
Scarlett
Johansson
Aimee
Lou
Mode
Elégances raffinées





















Scarlett
Johansson
Aimee
Lou
Mode
Elégances raffinées
N°24/Juin-Juillet-Août 2025
12. Tendances. Le talon tombe de haut.
«J’aime être dans mes pensées, sans me soucier de ce que les autres pensent de moi. Je n’aime pas être complexée».
20.Daniel Morin. «Je veux éviter l’humour facile, blessant, stigmatisant».
«J’adore les relations dysfonctionnelles».
26. Anaëlle Tourret. Eloge de la harpe.
Photographies Louis Decamps
48.Des gens que j’aime… Gilles Clément.
50. Julia Sedefdjian. «Dans le Sud, nous avons les meilleurs produits du monde».
«Le meilleur des collections haute couture printemps-été 2025.
65. Les trésors d’Olwen Forest. Marvellous Melody Jewels
Pour suivre au quotidien toute l’actualité parisienne, retrouvez-nous sur notre site internet www.palacescope.com en scannant directement ce QR Code
Magazine édité par la société
c o s t e s E D I T I O N S
RÉDACTION
Fondateur
Claude Maggiori
Rédactrice en chef
Anne Delalandre
Direction artistique, maquettes Christian Kirk-Jensen
Secrétariat de rédaction Philippe Bottini
Secrétaire administrative Dolorès Gonzalez
Assistante mode Noémie Jalu
Ont collaboré à la rédaction : Séraphin Bonnot, Alice de Chirac, Anne Delalandre, Sabine Euverte, Sandra Hirth, Noémie Jalu, Marie Jérémie, Patrica Khenouna, Juliette Michaud, Ellen Willer.
Photographies : Vittorio Zunino Celotto, Louis Décamps, Roch Debache Eric Legret, Lisa O’Connor, Frédéric Poletti.
PUBLICITÉ
Costes Editions, 340 rue Saint-Honoré, 75001 Paris
Direction commerciale : Marianne Tran 0620997757 mariannetran@palacescope.com
IMPRIMERIE
Imprimé en France, Aubin Imprimeur, Ligugé (86)
Suivi fabrication Annick Torrès (Les Conseils du Héron)
Tous les papiers utilisés dans cet ouvrage sont issus de forêts gérées durablement, labélisés 100% PEFC, ayant un Ptot de 0,01.
PHOTOGRAPHIE DE COUVERTURE
Louis Décamps
Directrice artistique Anne Delalandre. Mannequin Barbara Shilova (Premium Models). Styliste Timothé Grand-Chavin Coiffeur Jean-Luc Amarin. Maquilleuse Akari Sugino (STV). Casting V&Y Casting. Assistant photographe Paride Camasso Assistant styliste Fantin Heiberg. Assistante mode Noémie Jalu. Assistante Noée Féval
Barbara porte une robe à volants imprimée, Louis Vuitton, des colliers «Torque Byzance», «Candies» et «Croix Baroque», une bague «Candies», des boucles d’oreilles «Gio» et manchettes «Byzance» et «Byzantine», larimars, malachites et amazonites dorés à l’or fin, øSylvia Toledano. (Photographie retouchée)
Passionné par les voyages, la mer et le surréalisme, le photographe Louis Décamps aime imaginer que ses images évoquent des situations insolites, tout un univers singulier mêlant mode, humour et poésie. Tous en Seine, la série de ce numéro d’été, a été réalisée en bord d’un petit bras de la Seine, à Poissy, où l’eau et le temps s’écoulent avec lenteur. Connu pour y avoir accueilli Claude Monet à la fin du XIXe siècle, c’est encore aujourd’hui un joli coin paisible et verdoyant, au charme suranné. Un petit port abrite une vingtaine de péniches. Nous avons aimé le contraste de ces barques vieillies par le temps et le style chic et élégant composé par Timothé Grand-Chavin, mêlant pièces de créateurs et silhouettes de grandes maisons. Barbara Shilova, de l’agence Premium, apporte la distinction indispensable aux mises en scène, offrant à cette série mode un charme subtil et décalé.
ANNE DELALANDRE
Le talon tombe-t-il de haut ? Ce symbole absolu d’une féminité assumée, longtemps considéré comme l’accessoire sensuel suprême, perd-il de son pouvoir d’attraction ? La mode des stilettos de 10 ou 12 centimètres semble doucement s’éloigner, comme le signe d’un vieux monde où les femmes devaient être fragiles pour être désirables. Les sociologues constatent le phénomène de déclin des talons très hauts depuis la fin de l’épidémie de Covid, qui a mis au centre de la société française les notions de naturel et de confort. Mais qu’en est-il des nouveaux modes de séduction ? Le sexy serait-il en train de devenir ringard ? Ou, plus sûrement, assistons-nous à des versions renouvelées du charme et de la séduction ?
Historiquement, les talons hauts ont d’abord été inventés pour des raisons pratiques… et pour les hommes : dans l’Egypte ancienne, les bouchers en portaient pour éviter de se salir les pieds avec le sang des animaux qu’ils venaient d’abattre. Certains cavaliers de l’Antiquité utilisaient leurs talons renforcés pour bien se caler sur leurs étriers. Dans la Rome Antique, ce sont les prostituées qui se distinguaient des autres femmes par la hauteur de leurs talons. Les courtisanes japonaises et les concubines chinoises portaient elles aussi des chaussures surélevées. Aux XVe et XVIe siècles, dans la cité-Etat de Venise, les prostituées, protégées et encadrées par le gouvernement de la Sérénissime, se hissaient pour être immédiatement remarquées dans la foule sur des talons plateformes qui pouvaient atteindre 30 cm, connus sous le nom de «chopines». Le roi Louis XIV, qui était plutôt petit, portait des souliers à talons ornés de boucles de diamants pour paraître plus grand. Mais, à la cour du Roi-Soleil, seuls les courtisans étaient autorisés à porter des talons hauts, avec des semelles rouges. Au début du XXe siècle, les militantes féministes, les suffragettes, parcouraient les rues de l’Angleterre avec des bottes à boutons dotées de hauts talons. D’autres s’adonnaient même à des activités physiques, comme le tennis, en portant des chaussures de sport à hauts talons ! L’escarpin revient au début des années 1950 : souvenez-vous de Marilyn Monroe, Sophia Loren, Jayne Mansfield… Bientôt le talon aiguille ou le stiletto se retrouvent sur tous les podiums des grands couturiers italiens (Salvatore Ferragamo, André Perugia) et français
(Christian Dior, Roger Vivier) et deviennent les chouchous de toutes les bimbos du monde comme des starlettes hollywoodiennes. Aujourd’hui, les très hauts escarpins n’ont plus la cote (depuis quatre ans, les ventes ont chuté de plus de 60 %), les talons sont désormais plus modestes, moins hauts,plus carrés. Les femmes découvrent les charmes des slingbacks plats (Jacquemus, Dior, Coperni), des tabis (Margiela en collaboration avec Louboutin), des ballerines en version résille, en daim, avec un petit nœud ou ornées de perles (Dior, Versace, Fendi…), des babies (Céline, Dior…), des sandales fisherman (Gucci, Loro Piana), des derbies, des spartiates (Dior, Isabel Marant), des chaussures bateau, des mocassins, mules, kitten heels, santiags, cuissardes, talons à bride sur la cheville, sabots, jelly shoes… et même des tongs à petits talons ou décorées de bijoux (Gucci, Bottega Veneta, Giuseppe Zanotti).
Le talon aiguille de 10 centimètres reste encore populaire dans les milieux de la finance et du droit,les femmes travaillant dans la culture ou la création préférant les talons moins hauts, les talons larges, les chaussures avec une bride autour de la cheville, les bottes plates… Selon une étude publiée en France, en février 2025, 30 % des femmes portent des talons de 6 cm et plus, 8 % n’en portent jamais et 60 % des femmes portent des petits talons de 2 cm. OSCAR LÉON
ENGLISH TEXT. Are high heels losing their allure? Once the ultimate symbol of confident femininity, the 10–12 cm stiletto seems to be fading, a relic of a time when women had to appear fragile to be desirable. Since the pandemic, comfort and naturalness have taken center stage in French society. But does this mean sexy is outdated—or simply evolving? Historically, high heels were practical—and male: Egyptian butchers, ancient horsemen, Roman and Asian courtesans all wore them. In 15th-century Venice, prostitutes stood out on 30 cm “chopines.” Louis XIV used heels to boost his height, reserving red soles for nobles. By the 1950s, stilettos made a glamorous comeback—Marilyn, Sophia Loren... Now, sales of very high heels are down 60%. Women favor lower, chunkier heels or alternatives: slingbacks, tabis, ballerinas, fisherman sandals, loafers, kitten heels, and even jeweled flip-flops. In 2025, 30% of French women wear heels over 6 cm, 60% wear small heels, and 8% never wear any.
«J’aime être dans mes pensées, sans me soucier de ce que les autres pensent de moi. Je n’aime pas être complexée»
Scarlett Johansson est la seule femme à avoir été classée deux fois «la femme vivante la plus sexy du monde», par le magazine américain Esquire, en 2006 et 2013 : cela pose une personne, et, qui plus est, une actrice, dans la catégorie des plus sensuelles icônes hollywoodiennes. Mais Scarlett est bien plus que cela, c’est une actrice fascinante par son charisme et les choix, éclectiques, de ses rôles. Scarlett Johansson est un type de femme pulpeuse mais moderne, populaire mais intransigeante. «Les gens qui décident ce genre de choses et les lecteurs qui y croient font un amalgame de pas mal de choses. Je suis actrice et je fais des publicités pour du maquillage. Du coup, on me voit souvent sous mon meilleur jour. Mais, quand je rentre chez moi, ma beauté disparaît sur un coton avec du démaquillant. Dans la vie de tous les jours, je suis loin d’être glamour, et, quand je sors de chez moi, je me fais la plus discrète possible.» Mais rien ne peut effacer les succès et les colossales recettes : la star Scarlett Johansson est la deuxième actrice la plus rentable de tous les temps, avec plus de 14 milliards de dollars de recettes mondiales. Seul Samuel L. Jackson la dépasse au box-office… Miss Johansson n’est pas simplement un très beau physique et une actrice bankable, elle a aussi un caractère bien trempé. L’année dernière, lorsque ChatGPT a copié sa voix à son insu pour son nouveau chatbot, Sky, sa réaction a été immédiate et violente : «Quand j’ai entendu la démo publiée, j’ai été choquée, en colère et incrédule que Sam Altman (le patron de ChatGPT) ait mis au point une voix ressemblant si étrangement à la mienne que mes amis les plus proches et les
médias ne pouvaient pas faire la différence.» Le grand manitou de l’intelligence artificielle a dû lui présenter des excuses officielles et a été contraint, penaud, de ranger piteusement Sky au placard des mauvaises idées…
En 2021, la star a porté plainte contre Disney, qui, profitant de la confusion provoquée par la pandémie, proposait de sortir en streaming, en parallèle de la sortie en salle, Black Widow, réalisé par l’Australienne Cate Shortland, où elle tient le rôle principal : Mickey et Picsou ont finalement plié et ont été obligés de verser 40 millions de dollars à la belle intraitable.
