il pourrait se suffire à lui-même en quelque sorte. Ainsi, l’échelle joue un rôle central sur la diversité des espèces et des écosystèmes. Plus un espace est vaste, plus il hébergera un large spectre d’espèces et d’habitats. Inversement, plus un espace est petit, plus il hébergera de petites populations végétales et animales ainsi qu’une diversité réduite de ces populations et des habitats, impactant les processus naturels et donc la survie desdites populations par leur appauvrissement génétique. Ainsi les Guidelines on wilderness in Natura 2000 stipulent que la taille critique ou suffisante d’un espace sauvage, afin que ses processus naturels puissent évoluer normalement, est à considérer en fonction de son environnement géographique. En effet, cette zone entourant l’espace sauvage aura un impact direct sur son fonctionnement de par leurs interactions et les corridors écologiques qu’ils offrent (ou pas) entre les espaces sauvages. Un espace sauvage, aussi vaste soit-il, évolue donc en interaction avec ses zones frontalières, si l’on excepte, encore une fois, les influences plus globales liées à l’activité humaine. La notion de continuité est donc, elle aussi, à prendre en compte.

(16) « Ensemble des êtres vivants (les communautés) coexistant dans un milieu défini (biotope). Biocénose et biotope forment l’écosystème » (Olivier Lemoine, Joanny Fahrner et Tolga Coskun, Les 101 mots de la biodiversité urbaine à l’usage de tous, Archibooks, 2014). (17) « Milieu support, non vivant, caractérisé par des éléments minéraux et des conditions physico-chimiques permettant d’accueillir une flore et une faune spécifiques », ibid. (18) Wikipedia.org, article « Écosystème ». 21

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1.3.3

Une notion de continuité

La notion de continuité entre les espaces sauvages, ou corridors écologiques, est essentielle en ce qui concerne l’Europe. En effet, le continent européen, et plus spécifiquement l’Europe occidentale, contient peu de vastes espaces tels que décrits précédemment, de par une densité humaine très importante et une fragmentation de l’habitat. 1.3.4

Causes de la fragmentation des habitats

Les causes de la fragmentation des habitats naturels sont liées à plusieurs facteurs : – la banalisation et la simplification des écosystèmes, dues à l’agriculture intensive et à son corollaire d’open fields ; – la consommation d’espaces due à l’urbanisation massive de ces cinquante dernières années ; – la fragmentation et l’isolement des espaces naturels, conséquences de l’urbanisation par la création d’infrastructures reliant ces urbanisations. 1.3.5 Réservoirs de biodiversité, corridors écologiques et trame verte et bleue Une continuité entre les espaces naturels (dont les espaces sauvages) signifie que ces espaces sont reliés par des corridors écologiques. Les espaces de nature sauvage que nous considérons peuvent être, selon la terminologie employée pour définir le principe de trame verte et bleue, qualifiés de réservoirs de biodiversité. Ainsi, les réservoirs de biodiversité sont des zones riches en biodiversité où les espèces peuvent réaliser l’ensemble de leur cycle de vie (alimentation, reproduction, abris, etc.). Les corridors écologiques constituent quant à eux des voies de déplacement empruntées par la faune et la flore qui relient les réservoirs de biodiversité. Ces corridors peuvent être constitués de haies, d’un alignement d’arbres sur la voirie, d’un passage à faune sur une infrastructure routière, d’une ouverture dans un jardin clôturé, etc. Les corridors écologiques peuvent être de plusieurs types : 1.3.5.1

Corridors en pas japonais

Les corridors en pas japonais sont des milieux physiquement disjoints mais fonctionnellement interconnectés. La fonctionnalité d’un corridor en pas japonais ne repose donc pas sur la continuité physique entre les milieux, mais sur la présence régulière d’entités suffisamment grandes et rapprochées pour assurer le cycle de vie et les déplacements de la flore et de la faune caractéristiques de ces habitats(19).

(19) DREAL Auvergne-Rhône-Alpes, « SRCE - Corridors thermophiles en pas japonais à préserver ou à remettre en bon état en Auvergne », data.gouv.fr, 15 novembre 2020. 22

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1.3.5.2

Corridors de type linéaire

Les corridors linéaires constituent une continuité d’un même milieu, tels qu’une haie, une bande enherbée le long d’un chemin ou d’un cours d’eau, une ripisylve, etc. 1.3.5.3

Corridors de type paysager

Les corridors de type paysager constituent une mosaïque de structures paysagères variées pouvant être composée, par exemple, de différentes strates telles que des milieux herbacés, des haies, bosquets, etc.

Fig. 1.1. Typologies de corridors (Guillaume Porcheron, 2021)

La trame verte et bleue est ainsi un « outil d’aménagement durable du territoire » ainsi que la qualifie le décret n° 2012‑1492 du 27 décembre 2012 qui définit ce qu’est une trame verte et bleue. Elle est un outil d’aménagement, car elle répond à la définition de l’aménagement du territoire telle que décrite dans l’article L. 300‑1 du Code de l’urbanisme et qui consiste, entre autres actions, en la sauvegarde ou la mise en valeur des espaces naturels. En outre, la mise en œuvre de trames vertes et bleues constitue une véritable appropriation du territoire, ce à quoi correspond l’aménagement du territoire. Plus généralement la trame verte et bleue a pour objectif « d’enrayer la perte de biodiversité en participant à la préservation, à la gestion et en la remise en bon état des milieux nécessaires aux continuités écologiques, tout en prenant en compte les activités humaines et notamment agricoles, en milieu rural ainsi que la gestion de la lumière artificielle la nuit. À cette fin, ces trames contribuent à : 1° diminuer la fragmentation et la vulnérabilité des habitats naturels et habitats d’espèces et prendre en compte leur déplacement dans le contexte du changement climatique ; 2° identifier, préserver et relier les espaces importants pour la préservation de la biodiversité par des corridors écologiques ; 23

