L'architecte et l'enfant: une collaboration évidente ? / Article / 2017 / ENSAG / Fanny Perrot

PERROT Fanny Salle de classe du projet «Made in Oakfield», MATT+FIONA ©FrenchTye

L’architecte et l’enfant: une collaboration évidente ?

Interrogation sur les enjeux de cette rencontre dans l’évolution de l’architecture scolaire vers l’école de demain

S5SA / Méthodologie de l’écriture 1 Ecole nationale supérieure d’architecture de Grenoble

INTRODUCTION «Le Programme international de l’OCDE pour le suivi des acquis des élèves (PISA) est devenu la référence mondiale dans le domaine de l’évaluation de la qualité, de l’équité et de l’efficience des systèmes d’éducation.

En identifiant les caractéristiques des systèmes d’éducation très performants, l’enquête PISA permet aux gouvernements et aux professionnels de l’éducation de s’inspirer de politiques efficaces qu’ils peuvent ensuite adapter à leur contexte local.» Angel Gurría, Secrétaire général de l'OCDE, URL: https:// www.oecd.org/pisa/ pisa-2015-results-infocus-FR.pdf 1

«Inégalitaire , Trop académique , pas pertinent ... l’OCDE blâme le système éducatif français », franceinfo. fr, mis en ligne le 29 août 2014, URL: https:// www.francetvinfo.fr/ societe/education/ inegalitaire-trop-academique-pas-pert i n e n t - l - o c de-blame-le-systeme-scolaire-francais_680843.html 2

Arrivée à la 25e place du classement Pisa1 en 2012 derrière de nombreux pays asiatiques et européens, la France assiste aujourd’hui à un débat public sur la qualité de son système éducatif.

En 2014, dans une interview de Franceinfo titrée : «Inégalitaire , Trop académique , pas pertinent ... l’OCDE blâme le système éducatif français», y sont dénoncées les lacunes et l’impertinence de l’enseignement en France, qualifié de décalé.

Andreas Schleicher, directeur de l’éducation au sein de l’organisation internationale s’exprime : «Le monde moderne se moque bien de ce que vous savez. Il s’intéresse à ce que vous savez en faire. Il a besoin de gens créatifs, capables de croiser les sujets quand l’école française fait encore trop réciter des leçons.»2 Parallèlement, un grand nombre de chercheurs, de responsables politiques, d’enseignants et parents indignés pointent du doigt un système qui ne fonctionne plus, invivable pour beaucoup, et remettent en cause la fonction politique et sociale de l’école.

En effet, l’École, à la fois institution et architecture, s’est construite sur plusieurs siècles et s’est figée en un modèle unique, basée sur un temps où elle était le lieu sacré de la connaissance et l’instrument idéologique de l’état, où l’on y apprenait principalement la citoyenneté, dans l’ordre et la discipline.L’espace que nous lui 1

connaissons encore majoritairement aujourd’hui est rigide, fixe, inchangeable, axé sur le pouvoir et la réglementation, à commencer par le modèle de la salle de classe: les élèves, en rang, de dos, qui ne se voient pas, face au professeur, supérieur.

Complexes et ségrégatifs, les espaces scolaires laissent peu de liberté à l’élève.

Depuis la deuxième moitié du XXème siècle, la société a progressivement changé, sans que l’enseignement et les valeurs transmises par l’école aient forcément été remises en question.

Le terme de « modernité liquide », utilisé par les chercheures Béatrice Mabilon-Bonfils et Virginie Martin3 vient qualifier ce changement : la société se transforme pour devenir un ensemble beaucoup moins rigide, beaucoup moins prédéfini. La socialisation du sujet et son identité sont requalifiés, le monde se complexifie, offrant davantage de liberté à l’individu, devenant ainsi de plus en plus inconstant. L’arrivée des nouvelles technologies vient appuyer la remise en question de la raison d’être de l’école. En effet, avec la multiplication des sources de connaissance et leur facilitation d’accès, «le bâtiment physique n’est plus le lieu unique ni nécessaire pour transmettre la connaissance»4 et son rôle est alors à ré-inventer. Car de la confrontation entre cette école «solide» et ce changement de société résulte un système inégalitaire et compétitif, le plus important d’Europe. La société d’aujourd’hui nécessite que l’on se tourne sur le travail et le besoin de chaque élève, et qu’ on lui enseigne des valeurs de partage et de créativité.