Miss Scarlett Johansson, 40 ans, signe astrologique Scorpion, peut aussi parfois être hautaine : elle a eu des mots très durs contre les Français, et plus particulièrement les Parisiens. En 2014, de passage dans «The Late Show», l’émission de David Letterman, elle s’est permis de déclarer : «J’ai fait le grand saut en allant vivre là-bas. Paris, c’est magnifique, j’adore. Mais toutes ces choses que je trouvais séduisantes au départ, maintenant, m’agacent vraiment. Je n’ai pas envie de me mettre toute une nation à dos, mais il y a plein de petites choses qui m’énervent. Quand je suis arrivée, au début, je pensais que tout ce qu’on disait sur la grossièreté et l’impolitesse des Parisiens était faux. Vous savez, les gens ne sont pas impolis, ils sont merveilleux… Mais ça, c’était avant que je ne m’installe à long terme à Paris. Depuis, les gens se sont dit que, puisque j’avais décidé de rester, ils pouvaient redevenir eux-mêmes, c’est-à-dire grossiers ! J’habite sur la rive gauche, c’est près du Quartier latin. J’aime me promener, mais c’est frustrant, parce que les gens, là-bas, n’ont pas… Je veux dire, je suis de New York et je suppose que je suis une marcheuse extraordinaire parce que je suis de New York : c’est une danse merveilleuse dans la rue, c’est une chorégraphie, de marcher dans la rue. Quand je suis arrivée là-bas, j’ai pensé
que c’était une ville de province, comme s’ils ne savaient pas marcher, les gens ne marchent pas, ici… Maintenant, je me contente de les fixer du regard… J’ai commencé à devenir très agressive avec les gens. Et je m’en fiche ! Je suis une super-héroïne, n’est-ce pas !» Divorcée du français Romain Dauriac en 2017, Scarlett est finalement retournée marcher avec élégance dans son pays natal…
L’actrice s’est fixé une ligne de conduite : préserver son identité et son intimité. Quitte à aller à contre-courant de l’industrie du cinéma qui pousse désormais les acteurs à s’exposer toujours plus. Johansson refuse d’apparaître sur les réseaux sociaux : elle n’est présente ni sur Facebook ni sur Instagram, Twitter ou TikTok. «Mon cerveau est trop fragile pour gérer ces outils», expliquait-elle il y a quelques mois au podcast «The Skinny Confidential». Elle se comparait même à «une fleur délicate». Dans une interview au magazine américain InStyle, elle a déclaré : «Je reçois beaucoup de pression pour rejoindre les réseaux sociaux. Ça me fait réfléchir… Y a-t-il un moyen de le faire tout en restant fidèle à moi-même ? Tout mon travail est basé sur la vérité. C’est l’ingrédient clé. Si j’étais quelqu’un qui appréciait vraiment les réseaux sociaux, je pourrais tout à fait me lancer. Mais ce n’est pas le cas.» Johansson est déterminée à préserver jalousement sa vie privée : aucune chance qu’elle poste des clichés de ses enfants, Rose, 10 ans, la fille qu’elle a eue avec son ex-mari français, Romain Dauriac, et Cosmo, 3 ans, son fils, avec son mari actuel, l’humoriste Colin Jost. Scarlett Johansson explique aussi pourquoi elle refuse toujours obstinément de prendre des photos avec ses fans en public. «Cela offense beaucoup de gens. Ça ne veut pas dire que je n’apprécie pas, bien sûr, que les gens soient fans ou heureux de me voir. Mais je dis toujours aux gens : “Je ne travaille pas.” Cela signifie que je ne veux pas être identifiée comme étant présente à ce moment précis et à cet endroit précis avec vous. Je fais mon truc… J’aime être dans mes pensées, sans me soucier de ce que les autres pensent de moi. Je n’aime pas être complexée.»
Quand elle veut quelque chose, Scarlett Johansson l’obtient. Et elle désirait absolument faire partie de la saga Jurassic Park. «Je suis une fan absolue du premier volet, a-t-elle confié il y a quelques mois au site ComicBook. C’est un des premiers films que je me souviens avoir vus au cinéma, et il m’avait bouleversé. A tel point que cela fait dix ans que j’essaie de rejoindre la franchise de toutes les façons possibles. Je leur disais : “Je suis prête à mourir dans les cinq premières minutes, à être dévorée par ce que vous voulez, ou même à faire la popote sur le plateau”…» Dans une interview à Vanity Fair, elle a encore insisté, impatiente qu’elle était de rejoindre la franchise. «J’étais vraiment fan du premier film, et j’ai dormi pendant un an entier dans une tente Jurassic Park dans la chambre que je partageais avec ma sœur. Dès que les professionnels annonçaient un nouveau film de la saga Jurassic, je le transmettais à mes agents pour leur dire : “Hé, je suis disponible !”» Sa ténacité a été récompensée : on va la voir en juillet dans la suite intitulée Jurassic World : La Renaissance, réalisée par Gareth Edwards, où elle tient même le rôle principal.
Scarlett Johansson est aujourd’hui actrice, réalisatrice, scénariste, productrice et… chanteuse. Et toujours une des plus belles femmes du monde. SÉRAPHIN BONNOT
ENGLISH TEXT. Scarlett Johansson is the only woman named “Sexiest Woman Alive” twice by Esquire (2006, 2013), cementing her place among Hollywood’s most sensual icons. Yet she’s far more than a pretty face—her charisma and eclectic roles make her a captivating, modern, and uncompromising actress.
“People confuse things,” she says. “I’m an actress, I do makeup ads, so people see me at my best. But at home, my beauty comes off with a cotton pad.” Glamorous or not, she’s the second highest-grossing actress in history—$14B worldwide—just behind Samuel L. Jackson.
She’s known for her strong will. In 2023, when ChatGPT launched a voice eerily close to hers, she reacted fiercely: “I was shocked and angry.” OpenAI’s CEO had to apologize and suspend the voice. In 2021, she sued Disney for releasing Black Widow online, violating her contract. Result: $40M in compensation.
Scarlett, now 40 and a Scorpio, can be blunt. In 2014 on The Late Show, she criticized Parisians, calling them rude and saying they didn’t know how to walk. Once charmed by the city, she grew disillusioned after living there: “At first, I thought Parisians were wonderful. Then they realized I was staying and became their true rude selves.”
After divorcing French journalist Romain Dauriac in 2017, she returned to New York.
Fiercely private, she shuns social media: “My brain is too fragile for it,” she told The Skinny Confidential podcast, likening herself to “a delicate flower.” She refuses to share photos of her children—Rose, 10 (with Dauriac), and Cosmo, 3 (with husband Colin Jost)—or take selfies with fans. “It offends some people, but I tell them, ‘I’m not working.’ I want to be present, in my own thoughts.”
Determined and persistent, Scarlett chased one dream for ten years: joining the Jurassic Park saga. “I told them I’d die in five minutes or cook on set!” A childhood fan who once slept in a Jurassic Park tent, she finally got her wish. This July, she stars in Jurassic World: The New Era by Gareth Edwards.
Actress, director, writer, producer, singer—Scarlett Johansson remains one of the most talented and striking women in Hollywood.
«Je veux éviter l’humour facile, blessant, stigmatisant»
De prof de yoga au Club Med à la radio la plus écoutée de France, il y a eu quelques petits pas, certains tout droit et d’autres de côté… Cette année, Daniel Morin célèbre ses 20 ans sur France Inter, signe pour une nouvelle saison comme maître de cérémonie de la tournée des jeunes humoristes de la station et, pour la première fois, monte sur scène en solitaire avec Ta gueule, Esteban. «J’ai démarré par un reportage à propos de l’éboulement d’une falaise sur la plage de la Petite Chambre d’amour au Pays basque. Première fois que je me servais d’un Nagra, le magnéto avec lequel on enregistrait, qui pesait un âne mort. Je me suis dit : “C’est sympa, je vais continuer.” J’étais persuadé que, pour travailler à la radio, il fallait avoir fait de hautes études spécialisées. Je ne savais pas à l’époque qu’on pouvait avoir une carte de presse sur la bonne foi de son patron.»
Sur Ouï FM, engagé à la rédaction, il devient le binôme du journaliste qui assurait les flashs du 6 h-9 h et du 17 h-20 h. «J’ai rencontré Frédéric Martin, que j’ai rejoint pour une heure d’humour le soir à 23 heures. J’ai dû lâcher l’info, je n’étais plus crédible… Dans l’émission qu’il a animée ensuite, “Le Monde de monsieur Fred”, j’ai mieux compris ce que j’aimais vraiment faire.» Il rejoint France Inter, en décembre 2005, pour «Le Fou du roi», l’émission d’info et d’humour animée par Stéphane Bern. «Quand il est parti à RTL, je devais le suivre. Mais je n’ai pas eu envie de quitter France inter.» Pourquoi ? «La liberté. Jamais aucun de mes papiers n’a été relu. Pas d’annonceur, pas de tunnel de pubs. Un esprit…» Isabelle Giordano reprend le créneau de Stéphane Bern pour une émission qui devait être 100 % féminine. Elle aime pourtant l’idée d’intégrer Daniel Morin. «France Inter est devenue ma maison. Il y a eu ensuite Frédéric Lopez, et puis Nagui… jusqu’à aujourd’hui.»