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3° […] préserver les zones humides ; 4° prendre en compte la biologie des espèces sauvages ; 5° faciliter les échanges génétiques nécessaires à la survie des espèces de la faune et de la flore sauvages ; 6° améliorer la qualité et la diversité des paysages. »(20) Les trames vertes et bleues sont ainsi constituées de réservoirs de biodiversité et de corridors écologiques. Tout ceci peut entrer dans le « champ d’action » des espaces de nature sauvage. Ce qui peut l’en éloigner, c’est le flou que constitue la « prise en compte les activités humaines et notamment agricoles ». Qu’est-ce que cela signifie ? Cela veut-il dire qu’ils doivent être gérés pour ne pas empiéter sur ces espaces ? Ne pas apporter ce qui pourrait être considéré par certains agriculteurs comme des externalités négatives (ombre portée sur les cultures, espèces jugées nuisibles…). En outre, quid de la notion de réservoir de biodiversité dont la définition semble assez précise, mais qui ne dit rien sur son mode de gestion ? Autrement dit, un « bon » réservoir de biodiversité est-il un réservoir géré ou un réservoir non géré ? 1.3.6

Notion d’espace géographique

Un espace de nature sauvage doit avoir une taille critique pour que ses processus naturels fonctionnent correctement mais tout dépend des espèces considérées ou des habitats pris en compte. Finalement, la taille diverge totalement en fonction de ces paramètres. Il peut également, nous l’avons vu, représenter un écosystème en soi ou une multiplicité d’écosystèmes réunis dans un espace défini. Qui dit espace défini, dit frontières, espace géographique clairement identifié et rien n’est plus compliqué, car il y a autant d’espaces géographiques que de définitions. 1.3.6.1

L’espace géographique, trois dimensions dans un espace délimité

Selon l’UICN(21), un espace géographique inclut les zones terrestres, les eaux douces, les zones maritimes et côtières ou une combinaison de deux ou plus de celles-ci. Il a également trois dimensions : le ciel, la surface du sol ou de la mer et le sous-sol ou sous-marin. Et il est « clairement défini » quand il implique une zone géographique spatialement identifiée avec des frontières acceptées et délimitées. Ces frontières peuvent parfois être identifiées par des caractéristiques physiques, qui peuvent être mouvantes (telles que les rives d’une rivière), ou par un mode de gestion avec des zones interdites par exemple.

(20) Article L. 371‑1 du Code de l’environnement. (21) Guidelines for applying protected area management categories, UICN, 2008. 24

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1.3.6.2

L’espace géographique, des combinaisons physiques dans un espace donné ou des espaces présentant des caractères de similitude quelle que soit leur localisation

Selon l’École nationale supérieure de Lyon(22), « alors que le mot territoire est, au-delà de son emploi en géographie, d’un large usage en sciences humaines, l’expression espace géographique est une création spécifique des géographes. Elle s’emploie soit au singulier pour rendre compte des combinaisons physiques, économiques et sociales s’exerçant sur un espace donné, soit au pluriel pour désigner des espaces présentant des caractères de similitude quelle que soit leur localisation : espaces montagnards, espaces ruraux, espaces industriels. L’espace géographique est un espace social, produit des groupes humains qui l’organisent et le mettent en valeur pour répondre à des objectifs fondamentaux : appropriation, habitat, échanges et communication, exploitation ». 1.3.6.3

L’espace géographique, un espace identifié et aménagé par l’homme

Selon Jean-Louis Nembrini, « l’espace géographique, produit du travail des hommes organisés en sociétés, a une étendue, il a une nature, il est constitué de lieux identifiés et aménagés. Espace social, il désigne l’aire occupée, pensée par une société »(23). 1.3.6.4

L’espace géographique en tant que représentation mentale

L’espace géographique peut également être compris comme une « construction intellectuelle qui rend compte de l’organisation du territoire »(24). Il y a donc plusieurs acceptions selon le prisme d’appréhension du sujet, social ou naturaliste. Nous mettrons de côté ici le prisme social pour tenter une définition liée aux caractéristiques naturelles du territoire. Nous retiendrons qu’un espace géographique (naturel) revêt trois dimensions : le ciel, le sol et le sous-sol et/ou la surface de la mer et l’espace sous-marin. Ses frontières peuvent être définies si ses caractéristiques sont communes (espace montagnard, zone humide…) ou si ses frontières sont identifiées par des éléments naturels (rivière, chaîne montagneuse…), néanmoins il se révèle d’une construction mentale qui rend compte, en effet, de « l’organisation du territoire ». En effet, pourquoi arrêter un espace géographique à ses caractéristiques morphologiques ou à des frontières elles-mêmes définies comme telles par l’être humain ? L’espace géographique naturel et sauvage est donc un espace qui sera défini par son degré de naturalité et non par ses caractéristiques morphologiques. Une naturalité pouvant combiner des caractéristiques naturelles variées (montagne et plaine, côte et océan, etc.) et dont les (22) Voir ENS, Géoconfluences, Glossaire, article « Espace », geoconfluences.ens-lyon.fr. (23) J.-L. Nembrini, Les Concepts fondamentaux de la géographie – La géographie en collège et en lycée, Hachette éducation, coll. « Profession enseignant », 1994. (24) Christine Partoune, Un modèle pédagogique global pour une approche du paysage fondée sur les nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC), 2004. 25

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Réensauvager les territoires

frontières pourront être clairement identifiées selon une approche administrative ou alors plus lâche selon l’interpénétration avec les activités humaines. En complément de cette géographie humaine, il ne faut pas oublier celle du vivant qui, de manière intraspécifique (territoire des individus, des meutes, des groupes sociaux…) ou interspécifique, utilise différemment l’espace physique dans le temps biologique (saison de reproduction, migration, disponibilité alimentaire…) et en fonction de la pression des autres espèces, notamment de l’homme. Ainsi, l’espace géographique sauvage que l’homme dessinera sera ce qu’il est prêt à « abandonner » ou qu’il croit juste ou fonctionnel d’abandonner, mais qui ne sera peut-être pas l’espace optimal pour le vivant. En effet, le vivant ne respecte pas nos limites, nos réserves naturelles, nos parcs. EN RÉSUMÉ

Nous considérerons l’espace géographique naturel et sauvage comme un espace tridimensionnel, pouvant être pourvu de nombreuses combinaisons physiques (géologiques, géomorphologiques…) et écosystémiques et dont les frontières pourront être clairement identifiées et cartographiées ou a contrario plus lâches selon l’interpénétration avec les activités humaines. Cet espace géographique devra prendre en compte la libre évolution du vivant en se référant à des taxons(25) ou à des espèces préidentifiées ou encore à des fonctionnements écosystémiques qui permettront là aussi d’en définir les frontières.