Selon l’architecte Vincent Parreira5, c’est par l’architecture que le système éducatif actuel peut être dépassé et remplacé par «l’école de demain».

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Béatrice MabilonBonfils et Virginie Martin, « Forme solide et École solide : comment penser une nouvelle grammaire (architecturale) scolaire ? », Éducation et socialisation [En ligne], 43 | 2017, mis en ligne le 01 février 2017, URL : http:// journals.openedition. org/edso/1925 ; DOI : 10.4000/edso.1925

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Ibid.

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Ibid.

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Les espaces de cette nouvelle école sont ouverts et conviviaux, défonctionnalisés et polyvalents, modulables et réversibles par des cloisons amovibles pour une grande liberté d’utilisation (de l’individu au groupe), et sont organisés sur un plan circulaire, exprimant l’unité formé par les différents savoirs. Les murs sont ouverts au tag, à l’expression, la relation entre l’école et la cité se fait par une confusion entre l’intérieur et l’extérieur, les locaux y sont partagés afin de confronter tous les âges et de créer une collaboration, l’espace extérieur est optimisé pour le travail, l’échange et le repos... Cette école s’établit dorénavant sur des principes collectifs indispensables à l’enseignement du savoir comme relation, enseignement où l’on partage, où la supériorité du professeur et l’infériorité de l’élève n’est plus.

De ces différents faits nous vient la volonté de comprendre le rôle de l’architecture dans l’éducation. En repensant globalement l’espace d’apprentissage, en inventant une nouvelle architecture scolaire, il semblerait que l’architecte puisse contribuer à la construction d’un meilleur système éducatif en France. En travaillant sur cette question, l’architecte vient alors se confronter à un usager peu habituel : l’enfant. Cela nous amène à nous questionner sur la nature de leur relation et sur l’intérêt de la participation de l’enfant dans la rénovation de l’école. En 2008, dans un article titré « de l’intérêt de transmettre une culture architecturale et urbaine », le réseau des Maisons de l’Architecture en France mettait en avant la nécessité de développement de Source: la collaboration architectes/enfants. L’Ordre National des Architectes, les CAUE et les ENSA 3

se questionnent et mettent en place de nombreux outils et formations cherchant à favoriser leur rencontre.6 On assiste ces dernières années à la multiplication de nombreux workshops, ateliers ou interventions. A Seyssinet-Pariset (38) par exemple, se déroule dans le collège Pierre Dubois, de septembre 2017 à mai 2018 une résidence du collectif d’architectes Lieu-dit, visant à la création d’un projet participatif avec les élèves afin de les impliquer dans la réalisation de micro projets dans leur établissement. En plus d’avoir beaucoup à s’apprendre en travaillant ensemble, l’architecte et l’enfant viennent alors, à travers cette démarche, influencer et renouveler l’espace scolaire.7 Nous nous questionnons, comment la collaboration entre architectes et enfants peut elle participer à une transformation de l’architecture scolaire, vers la création de l’école de demain ?

« Les architectes et les paysagistes dans les classes 2015-2016 », Ordre des architectes [En ligne], 9 | 2016, mis en ligne le 23 septembre 2016, URL : http://www.architectes. org/actualites/ les-architectes-etpaysagistes-dans-lesclasses-2015-2016 6

«Le collège Pierre Dubois mis en chantier par ses propres élèves : quand les collégiens deviennent experts de leur environnement », Ensag actualités, grenoble.archi.fr, mis en ligne le 09 novembre 2017, URL: http:// www.grenoble.archi.fr/ residence-dubois.php 7

La résidence « Dubois en chantier » est un exemple ponctuel, mais peut-on imaginer la mise en place de résidences/workshops réguliers dans les établissements scolaires mélangeant architectes et élèves, visant à la création de petits projets pour une rénovation de l’architecture scolaire progressive par l’enfant et pour l’enfant ?

