Le rêve d'Eloïse - Tome 1 - Bienvenue à l'école de danse

Pour Murielle, Florence, Brigitte, Clothilde et Alexandra.

Direction : Guillaume Pô

Direction éditoriale : Sarah Malherbe

Conception éditoriale : Estelle Mialon

Édition : Elsa Tirel

Conception graphique : Elena Baudier-Melon

Composition : Virginie Langlais

Correction : Catherine Rigal

Direction de fabrication : Thierry Dubus

Fabrication : Julia Mirenda

© Fleurus, Paris, 2023, pour l’ensemble de l’ouvrage.

www.fleuruseditions.com

ISBN : 978-2-2151-8168-2

MDS : FS81682

Tous droits réservés pour tous pays.

« Loi n° 49-956 du 16 juillet 1949 sur les publications destinées à la jeunesse, modifiée par la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011. »

Chapitre 1

Une rentrée pas comme les autres

Dans son magnifique tutu blanc et doré, Éloïse tourne sur elle-même comme une toupie. On ne voit qu’elle, au centre de la scène, éclairée par des dizaines de spots. Elle pirouette et pirouette encore, c’est comme si elle n’allait jamais s’arrêter. Dans la salle, le public, ébahi, applaudit. Qui donc est cette prodigieuse petite danseuse ?

– Éloïse ? C’est l’heure de se lever.

Se lever ? La voilà justement qui s’élance vers le devant de la scène, dans un grand jeté parfait, si haut qu’on dirait qu’elle va toucher le ciel…

– Ma chérie, tu vas être en retard pour ton premier jour de danse…

Cling ! Ce mot réveille Éloïse d’un coup. Danser dans ses rêves, c’est génial, mais c’est encore mieux en vrai !

Aujourd’hui, elle intègre le centre DorothéeGilbert, un collège qui fait aussi école de danse. Là-bas, les horaires sont aménagés de façon que les élèves puissent beaucoup danser. Elle aura des cours classiques le matin (français, mathématiques, histoire-géo…), comme tous les élèves de sixième, et danse l’après-midi. Le bonheur !

– Descends vite, ajoute sa maman en tirant les rideaux. Il y a une surprise.

En effet, dans la cuisine, M. Lambert déballe un gros sachet de brioches saupoudrées de billes de sucre.

– Le petit déjeuner de notre sportive de haut niveau est servi !

Miam, des brioches ! Ce sont ses viennoiseries préférées. Bon, pas sûr que tous les petits dej’ de l’année ressemblent à celui-là, mais pour cette rentrée pas comme les autres, ça vaut la peine de faire le plein d’énergie ! 10

– Alors, ma chérie, comment tu te sens ? demande son père.

– Plutôt bien… Enfin… on verra ce soir ! Maman, tu voudrais bien vérifier mon chignon une dernière fois ?

Personne n’a demandé aux élèves de s’attacher les cheveux dès 8 heures, mais Éloïse a très envie de commencer la journée dans la peau d’une ballerine. C’est comme si elle enfilait déjà son costume de scène ! Ça l’aidera peut-être à surmonter le trac du premier jour…

Cette année, « les choses sérieuses commencent », comme dit Malika. Malika, c’est son ancienne professeure de danse, chez qui elle prenait des cours trois fois par semaine l’année dernière. C’est elle qui lui a proposé de s’inscrire dans cette école. Le concours d’entrée était très difficile, et Éloïse avait quelques lacunes, mais Malika l’a beaucoup aidée à progresser.

– C’est bon ! dit Mme Lambert. Il n’y a plus aucune bouclette qui dépasse. Tu peux aller vérifier ton sac une dernière fois, et on file !

Éloïse monte au pas de course dans sa chambre.

Ils sont là !

Maman !!!

Tu as vu mes chaussons ?

– J’ai fini de les coudre hier soir devant la télé, explique Mme Lambert.

Ouf ! Il n’y a rien de pire que d’oublier ses demipointes et devoir danser en chaussettes.

Maintenant que tout est là, Éloïse peut y aller.

Ce matin, c’est son père qui l’accompagne à pied.

Ça tombe bien, l’école est juste à côté de la maison.

C’est un signe… Elle était faite pour elle !

Le centre Dorothée-Gilbert, avec ses maisonnettes et son bâtiment principal, ressemble plus à un petit village qu’à une école. Il y a des arbres partout, et on entend même des cigales ! Il fait encore chaud, en ce mois de septembre.

À l’inverse d’Éloïse, certains élèves viennent de loin, alors ils dorment sur place. Leur internat n’est pas très grand mais il a l’air confortable. Par la baie vitrée du rez-de-chaussée, Éloïse aperçoit deux machines à laver, un baby-foot et… un vieux chat qui fait la sieste, enroulé sur un fauteuil. Ça doit être rigolo de vivre ici avec ses copains de classe, comme dans une vraie maison ! Mais elle préfère quand même rentrer chez elle le soir. Retrouver sa chambre, ses parents, sa meilleure amie Juliette…

– C’est ici que tu as cours, dit M. Lambert.

Il n’y a que quatre salles de classe, dans ce mini-collège. Une par niveau. Les élèves restent dans la même pièce, comme à l’école élémentaire. Éloïse

embrasse son père et court rejoindre la file d’enfants qui se pressent déjà face à la salle Pietragalla.

– C’est une danseuse étoile, raconte une fille très élancée à sa voisine, juste devant Éloïse. Je suis allée voir son spectacle cet été à Marseille et elle m’a signé un autographe à la sortie.

– Waouh, la chance ! s’extasie l’autre.

La grande, qui vient de parler, est la seule de la file (avec Éloïse) à s’être fait un chignon. Elle se tient le dos bien droit, les pieds tournés en dehors. Pas de doute, c’est une future ballerine ! Éloïse se sent intimidée, tout à coup. À part les galas de Malika, elle n’a jamais vu de ballet en vrai (et encore moins rencontré de danseuses ou de danseurs étoiles).

Quand la prof arrive, tous les élèves entrent en classe, garçons et filles mélangés. Dans cette école, les garçons aussi apprennent à danser. Ils ont cours tous ensemble le matin, et sont séparés l’après-midi, sauf dans certaines matières comme l’expression scénique ou l’histoire de la danse.

La prof les place dans l’ordre alphabétique. Tant mieux ! Éloïse n’aurait pas su où se mettre.

Éloïse Lambert ?

Installe-toi au deuxième rang.

Manon Lanoé? Tu peux t’asseoir.

Salut, Éloïse !

Tu es à l’internat ? Non, je…

Et tu fais du classique depuis longtemps ?

Depuis que j’ai cinq ans, et toi ?

L’enseignante frappe dans ses mains.

– Un peu de silence, s’il vous plaît ! Nous allons commencer.

Elle a de drôles d’arabesques bleues dessinées autour des yeux, et des bras interminables qu’elle agite dans tous les sens quand elle parle. Elle écrit son nom au tableau : Mme Loretti, professeure de français et principale des sixième.

– Je sais que vous vous destinez à la danse, déclare-t-elle. Malgré tout, il ne faudra pas négliger les matières principales. Un artiste se doit d’avoir une tête bien faite. Mais ne vous inquiétez pas ; dès que ce sera possible, nous parlerons aussi de danse…

– Tu as vu ses bras ? souffle Manon à Éloïse. Ils sont si longs et souples, on dirait une pieuvre…

– Tu crois qu’elle était danseuse, elle aussi ?

– Chut ! Silence, toutes les deux, lance Mme Loretti d’un ton sévère.

Manon jette un coup d’œil penaud à sa voisine. Bon ! Elles feraient mieux d’écouter, maintenant…