Cette définition de frontière, plus ou moins lâche en fonction de l’interpénétration avec les activités humaines, nous amène à la notion de protection. 1.3.7

Notion de protection(26)

Un espace géographique sauvage tel que présenté ci-dessus, se détermine également par son degré de protection tel que défini par l’UICN(27). Nous prendrons cette référence sachant que chaque pays à travers le monde a ses propres catégorisations et même si les termes peuvent être partagés, ils ne revêtent que rarement le même degré de protection. L’UICN catégorise six niveaux de protection à même de déterminer le niveau de « naturalité » de l’espace considéré. Le niveau le plus élevé selon cette considération de naturalité étant catégorisé Ia et le moins élevé VI : 1.3.7.1 Ia : réserve naturelle intégrale

C’est la zone de protection naturelle la plus élevée et la plus stricte qui soit, où toute intervention humaine est strictement contrôlée et limitée afin qu’une telle zone conserve toutes ses caractéristiques géologiques, géomorphologiques et de biodiversité. De tels espaces peuvent être utilisés comme lieux de référence pour la recherche scientifique.

(25) Un taxon correspond à une entité d’êtres vivants regroupés parce qu’ils possèdent des caractères en commun du fait de leur parenté et permet ainsi de classifier le vivant à travers la systématique (famille, genre, espèce…). (26) European Environment Agency, « IUCN management categories », 2017, eea.europa.eu. (27) Guidelines for applying protected area management categories, UICN, 2008. 26

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Aux sources de l’espace de nature sauvage : la wilderness – Chapitre 1

1.3.7.2 Ib : zone de nature sauvage

Ce sont de vastes espaces non ou très peu modifiés qui ont conservé leurs caractéristiques naturelles sans influence humaine ou d’habitat permanent. Comme les espaces Ia, ils sont protégés afin de conserver leurs caractéristiques naturelles. 1.3.7.3 II : parc national

Ce sont de vastes espaces naturels ou quasi naturels mis en réserve pour protéger des processus écologiques de grande échelle, ainsi que les espèces et les caractéristiques des écosystèmes de la région, qui fournissent aussi une base pour des opportunités de visites de nature spirituelle, scientifique, éducative et récréative, dans le respect de l’environnement et de la culture des communautés locales. 1.3.7.4 III : monument naturel

Ces espaces naturels sont mis en réserve pour protéger un monument naturel spécifique, qui peut être un élément topographique, une montagne ou une caverne sous-marine, une caractéristique géologique telle qu’une grotte ou même un élément vivant comme un îlot boisé ancien. Ce sont généralement des aires protégées assez petites d’une importante valeur touristique. 1.3.7.5 IV : aire de gestion des habitats ou des espèces

Ces aires protégées ont pour objectif de protéger certaines espèces ou habitats. Leur gestion reflète cette priorité. De nombreuses aires protégées de la catégorie IV nécessitent des interventions régulières et actives pour répondre aux exigences d’espèces particulières ou pour maintenir des habitats, mais cela n’est pas une exigence de la catégorie. 1.3.7.6

V : paysages terrestres et marins protégés

Une aire protégée où l’interaction des hommes et de la nature a produit, au fil du temps, une aire qui possède un caractère distinct, avec des valeurs écologiques, biologiques, culturelles et paysagères significatives, et où la sauvegarde de l’intégrité de cette interaction est vitale pour protéger et maintenir l’aire, la conservation de la nature qui y est associée ainsi que « d’autres valeurs ». 1.3.7.7

VI : zones protégées avec exploitation durable des ressources

Ces aires protégées préservent les écosystèmes et les habitats, ainsi que les valeurs culturelles et les systèmes de gestion des ressources naturelles traditionnelles qui y sont associés. Elles sont généralement vastes, et la majeure partie présente des conditions de fonctionnement naturelles ; une certaine proportion y est soumise à une gestion durable des ressources naturelles et une utilisation modérée des ressources naturelles, non industrielle et compatible avec la conservation de la nature, y est considérée comme l’un des objectifs principaux de l’aire.

27

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Réensauvager les territoires

Ainsi pouvons-nous qualifier ces degrés de protection en nouvelles catégories selon le degré d’intervention humaine et son gradient de protection : – Les catégories I à II visent en premier lieu à protéger l’intégrité écologique des écosystèmes et des processus naturels. La catégorie II y adjoint une vocation récréative et éducative mais dans le plus grand respect du site. Ce sont de vastes espaces répondant à la définition préalable que nous avons tenté de conférer à la notion d’espace de nature sauvage. – La catégorie III est un espace plus restreint visant à protéger un espace naturel spécifique. Il est donc moins global dans son approche de protection écosystémique. – La catégorie IV s’applique à des sites dans lesquels des interventions de gestion régulières paraissent nécessaires pour conserver ou restaurer des espèces ou des habitats. Nous nous éloignons dans cette catégorie de la notion d’espace sauvage, car elle requiert une gestion humaine. – Les dispositifs relevant de la catégorie V protègent des paysages culturels habités, comprenant, par exemple, des exploitations agricoles ou d’autres formes d’utilisation des sols. La catégorie VI s’applique quant à elle aux aires d’utilisation durable des ressources naturelles, essentiellement au profit des populations locales. Nous ne sommes donc plus ici dans la protection d’espaces de nature sauvage mais dans celle d’espaces anthropiques. Nous nous intéresserons donc plus spécifiquement aux catégories Ia et Ib, car ce sont celles qui recoupent au mieux la définition de l’espace de nature sauvage que nous avons préalablement déterminée et qui offrent le degré de protection nécessaire au plein épanouissement des écosystèmes sauvages. La catégorie II peut aussi être considérée dans sa fonction « cœur de parc » (cf. 6.3.3) et la III si elle concerne les « éléments vivants ». Enfin, toujours selon l’UICN (2008) : une aire protégée est « un espace géographique clairement défini, reconnu, consacré et géré, par tout moyen efficace, juridique ou autre, afin d’assurer à long terme la conservation de la nature ainsi que les services écosystémiques et les valeurs culturelles qui lui sont associés »(28). Une aire protégée est donc une entité reconnue. EN RÉSUMÉ