Dans cette optique, nous chercherons à comprendre les apports de cette collaboration pour l’architecte et pour l’enfant, et leur intérêt dans la rénovation de l’école et de l’apprentissage.

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QU’APPORTE L’ENFANT À L’ARCHITECTE ?

Définir ses propres besoins Dans une période où l’architecture participative, née à la fin du XXème siècle face à la standardisation et la planification réprimant la spontanéité de l’individu, est en plein essor, de nombreux collectifs d’architectes et agences ressentent l’intérêt de se tourner vers l’usager. La « participation » vient replacer l’homme au cœur de la société et de la fabrication de la ville en incluant le citoyen dans le processus de conception du projet. De la concertation à l’acquisition d’un certain pouvoir de décision, elle vise à impliquer de manière active les usagers dans la création ou la rénovation de leur environnement. L’architecture participative se construit sur plusieurs objectifs: elle invite principalement à la collaboration et au partage, visant la création d’une architecture de qualité adaptée aux attentes des usagers, et rejoint également l’architecture durable dans le sens où elle sensibilise l’habitant au respect de ce qu’il aide à concevoir.

Dans le processus de conception ou de rénovation d’une école, l’architecte a besoin d’une confrontation avec l’enfant et d’une collaboration dans le but de mieux le comprendre, de mieux cibler ses besoins et envies. L’enfant devient un usager comme un autre qu’il faut alors questionner. En revanche, si l’architecture participative se crée souvent autour de permanences architecturales, de rencontres et débats, la communication est ici différente. L’architecte se doit d’utiliser des outils appropriés : le dessin, la maquette, le prototype à grande échelle, le jeu.

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Lors de la réalisation du projet « Made in Oakfield » (Royaume Uni) en 2017, Matt+Fiona se sont tournés vers les élèves pour réaliser une salle de classe expérimentale, sur le principe d’un workshop de trois mois. Respectivement architecte et éducatrice, ils proposent une éducation unique, basée sur l’expérimentation, pour les enfants et les jeunes adultes. Les élèves ont exploré leurs idées en maquettes, il en est clairement ressorti la volonté d’un espace modulable, pouvant être à la fois très ouvert et très intime, et d’un espace permettant d’avoir toujours un œil sur le lotissement.

C’est dans la même idée que l’architecte Asif Khan à réalisé la structure de jeu de l’école Chisenhale, école primaire de l’Est londonien. Par la mise en place d’ateliers dans les classes et la création intuitive de réels « playground comittee » 8, chaque enfant a dessiné une aire de jeu. En en faisant la synthèse, il ressortait une volonté générale d’un endroit silencieux, mi-clos, à usage flexible. Asif Khan a cependant dû mettre en commun cette volonté avec celle de l’enseignant qui avait lui principalement besoin de voir les enfants pour les surveiller.

En effet, l’architecte doit confronter les besoins des différents acteurs et usagers, celui des enseignants, mais aussi celui des chercheurs sur la question des conditions d’apprentissage.

L’observation de l’enfant durant la collaboration permet également à l’architecte une analyse de ses comportements de manière quotidienne, afin d’adapter l’espace scolaire et les dispositifs spatiaux à l’enfant.

Alice Morby, «Asif Khan adds elevated wooden play area to east London primary school », Deezen. com [En ligne] 3 | 2016, mis en ligne le 2 Mars 2016, URL: https://www.dezeen. com/2016/03/02/ asif-khan-chisenhaleprimary-school-towerhamlets-londonelevated-wooden-playarea/ 8

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©FionaMacDonald Workshop et réalisations de maquettes, projet «Made in Oakfield», MATT+FIONA

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Apporter son imaginaire L’imaginaire, à ne pas confondre avec l’illusoire, ne s’oppose pas au réel. Il en est l’interprétation, il est subjectif et révèle l’invisible, ce que chacun voit et que les autres ne voient pas. Il est à la fois une source d’inspiration, une référence, une caractéristique et un champ d’expression. Issu de sensations, il se caractérise par une affection ou au contraire une appréhension à propos d’éléments visuels (couleurs, matières, formes...), d’ambiances, d’odeurs, d’espaces, de sons, de goûts, de textures, etc... Généralement construit au cours de l’enfance, l’imaginaire est lié au souvenir.

