Paimboeuf

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ESTUAIRE 2029

PAIMBOEUF Ou la figure péri-métropolitaine

Dérives des rives

Charlotte Boyard, Kévin Chesnel, Juliette Lempreur (PFE), Nicolas Padovani (PFE), Tifenn Taillandier (PFE) Directeurs d'étude : Eric Chauvier, Saweta Clouet, Chérif Hanna ensa nantes - arts de faire

Paimboeuf


ESTUAIRE 2029

arts de faire - janvier 2016


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Estuaire 2029 Estuaire de la Loire, territoire en mouvement

Equipe étudiants : Charlotte Boyard

Kévin Chesnel Juliette Lempereur Nicolas Padovani Tifenn Taillandier

Equipe enseignante : Chérif Hanna, Architecte Urbaniste Eric Chauvier, Anthropologue Saweta Clouet, Architecte

Intervenants : Jennifer Aujame , Réalisatrice

Flore Grassiot, Architecte - Urbaniste Antoine Mialon, Architecte - Urbaniste Ricardo Basualdo, Artiste et Scénographe Urbain Marine Leroy, Architecte

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ESTUAIRE DE LA LOIRE TERRITOIRE EN MOUVEMENT

PAIMBOEUF OU LA FIGURE PERI-METROPOLITAINE

DÉRIVE (DES)RIVES CHARLOTTE BOYARD, KÉVIN CHESNEL JULIETTE LEMPEREUR (PFE), NICOLAS PADOVANI (PFE), TIFENN TAILLANDIER (PFE) DIRECTEURS D’ÉTUDE : CHERIF HANNA, ÉRIC CHAUVIER, SAWETA CLOUET

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SOMMAIRE 5

PRÉFACE

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INTRODUCTION

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PAIMBOEUF, UNE ÎLE ?

18 28

Situation géographique particulière Symbolique des lieux

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PAIMBOEUF ENTRE DEUX EAUX

38 42 46 42 46

53 54 60 la 62 64 66 68

75 76 80 76 80 76 80 76 76 80

Paimboeuf,entre deux eaux Vagues touristiques et culturelles Vagues industrielle et eco- industrielle Paimboeuf mise à distance ? Vagues d'Histoire(s)

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Habiter la zone commerciale Charlotte Boyard Quai ligérien Kévin Chesnel La serre de Paimboeuf Juliette Lempereur (PFE) L'emprise Kuhlmann Nicolas Padovani (PFE) La pierre à l'oeil Tifenn Taillandier (PFE)

80 76

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Capitaux Mimétisme métropolitain Quel mimétisme ? La zone commerciale Le parc Les quais La friche ferroviaire La friche industrielle Croisement d'échelles

FAIRE PROJET À PAIMBOEUF

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Rencontres paimblotines Ateliers publics à Paimboeuf, suite... Réactions paimblotines Paimboeuf au présent et au futur Ateliers publics maison de jeunes Habiter Paimboeuf

75 80

ÊTRE PAIMBLOTIN(E)S

PENSER LE PÉRI-METROPOLITAIN

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BIBLIOGRAPHIE

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REMERCIEMENTS


PRÉFACE

Chérif Hanna et Jean-Yves Petiteau

L’estuaire de la Loire : un territoire en mouvement

le «ménagement» de la future métropole estuarienne, repose sur la qualité de nouveaux «espacestemps» sollicités par la mise en résonance des différents territoires.

L’estuaire de la Loire est, de son origine à nos jours, le territoire de tous les départs, celui des voyageurs, des aventuriers, celui des conquérants et des émigrants. Les villes de l’estuaire se sont greffées sur les quais où ont transité les hommes, les marchandises et la valeur.

Tirer des bords : une métaphore pragmatique... Mobiliser une résilience En mer, tirer des bords, c’est poursuivre sa route « au près serré » contre le vent. Remonter l’estuaire « contre le vent », souvent à « contre courant », c’est engager un parcours de reconnaissance. C’est retrouver au présent les traces d’une histoire.

Ce territoire instable au rythme des crues, des marées, des creusements du lit d’un fleuve « sauvage » sur lequel se croisaient émigrants et commerçants est devenu l’espace privilégié d’une immigration. Le mouvement s’inverse, le territoire s’invente au fil de l’imaginaire et devient l’enjeu de multiples investissements. La valeur de ce territoire repose sur un héritage, celui des mobilités antérieures, dont les infrastructures conservent la mémoire. Elle repose sur les déplacements et mouvements qui les investissent aujourd’hui, multipliant les croisements, liens et coïncidences sur lesquels se jouent de nouveaux rapports de civilité et une nouvelle urbanité. Un monde s’invente au croisement de ces mouvements, une métropole originale se construit sur les liens que les nouveaux et anciens habitants tissent sur un paysage redécouvert donc réinventé.

Tirer des bords, c’est, en louvoyant, réveiller les traces d’un déplacement antérieur; celles des liens qui peuvent encore mobiliser le territoire. L’estuaire est un territoire en mouvement : celui du fleuve, de la marée, des marais et de l’estran que l’on protège ou que l’on sédimente. Les bâtiments ou les infrastructures ne suivent pas la même temporalité que celle des constructions ancrées sur le sol. L’estran, les rives, les bords, les berges et les quais ne subissent pas seulement les mouvements naturels du fleuve ou de la mer, ils bordent un territoire continental. Lieux des passages et transactions qui animent, modifient et obligent à réinvestir les espaces où les hommes et marchandises embarquent ou débarquent. Ils deviennent miroir des grandes mutations économiques inscrites dans un rapport de mondialisation.

Un monde s’invente au croisement de ces mouvements, une métropole originale se construit sur les liens que les nouveaux et anciens habitants tissent sur un paysage redécouvert donc réinventé. La question sur laquelle repose 6


Sur un tel espace en mutation, les strates de chaque occupation recouvrent la mémoire des échanges et valeurs sur lesquelles se rejoue, périodiquement, dans un rapport d’altérité, une identité des hommes et des lieux.

Sur un espace en mutation, la révélation de ce maillage dynamique est la première clé pour la mise en œuvre d’une problématique de l’aménagement. Ce sont donc les liens, le contexte et l’enjeu de chaque traversée qui permettent de réinventer le potentiel de chaque territoire. Le repérage pour cela n’est pas neutre puisque le déplacement du découvreur est déjà une mise à l’épreuve d’une interaction ; soit la reconnaissance d’un échange, qui

Ces implantations et ces effacements obligent, comme le monde non encore découvert, à redécouvrir un territoire qui s’invente et renaît au fil de l’histoire. Si les rives ne recelaient pas un potentiel, jamais les nouveaux conquérants ne réinvestiraient périodiquement cet espace dont la valeur repose sur la transaction. Et parce que ce territoire s’invente à chaque phase de l’histoire ; le repérage doit être analysé et pratiqué comme une aventure : celle d’une découverte et d’une relecture du potentiel que révèle cette identification des traces. Retrouver ces traces, c’est mobiliser des liens que chaque frontière met en tension entre des territoires, lointains ou proches. Cette reconnaissance en acte des traces qui tissent les relations potentielles d’un bord par rapport à ses différents contextes permet d’évaluer, de choisir et de construire les liens qui placent chaque projet comme l’attente d’une relation, d’un échange et d’une négociation. Ce que nous révèle chaque négociation, c’est que ce qui s’échange déborde ou déplace l’objet dans sa fonction ou sa définition première. Les arguments de l’échange mobilisent de nouveaux contextes. Ce qui est important n’est pas toujours la fonction première, mais ce qu’elle induit comme rapports sociaux. Ce que l’on échange dans l’échange. Ce n’est jamais ni l’objet lui même ni son usage mais sa valeur1 qui est totalement relative à la reconnaissance des partenaires de

révèle le potentiel de chaque parcelle ou fragment sollicité, par l’expérience d’un tel déplacement. L’estuaire est par excellence, un territoire en mouvement. Il n’est pas seulement le lieu d’une « identité » remarquable, mais, le territoire privilégié d’une problématique nouvelle. Le lieu d’une expérience où s’explicite un regard nouveau sur le territoire. Le master 2015 est la 8ème édition d’une démarche stratégique centrée sur l’Estuaire de la Loire. Chaque session est l’occasion d’explorer de nouveaux espaces à différentes échelles ; les mobiliser et rendre explicite des arts de faire et des arts de vivre, peu ou pas toujours reconnues par les experts et professionnels de l’aménagement. Après « La métaphore d’une île » en 2013 et « import/export » en 2014, la thématique retenue pour le projet actuel « tirer des bords» tente de retrouver sur les traces de la mémoire, la dynamique d’un « ménagement » capable d’inaugurer un processus de résilience in-situ. Cette démarche propose avec les les lisières qu’ils contaminent.

1 Ce qu’un économiste /anthropologue: Georges Hubert de Radkowski analyse dans son ouvrage : La métamorphose de la valeur, Presses universitaires de Grenoble, 1988 7


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INTRODUCTION Paimboeuf, commune de 3200 habitants entre Nantes et St- Nazaire, se situe à l'embouchure de l'Estuaire sur la rive sud. Si le pont de St-Nazaire et la raffinerie de Donges témoignent d'une activité industrialo-portuaire dans l'estuaire, Paimboeuf se pose quant à elle comme la figure patrimoniale, lieu de passage où l'on s'arrêtait jadis, avant de rejoindre Nantes. De ce passé, Paimboeuf a su garder ce penchant pour l'accueil, celui de nouveaux habitants, visiteurs ou âmes en quête d'un ailleurs dans ce paysage en perpétuel changement. Mais Paimboeuf ce n'est pas que ce passé industriel, c'est aussi des énergies tournées vers le futur. Etudiants à l'école d'architecture de Nantes, nous nous sommes retrouvés embarqués dans cette aventure à la rencontre des Paimblotins, de leur(s) Histoire(s), d'un territoire riche par sa diversité culturelle. Nous aurions pu partir ailleurs, à Donges ou à Cordemais, mais c'est Paimboeuf qui nous a touché, c'est sur ce sentiment commun que nos routes se sont croisées. Pour certains, Paimboeuf était l'occasion de découvrir un territoire à la lisière de la métropole, nouvelle approche dans un parcours pédagogique qui nous mène à travailler principalement la grande ville. Pour d'autres, Paimboeuf évoquait Trentemoult ou de longues soirées d'enfance passées dans le parc face à la Loire. Enfin, Paimboeuf c'était l'exotisme, des paysages en mouvement perpétuel entre Loire et marais, comme autant de richesses à découvrir. Un lieu intriguant et plein d'espoir que nous allons essayer de vous raconter au travers de ce livret. Nous en profiterons pour vous exposer notre démarche ainsi que nos propositions pour l'avenir.

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PAIMBOEUF, UNE ÎLE ?

" On nous dit que c'est une île, bordée par la Loire au Nord et les marais au Sud. Une île c'est l'immanence quand on ne peut en sortir, c'est le temps qui passe au rythme de l'eau. Statique ? L'eau transcende plus qu'elle immobilise, elle mobilise un imaginaire, un ailleurs. D'ailleurs, cela m'a toujours surpris de voir à quel point les insulaires ou les iliens sont les plus grand voyageurs. A Paimboeuf on entend parler du Mékong, d'Indonésie, de Nouvelle Calédonie, un tour du monde, et si Paimboeuf était un petit monde inscrit dans un réseau de ports symbole de voyage et de mouvement. Arrivée ou départ, plus qu'un lieu de passage elle marque le point de départ vers d'autres pays, le temps d'un voyage, avant de revenir où l'on est né pour clore celui-ci. L'eau devient le champs des possibles, partir pour un avenir meilleur et le trouver à notre retour."

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SITUATION GÉOGRAPHIQUE PARTICULIÈRE Paimboeuf, une presqu'île ? Comme un rocher échoué sur la rive ligérienne sud, Paimboeuf marque la silhouette de la Loire par son avancée sur le fleuve. Cette situation géographique particulière lui a valu d'être l'avant-port de Nantes au XVIIIème siècle, facilitant le trajet des navires qui n'avaient alors pas à remonter tout l'estuaire. Les cartes historiques nous montrent que la commune, s'apparentant ainsi à une presqu'île, était entourée d'un archipel de formations sablonneuses. Les mouvements naturels du fleuve, ainsi que les nombreux dragages, ont fait disparaître ces îles, laissant Paimboeuf seule face à l'étendue fluviale, et ainsi davantage exposée aux marées. Carte de 1850

Entre Loire et marais

quelques années plus tard. La carte de 1850 présentée ici montre la commune bordée de territoires humides, faisant ressortir le caractère insulaire de Paimboeuf.

Paimboeuf a toujours été ceinturée d'eau. Le fleuve au Nord, les marais au sud. Ces derniers sont alimentés par la Loire et ainsi soumis aux marées. Asséchés par les dragages du large cours d'eau, et donc l'abaissement de son niveau, des canaux ont été conservés pour ne pas faire disparaître les marécages et leur écosystème. C'est au XVIIIème siècle que des assèchements volontaires sont entrepris dans les marais de SaintViaud pour "procurer aux habitants de Paimboeuf un air plus salubre et une production qui manquait au pays". Ces assèchements sont mis en place grâce à la construction d'un étier en 1769, et d'une écluse,

"À l'encontre d'une désignation fréquente qui, à l'époque moderne, voit en Paimboeuf une ancienne île, la carte d'arpentage des îles de Loire [...] dressée en 1665 ne la recense nullement comme telle." Une situation insulaire Située à 45 km de Nantes et 25 km de Saint-Nazaire, cette commune en forme d'amande est reliée aux villes 12


environnantes par un axe majeur desservant toutes les communes riveraines de la Loire au sud, route départementale qui longe Paimboeuf d'Est en Ouest. Une petite route de campagne la raccorde également à Saint-Père-en-Retz. Cette première route, nommée la "rue des Remparts", marque la frontière méridionale de la commune bordée ici par les marais. Paimboeuf est ainsi contenue

dans ses 200ha, ce qui fait d'elle la deuxième plus petite commune de Loire-Atlantique. Cette situation géographique et la faible superficie de la commune font la particularité de ce petit territoire porteur de symbolique et d'imaginaire. L'imaginaire de l'île ligérienne, un atout non négligeable qui en a attiré et inspiré plus d'un... Citations extraites de Paimboeuf, un avantport de Nantes, Françoise Lelièvre

rue des Remparts

quai Eole

Coupe schématique - Paimboeuf entre Loire et marais 13


SYMBOLIQUE DES LIEUX L'imaginaire de l'île Ce que l'on retient de Paimboeuf, c'est cette lumière reflétée par la Loire, et toujours différente, qui rend le fleuve encore plus vivant. C'est ce quai, dangereux et reposant, flirtant avec un fleuve agité et docile. Ce sont les couleurs vives ou pastelles des étroites maisons qui se dressent les unes à côté des autres sur le quai paimblotin. Chargées d'histoire, elles marquent l'identité de cette

ancienne ville portuaire où chaque navigateur peingnait sa maison de la même couleur que la coque de son bateau.

"La douceur de l'air s'est associée au calme de la Loire pour cette première rencontre. Plusieurs fronts de maisons colorées, parfois avec fantaisie, se succèdent avant d'arriver à ce qui semble être l'extrémité. Ponctuée par un jardin étoilé. Cet observatoire singulier caché derrière un parking quelconque contraste avec ce décor sobre et linéaire. [...] L'ouverture sur le paysage nous fait oublier ce qu'il y a derrière, l'arrière pays, l'arrière port de Loire, l'arrière Paimboeuf. [...] Avant c'était un port. Maintenant c'est une pause. L'avant nous le rappelle, l'arrière nous interpelle. L'avant et l'arrière d'une île. Deux littoraux symétriques. L'un face au marais, l'autre face à la rivière." Nicolas

"Et si on retournait Paimboeuf ?

Nous avons nous-mêmes été sensibles à ces paysages et en avons fait le sujet de quelques écrits et collages. En voici des extraits.

Si l’avant était à l’arrière, et l’arrière à l’avant ? Quel visage aurait Paimboeuf si le quai Eole faisait face au marais, et la rue des remparts, face à la Loire ? Le quai des marais ; les remparts de la Loire. Et si c'était autre chose que les façades colorées des quais ? Si c’était ces lotissements post-modernes, si c’était ces collectifs aux tuiles bleues, si c’était cette gare abandonnée, cette lisière du fond ? Un cimetière face à la Loire Des cafés face au marais Si Paimboeuf se réconciliait avec son refoulé." Charlotte

La raffinerie de nuit - Pierre Duriot 14


La rive Nord au matin - centrale de Cordemais dans la brume

Ce qui marque également l'esprit, à Paimboeuf, ce sont les paysages qui l'entourent et la mettent davantage en valeur.

ou de glace. Pour certains, elle est synonyme de voyage et fait écho à des souvenirs du Mékong, ou du fleuve Niger. La loire, à Paimboeuf, n'est pas un fleuve, la Loire est voyage. Lorsque l'on tourne le dos à la Loire et que l'on regarde les marais, on se heurte aux remparts invisibles. Selon la saison, ces marécages peuvent évoquer la Camargue, et "Si la brume stagne sur les marais, qu'un corbeau croasse et que les bruits du matin ont du mal à percer, l'Ankou peut s'inviter à Paimboeuf" (extrait de dispositif littéraire - Tifenn).

Paimboeuf se glisse entre deux paysages remarquables qui valorisent le profil de la commune : la Loire et les marais. Ils viennent alimenter l'imaginaire de l'île et sont sources d'évocation. La rive d'en face, au Nord, avec son horizontalité marécageuse, fait penser aux aquarelles chinoises aux tons pastels. Lorsque la brume se présente, l'horizon est gommé et on peut aisément se croire au bord de l'océan. La nuit, les lumières de la raffinerie s'allument, et c'est un petit Paris, ou bien New York, qui se donne à voir. Mais l'usine représente un autre symbole, celui du danger, de la bombe.

Paimboeuf est entourée de deux paysages qui semblent inaccessibles, ou du moins difficilement praticables, et qui la confortent ainsi dans son aspect insulaire. La Loire est profonde, large et mouvementée. Peu de téméraires risquent de s'y baigner. Le marais, lui, reste mystérieux. Des chemins de randonnées ont été tracés, mais demeurent rarement empruntés.

La Loire évoque également la mer. Son mouvement rappelle celui des vagues, faisant de lui un fleuve vivant, "très beau quand il est en colère". La Loire est une personne que les Paimblotins observent et admirent. Elle n'est jamais pareille, on la découvre chaque jour. Parfois, on la comparerait à une mer d'argent,

Cet enclavement, bien que porteur d'imaginaire, constitue une entrave au développement de la commune qui se retrouve isolée sur d'autres points, notamment politique et administratif...

15


16


PAIMBOEUF, ENTRE DEUX EAUX

Paimboeuf... Port ? Village ? Ville rurale ou fluviale ? île ou presqu'île ? Ancienne ville industrielle à l'usine effacée ?.. À l'image de ce collage, Paimboeuf nous est apparue comme un rocher. Un rocher perdu en pleine mer mais possiblement à l'abri de la tempête. Alors que certaines vagues viennent effleurer Paimboeuf. D'autres , quant à elles viennent par temps orageux, submerger la ville. Les vagues symbolisent, pour nous, les différentes ambitions et stratégies territoriales qui tendent à transformer, à valoriser et à questionner Paimboeuf et ses environs.

17


VAGUE TOURISTIQUE ET CULTURELLE Quelle est la place à prendre pour Paimboeuf dans le développement touristique et culturel ..? Paimboeuf, situé dans le paysage ligérien apparaît aux yeux des visiteurs comme un lieu de caractère. Maisons de couleurs, se reflétant dans la Loire lorsque celle-ci est calme... En été, le bateau de la croisière fluviale proposée par la Biennale Estuaire en 2007, puis reprise par l'entreprise culturelle Le Voyage à Nantes1 depuis 2011, longe le quai, accoste parfois et invite, surtout, ses passagers à revenir à Paimboeuf. Paimboeuf, point étape dans le développement touristico-culturel entre Nantes et Saint-Nazaire. Ainsi, Paimboeuf se voit peu à peu redevenir un point étape dans les parcours touristiques et culturels qui s'organisent autour d'elle. Loire à vélo, et le parcours européen Vélodyssée passent par Paimboeuf. Comprenant, le possible atout de pouvoir figurer comme un lieuétape, Paimboeuf se réveille peu à peu, et a décidé d'en tirer parti. L'inauguration en novembre dernier, du tronçon de voie cyclable entre Paimboeuf et Corsept atteste de cette prise de conscience. De plus, au travers de la création d'une halte pour la Loire à vélo et du nouveau ponton, la volonté politique de la ville appuie le fait d'inscrire Paimboeuf au sein d'une nouvelle tendance verte. Cette tendance s'illustre par le développement d'un nouveau

Paimboeuf et le développement touristique et culturel.

réseau d'écotourisme ainsi que de commerce fluvial. Un enthousiasme est en train de naître... Une vigilance à adopter. Cependant, cette transition ne peut se faire sans les Paimblotins qui vivent au quotidien leur ville. Car, si Paimboeuf veut renouveler son image et dépasser la chape de plomb qui s'est abattue sur elle il y a quelques années, cela passe avant tout par 18


JARDIN ETOILÉ (ESTUAIRE 2009)

CROISIÈRES PARCOURS ESTUAIRE

PARTENRIAT CULTUREL THÉATRE DE ST-NAZAIRE CSC M. MOYON

CROISIÈRE LOIRESTUA LAVAU PAIMBOEUF

CIRCUIT DE RANDONÉE ST-VIAUD LOIRE À VÉLO VÉLODYSSÉE

Oeuvres biennale Estuaire Institution Parcours cyclables Ligne de bateau ( non régulière ) Chemin de randonnée Pôle touristique important

la consolidation de son réseau culturel local et par la possibilité d'y accéder tous les jours de l'année. Ainsi, en tant que commune à la périphérie, Paimboeuf ne peut pas croire que seul la venue de mille cyclistes et touristes, peut revitaliser la ville. Son développement et son caractère repose également sur la prise en considération des initiatives portées par les Paimblotins et des associations qui font également vivre

la ville tout au long de l'année.