Les catégories Ia et Ib, ainsi que II et III sous certaines conditions, correspondent au mieux à la notion d’espace sauvage telle que nous l’avons préalablement définie, car l’intervention humaine et son empreinte sont réduites.

Cependant, il faut noter que les espaces naturels, plus ou moins sauvages, selon la définition que nous en avons donnée, sont des espaces en constante évolution. Il paraît ainsi essentiel de noter qu’un espace, quel que soit son degré d’artificialisation, peut (re)devenir sauvage. Il peut le redevenir si les moyens sont mis en œuvre pour supprimer les infrastructures qui y sont sises et si l’être humain limite par la suite drastiquement ses interventions en laissant s’exprimer les processus naturels. Ce sera donc notre propos : comment intégrer cette notion d’espace de nature sauvage existant ou en devenir dans les politiques d’aménagement ?

(28) UICN, comité français, Application des catégories de gestion UICN en France, 2008. 28

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Aux sources de l’espace de nature sauvage : la wilderness – Chapitre 1

Dans un contexte européen, il s’agira notamment de penser l’espace de nature sauvage en devenir (ou reconquête), car les espaces de pleine naturalité tels que définis précédemment sont très rares, en quantité comme en superficie. 1.3.8

Notion d’évolution

1.3.8.1

La nature originelle existe-t-elle ?

L’histoire biologique de la planète Terre est ponctuée de grandes catastrophes écologiques, appelées extinctions de masse. Il y en a eu cinq entre 445 et 61 millions d’années avant notre ère. La première a vu la disparition de près de 85 % des espèces. Les paléontologues référencent, au-delà de ces extinctions de masse, une vingtaine d’autres extinctions de moindre ampleur. Au total, plus de 99 % des espèces ayant vécu sur Terre auraient disparu au cours de l’évolution(29). De quoi relativiser les pertes actuelles ? Rappelons que ces extinctions se sont faites sur des périodes très longues (à l’échelle humaine), de plusieurs milliers d’années. Celle que nous connaissons, appelée « sixième extinction de masse », se fait sur une période très réduite (cinquante ans). Comment s’adapter ? De plus, l’homme n’existait pas encore. Il aurait d’ailleurs certainement disparu s’il avait vécu à de telles périodes. En outre, jusqu’à preuve du contraire, cette « sixième extinction de masse » est due à l’être humain. Sur ce dernier point, au-delà des problèmes majeurs qui en découlent pour la biodiversité et son corollaire, lié à la vie humaine sur Terre, une question éthique peut se poser. Enfin, ces périodes de destruction massives ont été suivies de reconquête et de diversification dites « explosives »(30). La « nature » semble toujours se relever mais la reconstitution d’une nouvelle biosphère prend des millions d’années : un peu long à échelle humaine… 1.3.8.2 Il n’y a pas d’ordre immuable mais des temps longs et des temps courts

Les changements climatiques ont joué un rôle majeur dans la diversité biologique de la France et du continent européen. Les systèmes écologiques actuels se sont constitués il y a environ 12 000 ans à la suite de la reconquête très hétérogène et plus ou moins rapide des espèces initialement endogènes. Certaines ont définitivement disparu, d’autres sont revenues, et ont mis des siècles pour le faire, et d’autres, enfin, ont été importées il y a de nombreux siècles (châtaigner et noyer) ou récemment, volontairement (nombre de plantes ornementales) ou involontairement (avec les échanges commerciaux). Ainsi les peuplements se modifient continuellement et il n’y aurait donc pas d’ordre immuable(31). Cependant, il est essentiel de noter que les changements sur de vastes échelles, dus à la nature et pouvant (29) Christian Lévêque, La Biodiversité avec ou sans l’homme ? Réflexions d’un écologue sur la protection de la nature en France, Quae, 2017. (30) Ibid. (31) Ibid. 29

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Réensauvager les territoires

être extrêmes et profonds, se font sur des temps longs à l’échelle humaine (souvent sur des milliers d’années) et que les modifications liées à l’activité humaine se font sur des temps courts, de plusieurs siècles à quelques années. On ne peut pas parler de nature immuable, mais il y a des temps longs (naturels) et des temps courts (anthropiques). Il existait donc bien un « ordre naturel » qui a subi des variations considérables au cours des âges mais qui pouvait rester relativement stable sur des milliers d’années, ce qui était le cas des écosystèmes européens post-dernière glaciation. Cet « ordre naturel » a été bouleversé d’une manière exponentielle par l’être humain. Aussi la nature que nous connaissons aujourd’hui en France et en Europe n’a pratiquement plus rien à voir, ou sur des zones très restreintes, avec celle de la fin du Néolithique. L’agriculture et l’introduction de nouvelles espèces y ont fortement contribué. 1.3.8.3