Il nous accompagne et peut être sollicité en toute circonstance. Chez l’adulte, l’imaginaire peut être moins évident. Il est ancré profondément, et nécessite une attention pour exister, à l’inverse de l’enfant, pour qui l’imaginaire est une part entière de son existence, qu’il sollicite à travers ses jeux, ses dessins...

L’imaginaire constitue un point commun entre l’enfant et l’architecte dans le sens où il est une qualité essentielle de la création architecturale.

Dans sa fonction première qu’est l’invention, l’architecte est intimement lié à l’imagination. Si son rôle est dans un premier temps de rassembler toutes les données existantes, c’est en ajoutant son imaginaire dans le processus de création qu’il peut concevoir quelque chose de nouveau, de transportant. En ayant souvent recours à son imaginaire, plus ou moins consciemment, l’architecte est tout de même limité par une certaine rationalisation que tout enfant gagne en grandissant. Si l’enfant ne possède que des barrières émotionnelles, l’adulte lui se voit confronté à des barrières intellectuelles qui 8

Entretien avec Julie Martin, enseignante du projet à l’ENSA Grenoble, 01/12/2017 9

restreignent le monde des possibles. La capacité de l’enfant à faire sauter toute rigidité, toute « banalité », se montre alors comme qualité intéressante dans le processus de création. En fonctionnant par idéal, l’imaginaire de l’enfant est une énergie brute, en décalage, capable de faire sauter toutes les contraintes et de détourner les cadres. L’enfant apporte à l’architecte sa vision et son réel sans limites, capable de libérer un peu une création architecturale inconsciemment rigide9.

C’est de cette manière que fonctionne le Wiki Building School Project, créé par l’architecte chinois Mu Wei et Magali Paris, paysagiste et enseignante à l’ENSA Grenoble.

Leur projet consiste à la création de workshops visant la collaboration entre étudiants, parents et enfants dans le but d’expérimenter une nouvelle pédagogie de l’architecture. Cette expérience est en partie destinée à l’enfant, concepteur de notre futur.

Ils cherchent à participer au renouveau de la conception architecturale, urbaine et paysagère par le développement de méthodes collaboratives.

Ils prônent un apprentissage « par le faire » (réalisation de prototypes), basé sur l’expérimentation, au croisement de l’architecture et de la nature.

En juillet 2017, à l’Isle d’Abeau, s’est déroulé le projet Moon Forest Kids Pavilion, rassemblant des étudiants de l’ENSA Grenoble, des enfants, français et chinois, ainsi que leurs parents.

Avec la volonté de « Rendre l’architecture abordable par le biais de l’imaginaire», il a été proposé aux enfants de dessiner leur école idéale, basée sur un 9

animal de référence propre à chacun.

Le dessin choisi et récupéré par les étudiants pour en dessiner des plans réalisables a donné lieu à la conception d’un espace de jeu. La démarche du Wiki Building School Project est de créer des distinctions entre les étapes et de donner plusieurs échelles à l’utilisation du projet..

Aujourd’hui jeu, la structure est dessinée autour de cercles concentriques et s’organise sur le plan d’une potentielle école: ce projet a été mené dans l’optique que le concept soit un jour ré-étudié par Mu Wei pour amener innovation et imaginaire à l’école qu’il propose, « fab-lab assez classique » 10 .

Entretien avec Magali Paris, paysagiste et enseignante à l’ENSA Grenoble, co-fondatrice du WKBS, 10/11/2017 10

L’imaginaire de l’enfant donne donc à l’architecte un plan de départ basé sur ses propres intentions.

Dans la conception d’une école, cela permet à l’architecte de créer un espace dont l’imaginaire et la poésie lui échappent en partie.

