POUR EUX «J’EXISTE QUAND JE DONNE »

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POUR EUX

j’existe quand je donne

Geznah.S | The Silence Reader

Introduction – Ce livre est pour toi

Il ne s’agit pas ici d’un seul visage.

Il ne s’agit pas de « Kaël » ou de « Liora ». Il s’agit de toi, de moi, de nous.

De ceux et celles qui ont appris à donner… parfois trop.

De ceux et celles qui sont devenus des portefeuilles avant d’être des personnes.

Ce livre ne raconte pas une seule histoire, mais deux voix. Deux chemins.

Un homme. Une femme.

Ils ne se connaissent pas.

Ils ne vivent pas au même endroit.

Mais leurs cœurs portent le même poids.

Parce que que tu sois un homme ou une femme, il y a des moments où tu as compris que, pour certains, tu n’existes que quand tu donnes.

Ce livre parle de cette douleur silencieuse.

De ces messages qui coûtent.

De ces appels sans amour, mais pleins d’attentes.

De cette solitude, même entouré.

Et de cette force qu’on trouve, malgré tout.

Tu n’es pas seul. Tu n’es pas seule.

Et peut-être qu’à travers Kaël et Liora, tu te reconnaîtras, un peu.

Et tu respireras, enfin.

Geznah.S | The Silence Reader

Chapitre 1 – Kaël : Toujours disponible

Geznah.S | The Silence Reader

“Coucou…”

Le message était tombé à 22h47. Juste un mot, mais Kaël savait déjà ce qui allait suivre.

Il a attendu. Pas pour répondre, non.

Pour laisser le reste arriver.

Et comme prévu, “Tu peux m’envoyer 200 ?”

À ce moment-là, il n’a même pas levé les sourcils.

Il ne s’est pas demandé si c’était urgent. Il ne s’est pas énervé non plus.

Il a juste soufflé.

Un souffle long, vide, fatigué.

Parce que ça fait longtemps que Kaël a compris quelque chose :

Quand on lui dit “coucou”, ce n’est jamais juste pour prendre de ses nouvelles.

C’est pour prendre tout court.

Avant, Kaël croyait qu’évoluer allait le rapprocher des siens. Qu’il allait pouvoir rire avec eux, discuter, se raconter les choses de la vie.

Mais aujourd’hui, chaque message est devenu une transaction déguisée.

Chaque appel contient un petit piège.

Il ne savait plus comment dire “non”.

Il avait essayé une fois.

On l’avait appelé égoïste

On l’avait dit changé, oublié d’où il vient.

Mais Kaël, lui, il se souvient très bien.

Il se souvient d’où il vient.

De tout ce qu’il a traversé.

Des nuits blanches. Des humiliations. Des sacrifices.

Ce que les autres ont oublié, c’est tout ce qu’il a payé pour en arriver là.

Aujourd’hui, même sa mère termine ses appels avec un petit rire nerveux : “T’as quelque chose pour ta maman ?”

Et à chaque fois,

Kaël se demande :

Est-ce qu’on m’aime encore quand je ne donne rien ?

Il est devenu le pilier.

La roue de secours.

La réponse facile aux problèmes des autres.

Mais lui, qui lui demande comment il dort ?

Qui lui demande s’il va bien ? Personne.

Il n’est plus un homme. Il est devenu une banque.

Chapitre 2 – Liora : Ce n’est jamais pour moi

Geznah.S | The Silence Reader

“Coucou, tu vas bien ?”

Elle lit le message, les yeux fixes, le cœur déjà fermé.

Elle sait ce qui arrive.

Et voilà :

“J’ai un petit souci, tu pourrais m’aider ?”

Liora est loin. Loin de tout.

Loin de sa maison.

Loin des bras qui l’ont portée.

Loin des regards familiers.

Elle s’est éloignée pour construire une vie, pas pour devenir un distributeur de solutions.

Quand elle est partie, elle avait des rêves.

Elle croyait qu’en travaillant dur, elle allait être une fierté.

Elle allait rendre les choses plus faciles pour ceux qu’elle aime.

Mais ce qu’elle est devenue, c’est un outil.

Un moyen.

Pas une personne.

Pas une fille.

Pas une sœur.

Juste… là quand il faut envoyer.

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Elle répond toujours.

Pas parce qu’elle peut.