Notion de féralité

Ainsi, nous pourrions dire que, pour partie, le domestique et l’exotique d’hier ont pu devenir le sauvage d’aujourd’hui. C’est la notion de féralité : l’adjectif « féral » désignant des espèces domestiques retournées à un état sauvage, à partir de leur patrimoine génétique « limité » issu de la sélection humaine. La féralité a son rôle à jouer dans le processus de réensauvagement (cf. 3.9) des espaces et notamment des forêts. L’aurochs, ayant disparu dans la première moitié du xviie siècle (le dernier spécimen serait mort en 1627 dans la forêt de Jaktorow en Pologne), a ainsi fait l’objet de tentatives de reconstitution par le croisement de races domestiques rustiques censées être proches de l’aurochs originel. Ainsi fut créée une nouvelle race d’« aurochs reconstitués ». Il s’est ensuivi une « dédomestication ». Relâché dans les quelques profondes forêts européennes restantes, il pourrait jouer un rôle majeur dans l’évolution de ces espaces : création de clairière, d’humus, proie pour les grands prédateurs, etc. Le même rôle a été attribué au tarpan, petit cheval des forêts polonais, lui-même « dédomestiqué » et relâché dans la forêt de Bialowieza. 1.3.8.4

Le sauvage en devenir

À partir de quand pouvons-nous qualifier un espace naturel de sauvage ? Les définitions que nous en avons données ne renseignent pas sur la temporalité. Cependant, pour qu’une forêt soit considérée comme primaire, il faut entre 800 et 1 000 années d’évolution libre, c’est-à-dire sans aucune intervention humaine(32). Un espace pourrait donc être pleinement sauvage dès qu’il a atteint son climax(33). La notion de climax est cependant contestée, arguant que la nature n’est jamais dans un état stable. En effet, les écosystèmes seraient des entités fondamentalement stables mais (32) Emma Marris, Rambunctious Garden, Saving Nature in a Post-Wild World, Bloomsbury, 2011. (33) « En écologie, le climax est un état théorique dans lequel un sol ou une communauté végétale a atteint un état d’équilibre stable et durable avec les facteurs édaphiques et climatiques du milieu. Toute perturbation du milieu, naturelle ou anthropique, détruit cet état climacique. En l’absence de nouvelle perturbation, le sol et la communauté végétale évoluent de nouveau vers leur climax », Futura, « Climax : qu’est-ce que c’est ?, futurasciences.com, rubrique « Planète ». 30

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Table des matières Sommaire.................................................................................................

5

Remerciements.........................................................................................

7

Avant-propos.............................................................................................

9

Espaces de nature sauvage, espaces naturels et paysages.........................................................................................

13

Chapitre 1

Aux sources de l’espace de nature sauvage : la wilderness....

15

1.1

Le double sens du terme « sauvage »................................................

16

1.2

Une pluralité de définitions, concernant l’espace de nature sauvage, pour des caractéristiques communes................................

17

À quelles notions se référer pour identifier un espace de nature sauvage ?.............................................................................

20

1.3.1

Caractéristiques écologiques de l’espace de nature sauvage........................

20

1.3.2

Une notion de taille...................................................................................

21

1.3.3

Une notion de continuité...........................................................................

22

1.3.4

Causes de la fragmentation des habitats.....................................................

22

1.3.5

Réservoirs de biodiversité, corridors écologiques et trame verte et bleue.....

22

1.3.5.1

Corridors en pas japonais.........................................................................

22

Partie 1

1.3

1.3.5.2 1.3.5.3

Corridors de type linéaire.........................................................................

Corridors de type paysager.......................................................................

23 23

1.3.6

Notion d’espace géographique...................................................................

24

1.3.6.1

L’espace géographique, trois dimensions dans un espace délimité..............

24

1.3.6.2

L’espace géographique, des combinaisons physiques dans un espace donné ou des espaces présentant des caractères de similitude quelle que soit leur localisation.................................................................

25

L’espace géographique en tant que représentation mentale........................

25

1.3.7

Notion de protection..................................................................................

26

1.3.7.1

Ia : réserve naturelle intégrale..................................................................

26

1.3.6.3 1.3.6.4

1.3.7.2 1.3.7.3 1.3.7.4

L’espace géographique, un espace identifié et aménagé par l’homme.........

Ib : zone de nature sauvage.......................................................................

II : parc national....................................................................................... III : monument naturel..............................................................................

25

27 27 27

241

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Réensauvager les territoires

1.3.7.5

IV : aire de gestion des habitats ou des espèces..........................................

27

1.3.7.7

VI : zones protégées avec exploitation durable des ressources....................

27

1.3.8

Notion d’évolution....................................................................................

29

1.3.8.1

La nature originelle existe-t-elle ?.............................................................

29

1.3.7.6

1.3.8.2

V : paysages terrestres et marins protégés..................................................

27

Il n’y a pas d’ordre immuable mais des temps longs et des temps courts.....

29

Le sauvage en devenir...............................................................................

30

1.4

Conclusion.............................................................................................

31

Chapitre 2

À quoi l’espace de nature sauvage peut-il s’apparenter ?.........

33

2.1

Les espaces de nature sauvage sont-ils des espaces naturels comme les autres ?...............................................................................

33

2.1.1

Notion d’espaces naturels selon le Code de l’environnement......................

33

2.1.2

Notion d’espaces naturels selon le Code de l’urbanisme.............................

34

2.1.3

Espaces naturels sensibles.........................................................................

34

2.1.4

Conclusion................................................................................................

35

2.2

L’espace de nature sauvage est-il une réserve naturelle ?.............

35

2.3

L’espace naturel sauvage est-il un « site » ?....................................

36

2.4

L’espace de nature sauvage est-il un paysage ?..............................

37

2.4.1

Le paysage, une dimension culturelle forte.................................................

37

2.4.2

L’espace de nature sauvage serait-il un tiers paysage ?...............................

37

2.4.3

L’espace de nature sauvage, un paysage en soi...........................................

39

2.4.4

Conservation du paysage...........................................................................

41

2.5

L’espace de nature sauvage est-il un espace vert ?.........................

42

2.6

Conclusion.............................................................................................

44

Chapitre 3

De l’intérêt du sauvage......................................................................

45

3.1

État des lieux........................................................................................

45

3.1.1

Une définition de la biodiversité................................................................