Le Voyage à Nantes est à la fois un événement estival et un organisme de promotion touristique via la culture. 1

19


VAGUES INDUSTRIELLE ET ECO INDUSTRIELLE Une opposition rive Nord/ rive sud, la rive sud une zone de compensation écologique du développement de la rive Nord ? Intrigués par le projet du Grand Port maritime au niveau du Carnet, on est allé voir le maire pour essayer d'en savoir davantage: "On ne veut pas que le sud Loire (...) soit un faire-valoir du développement économique qu'il peut y avoir au Nord Loire et qu'on soit simplement une zone de compensation écologique par rapport à un développement des activités portuaires du Grand Port Maritime de St Nazaire. Même si le Grand Port s'est clairement affiché sur son positionnement par rapport au Carnet où il souhaite développer des activités liées aux énergies marines renouvelables au Carnet. Maintenant quand on regarde, on a plutôt l'impression que ça va être la proue du stockage, je ne sais pas si ça va créer énormément d'emploi, ça va utiliser beaucoup de surface mais ça ne va pas créer beaucoup d'emploi, on ne sait pas encore très bien."

Zones industrielles versus zones naturelles

ces différences: comme l'indique le maire, actuellement, les activités économiques se regroupent sur la rive Nord tandis que sur la rive Sud se concentrent les zones naturelles protégées. Dès lors faut il chercher à inverser la tendance ? La rive Sud doit elle rentrer en concurrence avec la rive Nord ? En a t-elle les moyens ? Ou même l'intérêt ? La rive Sud aurait de notre point de vue intérêt à jouer la carte de la complémentarité,

Rive Nord / Rive Sud, deux concurrents ? La rive Nord et la rive Sud sont souvent comparées ou opposées dans les discours, la carte révèle 20


PAIMBOEUF Vers un rééquilibrage

Disparités N/S Espaces protégés

Zone d’étude du Carnet

Zones industrielles

et devrait s'assumer en tant que zone naturelle compensatoire en développant des projets verts comme le cyclotourisme.

Natura 2000, ce milieu comporte des caractéristiques faunistiques et floristiques uniques et accueillent plusieurs espèces d'oiseaux rares. La création d'infrastructures qui vont "utiliser beaucoup de surface mais (...) ne (...) pas créer beaucoup d'emploi" est à interroger. Peut de communication est faite à ce sujet, les habitants devraient être en possession de l'inventaire des espèces réalisées sur site.

Les paradoxes du projet du Carnet Des projets verts, comme le projet du Carnet pour le développement d'énergies marines renouvelables ? Le projet du Carnet s'implante sur un rivage marécageux d'estuaire en bordure d'une zone protégée

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PAIMBOEUF MISE À DISTANCE?

Un port de plaisan

PAIM ST NAZAIRE

SAINT BREVIN

CORSEPT

ST PERE EN RETZ

« Il n'y a pas de territoire sans imaginaire du territoire » _ André Corboz1 PORNIC

Aujourd'hui, peut-on dire que Paimboeuf se retrouve à la marge des stratégies politiques territoriales ? Malgré son inscription dans le ScoT2 du Pays de Retz [en orange clair], Paimboeuf a tendance à être mis à distance dans les stratégies politiques territoriales. D'une part, en conséquence à sa position géographique, Paimboeuf pourrait se rapprocher davantage du ScoT Nantes / Saint-Nazaire, situé au Nord Loire. En effet, sa spécificité ligérienne est peu pris en compte par le ScoT qui possède des territoires ruraux et maritimes déjà bien établis. D'autre part, les ambitions des politiques territoriales délivrées par le ScoT du Pays de Retz ne semblent pas vouloir connecter Paimboeuf avec le reste du territoire. Aujourd'hui, les volontés territoriales s'organisent autour de points d'équilibre tel que Machecoul, Saint-Philibert de Grand lieu. Ces points permettent, grâce à des développements de pôles multimodaux, des constructions de logements neufs et des implantations de zones commerciales, d'accueillir de nouvelles populations et de favoriser les connexions avec Nantes. Paimboeuf se retrouve alors, exclu de ce nouveau maillage en construction. Parallèlement, dans les décisions de développement territorial, une grande attention est portée aux villes

Carte analytique des stratégies des politiques territoriales du ScoT

balnéaires situées au bord de mer. Ainsi, Saint-Brévin, considéré comme un territoire attractif3 se retrouve appuyé dans son développement touristique et culturel. Une volonté de faire lien ou des projets utopistes. Tant bien que mal, le ScoT cherche à intégrer Paimboeuf dans son schéma de développement. Cependant, c'est par le biais de projets, qu'on pourrait 22


nce ?

Un franchissement ?

MBOEUF

Un Bac ?

Réouverture de la gare? ST VIAUD FROSSAY

NANTES

Z

STE PAZANNE

ST PHILERT DE GRAND LIEU

MACHECOUL

LEGE

T.

Des projets utopistes

Un découpage en question

Projets du SCOT

SCOT Nantes/St Nazaire

Paimboeuf, exclu des schémas

SCOT du Pays de Retz CCSE FR

PORNIC

Couleurs politiques

André Corboz, « Le territoire comme palimpseste », in Diogène, 121, janv.-mars, 1983, p.20

Territoire considéré comme attractif car il accueille plus de 50% de la population et de l'urbanisation du territoire du ScoT du Pays de Retz.

1

2

Pôles d’équilibre Valorisation de la façade Atlantique

3

Schéma de Cohérence Territoriale 23


qualifier pour certains d'utopistes. Ainsi, le franchissement routier via un tunnel passant sous la Loire, la construction d'un port balnéaire en eau pleine ou encore la remise en route de la gare sachant qu'il y aurait alors plus de 30km de voie ferrée à réhabiliter, apparaissent aujourd'hui comme des projets peu réalistes et pourtant toujours envisagés dans le ScoT. Se pose alors la question de comment Paimboeuf peut discuter les ambitions du ScoT à son égard.

LA-CHAPELLE DES-MARAIS

GUERANDE GARE SNCF SAINT-NAZAIRE 20,7 km - 21 min

LE CROISIC

Le statut de Paimboeuf au sein de la Communauté de Commune Sud Estuaire. Au sein de la CCSE2, il nous a semblé que Paimboeuf en tant que petite commune, n'était pas encouragée dans son développement par les communes voisines. De plus, nous avons remarqué qu'il existait un déséquilibre lors de la répartition de l'implantation des équipements partagés entre les différents communes de la CCSE. Ainsi, tandis que la piscine de municipale de Paimboeuf fermait, le nouveau centre de baignade a été ouvert à Saint-Brévin, etc. Cependant, dans la répartition d'équipements scolaires décidée par la Région Pays de la Loire, Paimboeuf se trouve grandement privilégié par rapport à d'autres communes. En effet, Paimboeuf accueille un collège et un lycée professionnel.

LA BAULE

SAINT-NAZAIR

Isochrome des distances kilometriques et lignes de transports pub

Parallèlement, l'isochrome des distances et surtout la rareté des transports en commun témoigne d'une certaine marginalisation de Paimboeuf au sein de la CCSE. Même si le siège de la CCSE est situé à Paimboeuf elle est aujourd'hui présidée par le maire de Saint-Brévin, et a perdu son leadership historique. Se pose alors la question de quels sont les moyens d'action pour Paimboeuf afin de peser davantage dans les décisions de la CCSE, pour pouvoir réfléchir à son statut et à son

ambition pour demain. Cependant, au dela de la question de l'intégration de Paimboeuf dans la CCSE, c'est le principe même de l'application des Schémas de cohérence sur des territoires n'incluant pas de grande métropole qui nous semble problématique. Faudrait il envisager de revisiter ces documents au travers d'autres logiques que les directives métropolitaines ? En 24


30 à 45 min

ES

PONTCHÂTEAU

15 à

SAVENAY

in

30 m

LAVAU -SURLOIRE

PAIMBOEUF

RE

SAINT-BREVIN LES PINS

SAINT-PERE EN-RETZ

NANTES

FROSSAY in 15 m s de

moin

m 45

15 à 30 min

à

GARE SNCF PORNIC 21,9 km - 24 min

30

PORNIC

in

PIRMIL

Croisière Aller/Retour 2h30 (mai-juin-juil.1 fois/mois, août 2fois/mois) 27€ / adulte BOURGNEUF 16

1

Lignes LILA 16 : FROSSAY / SAINT-NAZAIRE 1 : NANTES / PAIMBOEUF - SAINT-PERE-EN-RETZ Prolongations actuelles des lignes LILA Arrêts de bus des lignes LILA Parcours de la Loire à Vélo

blics

effet, ces documents ont tendance à uniformiser et à gommer les spécifités de chaque commune en les considérant uniquement comme des pôles

Abréviation pour nomer la Communauté de Communes Sud Estuaire. 2

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LES VAGUES D'HISTOIRE(S) Au fur et à mesure de son histoire, la situation de Paimboeuf dans l'estuaire s'est trouvée bousculée. Quand Paimboeuf était... « Les trois mâts passaient là ». Comme si le XVIIIème siècle c'était hier, les Paimblotins évoquent l'époque où Paimboeuf était l'avantport de Nantes, constituant une étape importante dans la chaine économique fluviale. Paimboeuf concentrait alors les richesses et raccordait le Pays de Retz à la Loire, considérée alors comme une route commerciale. La construction urbaine linéaire de Paimboeuf témoigne de l'importance de la Loire comme source économique. Cette ville bâtie en un quart de siècle s'est dotée d'institutions importantes pour un port (tribunal administratif, hospice, orphelinat, centre de garnison, etc...) autour desquels se sont implantées de grandes maisons d'armateurs, ainsi que de simples maisons de

pêcheurs. Architectures qui donnent vie le temps de quelques secondes, à un imaginaire d'aventure et de flibusterie digne des films de capes et d'épée en noir et blanc. Au temps de Kuhlmann. Lorsque Kuhlmann s'est implanté à Paimboeuf, la ville-port s'est transformée en ville industrielle. Aujourd'hui, avec la disparition de la classe ouvrière, Paimboeuf est en deuil car comme d'autres villes elle assume encore difficilement le changement d'époque. La douleur ressentie par les habitants quand Kulhmann a fermé est encore palpable. À juste titre d'ailleurs, car au fur et à mesure des récits, on s'aperçoit que l'entreprise Kulhmann et sa vision paternaliste rythmait la vie sociale et festive de Paimboeuf.

PAIMBOEUF

“ On a perdu toute notre belle marine à voile, cette façon de naviguer moins polluante (...) ” NANTES

Clocher de Paimboeuf Le bois gautier Le gros buisson

Métairie du haut paimboeuf

La Kervetière

Champs de Mars

Pont tournant

“ Tous les trois mâts, les beaux trois mâts arrivaient à Paimboeuf, ils déchargaient la marchandise, ils stockaient dans les hangars (...) Après y’a eu le canal de la martinière et les bateaux partaient directement à Nantes. ”

Le petit Paimboeuf

Paimboeuf au XVIIIè siècle : l'avant-port de Nantes et porte d'entrée du Pays de Retz. 26


« (...) de l’usine ça repartait vers la gare et de la gare ça partait vers Nantes (...) et après c’était dispatché dans toute la France. »

« Y’avait 700 ouvriers chez Kuhlman ! » « Ils étaient livrés par des bateaux de soufres, (...) la poussière de soufre s’envolait, on pleurait ça partait sur les bords des fenêtres. Y’avait du soufre partout, partout, partout. »

Paimboeuf, au temps de Kuhlmann : l'entre soi et la ville industrielle auto-suffisante

Une dynamique Nord-Sud ? Lors de nos différentes rencontres, nous nous sommes rendus compte que les Paimblotins entretenaient un rapport privilégié avec Saint-Nazaire. Et que peu de personnes parmi eux se rendaient régulièrement à Nantes. En effet, l'arrivée du pont de

Saint-Nazaire et sa gratuité a permis l'apparition d'un rapprochement Nord / sud assez perceptible.

“ Avant que le pont soit gratuit, Auchan remboursait le ticket du passage quand on faisait nos courses là bas (St Nazaire). Donc on a pris des habitudes.”

ST NAZAIRE

TRIGNAC

“ Passer le pont quand il fait beau c’est agréable, puis on voit les gros ateaux accostés”

PAIMBOEUF

LOGEMENTS SOCIAUX

“ Le théatre de St Nazaire organise quatre spectacles à Paimboeuf dans la salle municipale et la mairie organise la navette qui est gratuite pour les habitants.”

Paimboeuf aujourd'hui : l'arrière port de l'Estuaire et la dynamique Paimboeuf Saint-Nazaire 27


ITINÉRAIRE Nous avons rencontré Patrice au bar, né à Paimboeuf il est ensuite parti voyager et habiter ailleurs. Pour enfin revenir y passer sa retraite. C'est un témoin de l'évolution récente de la ville. Il nous a beaucoup raconté sa jeunesse à l'époque à laquelle la ville était encore industrieuse.

"Alors donc avant c’était les corderies, euh ça, ça, ça a dû fermer… moi j’ai pas connu, hein. Euh quand on était jeune on venait s’amuser dans les ruines, là parce qu’il y avait les ruines, qui étaient là, donc on venait s’amuser dans les ruines..."

"C’était, eh bah c’était une souspréfecture qui a été construite sous Napoléon Ier. Parce-que Paimboeuf à l’époque a été la deuxième ville la plus peuplée de Loire-Atlantique après Nantes, y’a eu jusqu’à 9500 habitants, donc à l’époque, en 1800 c’était euh…"

"Et alors là c’était les gros bateaux, les bateaux de soufre. Alors ceux-là je les ai pas connu, hein, parce que c’était avant, ça doit être dans les années 20 ou 30 ça, ça devait être un truc comme ça mais j’ai connu les grues, là, j’ai connu les grues, et puis là y en avait, y avait, deux, y avait quatre, y avait cinq grues ici"

"Boulay Paty, là, c’était des maisons de pêcheurs, là, ici. C’est pour ça qu’on voit, les maisons elles sont toutes disparates, euh tous les trucs, alors euh chacun avait sa couleur à l’époque, alors ils faisaient la maison de la couleur de leur bateau."

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"des voies ferrées qui étaient là, et qui allaient jusqu’à l’usine, donc euh l’usine, bah qui, ils avaient fait leur ou le sulfate d’ammoniaque, bah ça repartait vers la gare, et de la gare ça partait, ça prenait vers Nantes, ça passait par Sainte Pazanne, et après c’était dispatché dans toute la France "

"Briconautes ah pfff, c'est du n'importe quoi, le mec il tenait le briconaute de St-Nazaire là dans le centre ville de St-Nazaire à côté des halles je le connaissais parce que j'y passais moi aussi dans mon métier je le connaissais bien ça marchait bien il est venu monter un magasin à Paimboeuf"

"Ah ouais, bah à l’époque, y’avait du gendarme, hein. Ah oui… Mon beaupère d’ailleurs, il a été gendarme Ah oui il a été gendarme ici, ouais. Et après il a terminé comme euh… comme je sais plus quoi à l’usine là-bas. Bon il a fait son temps de

gendarme, et après il est parti à, il a fini sa carrière à l’usine Kuhlmann là-bas.. Quand les gens pouvaient rentrer à l’usine, ils entraient à l’usine, parce que c’était vraiment intéressant, quoi. Voilà les viviers, là..."

"Donc je pense que cette zone la restera comme ça. C’est dommage parce qu’il y a toute une zone industrielle qui pourrait être occupée. Puis autrement y a toutes les roselières qu’il y a tout du long, qui sont protégées, je crois que c’est natura 2000, un truc comme ça, donc y’a pas le droit d’y toucher..."

"Tout bah tout a été rasé parce que le problème c’est que ils payaient des impôts là-dessus après, donc ils ont tout rasé, et donc, puis en plus bah cette zone là y’a une grande zone industrielle, si on veut, alors le problème c’est qu’elle est toute polluée par les produits comme le plomb et tout ça, alors il faudrait creuser à de mètres et des mètres de profondeur de façon à tout dépolluer alors..." 29


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ÊTRE PAIMBLOTIN(E)S "Paimboeuf c'est un petit peu plein de choses : port, ville, village pittoresque." "Ouais, ça va quoi, c’est une ville paumée mais voilà quoi. Non, on dirait qu’elle est un peu, comment dire, déserte. Franchement j’y aurais même pas mis les pieds si j’étais pas au lycée. C’est la campagne… Y’a rien, c’est vide, y’a que des vieux." "C'est un peu des racontards les 50% de personnes non imposables, c'est une faune qu'on voit de partout.... la jeunesse qui se fait chier..." "C'est génial de voir des bateaux passer, c'est vivant mais c'est peut-être pas assez." "C'est un lieu où il y plein de choses à faire, des potentiels." " C'est plein de poésie ici : le rapport nature industrie. Il y a plein de contrastes, contrastes de lumière."

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RENCONTRES PAIMBLOTINES Il y a les anciens de chez Kuhlmann, encore marqués par le passé, et qui sont de réels guides de leur commune. Il y a les "nouveaux arrivants" qui, après avoir voyagé, sont tombés amoureux de Paimboeuf. Il y a ceux qui font la promotion de la commune auprès des touristes, ceux qui sont venus installer leur petite affaire, ou encore ceux qui ne sont que de passage, scolarisés dans une commune qu'ils ne connaissent pas vraiment. Nous les avons rencontrés. un club nautique (fermé durant l'été), un club de boules nantaises ou encore une association patrimoniale qui tente de transmettre à travers des visites et des expos, l'épaisseur historique de Paimboeuf. Par ailleurs, beaucoup de ces associations sont en lien avec d'autres situées sur les différentes communes de la CCSE, contribuant à rapprocher les territoire. Des partenariats avec SaintNazaire ont été mis en place, mais ils sont encore insuffisants concernant l'offre culturelle pour cette petite commune qui a perdu son cinéma. La problématique majeure concerne essentiellement le manque de visibilité et de moyens. En effet les acteurs locaux ne possèdent peu ou pas d'espace pour se retrouver et travailler ensemble, et beaucoup de témoignages nous ont fait comprendre que l'engagement associatif n'était plus si populaire qu'auparavant, notamment auprès des jeunes.

La majeure partie des témoignages qui nous ont aidés dans notre compréhension de la commune sont issus de rencontres spontanées au comptoir du PMU, au démontage d'une exposition sur le thème des phares, au marché, ou encore sur les banquettes du bus Lila. « Vous avez dû l’entendre, Paimboeuf c’est particulier » Souvent, on nous a dit, « Il ne se passe rien à Paimboeuf » comme une phrase pour introduire le propos, avant d'énumérer tout ce qu'il s'y passe... Mise en réseau La question du réseau entre habitants, asociations a été au coeur de nos échanges, témoignant souvent d'une envie de recréer du lien. Depuis l'arrêt du comité des fêtes, les occasions de se retrouver viennent à manquer.

« Comme on fait partie de la vieille génération, on connaît pas beaucoup les jeunes, mais on connaît que des personnes âgées, hein »

« Les gens se connaissaient tous c'était plus convivial euh y'avait euh 23 cafés » Malgré un grand manque de visibilité, il existe un tissu associatif assez dense et varié proposant des activités pour tous les ages. On trouve notamment

Les Paimblotins ne se rencontrent plus, et plus particulièrement entre les anciens et les nouveaux arrivants 32


Rencontres au marché

« On est des étrangers pour ces gens-là »

vélo apparaissent comme des aubaines, réelles opportunités de développement pour certains. Malgré quelques tentatives d'ouverture de petits commerces, un véritable manque se fait sentir dans la rue historiquement commercante du Général De Gaulle. Lorsque les Paimblotins évoquent le terme "commerce", c'est pour désigner les quelques résistants de la rue de Gaulle (tabac, Vival, pizzeria, boulangerie). Le Super U, lui, ne semble pas être considéré comme un commerce, car détaché de l'échelle paimblotine. Cependant, il constitue un repère pour les jeunes notamment.

Habiter Paimboeuf « Alors les maisons elles se vendent bien parce que c’est des maisons qui sont vieilles mais qui sont quand même pas trop chères » Paimboeuf nous est parfois apparue comme la dernière étape d'un parcours résidentiel. L'usage est de dire que Paimboeuf, c'est à part. Il y a ceux qui la trouvent charmante, avec sa façade ligérienne, et d'autres qui ont conscience que la situation sociale de certains n'est pas des meilleures.

« Oui bah bien sûr … qu’est-ce que j’connais euh… j’marche au port, des fois on se balade, des fois… on va au SuperU (rire) Bah grignoter, on achète des petits trucs et hop à la récréation […] Si, Super U ! Tu te poses sur un banc le midi devant tu vois tout le lycée défiler »

« Moi j'aime bien ce bled parce qu'il n'est pas comme les autres » D'autres encore la voient comme une ville-dortoir dans laquelle il n'y a pas de centre. Les pôles qualifiés de principaux par les habitants (quais, rue du Général de Gaulle, église et marché) ne sont pas directement reliés, ce qui participe du peu d'interactions, d'animation. « On a la Loire à vélo puis vélodyssé qui passent ici ... »

Parmi les autres emblèmes ou repères dans Paimboeuf, les bâtiments remarquables sont souvent cités par les Paimblotins, et constituent une réelle fierté, comme la mairie, et l'église de style néo-byzantin.

