La Gazette du 221B - N°16 - Mai 2024

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Grand dossier Baker Street Irregulars

La clef de voûte du mouvement holmésien, son histoire, ses activités

Entretiens exclusifs

Dan ANDRIACCO

Ray BETZNER

Steven DOYLE

Andrew SOLBERG

Portrait de Christopher MORLEY

Par Harrison HUNT

Le BSI dinner 2024

Retour en images sur les événements du week-end

Les nouvelles investitures

N° 16 - Mai 2024 @Baker Street Irregulars

Édito

La Gazette du 221B revient avec un nouveau format. Vous pouvez désormais soit télécharger le numéro, soit le feuilleter en ligne. On espère que ce nouveau design vous plaira. N’hésitez pas à nous faire part de vos réactions sur le groupe Facebook du magazine. Et pour ce retour, c’est un numéro exceptionnel de 50 pages que nous vous proposons, consacré aux Baker Street Irregulars de New York. Ce club, fondé en 1934, a une réputation internationale et vient de fêter ses 90 années d’existence. C’est la plus ancienne société consacrée à l’étude du Grand Détective.

Les BSI comptent environ 300 membres dans le monde entier et chacun a reçu, lors de son investiture, un nom issu des aventures de Sherlock Holmes. Environ la moitié assiste au dîner annuel à New York, autour de la date d’anniversaire que Christopher Morley a établi pour Holmes, le 6 janvier. J’ai eu la chance d’être invitée au dîner en janvier dernier et le grand bonheur d’avoir reçu l’investiture, qui n’est accordée que sur proposition des membres et décision du Wiggins. Mais le week-end entourant le dîner BSI est désormais ponctué de conférences, d’autres dîners, cocktails et autres événements, dont beaucoup sont ouverts à tous. J’ai passé quatre journées inoubliables à revoir d’anciens amis, à faire de nouvelles connaissances, à apprendre mille choses sur les activités holmésiennes organisées non seulement aux États-Unis, mais également aux quatre coins du globe. La dernière partie de ce numéro revient sur cet événement avec un compte-rendu des temps forts de ce week-end et un portrait de chaque membre de la promotion 2024.

J’ai aussi réalisé que finalement, je connaissais bien peu de choses sur ce club mythique, qui est devenu une pierre angulaire du monde holmésien et qu’il serait intéressant de porter un coup de projecteur sur sa création et son actualité, car les BSI ont su évoluer et étendre leurs activités au fil des ans. Ils dirigent aujourd’hui un Trust qui gère leurs archives et encourage les recherches, une maison d’édition (BSI Press) et un magazine trimestriel (The Baker Street Journal). Vous trouverez ici des entretiens exclusifs avec les responsables de ces organisations. C’est donc un numéro exceptionnel qui accompagne ce retour de La Gazette, mais nos rubriques habituelles seront de retour dès le prochain numéro, dont le dossier central sera consacré aux 40 ans de la série de la Granada et à la convention organisée en l’honneur de cet anniversaire qui se déroule à Guilford (Royaume-Uni) le 25 mai prochain.

Au sommaire de ce numéro

L’histoire des BSI

Les origines et l’évolution des Baker Street Irregulars............................................................... P 3

Portrait de Christopher Morley, par Harrison Hunt ...................................................................... P 9

Les activités des BSI

Le BSI Trust - Interview de Ray Betzner........P 13

Le BSI Press - Interview d’Andrew Solberg...P 16

Le Baker Street Journal - Interview de Steven Doyle, éditeur......................................................P 21

Le Baker Street Journal - Interview de Dan Andriacco, rédacteur en chef ..........................P 24

Le week-end BSI 2024

Photoreportage ................................................. p 26

La promotion 2024............................................ p 42

La gazette du 221 B - N°16- Mai 2024 2

Les origines et l’évolution des Baker Street Irregulars

Drôle d’histoire que celle des BSI… Ou comment l’envie de quelques érudits, souhaitant discuter de leur détective préféré en partageant une bonne bouteille, s’est peu à peu muée en une institution. Coup de chance ou évolution prévisible ? Sans doute un peu des deux. Il est cependant certain que l’aventure du premier et plus célèbre club holmésien du monde va se mêler à la grande Histoire du 20e siècle, à ses remous comme à ses avancées.

En 1930, Arthur Conan Doyle vient de rendre son dernier soupir. Le succès, déjà faramineux, des histoires de Sherlock Holmes s’accroît encore. Le livre de S. C. Roberts, Dr. Watson, est publié en 1931, Sherlock Holmes, Fact or Fiction de T. S. Blakeney en 1932, Sherlock Holmes et le docteur Watson de H. W. Bell et La Vie privée de Sherlock Holmes de Vincent Starrett suivent en 1933.

Mais la crise économique qui a éclaté en

1929 fait rage et les États-Unis sont soumis depuis dix ans à des lois de prohibition peu appliquées ou inefficaces. À New York, certains intellectuels, lassés de devoir organiser leurs fêtes clandestinement, n’hésitent plus à braver la loi et tiennent salon dans des speakeasies pour parler de littérature.

Parmi ceux-ci, Christopher Morley, journaliste, romancier, essayiste et fondateur de la Saturday Review of Literature

3 L’histoire des BSI
Le BSI Dinner de 1940. @Baker Street Irregulars

aime aussi partager ses repas avec des amis et crée de nombreux clubs qui se réunissent périodiquement. L’un de ses favoris est le « Three Hours for Lunch Club », qui se réunit dans les bars clandestins de Manhattan à partir de 1920 environ. De là est né en 1931 le « Grillparzer Sittenpolizei Verein » (Grillparzer Morals Police Association) ou le « Grillparzer Club », que Morley a baptisé d’après un livre acheté au hasard.

Les membres du club (c’est-à-dire les participants ayant signé le livre) comprennent W. S. Hall, Rex Stout, Edward G. Robinson, Elmer Davis, A.A. Milne,

Buckminster Fuller, Robert Montgomery, Nelson Doubleday, Ginger Rogers, les frères Frank et Felix Morley, Don Marquis, Ogden Nash, H. G. Wells, A. S. W. Rosenbach, T. S. Eliot, Gene Tunney ou Judith Anderson. Plusieurs partagent l’intérêt de Morley pour Sherlock Holmes.

À la fin de 1933, l’Amérique obtient ce qu’elle veut pour Noël : la fin de la Prohibition. Cette même année, la Saturday Review of Literature publie plusieurs articles sur Sherlock Holmes et la pratique consistant à poser des questions difficiles commence à apparaître dans les clubs de Morley (le perdant devant payer une tournée de boissons).

Quelques-unes concernent le Canon et certains membres commencent à le relire d’un peu plus près. Morley annonce alors que la Saturday Review of Literature publiera un numéro le 6 janvier 1934, date de l’anniversaire de Sherlock Holmes, et organise un dîner pour fêter l’événement à l’hôtel Duane, fondant ainsi le BSI. Le moment est venu pour la sodalité – et même pour le whisky et la sodalitédit Christopher Morley , et l’idée d’un club appelé les Baker Street Irregulars vient simultanément à Starrett à Chicago et à Morley à New York.

Peu de temps après, la Constitution et le règlement intérieur du BSI d’Elmer Davis sont publiés

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@Baker Street Irregulars

CONSTITUTION

DES BAKER STREET IRREGULARS par Elmer Davis

• ARTICLE PREMIER

Le nom de cette société sera les Baker Street Irregulars.

• ARTICLE II

Son objet sera l’étude des Écritures sacrées.

• ARTICLE III

Seront éligibles à l’adhésion toutes les personnes qui réussissent un examen sur les écrits sacrés établi par les dirigeants de la société et qui sont considérées par ailleurs aptes.

• ARTICLE IV

Les fonctions officielles seront : un Gasogène, un Tantale et un Commissionnaire.

Les fonctions du Gasogène seront celles communément exercées par un président. Les fonctions du Tantale seront celles couramment exercées par un secrétaire.

Les fonctions du commissionnaire seront de téléphoner pour obtenir des glaçons, des boissons gazeuses et tout ce qui peut être utile et disponible, de mener toutes les négociations avec les serveurs et de s’assurer que les frais sont partagés entre les membres.

RÈGLEMENT INTÉRIEUR

(1) Une réunion annuelle aura lieu le 6 janvier, au cours de laquelle seront portés les toasts publiés dans la « Saturday Review » du 27 janvier 1934 ; après quoi les membres boiront à volonté.

(2) La tournée en cours sera payée par le membre qui ne parvient pas à identifier une citation des Écrits sacrés soumise par un autre membre.

Qualification A. — Si deux membres ou plus ne parviennent pas à l’identifier, une tournée sera payée par chacun de ceux qui échouent.

Qualification B. — Si celui qui soumet la

citation commet une erreur à propos de celle-ci, c’est lui qui paie une tournée.

(3) Des assemblées extraordinaires peuvent être convoquées à tout moment et en tout lieu par l’un des trois membres du bureau. La présence de deux d’entre eux deux constitue le quorum.

Qualification A. — Si lesdits deux sont de sexes opposés, ils doivent faire preuve de prudence dans le choix du lieu de réunion, afin d’éviter toute mauvaise interprétation.

Qualification B. — Si ces deux personnes ont publié des annonces matrimoniales dans la « Saturday Review », ce qui précède ne s’applique pas ; ces personnes doivent se laisser guider par leur conscience.

(4) Toutes les autres questions seront débattues à l’assemblée mensuelle.

(5) Il n’y aura pas de réunion mensuelle.

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@Baker Street Irregulars

En mai 1934, Frank Morley (mathématicien et cadet de Christopher) crée une grille de mots croisés dont la réussite conditionne l’adhésion aux BSI. Christopher Morley la publie dans le SRL et demande aux lecteurs de lui envoyer leurs grilles complétées en indiquant que le premier dîner officiel sera organisé par les BSI en juin. Mais, même s’il reçoit des réponses de personnes des deux sexes, seuls les hommes seront invités aux dîners BSI à venir cette année-là, Morley ayant ajouté que « cette première rencontre sera exclusivement masculine », une décision qui hantera le BSI pendant près de soixante ans…

Le 5 juin 1934, le BSI organise donc son dîner à l’étage du Christ Cella’s, un ancien speakeasy devenu un restaurant renommé, coiffant au poteau la première réunion de la Sherlock Holmes Society of London qui se tient au restaurant Canuto’s à Baker Street le lendemain.

Puis, le 7 décembre a lieu le premier dîner annuel du BSI. Outre Morley, ses amis du club Grillparzer et certains gagnants de la

grille de mots croisés publiée dans le SRL, sont présents Archie Macdonell, fondateur de la Sherlock Holmes Society of England, Vincent Starrett de Chicago, Gray Chandler Briggs de Saint-Louis, H. W. Bell de Boston, William Gillette, Frédéric Dorr Steele ainsi que le critique de théâtre du New Yorker Magazine

Alexander Woollcott, que Morley ne porte guère dans son cœur… Innocemment invité ce soir-là par Vincent Starrett, Woollcott indigne quasiment l’ensemble des convives et publie ensuite un rapport moqueur sur l’événement dans le New Yorker Magazine . Peut-il être digne d’être considéré comme un authentique Irregular ? Cette question agite encore les cercles d’érudits et fut d’ailleurs débattue pendant le dîner de 2024.

Le BSI organise son deuxième dîner annuel en janvier. Entre-temps, des « Scions » (clubs holmésiens locaux se reconnaissant comme des « rejetons » des BSI) se forment, tels le Speckled Band of Boston ou les Six Napoléons of Baltimore et bien d’autres.