Depuis quatre ans, c’est lui qui emmène les jeunes humoristes de la station en tournée : «J’aime bien ce rôle de maître de cérémonie. Au début, je me suis contenté de les annoncer. Le producteur, Christophe Meilland, m’a proposé de rester une peu plus longtemps sur scène entre chaque intervention. Jusqu’au jour où il m’a demandé quand j’allais faire mon propre spectacle. Ça a un petit côté proxénète, un producteur… J’ai d’abord refusé. Il a insisté, et il m’a mis un doute : “Peut-être qu’un jour tu le regretteras ?” Il n’avait pas tort. J’ai dit d’accord !» C’était il y a six mois, et Daniel Morin n’avait rien : «Pas un mot, pas une idée. Je savais seulement que je voulais éviter l’humour facile, blessant, stigmatisant.» Il décide de tirer un fil rouge, lui-même, ou plutôt le personnage un peu caricatural de ses chroniques quotidiennes : un homme de son âge, la cinquantaine, qui tente de se déconstruire et réagit à tous les sujets à l’ordre du jour : «Le genre, l’écologie, le climat, les injonctions du moment… Ce sont des questions intéressantes. Plus j’y travaille, plus j’approfondis, et plus je me laisse convaincre. Ça me transforme un peu. Bon, pas sur
tout : ma fille de 11 ans m’a balancé récemment, en racontant à tout le monde que “(son) père (était) un pollueur qui jette ses clopes dans le caniveau”...» C’est pour sa fille qu’il entend bien aménager sa tournée en fonction des jours où elle est chez lui : «Je l’ai du jeudi au dimanche... je ne vais tout de même pas lui faire manquer l’école sous prétexte que son père est humoriste !» En avril, les premiers rodages de son seul-en scène, Ta gueule, Esteban, ont eu lieu au Point Virgule : «C’est vraiment grisant, les rires de toute une salle. A la radio, on a un million d’auditeurs, mais on ne les voit pas. Sur scène, ils sont beaucoup moins, mais ils sont là.» Il reprend le 13 septembre, une fois tous les quinze jours jusqu’à Noël. Après, c’est le grand départ. Son nouveau départ. Propos recueillis par ELLEN WILLER
ENGLISH TEXT. From Club Med yoga teacher to France’s most-listened-to radio, Daniel Morin marks 20 years at France Inter. He leads the station’s young comics tour and debuts solo onstage with Ta gueule, Esteban. He began with a cliff-collapse report in Basque Country: “I thought radio required top studies—I didn’t know your boss could just vouch for you.” At Ouï FM, humor replaced news, leading to France Inter in 2005. “I stayed for the freedom— no ads, no scripts.” Now hosting young talents, a producer urged him to try his own show. Six months ago, he had nothing—now he plays a 50-something man grappling with gender, climate, and norms. “It’s changing me… a bit.” He plans shows around his daughter’s custody days: “She won’t miss school for comedy!” Live laughter, he says, beats a million unseen radio listeners.
«J’adore les relations dysfonctionnelles.
Je suis très interessée par le travail de la psychothérapeute belge Esther Perel, qui parle de la pression actuelle, plus forte que jamais, sur les relations amoureuses»
Renouvelée pour une quatrième saison, The White Lotus (saison 3 à voir sur Canal+ et HBO Max) est devenu une référence. Le principe de cette comédie ultra-noire et terriblement addictive, créée par Mike White, est simple. Amener à chaque fois un groupe d’acteurs différents dans un nouveau resort de luxe, appartenant tous à la chaîne imaginaire des hôtels White Lotus. Découvrir le nouveau casting fait partie de la jubilation. Cette fois, l’action se déroule en Thaïlande, et si toute la nouvelle troupe d’acteurs est formidable (Charlotte Le Bon est géniale), le cœur battant de cette saison 3, c’est elle, Aimee Lou Wood, craquante comédienne anglaise de 31 ans révélée par Sex Education sur Netflix. Signe particulier ? De charmantes dents en avant qui la rendent ultra-sexy, moderne et sympathique. Alors que tout le monde lui suggérait de les faire refaire, elle, au contraire, diplômée de la Royal Academy, en a fait son atout chic et choc. Son sourire ? Une bouffée d’air frais. Son talent crève l’écran. Dans cette saison 3, elle joue Chelsea, en couple avec Rick, un homme plus âgé, incarné par Walton Goggins. Avis aux fans : les deux acteurs pourraient se retrouver dans un nouveau projet… Autre gros projet annoncé pour celle qui monte à toute allure à Hollywood : Anxious People, un thriller de prise d’otages de Marc Foster avec Angelina Jolie. En attendant, l’espiègle et irrésistible Aimee revient pour nous sur la série qui a rendu le monde entier amoureux d’elle.
Dans The White Lotus, Walton Goggins et vous jouez un couple mystérieux, un duo hors du commun… Rick, son personnage, a une raison pour faire ce voyage, mais Chelsea, mon personnage, ne la connaît pas. Elle s’est embarquée alors qu’elle ne sait pas vraiment ce qu’est le White Lotus Resort. Elle se dit juste :
“Whoa, qu’est-ce que c’est que ce monde de fous ?”, car elle n’en fait pas partie. Au fil de l’histoire, elle va découvrir pourquoi elle fait réellement ce voyage avec Rick. Chelsea est une invitée atypique et elle est là pour des raisons étranges. C’était bien sûr très excitant à jouer.
Quel est le lien profond qui les unit ?
Rick est plutôt insaisissable. Mais ce qui rapproche deux personnes est souvent un mystère. Ils ont une vraie connexion profonde, au-delà du verbe et du sexe. Je pense qu’ils ne se connaissent que depuis deux ou trois ans, et que c’est clairement Chelsea qui a fait le premier pas… L’amour est toujours sauvage ?
Absolument, et c’était tellement libérateur de ne pas analyser cette relation en permanence. J’adore les relations dysfonctionnelles. Je suis très intéressée par le travail de la psychothérapeute belge d’origine polonaise Esther Perel, qui parle de la pression actuelle, plus grande que jamais, sur les relations romantiques. Mais là, j’ai juste accepté l’idée que Chelsea était convaincue, sans l’ombre d’un doute, que Rick est son âme sœur. J’ai moi aussi ce côté candide. C’est comme ça, l’univers les a réunis, et même si les preuves semblent parfois aller dans une autre direction, elle sait au fond d’elle-même que rien ni personne ne peut ébranler cette certitude. Ils sont toujours plus tendus le matin, mais, à la fin de la journée, il y a une forme de sérénité. Car Rick n’est vraiment pas du matin ! (Rires.)
Vous avez beaucoup répété ensemble ?
Non, pas une seconde ! On a juste déjeuné ensemble, sur la terrasse… Pas de stress, juste deux humains qui ont tilté, comme si nous nous étions connus dans une vie antérieure. Soleil en Scorpion, Lune en Scorpion…
On a parlé de tout sauf du projet, en fait. Et c’est là que Mike White montre
sa différence. Il a un instinct incroyable pour le casting. Il n’y a pas de tests pour voir qui possède assez d’alchimie avec tel autre, il choisit simplement en fonction de son instinct. Quelqu’un m’a même dit que, si Walton n’avait pas joué Rick, je n’aurais pas eu le rôle de Chelsea… C’était un duo destiné à exister. Chelsea est la personne dysfonctionnelle parfaite pour Rick ! The White Lotus touche des thèmes existentiels. En même temps, et c’est ce qui est super jubilatoire, tout passe par des personnages vains et vaniteux… La série nous donne l’occasion de détester les riches … C’est à la fois drôle et fascinant, de voir le vernis de gens superficiels craquer, soudain confrontés à des situations personnelles très déstabilisantes. Montrer la nature humaine dans ce qu’elle a de moins reluisant est forcément fascinant, pour les téléspectateurs et bien sûr pour les acteurs. Cette histoire où rôde toujours la mort, mais où l’amour est là malgré tout, révèle, pour moi, l’affrontement éternel du destin contre le libre arbitre. Jusqu’à quel point notre vie est-elle prédestinée ? Où commence notre liberté de choix ? Certaines failles, comme l’orgueil, sont-elles irréversibles ? Aurions-nous pu prendre un autre chemin ? Réaliser que chacun a toujours le choix est très excitant. Quoi que je fasse maintenant, et même si je n’ai aucun plan de carrière, le personnage de Chelsea dans The White Lotus va rester un rôle clé dans mon parcours.
Propos recueillis par JULIETTE MICHAUD
«Quoi que je fasse maintenant, et même si je n’ai aucun plan carrière,dele personnage de Chesea dans The White Lotus va rester un rôle clé dans mon parcours»
ENGLISH TEXT. Renewed for a fourth season, The White Lotus (season 3 on Canal+ and HBO Max) has become a cult favorite. The premise of Mike White’s darkly comic, addictive series is simple: each season follows a new group of guests at a different luxury White Lotus resort. This time, we’re in Thailand, and while the entire cast is excellent (Charlotte Le Bon shines), the heart of season 3 is Aimee Lou Wood. The charming 31-year-old English actress, known from Sex Education, captivates with her signature forward teeth—once seen as a flaw, now her unique asset. A Royal Academy graduate, she turned down pressure to «fix» her smile, making it part of her offbeat charm.
In The White Lotus, she plays Chelsea, who travels with older partner Rick (Walton Goggins). “Rick has a reason to be there—but Chelsea doesn’t know it,” she says. “She’s baffled by the madness of this place.” Their bond is deep, intuitive. “They’ve known each other maybe two or three years. Chelsea definitely made the first move.”
Wood loves messy relationships. “Esther Perel says modern couples face huge pressure. Chelsea believes Rick is her soulmate—no doubt, no proof needed. It’s wild love.”
She and Goggins barely rehearsed: “We just had lunch. No stress, just a weird soul connection. Scorpio sun and moon for both.” Mike White, she says, casts by instinct. “Without Walton, I might not have been Chelsea.”
The show mixes vanity and existential dread. “It’s about death, wealth, ego, free will. Do we really choose our paths? Chelsea will remain a key role in my life, whatever comes next.”
