Magazine IT n°923

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INTELLIGENCES

Cellules souches embryonnaires. Elles prolifèrent en culture et sont capables de générer des cellules de tout type de tissu.

nent à différencier des cellules souches embryonnaires en d’autres plus spécialisées », assure Sébastien Duprat, responsable des partenariats du laboratoire de l’Institut des cellules souches pour le traitement et l’étude des maladies monogéniques (I-Stem). À terme, les cellules souches issues d’embryons humains pourraient, en laboratoire, être transformées en cellules du cœur, du foie, du cerveau… Il suffirait de leur insérer des gènes anormaux pour produire des lignées de cellules malades. Produites en masse, elles serviraient de cobayes aux industriels de la pharmacie pour mettre au point les médicaments de demain.

bsip ; D.R.

ccL’avis De

PhiLiPPe menasché chirurgien au centre hospitalier georges pompidou

C’EST uNE ErrEur GroSSIèrE dE CroIrE quE LES CELLuLES SPI voNT rEmPLaCEr LES CELLuLES SouChES EmbryoNNaIrES Pour La rEChErChE.

Les promesses des cellules souches semblent infinies. Elles pourraient permettre de vérifier l’innocuité des produits cosmétiques. Des réserves de molécules pourraient aussi être constituées, telles que l’insuline, . « Cette molécule soignant le diabète serait alors disponible à plus grande échelle », explique Serge Braun, directeur de l’Association française contre les myopathies (AFM). Autre exemple, l’équipe du chirurgien Philippe Menasché, du centre hospitalier Georges Pompidou, a créé des cellules précurseurs du cœur avec l’espoir de créer des thérapies contre l’insuffisance cardiaque.

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Des craintes De Dérives

Mais toutes ces promesses cachent des failles. Pour les applications médicales, les greffes à base de cellules souches seront accompagnées de thérapies immunosuppressives pour éviter les rejets, « ce qui fragilisera les patients », pointe Philippe Menasché. Surtout, les cellules embryonnaires ont tendance à former des tumeurs… que l’on ne sait pas contrôler. Sur le plan éthique, la question sensible du statut de l’embryon n’est pas tranchée. Un point reste en suspens: à partir de quand considérer qu’un embryon est un individu à part entière, ne pouvant être exploité? Pour l’Église catholique, dès la fécondation entre un ovule et un spermatozoïde, il y a

individu. « Beaucoup d’États choisissent le quatorzième jour après la fécondation, lorsque la formation de jumeaux est devenue impossible », répond Sébastien Duprat. En France, la loi de bioéthique interdit pour l’instant leur utilisation, à l’exception de quelques laboratoires. Ces rares élus peuvent les utiliser à trois conditions: que les embryons soient issus de procréations assistées, qu’ils n’entrent plus dans aucun projet parental et… qu’ils soient importés. Cette dernière condition laisse de côté « quelque 2500 embryons surnuméraires conçus chaque année en France », estime Claude Burlet, professeur au Comité consultatif national d’éthique (CCNE). Autre crainte de dérive: « les sociétés privées peinent à comprendre qu’on ne peut pas faire de bénéfices sur des embryons donnés gratuitement par les parents », note Claude Burlet. Sans parler du danger réel, commun à tout type de commerce, d’apparition d’un marché noir de cellules souches embryonnaires.

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L’avenir au génétiquement moDifié ?

Une solution se dessine depuis peu, mais sans totalement convaincre. C’est la cellule souche pluripotente induite (SPI). Le principe: on force une cellule adulte à revenir au stade embryonnaire, en lui transférant des gènes de virus. Actuellement, on arrive « à reprogrammer une cellule sur 100000 », estime Sébastien Duprat. Bon point: pour les nouvelles thérapies, « le risque de rejet du greffon est quasi-nul, puisqu’il s’agit d’une des propres cellules du patient », se réjouit David Sassoon, directeur du projet européen de recherche sur les cellules souches Endostem. Mais elles ne résolvent pas entièrement le casse-tête éthique. D’abord, il existe un risque de clonage dans la mesure où, à partir des cellules d’un individu, on peut créer un génome identique. Mais, en plus, les cellules IPS sont censées éviter le recours à l’embryon. Or, pour comprendre leur fonctionnement, les chercheurs réclament le droit d’étudier les cellules embryonnaires. Le serpent se mord la queue. C’est à la loi qu’il reviendra de le maîtriser. cm ccDiana SemaSka redaction@industrie-technologies.com

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