Le jardin étoilé et la Loire à

« Y’a l’église qu’est très belle [...] à 33


Constantinople y’a la même » Enfin, la Loire constitue un réel atout pour la commune. On se promène souvent sur les quais pour l'observer. Elle intrigue, change de caractère, comme un être vivant. Certains, très peu, la cotoient de plus près en s'y baignant depuis le petit banc de sable qui s'apparente à la "plage" de Paimboeuf. « Même quand je vais chercher mon journal, je passe par les quais, déjà pour voir la Loire [...] quand elle est en colère c’est très, très beau » Mais lorsque l'on parle de la Loire, on évoque également la question de la propriété de ses rives. À Paimboeuf notamment, les bords du fleuves appartiennent au Port Autonome qui en délègue la gestion à la commune. On ne fait alors pas ce que l'on veut sur les quais. Ces derniers étaient jadis très investis par l'activité portuaire et la pêche. Les habitants sont encore nostalgiques de cette animation, des différentes appropriations, des filets de pêche que l'on mettait à sécher et qui se substituaient "au linge des ménagères". Aujourd'hui, on ne côtoie plus les quais, à l'exception de quelques pêcheurs venus pour la plupart de la rive Nord pour ce rapport privilégié à la Loire, que l'on ne retrouve pas ailleurs.

Rencontres sur les quais

Mais personne ne nous en parle spontanément. Les Paimblotins sont accoutumés à sa présence, elle fait partie du décor. On ne la remarque plus, mais les odeurs restent tout de même dérangeantes. Bien qu'elle représente un risque comme l'usine Kuhlmann a pu également en constituer un, elle reste un atout dans le paysage nocturne , et Paimboeuf est aux premières loges pour observer ce petit New York.

« […] dans les années 60 tout ça y'avait des bateaux mais plus de 100 bateaux qu'étaient là en train de pêcher ça venait de partout. A Paimboeuf y'avait au moins 80 pêcheurs là à Paimboeuf ils faisaient leur saison avec ça leur année avec ça. […] Aujourd'hui y'en a 4-5, et encore ils vivent pas que de ça bah la civelle ouais ça aide un petit peu, l'anguille la crevette, un peu le bar mais c'est po... »

« Kuhlmann, c’était la plus grande richesse de Paimboeuf… C’est peut-être là que j’ai ai laissé ma santé. »

En face, c'est aussi la raffinerie. « [...] ça fait partie du charme de l’estuaire »

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Rencontres Ă l'AMAP 35


« L'histoire elle est à la fois intéressante et aussi traumatisante pour les gens qui ont eu cette histoire-là » Se déplacer Ce que l'on apprécie à Paimboeuf c'est aussi sa petite superficie qui permet aux habitants de se déplacer à pied. « Le fait de faire tout à pied déjà et d'avoir cette proximité près de chez nous c'est déjà.. » Cependant, l'usage de la voiture reste nécessaire dès lors que l'on veut se rendre ailleurs et notamment pour faire des courses. « non non j’viens pas, j’viens pas parce que on va faire nos courses à Saint-Nazaire … Bah c’est pas Saint-Nazaire qui fait vivre ! » Mais la ville étant située à la lisière de deux métropoles, Nantes et SaintNazaire, les Paimblotins dénoncent la mauvaise desserte de la commune en terme de transports en communs. Ces derniers sont adaptés aux horaires scolaires (collège, lycée), ce qui restreint les passages de bus. En outre, certains regrettent que le bac n'existe plus.

Rencontres sur les quais

entretient une représentation négative, qu'on pourrait résumer ainsi « Nantes-Saint-Nazaire et le désert sud ligérien », Paimboeuf constituant l'angle mort de ce désert.

« moi je regrette une chose c’est que on n’ait pas gardé un bac. Un bac au moins pour que les gens puissent avoir le, le plaisir de traverser l’estuaire […] on mettait un quart d’heure »

Prise d'initiatives Enfin, les habitants nous parlent de projets à Paimboeuf.

De plus, les alternatives contemporaines comme le covoiturage ne semblent pas encore trouver leur place ici. Ce vide de mobilité est particulièrement contraignant pour les jeunes et les personnes âgées « non-motorisées », ainsi aller passer la journée à SaintNazaire n'est pas une tâche aisée.

« […] ils ont le projet d’avoir un espace salon de thé plus les places de parking et tourné vers la Loire […] ce qui serait génial pour nous en tout cas ce serait que les gens qui aiment la plaisance ils puissent, ils puissent mettre leur bateau à l’eau […] ce qui serait mortel mais techniquement je ne sais pas ce

Le maillage territorial, beaucoup plus développé au Nord de l'estuaire, 36


que ça implique ce serait d’avoir un ponton visiteur »

Bien que beaucoup relèvent le manque d'initiatives prises dans la commune, tout le monde souligne le potentiel manifeste de Paimboeuf.

Il y a ceux qui sont prospectés et encouragés par la mairie (réfection des quais, bibliothèque, salon de thé...) ou encore ceux qui viennent des habitants eux-mêmes.

« Ils sont durs à trouver [ndlr. les touristes ] mais je pense vraiment qu’ils sont contents d’être là quand même oui il y a un vrai potentiel »

« […] eh bien de mettre faire comme Michel Puy a fait, euh faire des expositions dans chaque vitrine. Demander à un artiste, parce qu’il y a plein d’artistes à Paimboeuf,… et demander aux artistes de, ben de mettre quelques œuvres pour dire bon bah, inviter les gens à se promener à pied dans Paimboeuf. »

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ATELIERS PUBLICS À PAIMBOEUF, LA SUITE... L'année dernière un groupe d'étudiants a travaillé à Paimboeuf. Leur travail a su intéresser les Paimblotins, et a fourni des outils pour formaliser une réflexion citoyenne pour les projets d'avenir de la commune. Nous avons fait la connaissance de Malika et Liliane, organisatrices de l'Atelier paimblotin. Des ateliers publics aux ateliers Paimblotins

Ateliers publics

Les ateliers publics réalisés par les étudiants l'année dernière (octobre 2014) ont permis d'ouvrir un espace de discussion à Paimboeuf. Pendant trois jours, ils ont mis en place des ateliers autour de plusieurs thèmes : "Le paysage, le social, le rapport aux délaissés dans la ville et les pratiques des Paimblotins aux différentes échelles du territoire."1 Ils ont interrogé le rapport au passé, les pratiques quotidiennes pour envisager le futur de Paimboeuf. Plusieurs Paimblotins ont choisi de poursuivre ces discussions, au sein de l'Atelier paimblotin, le samedi matin, une fois par mois, au Café de la Loire. Lors d'une de ces réunions nous avons pu rencontrer Liliane, JeanClaude, Annaïk, Gilles et Christophe (un des étudiants de l'équipe de l'année dernière) et d'autres. Cette réunion nous a permis de rencontrer des personnes engagées pour l'avenir de Paimboeuf et de prendre connaisssance des problématiques qui les interpellent ainsi que leur point de vue sur la commune, son fonctionnement actuel et les projets envisagés. Une semaine avant les ateliers publics, ils nous ont aidés à donner du sens à notre démarche.

5 - 6 -7 NOVEMBRE

Venez nous raconter Paimboeuf !

9h - 21h ATELIER RE’GAIN 38, rue Général de Gaulle Paimboeuf

JEUDI CRÊPES !!! RACONTEZ NOUS PAIMBOEUF ! 38


Parce que "pendant les soirées crêpes ont refait le monde", Gilles est venu nous prêter main forte pendant les ateliers publics.

L'atelier RE'GAIN institutionnel, une caractéristique essentielle pour créer un lieu d'expression libre.

Nous avons choisi de réaliser nos ateliers publics dans le même local que celui utilisé l'année dernière par les étudiants de l'école d'architecture de Nantes. C'était pour nous une manière de nous inscrire dans la continuité de leur travail.

Les ateliers publics, la suite ! Au regard de nos premières rencontres, ainsi que du travail effectué par les étudiants l'année dernière, nous avons choisi de tourner les ateliers publics vers la question de l'avenir de Paimboeuf. Les Paimblotins connaissent l'histoire de Paimboeuf et la partagent aisément. Nous voulions proposer des supports qui permettent d'interroger les pratiques quotidiennes de chacun et qui aident à penser le Paimboeuf de demain. Les supports proposés présentent plusieurs échelles et font appel à plusieurs modes d'expression: le dessin, l'écrit, le collage. C'était pour nous une manière de s'adresser à tous les Paimblotins.

Malika, la propriétaire, nous a accueillis à bras ouvert dans son atelier, Re'gain. Un local dans le bourg de Paimboeuf pourvu d'une grande vitrine sur la rue du Général de Gaulle. Son ancien usage correspond à l'esprit qu'on a voulu lui insuffler pendant les ateliers publics: il a d'abord été une boutique de dépôt-vente, un commerce mais aussi un lieu de discussion, ouvert à tous. Il a aussi l'avantage d'être non Le dispositif mobile se rend à la sortie de l'école

Pour compléter notre installation à l'atelier Re'gain, nous avons voulu réaliser un atelier mobile pour prendre part à la vie paimblotine: la sortie de l'école, le marché, la vente de poissons sur les quais, la maison des jeunes. Une manière de rencontrer un autre public et d'en savoir plus sur le fonctionnement des espaces publics. 39


RÉACTIONS PAIMBLOTINES Expression libre L'atelier s'apparente à un mur d'expression libre. Il n'est pas une page blanche parce qu'il est dans un premier temps le support de nos interrogations. Photos de Paimboeuf et d'ailleurs, schémas, dessins... "Ces éléments nous posent question, et vous ?" À l'entrée et à la sortie de l'atelier, il est le point de départ mais aussi le point d'arrivée. Informel il ne peut intimider et constitue une bonne entrée en matière. Libre, il complète les ateliers proposés et peut les requestionner. Réagir, commenter, enrichir C'est sans doute l'atelier qui a le plus évolué. Nous avions déjà rencontré plusieurs Paimblotins avant les ateliers publics, s'installer à l'atelier Re'gain permet de partager, d'échanger, de rendre publique nos discussions. Les commentaires, réflexions et suggestions sont annotés sur des post-it et chaque Paimblotin est invité à réagir, rebondir, enrichir ces réflexions.

Réactions paimblotines après réorganisation de l'affichage

Nous avons réorganisé notre affichage au fur et à mesure des ateliers publics. Nous avons regroupé les post-it selon les thèmes qui se dégageaient et nous avons choisi de les placer au centre. Nous voulions que ce soit les paroles qui deviennent support à discussion et non plus nos photos, nous les avons disposés en périphéries. Elles viennent en second plan.

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PAIMBOEUF AU PRÉSENT ET AU FUTUR "Pin-it ", carte des mobilités Une image satellite en noir et blanc à l'échelle de l'estuaire. Des épingles avec un code couleur qui permet d'indiquer : le lieu de travail, de résidence, de loisirs, de consommation, un lieu considéré d'exception."Quels sont vos trajets ?" Ce dispositif nous permet de récolter des informations sur les déplacements des Paimblotins et sur leur quotidien. Qu'est ce que signifie résider à Paimboeuf ? Est ce qu'on vit à Paimboeuf ou est ce qu'on ne fait qu'y dormir ? Que faut il absolument préserver et que manque t-il ?

"Pin it", carte des mobilités

vécu est verticale, en format portrait, elle souligne le littoral et va jusqu'à St-Nazaire.

L'image satellite en noir et blanc sème le trouble. Où est Paimboeuf ? L'égarement suscité par la carte permet de révéler les points de repère de chacun, et leur importance. Certains cherchent St Nazaire, d'autres St Brévin ou encore St Viaud alors que Nantes est rarement évoquée. Nous avons proposé une carte horizontale, format paysage qui souligne l'estuaire mais la carte des Paimblotins, la carte du territoire

"Demain, Paimboeuf...", les possibles Après avoir cartographié le quotidien, les ¨Paimblotins sont invités à le requestionner: "Demain, Paimboeuf...", un début de phrase à compléter, une invitation à projeter. Abrupt, cet atelier bouscule. Certains se risquent à écrire ce qui leur passe par la tête: une évidence ou une lubie, certains restent songeurs... Et

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tant mieux, rêver Paimboeuf c'est déjà le transformer!

d'ailleurs... Des outils pour dessiner un parcours des trajets, des points de départ et d'arrivée mais aussi des haltes ou des lieux marquants.

"Et si...", dessins prospectifs Nous avons choisi huit lieux, jugés emblématiques et porteurs d'imaginaires : la gare et un café tous deux abandonnés, la place du marché, le nouveau lotissement, la rue des Remparts, le quai Sadi Carnot, l'ancien quai de Kuhlmann et la pinède. Imprimés au format A4, un film transparent et des marqueurs ont été mis à disposition pour que ces lieux soient réinventés et d'une manière réinvestis par les habitants.

Un atelier qui a plu aux enfants, ils ont représenté le chemin emprunté de la maison à l'école, les lieux où ils vont faire du vélo et où ils vont faire les courses. "Et si..." dessins prospectifs

Le premier coup de crayon n'est pas facile mais les résultats sont convaincants et deviennent rapidement de nouveaux supports de discussion. "À Paimboeuf", cartes sensibles Un atelier d'expression libre, pas de fond de plan pour guider le crayon pour que chacun puisse dessiner Paimboeuf à sa guise. À disposition une boîte à outils : gommettes, motifs, objets de Paimboeuf ou 43


ATELIERS PUBLICS MAISON DES JEUNES Il nous a paru intéressant de nous rapprocher du jeune public, qui revenait assez souvent dans les discours d’adultes « il faudrait faire ça pour les jeunes… ». Nous avons donc réalisé un atelier au pôle jeune de Paimboeuf, où nous avons pu dialoguer avec quatre adolescents, âgés de 11 à 14 ans et originaires de Paimboeuf et Corsept. Reconnaissance territoriale

fait appel à leurs déplacements sur les lisières ; par exemple, une ondulation de la silhouette au Nord leur rappelait le virage de la route qui longe les quais. Une longue avancée sur l’eau (en l’occurrence la berge du Croisic) correspondait, dans leurs esprits, à celle qui amène au phare de Paimboeuf, ou encore au pont de Saint-Nazaire. L’apparition des réseaux viaires, dans un second temps, leur a permis d’avoir une autre lecture des silhouettes. Les ronds-points ont ainsi été vecteurs de réflexion. Un des adolescents a identifié la première silhouette (île de Nantes) comme étant celle de Paimboeuf, grâce au rond-point central, et ceux qui marquent les extrémités ouest et est, soit les entrées de la commune.

Dans un premier temps, nous avons choisi de démarrer l’atelier avec un exercice simple de « reconnaissance territoriale ». Le principe était de reconnaître, parmi trois silhouettes noires assez similaires (fines et allongées), celle de Paimboeuf. Le but était ici de savoir si les adolescents avaient conscience de la forme de leur commune, et comment ils la perçoivent. La première question que nous avons posée a été « quelles sont les frontières à Paimboeuf », ce à quoi la réponse a été « La Loire ». Nous leur avons conseillé de se repérer notamment grâce aux contours de la silhouette. Ce travail de reconnaissance a directement

Paimboeuf ou pas Paimboeuf ?

île de Nantes

Le deuxième atelier se présentait sous la forme d’un diaporama de photos prises à Paimboeuf ou ailleurs. Le principe était de définir si le cliché avait été pris à Paimboeuf ou non, et pourquoi. Nous voulions, à travers cet exercice, entrainer une discussion entre les adolescents afin de faire émerger tout ce que les photos leur évoquaient. Il s’est avéré que le château d’eau agissait comme un repère dans l’esprit des jeunes garçons, à l’instar de la raffinerie qui est qualifiée d’usine, mais également

4,6 km² 13110 hab. 2850 hab/km²

Paimboeuf 2 km² 3228 hab. 1614 hab/km²

Le Croisic

4,5 km² 4040 hab. 898 hab/km²

Silhouettes "reconnaissance territoriale" 44


Espace vert de mon quartier La mare 2

La mare aux canards

100 m 1 km

?

On y voit la nature et c’est bien Dans la forêt

là où j’aime me promener

Quand on y emmène mon petit frère

là où j’aime me poser

là où je t’emmènerais

là où je ne suis jamais allé, mais j’aimerais

là où je ne voudrais pas aller

Boulevard Dumesnildot, j’aime y aller en vélo

La mairie ça représente tout Paimboeuf MAIRIE E

MARCH

EGLISE

CSC

JARDIN

ETOILE

GARE

Je vais à Corsept en vélo, faire de l’ultimate

Le street

SUPER U

Espace vert de mon quartier La mare 2

La mare aux canards

100 m 1 km

Carte "Comment je pratique Paimboeuf ?" là où j’aime me promener

là où j’aime me poser

? là où je t’emmènerais

de « phare ». « Moi ça ne me fait pas peur parce qu’au début je pensais que c’était un phare ». La pinède, elle, est nommée «la forêt ». « Quand je me promène à Paimboeuf, c’est toujours là, toujours en vélo. » Les adolescents prennent soin de préciser que l’on trouve, dans cette « forêt », un ancien phare, petit bâtiment circulaire, en pierre, nommé « La Pierre à l’Œil ». Nous soulevons alors la question du recul de la Loire qui est à l’origine de la particularité de l’emplacement de ce sémaphore. Un des jeunes ajoute que dans différents jardins des Floralies, ont été retrouvés de nombreux coquillages traduisant encore le mouvement historique de la Loire. Enfin, une photo de l’immeuble de la rue des remparts fait naître une discussion sur l’échelle de la ville. Ce bâtiment rappelle « une capitale » à certains des jeunes garçons. A quoi d’autres répondent que « Lorsqu’on est sur Paimboeuf on voit bien que c’est une grande ville, mais sur la carte on voit que c’est une petite. » La question de la densité est sûrement la raison pour laquelle Paimboeuf est perçue comme une « grande ville » alors qu’il s’agit là de la deuxième plus petite commune de Loire-Atlantique.

là où je ne suis jamais allé, mais j’aimerais

là où je ne voudrais pas aller

demandé aux adolescents de nous indiquer, sur une vue aérienne de Paimboeuf, des lieux qui relèvent de leurs pratiques ou qui leur posent question. A l'issue de cet exercice, on ressent tout d’abord une quête d’espaces verts chez les jeunes garçons. « [la pinède] on y voit la nature, et c’est bien » « j’aime me poser à l’espace vert de mon quartier [les Floralies]». D’autres repères naturels sont également cités comme des lieux fréquentés régulièrement « La mare aux canards » (près de la gare) et « La mare 2 ». L’axe du boulevard Dumesnildot constitue un lieu où les jeunes aiment se promener, notamment en vélo. On remarque une grande pratique de ce moyen de locomotion, notamment due à la petite échelle de la commune qui permet de se déplacer très facilement. Les lieux « symboles » que les quatre adolescents aimeraient montrer à un étranger à la ville sont le Jardin étoilé, la pinède ou encore la mairie. Témoin du passé, ce bâtiment est emblématique et reste un atout pour la commune « La mairie ça représente tout Paimboeuf ». Enfin, la friche Kuhlmann est un lieu qui intrigue et dans lequel on aimerait s’immiscer.

Comment je pratique Paimboeuf ? Dans un troisième temps, nous avons 45


HABITER PAIMBOEUF L'expérience des ateliers publics L'expérience des ateliers publics nous a conforté de l'intérêt de la concertation des habitants. Les questions d'aménagement de la commune concernent leur quotidien, pas besoin d'être un expert pour exprimer des envies ou des regrets. Les Paimblotins ont beaucoup à dire. Étant tous nantais, nous avons préféré loger sur place pendant les ateliers publics. Nous avons eu la chance d'être accueillis à bras ouvert par des habitants. C'était une vraie valeur ajoutée à notre expérience à Paimboeuf. Nous avons pu découvrir la vie de Paimboeuf le soir, avec la vue sur la raffinerie de Donges, le "petit New York" dont on avait tant entendu parler et voir la vie animée des quais en début de matinée à l'heure où les Paimblotins promènent leur chien et vont acheter leur pain. Ces observations peuvent paraître anecdotiques mais elles nous permettent de mieux comprendre la vie des différents espaces publics, ce qui finalement contribue à l'identité de Paimboeuf.

Un manque de communication, révéler les initiatives paimblotines Mais toutes ces énergies se heurtent à plusieurs difficultés. Dans un premier temps, il y a un manque de communication à Paimboeuf, le compte rendu des « ateliers Paimblotins » l’a déjà souligné. Les Paimblotins ne sont pas toujours au courant des initiatives qui se déroulent à côté de chez eux, comme en témoignent plusieurs Paimblotins lors des ateliers publics: "Paimboeuf c'est mort, mon copain par exemple il m'a dit qu'il y avait des clubs de sport pour femmes mais il n'y a pas de pub. On ne sait pas.", "Il n'y a pas assez d'info, il n'y a que les mêmes gens qui savent.", "Ça manque peut -être d'associations ou ça manque d'infos". Est ce que le Paimblo’fil pourrait être plus conséquent ? La page facebook a l’avantage de la flexibilité, les informations peuvent être transmises rapidement, elle est accessible partout mais pas à tous. Nous avons pu voir lors des ateliers publics que plusieurs Paimblotins ne disposent pas d’adresse e-mail. Fautil prévoir un système d’affichage plus performant ? Nous avions fait un affichage pour annoncer la tenue des ateliers publics dans les commerces et plusieurs lieux publics mais ces lieux se concentrent au Nord de

Nos ressentis après les ateliers publics On a rencontré des Paimblotins conscients et convaincus du potentiel de leur commune et qui aimeraient la voir s’épanouir : « Qu’on arrête de dire qu’il n’y a rien à Paimboeuf.». On a rencontré des Paimblotins engagés et mobilisés pour changer le quotidien à Paimboeuf : les personnes qui nous ont prêté main forte lors de nos ateliers publics, tous les participants aux ateliers publics mais aussi tous ceux qui nous ont ouvert leur porte, ceux qui nous ont guidés dans Paimboeuf et qui se sont arrêtés pour nous écouter et partager leur point de vue sur leur territoire.