Avec ses sonorités délicates et féeriques, la harpe a conquis une place à part dès l’Antiquité. «On en trouve en Mésopotamie et en Egypte ancienne. Sa facture n’a eu de cesse d’évoluer au fil du temps pour trouver son apogée avec la harpe à pédales au tout début du XXe siècle. Cela a suscité l’intérêt de compositeurs qui ont redécouvert l’instrument : Fauré, Ravel, Debussy, Mahler et Richard Strauss, jusqu’à nos jours», s’enthousiasme Anaëlle Tourret, une de nos plus grandes harpistes françaises. Issue d’une famille de musiciens, la jeune trentenaire a été récompensée de plusieurs prix au concours international de harpe en Israël en 2015, puis lauréate du prix Berenberg en 2019. Formée au conservatoire à rayonnement régional de Paris auprès de Ghislaine Petit-Volta et Nicolas Tulliez, elle effectue ensuite un master à Hambourg dans la classe de Xavier de Maistre, soliste renommé après dix ans passés au Philharmonique de Vienne. En 2018, elle remporte le concours de première harpiste soliste au NDR Elbphilharmonie Orchester, dont les concerts ont lieu dans l’imposante et moderne Elbphilharmonie de Hambourg. «Cette salle est phénoménale, un moteur de tous les jours pour chercher un son, une couleur, une énergie.»
Anaëlle y a réalisé le premier enregistrement exclusif pour harpe avec son orchestre. A cette occasion, elle a choisi le Concerto pour harpe de Reinhold Glière, une œuvre d’inspiration romantique composée en 1938 à retrouver dans son deuxième album : Perspectives concertantes Au programme également, le Concertino pour harpe d’Ernst von Dohnányi, une autre œuvre injustement oubliée que la cheffe Bar Avni, lauréate du concours La Maestra en 2024, lui a fait découvrir et enregistrer avec l’Orchestre de chambre de Stuttgart. La Danse sacrée et la Danse profane de Debussy, «le fer de lance du répertoire concertant», concluent cet enregistrement magistral. Anaëlle mène de front sa carrière en orchestre, parfois en invitée à l’Orchestre de Paris, à celle
de soliste et chambriste, et aussi de professeur à Hambourg. «J’adore être inspirée par des grands», confie la musicienne, récemment bouleversée par Les Cerfs-volants de Romain Gary et «la folie artistique qu’est le ballet du Lac des cygnes» à l’Opéra de Paris. ALICE DE CHIRAC Album «Perspectives concertantes» (ES-Dur). En récital au festival La Clé de voûte, les 2 et 4 juillet et au Festival de Salon-de-Provence, les 26 et 28 juillet.
ENGLISH TEXT. With its delicate, magical tones, the harp has held a unique place since Antiquity. «It existed in Mesopotamia and ancient Egypt. Its design evolved over time, reaching a peak with the pedal harp in the early 20th century. This inspired composers like Fauré, Ravel, Debussy, Mahler, and Strauss to rediscover it,» says Anaëlle Tourret, one of France’s leading harpists. Born into a musical family, the thirty-something artist won prizes at the 2015 International Harp Contest in Israel and the 2019 Berenberg Prize. Trained in Paris by Ghislaine Petit-Volta and Nicolas Tulliez, she earned a Master’s in Hamburg with Xavier de Maistre, former Vienna Philharmonic soloist. In 2018, she became principal harpist of the NDR Elbphilharmonie Orchestra. “The Elbphilharmonie is phenomenal—a daily source of sound, color, and energy.” Her latest album Perspectives concertantes features Glière’s Harp Concerto, Dohnányi’s Concertino discovered with conductor Bar Avni—and Debussy’s Danse sacrée et profane. She also teaches in Hamburg and performs as soloist and chamber musician.
Explorez plus de 900 sites culturels dans le monde.
Explore 900+ cultural spaces around the world.
Photographies LOUIS DÉCAMPS
Direction artistique ANNE DELALANDRE
Stylisme TIMOTHÉ GRAND-CHAVIN
Surchemise en gabardine de coton, soutien-gorge, culotte et mini-sac en coton, Prada Pendentif et boucles d’oreilles «Blossoms Vermeil» en argent, Buccellati
Robe en scuba sergé, Natan Chemisier en soie, Dice Kayek Carré en soie imprimé, Dior Collier «Aida» en métal doré à l’or fin, Gas Bijoux Chapeau «Blanche» en feutre, Maison Michel Bottines «Berlin» en cuir, Louis Vuitton Sac seau «Elisa» en cuir, Il Bisonte
QUE
J’AIME…
Gilles Clément était assez mauvais au lycée jusqu’au jour où sa professeure de sciences naturelles (comme on appelait alors les SVT) lui a appris que paysagiste pouvait être un métier. Egalement professeur, écrivain, conférencier au Collège de France, commandeur des Arts et des Lettres, il est devenu la référence, le philosophe des jardins, et nous pousse vers d’autres esprits fertiles qui ont ensemencé le sien.
1 / JEAN-HENRI FABRE. «Adolescent, comme je m’intéressais aux insectes, mes grands-parents m’ont donné les Souvenirs entomologiques de Fabre dans leur édition originale. Un ouvrage remarquable et énorme, daté fin XIXe-début XXe. Cette lecture m’a amené à regarder les animaux, les plantes (et plus tard les micro-organismes) autrement : je voyais comment la vie d’une espèce pouvait être liée à une autre, même très éloignée. Fabre mettait en évidence l’écosystème, avant l’existence du mot. Quelques années plus tard, j’ai appris que tous les enfants japonais avaient ce livre chez eux, l’étudiaient en classe. Sa maison dans le Vaucluse, l’Harmas, fait aussi partie des circuits touristiques japonais, alors que, chez nous, Fabre est aujourd’hui quasiment inconnu.»
2 / GEORGE SAND. «Elle avait une petite maison à Gargilesse, un village proche d’Argenton-sur-Creuse, où je suis né, pas très loin non plus d’où je vis maintenant. C’est là que j’ai rencontré la veuve de son héritier légal, Christiane Sand, qui m’a proposé d’écrire avec elle un livre sur George Sand et la nature. J’ai donc redécouvert George Sand tardivement et, dans sa correspondance, la liberté de sa vie et de sa pensée. J’ai trouvé formidable, déjà, qu’elle échappe à son milieu, qu’elle passe de baronne Dudevant à… George !»
– George, étymologiquement, celui qui travaille la terre…
«Voilà ! Je connaissais la romancière. J’ai été étonné de trouver une écologiste ! Elle se passionnait pour les oiseaux, les fleurs sauvages, elle s’est investie dans la protection des forêts. Son fils, Maurice Sand, était entomologiste, spécialiste des lépidoptères, et la maison de Gargilesse, Algira, porte le nom d’un papillon de nuit trouvé au bord de la Creuse… Un peu plus loin, à Nohant, il y a le premier Ginkgo biloba du Nord, qu’elle avait fait venir du jardin botanique de Montpellier. Même au Jardin des Plantes, à Paris, ils n’avaient pas de Ginkgo biloba. Il est arrivé d’abord chez George Sand !»
– Vous connaissez ses derniers mots ?
«“Verdure… Laissez verdure !” C’est superbe.»
3 / FRANQUIN. «J’ai choisi Franquin pour Gaston Lagaffe. Dès que j’ai découvert Gaston dans Spirou, j’ai laissé tomber les Tintin et autres Mickey. Il m’a immédiatement plu parce qu’il est dans la déraison heureuse. Il fait ce que lui dicte son corps, il dort beaucoup et il a bien raison, il règle sa vie à partir de ses éléments biologiques et non sur l’ordre, la rentabilité. Ça énerve la direction du journal, mais le temps n’est pas chiffré, pour Gaston, c’est merveilleux. C’est exactement le regard qu’un jardinier peut porter sur le jardin : seul compte le temps qu’il fait, pas le temps qui passe. Une graine va germer, on verra quand. La mise en avant de quelqu’un qui invente sans arrêt des trucs très drôles et pas du tout rentables, moi, ça me convient. Et, bien sûr, sa façon affective de communiquer avec les animaux, la nature. Avec les oiseaux ou les feuilles mortes, on ne peut pas parler, mais on peut chanter, danser…»
4 / KETUT KRINTING. «Vers 1990, un ami psy, qui y vivait, m’avait dit : “Tu dois aller à Bali.” Je venais de construire ma maison. Je savais où j’habitais : je pouvais partir. Comme Bali me paraissait déjà touristique, j’y suis arrivé avec un visa de quelques jours. Vu l’accueil chaleureux, j’ai prolongé de deux semaines, pour rester finalement deux mois et demi. J’y suis revenu chaque année pendant douze ans. J’habitais un lumbung que me louaient Ketut et sa femme, Wayan, une sorte de grenier à riz entouré de rizières, avec au loin le mont Agung. C’était très agréable. Surtout, les gens étaient heureux. En France, on râle. Partout dans le monde, on fait la guerre. Tout à coup, je tombe sur un peuple heureux ! J’ai envoyé des messages à mes amis : “Venez !” Beaucoup sont passés, année après année. J’ai appris la langue… Ketut était peintre. Un jour où il traçait des mandalas, je lui ai demandé de m’expliquer sa religion. Il a répondu : “Oh ! C’est beaucoup trop compliqué !” Puis il a repris : “Il faut savoir une chose. Une seule chose...” Ce message essentiel, qui m’a fait passer de misanthrope à philanthrope, c’est : “Il faut que l’autre soit heureux.”»
5/ FRANCIS HALLÉ. «Depuis son premier appel, huit ans auparavant, on se parlait, on s’écrivait, on s’était mis à se tutoyer sans jamais s’être rencontrés. Quand il m’a invité à une mission “Radeau des cimes” au Gabon, j’ai expédié tout le reste. Le principe, c’est qu’en haut des forêts primaires (en Guyane, au Panama, au Cameroun…) vit tout un monde, animal, végétal, impossible à observer d’en bas. Un ballon dirigeable dépose une structure habitable de boudins gonflables et de filets sur la canopée. Nichés à 40 mètres du sol, on part en mission. La mienne, de quinze jours, avait pour objet les insectes. Je dormais là-haut, je me déplaçais en luge des cimes, soulevée par le ballon. Une expérience inoubliable.»
– Génial ! On dirait une invention de Gaston !
(Il rit.) «Oui ! C’est fou. D’ailleurs, il vient de sortir une BD : Le Génie de la forêt. On le voit discuter avec Aristote, c’est hyper pédagogique. Dans l’histoire des sciences du vivant, Francis Hallé sera un personnage fondamental.»
6 / PHILIPPE DESCOLA. «L’anthropologue le plus éclairé qui soit. Il a vécu en Amazonie chez les Achuars (des Jivaros). Son livre Par-delà nature et culture m’a sidéré. On a beaucoup de sympathie l’un pour l’autre et un vrai partage sur l’acceptation d’une vision animiste.»
– Plus précisément ?