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École proposée par l’architecte Mu Wei , magazine WKBS, n°1

Structure de jeu du Moon Forest Kids’ Pavilion, Wiki Building School Project ©Auteurinconnu

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Qu’apporte l’architecte à l’enfant?

L’apprentissage de l’espace «Tous les jeunes, comme tous les citoyens, partagent l’acte d’habiter et de circuler. Partir de cette donnée de base fondamentale pour élargir la réflexion vers une découverte politique et sociale de la ville, de son quartier, est un des moyens pour leur apprendre le « vivre ensemble » » 11 Savoir lire et apprécier un lieu, son école, éveiller son regard, comprendre le fonctionnement de l’espace et de la ville pour mieux l’habiter, sont des notions indispensables et pourtant peu enseignées pendant longtemps. L’enseignement de l’architecture est nécessaire dans celui du «vivre ensemble»12 délivré à l’école. L’architecture et la ville sont des lieux où l’on partage, à commencer par l’espace. Chaque lieu crée un cadre de vie et conditionne le comportement des habitants. Le fonctionnement de l’espace urbain dépend alors d’une sensibilisation au «vivre ensemble» dans l’espace et dans la ville dès l’enfance, car «la ville n’est vivante que quand elle est habitée par une pluralité d’êtres qui lui reconnaissent une existence propre.» En travaillant avec l’enfant, en lui permettant de suivre, à l’échelle de son école, un processus de conception depuis son début, l’architecte lui permet une meilleur compréhension de l’espace tout en lui transmettant ses notions et valeurs.

Développer confiance et créativité La sensibilisation à l’architecture permet également d’éveiller l’enfant et l’adolescent à une sensibilité artistique. Par l’apprentissage du regard, de l’attention aux détails, aux formes, couleurs et matières, l’architecture invite l’enfant

Réseau des Maisons de l’Architecture « De l’intérêt de transmettre une culture architecturale et urbaine », archipedagogie.org, publié en mai 2008, URL: http://www.archipedagogie.org/sites/www. archipedagogie.org/ 11

« Le vivre ensemble définit les échanges et relations entre les individus dans une volonté de justice et d’égalité pour l’accès à la parole et à l’action», Ibid.

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Olivia Mull, « School children design and buil green den with moving walls for Hull allotment », Deezen. com [En ligne] 6 | 2017, mis en ligne le 3 Juin 2017, URL: https://www.dezeen. com/2017/06/03/ matt-fiona-pupilsmade-in-oakfield-outdoor-classroom-hullallotment-movingwalls/ 13

à être à l’écoute de ses sensations, valeur fondamentale transmise par l’école. L’aspect plastique et manuel de l’architecture permet également un apprentissage « par le faire », par l’expérimentation qui considère la créativité de l’enfant d’une manière bien plus efficace que le simple cours théorique. Si cette créativité est en plus utilisée à des fins concrètes, en tant que rénovation ou aménagement de l’espace scolaire, comme dans le cas de la résidence « Dubois en chantier », l’enfant est valorisé, ce qui contribue à l’apport indispensable d’une confiance en soi. « Les projets éducatifs basés sur l’auto-construction permettent aux jeunes de se rendre compte qu’ils peuvent non seulement être impliqués dans la prise de décisions qui forment nos villes, mais aussi créer littéralement des espaces à l’intérieur » 13 explique Fiona MacDonald à propos du projet « Made in Oakfield ».

Savoir être impliqué, savoir débattre et collaborer En s’impliquant dans un processus de conception, l’enfant devient acteur de son environnement En ayant conscience de son propre travail, il en est alors respectueux car il sait ce que la réalisation lui a demandé et à quelles fins il l’a faite. L’implication des élèves dans la création ou la rénovation de leur lieu d’apprentissage, lieu qui occupe une part importante de leur vie, amène donc un respect et une envie d’y vivre.