Morley a toujours considéré le BSI comme un club informel se réunissant à son gré et, après ce deuxième dîner, le club s’enfonce dans quatre longues années d’hibernation.

Entretemps, le vice-président de General Motors à New York, Edgar W. Smith, s’enthousiasme pour La Vie privée de Sherlock Holmes et, en janvier 1940, le BSI renaît

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grâce à ses efforts. Denis Conan Doyle, fils du romancier, assiste au dîner organisé cette année-là. Il y prononce un discours charmant, mais repart avec le sentiment que la mémoire de son père n’a pas été dignement honorée, ce qui conduira à une querelle entre les BSI et les fils de Sir Arthur. Smith est un homme d’action disposant de moyens conséquents. Morley, plus dilettante, lui laisse volontiers l’organisation du dîner. À partir de cette date, les BSI se réunissent chaque année. Smith en devient le moteur du club et le dirige pendant vingt ans. Se succéderont à la tête de l’organisation Julian Wolff à partir de 1960, Tom Stix en 1986, Mike Whelan en 1997 et enfin Michael Kean depuis 2020. Pendant la mandature de Smith, la taille du club ne cesse d’augmenter, accueillant en son sein des membres prestigieux tels que John Dickson Carr (1943), le président des États-Unis Harry S. Truman (en tant que

membre « Honoris Causa, 1946), Rex Stout (1949) ou William Baring-Gould (1952) et le Baker Street Journal connaît son premier âge d’or.

En 1944, Edgar W. Smith adresse une lettre à tous les BSI dans laquelle il stipule que l’investiture sera désormais accompagnée par l’attribution d’un nom tiré des soixante

histoires de Sherlock Holmes. En 1948, Cy Keller, banquier de Baltimore, suggère que les diplômes d’investiture soient accompagnés d’une pièce d’un shilling frappée pendant le règne de Victoria. Depuis lors, chaque nouveau membre des BSI reçoit un authentique shilling collé sur son certificat.

En 1958, le prix Morley-Montgomery est créé grâce à la générosité du légendaire libraire Lew D. Feldman. Il récompense chaque année l’auteur du meilleur article du Baker Street Journal de l’année précédente.

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Le BSI Dinner de 1992@Baker Street Irregulars

Il a été suspendu en 1980 puis rétabli en 1995.

Peu à peu, l’idée d’une distinction supplémentaire pour les membres ayant rendu des services exceptionnels à l’univers holmésien fait son apparition. C’est ainsi que le premier « Two Shillings Award » est attribué en 1962 à Rex Stout pour son « dévouement extraordinaire à la cause au-delà de l’appel du devoir ».

En 1968, un coup de tonnerre éclate dans le ciel holmésien. Au cours du cocktail qui précède le dîner, six étudiantes de l’Albertus Magnus College de New Haven, dans le Connecticut, décident de manifester devant le restaurant Cavanagh contre l’interdiction faite aux femmes de participer au repas. John Bennett Shaw et Peter Blau acceptent de lire leur manifeste devant l’assemblée... qui ne cache pas sa désapprobation.

Devant cette fin de non-recevoir, les jeunes femmes forment un club exclusivement féminin, les « Adventuresses of Sherlock Holmes », ou ASH qui organise dès lors un dîner mixte concurrent de celui des BSI, le « Gaslight Gala ».

Mais lors du cocktail de 1991, Tom Stix annonce l’investiture de six femmes (dont Dame Jean Conan Doyle). Contrairement au silence assourdissant qui avait suivi la lecture du manifeste en 1968, le discours de Stix sera interrompu par plusieurs standing ovations.

Depuis, les Adventuresses organisent un dîner le mercredi et un brunch le dimanche du week-end BSI. Au fil des ans, de nombreux autres événements holmésiens, ouverts à tous, se sont greffés autour du dîner comme par exemple le « Gillette Luncheon » depuis 1945, la « Morley Walk » (une balade commentée dans les rues de New York sur les traces du fondateur des Irregulars), la « BSI Distinguished Speaker Lecture » depuis 1998 (une conférence sur

un thème holmésien dispensée par un invité de prestige) ou, plus récemment, la remise des « Doylean Awards », décernés par l’ACD Society.

Enfin, les années 2000 voient la création du Trust et des archives afin de conserver la mémoire de ce passé glorieux, car si, bien évidemment, le club doit continuer à évoluer dans ce nouveau millénaire, l’âme insufflée par ses fondateurs doit se perpétuer et trouver une résonance à chaque nouvelle investiture !

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Portrait de Christopher Morley, fondateur des BSI

Par Harrison Hunt, BSI

Il est impossible de raconter l’histoire des BSI sans mentionner son fondateur, l’auteur américain Christopher Morley. Dans les années 1930, Morley, avec son camarade Vincent Starrett, fut au cœur d’un mouvement naissant dont le but était d’étudier et de célébrer Sherlock Holmes.

Leur initiative a rencontré un succès qui va bien au-delà de leurs rêves les plus fous.

Christopher Darlington Morley est né à Bryn Mawr, en Pennsylvanie, le 5 mai 1890. Ses parents étaient arrivés d’Angleterre l’année précédente lorsque son père, Frank, accepta un poste d’enseignant au département de mathématiques du Haverford College . Christopher passa ses dix premières années à Haverford, puis déménagea à Baltimore, dans le Maryland, en 1900 lorsque son père fut nommé chef du département de mathématiques de l’Université Johns Hopkins.

C’est à Baltimore que Christopher –« Kit » pour les intimes – commença à s’intéresser à Sherlock Holmes. Mais il ne se contenta pas de se passionner pour les récits. En effet, vers 1902, il

fonda, avec trois amis, son tout premier club pour étudier le Canon. Tout naturellement, ils l’appelèrent « le signe des quatre ». Plus tard, il initia à ses deux jeunes frères, Felix et Frank, aux aventures du Grand Détective, allant jusqu’à leur poser des colles sur chacune d’entre elles... le début d’une tradition perpétuée dans les groupes holmésiens jusqu’à aujourd’hui.

Après avoir terminé le lycée à Baltimore, Kit retourna au Haverford College en 1906 pour commencer son cursus universitaire. Il obtint sa licence de lettres, puis reçut l’une des rares et prestigieuses bourses « Rhodes » pour poursuivre ses études à l’Université d’Oxford au Royaume-Uni. Il y resta trois

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ans et y décrocha son diplôme en 1913. C’est là qu’il publia son premier livre, un recueil de poésie intitulé The Eighth Sin. Il y rencontra également Helen Fairchild, une touriste américaine qui devint plus tard sa femme.

À son retour aux États-Unis en 1913, Morley décida de se lancer dans le monde des lettres. Il obtint un emploi dans la maison d’édition Doubleday, Page and Company , située à Long Island, dans la banlieue de New York. Son travail consistait à examiner les ouvrages proposés et à dénicher de nouveaux auteurs. Il y apprit également les bases du business de l’édition.

À la même période, il commença à écrire ses propres œuvres pour arrondir ses fins de mois. Après quatre ans, Kit quitta

qu’il appela Green Escape . Lui et Helen y demeurèrent pour le reste de leurs vies et y élevèrent leurs quatre enfants.

Morley était un animal social qui aimait organiser des rencontres avec ses amis.

Pendant qu’il travaillait à New York, il fonda deux groupes, le Three Hours for Lunch Club et le Grillparzer Club , qui se réunissaient occasionnellement pour déjeuner, boire un verre et discuter à loisir. La convivialité de ces réunions a certainement ouvert la voie à la création des Baker Street Irregulars.

Lorsque le supplément littéraire du Pos t cessa d’être publié en 1923, Morley et quelques collègues créèrent leur propre magazine, The Saturday Review of Literature. Pendant plus de 14 ans, Kit y écrivit deux articles hebdomadaires : », où il donnait son point de vue sur l’actualité littéraire et « The », une chronique de réflexions personnelles.

Au milieu des années 1920, Morley a commencé à parler de Sherlock Holmes dans The Bowling Green ». Peu à peu, les références à Holmes se multiplièrent et la rubrique devint, au début des années 30, le bulletin d’information non officiel des holmésiens aux États-

C’est dans cette même chronique que Christopher Morley, pour la première fois, émit la théorie qui donne le 6 janvier comme date

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d’anniversaire de Holmes et annonça la première réunion des Baker Street Irregulars pour le fêter en janvier 1934. Par la suite, c’est encore dans cette colonne que seront publiés la Constitution et le Règlement Intérieur du groupe (qui sont toujours suivis par les BSI) ainsi que les célèbres mots croisés holmésiens créés par le frère de Kit, Frank, qui furent utilisés comme test d’entrée pour les premiers membres des Irregulars . Ces derniers organisèrent trois rencontres en 1934. La première était un petit rassemblement le 6 janvier pour célébrer l’anniversaire de Sherlock. Le 5 juin, un autre petit groupe tint la première réunion officielle des BSI, dont la date a été fixée pour que le club puisse se targuer d’une antériorité par rapport à la Sherlock Holmes Society of London , qui se réunissait pour la première fois le lendemain. Finalement, les Irregulars tinrent leur premier dîner officiel le 7 décembre. Cet événement comptait parmi ses invités de nombreux holmésiens respectés, qui prononcèrent des discours, portèrent des toasts et donnèrent le ton pour les futures réunions du groupe. Au bout de quelques années, Christopher Morley se lassa d’avoir à orchestrer ces rassemblements et, en 1940, il confia leur organisation à Edgar W. Smith, qui en fit un événement annuel. Smith fonda par la suite le Baker Street Journal et succéda à Morley à la tête des BSI.

Christopher Morley fut un auteur populaire aux États-Unis de la Première Guerre mondiale jusqu’aux années 1940, touchant à presque tous les genres littéraires. Son ouvrage le plus connu est le roman Kitty Foyle , paru en 1939, qui fut adapté en film en 1940. Cependant,

les holmésiens se souviennent surtout de lui pour ses écrits sur le Canon. Il s’agit notamment de l’essai « In Memoriam Sherlock Holmes », qu’il composa en 1930 en introduction de la première édition de l’intégrale de Sherlock Holmes chez Doubleday , de Sherlock Holmes and Doctor Watson : A Textbook of Friendship et de ses nombreux articles parus dans le Baker Street Journal. La plupart de ces écrits sont réunis dans The Standard Doyle Company : Christopher Morley on Sherlock Holmes (New York : Fordham University Press, 1990), un ouvrage inestimable édité par Steve Rothman, ancien rédacteur en chef du Baker Street Journal et grand expert de Christopher Morley. Les écrits de Morley connurent moins de succès après la

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Seconde Guerre mondiale, car ils furent alors considérés comme démodés. Puis il subit une série d’accidents vasculaires cérébraux dans les années 1950, ce qui diminua considérablement sa capacité à écrire et à jouer un rôle actif au sein des Irregulars.

Christopher Morley est mort à Green Escape le 28 mars 1957 et est enterré près de sa demeure, dans le cimetière de Roslyn. Il continue d’être célébré comme le fondateur des irréguliers de Baker Street et l’un des holmésiens les plus éminents.

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Les BSI sont aujourd’hui plus qu’un club ou le vaisseau mère des scions américains. Ils ont développé au fil des ans des activités d’archivages , d’édition ou de soutien à la recherche qui les placent dans une position phare pour la communauté holmésienne mondiale.