«La plante, la fourmi ont une âme. On ne sait pas très bien ce qu’est l’âme de la fourmi, mais on ne sait pas très bien non plus ce qu’est celle de l’homme…» SABINE EUVERTE «Le Jardin romantique», de George Sand, 1995, Albin Michel. «Vagabondages & Conversations», conférence dansée de Gilles Clément avec le chorégraphe Christian Ubl, à Avignon cet été, au Théâtre de Suresnes à l’automne. «Le Génie de la forêt», de Vincent Zabus (scénario), avec la participation de Francis Hallé, et Nicoby (dessin), Albin Michel.
ENGLISH TEXT. Gilles Clément was a poor student—until his biology teacher told him landscape gardening was a real job. Now a professor, author, Collège de France lecturer, and Commander of Arts and Letters, he’s a garden philosopher shaped by fertile minds.
1 / JEAN-HENRI FABRE. “As a teen into insects, I got Fabre’s Entomological Memoirs. It changed how I saw life—how species connect. He revealed ecosystems before the word existed. In Japan, every child knows him. In France, he’s nearly forgotten.”
2 / GEORGE SAND. “She lived near where I was born. Later, I co-wrote a book about her and nature. I rediscovered her independence, her love for wildflowers, birds, forests. Her son Maurice was
« La plante, la fourmi ont une âme. On ne sait pas très bien ce qu’est l’âme de la fourmi, mais on ne sait pas très bien non plus ce qu’est celle de l’homme »
a lepidopterist. Her home was named after a moth. She even planted the first northern Ginkgo biloba, before Paris had one!”
3 / FRANQUIN. “I gave up Tintin for Gaston Lagaffe. He follows his body—sleeps, invents useless (funny!) things, ignores time and productivity. That’s gardening: only weather matters. Gaston connects to nature emotionally. With birds or dead leaves, you don’t speak—you sing, dance.”
4 / KETUT KRINTING. “In 1990, I stayed with Ketut in Bali, in a rice granary facing Mount Agung. The joy there stunned me. Ketut, a painter, once said: ‘Religion is too complex. But remember one thing—the other must be happy.’ That turned me from misanthrope to philanthropist.”
5 / FRANCIS HALLÉ. “We talked for years before meeting. He invited me to a canopy mission in Gabon. A blimp drops a structure on treetops—we lived and studied insects up there! It felt like a Gaston invention.”
6 / PHILIPPE DESCOLA. “A brilliant anthropologist. His Beyond Nature and Culture changed me. We share an animist view: the plant, the ant—each has a soul. And who really knows what a human soul is anyway?”
«Dans le Sud, nous avons les plus beaux
L’heure a beau être matinale, les cuisines du restaurant Baieta, 1 étoile Michelin, entrent déjà en ébullition. Aujourd’hui, c’est au rythme chaloupé d’un air caribéen que la brigade de choc de Julia Sedefdjian se donne du cœur à l’ouvrage, clin d’œil aux origines martiniquaises de ses deux associés : les pétillants Grégory Anelka et Sébastien Jean-Joseph. Pas de quoi distraire les troupes de la plus jeune cheffe étoilée de France pour autant. Ici, chacun connaît sa chorégraphie sur le bout de la spatule et le coup de feu ne fait aucune victime.
Née à Nice il y a trente ans, Julia Sedefdjian voue un amour inconditionnel à la cité des Anges. Pas étonnant que son restaurant, qui régale depuis 2018 les Parisiens à deux pas du boulevard Saint-Germain, porte fièrement les couleurs du terroir azuréen. Sous des allures de rebelle – coupe undercut et queue de cheval, piercing, tatouages –, Julia est une tendre qui distribue les câlins dans de savoureuses assiettes remplies d’émotion. Lorsqu’elle nous apprend qu’en patois niçois, «baieta» signifie «bisou», tout s’explique. Il suffit que la conversation accoste sur les rivages de la Méditerranée pour convoquer les parfums métissés de ses racines, un mélange explosif de Sicile (du côté maternel) et d’Arménie (du côté paternel) qui a façonné son tempérament et lui a inculqué la culture du partage. «Dans ma famille, tout le monde aime manger et cuisiner. Il faut dire qu’on a les plus beaux produits du monde !» Les tablées de quinze croulant sous les mezze, la daube de poulpe de sa mère, les pâtes ricotta tomate basilic et la brioche au cœur de sorbet citron, gourmandises typiquement siciliennes, ont bercé son enfance. «Quand on est petit, il n’en faut pas plus pour vous combler.» Et déclencher des vocations. Julia doit la sienne à Lulu, le papa pâtissier de sa marraine. Titulaire d’un CAP cuisine, puis d’un CAP pâtisserie, elle fait ses premiers pas à L’Aphrodite, un restaurant réputé de Nice, sous la houlette du chef David Faure. «Mon papa de cuisine !» précise-t-elle à propos de celui qu’elle considère comme son mentor, au même titre qu’Anne-Sophie Pic, dont elle admire tout : la cuisine, l’humilité, le parcours… Julia n’a pas à rougir du sien. N’a-t-elle pas reçu la médaille de chevalier dans l’Ordre national du mérite l’année dernière ? Meilleure apprentie de France à 17 ans, elle devient sous-cheffe à 18 ans, puis cheffe des Fables de La Fontaine (Paris VIIe) à 19 ans et demi. Après avoir complètement revu la carte, elle en conserve l’étoile… à 21 ans seulement, une première. Et, en 2019, c’est au tour de Baieta d’être auréolé d’une étoile, un an à peine après son ouverture. «La première étoile m’a inspiré une immense fierté, mais aussi beaucoup d’interrogations. Je me suis dit : “Pourquoi moi, si jeune ?” Celle de Baieta a eu un autre goût : on apprend à la savourer sans pression.»
Pour franchir le seuil de sa cuisine, chaque nouvelle recette fait l’objet d’une esquisse précieusement conservée dans un petit carnet. Si l’art l’inspire – peu importe le style, pourvu que l’ivresse des couleurs lui souffle des associations –, Julia s’en remet volontiers aux rencontres pour bousculer ses habitudes. Et lorsque Emilien Boutillat, l’éminent chef de cave de la maison Piper-Heidsieck, lui propose de créer sa propre cuvée en avril dernier, elle va jongler pour que sa
cuisine, avec ses sauces bien marquées, puisse «laisser vivre la bulle». Pari gagné. Avec quatre accords époustouflants qui évoluent au fil des saisons sans aucune fausse note.
Alors que le service vient de commencer, ses deux plats signatures font un tabac : le jaune d’œuf croustillant merlan et haddock, poireau en vinaigrette d’algues, et la Bouillabaieta 2. Cette version ultra«sexy» de la bouillabaisse a mariné longtemps dans ses méninges avant que la chef s’autorise à la revisiter à sa sauce. «Je craignais la réaction des chauvins Marseillais (rires) ! Heureusement, ils adorent.»
Malgré un emploi du temps surchargé, Julia ne manquerait pour rien au monde les ateliers culinaires qu’elle anime bénévolement deux fois par mois dans un collège du XXe arrondissement. «Transmettre à ces jeunes l’envie de bien manger est un combat qui me nourrit énormément.» Son fils, Maël, 4 ans, semble avoir déjà parfaitement compris la leçon, puisqu’il adore cuisiner. «A 1 an et demi, il faisait ses premiers œufs brouillés ! Mais bon… je le laisserai libre de suivre ses rêves.» Et elle ? A-t-elle exaucé tous les siens ? «Je n’exclus pas d’allier un jour la musique, ma deuxième passion, à la cuisine !» glisse-t-elle mystérieusement… avant de rejoindre ses pianos et de nous laisser diablement sur notre faim. Tchao, baieta.
PATRICIA KHENOUNA restaurant-baieta-paris.fr «Essentiel by Baieta», assemblage 44 % pinot noir, 34 % pinot meunier, 22 % chardonnay
ENGLISH TEXT. It’s early, but the kitchen at Michelin-starred Baieta is already buzzing. Today, Caribbean music energizes the team—a nod to the Martiniquan roots of chef Julia Sedefdjian’s business partners. Born in Nice, Julia proudly brings Mediterranean flavors to Paris. With her undercut, piercings, and tattoos, she looks rebellious, but her dishes are tender, emotional hugs. “Baieta” means “kiss” in the Niçois dialect. Of Sicilian and Armenian descent, she grew up with vibrant meals and a love for sharing. A culinary prodigy, she earned her first Michelin star at just 21. Baieta was starred a year after opening. Inspired by art and encounters, she recently created her own cuvée with Piper-Heidsieck. Her bouillabaisse remix, the “Bouillabaieta 2,” is a hit—even in Marseille! Despite her busy schedule, she teaches cooking workshops for teens and shares her passion with her young son. One day, she dreams of blending food and music.
Collection Been There - Modèles Twenty Editions limitées & numérotées
Plaque siglée «Paris» en exclusivité sur www.redline-boutique.com
Plaque siglée «Saint-Honoré» en exclusivité au 167, rue Saint Honoré75001 Paris
CARNETS DE TENDANCES
Le meilleur des collections haute couture printemps-été 2025
Al’occasion des 20 ans de la maison, Alexis Mabille a réuni des artistes, des clientes et des amies évoluant dans des univers différents : la danse, le cinéma, le design, la musique. Plutôt qu’un traditionnel défilé, le créateur parisien a préféré une approche plus personnelle. Chaque pièce de la collection, intitulée We Are Amazing, a été imaginée pour refléter la personnalité et souligner l’individualité de celle ou celui qui la porte. Ont été invitées Dita Von Teese, l’amie de toujours, la photographe Ellen von Unwerth, la danseuse Marie-Agnès Gillot, les actrices Audrey Marnay, Kim Higelin et Bérénice Bejo… ainsi que quelques sublimes mannequins. Ici, Paula Engbert dans un long fourreau plastron de crêpe mousse noir, à double boutonnage cristal et ceinture de satin noire. «C’est une collection un peu famille», nous a confié Alexis Mabille.
Dossier réalisé par ANNE DELALANDRE assistée de NOÉMIE JALU
La collection Velvet Underground d’Ashi Studio est un hommage au Paris des boudoirs et à la femme bourgeoise des années 1960. «Ma collection printemps-été 2025 est née à partir d’un moment particulier où les femmes s’émancipent et aspirent à être les seules maîtresses de leurs destins», a déclaré le directeur artistique, Mohammed Ashi, premier créateur du Golfe à participer à la Semaine de la couture à Paris. Les silhouettes allient structure et fluidité, avec des corsets architecturés, des jupes ultra-bouffantes et des robes fourreaux aux lignes épurées. La collection se distingue par un audacieux jeu de contrastes, telle cette jupe volumineuse en velours, brodée de perles et de pierres, portée avec un raffiné soutien-gorge en dentelle de Chantilly.