Mais parce qu’elle n’arrive pas à ignorer.

Elle ne veut pas qu’on souffre.

Même si elle, elle souffre en silence.

Les messages viennent toujours avec les mêmes phrases :

“T’as oublié la famille ?”

“T’es bien là-bas, toi.”

“Tu fais genre t’as plus rien.”

Mais personne ne sait qu’elle pleure seule, qu’elle mange peu, qu’elle dort mal, et qu’elle travaille plus qu’elle ne vit.

Parfois, le soir, quand elle éteint les lumières, elle regarde le plafond et se demande :

“Est-ce que je suis un sacrifice ?”

Parce que c’est ce que ça ressemble à.

Elle a quitté ses repères, ses rêves, son confort, et elle a tout donné.

Mais personne ne la voit.

On voit ce qu’elle envoie.

On compte ses efforts comme des obligations.

Mais jamais comme des preuves d’amour

Elle voudrait parfois juste un appel.

Un message qui dit :

“Tu me manques.”

“Comment tu vas, sincèrement ?”

Pas pour demander.

Pas pour quémander.

Juste pour se connecter.

Mais non.

Chaque “coucou” est une demande.

Chaque “bonjour” cache une facture.

Et Liora reste là, à se demander :

“Qui pense à moi, moi ?”

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Chapitre 3 – À Kaël, le message de trop

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Un jour, c’est arrivé.

C’était le message de trop.

Il ne l’a même pas ouvert.

Parce qu’il connaissait la suite.

Il a regardé son écran.

Il a senti une boule dans sa gorge.

Et il s’est demandé :

“Est-ce que je suis encore un frère ? Un fils ? Un ami ? Ou juste… une banque ambulante ?”

Il avait envie d’écrire :

“J’ai aussi des galères, tu sais. J’ai aussi des nuits sans sommeil, des matins sans courage, des jours où je me dis que tout ça, ça n’a aucun sens.”

Mais il ne l’a pas fait.

Parce qu’il savait que ce message-là… personne ne le lirait jusqu’au bout.

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Kaël, lui, ne savait plus quoi dire quand il recevait un message.

Parce que c’était toujours pareil.

Un petit “Salut, tu vas bien ?”, puis… les phrases longues, les demandes déguisées, les urgences qui tombaient comme des tuiles.

Il avait cru que c’était lui qui exagérait.

Mais à force, il a compris :

Ce n’était pas de l’amour. C’était de l’attente.

Il voulait parler de ses projets, de sa fatigue, de sa solitude.

Mais il n’y avait jamais la place pour ça.

Il écoutait les autres. Il portait leurs douleurs.

Mais quand c’était son tour,

personne n’était disponible.

Alors il s’est tu.

Il a commencé à ignorer.

Pas par vengeance. Pas par haine.

Mais parce que le silence devenait une protection.

Et comme Liora, il a été mal jugé.

“Tu fais le riche.”

“Tu oublies d’où tu viens.”

“Tu réponds plus. Tu changes.”

Personne ne comprenait que ce silence était un cri.

Un cri de fatigue.

Un cri de trop.

Il a mis son téléphone en mode silencieux.

Pas parce qu’il n’aimait plus les siens, mais parce qu’il n’arrivait plus à exister autrement.

Il voulait juste une voix qui lui dise :

“Kaël, tu vas bien ? Je t’appelle juste pour te parler, rien d’autre.”

Mais cette voix, il ne l’a plus jamais entendue.

Et c’est là qu’il s’est dit :

“Ce n’est pas que je suis devenu froid.

C’est juste que j’ai gelé sous les demandes, sans jamais recevoir une chaleur qui venait du cœur.”

Chapitre 4 – Liora : Le silence mal compris

Geznah.S | The Silence Reader

Au début, elle répondait à tous les messages.

Même aux “Coucou” envoyés à des heures étranges. Elle se disait : “Peut-être que quelqu’un a besoin de parler, juste ça.” Mais non. Toujours la même suite.

Des paragraphes. Des textes interminables. Des récits de problèmes, de dettes, de catastrophes soudaines.

Elle les lisait tous. Elle y croyait. Elle essayait de comprendre.

Jusqu’au jour où elle a réalisé… que chaque message était une commande, pas une confession.