Le BSI Trust Interview de Ray Betzner

Les

Le BSI Trust est le dépositaire de la mémoire collective des Irregulars, géré par un conseil d’administration et présidé par Ray Betzner, qui a accepté de répondre à nos questions

La Gazette du 221B : Bonjour, Ray, pouvez-vous nous dire quand et pourquoi le BSI Trust a été créé ?

Ray Betzner : Bonjour, les Baker Street Irregulars sont la première société littéraire dédiée à Sherlock Holmes. Elle a été créée il y a plus de 90 ans et pendant la majeure partie de cette période, son histoire a été essentiellement racontée par bribes, à travers les écrits contemporains de ses membres et des médias. Il y avait aussi une forte tradition orale.

Mais tous ces éléments n’offrent qu’un aperçu incomplet de l’histoire de la société. À la fin des années 1980, Jon L. Lellenberg (avec l’encouragement de Tom Stix, le Wiggins de l’époque) a commencé à éditer une série d’archives qui rassemblait les premiers écrits, ainsi que la correspondance des fondateurs et quelques autres pièces datant des premières années des BSI.

Le premier ouvrage paru fut Dear Starret / Dear Briggs en 1989. Depuis, des livres contenant des témoignages exceptionnels sur l’histoire des BSI au cours des années 40 ont été publiés régulièrement.

Certains des documents historiques concernant les BSI ont également été transmis d’un Wiggins à l’autre, de façon informelle. Lorsque Mike Whelan a succédé à Tom à la tête des BSI, il a voulu s’assurer que ces documents auraient une structure dédiée. En 2003, Mike a donc créé le BSI Trust, qui fait partie intégrante de l’organisation des BSI. Sous la direction de Mike, les archives du Trust ont été installées dans la bibliothèque Houghton de l’Université Harvard en novembre 2005. Puis, elles ont déménagé à la bibliothèque Lilly de l’Université de l’Indiana en septembre 2018.

G221B : Quand et comment êtes-vous devenu le président du Trust ?

R.B : Je connais le Trust et ses activités depuis de nombreuses années, mais j’ai été honoré

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activités
BSI
des

il y a quelques années lorsque le président de l’époque, Tom Horrocks, m’a demandé de me joindre à lui en tant que rédacteur en chef de la newsletter. Lorsque Tom est tombé malade en 2023, il a dû renoncer au rôle de président et Michael Kean m’a demandé si je voulais assumer cette fonction à sa place. Il sera difficile de rivaliser avec l’excellent travail de Tom, mais je suis ravi qu’il se porte mieux désormais et qu’il reste membre du conseil d’administration. Il a été d’un soutien précieux au cours de mes premiers mois de travail.

G221B : Comment le Trust est-il organisé ?

talent soient si dévouées aux BSI et à leur histoire.

G221B : À quoi sert le Trust?

L’objectif du Trust est de collecter, de préserver et de donner accès à des documents historiques, de la correspondance, des articles, des photos, des enregistrements et des souvenirs relatifs aux BSI.

Comment les décisions sont-elles prises ?

R.B : Un groupe de membres des BSI très impliqué et actif dirige le Trust : Peter Blau, Mary Ann Bradley, Bob Coghill, Denny Dobry, Steve Doyle, Tom Horrocks, Bob Katz, Michael Kean, Les Klinger, Richard Olken, Marsha Pollak, Steve Rothman et Tamar Zeffren.

Les décisions concernant nos activités et nos priorités sont discutées entre les membres du conseil d’administration. Si vous me le permettez, j’aimerais dire quelque chose au sujet de ces gens. Tout d’abord, vous remarquerez que Michael Kean, notre Wiggins actuel, fait partie de ce groupe. Avoir le soutien du leader des BSI est d’une importance capitale, et Michael a été un ardent défenseur de notre travail.

Par ailleurs, il y a une liste d’Irrégulars incroyablement talentueux qui ont consacré des centaines, voire des milliers d’heures à poursuivre les efforts du Trust. Je suis toujours étonné que ces personnes de

R.B : Les archives des BSI n’ont pas été créées uniquement pour constituer une collection d’ouvrages holmésiens. L’objectif du Trust est de collecter, de préserver et de donner accès à des documents historiques, de la correspondance, des articles, des photos, des enregistrements et des souvenirs relatifs aux BSI, à leurs membres et à leurs amis. Et ce n’est pas parce que nous avons une histoire qui remonte aux années 1930 que nous ne gardons et n’acceptons pas de pièces plus contemporaines. Nous avons une liste détaillée de ce que nous aimerions voir répertorier ici. Notre objectif est de rendre le plus grand nombre possible de ces documents accessibles au public pour les chercheurs, qu’ils soient des Irregulars, des holmésiens ou des universitaires.

G221B : Comment les archives peuventelles servir aux chercheurs ? Pouvez-vous nous donner un exemple ?

R.B : Depuis quelque temps, le Trust invite chaque année une personnalité à donner une visioconférence et, en 2023, le

La gazette du 221 B - N°16- Mai 2024 14

rédacteur en chef du Baker Street Journal, Steven Rothman, a relevé ce défi. Steve a fait une présentation formidable qui a rencontré un grand succès auprès des téléspectateurs, et a remercié le Trust pour les informations qu’il y a trouvées. (Vous pouvez visionner les trois conférences ici).

D’ailleurs, la conférence de cet automne sera internationale, car c’est Mattias Boström, qui est suédois, qui sera invité. Les informations sur cet événement seront disponibles d’ici quelques semaines.

G221B : Quels sont les projets du Trust ?

R.B : Il y a tellement de remarquables projets en cours qu’il est parfois difficile de les suivre tous.

La bibliothèque Lilly a travaillé d’arrachepied pour améliorer sa notoriété. Par exemple, nous venons de mettre en ligne une nouvelle page d’accueil pour le Trust, qui est un excellent point de départ pour tous ceux qui souhaitent en savoir plus sur les archives des BSI. Un grand merci à Erika Dowell de la Lilly et Tamar Zeffren pour leur travail exceptionnel.

noter que les femmes, qui ont été honorées avant chaque dîner BSI, réalisent maintenant leurs propres interviews, qui seront ajoutées à la collection de la bibliothèque Lilly. Une autre initiative que nous inaugurée cette année consiste à contacter les BSI pour nous assurer qu’ils connaissent le fonctionnement du Trust et les informer de la façon dont ils peuvent alimenter eux aussi les archives. Il y a tellement de BSI qui ont de belles collections de lettres et de photographies ; nous voudrions nous assurer que ces articles trouvent leur place à la bibliothèque Lilly.

Dans ce cadre, nous travaillons avec Ben et Sue Vizoskie, qui ont réuni des milliers de photographies de membres et d’événements parrainés par BSI. Nous espérons faire parvenir ces photos au Lilly cette année et commencer à travailler sur un à les rendre petit à petit publiques.

Enfin, la librairie holmésienne tenue par Denny Dobry est désormais internationale ! Denny a des centaines de livres et d’objets de collection à d’excellents prix. Il a répondu

The Oral History Project (OHP) a connu un immense succès. Près de 250 interviews ont été réalisées auprès de BSI.

L’OHP mobilise beaucoup de gens sous la direction de Marsha Pollak. Dans les années à venir, cette ressource se révélera inestimable. Je suis également heureux de

aux demandes du Canada et de l’Europe. Contactez-le par e-mail à dendobry@ptd. net. Tous les bénéfices des ventes réalisées sont reversés au BSI Trust.

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@Baker Street Irregulars

Le BSI Press Interview d’Andrew Solberg

Les Éditions BSI ont publié plus de 60 volumes. Ceux-ci incluent des livres sur les manuscrits, des recueils d’articles d’écrivains internationaux et des livres couvrant un large éventail d’autres sujets holmésiens. Andrew Solberg, qui en est le co-éditeur, nous en raconte l’histoire et nous dévoile leur fonctionnement.

La Gazette du 221B : Bonjour Andrew. Pouvez-vous nous raconter l’histoire des Éditions BSI ? Quand et pourquoi ont-elles été créées ?

Andrew Solberg : Comme beaucoup de questions chronologiques holmésiennes, il y a plusieurs réponses. Le premier livre publié par les BSI était un exemplaire de L’Aventure de l’escarboucle bleue en 1948. Edgar W. Smith était à la tête des BSI à cette époque, il avait déjà publié de merveilleux livres holmésiens et avait envie de développer cette activité. Il avait aussi créé le Baker Street Journal avec l’aide des équipes qu’il avait à sa disposition en tant que vice-président de General Motors . Sous sa direction, les BSI ont publié six livres :

• L’Aventure de l’escarboucle bleue en 1948 ;

• Baker Street Studies de H.W. Bell en 1955 ;

• Baker Street and Beyond de E.W. Smith en 1957 ;

• The Incunabular Sherlock Holmes de E.W. Smith en 1957 ;

• Introducing Mr. Sherlock Holmes de E.W. Smith en 1959 ;

• Leaves from The Copper Beeches de A. Johnston, T. Hart, H.A. Shalet et H.W. Starr (éditeurs) en 1959.

On peut donc dire que les BSI ont toujours été à la tête d’une maison d’édition, lancée sous la direction d’Edgar en 1948.

Puis le docteur Julian Wolff a pris en 1960 la direction des BSI et du BSJ. Mais contrairement à Edgar, il ne disposait pas d’employés. Il tapait les numéros lui-même à la machine et les assemblait sur sa table

La gazette du 221 B - N°16- Mai 2024 16
Edgar W. Smith

de salle à manger, comme on peut le lire dans Commissionaire: Julian Wolff and His Baker Street Irregulars ( The Baker Street Irregulars , New York, 2020). C’est peutêtre pour cette raison qu’aucun livre n’a été publié pendant son mandat.

Tom Stix a ensuite dirigé les BSI à partir de 1986. L’une de ses initiatives a été de remettre en route l’activité d’édition. Ainsi, après une coupure de trente ans, cinq livres sont sortis sous sa direction, dont quatre sur l’histoire des BSI :

• Sherlock Holmes by Gas Lamp de P. Shreffler en 1989,

• Dear Starrett - Dear Briggs de J. Lellenberg en 1989,

• Irregular Memories of the Thirties de J. Lellenberg en 1990,

• Irregular Memories of the Early Forties de J. Lellenberg en 1991,

• Irregular Memories of the Mid Forties de J. Lellenberg en 1995.

On peut donc aussi considérer que des Éditions des Baker Street Irregulars ont été lancées par Tom Stix.

En 1997, Michael Whelan prend la tête des BSI. Mike voulait perpétuer leur activité de maison d’édition. Il voulait même professionnaliser cette activité, notamment en nommant un directeur de publication pour superviser l’entreprise et s’assurer qu’un ou plusieurs nouveaux livres sortiraient chaque année. Sous l’influence de Mike (1997 - 2019), soixante et onze livres ont été publiés ! Il n’y eut qu’une ou deux années où aucun livre n’est sorti. C’est

à cette publication régulière et continue de livres d’exception que nous pensons aujourd’hui lorsque nous nous référons aux Éditions BSI.

Il est donc également possible d’affirmer que les Éditions des BSI ont démarré sous la direction de Mike Whelan en 1997.

Comme je l’ai dit, voilà une nouvelle occasion pour les holmésiens, qui adorent ça, de se chamailler sur des dates !

Michael Kean, l’actuel Wiggins des BSI depuis 2019, a poursuivi la tradition de l’édition. Depuis cette date, les BSI ont

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publié dix-huit livres, et deux autres sortiront en janvier 2025.

La Gazette du 221B : Comment les Éditions des BSI sont-elles organisées ?