Travail, ode, rossignol, John Keats, chapeau, plumes, oracle, queue, cinéma silencieux, zouave, culotte, Garbo, faisan, mercure, déesse ailée, blanc Dunluce 266, blouse… Pour sa première collection haute couture pour Valentino, Alessandro Michele s’est inspiré du livre Vertige de la liste d’Umberto Eco. Ainsi, chaque silhouette est décrite avec une liste de plus de 200 mots. Chaque robe est donc le nouage de significations hétéroclites. Ici, une majestueuse blouse plissée en georgette, mousseline et organza aux manches ultra-longues ornées de volants et d’éléments dorés. Un pantalon ample en velours et sergé noir contraste avec sa légèreté et apporte une touche théâtrale. De très longues plumes noires s’échappent du chapeau en feutre.
«Comment deux êtres ont conquis le monde par leur liberté d’expression, initiateurs et avant-gardistes : Joséphine danse et chante, Brancusi sculpte, et Paris s’enflamme. Elle sublime le corps et le libère, lui révèle les formes primaires et polit le bronze pour en révéler toute sa lumière. C’est de cette union d’esprits et de formes que mon trait prend vie et démarre la collection», a expliqué Stéphane Rolland. Une palette sobre, oscillant entre le blanc, le noir, l’ivoire et des bruns, met en avant des coupes élégantes et éthérées. Les transparences valorisent les mouvements du corps, et les plumes font référence à L’Oiseau de Brancusi. Ici, une longue robe bustier en crêpe blanc et vasques de gazar, minutieusement brodée de plumes ivoire. Le défilé a également eu une dimension solidaire : les recettes ont été reversées à la Fondation des hôpitaux et des ateliers créatifs ont été organisés avec des adolescentes en difficulté.
La robe boule est clairement une tendance forte des collections couture du printemps-été 2025. Ici, comme un petit oiseau, une mini-robe cape est entièrement recouverte de plumes teintées à la main dans des nuances de rose fuchsia et magenta. L’encolure est haute, renforçant l’effet sculptural. Fidèle à son univers féminin et élégant, Giambattista Valli crée des silhouettes qui évoquent la légèreté, la fête et la joie de vivre, tout en rendant hommage au savoir-faire artisanal de la haute couture.
Kevin Germanier, l’un des talents les plus prometteurs du moment, a marqué les esprits avec cette collection intitulée Les Globuleuses, mêlant innovation, durabilité et esthétique résolument avant-gardiste. Fidèle à son engagement, il a collaboré avec des artisans du monde entier pour transformer des matériaux récupérés. Ici, une volumineuse jupe upcyclée brodée de fausses plumes métallisées avec un bustier rectangulaire en paillettes.
Son CAP de dessinateur industriel en poche, le jeune Yves Esposito, de Bandol, se destinait à passer sa vie penché sur des plans, quand un job d’été bouscula les siens. Engagé comme groom dans un grand hôtel, on lui avait aussi confié le bar, les fins d’après-midi, et il fréquentait, le soir, un autre bar : l’Amiral, sur le port. En regardant travailler le barman, l’élégant Michel, souriant, plaisantant avec les clients, Yves a été «frappé d’un éclair». Justement, l’Amiral embauchait. Parmi les habitués figuraient Miroslav et Colette Siljegovic, propriétaires du Café de Flore, futurs repreneurs de La Closerie des Lilas… Barman attitré de La Closerie, Yves Esposito vient de prendre sa retraite après y avoir œuvré vingt-neuf ans. Pour un établissement parisien si mythique, la cordialité du directeur, des serveurs, me surprend. Installés avec Yves à la table où Lénine jouait aux échecs avec Paul Fort, le «prince des poètes», nous parlons de temps que les barmen de moins de 100 ans ne peuvent pas connaître : du QG qu’a été La Closerie pour les impressionnistes, Zola, Baudelaire, Rimbaud, avec Verlaine, Apollinaire, Jarry, Gide, Duchamp, Picasso, Beckett… S’impose Fitzgerald, livrant ici même à Hemingway la primeur de Gatsby le Magnifique, et, bien sûr, la grande querelle des surréalistes où Aragon a rencontré Elsa… Lui, Yves, a-t-il connu Sagan ? Oui, mais pas au bar. Elle ne venait que déjeuner. Passent le saluer Catherine Jacob, qui avait repris l’appartement du chanteur Christophe, autre pilier du lieu, puis Yuri Buenaventura, intime de la famille.
Yves Esposito, barman de La Closerie des Lilas pendant 29 ans, prend sa retraite
Dans cette maison, Yves est chez lui. Derrière ce bar, il recevait : «Tous les soirs, je montais sur le plancher du bar comme un acteur entre en scène. Dans un même décor, avec un public différent, et sans répétitions.» Avant sa prise de service à 17 h30 (jusqu’à 1 h30), de chez lui, il avait déjà géré des réservations, préparé une surprise, souhaité un anniversaire… Par exemple ? Vincent Lindon, 15 juillet. Vincent, ses salades César avec du poulet juste grillé, ses accès de fureur quand on lui vole une photo. «On voit, on entend, on écoute, et, surtout, on se tait.»
Combien de secrets sont confiés à des barmen ? Epaules consolatrices, ils sont aussi parfois complices. L’histoire de cette barmaid du Ritz qu’un couple qui attendait un enfant avait mise de mèche avec leur médecin. C’est elle, la barmaid, qui devait leur annoncer le sexe du bébé avec un cocktail bleu ou rose… Et Renaud aurait-il composé A la Close si Yves ne lui avait pas lancé : «Quand nous dédies-tu une chanson ?» «Renaud, j’ai été témoin de tous ses états : au top, j’ai vu des groupies se précipiter au bar après son départ pour récupérer un de ses mégots ; dans ses
excès, je faisais tout pour espacer ses verres, mais je l’ai vu se cacher pour boire, puis ne plus s’en soucier… J’ai connu Dominique, Romane, Cerise.» Il le chante, c’est «dans ce bel endroit inconnu des blaireaux» qu’il a rencontré celle qui lui a «redonné le joli goût de l’eau»… Tandis que s’installe à côté le sosie d’Iggy Pop, Yves, ému, reconvoque Roda-Gil : «un monstre, un grand monsieur, qui avait ses larges habitudes ici» ; Sollers, «un inconditionnel, qui avait son parterre, son verbe incomparable, son inséparable ironie, et ses manies, d’abord un double J&B avec un glaçon, puis un simple J&B» ; Michou, «présent tous les samedis au bar, et avec ses Noëls, d’une trentaine de convives, où coulaient à flots éclats de rire et champagne» ; «Johnny Depp, Vanessa et la petite Lily-Rose, qui mangeaient souvent à cette table, derrière nous ; Johnny Depp qui, un jour, a enlevé son chapeau pour me saluer, moi !»... Quoique toujours discret sur ses clients préférés, ce barman est intarissable… Mais mon article déborde aussi, la coupe menace mes lignes, je dois arrêter. D’un trait, vider Timsit, Benacquista, Beigbeder, Dan Franck, Edouard Baer… ne pas me répandre sur les petites plaques dorées gravées aux noms des familiers historiques, expédier les cocktails d’Yves, Mistral gagnant, Femmes, Moveable Feast – Paris est une fête d’Hemingway en VO, à qui La Closerie doit sa renommée internationale… Tandis qu’Yves va enfin pouvoir en profiter avec sa femme – ils ne sortaient jamais–, telle une olive dans un martini dry, je lui ajoute juste une adresse à la Bastille : celle où Jack Depp (le fils), récemment encore, servait au bar.
SABINE EUVERTE
Depuis 135 ans, le Moulin Rouge est un emblème de la culture et des savoirfaire français. Cabaret populaire à sa création, music-hall incontournable dans les Années folles, salle de spectacle où se sont produits de célèbres artistes français et internationaux… le Moulin Rouge perpétue depuis 1889 l’esprit de la fête parisienne. La marque Moulin Rouge, c’est aussi des collections de produits haut de gamme en collaboration avec des maisons françaises et internationales qui partagent ses valeurs d’élégance, de créativité et de joie de vivre : des collections au design singulier inspirées de l’univers glamour du Moulin Rouge.
- Le panama par Moulin Rouge x Lastelier, un indémodable du printemps. Fusion inédite entre un savoirfaire d’exception et une intemporalité captivante, cette collaboration exclusive donne naissance à une réinterprétation audacieuse du panama. Trois modèles sont disponibles, chacun représentant une fusion de style et de couleurs captivantes propres au Moulin Rouge. Que ce soit pour une journée ensoleillée ou une soirée élégante, les panamas de la collection Moulin Rouge x Lastelier
seront les complices idéals pour compléter votre tenue avec style en toute circonstance !
- Moulin Rouge x Château ToulouseLautrec, entre héritage et raffinement.
A l’occasion du 135e anniversaire du Moulin Rouge, le célèbre cabaret et le Château Toulouse-Lautrec lèvent le rideau sur une édition spéciale de la cuvée signature du domaine, en rouge et en blanc. Cette alliance célèbre la rencontre entre deux maisons françaises intemporelles et raffinées, renforçant ainsi les liens entre l’art de vivre, le vin et l’élégance.
- Moulin Rouje, la collection capsule follement parisienne. Véritable fusion entre deux maisons françaises passionnées de rouge, Moulin Rouge et Rouje ont puisé leur inspiration au cœur de la fête parisienne pour créer une collection de sept pièces emblématiques. Robes, tee-shirts, chemisiers ou même palettes lèvres, cette collection d’exception témoigne d’une rencontre créative évidente. Un savant mélange d’audace, de féminité et de chic parisien !