Ste Sunners, professeur à l’école d’Oakfield en charge du projet de création de la nouvelle salle de classe affirme que l’implication des élèves a eu un énorme impact : « Les élèves d’Oakfield ont pris énormément de plaisir […] grâce à la construction. Nous avons constaté en 13

©FionaMacDonald

©PatrickMateer Construction de la salle de classe, projet «Made in Oakfield», MATT+FIONA

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Ibid., p13.

Réseau des Maisons de l’Architecture « De l’intérêt de transmettre une culture architecturale et urbaine », op. cit., p.12 15

conséquence leur confiance, leur estime de soi et leur enthousiasme ».14 Plus indirectement, apprendre à s’impliquer dans des projets à l’école forme l’enfant au débat et à la collaboration, et le prépare à s’impliquer plus tard dans des questions d’aménagements urbains. Ce qu’il apprend à l’école lui fournit des outils et forme le futur citoyen à une meilleure gestion de la ville : «Une démocratie n’est vivante et assurée, que si celles et ceux qui la composent ont les moyens de comprendre les raisons qui les gouvernent.» 15 La réalisation de projets à l’échelle de l’école en collaboration avec l’architecte permet à l’enfant l’apprentissage de notions clés sur l’organisation de l’espace, afin qu’il le connaisse, le comprenne et s’y sente bien, élément essentiel dans la construction d’un système éducatif performant.

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La rencontre entre enfants et architectes : quelle importance dans le renouveau de l’école ?

En France, si l’école a du mal à évoluer, entre autre pour des raisons économiques, culturelles et politiques, elle est également limitée par les programmes de concours définis par l’Éducation Nationale. Dans un article publié en 2017 par les cahiers du CERFEE 16, les six architectes interrogés s’accordent à dire que les programmes sont trop stricts. Définissant toutes les tailles et superficies minimales et maximales, ils proposent des schémas fonctionnels classiques et laissent très peu de liberté à la création. Le programme établit une égalité entre les candidats lors du concours, mais le respect des consignes dans la volonté de le remporter rend les propositions semblables et faibles en originalité. En proposant seulement quelques espaces atypiques, souvent consacrés aux circulations, les programmes limitent la pensée d’un autre « mode » d’enseignement.

En attendant la mise en place de programmes moins stricts, dimensionnés par les équipes de maîtrise d’œuvre elles-mêmes, seulement basées sur quelques directives de l’État, l’école nécessite d’évoluer d’une autre manière.

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S’il est impossible de détruire et reconstruire toutes les écoles avec une architecture nouvelle, la collaboration entre les architectes et les enfants, comme l’illustre la résidence « Dubois en chantier » , offre la possibilité à l’école d’évoluer en permettant une rénovation progressive. Ce système de résidence est d’autant plus intéressant qu’en restant à une échelle locale, il favorise

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Interview de six architectes (Vincent Parreira, Dominique Seni & Danièle Niccoletti (architectes DPLG FREJUS), Lionel Formentelli (FCL Architecture), Ivry Serres (Maitre-assistant – ENSAM, Architecte cofondateur de l’Atelier Fernandez & Serres), et Roland Castro) dans ««L’école, le collège ou le lycée sont des villes en miniature» : entretien avec 6 architectes qui imaginent l’école du futur», propos recueillis/retranscrits par François Durpaire et Béatrice Mabilon-Bonfils, Éducation et socialisation [En ligne], 43 | 2017, mis en ligne le 01 février 2017, URL : http://journals.openedition.org/ edso/1993

«Le collège Pierre Dubois mis en chantier par ses propres élèves : quand les collégiens deviennent experts de leur environnement », Ensag actualités, op. cit., p.4

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implication et communication et conserve une diversité liée au contexte de chaque école.

En ce qui concerne l’architecture scolaire, c’est principalement les apports de l’enfant dans sa collaboration avec l’architecte, qui permettent son évolution. En exprimant ses attentes, il permet la réalisation d’une école plus à l’écoute de ses envies et besoins : dans les différentes collaborations que nous avons prises en exemples, nous assistons à la création d’espaces plus adaptés à l’enfant dans ses dimensions, qui favorise l’apprentissage dans sa disposition et son aspect.