Pêcheur du quai Sadi Carnot 46


Dispositif mobile devant le café de l'avenir

Paimboeuf, sur les quais et dans le bourg. Les Paimblotins qui font leurs courses sur leur lieu de travail avant de rentrer à Paimboeuf dans les quartiers résidentiels n’ont pas forcément accès à ces informations.

rendre. L’AMAP qui touche un autre public, se déroule au même endroit mais la veille, ce qui ne permet pas aux populations de se rencontrer. Les cafés de Paimboeuf touchent une clientèle restreinte, leur offre ne s’adresse pas aux familles, les personnes âgées se retrouvent à un autre endroit. Un lieu qui regrouperait les différentes associations avec un foyer central permettrait l’émergence de projets communs. Les associations manquent de bénévoles, il faudrait qu’un tel lieu soit accessible, en lien avec un espace informel pour encourager les Paimblotins à prendre part aux projets. En effet, un Paimblotin nous confie: "C'est nous qui faisons Paimboeuf. Tant qu'il n'y a pas de cohésion, il ne se passera rien." Depuis la fin du comité des fêtes, il manque un projet commun, une occasion de se retrouver, un rendez-vous annuel paimblotin. Les événements pour fédérer la commune manquent. Des événements ont lieu, nous avons pu notamment assister à l’inauguration d’un tronçon de la piste cyclable pour la Loire à vélo mais ils touchent un public restreint, tous les Paimblotins ne se sentent pas concernés par le développement de la mobilité douce. Un événement plus large permettrait d’impliquer davantage

Un lieu et un événement fédérateur pour encourager la prise d’initiative En plus de mettre en valeur les initiatives existantes, il faudrait les soutenir, pour qu’elles puissent s’amplifier ou même juste subsister. Aujourd’hui des initiatives ont lieu mais mal relayées, elles remportent un succès limité, ce qui a tendance à décourager la prise d’initiative. Il faudrait rompre ce cercle vicieux. Il manque deux choses à Paimboeuf : un lieu, où les Paimblotins de toutes générations et classes sociales confondues peuvent se retrouver et un événement fédérateur: "À Paimboeuf il n'y a pas trop de lieu de confrontation, il y a le Super U, il y a quelques bars mais on n'y va pas trop, on va à la crêperie chez Stéphane, et il n'y a plus de fête qui rassemblent." Il n’y a plus aujourd’hui de lieu pour tous les Paimblotins. Le marché n’ouvre qu’une matinée par semaine et en semaine, ce qui ne permet pas à tous les Paimblotins de s’y 47


Photo de groupe sur les quais

de Paimblotins, d’horizons différents. L’intérêt de ce type d’événement est de permettre des rencontres, essentielles à la création de nouveaux projets. Ce sont des temps de discussion importants, notamment en ce qui concerne les questions d’avenir de la commune.

Paimboeuf s’y arrêtent. Mais est-ce suffisant ? Plus qu’accompagner des dynamiques existantes, ne pourraiton pas imaginer le développement d’activités parallèles ? Un port s’appuie sur son arrière-pays, des cyclotouristes se déplacent à vélo mais pour découvrir un territoire, qu’est-ce que Paimboeuf veut montrer à ces touristes ? Nous avons réfléchi à des outils pour penser l’avenir de Paimboeuf, l’avenir d’une commune péri-métropolitaine.

Penser l’avenir de Paimboeuf Nous nous sommes rendu compte de la difficulté à penser l’avenir, le futur d’un territoire, pour nous y être confronté et l’avoir questionné au sein des ateliers publics. Dès qu’on aborde le sujet de l’avenir de la commune, les propositions autour de la « Loire à vélo » et du port sont récurrentes. Tous deux disposent d’infrastructures existantes, Paimboeuf est le seul port de l’estuaire où l’on peut accoster, il sera bientôt renforcé par un nouveau ponton et Paimboeuf est au croisement de deux pistes cyclables « Vélodyssée » et la « Loire à vélo », c’est un lieu de passage privilégié. Concrètes et palpables, ces infrastructures sont un support pour imaginer le Paimboeuf de demain. On imagine facilement des infrastructures pour amplifier ces dynamiques : un nouveau ponton pour l’accostage du Bélem et une aire de stationnement pour la Loire à vélo pour que les cyclistes, au delà de passer à 48


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PENSER LE PÉRI-MÉTROPOLITAIN " Désormais, deux Frances s'ignorent et se font face : la France des métropoles, brillante vitrine de la mondialisation heureuse, où cohabitent cadres et immigrés, et la France périphérique des petites et moyennes villes, des zones rurales éloignées des bassins d'emploi les plus dynamiques." _ Christophe Guilluy, La France périphérique, comment on a sacrifié les classes populaires, Flammarion, spetembre 2014.

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CAPITAUX

Mireille Moyon est assez actif, il reste néanmoins vétuste et n'est plus à l'échelle de la commune. Certains anciens édifices, comme l'hôpital ou le tribunal n'étant plus utilisés aujourd'hui, ont déjà été mis à profit pour développer l'offre culturelle, mais leur réhabilitation étant trop coûteuse ils sont aujourd'hui laissés à l'abandon, comme les autres symboles du passé. On le voit, l'épaisseur historique est indéniable, mais malheureusement sa richesse est sous-exploitée et n'est pas mise en valeur comme on pourrait l'attendre. Le capital de Paimboeuf en terme de culture ouvrière est aujourd'hui complètement éteint, alors que beaucoup de Paimblotins se plaisent à se souvenir du nombre de bistrots qu'il y avait " à l'époque ". Seuls deux d'entre eux ont survécu et la bonne humeur d'antan a laissé place à une certaine morosité.

Après ces différents constats sur le terrain, nous avons voulu poser un regard théorique sur Paimboeuf, afin de comprendre ce qui composait cette négativité ambiante que nous avions identifiée. Sans vouloir noircir le tableau, loin de là, il était indispensable pour nous d'assimiler cette réalité avec d'autres outils. En effet il semblerait qu'en plus d'avoir un capital économique très limité, la somme des capitaux, social, culturel et symbolique soit également assez faible. Cette grille d'analyse nous a permis de porter un autre regard et de proposer différentes stratégies. Comme nous l'avons vu, même si il n'y a que 3000 habitants, il y a comme une certaine étanchéité entre les différents groupes sociaux. Contrairement à ce que l'on pourrait penser tout le monde ne se connaît pas et les gens se répartissent d'une manière spécifique dans l'espace. La densité et la compacité du tissu bâti ne semblent pas favoriser les interactions entre les gens, comme si c'était trop dense pour profiter de la proximité des bourgs mais pas assez peuplé pour jouir de l'anonymat des villes. On a par ailleurs observé une certaine conflictualité dans les relations avec les communes voisines. En effet la communauté de communes masque un certain nombre de dysfonctionnements qui paraissent desservir la ville, d'autant plus que les autres communes semblent mieux fonctionner.

Ces deux constats nous amènent au capital symbolique lui aussi en berne. Il y a un manque de reconnaissance certain, on retrouve cette représentation négative aussi bien chez des habitants qui dénigrent leur ville, que chez des gens d'ailleurs remplis d'idées négatives à l'égard de Paimboeuf. Le cliché du mauvais climat social est récurrent, au point qu'on entend parfois certaines statistiques fantaisistes à la limite du fantasme. « Il y a 51 % de cas soc' à Paimboeuf ». Comme nous l'avons vu lors des ateliers publics, même si les gens sont installés depuis plus de dix ans ici, ils ne se diront pas Paimblotins s'ils n'y sont pas nés, et certains entretiennent l'envie de partir vivre ailleurs. Ce manque de reconnaissance apparaît comme se nourrissant de lui-même, comme il n'y a rien, on n'attend rien. Néanmoins, si les natifs ont vu Paimboeuf décliner au fil du temps, les nouveaux arrivants arrivés plus récemment noircissent moins le tableau, ayant choisi Paimboeuf comme lieu de vie, ils perçoivent plus aisément ses côtés positifs. A l'inverse les arrivants récents ayant emménagé dans les

Deuxièmement le capital culturel est peu important lui aussi, que se soit en terme d'offre ou d'héritage culturel. Si on a vu l'importance du tissu associatif, celui-ci a du mal à trouver une place dans la cité étant donné le peu d'infrastructures disponibles. Il y a un réel déficit d'équipements publics à Paimboeuf, et même si le centre socio-culturel 52


MANQUE DE RECONNAISSANCE CAPITAL SYMBOLIQUE FAIBLE : Peu de reconnaissance, stéréotypes d’un mauvais climat social «51 % de cas-soc’», symboles désuets à l’ère post-industrielle

MARGINALISÉE MISE À DISTANCE

IMAGINAIRE PORTUAIRE NON RENOUVELÉ

NÉGATIVITÉ CAPITAL SOCIAL

CAPITAL CULTUREL PARTIEL : Tissu associatif dense mais manque d’infrastructures culturelles. Seule une partie des paimblotins est concernée

DIFFICILEMENT QUALIFIABLE

TRAUMATISME FIN DE LA CULTURE OUVRIÈRE

logements sociaux, semblent avoir plus de mal à s'inclure dans ces mécaniques de représentation, entretiennent un rapport plus anonyme et détaché du territoire, percevant Paimboeuf comme un lieu de résidence générique. Enfin ce capital symbolique est également incarné par ces nombreux emblèmes issus de l'ère portuaire et industrielle aujourd'hui révolue. Ainsi malgré leur force, ils rappellent la disparition de cette culture ouvrière. Ils mettent en avant le déclin que connaît la ville, à l'image de ces quais vides et envasés, des quelques bateaux à l'état d'épaves, ou de ces friches désertes.

PARTIEL :Relation conflictuelles avec les communes voisines. Etanchétité entre les différents «clans» de Paimboeuf

CLANS

seraient pas effectives ici. Paimboeuf nous est apparu comme un territoire péri-métropolitain, non plus à la lisière de la ville mais bel et bien à la lisière de la métropole, se retrouvant exclue des dynamiques positives engendrées par celle-ci. D'abord déstabilisée par le déclin de l'industrie, la ville s'est retrouvée dans l'incapacité de se renouveler. Nos constats sur les politiques sociales et culturelles, ou sur la mobilité, nous montrent comment ce territoire se trouve aujourd'hui peu intégré dans la cohérence territoriale de l'estuaire de la Loire. Cette réalité est illustrée par le manque de développement ces dernières années, devenant un lieu de relégation, créant une certaine déprise sur le territoire. A la fois marginalisée dans le SCOT du Pays de Retz, et mise à l'écart dans la communauté de communes, Paimboeuf est réduite à sa condition de satellite de St-Nazaire, sans en être pour autant à sa périphérie directe.

Ces déficits de capitaux contribuent donc à la négativité inhérente à Paimboeuf. Les difficultés économiques associées aux problématiques sociales et culturelles ont engendré une réelle représentation négative. Loin d'être notre seul constat, il en résulte néanmoins une certaine singularité. Assez vite nous avons eu le sentiment que Paimboeuf était une situation particulière sur l'estuaire et que les approches de travail habituelles ne 53


MIMÉTISME MÉTROPOLITAIN Comment appréhender le péri-métropolitain ? Quelle posture projectuelle pour Paimboeuf ? Territoire péri-métropolitain Ce que l'on appelle territoire péri-métropolitain consiste en un territoire exclu des dynamiques métropolitaines et urbaines à l'inverse du péri-urbain. Ce dernier, malgré sa distance au centre, demeure intégré dans le fonctionnement de la métropole avec des problématiques bien différentes, telles que l'étalement urbain ou le "tout-voiture". Le périmétropolitain quant à lui s'illustre par une mise a distance subie, une raréfaction des services publics ainsi qu'une économie sinistrée. Dès lors, comment agir sur ces territoires que l'on n'a pas pris le temps d'observer, d'analyser, de penser ? Ces territoires oubliés comme les décrit Christophe Guilluy dans son livre La France Périphérique , nécessitent d'être reconsidérés, repensés dans une cohérence nouvelle (sociale, économique, touristique, institutionnelle...) tout en s'appuyant sur leurs singularités, leurs atouts géographiques, et en préservant des usages culturels...

Repérage de situations et définition de figures archétypales

cette posture du"POUR" les habitants, nous lui avons préféré le "AVEC" qui permet d'inclure les habitants dans le faire du projet tout en permettant à chacun d'affirmer son rôle, usager ou concepteur. A partir de cette posture, nous cherchons à identifier les situations potentielles (en orange) de projet tout en réfléchissant à des programmes. Reproduction

A la suite de notre analyse, nos premières intentions, notre posture, se voulait salvatrice vis à vis de Paimboeuf et de ses habitants. La traduction de cette posture consistait à dire "on va mettre en place des projets POUR les Paimblotins..." Par la suite, nous avons remis en question

A partir de l'identification de tous ces potentiels, ces situations, ces usages, le travail cartographique nous a mené à nous poser des questions quant à la reproduction perceptible d'archétypes métropolitains, comme un mimétisme. Par mimétisme, nous 54


entendons ces espaces, ces formes qui font appel à la manière dont la ville se construit dans les métropoles. A Paimboeuf, nous identifions des figures fortes comme le boulevard avec ses allées d'arbres et ses voies larges, l'entrée de ville et sa zone commerciale ou encore la ZAC et ses pavillons. Cependant ces lieux semblent aujourd'hui dysfonctionner, à l'image de l'entrée de ville où le Briconaute a fermé, du boulevard très peu fréquenté qui parait hors d'échelle ou encore de la ZAC dans laquelle des logements neufs restent inhabités. Dans les documents d'orientation, on observe également la projection d'opérations de logements avec commerces en RDC, ou alors des termes apparaissent

comme mobilité douce ou encore éco-technopole. Cette manière de faire, semble en décalage avec la réalité paimblotine, ce pourquoi nous souhaitons questionner ces figures urbaines et les ré-interroger à la lumière de Paimboeuf, et sa condition péri-métropolitaine. Basé sur une critique de ces archétypes, il s'agit de proposer une autre manière de faire avec les ressources présentes. Les programmes sont comme des annonces, ils font figure de manifeste pour Paimboeuf. Chacun à leur manière, les projets se positionnent soit dans une remise en question d'un modèle établi soit dans l'anticipation d'un risque mimétique notamment sur les friches industrielles. 55


QUEL MIMÉTISME ?

Kuhlmann sont toutes deux les produits de la désindustrialisation violente qu'a connu Paimboeuf à la fin du XXe siècle. Contrairement aux autres figures, elles ne sont pas réellement le résultat d'un mimétisme métropolitain de la part de leurs planificateurs mais elles sont plutôt issues d'une dynamique industrieuse qui n'a plus lieu à Paimboeuf aujourd'hui. Elles peuvent apparaître hors d'échelle et leur présence intrigue le nouveau-venu. Certains ignoraient même la présence d'une ancienne gare. Pour ces deux figures, l'enjeu est pour nous d'anticiper un mimétisme éventuel plutôt que d'en questionner un déjà présent.

Mimétisme existant La zone commerciale en entrée de ville, le boulevard ou encore le parc constituent les lieux porteurs de l'expression de ce mimétisme. On observe une rupture d'échelle entre ces aménagements et la commune qui ont été pensées dans les usages et la morphologie, pour des villes de tailles plus importantes, ce qui contribue à renforcer leur caractère hors sol. Questionner ces aménagements signifie les réinterroger à la lumière du contexte Paimblotin que nous avons appris à connaitreau fil des mois. L'idée sera donc de réhabiliter ces figures en les re-contextualisant.

En effet les friches post-industrielles sont les terrains privilégiés de ces mimétismes métropolitains que nous avons pu identifier, et ce partout en Europe. Le déclin industriel que nous connaissons depuis 40 ans a offert de nouvelles opportunités foncières à nos élus et promoteurs qui font la ville. Alors que la fin du XX siècle était encore le théâtre de l'étalement urbain et du développement de nouveaux quartiers créés ex-nihilo, le début du XXI ème est le temps du renouvellement urbain, on reconstruit la ville sur la ville. Les friches qui se sont démultipliées, permettent d'accueillir cette nouvelle fabrique de l'urbain en proposant une recette appliquée un peu partout. La tertiarisation de l'économie qui s'est développée à partir du départ de l'industrie, associée à la construction de l'Europe a donné lieu a une concurrence entre les différentes métropoles qui la composent. Cette nouvelle donne a donc engendré un développement urbain spécifique, associé à un effet vitrine visant à se rendre attractif. Lille Europe, l'île de Nantes, ou Lyon Confluence sont ces exemples proposant à la fois une nouvelle offre de logement, intégrants tous les standards environnementaux, une offre tertiaire importante pour développer des activités novatrices comme le numérique, et souvent une offre

Anticipation mimétique Lors de l'identification des figures, deux d'entre elles nous sont apparues comme ayant des enjeux similaires. La friche ferroviaire de la gare et la friche industrielle de

Vue de la friche ferroviaire 56


Boulevard Dumesnildot

culturelle avec une symbolique forte, favorisant la visibilité et l'attrait de ces nouveaux quartiers, qu'on pourrait qualifier « d'effet Bilbao ». Si le succès de ces approches peut être avéré à certains endroits, il n'empêche qu'on assiste aujourd'hui à une production presque industrielle de nouveaux quartiers engendrant une certaine aseptisation des espaces publics, et un développement plus difficile que prévu, la Courrouze à Rennes en est un exemple.

leurs histoires, suggèrent des façons de faire du projet. Le renouvellement urbain semble avoir acquis le statut de recette qu'on applique simplement sur le territoire comme une pommade qu'on passe sur une cicatrice, sans avoir au préalable fait un effort de contextualisation. Ces friches sont en effet des cicatrices, elles sont les stigmates du déclin que connaît la commune depuis plusieurs dizaines d'années, mais notre attitude en tant qu'architecte doit être justement de les explorer, sans leur tourner le dos.

Bien sûr notre échelle n'est pas du tout la même que celle de ces grandes métropoles, cependant on a vu comment, notamment à travers Estuaire, ces dynamiques métropolitaines pouvaient rattraper Paimboeuf sans pour autant apporter un renouveau significatif. La Loire à Vélo ou encore le développement de l'activité artistique contribuent eux aussi à nourrir certaines ambitions qui nous paraissent illusoires malgré tout. En effet Paimboeuf est d'abord une étape avant d'être une destination et nos approches projectuelles se doivent donc d'inventer des programmes cohérents qui prennent en compte ces différentes dimensions, et qui anticipent la tentation du mimétisme. Comme on l'a vu les lieux, leurs ambiances, et

Les friches sont des territoires privilégiés pour fabriquer la ville, elles sont des atouts autant que des handicaps, les opportunités y sont grandes autant qu'elles sont risquées, et l'enjeu de notre travail est de proposer autre chose que ce que notre époque suggère. La « friche culturelle » ou « la gare des assoc' » ne sauraient trouver leurs places dans le contexte Paimblotin.

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LA ZONE COMMERCIALE Petite commune de 3200 habitants, Paimboeuf a délaissé ses commerces de bourg pour construire, à son entrée Est, une zone commerciale... comme les grandes villes. La zone commerciale est née en France dans les années 1960, en réponse à des modes de vie changeants, et une utilisation accrue de l'automobile. C'est un temple, celui de la consommation. Elle est un condensé de tout ce dont l'homme a (a priori) besoin. Elle ne passe pas inaperçue, annoncée de loin grâce aux panneaux colorés et remplis d'indications textuelles. Très accessible (en voiture) pour un secteur géographique assez large, elle est d'ailleurs implantée généralement en périphérie ou en entrée de ville (il faut de la place). La zone commerciale, de l'extérieur, est caractérisée par des étendues de bitume zébrées de blanc et plantées de volumes le plus souvent métalliques et hermétiques, tout comme le dialogue qu'ils entretiennent avec leur environnement. Les déplacements piétons y sont limités, excepté dans les rayons, ou dans la galerie marchande, souspartie de la zone.

La petite zone commerciale de Paimboeuf depuis le parking du Br

Bienvenue à Paimboeuf. Si vous arrivez par l’entrée Ouest, c’est-à-dire si vous êtes du littoral ou bien du Nord Loire, c’est une nature plate et généreuse qui s’offre à vous. Une étendue de marais quadrillés vous tend les bras d’un côté, et de l’autre un petit muret de pierre marque la lisière d’un autre type de marais qui se fondent enfin à la Loire, se faisant se rencontrer vaches et cabanes de pêcheurs. Des repères paysagers appellent votre œil. En bordure de Loire, ce sont les cheminées de Donges qui percent le ciel avant de se glisser entre les mâts verticaux de la pinède. Si vous arrivez de nuit, vous ne pouvez détacher votre regard de cet amas

En bref, la zone commerciale n'est pas faite à l'échelle de l'homme, mais à celle de la voiture. Très animée du lundi au samedi selon des pics de fréquentation, elle devient un lieu de no man's land le dimanche. 58


riconautes

de phares lumineux rivalisant avec la lune. Droit devant vous, puis sur votre droite, se dresse un emblème pour la ville de Paimboeuf : son château d’eau. Symbole de l’autonomie de la ville, partie visible de tout un réseau souterrain, cette tour inaccessible surplombe les paysages, source d’imaginaire, et veille sur Paimboeuf.

métalliques, et sur laquelle de rares voitures flottent, dans la pénombre. De l’autre côté, des bordures de buissons vous cachent partiellement le paysage marécageux qui se déploie en arrière-plan. Vous passez par-dessus un ruisseau qui s’enfonce dans les marais, et que vous ne remarquez pas, tant vos yeux sont accrochés à cette ligne blanche droite qui vous indique le chemin à suivre. Un repère surgit, légèrement sur votre gauche : l’enseigne de Super U, accompagnée de Briconautes, sur votre droite. Symboles d’étalement urbain, ces blocs hermétiques rappellent les entrées de villes composées de zones artisanales et commerciales ornées d’enseignes sans dialogue.