A retrouver à la boutique du Moulin Rouge : place Blanche, 82 boulevard de Clichy, Paris XVIIIe
Brionvega, fondé à Milan en 1960 par la famille Brion, incarne une histoire d’excellence, animée par une passion et un dévouement inégalé : celle de la recherche de l’excellence. C’est en 1965 que les designers et architectes Achille et Pier Giacomo Castiglioni ont conçu pour et avec Brionvega l’intemporel Radiofonografo, qui célèbre cette année son 60e anniversaire. Leur intuition de combiner les fonctionnalités de la radio à celles du tourne-disque a marqué un tournant significatif à l’époque. Doté d’une identité forte et bien définie, le Radiofonografo a une apparence anthropomorphique où les yeux, les oreilles et même un sourire sont facilement reconnaissables. De plus, le socle en aluminium moulé sous pression lui confère une identité et une autonomie lui facilitant tout déplacement par son utilisateur grâce à ses roulettes. Ces caractéristiques uniques font du Radiofonografo un objet mobile qui se transforme en véritable ami ! Le design unique et captivant fait du Radiofonografo un objet d’une beauté rare, un objet à chérir et à transmettre aux générations futures. Cet objet iconique est reconnu internationalement dans ses différentes couleurs : orange, rouge, bleu et blanc. Le Radiofonografo est aussi disponible dans une édition limitée et numérotée, avec une finition en merisier, dédiée à un public d’enthousiastes, d’amateurs d’art qui souhaitent devenir les gardiens d’une pièce unique.
Le Radiofonografo est un véritable chef-d’œuvre exposé dans les plus importants musées du monde, tels le MoMA de New York, le Victoria & Albert Museum de Londres, le MAM-Museu de Arte Moderna de São Paulo au Brésil, le MCASD de La Jolla en Californie… Achille et Pier Giacomo Castiglioni ont créé avec Brionvega un objet intemporel qui transcende les tendances : un «Art Product» devenu un symbole du savoir-faire italien. Aujourd’hui, des artisans qualifiés exécutent chaque étape du processus de production avec un soin extraordinaire et une véritable passion. Chaque Radiofonografo révèle son essence en tant que produit d’art, en tant que chef-d’œuvre. Le concept de «produit ami» est le fil conducteur de Brionvega dans la conception et la création de nombreux objets emblématiques, entretenant un lien spécial entre le produit et son utilisateur. L’excellence de Brionvega se manifeste également dans la remarquable continuité et l’innovation générées par ses produits, considérés comme des jalons dans le développement du design industriel international.
Les «Art Products» de Brionvega sont d’authentiques chefs-d’œuvre, porteurs d’un univers de valeurs intrinsèques, d’unicité, de charme et de beauté qui perdurent dans le temps. Les esthètes qui choisissent les «Art Products» de Brionvega comme compagnons de vie les chérissent et les transmettent avec affection aux générations futures.
Cet objet iconique est reconnu internationalement dans ses différentes couleurs : orange, rouge, bleu et blanc.
Le Radiofonografo est aussi disponible dans une édition limitée et numérotée, avec une finition en merisier, dédiée à un public d’enthousiastes, d’amateurs d’art qui souhaitent devenir les gardiens d’une pièce unique
éverrouiller les codes de la «grande joaillerie» pour la rendre plus responsable, plus audacieuse aussi. Ouvrir des coffres-forts et des portes fermées pour dénicher les plus belles pierres anciennes et mettre ainsi – un jour – un terme à l’extraction minière : voici le concept fondateur de la Maison Rouvenat depuis sa renaissance en 2022. Rouvenat est une très ancienne maison : lorsqu’on remonte à sa création, en 1852, on découvre que le poinçon de maître historique n’est autre qu’une serrure. Cette estampille d’origine, et toute sa symbolique, a inspiré la nouvelle collection Unlock : des plaques percées en leur centre par un trou de serrure, en or ciselé, lapis-lazuli ou cornaline, serties de diamants ou décorées à la céramique de couleur. Elles existent en pendentifs, en grands médaillons, en bagues ou en bracelets.
Rouvenat. 416 rue Saint-Honoré, Paris VIIIe
Al’occasion du 50e anniversaire du Papillon Graff, une silhouette iconique devenue indissociable de l’univers de la Maison, Graff dévoile une série de parures de haute joaillerie célébrant l’excellence de son savoir-faire en matière de sertissage et de mise en valeur des pierres précieuses. Véritable démonstration de sa maîtrise inégalée du diamant, ces nouvelles créations illustrent un niveau de détail et une complexité toujours plus saisissants.
Le Byblos, l’hôtel iconique de Saint-Tropez, dévoile ses nouveautés
Lieu magique en plein cœur de Saint-Tropez, refuge de stars et haut lieu des nuits tropéziennes, le Byblos cultive sa sin gularité, entre grand hôtel de luxe et « village » à l’esprit de famille. Etendu sur près de 17 000m², le Byblos et ses 86 chambres (dont 47 suites) est un véritable petit village avec ses jardins luxuriants, ses fontaines, sa magni fique piscine et son spa by Sisley. Cette année, le Byblos présente trois nouveaux lieux d’exception. Il Giardino : dans un cadre raffiné et intimiste,
le nouveau restaurant italien du Byblos vous invite à découvrir une carte sublimant les saveurs authentiques d’Italie. SkyBar : le nouveau rooftop du Byblos, un nouveau lieu inédit et exclusif, offrant une vue imprenable sur la baie de Saint-Tropez. B.Lounge : le renouveau du bord piscine, un lieu idéal pour un déjeuner ou un apéritif prolongé au cœur de Saint-Tropez. Zuma : le concept japonais prend ses quartiers d’été au www.byblos.com
De haut en bas et de gauche à droite. Trois pendentifs : nacre rose, or rose et diamant ; amazonite, or jaune et diamant ; malachite, or rose. Puce d’oreille, onyx, or jaune. Bracelet, malachite, or rose, et diamants. Bague, cornaline, or rose et diamant. Puce d’oreille nacre rose, or rose. Collection Color Blossom, Louis Vuitton Joaillerie
Toutes les pierres colorées utilisées pour les pièces de la collection de joaillerie Color Blossom de Louis Vuitton sont des pierres naturelles. Chaque pierre est unique, méticuleusement choisie pour garantir la plus haute qualité et la plus belle couleur ; c’est ce qui les rend si précieuses. Déclinés en deux formes graphiques, les motifs sont des hommages colorés à l’emblématique fleur de Monogram, créé en 1896 par Georges Vuitton. Chaque pierre est taillée en volume, révélant ainsi sa beauté intérieure ; elle est polie à la main pour garantir la plus belle brillance. Ce travail en volume résulte d’un savoir-faire unique. Réaliser de telles formes prend cinq fois plus de temps que si elles étaient plates.
Depuis toujours l’être humain a été attiré par les bijoux. Il les a admirés, convoités, désirés. A mes yeux, les bijoux présentent une certaine liberté, et, à partir des années 1930, les grandes maisons de la haute couture ont su les montrer, et particulièrement Coco Chanel, avec nonchalance, élégance, charme et attractivité. Elle a été avant-gardiste avec ses fameux sautoirs, accessoires passionnants avec de multiples incrustations en pâte de verre ; souvent p ortés long style Charleston ; mais aussi doublés ou triplés pour devenir un collier ras du cou. Ce bijou suit le mouvement du corps en laissant une certaine mélodie (a small jingle). Comme Coco, certaines osent aujourd’hui porter plusieurs sautoirs à la fois. La haute couture s’intéresse également de près à la broche, objet à la fois insolite, original et raffiné. Roger Jean-Pierre, la colonne vertébrale de la haute couture française, a ainsi créé des broches en trois dimensions pour Elsa Schiaparelli, Christian Dior, Balenciaga, Givenchy. Aux Etats-Unis, la maison Monet a créé des bijoux très stylisés et structurés. Son bracelet tank de couleurs multiples fut un succès. On ne peut pas oublier Joseff of Hollywood qui faisait des bijoux de films de 1930 à fin 1940, qui a créé pour l’actrice américaine Carole Lombard une parure extraordinaire portée pour la couverture du magazine Playboy en 1940. «Live on with beauty and melody à gogo.»
L’actrice américaine Carole Lombard porte un collier et une manchette signés Joseff of Hollywood circa 1940
Broche sculpturale signée Chanel 1960
Sautoir en pâte de verre signé Chanel circa 1950 et sautoir avec médaillon signé Chanel circa 1970
Olwen Forest, Marché Serpette, 110 rue des Rosiers, à Saint-Ouen, allée3, stands 5, 6 et 7. 0140119638. www.olwenforest.com
«Nous proposons une vision originale des grands vins de Champagne : celle de la famille»
Il y a vingt ans, les trois branches de la famille Rothschild (Château Lafite Rothschild, Château Mouton Rothschild, Château Clarke) ont décidé de se grouper autour de la création d’un grand vin de Champagne. C’est la première et unique fois dans l’histoire de la famille que tous s’unissent dans la création d’un domaine commun. Les explications de Guillaume Lété chef de caves des Champagnes Barons de Rothschild Pourquoi fonder en 2005 une nouvelle Maison de Champagne ? La famille est historiquement basée à Bor deaux, où elle élabore certains des plus grands vins classés, mais elle est également présente dans les plus beaux vignobles du monde, comme l’Argentine, l’Espagne, le Chili ou l’Afrique du Sud. La Champagne étant l’un des terroirs les plus prestigieux au monde et le champagne un symbole de convivialité et d’art de vivre pour lesquels la famille est très reconnue, c’est tout naturellement qu’ils ont choisi la Champagne pour ce projet commun.
Pourquoi Champagne Barons de Rothschild est-il déjà une «grande Maison» ? Nous avons fait le choix d’une production limitée permettant une qualité à la hauteur de l’exigence de la famille. L’attribut de grande Maison passe aussi par la reconnaissance de nos clients. Nos champagnes sont aujourd’hui présents sur les plus belles tables, dans les plus beaux hôtels et chez les grands cavistes dans plus de 90 pays. Pour l’anecdote, en 2017, notre Maison a été appelée à intégrer l’Union des maisons de Champagne et ainsi à rejoindre le petit cercle des grands noms de la Champagne, une grande fierté pour notre jeune Maison familiale.
chaque fois un challenge renouvelé ! Puis viennent le suivi des fermentations, les dégustations, les assemblages, la mise en bouteilles pour un repos bien mérité de nos flacons pendant plusieurs années avant la commercialisation. J’ai la chance de travailler avec des équipes investies avec qui je partage l’exigence à toutes les étapes, aussi bien à la vigne qu’en cuverie, de la production jusqu’à l’expédition. Nous devons proposer à nos clients la qualité optimale pour qu’ils prennent in fine un grand plaisir à déguster nos vins. Et c’est finalement cela, l’essentiel !