45

3.1.2

Pourquoi la biodiversité ?..........................................................................

46

3.1.3

Causes de son déclin.................................................................................

47

3.1.3.1

Le monde..................................................................................................

48

1.3.8.3 1.3.8.4

3.1.3.2 3.1.3.3

Notion de féralité......................................................................................

Bloc continental d’Europe et d’Asie centrale..............................................

La France.................................................................................................

30

49 50

242

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Table des matières

3.1.4

Un déclin à relativiser ?.............................................................................

3.1.4.1

De quelle biodiversité parlons-nous ?........................................................

3.1.4.2 3.1.4.3

De la difficulté de définir une espèce.........................................................

51 51 52

Qu’est-ce qu’un habitat ?..........................................................................

53

Une biodiversité plus ou moins riche selon les régions du globe.................

54

3.2

Espaces sauvages et biodiversité........................................................

55

3.2.1

Forêts.......................................................................................................

55

3.2.2

Prairies naturelles......................................................................................

56

3.2.3

Les animaux sauvages : de véritables aménageurs......................................

57

3.2.4

De l’intérêt de la libre évolution................................................................

58

3.3

Lutte contre le réchauffement climatique........................................

59

3.4

Résilience...............................................................................................

60

3.5

Conclusion.............................................................................................

61

Partie 2

Le retour (sous contrôle) du sauvage......................................

63

Chapitre 4

Notre rapport au monde sauvage...................................................

65

4.1

L’homme et les autres : une vision anthropocentrique du vivant

65

4.1.1

Les rapports de l’homme à l’animal ont façonné notre cerveau...................

66

4.1.2

Le christianisme, cause du « désastre écologique » actuel ?........................

68

4.2

Le xixe siècle et l’émergence d’un nouveau rapport à la nature.

71

4.2.1

Le tournant Humboldt...............................................................................

71

4.2.2

Naissance du terme « écologie »................................................................

72

4.2.3

Les Romantiques, gardiens d’une « nature originelle »...............................

73

4.2.4

Ère industrielle et premiers mouvements de conservation...........................

74

4.3

Le xxe siècle : d’Aldo Leopold aux objectifs d’Aichi.....................

75

4.3.1

Écocentrisme, biocentrisme et anthropocentrisme.......................................

76

4.3.2

Modes de protection de la nature...............................................................

76

4.3.3

Objectifs d’Aichi.......................................................................................

77

4.4

Conclusion.............................................................................................

78

3.1.4.4 3.1.4.5

De quel déclin parlons-nous ?...................................................................

53

243

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Réensauvager les territoires

Chapitre 5

Caractéristiques biogéographiques de la France.........................

79

Chapitre 6

Aires protégées en France................................................................

81

6.1

Aires protégées sous références internationales..............................

83

6.1.1

Patrimoine mondial de l’humanité (Unesco)...............................................

83

6.1.2

Réserves de biosphère...............................................................................

83

6.1.3

Sanctuaire Pelagos....................................................................................

84

6.1.4

Sites Ramsar.............................................................................................

84

6.2

Aires protégées sous référence européenne : le réseau européen Natura 2000...........................................................................................

85

6.3

Aires protégées sous référence française..........................................

86

6.3.1

Inventaire du patrimoine naturel................................................................

86

6.3.2

Grands Sites de France..............................................................................

86

6.3.3

Parcs nationaux.........................................................................................

87

6.3.4

Réserves naturelles nationales....................................................................

89

6.3.5

Réserves biologiques.................................................................................

90

6.3.6

Réserves nationales de chasse et de faune sauvage.....................................

91

6.3.7

Parcs naturels marins.................................................................................

91

6.3.8

Sites du Conservatoire du littoral...............................................................

91

6.4

Aires protégées régionales..................................................................

92

6.4.1

Parc naturel régional (PNR).......................................................................

92

6.4.2

Réserves naturelles régionales et réserves naturelles de Corse.....................

93

6.5

Aires protégées départementales.......................................................

94

6.5.1

Arrêtés préfectoraux de protection de biotope............................................

94

6.5.2

Arrêtés préfectoraux de protection de géotope............................................

95

6.5.3

Zones prioritaires pour la biodiversité........................................................

95

6.5.4

Espaces naturels sensibles.........................................................................

95

6.6

Aires protégées communales..............................................................

96

6.6.1

Zones naturelles du PLU...........................................................................

96

6.6.2

Espaces boisés classés...............................................................................

96

6.7

Conclusion.............................................................................................

97

244

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23/02/2022 15:58


Table des matières

Chapitre 7

Artificialisation des sols en France.................................................

99

7.1

Des paysages en mouvement..............................................................

100

7.2

Une artificialisation exponentielle.....................................................

100

7.2.1

Une consommation de l’espace déconnectée des besoins............................

101

7.2.2

À quoi peut être dû ce phénomène de déconnexion ?..................................

102

7.3

Tentatives de réduction de l’artificialisation des sols en France et de protection des espaces naturels................................................

104

7.3.1

Protection des espaces naturels par la voie législative.................................

104

7.3.1.1

Loi « Montagne » et loi « Littoral »...........................................................

7.3.1.2 7.3.1.3

Loi sur le développement des territoires ruraux..........................................

104 105

Vers le zéro artificialisation nette...............................................................

105

7.3.2

Protection des espaces naturels par maîtrise foncière..................................

107

7.3.2.1

Acquisitions du Conservatoire du littoral...................................................

107

7.3.2.3

Zones protégées par les conservatoires régionaux d’espaces naturels.........

108

7.3.3

Schémas d’aménagement et documents d’urbanisme..................................

108

7.3.3.1

SRADDET................................................................................................

108

7.3.2.2

7.3.3.2 7.3.3.3 7.3.3.4 7.3.3.5 7.3.3.6 7.3.3.7 7.3.3.8

Espaces naturels sensibles des départements..............................................

107

Le SRADDET, un document opposable......................................................

109

SCoT et SDRIF.........................................................................................