Si vous arrivez par l’entrée Est, c’est-àdire si vous êtes des terres agricoles du pays de Retz, ou du Sud de la métropole, c’est une zone d’activité stérile qui s’offre à vous. Un troupeau de voitures en cage, au pied de fins candélabres bleus plantés méthodiquement. Si vous arrivez de nuit, c’est une mer de bitume qui se dessine derrière les ganivelles 59


LE PARC Le jardin public, constitue la forme de la nature désirée par l'homme, qui en a conçu la fabrique d'un décor vivant: « plantes fixées au sol, plantes qui ne piquent pas, qui ne dépassent pas une certaine hauteur, qui ne perdent pas trop de feuilles, qui ne produisent pas de fruits trop salissants. La nature en ville est là pour l'homme, pour le servir, lui apporter une tranquillité, une détente et un bien-être de proximité. La nature en ville n'est pour lui ni une nature refuge, ni une nature utilitaire pour s'alimenter ou se soigner. » Liliana MOTTA, le « sol » en ville.

Evolution au fil des siècles. Espace clos au départ, le parc désignait la réserve foncière boisée faisant partie d'un domaine familial. Les murs et haies, qui matérialisaient l'enclos, permettaient d'une part de maintenir le gibier dans l'enceinte du parc, et d'autre part de marquer le territoire réservé au seigneur du domaine. L'acte de braconnage [chasseur chassant furtivement sur les terres d'autrui] est alors sévèrement puni. Le rôle du parc est à la fois économique (culture et exploitation forestière), de divertissement et d’agrément (chasse et promenade).

Au fur et à mesure, à l'aube du 16ème siècle, ces réserves boisées jouxtant les châteaux se sont transformées en parc paysager, dont le raffinement et l'esthétique de la conception paysagère manifestait la richesse du propriétaire. Espace de représentation par excellence tout au long du 17ème, 18ème siècle, les parcs sont devenus, à l'ère industrielle, des espaces gelés, afin de préserver le sentiment de nature dans les grandes villes. Au 19 ème siècle, le parc ou le jardin devient un espace de représentation de l'ailleurs avec l'apparition des parcs 60


thématiques tel que le jardin japonais ou le jardin botanique.

petits domaines offrant de la verdure, un endroit pour s'asseoir au dehors et une aire de jeux pour les enfants. Parfois, les parcs sont gérés par des associations type « amis du parc X » et des conseils consultatifs qui aident à protéger et à maintenir la nature semi-sauvage des parcs.

La naissance du parc urbain. Le premier parc urbain voit le jour en 1847 dans le centre de Birkenhead, près de Liverpool, en Angleterre. Dans son ouvrage The Politics of Park Design : A History of Urban Parcs in America, Galen Cranz1, identifie quatre phases de conception du parc aux Etats-Unis, à la fin du 19ème siècle. Premièrement, les administrations municipales ont progressivement acheté de vastes étendues de terres à la périphérie des villes en expansion, afin de créer « des terrains de plaisirs ». Des aires paysagères semiouvertes dont l'objectif principales était de permettre aux habitants de la ville, notamment aux travailleurs d'accéder à la détente dans la nature. Deuxièmement, lorsque l'expansion urbaine à gagner les limites de ces parcs, le terrain foncier a été utilisé parfois à d'autres fins telles que des parcs zoologiques, des terrains de sport, de golf ou pour la construction de musées municipaux qui attirent alors un grand nombre de personnes. Dans un troisième temps, dans les années 1900, selon Galen Cranz, les villes américaines ont construit des parcs de quartier avec des piscines, des terrains de jeux et des bâtiments municipaux, avec l'intention d'américaniser2 les immigrés résidents. Après la Seconde Guerre mondiale, l'aménagement des parcs et des nouveaux parcs situés dans les zones résidentielles s'est concentrée à la fois sur les loisirs d'intérieur et d'extérieur en voulant au maximum servir à tous les résidants avec des programmes pour les aînés, les adultes, les adolescents et les enfants. La conception paysagère des espaces verts ont été d'une importance secondaire. La création de nouveaux parcs urbains à partir des années 1960, se matérialisent souvent par ce qu'on appellent aux États-unis, « parcs de poches ». Car face à la montée du prix des terrains dans les aires urbaines, les nouveaux parcs urbains se cantonnent à des

Cette évolution du statut du parc et de sa nécessité dans la ville nous permet d'en retirer quelques remarques et enseignements. Premièrement, on observe l'intérêt d'avoir pu préserver, de la part des autorités publiques, des réserves foncières destinées à rester publiques. Et de pouvoir, via cette détention du foncier par les autorités publiques, laisser un temps pour réfléchir à un aménagement d'équipements publics futurs appropriés au contexte. Deuxièmement, se pose la question de zonage dans la ville suite à l'apparition de « terrains de loisirs ». Ce fait atteste-t-il d'une volonté de la part des décideurs publics de vouloir clarifier la distribution des usages dans la ville ? À chaque lieu son usage. Ce qui présuppose d'une part, des problèmes d'inactivité sur les lieux lorsque la temporalité de l'usage prédéfini ne prévoit rien. Et d'autre part, un problème de non flexibilité. À savoir, si le parc est décrété que étant un « terrain de loisir » comment peut-il se réinventer pour répondre à des nécessités propres à chaque période. Galen Cranz est doctorante en sociologie de l'Université de Chicago et professeure certifiée de la Technic Alexander. Elle enseigne actuellement au district d'Architecture à l'Université de Berkeley en Californie. Son enseignement s'appuie sur une approche sociale et culturelle de l'architecture et du design urbain. 1

L'américanisation ou « the American Way of Life » est un terme utilisé tout au long du 20ème siècle pour décrire l'influence exercée par les États-Unis sur la vie des citoyens d'autres pays, en propageant des caractéristiques de la culture américaine avec la société de consommation. 3

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LES QUAIS Un quai ? Mais de quoi parle t-on ? Un ou plutôt des ouvrages complexes, figures patrimoniales pour certains, leurs dimensions fonctionnelles oubliées semblent aujourd'hui au coeur des débats.

Quai[s] n.m Un quai est une levée de pierre aménageant les bassins d'un port ou les rives d'un fleuve, d'une mer, d'un océan destiné à retenir les berges ou à en faciliter l'accostage. Le quai est cet ouvrage puissant construit par la main de l'homme qui interagit avec l'eau, créant ainsi un mouvement horizontal ou vertical qui redessine les rives au grès des marées. DES quais et non pas UN quai car il en existe autant qu'il existe de ports, il y'a les quais de pierre, en treillis à cale ou à ponton flottant. Les quais à treillis évoquent des ouvrages lourds, des façades géométriques comme à Nantes et ne tolérant que le mouvement vertical, illustration d'un espace gagné à la Loire. Il y a les quais de pierre, robustes, qui n'autorisent que le mouvement vertical de la ligne d'eau mais ne permettent pas de rencontre entre l'eau et la terre. Il y a les quais à cale, comme ceux de Paimboeuf, en forme de Radoub qui permettent une mise à l'eau ou un simple accostage, le Radoub laisse l'eau l'envahir et évolue avec la hauteur de ligne d'eau, la limite entre la berge et l'eau n'est alors plus si nette. Des cales, Paimboeuf en est empli le long de ses quais, on retrouve les cales du petit et du grand fer à cheval ou encore des

Quai Sadi Carnot, Paimboeuf

cales de mise à l'eau informelles. Des quais à ponton flottant il en existe quatre à Paimboeuf et permettent de contourner l'envasement en allant chercher une profondeur plus importante à quelques mètres de la rive. Ces installations construites avec de vieilles barges, aujourd'hui envasées et "rempli de Loire" ne permettent pas aux Paimblotins de se projeter dans un éventuel avenir pour leur port. Relation ville port fleuve En France, les ports constituent dans la majeure partie des cas, des enclaves juridiques fonctionnelles dans la ville, privant ainsi les habitants d'un accès direct à l'eau ou 62


même d'une tentative de partage du quai. A l'image de Nantes (Cheviré) ou de St Nazaire, les manœuvres de manutention restent du domaine du Grand port autonome et ne sont pas visibles au public. Le quai fonctionnel fait donc plutôt référence à l'enclave, cependant un nouveau type de quai a fait son apparition dans les ports dont l'activité portuaire a diminué ou s'est éteinte. A l'image de Nantes ou de Bordeaux, les quais sont le support d'un imaginaire de projet, ils deviennent des lieux de promenades culturelles, ponctués d'œuvres artistiques et de bars branchés, où seuls les rails ou les amarres témoignent d'une activité portuaire révolue. Bien que ce travestissement redonne un accès à la Loire ou à la

Garonne, il semblerait en oublier la dimension fonctionnelle de la voie d'eau qui depuis toujours a permis le transport de fret et de passagers autour du monde. Paimboeuf, avantport de Nantes, aujourd'hui arrière -port de St Nazaire, a longtemps été une plaque tournante du transport de marchandise à l'échelle régional, laissant ainsi en héritage aux Paimblotins des infrastructures de quais de qualité. Loin de l'idée de travestir Paimboeuf , de la métropoliser, il s'agit ici de repenser les quais non pas uniquement au travers du patrimoine et de la culture mais aussi en terme fonctionnel, en s'appuyant sur la Loire, au travers d'un travail sur des USAGES PARTAGES des quais. 63


LA FRICHE FERROVIAIRE La friche ferroviaire fascine, par ses bâtiments abandonnés d’abord, qui renvoient à une époque jadis prospère et génèrent une certaine nostalgie, par ses rails ensuite, qui créent une profondeur de champ et rythment la formation d’un nouveau paysage. Terrain abandonné, non productif, il a néanmoins une valeur paysagère et patrimoniale. La friche ferrovIaire constitue une réserve foncière au cœur des villes, sa réhabilitation peut être l’occasion de créer de nouvelles connexions, de gommer la coupure urbaine que le chemin de fer a constitué dans le passé. C’est un territoire indéterminé car défonctionnalisé. Le caractère de friche est un état transitoire dans le processus de renouvellement urbain. Mais c’est une étape à considérer en soi, ces territoires non entretenus, constituent des réservoirs de biodiversité dans la ville qui est une richesse à préserver. La situation urbaine privilégiée de ces territoires et leur état de friche est paradoxal et pose rapidement la question de l’«après», de la reconversion « post » industrielle.

La Gare de Paimboeuf

mimétisme métropolitain futur. Pour le boulevard il s’agit de souligner un mimétisme métropolitain déjà présent. Construit en même temps que la gare, dénommé d’ailleurs à l’époque « boulevard de la gare », il est construit pendant la période d’expansion industrielle de Paimboeuf, à l’image des boulevards du XIXème. Les boulevards sont de larges voies urbaines plantées d’arbres, à l’origine à la bordure des villes, sur l’emplacement d’anciens remparts. À Paimboeuf, le boulevard n’est pas construit à l’extrémité de la ville mais à la limite de la partie urbanisée de la commune, il marque la limite

La friche ferroviaire de Paimboeuf jouxte une deuxième figure celle du boulevard. Alors que pour la friche ferroviaire l’enjeu est d’éviter un 64


entre la ville et la campagne. Ses larges dimensions s’expliquent par l’époque de sa conception : une période de croissance et sa situation au niveau de la gare, il dessert notamment l’entreprise Hailaust et Gutzeit. Si la largeur de la voie répond à une fonction, les dimensions des promenades qui le bordent interrogent : le bâti attenant est de forme très hétérogène, ses proportions ne répondent pas à l’ambition de grandeur du boulevard. Avec la fermeture de la gare, le boulevard perd son rôle d’artère principale, il n’a plus de point de départ ni de destination. Parallèle aux quais mais n’offrant aucun paysage, il

ne peut se permettre de proposer une promenade désintéressée, il lui manque un point d’attraction. Ses dimensions, celle d’un boulevard urbain, sont aujourd’hui obsolètes.

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LA FRICHE INDUSTRIELLE Friche Peut-on définir ce qu'est une friche ? N'est-ce pas même sa nondéfinition qui en est la nature même ? La friche est un espace-temps. La friche est à la fois un vaste lieu qui semble inoccupé, mais aussi une histoire dans laquelle le temps s'est arrêté. Témoins d'un passé industriel glorieux, elles évoquent le déclin de nos sociétés. Supports de souvenirs, elle inquiètent autant qu'elles rassurent et donnent lieu à beaucoup de fantasmes. Elles sont les lieux de relégations de la cité. Elles accueillent ceux qu'on ne veut pas voir, qu'on ne veut pas entendre, elles sont les lieux privilégiés des contre-usage et abritent une large palette d'activités secrètes, aussi bien pour les humains, les animaux, les plantes. Ces dernières sont les premières à recoloniser ces espaces de l'oublie. Leur pouvoir est d'habiter la mémoire, tout en l'effaçant un peu plus. Les friches incarnent la jachère dont nos villes ont besoin pour se régénèrer, à l'image du champ auquel on accorde du temps pour que l'écosystème qui le compose puisse reprendre son souffle.

Repérage de situations et définition de figures archétypales

de renouvellement urbain et d'opportunités foncières, ici elle se présente comme une impasse. La pollution des sols est telle que seule une nouvelle activité industrielle pourrait y prendre place, cette condition incontournable nous rappelle donc la difficulté à envisager un quelconque renouvellement. Alors que les activités industrielles lourdes étaient surtout situées sur la rive Nord de l'estuaire, Paimboeuf a longtemps fait figure d'exception de ce côté de la Loire pour sa vocation économique. Comme les autres figures identifiées, cette friche symbolise les particularités de Paimboeuf ayant fait sa renommée jadis, et incarnant aujourd'hui sa décadence.

A Paimboeuf la friche nous interpelle par sa présence écrasante, dès qu'on pénètre dans la ville, on la devine derrière l'ancien briconautes. Derrière les grilles, quelques rares édifices tiennent encore debout. Parmi eux, le bâtiment en briques rouges qui abritait autrefois la direction. On apprend peu à peu que ce lieu a été le cœur battant de la production chimique dans la région et qu'il est aujourd'hui lourdement pollué. Alors que les friches sont souvent synonymes 66


UnitĂŠ de production d'engrais avant la dĂŠmolition en 1988 67


CROISEMENT D'ECHELLES

La Pierre à l’oeil

Les cinq projets issus de notre questionnement sur les figures identifiées, contribuent chacun à leur façon à générer du lien. Pour autant, il n'était pas question pour nous, de proposer des projets interdépendants développés dans un scénario fictif. Paimboeuf a besoin de poursuivre son histoire et non de la réinventer. Chaque projet apportera à différentes temporalités, dans différents lieux, une pierre à l'édifice. Ces projets naissent avant tout de l'identification de besoins, de manques mais aussi d'envies. C'est pourquoi chaque projet, sur des programmes variés propose de valoriser Paimboeuf et les productions locales. La reconnaissance étant nécessaire pour évoluer. Une reconnaissance de l'extérieur, mais aussi de l'intérieur avec la possibilité pour chacun d'entreprendre des actions et que celles-ci trouvent écho auprès des autres et des institutions. Enfin, d'autres proposent une vision à long terme car imaginer des possibles ensemble, c'est aussi avancer. De l'échelle nationale à l'échelle paimblotine en passant par le Pays de Retz, les projets se spatialisent sur des sites clés. L'entrée de ville, fait figure de vitrine, c'est la première vision qu'on a de Paimboeuf La rive doit trouver une continuité afin que les Paimblotins reprennent prise avec le fleuve L'axe Nord/Sud pour inscrire davantage Paimboeuf dans le Pays de Retz et lui redonner sa position de seuil. 68

Habiter la zone commerciale


La Serre de Paimboeuf

Le Hangar à patates

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L’emprise Kuhlmann


La Pierre à l’oeil

Habiter la zone commerciale

Maison des associations

Commerces Logements

Maison des clubs

La Serre de P

Maison des p Légumerie

Halle de marché Maison des institutions

Halle de fabrication

Espace en commun

Crèche

Pépinière

Espace public

Ludothèque

DEVEL AV

70


Paimboeuf

Le Hangar à patates

L’emprise Kuhlmann

producteurs

Restaurant de l’Estuaire

Dépollution par les plantes

Atelier vélo

Recherche scientifique

Mareyeur / Vente

lieu de transmission

Guinguette

Promenade et belvédère

c

Plateforme logistique

REHABILITER LA RIVE

LOPPER LA CONNEXION VEC LE PAYS DE RETZ

REQUALIFIER L’ENTREE DE VILLE 71


72


FAIRE PROJET À PAIMBOEUF 00 00 76 80 76

Habiter la zone commerciale Charlotte Boyard Quai ligérien Kévin Chesnel La serre de Paimboeuf Juliette Lempereur (PFE) L'emprise Kuhlmann Nicolas Padovani (PFE) La pierre à l'oeil Tifenn Taillandier (PFE)

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HABITER LA ZONE COMMERCIALE À l'instar des grandes villes, Paimboeuf s’est dotée d’un centre commercial. Situé à l'entrée de la commune, il marque un lieu de passage pour les automobilistes du Sud Loire entre Nantes et Saint-Brévin/Saint-Nazaire. Cependant, cette zone commerciale, catapultée au seuil de Paimboeuf, ne paraît pas adaptée à l'échelle de la commune. Vers un déplacement du bourg ? Constat.

enseignes, accompagnant le déclin de la commune (après la fermeture de l'usine Kuhlmann). Cet essoufflement du "centre" a été accéléré avec l'arrivée d'un Intermarché rue Pierre Chevry, en plein coeur de la commune. En 2011, il a été substitué par l'école des Quarte Amarres. Un SuperU lui a succédé, implanté à l'entrée Est de la commune, dans la continuité du développement de la ZAC du Petit Paimboeuf. Ce lieu de consommation, doté d'une petite galerie commerciale, a vu naître son voisin, un magasin Briconautes, de l'autre côté du rond-point, en signal d'entrée de la commune. Après trois ans de fonctionnement, cet établissement a fermé ses portes pour n'être aujourd'hui qu'une boîte

Paimboeuf est polycentrique, éclatée. Aucun marqueur de centralité n'y est présent. Historiquement, la place de l'église, entourée de commerces et de la halle de marché, fait figure de bourg, lieu de rassemblement. À Paimboeuf, ces trois lieux ne dialoguent pas, dénués de connexions géographiques. Le bourg de Paimboeuf est ainsi difficilement définnissable. Les habitants l'apparentent pourtant à la rue du Général de Gaulle seule, dans laquelle on peut retrouver aujourd'hui encore quelques commerces subsistants. Cette rue historiquement commerçante de Paimboeuf s'est progressivement vidée de ses

Rue du Général de Gaulle

Intermarché

SuperU Briconautes

Déplacement des structures commerciales 74


Verrière du Briconautes (au Sud)

de métal et de verre en ruine, bordée d'un vaste parking bitumé, inutilisé. Cet aménagement délaissé est le fruit d'une non adaptation à la commune de telles structures commerciales. Le coût trop élevé des produits, et la surface trop grande du bâtiment ayant entraîné la fermeture du commerce fréquenté par une clientèle quasi-absente.

Entrée du SuperU

Le seuil Est de la commune est donc marqué par un lieu largement bitumé, de non-interactions, bien que fréquenté par un grand nombre de personnes venant uniquement faire leurs courses. Le temps court y est ainsi prôné.

Collectifs de la ZAC depuis le parking du SuperU

Site d’intervention

Site d’intervention

Site d'intervention 75


La zone commerciale est une figure obsolète à Paimboeuf. Il y a donc un besoin de déconstruire cet espace, de lui donner une nouvelle lecture. La posture est ici d’affirmer que l’on pourrait y faire autre chose que consommer, de faire de ce quartier un lieu où l’on favorise le temps long plutôt que le temps

court.

à cette surface commerciale en retournant la boîte pour créer des vitrines extérieures. Les rayons sont ainsi réorganisés en périphérie afin de constituer de petites échoppes. En outre, les commerces de la galerie du SuperU sont répartis individuellement dans des volumes externes, face aux vitrines, activant ainsi une ruelle commerçante bordée

1. Redonner à cet espace une échelle adaptée à Paimboeuf Les témoignages des habitants de Paimboeuf soulignent la trop grande échelle du SuperU, et révèlent une nostalgie des petits commerces de la rue de Gaulle. Le volonté est ici de donner une échelle humaine SuperU

Briconautes

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de devantures. 2. Profiter des flux routiers

laverie/pressing (besoins issus des témoignages). Ces interventions s'accompagnent de la réactivation du Briconautes, mais sous une autre forme. Un petit magasin de bricolage est à nouveau ouvert dans le grand bâtiment délaissé qui devient alors une halle de fabrication. Cet espace, ouvert à tous, permet de déposer du matériel, de le transformer et potentiellement de l'exposer dans la grande serre. La fonction de ce lieu s'appuie sur des pratiques existantes à Paimboeuf : plusieurs artistes pratiquent la récupération et transformation d'objets/déchets en

L'actuelle zone commerciale de Paimboeuf est située au croisement des deux axes les plus passants de la commune. La rue des Remparts, notamment, qui borde Paimboeuf au Sud, draine des flux importants reliant Nantes à Saint-Nazaire. Il est donc intéressant de profiter ici de cette situation géographique pour implanter des services utiles au quotidien des passants. L'étape à Paimboeuf propose alors, en plus du SuperU, une crèche et une

2

sculptures. 3. Reconnecter les commerciales de la zone

Actuellement en déclin dans le centre de la commune, le marché paimblotin tend à disparaître. La stratégie est de le déplacer à un endroit qui draine du monde, afin d'attirer la clientèle. Lieu de rassemblement et de rencontre, il symbolise le caractère entier du nouveau quartier, au seuil de la commune, lieu d'échanges.

entités

Les bâtiments commerciaux ainsi réactivés et ouverts sur l'extérieur, doivent constituer un ensemble bien connecté. Ainsi, un élément pivot permet de renforcer le carrefour : la nouvelle halle de marché.