Quelle est l’originalité de la Maison ? Sa jeunesse en même temps que l’héritage des grands vins. Notre jeunesse nous a permis de proposer une vision originale des grands vins de Champagne, celle de la famille. Pour nos cuvées, cela se traduit par l’utilisation du chardonnay à plus de 70 % de nos approvisionnements. Ce cépage nous donne le potentiel nécessaire au vieillissement lent de nos vins, pendant 4 à plus de 10 ans, et un style à l’élégance absolue.
L’exigence de la famille est aussi au cœur de notre démarche : nos cuvées sont issues à 90 % des grands et premiers crus.
Quel est le travail d’un chef de cave ? Quelle est votre vision ? Au quotidien, mon travail consiste à garantir une qualité irréprochable de la vigne au vin. Tout démarre à la vigne où nous suivons tout au long de l’année le développement de nos parcelles jusqu’au moment crucial de la vendange, qui est à
Vous avez deux nouveaux sites de production… Nous avons mis en fonctionnement en janvier 2024 un nouveau site de production à Oger qui centralise les étapes finales de vieillissement, remuage, dégorgement, conditionnement et expéditions. Nous voulions nous doter d’un équipement à la pointe. Nous avons eu la chance de pouvoir pousser les curseurs le plus loin possible en matière de durabilité et d’innovation : autosuffisance énergétique à hauteur de 90 % grâce à une installation de 780 panneaux solaires sur 4 500 m2 de toiture, lumière naturelle dans les ateliers et automatisation de la manutention afin de réduire au maximum la pénibilité, isolation naturelle par la craie recouverte de terre végétale pour une parfaite intégration paysagère. Tout cela nous permet d’assurer un service à la hauteur des exigences (bien naturelles) de nos clients. Cette année, nous inaugurons un nouveau site de vinification à Vertus, là où tout a commencé. Nous avons fait le choix de rénover une bâtisse ancienne de 1870 pour y installer une cuverie moderne sur mesure pour nos besoins. Nous avons restauré les caves voûtées qui retrouvent ainsi leur fonction d’origine et créé un pressoir. Le tout est adossé à une parcelle de vignes ceinte de murs, un clos, que la famille a eu la chance d’acquérir en 2013, ce qui est une vraie rareté en Champagne. Ces deux chantiers ont représenté de très grands défis, et j’ai pu ajouter à ma fonction la casquette de chef de chantier durant ces années de travaux. Le résultat assure à la Maison le maintien d’une qualité au plus haut niveau pour les années à venir, et c’est une grande fierté d’avoir pu participer à cela et d’inaugurer cette nouvelle page de notre histoire l’année des 20 ans de la Maison.
Propos recueillis par ANNE DELALANDRE
Prisé par les plus grands décorateurs internationaux et les amateurs de pièces d’exception pour leur intérieur, Biron demeure une place incontournable de la grande décoration à Paris. Professionnels et particuliers apprécient le mobilier estampillé du XIXe siècle proposé par Claude & David Mekiess, les lustres à papilles Lalique et Baccara de MLD Antiquités, les vitraux monumentaux chez Lassaussois, ou encore les luminaires de créateurs du XXe siècle chez Marie Bonnet. Quelques exemples parmi plus de 170 antiquaires et marchands d’art réunis dans ce célèbre marché aux puces qui fête ses 100 ans cette année.
Marché Biron. 85 rue des Rosiers, Saint-Ouen (93) .
Ouvert tous les week-ends, du vendredi au lundi. marchebiron.com
ENGLISH TEXT. THE HIGH-END DECORATION AT BIRON
Prized by the greatest international interior designers and connoisseurs of exceptional pieces, Biron remains a landmark destination for high-end decoration in Paris. Both professionals and private collectors are drawn to the 19th-century stamped furniture offered by Claude & David Mekiess, the exquisite Lalique and Baccarat chandeliers from MLD Antiquités, the monumental stained glass windows at Lassaussois, and the 20th-century designer lighting found at Marie Bonnet. These are but a few examples among more than 170 antique dealers and art merchants gathered in this renowned flea market, which celebrates its centennial this year.
Open every weekend, from Friday to Monday
Réputée à travers le monde pour sa lingerie couture, Maison Close franchit aujourd’hui un nouveau cap audacieux : la marque française dévoile sa toute première ligne de maillots de bain, fidèle à son ADN unique. Une ligne sophistiquée et envoûtante, qui transcende la féminité par des jeux de transparence étudiés et des coupes affûtées.
Depuis dix-neuf ans, Maison Close défie les conventions et réinvente les codes de la séduction à la française. A l’origine de chaque pièce : l’imagination de Nicolas Busnel, alias Monsieur le Français, fondateur et styliste de la maison. Toujours seul à l’origine de chaque dessin, il compose ses collections comme une bande-son visuelle et tactile, avec l’ambition d’exalter la vue autant que le toucher.
Parce qu’elle a l’audace de s’appartenir, Maison Close montre ce que les autres cachent… et continue désormais d’écrire son récit au bord de l’eau. Pour cette première incursion balnéaire, la maison signe une ligne désirable, entre pièces sculpturales et accessoires coordonnés. Une collection de maillots de bain en immersion totale pensée comme un vestiaire d’attitude, qui évoque et provoque les mêmes sensations que la lingerie. Cinq capsules, cinq tempéraments, où le savoir-faire et la matière interagissent avec la lumière, l’eau et les éléments, offrant une perception visuelle et sensorielle unique.
Splash incarne la sirène moderne, résolument rétro. Maillots ultra-découpés, bikinis à brides affûtées, seconde peau liquide en rouge et en noir.
Fatale fait du bondage un art chic. Des jeux d’élastiques maîtrisés encerclent la taille et s’accrochent aux courbes. Elle ne se contente pas d’être portée : elle s’éprouve.
Glow célèbre les couleurs vibrantes bleu électrique, violet, noir irisé traversées de liens-bijoux qui captent la lumière et hypnotisent.
Minuit joue avec l’illusion : entre opacité troublante et découpes transpa-
rentes, le noir y vibre de reflets étoilés, laissant deviner sans jamais révéler. Pour prolonger cette aura incandescente, la collection Fever, classée en «resortwear», redessine l’élégance du jour comme de la nuit. Robes fluides, paréos vaporeux, kimonos graphiques et jupes portefeuilles se déclinent dans un violet profond signature de la maison et dans un imprimé noir et blanc psychédélique. Des pièces hybrides, prêtes à envelopper un corps encore salé, pensées pour danser et s’évaporer à l’aube.
Découvrez toute la collection sur maison-close.com
(lien vers swim & resort)
Maison Close montre ce que les autres cachent… et continue désormais d’écrire son récit au bord de l’eau
FACE-À-FACE AVEC UN TABLEAU
«A l’écoute (Portrait de Jawlensky)» (1909)
Décidément, l’art allemand a bien des difficultés à pénétrer dans les musées de l’Hexagone, et, pour peu que l’artiste soit une femme, le parcours devient encore plus ardu. Dans le cas de Gabriele Münter (1877-1962), il a fallu attendre plus de soixante ans après sa disparition pour qu’elle bénéficie de sa première rétrospective en France et le même nombre d’années pour la publication du premier catalogue consacré à son œuvre en français. Grâce en soit donc rendue au Musée d’art moderne, qui a sauté le pas. Cela dit, pareil délai est d’autant plus surprenant que Gabriele Münter a été au cœur de l’avant-garde de son temps en cofondant Der Blaue Reiter (le Cavalier bleu). Ce groupe, formé à Munich en 1911, réunissait entre autres les peintres Vassily Kandinsky, Franz Marc, Paul Klee, désormais au pinacle de la notoriété. Sauf Münter, vite éclipsée par l’hommage que la postérité accorda à ses collègues masculins. On retrouve, dans le tableau ci-dessus, le chromatisme tranchant et explosif propre au mouvement d’inspiration expressionniste dans lequel elle s’inscrit. Ainsi que les motifs dont Gabriele aimait s’entourer dans la maison qu’elle habitait à Murnau, près du lac Staffel, au pied des alpes bavaroises. Notamment l’art populaire de la région, qu’elle collectionnait, en particulier ces peintures sous verre aux contours noirs. Ils appartiennent à son univers de prédilection, mais, à part ces références, un mot tout de même sur ce portrait qui frappe par l’ambiguïté de sa composition. Naïf, dans un sens, ou faussement simple, on ne peut s’empêcher d’être séduit par cette hésitation. On aperçoit bien l’homme à la lampe, et pourtant
Münter, «A l’écoute
de
1909, Munich, Lenbachhaus, donation Gabriele Münter, 1957, Städtische Galerie im Lenbachhaus und Kunstbau München, Gabriele Münter Stiftung 1957 ©Adagp, Paris, 2025.
tout semble de guingois. Le peintre portraituré, Alexej von Jawlensky (1864-1941), par ailleurs ami proche de Münter et membre actif du Blaue Reiter, adopte une curieuse position allongée. Placé sur un demi-cercle concave, son corps enveloppe le pied de lampe qui partage l’image en deux parties opposées : l’obscurité quasi totale à gauche, et la lumière à droite. Pourtant, rien de bien symétrique, puisque les notes de couleur, réparties à la manière d’un puzzle, émergent toutes d’un fond noir uni contre lequel elles luttent vaillamment. Les quatre volumes de couleurs différentes qui structurent la lampe apparaissent légèrement disjoints, chacun apportant sa part discrète au trouble de l’équilibre qui semble affecter toute la représentation. A cet égard, on ne peut manquer de remarquer que le modèle est drôlement assis, un peu affaissé sur l’arrière. Les différences très nettes de tonalité renforcent le dynamisme de cette peinture qui, dans un sens, obéit à son titre, A l’écoute. Il s’agit en fait des couleurs dont on suit pas à pas l’écho. Le bleu du plat posé sur la table renvoie aux yeux bleus de Jawlensky, ainsi que le vert de l’assiette à sa barbe ou encore le rose de son chandail à celui de son visage. Autrement dit, pour prêter l’oreille à Jawlensky, il faut d’abord se mettre à l’écoute des résonances du tableau, et c’est peut-être là son sujet principal. BERTRAND RAISON MUSÉE D’ART MODERNE DE PARIS. Gabriele Münter. Peindre sans détours. 11 rue du Président-Wilson, Paris XVIe Jusqu’au 24 août 2025.
CHÂTEAU ROMASSAN, BANDOL
VU PAR ÉTIENNE FRANCEY
vancleefarpels.com