Andrew Solberg : L’organisation est assez simple, bien qu’elle ait changé au cours des dernières années.

son rôle de « Cartwright » (c’està-dire deuxième dans l’ordre de succession des BSI). Michael Kean m’a demandé de le remplacer. Je n’occupe donc le poste de coéditeur que depuis moins d’un an.

John est le directeur de production et prépare chaque livre à envoyer à l’imprimeur. Je supervise les différentes séries que nous produisons ainsi que les acquisitions et je prends d’autres décisions au fur et à mesure qu’elles se présentent. Je remanie aussi quelques livres et passe en revue tous les brouillons que John et moi recevons. Nous avons développé plusieurs séries au fil des ans : la série « Manuscrits », la série « Internationale », la série « Professions », la série « Histoire des BSI », la série « Biographies », la série « Expéditions et événements spéciaux », etc. Vous pouvez voir toutes nos séries sur bakerstreetirregulars.com/bsi-books-list/

Aucun d’entre nous n’est payé pour ce qu’il fait et je suis reconnaissant à toutes et tous pour le travail acharné nécessaire à la gestion des Éditions BSI.

John Bergquist et moi-même sommes les coéditeurs. Mon ami Bob Katz occupait cette fonction, mais il a démissionné l’année dernière pour se concentrer sur

Notre série la plus populaire est la série « Manuscrits ». Chaque livre comprend une numérisation en haute résolution du manuscrit d’une histoire de Sherlock Holmes écrite par Conan Doyle, avec sa transcription ainsi que des chapitres sur la façon dont cette version originale diffère des versions publiées, sur la provenance du manuscrit, sur ce qui se passait dans la vie de Conan Doyle au moment de l’écriture et sur les aspects les plus intéressants de cette aventure. Ces livres sont remarquables, car vous

La gazette du 221 B - N°16- Mai 2024 18
@Baker Street Irregulars

pouvez voir l’histoire naître sous la plume de Conan Doyle et constater les changements qu’il a apportés pendant et après sa composition.

Chaque livre a un ou plusieurs responsables d’édition et Andrew Fusco le responsable de la série, les choisit et s’assure qu’ils produisent le livre à temps. J’ai co-édité (avec Bob Katz) quatre des livres de la série des manuscrits, et j’ai adoré le faire.

Par ailleurs, Bob et moi avons co-édité deux livres dont nous avions suggéré l’idée à la responsable de la série « Professions » (Marsha Pollak), sur Sherlock Holmes et la médecine ( Nerve and Knowledge et Stimulating Medicine ). Parmi les autres ouvrages de cette série, on peut citer Canon Law, Education Never Ends, Corporals, Colonels, and Commissionaires , et My Scientific Methods .

Randall Stock s’occupe de nos ventes en ligne et de nos relations avec la société de distribution. Randall, concepteur de sites web professionnel, est l’informaticien des BSI. J’ai travaillé en étroite collaboration avec lui lorsque j’étais à la tête du BSI Trust (les archives institutionnelles du BSI à la Lilly Library) lors du remaniement du site web du Trust pour pouvoir accueillir une page consacrée à chaque dîner BSI. Randall est un homme extraordinaire.

aux personnes qui les ont commandés. Monica est également en charge des goodies : cravates, écharpes, badges, etc. C’est un plaisir de travailler avec elle.

Nous avons aussi recruté Ira Matetsky il y a quelques années pour rechercher les manuscrits holmésiens de Conan Doyle encore aux mains de propriétaires privés et négocier avec eux l’autorisation de les publier. Avant qu’Ira ne rejoigne l’équipe, ça fonctionnait par bouche-à-oreille. Maintenant, nous nous intéressons plus qu’à un nombre limité de manuscrits, ceux qui sont disponibles, et le fantastique

travail d’Ira nous permet de les mettre à la disposition du public.

Monica Schmidt a rejoint l’équipe en tant que responsable du marketing l’année dernière. Nous collaborons avec elle pour faire le suivi de notre inventaire et elle effectue un travail remarquable pour s’assurer que tous les livres parviennent

Et évidemment, en tant que Wiggins , Michael Kean a la responsabilité (comme ses prédécesseurs) de donner le ton et de s’assurer que nous ne commandons pas des milliers d’exemplaires de livres. Nous prenons la plupart des décisions en fonction de l’avis de Michael. Nous nous fions à son jugement et nous nous en remettons à lui. Aucun d’entre nous n’est payé pour ce qu’il fait et je suis

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Michael Kean

reconnaissant à toutes et tous pour le travail acharné nécessaire à la gestion des Éditions BSI.

La Gazette du 221B : Combien d’ouvrages recevez-vous par an et comment choisissez-vous ceux que vous allez publier ?

Andrew Solberg : Nous planifions notre calendrier de publication plusieurs années à l’avance afin de nous assurer que nous avons, par exemple, au moins un livre de la série « Manuscrits » ou que nous ne sortons pas trop de livres au cours d’une année. Il y a eu des années où les Éditions BSI ont publié six livres, mais c’est loin d’être la norme. Nous prévoyons en général d’en sortir deux à trois par an.

Les livres que nous publions ne sont en général pas ceux qui nous sont envoyés (bien que je sois en train d’en préparer un qui sortira en 2026). La plupart d’entre eux sont issus de notre planification et leur conception est confiée aux responsables d’éditions. Ces derniers choisissent les sujets des chapitres et les contributeurs. Nous envisageons aussi actuellement de réimprimer un livre épuisé depuis un certain temps, mais pour lequel nous avons reçu des demandes. Nous verrons où cela nous mènera…

La Gazette du 221B : Quels sont les projets des Éditions BSI pour les années à venir ?

Andrew Solberg : Nous avons deux merveilleux livres qui sortiront en janvier 2025. L’un d’eux, sur Le Soldat blanchi , appartient à la série « Manuscrits » et est édité par Ira Matetsky. C’est la première des deux aventures que Holmes prétend avoir écrites lui-même. Beaucoup se demandent s’il l’a écrite d’une traite ou au

fil des ans, et si cela se reflète dans ce livre. De plus, parce que l’histoire comporte des aspects médicaux, il y a des chapitres qui examinent ces points. Et beaucoup d’autres chapitres passionnants sur les questions soulevées dans l’histoire.

L’autre ouvrage, de Sonia Fetherston, est consacré à Tom Stix, Wiggins de 1986 à 1997 et qui a ouvert le dîner BSI aux femmes. C’est un excellent portrait à la fois de Stix et de cette époque, un moment crucial de l’histoire des BSI, que Sonia décrit à merveille.

En 2026 sortira un livre sur les BSI des années 1950, édité par Julie McKuras et Bill Mason. Si vous avez déjà lu les ouvrages sur l’histoire des BSI écrits par Jon Lellenberg (que j’ai beaucoup appréciés), vous savez comment ceux-ci replacent notre club dans le contexte de l’époque. J’ai hâte de le lire !

Par ailleurs, chaque année a lieu le week-end anniversaire des BSI à New York. Al Rosenblatt et sa fille Betsy y font, en vers, le bilan de l’année et du dîner BSI lors du lunch du samedi. Ces performances vraiment remarquables sont devenues un événement majeur et une tradition du week-end, inaugurée par Ezra Wolff en 1969 et poursuivi par lui jusqu’en 1989. Al nous a donc proposé un livre sur la poésie des BSI et une compilation des bilans annuels en vers depuis 1969. Je suis en train de le relire. Ça va être un grand livre, guettez sa parution !

Et nous planifions déjà l’année 2027. L’avenir des Éditions des BSI s’annonce donc très prometteur…

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La publication régulière du Baker Street journal est certainement l’activité la plus connue des BSI. La sortie trimestrielle de ce magazine ponctue chaque année holmésienne depuis les années 40. Mais cette mécanique bien huilée est le fruit du travail constant de deux personnes : l’éditeur et le rédacteur en chef. Steven Doyle et Dan Andriacco, qui tiennent actuellement ces rôles, se sont confiés à la Gazette du 221B

Interview

de Steven Doyle, éditeur

La Gazette du 221B : Bonjour, Steven, pouvez-vous nous raconter l’histoire et l’évolution du Baker Street Journal depuis sa création ?

Steven Doyle : Le Baker Street Journal a été créé au milieu des années 1940, au cours de ce que j’appelle le premier âge d’or des activités holmésiennes et des Baker Street Irregulars (c’était alors une seule et même chose). Edgar Smith,

qui les dirigeait à cette époque, avait édité un recueil d’essais intitulé Profile by Gaslight et, encouragé par la réussite de cet ouvrage, décida de lancer une revue trimestrielle consacrée à la littérature et à l’étude de Sherlock Holmes.

Il y avait alors quelques divergences quant au sérieux et à l’académisme de la publication : voulait-on une érudition fantaisiste ou des écrits de

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@Baker Street Irregulars

niveau universitaire ? Rétrospectivement, on peut considérer que le contenu du magazine se situe quelque part entre les deux…

Le premier numéro parut au printemps 1946 et c’était une petite merveille. Il fut dirigé par Edgar Smith et contenait des essais, des critiques et diverses informations. L’éditeur était le célèbre libraire Ben Abramson. Il n’avait pas lésiné sur les moyens pour produire le BSJ, ce qui rendait malheureusement sa fabrication très coûteuse. Les éditeurs holmésiens ont toujours eu tendance à surestimer le nombre de lecteurs, et c’en fut l’un des premiers exemples. Avec beaucoup trop d’exemplaires imprimés et pas assez d’abonnés pour couvrir les dépenses, la revue a cessé de paraître en 1949.

Mais le BSJ revient en 1951 sous une forme plus modeste et n’a jamais cessé d’être publié depuis. C’est ce qu’on appelle la Nouvelle Série, qui compte à ce jour neuf rédacteurs en chef en 73 ans : Edgar W. Smith, Julian Wolff, John Linsenmeyer, Peter Blau, Philip Schrefler, William R. Cochran, Donald Pollack, Steven Rothman (pendant 22 ans), et maintenant Dan Andriacco.

La Gazette du 221B : Comment le BSJ est-il organisé ? Comment les décisions sont-elles prises ?

Steven Doyle : L’éditeur est responsable de toutes les activités du BSJ. Cela comprend la production physique du manuscrit dactylographié ou électronique envoyé par le rédacteur en chef, ainsi que toutes les questions relatives à l’impression ou à la revue en général.

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Un numéro du Baker Street Journal de 1946, Edgar W. Smith rédacteur en chef et Ben Abramson éditeur. @Baker Street Irregulars

Nous avons aussi un gestionnaire d’abonnement et un graphiste qui dépendent directement de l’éditeur. En revanche, la politique éditoriale et le choix des articles reviennent au rédacteur en chef. Il est en charge de la lecture des contributions reçues, en retient certaines et en rejette d’autres. Il est également responsable de l’ensemble de la relecture et de la correction, ainsi que de la mise en page. Il dispose de sa propre équipe de rédacteurs en chef adjoints et de correcteurs d’épreuves bénévoles.

La Gazette du 221B : Quand et comment êtes-vous devenu l’éditeur du BSJ ?

Steven Doyle : Je suis devenu éditeur fin 2009 et le premier numéro que j’ai publié était celui du printemps 2010. J’ai rejoint l’équipe lorsque Mike Whelan décida que le BSJ avait besoin pour progresser de quelqu’un possédant une large expérience dans le domaine de l’édition holmésienne. C’était effectivement mon cas puisque je dirigeais Wessex Press et Gasogene Books depuis plusieurs années. L’une des premières modifications que j’ai

apportées à la revue a été d’insérer une photo sur la couverture, ce qui a été perçu comme un changement radical ! Bien sûr, depuis lors, il y en a eu beaucoup d’autres.