3

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4. Coloniser par l'habitat

ZAC sur le dernier terrain restant à Paimboeuf, à l'ouest du SuperU, et d'y proposer du logement qui vient enrichir le nouvel esprit de bourg ainsi créé. Les volumes d'habitations sociales ont d'un côté accès à une ruelle piétonne reliant la ZAC au SuperU, et de l'autre à une rue desservant les garages. Le week-end, une fois les commerces fermés, la zone reste animée par une ludothèque et le street (terrain multisport), qui se trouve actuellement derrière les collectifs de la ZAC, et tend à être déplacé avec l'arrivée de la nouvelle caserne des pompiers. Il est ici proposé de l'implanter du côté Est du SuperU, au fond du parking existant.

La zone est entourée de quartiers à forte singularité. Au Nord on retrouve la rue des Jardins, bordée d'un parcellaire des plus anciens de la commune (XVIIIè siècle). Au Sud, les petites maisons jumelles sont celles de la cité Castor, nommée Les Floralies et construite à l'initiative patronale de Kuhlmann dans les années 1950. Cette cité était accompagnée de jardins ouvriers aujourd'hui remplacés par du bitume, à l'extrémité de la ZAC du Petit Paimboeuf, derniers lotissement en date de la commune (début des années 2000). La démarche est ici d'anticiper un potentiel développement de la

4

Existants Commerces

N

Services Logements

Programme

Usages

dits de "nécessité" (nourriture). Au Sud, face aux volumes accueillant la galerie commerciale (pharmacie, opticien, coiffeur, banque) on retrouve les rayons "bazar" (papeterie, jouets, cuisine, etc.). Cela permet de redonner de l'importance à certains

Le retournement du SuperU consiste en la réorganisation des rayons. Ces derniers sont regroupés par thématiques. A l'Ouest, du côté des habitations, on retrouve les rayons 78


rayons, comme celui des vêtements qui possède alors sa propre vitrine. A l'Est, du côté de la station essence et du service lavage auto, sont placés les rayons "entretien". Au Nord-Est, ce sont les rayons "snack et sodas" qui font face au street, composant l'espace jeunes. Enfin, au Sud, la vitrine du rayon

boulangerie / pâtisserie vient se glisser sous la nouvelle halle de marché. "On va au SuperU [...] grignoter, on achète des petits trucs […] Tu te poses sur un banc le midi devant tu vois tout le lycée défiler" Témoignage d'un lycéen à Paimboeuf

SuperU

Schéma de réorganisation du SuperU

Recherches architecturales et mise en oeuvre

banc. Un certain dynamisme ainsi créé permet de s'affranchir des tracés linéaires existants. La halle de marché suit les mêmes dessins.

Ce quartier d'entrée de ville est marqué par des toitures à double pente (sheds des bâtiments d'activités, toits des habitations individuelles et collectives). Pour casser les lignes plates des "boîtes" que l'on traite ici (Briconautes et SuperU), les nouvelles vitrines envisagées sont découpées selon des obliques, et la façade ellemême présente une ondulation, faisant ressortir des assises au bords des devantures pour permettre aux passants qui se recontrent de prendre le temps de discuter sur un

Pour la mise en oeuvre, l'économie de moyens est le maître-mot. La tôle qui est découpée sur la façade du SuperU pour créer des vitrines est utilisée comme auvent. Celle qui est découpée sur la façade du Briconautes est utilisée en partie pour l'auvent du nouveau magasin de bricolage, et l'autre partie, qui crée l'ouverture des halles de fabrication, est réemployée pour constituer le toit de la halle de marché. Il n'y a aucune perte de matériau.

Recherche de façade pour le SuperU 79


QUAI LIGERIEN Le Hangar à Patates

Des quais en héritage...

créant des stimuli. Dès lors que les entreprises historiques partent ( Kuhlmann / Chantiers navals), une déprise s'installe avec le territoire, les usages se replient sous des hangars inaccessibles et deviennent invisibles. Pourtant une diversité d'usages existe le long de la rive Paimblotine mais ils sont dispersés et ne génèrent pas d'effervescence. D'ailleurs, pas moins de 600 000 cyclistes potentiels parcourent les rives Paimblotines chaque année. Pourtant, la ville ne semble pas aujourd'hui tirer pleinement partie de cet afflux touristique ; pas un endroit pour poser ou réparer son vélo et ainsi partir visiter les richesses de la commune, pas un hôtel... Paimboeuf n'accueille plus ou peu.

Les quais de Paimboeuf, figures industrielles aujourd'hui désaffectées posent la question de la réhabilitation, de leur reconversion au travers d'une programmation contextualisée. L'analyse des quais passe de fait par un questionnement sur le rapport de Paimboeuf à la Loire. Paimboeuf ne sera jamais Cheviré ou St Nazaire, avec des gros tonnages, ni Nantes ou Bordeaux et leurs quais branchés. Paimboeuf c'est un port d'escale , une halte sur la Loire. Dès lors, il apparaît indispensable de repenser la Loire dans sa dimension fonctionnelle qui a permis depuis toujours le transport de biens et de personnes lui conférant le rôle de lien entre les ports et non de frontière. Les quais de Paimboeuf observent une diversité inédite, une collection de formes (Radoub,Cales, verticales...) et donc d'usages variés . Lors d'un itinéraire, nous avons entendu la richesse d'un discours sur le passé qui contraste avec celui du présent. Les activités investissaient les quais et rendaient visible les usages,

...A mettre en partage Les quais Paimblotins observent donc un réel potentiel de développement pour la commune mais aussi pour le Pays de Retz qu'il va falloir accompagner. Les différents usages qui s'articulent à différentes échelles doivent pouvoir trouver des supports pour leur développement ou leur prolongement.

Vue du quai Sadi Carnot depuis l'estacade 80


A

B

Relation à la Loire public / privé

A

Recul sur la Loire

B

Il suffit de se pencher sur une carte, pour comprendre la position géographique stratégique de Paimboeuf et plus particulièrement de ses quais. Ils marquent une véritable porte d'entrée sur le Pays de Retz et propose une escale dans l'estuaire. A l'échelle de la Loire, Paimboeuf marque un arrêt remarquable sur la route de la Loire à vélo qui longe la rive, du quai Albert Chassagne au quai Éole. Le lien au fleuve est également très fort de par l'activité de pêche fluviale qui voit tous les ans l'arrivée de marins à Paimboeuf pour la saison de pêche à la civelle. L'activité de pêche est relayée toute l'année par le mareyeur Foucher Maury qui conditionne et prépare le poisson, pour la vente ou l'exportation aux quatre coins du globe. Enfin, à l'échelle de Paimboeuf, un ponton en dur viendra demain pérenniser l'activité des pêcheurs et du mareyeur mais aussi développer le tourisme fluvial.

Projet d'aménagement sur le quai Sadi Carnot et dont les travaux ont débutés mi-décembre. Le projet, présenté en réunion publique, participe visiblement d'une réappropriation de l'espace et d'une nouvelle prise avec la Loire. En effet, le projet développé par la mairie vient dessiner des percées sur le fleuve, créer un square à l'ouest et un parking de 80 places à l'est. Un local commercial et également prévu ainsi que des attaches pour vélos. Ce projet, bien que participant à la réhabilitation des quais, ne va pas assez loin dans la programmation selon moi et nie certains usages présents. De plus, la création d'un square pose question au regard des hectares de parc situés sur le front de Loire et du caractère minéral du quai. La présence d'un parking de 80 places en entrée de quai apparaît hors échelle, cependant le caractère polyvalent de cet espace apparaît pertinent. Enfin, la présence d'une cellule commerciale parait indispensable pour le développement d'une activité sur les quais, cependant la programmation déterminante pour le projet reste inconnue.

Projet en cours ! Le potentiel de développement sur les quais à déjà été identifié par la commune qui développe un encore 81


Le quai ligérien

Le hangar à patates

Elle a des aires d'affiche à la voyage à Nantes mais elle montre plus sûrement une mise en partage des quais, loin du Hangar à Bananes et de ses bars branchés. Il s'agit ici d'évoquer, la possibilité d'un avenir pour Paimboeuf en s'appuyant sur ses quais, si et seulement si les infrastructures présentes et à venir sont mises en commun par les Paimblotins et les touristes à la recherche d'une ambiance Nauticochampêtre. Une architecture qui s'appui sur des fondations solides, figure d'une épaisseur historique qu'on écoute encore au présent. Le collage révèle une multiplicité d'usages en lien avec la Loire et ses berges ; La Loire à vélo, la pêche professionnelle et amateur, le mareyeur, les sports nautiques, la guinguette... Ces usages de rives restent cependant localisés et il s'agit ici de proposer une architecture qui fait lien. Le quai devient un nœud, lieu de créolisation, il propose une nouvelle lecture de cet espace où la notion d'accueil au travers de la valeur de l'échange prend place. En se posant comme un seuil qui reconnaît Paimboeuf et sa situation géographique, ouverte sur la Loire à l'orée du pays de Retz, le projet pose les conditions de transactions et d'échanges futurs car c'est à la lisière, sur la rive, que se tissent les liens.

Le projet s'articule donc autour d'une programmation en lien avec deux notions inhérentes aux quais Paimblotins : La halte, en permettant une pause à Paimboeuf et la logistique ligérienne, en donnant à voir l'activité économique de la pêche de Loire ainsi qu'en développant le cabotage ligérien. Dans une démarche prospective, la programmation s'appui sur trois actions qui permettent au projet d'évoluer dans le temps. En premier lieu il s'agit de S'APPUYER SUR LE TOURISME avec les cyclistes de la Loire à vélo mais aussi les visiteurs en escales estuarienne (Loire Princesse / La Biche ) ou encore les visiteurs des expositions du quai des arts. Dans un second temps, le projet propose D'ACCOMPAGNER ET DE PÉRENNISER DES ACTIVITÉS EXISTANTES par l'intégration du Mareyeur, facilité par l'arrivée du nouveau ponton ainsi que du restaurant qui sert aujourd'hui plus de 150 couverts par jour. Enfin, il s'agit D'INTÉGRER DE NOUVEAUX USAGES dans une démarche de développement du cabotage de Loire, Paimboeuf a une carte à jouer de part son positionnement géographique et de ses nouvelles infrastructures permettant une logistique portuaire. Pour cela, il s'agit d'intégrer au projet dès à présent, un lieu de stockage et de vente de produits alimentaires en vue de l'exportation ou de la distribution dans le Pays de Retz. Cette plate-forme logistique s'appui sur un partenariat avec la légumerie située sur l'ancienne gare de Paimboeuf en vue de transporter des produits agricoles transformés dans l'Estuaire. Ce partenariat permet de renforcer les liens entre les activités des quais et de la ville en recréant des interactions entre la ville, le port et le fleuve.

Collage / Quai Ligérien 82


LA HALTE LOGISTIQUE LIGERIENNE

HALTE LOIREA VELO Atelier réparation vélos

MAREYEUR

Sanitaires ( Douches / Vestiaires / Casiers)

Viviers

Casiers vélos et side bike

Stockage du poisson

HALTE PECHEURS AMATEURS

Triage du poisson

LOGISTQUE / CABOTAGE

Sanitaires ( Douches / Vestiaires / Casiers) Nettoyage des outils

Espace de stockage miel / vin / poisson

Aménagement aire camping-cars

Plateforme pour le cabotage

Aire de cuisine / Barbecue / Tables

VENTE / LOIRE ET MARAIS

HALTE PECHEURS PROFESSIONNELS

Vente directe dans le hangar de stockage

Accueil pêcheurs à la civelle

Conserverie

HALTE DU DIMANCHE La Guinguette du café de La Loire La Crêperie de l’estuaire

Legumerie

Schéma de programmation

Nouveau Ponton

Requalifier la cale CABOTAGE LA PECHE ET LA PAUSE

Affirmer la percée

Espace de Pêche LE HANGAR A PATATES

La loire à vélo

Axonométrie orientations projectuelles

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LA SERRE DE PAIMBOEUF

Valoriser les circuitscourts Juliette Lempreur (PFE)

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UN ARRIÈRE PAYS AGRICOLE Paimboeuf, ancienne île, a des frontières très marquées. D'un côté les quais et l'ouverture vers la Loire, de l'autre, la rue des Remparts, bordée par une haute haie qui masque le paysage de bocage qui entoure Paimboeuf. J'ai voulu en savoir plus, que se passe t-il au delà Paimboeuf ? Un paysage Mon intérêt pour l'arrière-pays de Paimboeuf s'est éveillé avec la découverte d'un paysage. Originaire du Nord de la France, ma représentation de la ruralité est autre: au nord de la Seine, l'absence de relief a favorisé l'agriculture intensive, le remembrement et la mise en place de monocultures créent des perspectives hors d'échelles.

quotidiennes de consommation, les Paimblotins semblent ignorer ce patrimoine. Ces produits sont actuellement disponibles au marché, à la vente à la ferme ou à l'AMAP. Mais ils restent malgré tout, peu accessibles et peu visibles. Peu nombreux sont les Paimblotins qui peuvent se rendre au marché en semaine. Utiliser les circuits de distribution courts reste un acte "militant": la vente à la ferme tout comme l'AMAP s'adressent à une population déjà avertie sur ces questions et comporte des contraintes fortes qui ne favorisent pas leur accessibilité: la vente à la ferme demande aux consommateurs de multiplier leurs points d'approvisionnement, sachant qu'un producteur ne produit pas toutes les denrées nécessaires à un foyer. Faire ses courses à la ferme demande donc du temps, alors que la majorité des gens font leurs courses dans un supermarché en rentrant de leur travail pour, justement en gagner. Quant à l'AMAP, elle est contraignante parce qu'elle impose un panier de

Dès lors le paysage de bocage aperçu depuis la rue des Remparts m'est apparu comme une spécificité. Marqueur de l'identité du Pays de Retz, il est peu valorisé et les pratiques qui le caractérisent restent méconnues alors qu'elles pourraient constituer une identité forte du Pays de Retz. Il reflète en effet le nombre et la diversité des producteurs du Pays de Retz. Il regroupe deux types de productions: la production animale (lait et viande bovine) et végétales (culture maraichère) cohabitent. Manger local Pourtant, dans

leurs

pratiques

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légumes, le consommateur ne choisit pas ce qu'il mange etdoit parfois faire un effort pour imaginer les recettes nécessaires à la mise en valeur des produits qui lui sont imposés. Tout le monde n'a pas envie de regarder des tutoriels "youtube" pour apprendre à cuisiner un butternut en rentrant chez soi. Comment donner envie de consommer local ?

même sac "trop cher". Comme le relevait Stéphanie le "bio" est devenu un objet de marketing paradoxal "Chez Leclerc, ils emballent les produits bio dans du plastique pour les distinguer des autres". Stéphanie en nous montrant son exploitation et en nous parlant de son quotidien a donné un caractère concret à ces valeurs écologiques aujourd'hui malmenées. Une plus grande visibilité de l'agriculture permettrait d'en comprendre les enjeux et de mieux les défendre.

Un savoir-faire méconnu Nous avons rencontré Stéphanie dans sa ferme à St Viaud. Ce fut pour nous l'occasion de découvrir son exploitation maraichère de 4 ha labellisée bio. Elle nous a expliqué comment elle parvient à fournir deux AMAP, une maison d'assistantes maternelles, un foodtruck et un magasin de proximité tout au long de l'année. Car si ces contrats lui assurent une certaine sécurité financière, ils sont aussi contraignants, ils demandent une production continue. Ses trois serres lui permettent de cultiver certains légumes plus longtemps, elle varie aussi les espèces pour fournir des légumes variés à chaque saison. Si elle travaille la plupart du temps seule, elle a parfois besoin de l'aide de son mari ou d'un saisonnier. En plus du travail attendu de maraîchage, s'ajoute les travaux d'entretien comme la réalisation de fossés pour le drainage, la préparation de décoction de plantes pour lutter contre les maladies ou les insectes ravageurs et la vente. Il n'est pas rare que Stéphanie fasse des semaines de 80h. On comprend qu'il soit aujourd'hui difficile de trouver de jeunes agriculteurs d'autant plus qu'avec la pression de l'urbanisation, les terres agricoles se raréfient et voient leurs prix à la vente ou à la location dissuassifs... Cette rencontre à la ferme m'a convaincue de l'importance de recréer un lien entre le consommateur et le producteur. Perdus entre les étiquettes "bio", "AB", on a tendance à finalement tout ranger dans le 87


ET PAIMBOEUF... ? Paimboeuf, ville-port puis ville ouvrière se distingue et s'affranchit de son arrière-pays rural. L'époque postindustrielle, se situe dans un "après", c'est l'occasion d'une mise à distance critique. Paimboeuf, ville-port puis ville ouvrière aujourd'hui en reconversion postindustrielle Paimboeuf est une ville nouvelle du XVIIIème qui naît grâce à l'activité portuaire, en se positionnant comme avant-port de Nantes. Ville-port, elle se distingue et s'affranchie de son arrière-pays rural. La période industrielle ne va pas bousculer cet ordre local établi, ses entreprises fonctionnent à une échelle nationale voire internationale grâce aux infrastructures portuaires et ferroviaires. La partie Nord de Paimboeuf reste tournée vers la Loire tandis que la partie sud s'urbanise, jusqu'au début du XXIème repoussant l'agriculture au delà de ses limites administratives. La période postindustrielle est l'occasion de requestionner ces jeux d'échelle.

arrière-pays, une limite physique mais aussi psychologique, les nombreux chemins de randonnée qui sillonnent cet espace peinent à favoriser sa reconquête par les Paimblotins qui semblent l'ignorer. Le collage évoque aussi les anciennes images satellites, jusque dans les années 2000, il y avait des champs à Paimboeuf. Le dernier lotissement pavillonaire est construit sur la dernière parcelle agricole, la dernière ferme est désormais une habitation parmis les pavillons. Avec l'étalement urbain nous perdons contact avec les espaces ruraux, qu'elle peut donc être la place de l'agriculture en ville aujourd'hui ? Ce collage est l'occasion de soulever le paradoxe d'une commune entourée de champs mais qui l'ignore.

Ce collage a été réalisé en réaction de plusieurs observations: la brutalité de la rupture entre Paimboeuf et son

Paimboeuf, commune périmétropolitaine Paimboeuf est aujourd'hui une

Collage analytique, avant-projet

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10 km Périmètre de la communauté de communes Sud Estuaire

Légumes

Élevage

Miel

Lait

Inventaire des producteurs du Pays de Retz

commune périmétropolitaine. Elle est exclue des dynamiques métropolitaines et urbaines, elle fait figure de territoire enclavé. C'est l'occasion d'intensifier ses connexions à l'échelle locale, Paimboeuf devrait s'appuyer sur les richesses de son arrière-pays agricole pour générer de l'emploi. Sa position géographique (en entrée d'estuaire qui isole de la métropole nantaise) est souvent perçue comme une entrave à son développement apparaît dès lors constituer un atout. Favoriser les circuits courts semble particulièrement pertinent au vue de sa situation périmétropolitaine en lisière de l'espace rural. Selon le ministère de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche est considéré comme "un circuit court un mode de commercialisation des produits agricoles qui s'exerce soit par la vente direct du producteur au consommateur, soit par la vente indirecte, à condition qu'il n'y ait qu'un seul intermédiaire" Paimboeuf

est en contact direct avec la production agricole ce qui donne du sens à cette démarche sur les plans économique, écologique et social. Il est possible de recréer un lien entre le producteur et le consommateur, de sensibiliser le public aux modes de production et aux besoins des agriculteurs comme a pu le faire Stéphanie lors de la visite de son exploitation. L'objectif est de créer une vitrine de l'arrière-pays agricole, rendre sa diversité et ses savoirs-faire visibles. Créer un lieu de vente pour rendre ces produits accessibles, un lieu de transformation pour que ces produits soient présents dans la restauration collective et un lieu de recherche, une pépinière pour soutenir et enrichir les modes de productions actuels. Cette diversité d'approches a vocation à doter la commune d'un centre de ressources pour les problématiques de développement local et durable. 89


LES ENJEUX DE "LA GARE"

Perpendiculairement à cette voie est créé un boulevard: le boulevard de la gare, l'actuel boulevard Dumesnildot. Ses dimensions se justifient par sa fonction de "voie d'accès" à la gare, qui reçoit et envoie des matériaux pour les différentes entreprises de la commune. Mais rapidement de nouvelles voies, des embranchements, sont réalisés pour irriguer les principales entreprises: les « Sucreries de l’Ouest », la Corderie, l’entreprise de menuiserie Hailaust et Gutzeit et l’entreprise d’engrais chimiques Kuhlmann. La gare ferme en 1998, en même temps que l’usine Kuhlmann, dernière entreprise industrielle de Paimboeuf.

Ces réflexions s'incarnent sur un site, une friche ferroviaire, traversante, bordée, au Nord, par le boulevard Dumesnildot et qui ouvre, au Sud, un point de vue sur le Pays de Retz depuis la rue des Remparts.