110

SRCE........................................................................................................ Règlement national d’urbanisme, cartes communales, PLU et PLUi...........

Encadrement de l’urbanisme local............................................................. Projet d’intérêt général............................................................................. Conclusion................................................................................................

110

113 115 116 117

7.3.4

Lois « environnementales ».......................................................................

117

7.3.4.1

Avancées de la loi relative à la protection de la nature...............................

117

7.3.4.3

Charte de l’environnement........................................................................

118

Conclusion................................................................................................

120

7.3.5

Outils réglementaires.................................................................................

120

7.3.5.1

ERC : « éviter, réduire, compenser »..........................................................

120

7.3.4.2

7.3.4.4 7.3.4.5

7.3.5.2 7.3.5.3 7.3.5.4 7.3.5.5 7.3.5.6

Quelle portée de la loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages ?...................................................................................... Loi « Climat et résilience ».......................................................................

117

119

Déclaration d’utilité publique (DUP).........................................................

122

Servitudes.................................................................................................

124

PRIF.........................................................................................................

126

Préemption...............................................................................................

Obligations réelles environnementales.......................................................

123

125

245

RLT_.indb 245

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Réensauvager les territoires

7.4

Acteurs publics.....................................................................................

127

7.4.1

Acteurs publics ayant la maîtrise foncière..................................................

127

7.4.1.1

Agence des espaces verts de la Région Île-de-France.................................

7.4.1.2

127

Conservatoires d’espaces naturels.............................................................

128

7.4.2

Acteurs publics à vocation scientifique, réglementaire ou consultative........

128

7.4.2.1

Office français de la biodiversité...............................................................

128

7.4.2.2 7.4.2.3 7.4.2.4 7.4.2.5 7.4.2.6

Conseil national de la protection de la nature............................................ Commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF)............................................................ Commission supérieure des sites, perspectives et paysages.........................

Commissions départementales des sites, perspectives et paysages...............

129 129 130 130

Conclusion................................................................................................

130

Quelle politique d’aménagement par le réensauvagement en France ?.........................................................................................

133

Chapitre 8

Aménagement du territoire..............................................................

135

8.1

Principes et origines.............................................................................

135

8.2

Quelle échelle ?.....................................................................................

137

8.3

Vers un changement de paradigme...................................................

138

8.4

Aménagement et résilience.................................................................

139

8.5

Tendre vers plus de règles qualitatives.............................................

140

Chapitre 9

Le réensauvagement, explications et applications......................

143

9.1

Une définition.......................................................................................

143

9.1.1

Origines du terme « réensauvagement ».....................................................

144

9.1.2

Les différents courants du rewilding...........................................................

145

9.1.2.1

Pleistocene rewilding................................................................................

Partie 3

9.1.2.2 9.1.2.3 9.1.2.4 9.1.2.5

145

Passive rewilding......................................................................................

146

Rôle des espèces clés de voûte...................................................................

148

Trophic rewilding......................................................................................

148

Et la place de l’homme dans tout cela ?.....................................................

150

9.2

Processus de réensauvagement..........................................................

150

9.3

Réensauvagement vs. gestion..............................................................

152

9.3.1

Exemple de gestion : la réserve naturelle nationale des chaumes du Verniller....................................................................................................

153

Que se passerait-il si le site était laissé en libre évolution ?.........................

154

9.3.2 246

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Table des matières

9.4

Conservation, préservation et réensauvagement............................

154

9.5

Bénéfices du réensauvagement...........................................................

157

9.5.1

Biodiversité...............................................................................................

157

9.5.2

Services écosystémiques............................................................................

158

9.6

Critiques liées au réensauvagement..................................................

160

Chapitre 10

Réensauvagement et espaces naturels.........................................

163

10.1

Caractérisations d’une politique de protection efficace................

163

10.2

Quelques acteurs du réensauvagement en Europe.........................

165

10.3

Réensauvagement et grands espaces.................................................

165

10.3.1

Le pionnier : Oostvaardersplassen, Pays-Bas..............................................

166

10.3.2

Valoriser la déprise agricole : la vallée du Côa, Portugal.............................

166

10.3.3

Intégrer la population locale : les Apennins, Italie......................................

167

10.3.4

Développer une économie locale : le delta de l’Oder, Allemagne et Pologne....................................................................................................

168

10.3.5

Réensauvagement par la non-intervention : le parc national suisse..............

169

10.3.6

Tourisme et vie sauvage : le parc national de la forêt de Bavière.................

169

10.3.7

Le projet d’aménagement forestier de la plaine de Pierrelaye-Bessancourt est-il une opération de réensauvagement ?..................................................

170

10.4

Le réensauvagement par l’infrastructure : un paradoxe..............

172

10.4.1

Les écoponts, outils du réensauvagement ?.................................................

172

10.4.2

La forêt de Soignes est-elle un espace de nature sauvage ?.........................

174

10.4.3

S’inscrit-elle dans un processus de réensauvagement ?...............................

174

10.5

Politiques d’État...................................................................................

175

10.5.1

Objectif 2 % pour l’Allemagne..................................................................

175

10.5.2

5 % pour l’Italie........................................................................................

176

10.5.3

10 % pour la France ?...............................................................................

176

10.5.4

Stratégie de l’Union européenne en faveur de la biodiversité à l’horizon 2030.........................................................................................................

178

10.6

Programme régional d’espaces en libre évolution (PRELE)........

179

10.7

Conclusion.............................................................................................

180

247

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Réensauvager les territoires

Chapitre 11

Friches urbaines et réensauvagement...........................................

181

11.1

Biodiversité urbaine.............................................................................

181

11.2

Retour de la nature en ville : le cas de Dessau (Allemagne).........

182

11.3

Friches urbaines et industrielles : contraintes et opportunités pour les territoires...............................................................................

184

Quelle politique d’aménagement possible en France autour du sauvage ? Quels leviers d’action ?...............................

189

12.1

Stratégie foncière..................................................................................