La Gazette du 221B : Que contient un numéro typique ?

Steven Doyle : Il comprend un bel éventail de sujets : des études holmésiennes classiques, des articles sur l’histoire des holmésiens et des BSI, sur le cinéma et la télévision, etc. Et bien sûr des critiques de livres. Il y en a pour tous les goûts !

La Gazette du 221B : Est-il prévu d’étendre les activités du BSJ, comme vous l’avez fait récemment avec un podcast intitulé « The Fortnightly Dispatch », sponsorisé par le Baker Street Journal ?

Steven Doyle : Nous allons tourner la dernière saison de « The Fortnightly Dispatch », qui, je crois, a été un grand succès pour accroître la visibilité du BSJ et garder la communauté holmésienne connectée et unie pendant la pandémie. Et je me suis beaucoup amusé à le faire !

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@Baker Street Irregulars

Interview de Dan Andriacco

Voilà un an que Dan Andriacco a endossé le rôle de rédacteur en chef du Baker Street Journal, succédant à Steven Rothman qui a occupé ce poste pendant plus de 22 ans. Il nous raconte comment il relève ce défi constant.

La Gazette du 221B : Bonjour, Dan, racontez-nous comment vous avez été nommé rédacteur en chef du BSJ.

Dan Andriacco : Steven Doyle, l’éditeur, m’a demandé de le faire, peut-être parce que j’ai édité des anthologies holmésiennes et que j’ai déjà exercé le métier de rédacteur en chef économique d’un quotidien.

La Gazette du 221B : quelle est, selon vous, la place de la BSJ dans le monde Holmésien ?

Dan Andriacco : Le BSJ est publié par les Baker Street Irregulars , mais il ne s’adresse pas uniquement aux Baker Street Irregulars . C’est la plaque tournante des échanges du monde holmésien, la publication qui unit les holmésiens du monde entier, parce qu’elle est lue dans le monde entier.

La Gazette du 221B : Parlez-nous de votre histoire personnelle avec le BSJ. Depuis quand êtes-vous lecteur ? De quels sujets ou type d’article êtes-vous le plus friand ?

Dan Andriacco : Le numéro le plus ancien que je possède date mon premier abonnement, c’est-à-dire de décembre

1971. J’aime lire toutes sortes d’essais, y compris de l’analyse littéraire, des recherches sur le contexte historique, les nouvelles théories sur des questions qui ont longtemps intrigué les holmésiens, et des articles sur les grandes figures holmésiennes.

La Gazette du 221B : Et en tant que contributeur ? Quand avez-vous publié votre premier article dans le BSJ ? De quoi parlait-il et comment vous sentiezvous quand vous l’avez envoyé et quand il a été accepté ?

Dan Andriacco : Mon premier essai dans le BSJ s’appelait « Gothic Holmes : Dark Shadows in the Canon », et fut publié dans le numéro du printemps 2017. J’y examine de nombreuses histoires de Holmes qui contiennent des éléments de fiction gothique. C’est ce que j’entends par analyse littéraire. Je ne me souviens pas précisément de ma réaction quand il fut accepté par le rédacteur en chef, mais je suis sûr que j’étais extrêmement heureux.

La Gazette du 221B : Comment s’est déroulée la publication du premier numéro que vous avez dirigé ? Avez-vous ressenti beaucoup de pression ?

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Dan Andriacco : Il y a eu une phase d’apprentissage pour maîtriser les questions de mise en page, mais Steve Doyle a dit qu’il pensait que cela s’était plutôt bien passé. Et il y a forcément des points un peu délicats. Par exemple, en révisant un essai pour la publication, je fais

des modifications pour rendre l’écriture plus lisse, plus claire, pour éviter les répétitions et en restant fidèle à l’identité du magazine. Le défi est de faire tout cela sans altérer le style distinctif de l’auteur. Oui, il y avait de la pression, mais aussi une grande satisfaction lorsque la tâche fut terminée.

La Gazette du 221B : En quoi le rôle de rédacteur en chef s’est-il révélé différent de ce à quoi vous vous attendiez ?

Dan Andriacco : La mise en page des articles en respectant une charte graphique (les polices de caractères, les marges, le style de note de bas de page, etc.) prend plus de temps que je ne le pensais. J’ai également eu plus de contacts que prévu avec les auteurs, pour les guider et les conseiller, et cela a été très agréable.

La Gazette du 221B : Avez-vous l’intention d’apporter votre touche personnelle au magazine ? Si oui, comment ?

Dan Andriacco : c’est un peu inévitable qu’un ou une rédacteur.rice en chef appose sa marque sur une publication. Les critères des textes que j’accepte et la façon dont je les révise seront différents des neuf rédacteurs en chef officiels qui m’ont précédé. Cependant, cela n’est pas nécessairement visible pour les lecteurs. Ce à quoi ils peuvent s’attendre, comme je l’ai écrit dans mon premier édito, c’est que je privilégie la variété concernant le choix des auteurs, le type et la longueur des articles.

La Gazette du 221B : Envisagez-vous garder ce rôle de rédacteur en chef aussi longtemps que Steve Rothman à qui vous succédez ?

Dan Andriacco : Dans la mesure où j’ai 70 ans, il est peu probable que j’exerce cette fonction 23 ans comme Steve Rothman l’a fait. Mais qui sait ? En tout cas, j’espère bien tenir le poste plusieurs années !

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Printemps 2023- Le premier BSJ dirigé par Dan Andriacco @Baker Street Irregulars

Le week-end BSI 2024

vu de l’intérieur

Créé en 1934, le club holmésien nommé les Baker street irregulars (BSI), le plus ancien du monde, fêtait cette année ses 90 ans d’existence. C’est le journaliste, auteur et essayiste Christopher Morley qui, le premier, décida de réunir quelques admirateurs du grand détective. Le 6 janvier (la date d’anniversaire de Sherlock Holmes qu’il déduisit à partir d’une interprétation très fantaisiste du Canon), il organisa un cocktail à l’hôtel Duane de New York pour célébrer l’événement. S’y retrouvèrent quelques-uns des plus illustres pères fondateurs de notre hobby, tels que Vincent Starrett, Alexander Woollcott, Frederick Dorr Steele ou William Gillette. Cependant, le club ne commença à tenir des réunions régulières qu’en 1940, sous l’impulsion d’Edgar W. Smith, devenu alors

son leader et qui, en 1946, fonda le Baker Street journal, magazine trimestriel officiel du groupe et publication phare des études holmésiennes.

Le week-end s’est déroulé cette année du 10 au 14 janvier. Depuis longtemps, je rêvais de me rendre à New York, d’assister aux conférences, de participer aux échanges et bien sûr de rencontrer en chair et en os tous les camarades holmésiens que je n’avais jusque-là côtoyés qu’en ligne. Deux mois auparavant, j’avais eu la délicieuse surprise de recevoir une invitation au dîner prévu le vendredi 12, ce qui avait scellé mon projet de voyage pour ce début d’année.

Je débarque donc à l’aéroport JFK accompagnée de Sonia Yazmadjian, holmésienne de Lyon qui a entrepris le

La gazette du 221 B - N°16- Mai 2024 26
Le week-end BSI 2024

périple avec moi. Dans mes valises, des vêtements chauds pour affronter l’hiver new-yorkais, quelques tenues chics pour les événements formels et… de la place pour les livres que je compte rapporter.

J’ai réservé une chambre à l’hôtel Westin, près de la gare de Grand Central . Je sais que de nombreux holmésiens y ont leurs habitudes et que je n’y ferai que de bonnes rencontres dans le hall ou l’ascenseur.

À peine le temps de m’installer qu’il faut déjà me préparer pour le dîner qui, traditionnellement, ouvre les festivités : le ASH dinner. Les Adventuresses of Sherlock Holmes (ASH, donc, pour les intimes) est un club holmésien que j’admire infiniment. En 1967, un petit groupe d’étudiantes, amatrices de Sherlock Holmes, irritées de l’interdiction faite aux femmes de rejoindre les BSI, fondèrent ce club qui fut, en réaction, déclaré exclusivement féminin, et manifestèrent lors du BSI dinner de 1968. À partir de 1975, les ASH organisèrent un événement concurrent le soir du BSI dinner, et conformément à la citation d’Ovide qui leur sert de devise : Gutta cavat lapidem, non vi sed saepe cadendo (la goutte fait un trou dans la pierre, non pas par la force, mais en tombant souvent), finirent par persuader les BSI de devenir enfin un club mixte. (voir l’interview d’Evelyn Herzog, membre fondatrice des ASH, dans la Gazette du 221B de septembre 2018, en français ou en anglais).

Depuis lors, les Adventuresses

accueillent les premiers arrivants et les derniers partants du week-end en proposant un dîner dès le mercredi soir, puis un brunch le dimanche.

C’est au Joyce Public House, non loin de Times Square, qu’a lieu ce premier rendezvous international des holmésiens. C’est l’occasion de célébrer des retrouvailles et de faire de nouvelles rencontres. Je me suis avec plaisir installée à table avec des ami.es de longue date, comme Peggy Mc Farlane, Catherine Cooke ou Bonnie MacBird et de nouvelles connaissances, tel.les qu’Andrew Solberg et Tamar Zeffren. L’ambiance est enjouée, l’émotion de se revoir est

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palpable, les conversations papillonnent au gré des entrecroisements… À 22h cependant, le décalage horaire a raison de mon enthousiasme ainsi que de mon accent anglais et je me réjouis de regagner l’hôtel.

Il faut en effet que je sois en forme, car le jeudi est une journée chargée. Dès 9h15, rendez-vous est donné dans le hall du Westin pour participer à la « Morley walk » , organisée à l’initiative de Doré Nash et Jim Cox. Il s’agit d’un pèlerinage à travers Manhattan sur les traces du fondateur des Baker Street Irregulars. Les rues et les immeubles ont bien changé, naturellement, mais les anecdotes racontées avec autant d’érudition que d’humour par nos guides d’un jour nous permettent de replonger dans l’ambiance des années folles. Mais hélas, je dois couper court à cette promenade, car je ne veux pas rater la remise des Doylean Awards organisée par l’ACD society. Cette dernière, comme son nom l’indique, est un groupe de doyléens, qui se distinguent des holmésiens, car ils englobent dans leurs études l’intégralité

de l’œuvre, fictionnelle ou non, de Sir Arthur. Les nouvelles et romans sur Sherlock Holmes n’en représentent qu’un infime pourcentage ! (voir l’article sur l’un des doyléens les plus actifs de France, Alexis Barquin, dans la Gazette du 221B de novembre 2019).

Cette manifestation prend place au Mysterious book Shop, véritable caverne d’Ali Baba pour les amateurs de littérature policière, nichée au cœur de TriBeCa et tenue par l’infatigable libraire et collectionneur Otto Penzler. Les maîtres de cérémonie, Ross Davies et Mark Jones, ont remis les prix à Brian Pugh, pour l’ensemble de son travail, à Derrick Belanger, David Marcum et Lee Murray pour la catégorie « fiction et poésie », à Vincent Mallié pour la catégorie « arts visuels » et à Emily Alder, Douglas Kerr et Sylvia. A. Pauboukian pour la catégorie « études et essais » .

La matinée se poursuit au même endroit avec la deuxième édition de la course (presqu’) équestre de la Wessex Cup. La compétition fut passionnée, mais fair-play, et c’est Joe Eckrich avec A Ruffian of the Turf qui l’emporta.