Dans le projet « Made in Oakfield », la volonté d’un espace flexible, pouvant être à la fois très ouvert et très intime a donné lieu à une structure modulable. Le degré d’ouverture, de vue sur le jardin et de luminosité peut être contrôlée par des panneaux en bois pivotants. La classe peut ainsi être ouverte, semi ouverte, ou fermée pour un espace plus intime. La structure se développe également sur une certaine hauteur, respectant la vue sur le lotissement souhaitée par les enfants.

Dans sa structure de jeu, Asif Khan prend en compte le souhait des enfants de l’école primaire, un espace mi clos, silencieux et intime, par l’installation d’une enveloppe en bardage bois poreux aux aspects de cabane.

En ce qui concerne l’apprentissage et le bon fonctionnement de l’école, c’est là plutôt l’architecte, dans ce qu’il apporte à l’enfant en travaillant avec lui l’organisation de l’espace, qui offre la possibilité d’un changement.

Rendre l’enfant acteur et organisateur de son 17

Salle de classe du projet «Made in Oakfield», MATT+FIONA ©FionaMacDonald

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Structure de jeu, Chisenhale primary school, Asif Kahn ©HélèneBinet

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propre lieu d’apprentissage en l’impliquant dans sa conception, c’est le rendre conscient de ce qu’il habite, de l’influence qu’il a sur le lieu et que ce lieu a sur lui. En accordant une importance à ses décisions, en valorisant sa créativité et son estime de soi, l’architecte valorise les qualités que le système éducatif actuel condamne. Peut-être en résulterait alors un système moins compétitif car à l’écoute de l’originalité de chacun, et un meilleur apprentissage, basé sur un « vivre ensemble » plus présent.

De plus, sensibiliser le jeune public à l’architecture et à la ville par la conception de son environnement orienterait certainement le système éducatif vers des enjeux futurs, en palliant au manque décrit par Andreas Schleicher « En France plus qu’ailleurs, on n’enseigne pas suffisamment ce qui sera pertinent pour réussir sa vie ! » 18 En effet, l’architecture et la ville représentent une part importante des enjeux planétaires contemporains et du développement durable.

La conception de la ville est en pleine transition.

Il est indispensable que l’école transmette les outils nécessaires aux futurs citoyens pour la construction de villes responsables et la création d’un réel vivre ensemble à l’échelle de la société, en écho à la pensée d’Hannah Arendt : « C’est également avec l’éducation que nous décidons si nous aimons assez nos enfants pour ne pas les rejeter de notre monde, ni les abandonner à euxmêmes, ni leur enlever leur chance d’entreprendre quelque chose de neuf, quelque chose que nous n’avions pas prévu, mais les préparer d’avance à renouveler un monde commun »19

«Inégalitaire , Trop académique , pas pertinent ... l’OCDE blâme le système éducatif français », franceinfo.fr, op. cit., p.1 18

Hannah Arendt, La crise de la Culture, 1972 19

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En collaborant, architecte et enfant s’apprennent mutuellement, chacun à leur manière. Leur collaboration régulière au sein des écoles permettrait de tendre vers la naissance progressive de nouveaux espaces scolaires plus adaptés à l’élève, ouverts, modulables et tournés vers le partage.

De manière générale, l’enfant amène à l’architecte les éléments clés pour construire l’école de demain, dans le sens où il l’aide à répondre à de nouveaux besoins. Il permet à l’architecte de transformer l’école en étant directement acteur et constructeur. En encourageant la participation de l’enfant, l’architecte vient alors l’aider en lui apportant une nouvelle manière de considérer l’espace, qui le sensibilise à des concepts indispensables, inconnus auparavant : savoir comment habiter l’architecture et la ville, apprécier l’espace de l’école et aimer y apprendre.

Chacun possède son rôle: l’enfant permet une évolution de l’architecture scolaire en y apportant sa vision, alors que l’architecte lui, en apportant des éléments manquants à l’enfant dans la compréhension de l’espace permet d’améliorer le fonctionnement de l’école et du système éducatif.