189

12.2

Zoning ou non-zoning : de l’urbain dense au « sauvage dense », quelle mixité des espaces ?..................................................................

191

12.2.1

Vive l’urbain dense, vive le sauvage dense !...............................................

192

12.2.1.1

Qu’est-ce que la ville ?.............................................................................

Chapitre 12

12.2.1.2

194

Pastilles sauvages et friches réensauvagées...............................................

194

12.2.2

Espaces de continuité écologique et espaces de nature sauvage...................

196

12.2.2.1

Exemple d’aménagement potentiel dans un objectif de réensauvagement, intégrant une dimension paysagère en zone périurbaine.............................

12.2.2.2 12.2.2.3

Infrastructures..........................................................................................

196 199

Équipements et habitations........................................................................

199

12.2.3

À chaque parc urbain son espace de nature sauvage ?.................................

201

12.2.4

À la reconquête des friches urbaines..........................................................

203

12.2.5

À chaque exploitation agricole son espace de nature sauvage ?...................

203

12.2.5.1

Le « volet vert » de la politique agricole commune.....................................

12.2.5.2

Plan biodiversité.......................................................................................

204 206

12.2.6

Forêts publiques (domaniales, départementales, communales…), la part du sauvage.....................................................................................

208

12.2.6.1

À statut différent, mode de gestion différent................................................

210

12.2.6.2

Office national des forêts (ONF)................................................................

210

12.3

Maîtrise foncière..................................................................................

215

12.3.1

Utilité publique de l’espace de nature sauvage...........................................

215

12.3.2

Maîtrise foncière des acteurs associatifs.....................................................

218

12.3.2.1

Réserves de vie sauvage............................................................................

12.3.2.2

12.4 12.4.1

218

Conservatoires d’espaces naturels.............................................................

218

Quelles transcriptions possibles dans les documents d’urbanisme ?.......................................................................................

219

Pour une définition de l’espace de nature sauvage dans les Codes de l’environnement et de l’urbanisme.........................................................

219

248

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Table des matières

12.4.2

Prise en compte des espaces de nature sauvage et de la dynamique du réensauvagement dans les documents d’urbanisme................................

220

12.4.2.1

Document d’orientation et d’objectifs........................................................

220

12.4.2.2

Pour une orientation d’aménagement et de programmation (OAP) « pleine naturalité » obligatoire.................................................................

221

Densification et zéro artificialisation nette : quels outils potentiels ?............................................................................................

221

12.5.1

Certificat de biodiversité............................................................................

222

12.5.2

Vers une densité minimale.........................................................................

222

12.5.3

Vers une réutilisation obligatoire des locaux d’activité non utilisés avant toute nouvelle construction........................................................................

222

12.5.4

Vers une révision de l’ERC........................................................................

223

12.6

Outils du réensauvagement................................................................

223

12.6.1

Quelques adaptations réglementaires..........................................................

224

12.6.1.1

Vers un renforcement du droit de servitude attaché aux espaces naturels.....

12.5

12.6.1.2 12.6.1.3

Vers une extension du droit de préemption.................................................

224 224

Vers une « obligation de réensauvagement »..............................................

224

12.6.2

Espaces de réensauvagement volontaire.....................................................

224

12.6.3

Pour une démarche de contractualisation volontaire type Natura 2000........

225

12.6.4

Un plan de suivi ambitieux comme inventaire du patrimoine naturel...........

226

12.7

Conclusion.............................................................................................

226

Conclusion générale..................................................................................

229

Index........................................................................................................

231

249

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Guillaume Porcheron

Le réensauvagement, ou rewilding, vise à accompagner un espace vers un état plus sauvage, dont l’aboutissement consiste à lui permettre de retrouver son fonctionnement naturel. Il peut être mis en place à l’échelle de la ville (friches urbaines…) comme à des échelles plus vastes (forêts, réserves naturelles…). Cet espace, juridiquement non défini, est fréquemment incompris, mythifié, s’opposant a priori à la notion d’aménagement du territoire. Aujourd’hui, le réensauvagement suscite un intérêt croissant qui se heurte souvent à un manque d’outils pour être mis en pratique. Ce guide comprend à la fois un volet théorique qui permet de comprendre le réensauvagement et un volet pratique qui présente des études de cas et des propositions concrètes pour prendre en compte, développer ou recréer des espaces de nature sauvage et les intégrer pleinement dans les politiques d’aménagement et d’urbanisme. Ainsi, cet ouvrage : – définit l’espace de nature sauvage ; – fournit les clés pour qu’il soit pris en compte dans les politiques d’aménagement et détaille les formes que pourrait prendre l’expansion volontariste de ces espaces ; – propose des transcriptions possibles dans les documents d’urbanisme pour les mettre en œuvre ; – explique les bénéfices en termes de qualité de vie, d’évolution des paysages, de développement de la biodiversité que ces espaces peuvent apporter ; – expose les conséquences économiques sur le territoire. Les aménageurs, urbanistes, environnementalistes, écologistes et écologues, ainsi que le législateur qui s’intéresse de façon croissante aux problématiques environnementales y trouveront tous les outils pour comprendre, planifier et mettre en œuvre le réensauvagement.

Guillaume Porcheron Anciennement responsable du développement durable pour la ville de Vélizy-Villacoublay puis responsable de l’aménagement du territoire pour la communauté d’agglomération de Versailles Grand Parc, Guillaume Porcheron déploie le programme Petites villes de demain pour la communauté de communes Val-deGâtine. Diplômé d’un Master en développement durable et d’un Master en urbanisme et aménagement, il a enseigné en école de commerce et à l’université Paris-Dauphine.

13291_Hcoll_Porcheron_couv.indd 1

RÉENSAUVAGER LES TERRITOIRES Comprendre - Planifier - Mettre en œuvre

RÉENSAUVAGER LES TERRITOIRES

RÉENSAUVAGER LES TERRITOIRES

Guillaume Porcheron

ISBN 978-2-281-13523-7

18/02/2022 12:34


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