Aujourd’hui les différents embranchements qui traversaient Paimboeuf ont disparu mais les voies ferrées qui mènent à St Hilaire de Chaléons sont toujours présentes. Sur le site, deux bâtiments datent de cette période: le logement du garde barrière, aujourd'hui habité et le « bâtiment des voyageurs ». Ce dernier est muré, il fait presque figure de symbole de la déprise économique et de l’enclavement de la commune. Le boulevard ne fait

Un héritage de la période industrielle La friche ferroviaire de Paimboeuf est un héritage de la période industrielle. L'emplacement de la gare est décidé en fonction d'une logique de frêt de marchandises. La gare est implantée dans la partie sud de la commune pour permettre un prolongement direct de la voie jusqu'au quai.

Une friche ferroviaire à Paimboeuf, entre la Loire et le Pays de Retz

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Hôpital intercommunal du Pays de Retz

BOULEVARD DUMESNILDOT

Équipement sportif

École primaire et maternelle

Lycée professionnel

Une friche ferroviaire sur le boulevard Dumesnildot

une voie verte. L’objectif est de réaliser un équipement qui permette de conserver les rails en bon état en vue d'une possible réouverture de la voie. Actuellement la friche étant peu entretenue, la nature reprend ses droits, l'état des rails se détériore. Le projet de voie verte semble le plus cohérent, il est en adéquation avec la politique régionale de développement du cyclotourisme et semble en accord avec la philosophie de ce tourisme vert, toujours à la recherche de plus d’ « authenticité ». Une voie verte permettrait aux cyclistes de s'enfoncer dans le Pays de Retz, des paysages et une culture encore trop méconnus. Mais il ne faut pas perdre de vue l'échelle, la situation et le caractère de Paimboeuf: une commune périmétropolitaine en situation de reconversion postindustrielle. Paimboeuf pour le tourisme ne peut constituer qu'une étape à défaut de ne pouvoir être une destination touristique. Accompagner cette dynamique régionale ne suffit pas, il faut penser le développement d'activités parallèles.

plus figure d’artère de la ville, ses dimensions autrefois généreuses semblent aujourd’hui obsolètes. Le boulevard a été identifié comme une figure mimétique (p78-78) parce que son aménagement et ses dimensions ne sont pas à l'échelle de Paimboeuf bien qu'ils aient été à l'image des ambitions de la commune pendant la période industrielle. Quant à l'ancienne gare, elle représente un risque mimétique en tant que friche industrielle, ce sont les terrains privilégiés des métropoles, qui proposent des projets similaires : culturels et résidentiels. L'enjeu est d'anticiper un mimétisme éventuel des "recettes" métropolitaines qui ne pourraient pas fonctionner sur le site de Paimboeuf. L’ancienne gare et le boulevard forment un vide au cœur de la commune. Plus qu'accompagner le tourisme vert, s'engager La gare est un lieu symbolique fort pour les Paimblotins. Sa réouverture le serait tout autant, c'est pourquoi elle ne doit pas être juste un équipement public supplémentaire mais être porteuse d'une vision, s'engager pour l'avenir de la commune. Le maire de Paimboeuf a évoqué deux projets envisagés pour la friche ferroviaire : un train touristique ou

Ce site, une parcelle traversante de 2 ha au coeur de la commune a vocation à porter une ambition plus grande. Il a par sa situation géographique un rôle de vitrine de la commune. 91


APPROPRIATION DE LA FRICHE Les photos présentées montrent des passages informels, ils représentent la vie de cette friche. Deux d'entre elles sont des portes de jardins, un projet réussi serait un projet qui fasse naître d'autres portes, que tous les jardins qui tournent le dos à la gare se retournent et s'ouvrent. Usages et usagers actuels Officiellement, l'état de friche est un état transitoire, la friche est considérée comme un espace défonctionnalisé, en attente. Mais la vie n'attend pas, la nature reprend ses droits comme les habitants. La friche ferroviaire est aujourd'hui un poumon vert au coeur de la commune, elle est un raccourci agréable pour traverser la commune, loin des voitures. On y promène son chien. C'est aussi un lieu de rassemblement pour les jeunes du lycée, loin des regards inquisiteurs, c'est un espace de liberté. Un sentier informel, fruit des piétinements quotidiens, témoigne des allées et venues, du rôle charnière de cet espace.

Une promenade botanique Cet état de friche est pourtant perçu de manière négative par le plus grand nombre: il est associé au mauvais entretien, à l'abandon. Mais comme le montrent déjà les usagers actuels, ce temps d'attente peut être une expérience positive, un temps de réappropriation et d'improvisation. Je propose de tenter ce retournement de perception par le langage: organiser un atelier avec les habitants, les voisins comme les passants, pour nommer les plantes présentes, pour que progressivement au fil de la croissance de la végétation et des initiatives, une promenade botanique se crée. L'objectif est de révéler cet espace

Ce platelage en bois permet de rejoindre un lotissement au sud est de la commune

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au plus grand nombre. Ponctuer cette traversée afin qu'elle devienne une promenade, un lieu de rencontre entre les promeneurs quotidiens et les curieux de passage. Chercher à nommer les plantes c'est aussi essayer de comprendre son environnement ou juste y prêter attention. L'objectif est de créer un dialogue entre les paimblotins et leur environnement, que cet espace prenne une dimension publique.

Accès au lycée depuis la friche

Temps 1 : L'appropriation par les mots Laissé sans usage depuis maintenant vingt ans, la nature a repris ses droits sur « le terrain de la SNCF ». On distingue encore les rails, ils créent une perspective dans ce nouveau paysage qui mène au cœur du pays de Retz. À la lisière des herbes hautes, un sentier perdure, fruit du piétinement quotidien des promeneurs, un raccourci agréable pour aller chercher en ville le pain ou le journal. « Cornouillers », « saule osier », « aubépine », des pancartes ponctuent désormais la traversée. Elles indiquent ce qui n’était qu’hier des mauvaises herbes ou des plantes invasives. Le nombre de curieux et donc de promeneurs s'accroît. Les habitants, les amis de passage, les touristes se prennent au jeu et complètent l'inventaire. Une association se crée, un appel à jardiniers est lancé: petits et grands, débutants et experts, viennent à la gare trouver une extension de leur jardin: un défrichage raisonné est mis en place, un potager voit le jour. Le jardin de la gare est né.

Deux portes de jardin qui donnent sur la friche

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LE MAGASIN DES PRODUCTEURS Le projet serait de réhabiliter la gare, c' est un acte symbolique fort. Sa nouvelle fonction est un signal: un magasin des producteurs pour une économie locale et durable. Un commerce de proximité, durable Un premier élément de programme s'installe avec la réhabilitation de la gare. Je l'ai appelé "Magasin des producteurs" pour souligner sa singularité, c'est un magasin de proximité avant toute chose. Au centre de Paimboeuf, il est accessible à pied en moins d'un quart d'heure et en vélo en cinq minutes maximum pour tous les Paimblotins. Sa proximité avec l'école maternelle et primaire ainsi qu'avec le lycée professionnel, permet de faire ses courses sans faire de détours. Ce qui constitue une donnée essentielle pour la réussite du projet. Il fournit un pied à terre à l'AMAP, ses adhérents peuvent récupérer leur panier le jour de leur choix et le compléter à leur guise. Consommer local est un engagement bénéfique pour la collectivité, il ne doit pas pour autant être synonyme de contraintes ou de sacrifices.

se multiplier s'il remportait un succès qui dépasserait ses capacités. Son objectif est de rester dans la logique des circuits courts, qui sont toujours à requestionner et à améliorer. Sa petite échelle a aussi pour objectif de favoriser la rencontre et le dialogue, de recréer une proximité entre le producteur et le consommateur. Un intermédiaire est présent pour l'organisation de la structure mais des producteurs peuvent faire des permanences. Une structure de vente partagée permet aux producteurs de regrouper le temps dédié à la vente et de supprimer des intermédiaires pour prouver que les produits locaux et bio ne sont pas forcément chers. Mobiliser les producteurs autour d'une structure c'est aussi l'occasion d'échanger sur les savoir-faire et d'engager d'autres formes de coopération: le prêt de matériel ou entraide pour la récolte par exemple.

Le rôle social du commerce de proximité est conservé, le magasin garde une petite échelle et n'a pas vocation à s'agrandir mais plutôt à

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Temps 2: Ouvrir la gare La municipalité obtient de la SNCF un droit d’exploitation du terrain. Le « bâtiment des voyageurs » jusqu’ici muré, va pouvoir être réhabilité pour accueillir un magasin des producteurs. Les jardiniers peuvent y acheter des graines et glaner quelques conseils. Les Paimblotins disposent d’un nouveau magasin de proximité qui permet de manger frais et local. Les Amapiens peuvent récupérer leur panier toute la semaine et le compléter à leur guise. Les producteurs gagnent en visibilité et en accessibilité. Ils touchent un nouveau public. L’association des producteurs en supprimant des intermédiaires prouve que « manger bio, ce n’est pas cher ».

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LA LÉGUMERIE La légumerie permet de donner une autre échelle et une autre dimension aux engagements pour une économie locale et durable. un terrain propice à l'information et à la sensibilisation aux problématiques actuelles. Nous l'avons vu avec le magasin des producteurs, l'engagement des particuliers est essentiel mais ne suffit plus. L'échelle de la communauté de communes semble pertinente. Elle permet de communaliser les équipements et d'en partager les frais tout en restant dans une logique de circuits-courts.

Une échelle pour le développement durable La légumerie est un équipement qui vise à développer des circuits de proximité de la filière maraîchage pour la restauration collective. Les légumes fournis par les producteurs locaux y sont conditionnés pour pouvoir être directement consommés dans les collectivités. La restauration collective en France regroupe l'activité de 73 000 structures publiques et privées, en 2010 cela a représenté 3 milliards de repas, c'est à dire en moyenne 58 repas par français par an. Ce secteur est une cible privilégiée si l'on souhaite faire évoluer notre société vers une économie locale et durable. D'autant plus que la restauration collective dans le contexte des établissements scolaire et du travail est un lieu d'importante mixité, c'est

Une volonté politique à concrétiser Avec la COP 21, l'année a été particulièrement riche en promesses pour l'environnement. Mais concrêtement, sur le terrain l'engagement de l'Etat et des collectivités reste encore timide. Il semble important aujourd'hui de donner une plus grande échelle aux initiatives favorisant

Schémas des acteurs, créer un cercle vertueux

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le développement durable, elles restent aujourd'hui trop associées à des comportements individuels ce qui a tendance à donner au discours pour l'écologie des accents moralisateurs qui la desservent. Il faut favoriser les actions collectives, l'Etat et les collectivités ont un rôle d'exemplarité à jouer dans ce domaine. La région Pays de la Loire semble aujourd'hui attentive à ces problématiques, elle propose plusieurs aides et subventions pour les agriculteurs: "aide à la promotion de la démarche environnementale en maraîchage", "aide à l'installation en agriculture durable". Elle a aussi mis en place un système de "Plateformes régionales d'innovation", leur objectif est la "mutualisation d'équipements entre des entreprises au service de leur développement économique et celui de leur territoire. Le lycée agricole Jules Rieffel à St Herblain a pu en bénéficier, une légumerie a été livrée en décembre dernier. Elle va bénéficier d'une aide financière pendant deux ans.

Si la légumerie est un investissement de la communauté de communes, pourquoi celui-ci prendrait place à Paimboeuf ? D'une part pour des questions stratégiques, Paimboeuf est au centre de la communauté de communes, et dispose de trois établissements qui pourraient bénéficier de la légumerie: une école primaire et maternelle, un lycée professionnel, et un hôpital. C'est une donnée économique importante mais aussi essentielle dans la logique du projet, l'objectif est d'avoir un faible impact sur l'environnement et de minimiser les trajets à effectuer. Ensuite l'implantation d'une légumerie à Paimboeuf a une dimension symbolique importante. On a pu l'entendre à plusieurs reprises, la commune de Paimboeuf a une image négative, elle est connue pour son fort taux de chômage. Reconsidérer la situation de Paimboeuf dans le Pays de Retz en créant un programme innovant pour les questions de développement durable, permet de donner une autre image de la commune et contribue à changer les choses. La légumerie crée de l'emploi, elle peut être l'objet d'un programme d'insertion sociale et professionnelle.

Une légumerie à Paimboeuf La commune de Paimboeuf devrait tirer profit de l'engouement actuel de la politique pour ces problématiques.

Temps 3 : Une légumerie Depuis plusieurs années la région des Pays de la Loire encourage fortement le développement de légumeries. La ville de Paimboeuf saisit cette opportunité pour créer sa légumerie : la documentation nécessaire au montage du projet est déjà en ligne, il ne reste plus qu’à monter le dossier de demande de subventions. Parallèlement on monte une association avec les producteurs pour permettre la diminution des coûts. Paimboeuf s’engage pour l’avenir, pour le développement durable, tout en créant aujourd’hui des emplois.

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LA PÉPINIÈRE DE RECHERCHE La pépinière est un lieu de recherche pour la qualité et la gestion durable des productions agricoles. Cofinancé par la Région Pays de la Loire, il a un ancrage territorial fort, il s'appuie sur le savoir-faire et les expérimentations des maraîchers locaux. Un soutien aux dynamiques locales Le magasin des producteurs comme la légumerie vont générer une hausse de la demande en produits maraichers. Comment produire en quantité suffisante toute l'année ? Si les producteurs actuels ne peuvent pas répondre à l'augmentation de la demande, on fera appel à des producteurs toujours plus éloignés, ce qui est contraire à la logique des circuits courts. La ferme du Bec Hellouin en Normandie a travaillé en partenariat avec l'INRA sur les techniques issues de la permaculture qui permettrait sur 1 000 m2 de produire l'équivalent d'un hectare de culture grâce aux cultures associées. Les cultures sont densifiées, différentes espèces sont associées pour leurs caractéristiques complémentaires: par exemple on cultive du basilic sous des pieds de tomate, le basilic profite de l'ombre du pied de tomate tandis que sa forte odeur contribue à repousser les insectes ou les animaux ravageurs.

Un réservoir de la biodiversité Le développement de l'agriculture intensive et de la monoculture a aussi favorisé l'uniformisation des espèces semées. Des croisements sont réalisés pour obtenir des espèces plus résistantes et plus productives. Cet espace de recherche est aussi un espace de mise en valeur et de sauvegarde des espèces anciennes et indigènes: un conservatoire. C'est un lieu où l'on récupère, répertorie, multiplie et partage les semences. Outre la défense d'un patrimoine commun et régional, le partage des semences est aussi l'opportunité pour les agriculteurs de transmettre le savoir-faire associé à ces cultures, favoriser un partage intergénérationnel à l'heure où le métier d'agriculteur évolue, il n'est plus forcément une pratique familiale transmise de génération en génération. Un lieu d'exposition, de diffusion La serre de recherche est en lien direct avec l'espace public. Ce n'est pas un lieu de recherche à huis clos. Tout jardinier peut venir partager ses semences. Pensé comme un centre de ressources, une bibliothèque est accessible, des conférences peuvent se dérouler sous la serre principale. L'objectif est de sensibiliser le public et de l'inclure dans les recherches effectuées: rencontrer des chercheurs, des agriculteurs, voir et participer à des expérimentations. Une école et un lycée sont à proximité du site, des partenariats peuvent se créer.

Le centre Nantes - Angers de l'INRA participe déjà à plusieurs projets d'innovation de la Région Pays de la Loire. La gestion durable des productions agricoles fait partie de ses axes de recherche, un partenariat serait envisageable. Cette unité de recherche permettrait de créer une passerelle pour monter des projets avec les agriculteurs locaux. Ce centre peut fournir une expertise pour la gestion des exploitations et soutenir les projets de nouveaux exploitants. 98


PAIMBLOTINS Bénéficient des conférences et rencontres

COMMUNAUTÉ DE COMMUNES SUD ESTUAIRE Mise en valeur du patrimoine du Pays de Retz

PRODUCTEURS

PÉPINIÈRE Espace de recherche pour la qualité et la gestion durable des productions agricoles

Bénéficient d’une aide pour adapter leur exploitation agricole Mènent des projets de recherche en lien avec la pépinière

INRA Centre Nantes-Angers Bénéficient d’une nouvelle unité de recherche et ont la possibilité de mener des missions avec les producteurs locaux

Mise en réseau d'acteurs du territoire via la pépinière

Temps 4: La communauté de commune Sud Estuaire a finalement tranché entre les différents projets sur les anciens rails entre Paimboeuf et St Hilaire de Chaléons : une voie verte est créée. Les Paimblotains peuvent rejoindre St Viaud à vélo, les cyclotouristes peuvent découvrir le Pays de Retz. La nouvelle piste cyclable traverse la parcelle, le café de la gare ne désemplit pas. Un nouveau chantier commence, une pépinière se construit. Équipée d’un laboratoire et de serres, elle mène des projets de recherche avec l’INRA, les producteurs locaux et la légumerie. Les serres de recherche de la pépinière se prolongent, on peut y flâner : observer les boutures de nos voisins ou découvrir les nouvelles expérimentations des chercheurs. Pendant que les enfants apprennent à entretenir un potager, on va acheter nos plants de tomate.

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LA SERRE DE PAIMBOEUF

soient perçus comme un ensemble, un centre de ressources sur ces questions. Cette structure a aussi pour but de faciliter les échanges et la mutualisation des moyens. Notamment en ce qui concerne les aménagements nécessaires pour le transport des marchandises.

L'ancienne friche ferroviaire accueille trois structures: un magasin des producteurs, une légumerie et une pépinière. Une structure légère les relie, la serre.

Une traversée plantée Cette serre, jalon entre ces trois entités à vocation économique est un espace public. C'est un espace de passage, en accord avec les usages actuels du site et en lien avec l'analyse à l'échelle urbaine de cet espace charnière entre le bourg et les quais au Nord de Paimboeuf et le Sud qui abrite des quartiers essentiellement résidentiels. C'est aussi un espace d'exposition au sens large. La légumerie comme la pépinière s'ouvrent à l'intérieur de la serre. L'objectif est de permettre de faire le lien entre la production des aliments et les consommateurs, pour éveiller les curiosités à ce sujet. Quel chemin fait un produit avant d'arriver dans nos assiettes ?

Des programmes qui communiquent Regrouper ces programmes a un intérêt politique et économique. Ensemble ils constituent un pôle pour le développement durable et local. La serre qui relie ces trois entités permet de matérialiser leur engagement pour des problématiques communes, de leur donner une identité, pour qu'ils

MAISON DES PRODUCTEURS Magasin des producteurs

LÉGUMERIE PERSONNEL Bureaux

DÉCHETS Traitement de l’eau

Compost

TRANSFORMATION Prélavage Lavage Éplucher Découper Emballer 8°C Congeler

LOGISTIQUE Espaces de stockage Quai de déchargement et de chargement

Préparation des commandes

Espace de réunion

Vente Vestiaires Sanitaires

Chambre froide négative

Salle de repos Rencontres de chercheurs ou d’agriculteurs Conférences

PÉPINIÈRE ESPACE DE COMMUNICATION

Bureaux

Grainothèque Jardin d’hiver Ateliers potagers Le potager de l’école Atelier poterie

Chambre froide positive

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ESPACE DE RECHERCHE

SERRE Centre de documentation

Serre

Laboratoire de préparation Chambre de culture

Chambre froide


2 1

3

Légumerie

Magasin des producteurs

Pépinière

d'un sentier qui traverse le site. Ponctué de mobiliers accueillant du matériel pour les ateliers, il accueille surtout des plantes en lien avec les activités de recherche, de vente et de jardinage. Il fait figure de voie verte au sens propre, la voie verte projetée pour accueillir les cyclistes prend quand même place sur des rails à l'Est de la serre. Cette traversée est aussi une percée urbaine, elle se trouve dans l'axe de la rue Florent Gariou qui mène directement au quai Sadi Carnot. Une invitation pour les touristes à s'engager dans le Pays de Retz mais aussi une perspective commerciale avec l'aménagement des quais et l'installation d'un nouveau ponton, un transport par cabotage est envisageable.