L’école est un lieu clé dans la transmission de valeurs. Elle peut ainsi venir influencer le fonctionnement d’une société. L’architecture véhicule des valeurs qui viennent renforcer celles enseignées à l’école : partage, vivre ensemble, développement sensoriel... elles les appuie et les illustre en les concrétisant. Elle a donc un rôle à jouer dans la conception de l’école de demain, autant dans l’influence de son espace que par sa transmission.

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Alors quelle place pour des workshops et résidences d’architectes dans des écoles aux programmes scolaires déjà chargés ? Si L’architecture se trouve à la frontière entre toutes les disciplines enseignées à l’école, savantes et sensibles, elle invite au dialogue de ces dernières.

Illustrant concrètement ces matières souvent abstraites, elle en permet à l’élève une meilleure compréhension. Ainsi, en formant à la discussion entre les disciplines et à la culture urbaine, elle invite l’élève à tisser des liens entre ses connaissances.

Le processus de conception architecturale ne serait-il pas un médium pour l’apprentissage des différentes matières ? Apprendre les maths par le calcul d’une structure, apprendre la géographie par l’étude de l’environnement de l’école pour sa rénovation... dans une optique où la construction de projets collectifs participerait à la création d’un nouvel apprentissage, d’un système éducatif adapté à une époque où tout se croise et se questionne.

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Bibliographie Articles en ligne: «Inégalitaire , Trop académique , pas pertinent ... l’OCDE blâme le système éducatif français », franceinfo.fr, mis en ligne le 29 août 2014, URL: https://www.francetvinfo.fr/societe/ education/inegalitaire-trop-academique-pas-pertinent-locde-blame-le-systeme-scolaire-francais_680843.html Béatrice Mabilon-Bonfils et Virginie Martin, « Forme solide et École solide : comment penser une nouvelle grammaire (architecturale) scolaire ? », Éducation et socialisation [En ligne], 43 | 2017, mis en ligne le 01 février 2017, URL : http://journals.openedition.org/edso/1925 ; DOI : 10.4000/ edso.1925 « Le collège Pierre Dubois mis en chantier par ses propres élèves : quand les collégiens deviennent experts de leur environnement », Ensag actualités, grenoble.archi.fr, mis en ligne le 09 novembre 2017, URL: http://www.grenoble.archi. fr/residence-dubois.php Olivia Mull, « School children design and buil green den with moving walls for Hull allotment », Deezen.com [En ligne] 6 | 2017, mis en ligne le 3 Juin 2017, URL: https://www.dezeen. com/2017/06/03/matt-fiona-pupils-made-in-oakfieldoutdoor-classroom-hull-allotment-moving-walls/ Alice Morby, «Asif Khan adds elevated wooden play area to east London primary school », Deezen.com [En ligne] 3 | 2016, mis en ligne le 2 Mars 2016, URL: https://www.dezeen. com/2016/03/02/asif-khan-chisenhale-primary-schooltower-hamlets-london-elevated-wooden-play-area/ « «L’école, le collège ou le lycée sont des villes en miniature» : entretien avec 6 architectes qui imaginent l’école du futur», propos recueillis/retranscrits par François Durpaire et Béatrice Mabilon-BonfilsÉducation et socialisation [En ligne], 43 | 2017, mis en ligne le 01 février 2017, URL : http:// journals.openedition.org/edso/1993 Réseau des Maisons de l’Architecture « De l’intérêt de transmettre une culture architecturale et urbaine », 24

archipedagogie.org, publié en mai 2008, URL: http://www. archipedagogie.org/sites/www.archipedagogie.org/files/ interet.pdf Mackenzie Goldberg «Dream houses drawn by kids and rendered by professionals» archinet.com [En ligne] 10 | 2017, mis en ligne le 17 octobre 2017, URL: https:// archinect.com/news/article/150033784/dream-housesdrawn-by-kids-and-rendered-by-professionals?utm_ c o n t e n t = b u f fe r 3 a c 4 d & u t m _ m e d i u m = s o c i a l & u t m _ source=twitter.com&utm_campaign=buffer

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