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@ACD Society

Pour le déjeuner, un certain nombre d’entre nous rejoignent les promeneurs de la Morley Walk au Mc Sorley old ale house ,

le plus vieux pub irlandais de New York, au plancher semé de sciure de bois (une tradition qui date du temps où les clients mâchaient du tabac et crachaient par terre. La sciure de bois permettait d’absorber la salive, mais également la bière qui tombaient sur le sol) et aux murs chargés de photos de

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@ACD Society @ACD Society

célébrités ayant fréquenté ce pub ou de babioles foutraques (dont des menottes ayant appartenu à Houdini, des chaînes portées par un prisonnier lors de la Guerre de Sécession ou un fer à cheval qui proviendrait d’un des chevaux qui a tiré le corbillard de Lincoln).

L’endroit est truffé d’holmésiens qui m’apprennent que la mauvaise humeur du serveur fait intégralement partie de la légende du pub. Je partage la table avec notamment les frères Brian et Derrick Belanger et y déguste un hot dog typiquement New-Yorkais, dont la spicy mustard hantera mon palais pour le reste de la journée.

La gazette du 221 B - N°16- Mai 2024 30

C’est un rendez-vous bien plus académique qui m’attend après cette matinée pittoresque. En effet, à 18h15 a lieu, au New York City Bar Association (l’association du barreau, pas l’association des bars, comme je l’ai cru au début…) la BSI Distinguished Speaker Lecture, une conférence où les BSI convient chaque année un ou une invité.e prestigieux.se à s’exprimer sur une thème relatif à l’univers holmésien. En ce week-end 2024, l’auteure de thrillers médicaux Tess Gerritsen (qui a écrit les romans dont la série Rizzoli et Isle est tirée) est venue faire un exposé sur la médecine au temps du docteur Watson. Dans l’ambiance feutrée de l’immense salle d’audience pleine à craquer, l’écrivaine, d’une voix calme et posée, n’omet aucun détail sur les ravages du choléra engendré

par les eaux puantes et insalubres de la Tamise ni sur le trafic de cadavre organisé au bénéfice des étudiants en médecine désireux de s’entraîner à l’autopsie.

C’est donc une parfaite mise en bouche pour les agapes qui vont suivre, car le jeudi soir est souvent réservé aux dîners privés où se rassemblent quelques dizaines de personnes autour d’un hôte organisateur.

C’est par exemple au cours d’un de ces dîners qu’est né le SPODE (Sherlockians Preventing Oyster from Destroying the Earth), créé sur un coin de nappe devant un plateau de fruits de mer partagé dans un restaurant de Grand Central en hommage à la pseudo fièvre délirante que Sherlock Holmes simule dans Le Détective agonisant. Pour cause d’allergie, j’ai décliné cette invitation et opté pour le Foundry Dinner

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organisé par Terry Hunt au Pietro’s, un excellent restaurant italien à deux pas de l’hôtel Westin.

J’y suis installée aux côtés d’Ira Matetsky, non loin de mon ami, le grand francophile Terry McCammon et j’y ai l’immense plaisir d’échanger quelques mots avec Evelyn Herzog qui se

révèle aussi charmante en personne qu’elle l’avait été lors de nos échanges par mail.

À la fin de ce dîner, je rejoins le Rosie Dunn’s dont le premier étage est le QJ des holmésiens qui veulent prolonger les soirées. Les discussions informelles y éclosent érudites où légères, et les fous rires ne manquent pas.

Le vendredi arrive. Il se terminera par l’événement le plus attendu du week-end, le BSI Dinner et on sent l’impatience grandir. Mais auparavant a lieu le Gillette Luncheon au pub Connoly’s.

Ce rassemblement d’admirateurs de l’interprète mythique de Sherlock Holmes a été

La gazette du 221 B - N°16- Mai 2024 32

organisé pour la première fois en 1945 et fête par conséquent son 79ème anniversaire cette année. De nombreuses animations ponctuent le déjeuner, dont la très applaudie intervention de Ray Betzner.

C’est aussi au cours de cet événement qu’est attribué le récent Susan Rice Mentorship Award. Créé en 2022 pour célébrer les activités d’un membre de la communauté holmésienne qui a été un mentor pour ceux et celles qui l’ont côtoyé. Cette année, c’est Francine Kitts, auteure de In the Footsteps of Sherlock Holmes and Dr. Watson qui est honorée. Il est maintenant l’heure de se préparer pour le dîner de gala. Les tenues de soirée, talons hauts et nœuds papillon sont de sortie. En l’honneur de ce 90e anniversaire, la bibliothèque du Yale Club expose quelques documents et objets historiques de l’histoire des BSI. S’y trouvent par exemple le marteau officiel, fabriqué à partir de bois provenant du 221B Baker Street et offert à Edgar W. Smith par les Six Napoléon of Baltimore, mais aussi des livres

signés et annotés, une photographie et des comptes-rendus des premiers dîners. Les visiteurs pouvaient également voir les restes du tissu utilisé pour fabriquer la première cravate officielle des BSI, confectionnée et portée par Christopher Morley.

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La gazette du 221 B - N°16- Mai 2024 34 @Baker Street Irregulars

La soirée débute par le cocktail, au cours duquel Pam Wampler est désignée comme « The Woman » pour cette année. Puis vient le moment du dîner lui-même, le seul événement holmésien où on ne peut se rendre que sur invitation.

C’est évidemment Michael Kean, l’actuel Wiggins, qui déclare les festivités ouvertes dès que chaque invité a rejoint sa table. Un livret attend chaque convive à sa place. Entièrement illustré par Franck Cho, il est absolument magnifique. On y retrouve le menu, mais aussi et surtout la liste des toasts et interventions qui jalonneront la soirée. Se succéderont ainsi sur l’estrade Steven Doyle, Ray Betzner et Steve Rothman qui discuteront des mérites controversés d’Alexander Woollcott en tant que BSI, Alex Katz et Karen Wilson dans une parodie d’opérette tandis que Curtis Armstrong livrera une apologie hilarante des méchants de seconde zone, ceux qui font pâle figure à côté de Moriarty ou du Baron Grüner, ceux dont les vices ou les méfaits valent à peine une mention sous la plume de Conan Doyle… des méchants humains, trop humains. Ensuite, évidemment, un hommage est rendu aux membres des BSI qui nous ont quittés cette année.

C’est donc tout à la fin de la soirée qu’intervient le moment du grand frisson, celui que tout le monde attend : les nouvelles investitures.

Ayant été invitée au dîner, j’ai conscience

que je suis sur la liste des prétendants. Cependant, je ne veux pas me bercer d’espoirs, car certains de mes camarades ont été invités plusieurs fois sans pour autant recevoir leur shilling. Les nominations sont faites dans l’ordre alphabétique et dès la première annonce, des acclamations et applaudissements, auxquels je me joins de bon cœur, retentissent pour Rudy Altergott, investi sous le nom de “ Old Patrick ”. Puis vient le tour de Derrick Belanger (“ The Board Schools ”) et Tom Brydges (“ Waterloo Bridge ”).

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Et soudain, dans le brouhaha, j’entends Michael Kean prononcer le mot « Paris » et je me fige… Oui, c’est bien moi qu’il appelle, ou presque, puisque mon “diplôme” est établi au nom de « Fabienne Courage ». Mais c’est une bien petite erreur pour un si grand honneur. Mon nom de BSI est Henri Fournaye (le pseudonyme français d’Eduardo Lucas, l’agent double dans La Deuxième Tâche) et je rejoins mes trois premiers camarades de promotion encore tout abasourdie. Nous rejoindront ensuite Daniel L. Friedman (“ Sir Leslie Oakshott ”), Chuck Kovacic (“ Baker Street ”), Stephen Chahn Lee (“ Alex MacDonald ”), Danna A. Mancini (“ McMurdo ”), Maxine H. Reneker (“ Lomax the Sub-Librarian ”), Olivia Rutigliano (“ Lady Alicia Whittington ”), Jessica Schilling ( “ The

Queen’s Shilling ”), Robert Sharfman (“ Killer Evans ”), Liese Fabre (“ Mrs. Farintosh ”) et George Schwartz (“ The Alpha Inn ”).

Un deuxième shilling sera par ailleurs attribué à Otto Penzler, (“ The King of

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Bohemia ”), éditeur de romans policiers et propriétaire de The Mysterious Bookshop, pour ses services incommensurables à l’univers holmésien.

C’est une belle promotion, 14 personnes, 5 femmes et 9 hommes. Je me sens fière d’en faire partie et le courant passe très vite

essais d’érudits et passant par les pastiches et les revues. J’essaie pourtant de résister aux sirènes de la tentation en pensant à l’excédent de bagages et au découvert bancaire.

J’ai finalement craqué pour « à peine » une douzaine d‘ouvrages, dont A West Wind,

entre nous. Pour être honnête, le souvenir du reste de la soirée est un peu flou, car ce fut un tourbillon de félicitations, de “ hugs ”, de selfies et de verres de champagne. Si ce dîner est incontestablement un des sommets du week-end, il n’en marque pourtant pas la fin, car dès le lendemain matin s’ouvre la “Vendor’s Room”, un grand salon de l’hôtel Westin ou les éditeurs de publications holmésiennes, les collectionneurs et les artistes tiennent stand pour proposer leurs nouveautés.

C’est là que j’ai prévu de remplir ma valise pour le trajet retour, en me donnant la fausse excuse que j’y faisais des économies compte tenu du coût des frais d’envoi de la plupart des livres que je convoite. Effectivement, dans cette grande salle, tout m’attire, des bijoux holmésiens créés par Régina Stinton jusqu’aux derniers

How America and Americans Influenced in the Sherlockian Canon de Thomas Horrocks et Ray Betzner, que les auteurs ont eu la gentillesse de me dédicacer.

Puis nous sommes de nouveau attendus dès 11h30 au Yale où est prévu le BSI luncheon, un déjeuner un peu moins formel que le dîner de la veille et ouvert à toutes et tous. La tenue de ville y est malgré tout de rigueur, et c’est devant cette assemblée élégante qu’Al et Betsy Rosenblatt donneront une performance mémorable : un résumé de l’année holmésienne entièrement en vers. Et ce morceau de bravoure se termine par une évocation du BSI dinner… Ils l’ont donc peaufiné jusqu’à la dernière minute.

J’y partage une table avec ma compatriote Sonia, mais également Alex Katz, Catherine Cooke, directrice de la Sherlock Holmes

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Society of London, et mes camarades du Midwest américain.

De retour à l’hôtel, j’avais convié quelques amis que je sais amateurs de whisky à venir déguster un cru français, une curiosité pour ces habitués des saveurs américaines, irlandaises ou écossaises.

Mais ce que j’imaginais comme une tranquille réunion devient vite un joyeux bazar dans lequel se croisent des ami. es d’amie.s. Il faut dire que les “ room parties ” sont une tradition durant le BSI ce week-end. Tradition qui, pour des raisons évidentes, a été interrompue pendant l’épidémie de COVID et n’avait pas encore repris. C’est avec un plaisir partagé par toutes et tous que ma chambre d’hôtel a été le point de renaissance de cette coutume. Franck Cho assis sur le lit, en pleine conversation avec Monica Schmidt, Mike Mc Swiggins et Max Magee en plein

débat sur les meilleurs whiskys, Dan et Ann Andriacco, toujours en lune de miel après 50 ans de mariage, ne se quittant pas d’un pouce, Ann Lewis, Louise Haskett, Rudy Altergott, Mark Gagen mes camarades des Illustrious Clients of Indianapolis, sirotant sur le canapé.