Le ton montait, l’insistance s’installait. Les appels arrivaient. Plusieurs par jour.

“C’est urgent, Liora, réponds, s’il te plaît.”

Mais l’urgence, maintenant, elle la sentait en elle.

Celle de ne plus exister que comme une carte bancaire.

Elle avait aussi des nuits sans sommeil.

Des retards de loyers. Des douleurs qu’elle gardait pour elle. Mais personne ne demandait : “Toi, Liora, ça va vraiment ?”

Non. Parce que Liora, c’était le pilier. La solide. La guerrière.

Et un jour, elle a cessé de répondre.

Pas par orgueil.

Pas par égoïsme.

Mais par épuisement.

Chapitre 5 : Liora – Maman, moi aussi j’ai mal

Geznah.S | The Silence Reader

Il était 21h37. Un message s’afficha sur son écran. “Coucou, ma fille.”

Liora soupira. Elle connaissait déjà la suite. Elle l’aimait, sa mère, profondément. Mais ce “coucou” n’était plus doux. Il était devenu un signal. Le début d’une demande.

Elle ouvrit le message avec une lenteur mêlée d’appréhension. Les lignes suivantes défilèrent : des factures à payer, des urgences, des phrases comme “je ne sais plus quoi faire”, “tu es notre seule solution”, “on compte sur toi”.

Liora ne répondit pas tout de suite. Elle regarda son plafond. Ses yeux se remplirent d’eau. “Maman, moi aussi j’ai mal.”

Mais ce message-là, elle ne l’écrivit jamais.

Elle aurait voulu dire que ses nuits étaient courtes, que son dos lui faisait mal à force de se lever tôt et de porter tout, toute seule. Elle aurait voulu dire qu’elle se battait, pas pour briller, mais pour survivre. Qu’elle avait peur du futur, qu’elle se sentait seule même entourée. Qu’elle avait besoin d’un “coucou” sincère, sans pression, sans poids, juste une main tendue, même à distance. Geznah.S | The Silence Reader

Mais à la place, elle répondit : “Tu as besoin de combien ?”

Ses doigts tremblaient. Elle détestait cette version d’elle-même : la version automatique, celle qui ne dit jamais non, même quand elle n’en peut plus.

Liora pensait parfois qu’elle aurait aimé se confier. Dire qu’elle pleurait sous la douche pour ne pas alerter ses colocataires. Qu’elle mangeait peu, pas parce qu’elle voulait garder la ligne, mais parce qu’elle devait choisir entre le frigo et les virements.

Mais elle ne se plaignait jamais. Parce que si elle pleurait, qui allait sécher les larmes des autres ?

Dans le silence de sa chambre, elle regarda le message envoyé. Il n’y avait aucune trace de son propre mal. Seulement une réponse. Une habitude.

Et pendant que le monde dormait, elle, elle pleurait… en silence. Comme d’habitude.

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“Ils ne demandent pas une petite aide, un coup de pouce. Non. Ce sont des montants qu’ellemême n’a pas. Et s’ils savaient ce qu’il lui reste après le loyer, après les charges, après les courses ? Ils ne demandent pas moins. Ils demandent plus que ce qu’elle peut, parce qu’ils ont oublié qu’elle aussi est humaine.”

Chapitre 6 : Kaël – Invisible sauf pour mon compte bancaire

Il avait essayé d’être là pour tout le monde. Présent, généreux, solide. Mais au fil des mois, Kaël avait compris une chose brutale : il ne comptait que lorsqu’il pouvait aider. Il ne brillait que quand il payait. Le reste du temps, c’était comme s’il n’existait pas.

Les messages qu’il recevait suivaient toujours le même schéma. Ça commençait gentiment, un “frérot”, un “t’es là ?”… et puis venaient les paragraphes de plaintes, les urgences soudaines, les montants précis. Il connaissait ce théâtre. Il avait déjà tout lu. Toujours des besoins, jamais une vraie question sur sa vie, ses sentiments, sa santé mentale. Personne ne lui demandait s’il dormait bien, s’il tenait le coup. Et lui, il n’osait pas dire qu’il allait mal. Parce que quand un pilier se plaint, c’est le toit qui s’effondre.

Alors il encaissait. Il donnait. Et il se taisait.

Mais ce silence devenait lourd. Très lourd.