J’avais rapporté de France un autre cadeau pour mon ami Steven Doyle. Il m’avait glissé, au cours d’une discussion en ligne, que l’affiche de la pièce de théâtre L’Affaire du pont de Thor, jouée en novembre dernier à Paris, lui plaisait. Sans rien lui dire, j’avais donc demandé, au cours d’une interview, aux auteurs, JeanPhilippe Ancelle et Georges Mathieu de lui dédicacer l’une d’elles. Cette attention lui a vraisemblablement fait plaisir et je sais de source sûre que l’affiche a été encadrée et qu’elle trône désormais dans son bureau.

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Le soir venu, c’est avec mes amis du Midwest et quelques autres que je me rends dans un pub qu’ils ont découvert au cours de la semaine et qui porte le nom très approprié de Baker Street Irregulars. Un immense profil de Sherlock Holmes peint à même la façade nous y accueille. Puis sous les néons roses et le son saturé des chaînes de sport (comme dans tout pub qui se respecte), l’équipe nous fait sentir qu’elle est ravie de recevoir un groupe d’admirateurs du Grand Détective en nous offrant un verre. Nous restons sages (ou est-ce la fatigue de la semaine qui commence à se faire sentir ?) et ne débordons que de quelques minutes sur la permission de minuit.

Et nous voilà finalement arrivés au dimanche, le jour des au revoir, des embrassades, des promesses de rester en contact et des rendez-vous donnés pour l’année prochaine. Le hall de l’hôtel est bondé d’holmésiens emmitouflés, charriant leurs valises et

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surveillant du coin de l’œil l’arrivée d’un taxi.

Mais pour tromper la mélancolie qui guette ceux qui prennent un avion plus tard dans la journée, il reste un dernier rendezvous : le brunch des Adventuresses of Sherlock Holmes, qui se tient au Long Room, quasiment en face du célèbre hôtel Algonquin. C’est dans cette ambiance cosy, blottis sur les canapés qui entourent la cheminée ou en sirotant une bière autour des tables hautes que se nouent les derniers contacts, que s’étirent les dernières discussions.

est bel et bien le reflet du “ textbook of friendship ” que Morley voyait dans les pages du Canon et l’envie chevillée au corps de remettre ça dès l’année prochaine.

Il est alors temps de se quitter, avec la conviction que la communauté holmésienne

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Fabienne COUROUGE (Henri Fournaye)

Week-end BSI

La promotion 2024

Quatorze holmésiennes et holmésiens, aux profils très différents, ont eu le plaisir de recevoir l’investiture en tant que BSI cette année.

Voilà leurs autoportraits recueillis par la Gazette.

Rudy Altergott (« Old Patrick ») - Je suis un holmésien et un « bibliofool » ( c’est-à-dire une personne obsédée par les livres, comme Vincent Starrett), né le 1er avril 1990.

J’ai grandi à Hinsdale, dans l’Illinois et me suis installé à Chicago fin 2015 où je travaille comme gestionnaire d’une clinique. C’est mon camarade de la loge maçonnique de Chicago, Terry McCammon qui m’a fait connaître le royaume holmésien en 2017. Puis, lors d’un dîner du club des Hugo’s Companions , j’ai rencontré mon ami, mentor, voisin, chauffeur et futur camarade de promo BSI, Bob Sharfman (« Killer Evans »).

Depuis, je suis devenu membre des Hounds of the Baskerville [sic] , ainsi que des Illustrious

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@Baker Street Irregulars

Clients of Indianapolis , des Ribston-Pippins of Michigan , de la Crew of the Barque Lone Star et membre de la direction des Torists International de Chicago.

En 2022, suivant les traces de Vincent Starrett, Christopher Morley et de nombreux holmésiens, je suis devenu membre du Caxton Club des bibliophiles, artistes du livre, libraires, imprimeurs, éditeurs, écrivains, etc. établi à Chicago en 1895.

Mes recherches holmésiennes se sont jusqu’à présent concentrées sur l’infiltration des sociétés secrètes dans le Canon, notamment dans La Vallée de la peur et Son dernier Coup d’archet .

J’écris principalement des présentations et des essais sur Sherlock Holmes, bien sûr, mais aussi sur la fiction policière, la franc-maçonnerie, la libre pensée, le mysticisme, l’histoire et la politique. Je suis également intéressé par la lecture et l’écriture de poésie et de fictions de type « roman noir ». La poésie et la prose de Jim Harrison a une influence profonde sur mon écriture et ma vision du monde. Je suis également cinéphile et mélomane depuis toujours, particulièrement amateur de blues et de musique folk.

Derrick Belanger (« The Board Schools ») - J’ai découvert les histoires de Sherlock Holmes par le biais des récits d’horreur de Doyle.

Quand j’étais adolescent, après avoir lu le chef-d’œuvre de Doyle L’Horreur des altitudes , j’ai senti que je devais aller plus loin. J’ai choisi Une Étude en rouge et je suis devenu accro.

Au cours des douze dernières années, je me suis vraiment épanoui en tant qu’holmésien. J’ai écrit un nombre important de pastiches ainsi que des articles pour des revues holmésiennes. J’ai été publié dans The Baker Street Journal, The Sherlock Holmes Journal, The Strand Magazine et dans The Mysterious Bookshop Presents the Best Mystery Stories of the Year (2023) .

Ma maison d’édition, Belanger Books, est le plus grand éditeur de fictions inédites sur Sherlock Holmes aux États-Unis. Par ailleurs, j’ai récemment été élu « chirurgien en chef » c’est-à-dire président du club des Dr. Watson’s Neglected Patient s, situé à Denver, et je suis membre du conseil d’administration de Five Miles from Anywhere , un groupe international d’holmésiens. J’ai également reçu le prix Susan Z. Diamond en reconnaissance des efforts que j’ai mis en œuvre pour faire découvrir Sherlock Holmes aux jeunes, et remporté le Doylean honor de la Arthur Conan Doyle Society dans la catégorie « fiction » pour ma nouvelle, The Joyce-Armstrong Confession .

Je suis professeur d’anglais, de mathématiques et d’éducation spécialisée dans un lycée. J’ai été ravi lorsque j’ai reçu mon nom d’investiture (« The Board Schools ») parce qu’il correspond à mon expérience en tant qu’éducateur. Je suis encore sous le choc d’avoir été nommé BSI. Quand mon nom a été annoncé, ma mâchoire est tombée par terre ! C’est un grand honneur, et je continuerai à contribuer à la grande communauté de Sherlock Holmes pour le reste de ma vie.

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Tom Brydges (« Waterloo Bridge ») - Mon parcours holmésien a débuté lorsque mon camarade de chambre à l’université m’a demandé : « Que penses-tu des histoires de Sherlock Holmes ? » et j’ai dû admettre n’en avoir lu aucune. Il a levé les yeux au ciel et s’est exclamé : « Tu ne peux pas être considéré comme un homme instruit si tu n’as pas lu au moins quelques aventures de Sherlock Holmes. »

J’ai donc acheté le Canon des éditions Murray et elles m’ont fait vivre soixante ans de plaisir et de satisfaction - conférences, articles, présentations, lecture du travail d’autres holmésiens, cours sur Sherlock Holmes dans le cadre d’un programme de formation pour adultes, adhésion à plusieurs clubs, fondation et direction d’un club pendant dix-huit ans, etc.

Tout cela a culminé lors du dîner BSI. Le trajet entre mon siège au podium, au milieu de deux cents personnes acclamant et applaudissant au moment de mon investiture en tant que « Waterloo Bridge » a été inoubliable. Et je suis ravie de la relation inattendue qui se développe entre tous les membres de la promo BSI 2024.

Fabienne Courouge (« Henri Fournaye ») - La première aventure de Sherlock Holmes que j’ai lue fut Le Chien des Baskerville , lorsque j’avais 11 ans. Je me souviens très bien que je n’ai pas pu lâcher ce livre avant de l’avoir terminé, tard dans la nuit.

J’ai longtemps suivi mon chemin holmésien en solitaire, convaincue que je n’étais pas faite pour la vie de club, mais il m’arrivait de contribuer à des publications ou des sites web.

En 2018, cependant, constatant qu’il n’y avait pas de magazine consacré à Sherlock Holmes en France alors qu’il en existait beaucoup en langue anglaise, j’ai décidé de fonder La Gazette du 221B et rencontré des personnes désireuses d’y contribuer au sein du Cercle Holmésien de Paris, club que je fréquente régulièrement aujourd’hui. Je suis également devenue membre de la Société Sherlock Holmes de Londres.

Tout a changé lors de l’épidémie de Covid, lorsque j’ai commencé à discuter en ligne avec des holmésiens de toutes nationalités, et en particulier Steven Doyle qui m’a proposé d’assister à une réunion des Illustrious Clients of Indianapolis , puis d’en devenir la première membre étrangère.

Dès lors, j’ai eu l’opportunité de rencontrer beaucoup de camarades holmésiens américains qui m’ont proposé d’écrire dans leurs publications ( Sherlock Holmes Review, Baker Street Almanac, The Essential Sherlock Holmes, etc.).

Invitée pour la première fois au dîner BSI, je ne m’attendais pas à recevoir l’investiture. Aussi, quelle émotion quand j’ai entendu mon nom! Et j’apprécie encore plus le lien qui s’est créé avec mes camarades de promo !

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Daniel L. Friedman (« Sir Leslie Oakshott ») - Après avoir d’abord étudié l’histoire et la musique, je suis entré en école de médecine et exerce désormais en tant que pédiatre dans un cabinet que je partage avec mon père. Je suis aussi professeur adjoint à la Faculté de médecine de NorthwellHofstra University , où je m’efforce de transmettre mon savoir aux prochaines générations d’infirmières et de médecins avec dévouement et enthousiasme.

J’ai découvert très jeune la série Bobby La Science de Daniel Sobol et ce fut le début d’une longue passion pour la littérature policière. Mais c’est grâce au film de Spielberg Le Secret de la pyramide que j’ai découvert Sherlock Holmes. À l’école de médecine, j’ai aussi pu apprécier les publications médicales de Conan Doyle, qui, en plus d’être parfaitement documentées, étaient magnifiquement écrites. Je me suis alors plongé dans l’étude de la vie de cet auteur et ce n’est que quelques années plus tard que je me suis intéressé aux aventures de Holmes et Watson. Je suis l’auteur de Doyle’s World: Lost and Found et The Strange Case of Dr. Doyle : A Journey into Madness and Mayhem . J’ai publié plus de quarante articles sur Holmes et Doyle, dont certains ont été primés.

Je considère comme un grand honneur de porter le nom du chirurgien Sir Leslie Oakshott, qui a soigné Holmes dans L’illustre Client et j’attends avec impatience de retrouver mes camarades de promos lors de prochains événements.

Chuck Kovacic (« Baker Street ») - Mon entrée dans l’univers holmésien a d’abord été professionnelle. J’ai en effet joué le rôle du grand détective dans de nombreuses animations « Murder mystery » et les participants adoraient le costume authentique et les accessoires que j’apportais.

J’ai donc commencé à collectionner des objets et décorations d’époque pour meubler un salon holmésien. À un moment, j’ai dû tout installer dans ma propre maison en Californie. J’ai depuis partagé des pièces de ma collection, souvent rares et parfois uniques, lors de nombreuses réunions de clubs holmésiens aussi bien aux États-Unis qu’en Europe.