Il s’était surpris à se demander : “Si demain, je n’ai plus rien, est-ce qu’il restera quelqu’un autour de moi ?”

La vérité, il la connaissait. Et elle lui faisait plus mal que toutes les dettes du monde.

Un jour, c’est son cousin — presque comme un frère — qui l’a appelé. La voix pressée, agitée.

— « Frérot, j’ai un souci… C’est urgent, j’te jure. Faut que tu m’aides. »

Kaël, cette fois-là, avait hésité. Il venait à peine de payer son loyer, ses courses, quelques factures laissées en retard. Il n’avait plus rien à envoyer. Et puis, il était fatigué. Fatigué qu’on ne l’appelle que pour ça.

Alors il a dit doucement :

— « Là, je peux pas. J’suis désolé. »

Il y a eu un silence.

Puis la voix a changé. Froid. Tranchant. Ingrat.

— « Ah ouais ? C’est maintenant que tu choisis de faire le pauvre ? T’as oublié tout ce que j’ai fait pour toi ou quoi ? Toi aussi t’as changé. Dès que les gens ont un peu de confort, ils regardent plus personne. »

Kaël avait gardé le téléphone collé à son oreille, sans répondre. Il sentait son cœur cogner fort dans sa poitrine. Ce n’était pas juste la violence des mots. C’était la mémoire de tout ce qu’il avait déjà donné, sans jamais rien attendre.

Ce jour-là, quelque chose s’est cassé. Pas seulement entre lui et son cousin. Mais en lui. Il s’était dit :

« Donc tout ce que j’ai fait avant ne compte pas. J’existe que si je donne aujourd’hui. Sinon je ne suis rien. »

Il a raccroché. Pas dans la colère. Mais dans une sorte de vide. Ce genre de vide qui fait plus mal que les cris.

Chapitre 7 : Liora – L’angoisse des

appels

Geznah.S | The Silence Reader Le téléphone vibre. Encore.

Elle n’a même pas besoin d’ouvrir le message.

Liora n’y arrive plus. Ce n’est pas qu’elle ne veut pas aider. C’est qu’elle ne peut plus. Elle ne sait même plus comment se porter elle-même. Mais elle ne le dit pas. Elle ne le dit jamais. Parce que Liora n’aime pas se plaindre.

Elle a toujours été celle qui encaisse, qui rassure, qui envoie quand elle peut — ou même quand elle ne peut pas. Et pourtant, chaque fin de mois, c’est la même rengaine. Les messages qui pleuvent. Les appels enchaînés. Comme si elle n’était plus qu’un distributeur automatique d’aide.

Elle se souvient d’un moment, pas si vieux, où elle a lu un message et n’a pas répondu tout de suite. Deux jours plus tard, la même personne l’a bloquée. Juste parce qu’elle n’avait pas envoyé quelque chose.

Geznah.S | The Silence Reader

Liora a compris alors : tant que je donne, je vaux quelque chose. Le jour où je dis “non”, je deviens mauvaise, égoïste, oubliée.

Elle regarde son écran qui continue de vibrer. Elle baisse la luminosité. Et elle pense :

« Est-ce que je vais devoir m’excuser d’être fatiguée ? »

Elle se sent piégée. Prisonnière d’une image qu’on attend d’elle. Une image forte, disponible, généreuse. Mais à l’intérieur, elle se sent vide.

Elle repense à ce jour, il y a quelques semaines. Elle n’avait plus rien. Vraiment plus rien. Pas même assez pour elle. Et pourtant, elle avait envoyé ce qu’elle pouvait. Un geste, un effort de plus. Et la réponse qu’elle avait reçue était sèche, brutale : « C’est tout ? »

Ces deux mots l’avaient transpercée.

Elle aurait voulu répondre, expliquer. Mais à quoi bon ? Elle le savait : les gens n’écoutent pas ce que tu ressens. Ils n’entendent que ce que tu donnes. Et si tu ne donnes pas, tu es mauvaise.

Alors elle était restée silencieuse.

Geznah.S | The Silence Reader Et depuis ce jour, à chaque appel, à chaque message, Liora entend résonner ces deux mots, même quand ils ne sont pas dits.

« C’est tout ? ».

Non. Ce n’est pas tout. Mais c’est tout ce que j’ai.

Elle se lève doucement, comme si chaque mouvement pesait. Elle s’approche du miroir, regarde son reflet. Son visage est marqué, pas de rides, non — mais de fatigue invisible. La fatigue de devoir toujours être disponible. Toujours être forte. Toujours être “la bonne”.

Elle murmure à son reflet, comme une prière discrète :

« Et moi, qui me demande si j’ai mangé ? Qui m’appelle quand je suis fatiguée ? Est-ce que quelqu’un pense à moi… quand je ne sers plus à rien ? »

Silence. Geznah.S | The Silence Reader

Puis elle éteint la lumière.

Chapitre 8 : Kaël – Le burn-out du cœur

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Il n’avait rien vu venir.

Kaël pensait qu’il était fort. Il avait grandi avec l’idée qu’un homme ne se plaint pas. Qu’un homme tient bon, même quand tout s’écroule. Alors, il a tenu. Longtemps. Trop longtemps.

Jusqu’à ce jour-là.

Il s’était levé comme d’habitude. S’était habillé, avait souri dans le miroir, avait répondu à quelques messages comme s’il allait bien. Et puis, en plein milieu d’un trajet, dans le métro bondé, il a senti son cœur s’emballer. Ses mains tremblaient. Il avait l’impression qu’il allait tomber, s’effondrer. Il ne savait plus respirer.

C’était ça, un burn-out. Pas seulement du travail. Mais un burn-out du cœur.

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Son cœur était fatigué. Épuisé de donner sans recevoir. Épuisé de porter des problèmes qui n’étaient pas les siens, mais qu’on lui balançait sans cesse comme s’il était un coffre-fort sans fond.

Il a quitté le métro à la station suivante, s’est assis sur un banc, et a regardé ses messages.

Trois appels manqués. Cinq messages non lus. Tous différents, mais avec le même fond :

« Kaël, c’est urgent. »

« Kaël, tu peux m’envoyer 150 ? »

« Kaël, si tu ne m’aides pas, je suis foutu. »

Et à ce moment-là, il s’est demandé :

« Et moi ? Qui m’aide, moi ? Qui voit que je suis à bout ? »

Il a mis son téléphone en mode avion. Pas pour une heure. Pas pour une journée. Mais pour se sauver.

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Parce que s’il ne le faisait pas, il savait qu’il allait disparaître pour de vrai, noyé sous le poids de toutes les attentes, des promesses à moitié tenues, des regards accusateurs quand il ne pouvait plus donner.

Il n’avait pas cessé d’aimer sa famille. Ni ses proches. Mais il s’était oublié.

Et ce jour-là, sur ce banc froid, il a décidé que son cœur méritait aussi du repos.

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Chapitre 9: Liora – Et si je disparaissais ?

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Il y a des silences qui parlent plus fort que les cris.

Liora s’était toujours dit qu’un jour, elle allait juste… disparaître. Pas dans le drame. Pas dans la colère. Mais dans le silence. Sans bruit. Sans explication.

Elle en avait rêvé parfois. Prendre un billet, partir loin, changer de nom. Couper les réseaux. Oublier les messages. Les appels. Les demandes. Les obligations.

Juste exister pour elle. Dormir sans angoisse. Manger sans culpabilité. Respirer sans avoir à se justifier.

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Mais à chaque fois qu’elle pensait à fuir, une voix intérieure lui rappelait sa fille. Sa responsabilité.

Et puis… cette peur. Cette culpabilité d’oser penser à elle.

« Et si je disparaissais ? », pensait-elle, les yeux ouverts dans le noir, après un appel de trop, après un énième message demandant encore plus que ce qu’elle avait déjà donné.

Mais au fond, ce qu’elle voulait vraiment… c’était qu’on remarque qu’elle était là. Qu’on voit tout ce qu’elle portait, sans jamais le dire.

Pas pour être applaudie.

Juste pour qu’on lui dise une fois : “Liora, tu as le droit d’exister pour toi.”

Elle ne voulait pas tout abandonner.

Elle voulait qu’on la comprenne avant qu’il soit trop tard.

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Chapitre 10: Kaël – Le sacrifice sans merci

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Il y a des sacrifices qui construisent. Et d’autres qui consument.

Kaël ne comptait plus les fois où il avait donné sans rien dire. Où il avait serré les dents, ajusté son budget, reporté ses projets — juste pour pouvoir répondre à un message de détresse.