Par ailleurs, le portrait de Christopher Morley que j’ai peint est exposé au célèbre pub McSorley’s de New York et celui de William Gillette orne la salle où se déroule le déjeuner annuel en son honneur. Posséder et entretenir le 221B Baker Street à Los Angeles est l’entreprise d’une vie et je vous invite tous à effectuer la visite virtuelle de ma création sur le site www.chuckkovacicarts.com.

Stephen Chahn Lee (« Alex MacDonald ») - Stephen a grandi dans le Michigan et vit actuellement à Chicago où il exerce le métier d’avocat.

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Danna A. Mancini (« McMurdo ») - Je suis né dans le Massachusetts et vis actuellement dans le Connecticut. J’ai eu une carrière de 55 ans dans le domaine de l’industrie, principalement dans le dessin technique et l’ingénierie. Quand j’avais 15 ou 16 ans, je parcourais la section littérature policière de la bibliothèque de mon quartier et je cherchais quelque chose de nouveau à lire pour mes grands-parents. À un moment donné, je suis tombé sur un grand livre avec une couverture rouge : un exemplaire de l’édition Doubleday de l’intégrale de Sherlock Holmes. Quelque chose m’a poussé à le retirer de l’étagère et à regarder la table des matières. J’ai trouvé certains titres d’histoires très intéressants, alors j’ai emprunté le livre pour moi-même. J’ai lu tout le Canon en un peu plus de deux semaines.

Mon premier club était le Speckled Band of Boston. Ensuite, il y eut les Men on the Tor . Le soir de ma première réunion, Teddie et Tyke Niver, les fondateurs du club, vêtus d’une de leurs nombreuses tenues victoriennes, ont été les premiers à me saluer. Voyant que j’étais nouveau, ils m’ont pris sous leurs ailes et ont passé toute la soirée à s’assurer que je me sentais le bienvenu. Ils m’ont raconté l’histoire du club et m’ont présenté à tout le monde. Je n’aurais pas pu rêver d’une meilleure initiation à la vie de la communauté holmésienne. Je fais également partie des Cornish Horrors , et de la Cheshire Sherlock Holmes Society . J’ai écrit trois articles holmésiens, une douzaine de toasts et quelques quiz et énigmes.

Mon article « Who Else Knew » a été publié sur le site web de la Sherlock Holmes Society of India à la fin de l’année 2022.

Je suis allé au BSI Weekend tous les ans depuis 2017, excepté 2021. Pendant six de ces années, j’ai assisté au dîner en tant qu’invité.

Mon nom d’investiture est McMurdo, celui de La Vallée de la peur , pas du S igne des quatre . Holmes parle de la boxe comme d’une « profession scientifique », et je suis ingénieur et scientifique, donc ça me plaît bien.

Maxine H. Reneker (« Lomax, the Sub-Librarian ») - J’ai commencé à lire Sherlock Holmes vers l’âge de 10 ans, dans l’édition originale de Doubleday et j’ai lu le Canon de nombreuses fois.

J’ai d’abord été active dans des clubs situés en Arizona, en particulier les Moulton’s Prospectors, puis je suis devenue membre de plusieurs sociétés dans la région de la baie de San Francisco et sur la côte californienne. Je suis membre fondatrice de The Deerstalkers of Monterey Bay .

Mon nom d’investiture est Lomax the Sub-Librarian à la fois dans le club des Knights of the Gnomon of Redwood city et chez les Baker Street Irregulars. Ma carrière professionnelle s’est déroulée dans les bibliothèques universitaires, donc ce nom me semble tout à fait approprié.

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J’ai été co-auteur avec Marsha Pollak d’un article sur Watson et la London Library dans le Baker Street Journal de l’automne 2020, « Watson, Lomax, and the Goodly Volume ».

Je suis ravie d’être investie parmi les BSI et j’ai littéralement reçu un choc lorsque mon nom a été mentionné lors du dîner d’anniversaire annuel 2024.

Olivia Rutigliano (« Lady Alicia Whittington ») - Olivia est une écrivaine vivant à New York. Elle est également rédactrice en chef de CrimeReads où elle publie de nombreux articles.

Jessica Schilling (« The Queen’s Shilling ») - Bien que j’aie lu toutes les histoires de Sherlock Holmes quand j’étais enfant, ce n’est que des années plus tard que j’ai vraiment attrapé le virus. Je venais de rencontrer mon partenaire, Eric Scace, et j’ai été intriguée par une fête costumée sur le thème de Holmes auquel il participait.

À ce moment-là, tout ce que je savais, c’est que l’homme fascinant que j’avais récemment rencontré allait à un dîner, en smoking et chapeau haut de forme, pour célébrer un personnage tout aussi fascinant. Mais ça a suffi pour me plonger dans l’univers holmésien. Par la suite, j’ai compris comment fonctionnait le club appelé le Speckled Band of Boston (j’ai même fait partie du premier groupe de femmes intronisées).

En tant qu’ancienne journaliste, je m’étais penchée sur les débuts de la culture du fandom en ligne, donc Le Grand Jeu et tous ceux qui le pratiquent se sont révélés pour moi à la fois tout à fait étranges et bizarrement familiers. Depuis lors, ce fut une joie de rencontrer ces gens merveilleux, en personne ou en ligne, et de découvrir leurs travaux.

J’ai assisté à mon premier BSI week-end à New York en 2014, et j’ai eu la chance d’y participer chaque année depuis, mais j’ai été surprise d’être invitée au dîner deux années de suite... Avec autant d’holmésiens de longue date en lice pour l’investiture, je supposais que je resterais à la périphérie du groupe pendant très longtemps. En janvier dernier, j’étais également là pour encourager Eric, qui avait remporté le prix Morley-Montgomery pour le Baker Street Journal. J’avais remporté le même prix en 2020 et j’étais vraiment ravie pour lui. J’ai donc été complètement surprise d’entendre mon nom appelé pour la promotion 2024, car je m’étais dit que toutes les bonnes nouvelles de la soirée avaient déjà été annoncées !

Quant à mon nom d’investiture, je suppose qu’il s’est imposé de lui-même, n’est-ce pas ? Petite anecdote amusante : dans Le Signe des quatre , Jonathan Small prend le shilling de la reine pour rejoindre le 3e régiment des Buffs... et bien que je n’aie aucun lien avec l’armée, j’ai obtenu mon diplôme de l’Université du Colorado à Boulder, où joue l’équipe qu’on appelle ... les Buffaloes , mieux connus sous le nom de Buffs . Le monde est petit !

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Robert Sharfman (« Killer Evans ») - J’ai « rencontré » Sherlock Holmes par le biais des films avec Basil Rathbone et Nigel Bruce. Puis, le sujet est resté en sommeil jusqu’au milieu des années soixante lorsque mon associé m’a parlé d’une « réunion de fans de Sherlock Holmes » qui avait lieu à Chicago. Il en avait entendu parler à la radio et pensait que ça m’intéresserait peutêtre. J’ai assisté à ma première réunion des Hugo’s companions ce soir-là avec une cinquantaine d’autres hommes. Aucune femme n’était autorisée à devenir membre, ce qui était le cas dans de nombreuses organisations, groupes, clubs et chez les BSI eux-mêmes à l’époque. C’est là que j’ai rencontré Vincent Starrett qui m’a été présenté comme « le rédacteur en chef de la rubrique littéraire du Chicago Tribune » (le journal le plus important de Chicago à l’époque). J’étais très impressionné, mais je n’avais aucune idée de son véritable influence dans l’univers holmésien. J’ai également rencontré Eli Lebow, John Lellenberg, Bill Goodrich, John Nieminski, John Bennett Shaw et bien d’autres figures éminentes dans notre hobby. Je ne savais pas vraiment qui ils étaient, mais j’ai acheté le Canon (l’édition Doubleday avec l’introduction de Morley) et j’ai commencé à lire. J’assistais sporadiquement aux réunions, mais je revenais toujours pour profiter de la camaraderie du groupe. J’étais ébloui par l’érudition qui s’en dégageait et j’espérais qu’elle déteindrait un peu sur moi.

J’ai maintenu mon adhésion et on m’a rapidement offert de devenir membre des Hounds of the Baskerville (sic) . Mon certificat des Hounds est signé par Vincent Starrett. Je suis toujours membre de ces deux clubs et fier de dire que trois des six Wiggins ont été des Hugo’s companions et des Hounds .

Environ 60 ans plus tard, le 12 janvier 2024, j’ai été stupéfait d’entendre mon nom appelé parmi les BSI de la promotion de l’année. J’ai déplacé ma vieille carcasse aussi vite que possible pour accepter mon schilling de Wiggins avant qu’il se rende compte qu’il avait fait une erreur. Les Jeux olympiques de 2024 se tiendront à Paris cet été et des athlètes recevront des médailles d’or... Leur sentiment sera le même que le mien ce soir-là. C’est merveilleux d’être en compagnie de si grands holmésiens. Mon père disait toujours qu’on est défini par les amis qu’on a. Il serait fier de moi aujourd’hui avec des amis comme mes camarades de promotion.

Liese Sherwood-Fabre (« Mrs. Farintosh ») - J’ai grandi à Dallas, au Texas, et après avoir obtenu mon doctorat de sociologie à l’Université de l’Indiana, j’ai travaillé pour le gouvernement américain à Washington, DC, au Honduras, au Mexique, en Russie, puis de nouveau à Dallas. En cours de route, j’ai commencé à écrire des nouvelles et des romans, dont certains ont remporté des prix. Je n’arrive pas à me rappeler exactement quand j’ai lu pour la première fois un récit du Canon, mais je me souviens d’avoir toujours remarqué les personnages (y compris ceux des dessins

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animés) qui portaient un deerstalker et une loupe pour imiter le détective des vieux films en noir et blanc avec Basil Rathbone.

Lorsque Robert Downey Jr. a ravivé l’intérêt du public pour Sherlock Holmes, j’ai envisagé d’écrire un roman sur ce personnage. J’en avais déjà écrit plusieurs, mais j’ai voulu l’éclairer sous un nouvel angle, en me penchant sur ses origines. Mon premier roman, The Adventure of the Murdered Midwife , m’a demandé beaucoup de recherches : comment vivaient ses ancêtres, gentilshommes campagnards ? Quel impact ce milieu a-t-il eu sur son éducation ? Alors que je rassemblais toutes ces informations, j’ai pensé qu’il était dommage de les garder pour moi et j’ai décidé d’écrire de courts essais sur divers sujets à partager avec les clubs holmésiens, dans leurs bulletins d’information. Un de ceux que j’ai contactés était le club de Dallas ( The Crew of the Barque Lone Star ), et son président Steve Mason m’a invitée à une réunion. J’ai tout de suite été accro.

Au fil des ans, j’ai participé à de nombreux événements, de Dallas à Baltimore, en passant par Dayton ou Atlanta, et j’ai fait la connaissance de tant de personnes extraordinaires, toutes unies par le même intérêt pour un personnage fictif. Avoir l’occasion de rencontrer à New York les membres du BSI a été un moment fort pour moi et le fait d’être investi, un grand honneur. J’ai été la dernière à être appelée en 2024 et je m’étais résignée à ne pas avoir été choisie. Quand j’ai entendu mon nom, j’ai été chamboulée. Je pense que les photos de moi recevant mon certificat d’investiture montreront que je le tenais à l’envers. Même si le reste de la soirée est un peu flou, ponctué de félicitations et d’accolades, ce fut un moment inoubliable.

George Schwartz (« The Alpha Inn ») - Georges vit dans la région de Boston et est le président du club The Speckled band of Boston

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