Mais cette fois-là, celle qui lui restait gravée, c’était différente.

C’était un membre de la famille. Quelqu’un qu’il respectait profondément.

Il n’avait pas pu envoyer l’argent ce jour-là. Pas parce qu’il ne voulait pas. Mais parce qu’il n’avait tout simplement pas.

Et ce proche-là, sans attendre une explication, lui avait craché des mots qu’il n’oublierait jamais. « T’as changé. Avant, t’étais généreux. Maintenant, tu fais le riche, mais t’as le cœur sec. ».

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Kaël était resté silencieux, choqué.

Ce n’était pas la première demande. C’était la quinzième ce mois-là. Et la seule fois où il n’avait pas pu, il devenait soudain le mauvais.

Il a raccroché, le cœur serré. Il est resté là, sans bouger, à fixer le mur. Il ne pleurait pas — il avait dépassé ce stade. Mais à l’intérieur, quelque chose s’était effondré.

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Il avait tout donné. Parfois jusqu’à ne plus manger correctement, jusqu’à prendre des dettes pour aider. Mais on ne s’en souvenait pas.

Le monde oublie vite les fois où tu dis « oui ». Il ne retient que le « non »

C’est là qu’il a compris : ce n’était pas un sacrifice.

C’était une offrande silencieuse que personne n’avait jamais reconnue. Et ce jour-là, Kaël a juré une chose :

Plus jamais sans moi. Plus jamais jusqu’à l’épuisement. Car un cœur trop vidé ne bat plus. Et il voulait vivre. Pour lui, cette fois.

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Partie 3 : Reprendre son nom

Chapitre 11 : Liora – Me choisir enfin

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Il y a des jours où Liora se regarde dans le miroir, et elle ne sait plus vraiment qui elle voit. Elle connaît ce visage, bien sûr. Mais les yeux, eux, ont changé. Ce ne sont plus des yeux qui espèrent, mais des yeux qui supportent. Chaque matin, elle enfile son masque de force, de calme, de générosité. Et chaque soir, elle l’enlève en silence, seule avec son épuisement.

Liora n’a pas toujours été comme ça. Avant, elle aimait faire plaisir. Offrir, aider, soutenir. C’était naturel. C’était elle. Mais petit à petit, ce « donner » est devenu une attente. Puis une exigence. Puis une condition. À force, elle n’existait plus qu’à travers ce qu’elle pouvait offrir aux autres. Et quand elle ne pouvait pas, elle devenait invisible. Ou pire, égoïste.

Geznah.S | The Silence Reader Un jour, assise dans sa petite chambre qu’elle paie trop cher, elle a reçu un message de sa sœur. Un simple : « T’as reçu ton salaire ? J’ai besoin de 300 euros urgents. »

Pas de bonjour. Pas de « comment tu vas ». Rien. Juste ça. Une commande. Comme si Liora était une carte bancaire vivante.

Elle a laissé le message sans réponse pendant deux heures. Deux heures où elle a juste respiré. Deux heures à se demander si, pour une fois, elle pouvait penser à elle. Elle aussi, elle avait une facture en retard. Elle aussi, elle n’avait pas dormi depuis deux nuits à cause de l’anxiété. Elle aussi, elle avait pleuré la veille en silence, dans le métro.

Ce jour-là, elle n’a pas répondu. Pas parce qu’elle ne voulait pas aider. Mais parce qu’elle ne pouvait plus s’oublier.

Ce soir-là, Liora s’est fait une promesse. Une toute petite, mais immense pour elle : Se choisir. Juste une fois. Puis encore. Puis encore.

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Ce ne sera pas facile. Elle le sait. Les reproches viendront. Les jugements aussi. On la traitera de froide, d’ingrate, d’égoïste. Mais personne ne sait ce que ça coûte, d’être toujours disponible pour les autres et jamais pour soi.

Alors ce soir, elle a fermé son téléphone. Et elle s’est regardée dans le miroir, sans détourner les yeux.

— Je suis là, Liora. Je ne te laisserai plus tomber.

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Chapitre 12 : Kaël – J’ai dit non

Geznah.S | The Silence Reader Il avait toujours dit oui.

Oui, quand on l’appelait tard le soir pour « juste un petit coup de main »

Oui, quand un proche lui disait que c’était une urgence, même si ça ne l’était pas.

Oui, même quand son propre compte était à découvert. Oui, même quand son corps disait non.

Kaël avait été élevé dans l’idée que refuser, c’était trahir. Qu’un homme bon ne laisse jamais tomber. Que l’amour se prouve par le sacrifice.

Mais ce jour-là, quelque chose a basculé.

Ce n’était pas une journée spéciale. Juste un mardi banal. Il venait de finir une journée épuisante, avec mal de dos, migraine, et la tête pleine de chiffres et de tâches non terminées. Et puis, le message est arrivé. Presque comme une habitude. Geznah.S | The Silence Reader

« Je t’envoie mon RIB. C’est vraiment urgent cette fois. »

Pas de contexte. Pas de vrai échange. Rien que cette phrase, directe, pressante, automatique.

Kaël a regardé l’écran longtemps. Et puis il s’est vu, lui. Pas comme d’habitude — fort, responsable, toujours prêt — mais comme un homme vidé. Vidé d’avoir toujours été le pilier de tout le monde, et jamais de lui-même.

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Alors il a répondu :

« Je suis désolé. Pas cette fois. »

Il a relu son message trois fois. Il avait les mains moites, la gorge serrée. Il s’attendait à la colère. À la culpabilisation. À ce fameux « t’as changé ». Et il avait raison. La réponse est arrivée, glaciale.

« Ok. T’as trop pris la grosse tête. Bonne chance. »

Et là, quelque chose en lui s’est figé. Pas de douleur. Pas de remords. Juste un silence. Un silence nouveau. Un silence qui ne fait pas mal. Un silence de paix.

Il s’était toujours dit que le jour où il oserait dire non, il perdrait l’amour des autres.

Geznah.S | The Silence Reader

Mais à cet instant précis, Kaël a compris une chose : Ceux qui ne t’aiment que quand tu dis oui, ne t’aiment pas vraiment.

Et c’est ce jour-là qu’il a commencé à respirer. Pour lui. Geznah.S | The Silence Reader

Chapitre 13 : Kaël – L’argent ne dit pas qui je suis

Geznah.S | The Silence Reader

Il y a une chose que personne ne dit à haute voix : Quand tu réussis un peu, les gens ne voient plus ta fatigue. Ils ne voient plus l’effort. Ils ne voient plus les nuits blanches. Ils ne voient que ce qu’ils croient être ton confort.

Pour Kaël, tout avait changé le jour où il avait commencé à mieux gagner sa vie. Avant, on l’appelait pour parler, rire, s’encourager. Maintenant, on l’appelait pour des solutions, des paiements, des transferts.

Petit à petit, on ne lui posait plus la question « Comment tu vas ? »

On lui disait juste « Dis-moi si tu peux m’aider ».

Comme si son humanité avait été effacée. Comme si, dans leurs yeux, il était devenu une carte bancaire avec un prénom.

Mais l’argent n’avait jamais été son identité. Il n’avait jamais voulu être celui qu’on aime parce qu’il peut offrir. Il voulait être écouté, compris, vu. Et parfois, juste pris dans les bras.

Geznah.S | The Silence Reader

Il se souvenait de ce jour où il avait dit à un proche :

« Tu sais, j’ai pas la force aujourd’hui. Je suis fatigué. »

Et cette personne avait répondu :

« Fatigué ? Avec tout ce que tu as ? Arrête de faire le riche qui se plaint. »

Ce jour-là, Kaël avait compris qu’il fallait qu’il reprenne son nom.

Qu’il redevienne une personne, pas un statut.

Qu’il apprenne à dire :

« Mon cœur est plus précieux que mon compte. »

« Ma paix vaut plus que votre reconnaissance conditionnelle. »

Parce qu’il en avait assez d’être aimé pour ce qu’il pouvait donner.

Assez de n’être vu qu’à travers le prisme de l’argent.

Assez d’être confondu avec ce qu’il possède.

Kaël a décidé de se rappeler qui il était, sans les chiffres, sans les zéros, sans les virements. Un homme. Un être humain. Pas une promesse d’aide éternelle.

Geznah.S | The Silence Reader

Chapitre 14 : Liora – J’existe, même quand je ne donne pas

Geznah.S | The Silence Reader

Il y a des jours où Liora n’arrive plus à ouvrir ses messages.

Parce qu’elle sait déjà ce qu’elle va lire.

Ce ne sont plus des nouvelles. Ce ne sont plus des « Tu vas bien ? ».

Ce sont des problèmes. Des urgences. Des chiffres. Des promesses à rembourser plus tard.

Avant, elle répondait toujours.

Avant, elle trouvait toujours un moyen.

Même quand elle-même ne dormait plus bien. Même quand ses propres factures attendaient.

Mais maintenant, elle n’a plus la force. Et plus elle dit non, plus les gens s’éloignent.

Comme si son amour, son existence, sa valeur… dépendaient uniquement de ce qu’elle pouvait donner. Geznah.S | The Silence Reader

Mais elle, elle aimerait juste être regardée. Être appelée parce qu’elle manque. Pas parce qu’elle est utile.

Elle aimerait qu’on se souvienne de son anniversaire, pas juste du jour de paie. Elle aimerait qu’on l’écoute quand elle dit qu’elle est fatiguée.

Qu’on lui dise « Tu veux qu’on parle ? », au lieu de « Tu peux m’envoyer ? »

Ce n’est pas qu’elle ne veut plus aider.

C’est qu’elle veut aussi exister.

Sans devoir toujours prouver son amour par des virements.

Parce que l’amour ne devrait pas ressembler à une dette. Et l’attention ne devrait pas être une facture.

Geznah.S | The Silence Reader

Liora existe. Même quand elle ne donne pas.

Même quand elle est silencieuse. Même quand elle se protège. Même quand elle pense d’abord à elle, pour une fois.

Elle n’est pas égoïste.

Elle est en train d’apprendre à respirer.

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Conclusion – L’humanité sans condition

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Cette histoire, peut-être, ce n’est pas seulement celle de Liora et Kaël.

Ce n’est pas leur histoire, c’est aussi la tienne, la mienne, celle de tous ceux qui, un jour, se sont sentis invisibles malgré leurs efforts.

Ce n’est pas seulement un récit de personnages fictifs, mais une histoire qui peut toucher tout le monde, que l’on soit un homme ou une femme, un jeune ou un adulte.

Liora et Kaël, ce sont des prénoms, des vies entrelacées par le besoin, la douleur, la solitude et les sacrifices.

Mais ces prénoms, ce sont aussi des métaphores.

Des métaphores de ce que beaucoup d’entre nous vivent sans le dire.

Ce sont des symboles de ceux qui, trop souvent, se perdent à vouloir donner sans jamais prendre, à vouloir plaire sans jamais être vus.

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Peut-être que toi aussi, tu as donné quand tout semblait trop lourd, Peut-être que tu as pris sur toi, encore et encore, jusqu’à t’oublier.

Peut-être que tu t’es retrouvé à te demander, comme Liora, si tu étais simplement un sacrifice.

Ou peut-être, comme Kaël, tu as dit “non” pour la première fois, brisant des années de soumission silencieuse.

Les personnages sont là pour te montrer qu’il n’est pas nécessaire de se sacrifier pour exister. Que dire “non” n’est pas un acte d’égoïsme, mais de survie.

Que donner n’est pas toujours un acte d’amour, mais parfois un fardeau qu’on porte sans y réfléchir. Geznah.S | The Silence Reader

Cette histoire peut être la tienne.

Elle est universelle.

Elle nous touche tous, car derrière chaque prénom, derrière chaque douleur, derrière chaque sacrifice, il y a une humanité commune.

Peu importe qui tu es, peu importe d’où tu viens, tu as de la valeur.

Et tu n’as pas à être un sacrifice pour être vu, pour être aimé, pour être respecté.

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Remerciements

Je tiens à remercier chacun d’entre vous qui a pris le temps de lire cette histoire, d’y trouver un peu de vous-même ou de ceux que vous connaissez. C’est un voyage qui n’aurait pas eu de sens sans votre attention et votre ouverture.

À tous ceux qui se sont un jour sentis invisibles, incompris, ou écrasés par le poids des attentes : vous n’êtes pas seuls. Cette histoire est pour vous, et pour ceux qui continuent de se battre, malgré tout.

Merci pour votre soutien, votre patience et votre foi en l’histoire humaine. Geznah.S | The Silence Reader

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