La serre a vocation à être un espace de contact, de rencontres et de découvertes. L'espace est conçu comme un espace flexible pouvant accueillir divers ateliers. Du mobilier inspiré des "draisines" est disposé sur les rails de manière à fournir le nécessaire aux différentes activités: un vidéoprojecteur pour les conférences, un four à poteries, du matériel de jardinage. L'espace des rails, au centre de la serre est réinvesti. Les rails sont conservés mais un platelage de bois est installé pour rendre cet espace pratiquable. Un aménagement léger qui peut être démonté si les rails venaient à devoir être réemployés. Cet espace constitue l'artère principale du projet. Il permet d'accéder aux différents espaces de la serre et aux équipements, il fait aussi partie de la traversée

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L'EMPRISE KULHMANN

Vers une architecture post-industrielle ? Nicolas Padovani (PFE)

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CICATRICES Suite à nos différentes étapes d'analyse nous avons tenté de proposer une réponse qui soit adaptée à Paimboeuf, tout en essayant de nous détacher de nos réflexes de jeunes planificateurs. Ceux que nous avons acquis tout au long de nos études, ceux qu'on est tentés de proposer presque systématiquement. Nous avions le sentiment que ce qu'on pourrait qualifier de "méthodes habituelles" ne feraient pas effet sur le territoire, ni dans la réalité de celui-ci. Nous voulions regarder Paimboeuf différemment, pour l'approcher différemment. Nous ne doutions pas qu'une telle situation serait de toute façon difficile à aborder, et nos modestes outils d'architectes ne permettraient pas de "guérir" tous les maux. Même si la commune resterait sans doute à la marge, du moins éloignée des deux métropoles qu'elle jouxte, la question de son capital symbolique est restée primordiale à nos yeux. En effet au delà des traumatismes qu'elle a pu connaître, c'est la persistance de ces stigmates qui nous posait le plus de questions. Ou plutôt comment un territoire si particulier n'était pas parvenu à se renouveler ? D'abord avant-port éjecté, ce fut en suite l'une des seules si ce n'est l'unique cité industrielle de ce côté de l'estuaire qui fut amenée à péricliter au milieu de ce tissu agricole et rural. La vocation industrielle semble définitivement abandonnée comme ailleurs en Occident, et le renouveau portuaire peu envisageable face à Saint-Nazaire et Nantes, déjà en recherche d'activités nouvelles. Enfin l'agriculture, activité principale du pays de Retz, n'a que peu sa place à Paimboeuf tant son emprise territoriale ne lui a jamais permis de développer un quelconque caractère agricole. Ces stigmates sont encore

Vue aérienne de la friche en 2012.

là, la commune n'a rien de rurale, mais elle n'a plus de vocation portuaire non plus, et ne se sent plus vraiment ouvrière malgré ceux qui y vivent encore. L'enjeu pour nous était donc de changer la symbolique de ces cicatrices. Il ne s'agit donc pas de chirurgie réparatrice qui chercherait à les effacer mais plutôt d'une thérapie, qui permettrait alors à Paimboeuf de presque les arborer dignement, comme la morsure d'un requin dont on raconte l'histoire avec fierté quelques années après, une fois la douleur passée. C'est sur une de ces cicatrices que j'ai décidé de travailler. Même si le terme de cicatrice porte une certaine violence, il me paraît intéressant en terme de temps de projet. En effet on identifie toujours assez facilement le traumatisme qu'a pu connaître un territoire, néanmoins on cherche 104


souvent à oublier ce traumatisme en effaçant les marques, et insuffler un renouveau. L'enjeu ici était davantage de s'insérer au sein de ces marques, de considérer cette atmosphère négative comme un territoire de projet potentiel. Si beaucoup se sentent encore enlisés par cette négativité ambiante, d'autres ont déjà su saisir les opportunités que représentait cette nouvelle époque post-industrielle. Des entreprises de recyclage et de dépollution s'installent et se développent autour de l'ancienne usine Kuhlmann, et des artistes profitent de cette atmosphère singulière et des faibles coûts pour s'installer et poursuivre leurs activités artistiques à Paimboeuf. Le projet était donc de proposer un retournement du même ordre qui visait à saisir les symboles négatifs et leur apporter une dimension nouvelle, plus positive et plus valorisante. Ces symboles que Paimboeuf comporte

en son sein semblent aujourd'hui incarner des formes d'impasses. Malgré tout on peu toujours se saisir de ces symboles pour justement en réinventer la symbolique, essayer de s'y insérer sans renier ni le passé encore chaud, ni l'avenir pas si lointain, et en évitant la tentation du mimétisme. Car comme on l'a vu, depuis plusieurs dizaines d'années maintenant, nos métropoles font preuve d'une certaine inventivité pour proposer une vision nouvelle sur notre héritage industriel. Les friches ferroviaires, militaires ou industrielles sont devenues des théâtres nouveaux pour la fabrique de la ville, en alliant une offre nouvelle pour les logements et services souvent accompagnée d'une politique culturelle forte et de réhabilitation emblématiques. Nantes ou Saint-Nazaire en sont de très bons exemples.

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La friche Kuhlmann, tout comme la gare de Paimboeuf, ne sont pas encore sujet à une réhabilitation future, notre approche se veut donc anticipative. Elle propose des projets qui s'inscrivent dans une démarche différente que celle qu'on pourrait attendre sur de tels espaces, nous sommes sur un territoire péri-métropolitain, loin des dynamiques métropolitaines habituelles, notre diagnostic tout comme nos propositions se doivent de considérer cette réalité géographique et sociale.

Aujourd'hui encore beaucoup de symboles participent à cet imaginaire bien que l'usine ait fermé il y a vingtcinq ans. On y retrouve notamment la cité castor des Floralies bâtie dans les années 50, l'ancien terrain de sport à proximité, les parcelles de jardins familiaux, les quatre "maisons des ingénieurs" construites face à l'entrée de l'usine, mais aussi l'ensemble des infrastructures portuaires ayant longtemps servies à l'usine pour décharger les matières premières telles que le souffre. Le non renouvellement de cette époque industrieuse se fait donc d'autant plus sentir par cette diversité d'emblèmes encore en place et peut apparaître comme un poids pour le développement futur de Paimboeuf.

Paimboeuf est donc face à ce double enjeu : parvenir à réinterpréter ses symboles tout en prenant garde à la tentation mimétique, afin d'améliorer le capital symbolique de la commune sans tomber dans le stéréotype attendu du « nouveau Trentemoults ». La démarche se devait donc à la fois de définir un programme en cohérence avec cette réalité péri-métropolitaine prenant bien en compte le contexte paimblotin, tout en proposant une intervention modeste mais originale sur les sites retenus. Travailler sur la friche de Kuhlmann portait donc cette ambition.

Par ailleurs la friche occupe une place stratégique dans la ville. Située à l'entrée elle était à la fois desservie par voie ferrée, par la route et par le fleuve, ayant même un quai en estacade qui lui était dédié, lui même connecté au réseau ferré. Le bras de Loire qui jouxtait l'usine à l'époque, le bras du Carnet, constituait la voie d'accès principale au canal de la Martinière au XIXe siècle. Celui-ci a été comblé dans les années 70 et propose à son embouchure un paysage singulier de vasières et roselières unique à Paimboeuf, qui n'a pas été mis en valeur jusqu'à présent. La grande majorité des équipements encore présents à la fin des années 90 ont été détruits au début du XXI e siècle en raison du risque qu'ils représentaient. Quelques photos témoignent de cette période de destruction par dynamite. Ce moment illustre fort bien le divorce rapide qui a eu lieu entre Paimboeuf et l'industrie lourde, vécu par les gens comme un point de non-retour. Aujourd'hui il ne reste donc qu'un gigantesque terrain vague de 59 hectares, où la végétation reprend peu à peu ses droits, le bâtiment de l'administration persiste cependant et abrite quelques bureaux, tandis que dans la partie la plus enclavée de la friche

Cette friche incarne pour plusieurs raisons ce traumatisme postindustriel très fort à Paimboeuf. Pendant environ soixante-dix ans, on a produit sur ce site différents produits chimiques et cette forte activité industrielle a profondément transformé la commune. Ce que l'on pourrait qualifier aujourd'hui de services publics ont pendant longtemps tout simplement été créés et gérés par l'entreprise elle-même, une grande part des habitants de Paimboeuf y travaillant. Ainsi les premières infrastructures sportives, les services d'autobus, les jardins ouvriers ont été développés au XXe siècle par Kuhlmann. L'influence paternaliste a donc contribué au développement de cette culture ouvrière forte tout en marquant son empreinte dans le territoire. 106


Vue aérienne de l'ensemble du site en 1969.

une petite entreprise de dépollution d'effluents industriels s'est installée dans les années 2010. A la même époque, tout une partie de l'emprise foncière longeant la route a été vendue pour y installer une activité commerciale. Cette parcelle étant seulement partiellement polluée, une reconversion était possible, bien que le "briconautes" qui s'y était installé n'ait tenu que trois ans. Le reste du site, fortement pollué, ne peut en revanche pas accueillir une quelconque activité autre que l'industrie. Une reconversion autre nécessiterait des travaux de dépollution extrêmement lourds, donc inenvisageables. La friche reste donc à l'abandon, à l'entrée de la ville, dans l'imaginaire des gens, ou dans les ambitions des décideurs. Lorsque des visites sont organisées par les associations patrimoniales pour parler de l'histoire du lieu, elles se déroulent devant le portail sur lequel se dresse un ruban continu de barbelés. Seule une petite pancarte métallique sur le parking de l'ancien briconautes cherche à nous évoquer le passé glorieux de l'usine. Un bien maigre témoignage.

"Les établissements Kuhlmann s'installent à Paimboeuf en 1919. Peu rentable, l'usine s'offre à la veille de la seconde guerre mondiale une belle opportunité : produire le tout nouveau plomb thétraéthyl. Avec le développement de l'aéronautique, le produit devient rapidement indispensable". (...) À la fin de la visite, des ex de chez Kuhlmann restent discuter devant les grilles. Évoquent le passé, l'usine, la vie. " Il faudrait faire un film, l'histoire est tellement riche ! ", suggère André Viaud, ancien ouvrier. Qui sait, la friche industrielle s'inventera peut-être un nouvel avenir...1

La pancarte patrimoniale

1 Kuhlmann, l'usine résistante de Paimboeuf - Ouest-France, 03/10/2013, Marie-Charlotte DULUC 107


POST-INDUSTRIEL L'emprise Kuhlmann incarne donc cette emprise spatiale sur le territoire, tout autant que cette emprise mentale dans l'imaginaire des gens. Il s'agit de la renouveler mais aussi de parvenir à la conserver, en sachant que les "outils métropolitains" habituels ne seraient sûrement pas efficients ici. Ainsi on ne pourra pas proposer un autre "parc des chantiers", un nouveau "jardin étoilé" ou encore de "jardin du tiers-paysage". Il faut parvenir à développer une stratégie réaliste et adaptée à son territoire et son contexte. Comment alors aborder le projet ? Si l'époque est post-industrielle, serait-il possible de développer un projet qui soit également post-industriel ? Le qualificatif post-industriel est souvent utilisé pour parler d'une époque ou d'un contexte économique. Il nous suggère avec fatalité la fin de l'industrie et son difficile remplacement. Si les grandes métropoles ont traduit post-industriel par tertiarisation, voire "culturisation" nous savons que cette approche n'est pas reproductible indéfiniment. La critique du modernisme a donné lieu à tout un courant intradisciplinaire qualifié de postmoderne, elle remettait en cause la pensée moderne et s'est justement affirmée par la critique de celle ci. Le post-modernisme est intéressant puisqu'il part du modernisme pour proposer autre chose, il ne lui tourne pas le dos au contraire, il lui fait face parfois très frontalement. Il faut considérer le post-industriel comme un temps fertile qui se définit par lui même, non plus juste par le post rappelant le départ de l'industrie mais bien par le post-industriel comme un espace-temps de projet à part entière. Un projet qui vienne explorer l'après-industrie et non pas ce qu'on fait après l'industrie. Nous l'avons vu, l'industrie laisse une symbolique, des marques fortes,

L'unité de production d'engrais en cours de démolition (1988).

des emblèmes, des cicatrices. Qu'ils soient dans les cerveaux des gens ou dans l'épaisseur de son sol, tous ces éléments sont une matière à projet non négligeable et peuvent être conjugués ensemble pour proposer une approche nouvelle de la désindustrialisation, plus active que passive, plus volontaire que fataliste. On peut pour cela s'appuyer sur la pensée de Bruno Latour qui parle d'une nouvelle modernisation, en considérant justement ce que la première modernisation a contribué à « externaliser ». Le progrès industriel qu'on a connu au XIXe et au XXe siècle est aujourd'hui révolu. Néanmoins, cette modernisation rapide a décontextualisé nos modes de vies de notre environnement direct, nous proposant ainsi une vie standardisée, et libérée de nos contraintes. L'approche post-industrielle vise justement à interroger tout ce qu'on a pu négliger et mettre de côté au cours de cette modernisation. 108


La pollution des sols incarne définitivement ces externalités négatives qu'on a cherché à ne pas voir car s'en soucier aurait freiné notre développement. Le paradigme de notre époque est justement de considérer ces externalités. Soit les réduire au maximum soit les traiter pour les valoriser. On a pris conscience de la finitude de nos ressources, et nos réflexions doivent désormais réintégrer ces variables pour produire la ville. Ainsi il est aujourd'hui indispensable de recontextualiser géographiquement, humainement, socialement, écologiquement nos "visions politiques", au sens étymologique du terme en tant qu'organisation de la cité.

Nous en sommes tous en France les héritiers, mais, depuis une cinquantaine d'années, ce modèle prend l'eau de toute part, parce que pour s'émanciper il fallait aussi rejeter au-dehors une multitude de phénomènes, « externaliser » comme disent les économistes. Pensez à la pollution, aux déchets nucléaires, aux religions, etc. Brusquement, c'est le retour du refoulé. Tout ce qui avait été mis de côté demande à nouveau à faire partie de la vie publique, de la chose publique, j'insiste, de la chose publique. Et c'est la deuxième modernisation :maintenant, il faut prendre en compte beaucoup plus de choses et beaucoup plus de variables. C'est la fin de la modernité à l'ancienne, si j'ose dire » 1

« Il y a une première modernisation qui s'est pensée sur le mode de l'émancipation et du détachement. Le progrès consistait à se libérer des contraintes. Cela fut un formidable progrès, une immense espérance.

1 Bruno Latour in Article repris du Figaro / Entretien avec Yves Miserey - août 2004 109


RESSOURCES

un enjeu de projet majeur, elle reste impalpable si elle n'est pas conjuguée avec une autre dimension, et s'avère risquée en termes de perspectives programmatique. Proposer un énième mémorial sur le passé industriel serait stérile et manquerait de cohérence avec les lieux. Il faut parvenir à allier la mémoire aux autres offrandes du lieu afin de la mettre en résonance de façon plus pertinente.

Afin de proposer une vision nouvelle pour la friche il faut donc contextualiser notre pensée. On peut en premier lieu tenter de dresser une sorte d'inventaire de ces ressources en présence sur le territoire : elles peuvent être spatiales, matérielles, humaines, historiques, naturelles, et parfois un peu tout à la fois.

Comme nous l'avons vu, l'enjeu paysager est également incontournable. Le paysage de roselière et de marais face à la Loire est aujourd'hui invisible, et la seule connexion de celui ci avec le bourg de Paimboeuf se résume par une grille close au fond du jardin étoilé, l’œuvre d'estuaire de Maruyama. La roselière est par conséquent inaccessible et créé une frontière forte entre l'extrémité est du bourg où on retrouve donc le jardin étoilé mais aussi le café et le super U, et la zone d'activité du Carnet où on retrouve notamment le port à sec, plusieurs entreprises dans la dépollution et le recyclage et bientôt le futur pôle technique autour des éoliennes marines. Offrir la possibilité de traverser ce paysage c'est lier Paimboeuf à la zone d'activité qui la jouxte et qui en est aujourd'hui complètement déconnectée. Il faut en effet parcourir plus de 2,5 km pour relier le café au port à sec alors qu'ils sont à moins de 1 km à vol d'oiseau. Ce morceau de paysage singulier est une offrande pour Paimboeuf : contrainte par ses limites géographiques marquées et ses trois entrées bien définies, elle manque "d'échappatoires" plus informelles. L'inaccessibilité voire l'hostilité que

La plus importante est sans aucun doute la mémoire collective. Beaucoup de gens ayant travaillé à l'usine vivent encore à Paimboeuf aujourd'hui, et même si tout le monde n'y a pas travaillé, la commune a vécu au rythme de cette usine pendant des décennies. Elle est incontournable lorsqu'on discute avec un paimblotin : les anecdotes et les souvenirs s'y rattachent et on nous conte l'histoire récente de la commune à travers le prisme de Kuhlmann, le port et ses bateaux qui déchargeaient le souffre dans les camions, les femmes qui attendaient leur maris à la sortie de l'usine les jours de paye pour éviter que tout soit dépensé au bistrot, le tout pendant que les enfants ramenaient les anguilles qu'ils avaient pêchées pour le repas du soir, les autobus des ouvriers qui emmenaient les familles à Nantes le week-end, la construction des maisons castor sponsorisée par l'usine, mais aussi des histoires fortes comme la résistance pendant la deuxième guerre mondiale, incarnée par le directeur de l'usine Pierre Chevry, qui s'opposa fermement à la réquisition par les allemands et fut déporté pour cela. Si la mémoire collective représente indéniablement

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représente ce type de paysage sont analogues aux caractéristiques de l'emprise industrielle. Comme elle, la roselière est mise au ban tout en nous rappelant l'histoire de cet ancien bras de Loire qui desservait l'usine et le canal de la Martinière. Malgré son apparence sauvage, son histoire est liée aux activités humaines, jusqu'à son comblement dans les années 70. Il s'agirait donc d'offrir une possibilité de la traverser, de l'effleurer tout en maintenant ce caractère inaccessible... Et envisager comment il serait possible de retrouver une continuité à la rive entre le Carnet et Paimboeuf notamment pour les cyclotouristes. La dernière ressource en présence est d'une certaine façon la moins évidente à définir tant elle paraît d'abord être une contrainte lourde. En effet la forte pollution du site a jusqu'à maintenant incarné cette fatalité post-industrielle. Celle qui nous empêche d'envisager un quelconque renouvellement, celle qui nous empêche de visiter le site, celle qui oblige à mettre des barbelés tout autour, celle qui donne des cancers et qui détruit la nature. Comme un boulet au pied, la pollution a le double effet négatif de nous rappeler ce qu'on faisait à cet endroit mais qu'on ne fait malheureusement plus, mais aussi de nous rappeler tout ce qu'on peut pas faire tant les coûts des travaux de dépollutions nécessitent une forte pression foncière pour être rentables. Malgré tout elle incarne cette cicatrice qu'il s'agit d'assumer et d'apprendre à mettre en avant. Puisque l'on entend depuis 20 ans que c'est pollué, alors voyons ce qu'on peut faire avec ça, si c'est ce qui caractérise le site désormais. Ce qui

1949

1999

2004

Evolution du site en vue aérienne

2012

est intéressant, c'est que le secteur privé lui l'a compris, deux entreprises différentes de dépollution se sont installées. L'une au sein même du site et l'autre à proximité directe au sein de la zone d'activité, où l'on

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retrouve en plus plusieurs entreprises travaillant autour du recyclage. Peu attrayante pour la population, il est compréhensible que les élus aspirent à un autre dessein que la dépollution chimique et toute la représentation négative qui l'accompagne pour le développement de leur territoire, on peut cependant réfléchir à la dépollution comme une nouvelle spécificité locale qu'il s'agirait pourquoi pas de développer mais surtout d'accompagner et de conjuguer avec le reste du territoire. Si la dépollution chimique traditionnelle est peu "ragoutante", notamment par les odeurs qu'elle dégage, la dépollution par les plantes est aujourd'hui un secteur en pleine expansion et beaucoup de chercheurs y travaillent à travers le monde. Si elle est très lente, elle a pour avantage d'être beaucoup moins chère que les techniques traditionnelles puisqu'il s'agit seulement de plantes qui viennent puiser les matière nuisibles pour soit les dégrader à la manière de la photosynthèse, soit les stocker dans leurs feuilles (auquel cas on peut même envisager de les récupérer, notamment dans le cas des métaux lourds). Ces techniques novatrices sont encore en plein développement et ont besoin d'espaces d'expérimentation tout autant que de diffusion, de sensibilisation et de pédagogie. Si la dépollution par extraction puis traitement représente une technique intéressante dans les tissus urbain denses, la dépollution végétale propose une solution lente de reconversion des sols à long terme et Paimboeuf pourrait devenir un terrain privilégié pour l'expérimentation de ces techniques nouvelles. Les perspectives de

Vue depuis la roselière et l'etier au Nord de la friche

développement sur le site étant inexistantes actuellement tant la commune a peu de moyens, cette forme de jachère urbaine ne seraitelle pas une solution à moyen terme? Imaginer un parc de recherche et d'expérimentation sur la dépollution permet alors d'envisager un avenir immédiat pour le site tout en étant cohérent avec les activités déjà présentes et en respectant la mémoire du lieu et peut-être même lui donner un nouveau souffle. Par ailleurs, l'activité industrielle va être amenée à décliner sur d'autres sites de l'estuaire au sein desquels la pression foncière est faible également. Des problématiques similaires se poseront alors. On pense

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à Cordemais et sa centrale à charbon, ou à Donges et sa raffinerie Total, qui devront trouver des solutions pour dépolluer les emprises colossales que ces activités occupent. Ce ne sont que deux exemples parmi d'autres mais ces nouvelles formes de dépollution représentent un enjeu à l'échelle régionale, voir nationale. Le secteur privé doit envisager une sensibilisation à ces techniques nouvelles afin de proposer ce type d'offre aux petites communes. On pense notamment à Veolia environnement, acteur majeur en matière de dépollution et déjà présent sur le site par le biais de sa filiale Soredi. Le secteur public de la recherche est aussi concerné, et les futurs ingénieurs, biologistes et

chimistes devront se former à ces nouvelles techniques qui nécessitent un temps long de recherche, notamment pour la phytoextraction qui permet d'extraire les métaux lourds présents dans le sol afin de les recycler. Cet enjeu de la pollution offre donc l'opportunité de mobiliser plusieurs acteurs, privés (entreprises, industriels), institutionnels (université, institut de recherche) et publics (Région, État) sur le même lieu et redonner à Paimboeuf une visibilité à la hauteur de son passé sans pour autant en modifier radicalement sa nature.

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Conjuguer les ressources L'étape qui suit cet inventaire des ressources est celle de la conjugaison de celles-ci. Le paysage, la mémoire, et la pollution sont toutes trois des ressources exploitables, mais elles s'inscrivent dans des dimensions différentes et ont chacune leurs enjeux propres. Une fois mobilisées, il faut maintenant parvenir à les accorder et à les faire valoir les unes par rapport aux autres, sans que l'une d'entre elle prenne le dessus au détriment des autres. Si l'usage de la friche présente un intérêt évident pour expérimenter la dépollution, il faut imaginer comment cette activité nouvelle peut offrir l'opportunité aux Paimblotins de revisiter le lieu qu'ils ont connu et fréquenté parfois pendant toute leur vie. Tout autant que les visiteurs extérieurs, le tourisme se développe grâce à la Loire à vélo, et proposer une sensibilisation à l'égard du passé, du présent et du futur de ces friches présente un potentiel attractif. La dépollution peut aisément rentrer en résonance avec la mémoire, si on imagine un lieu qui puisse à la fois accueillir les anciens usagers à savoir les retraités de Kuhlmann et les nouveaux, les chercheurs en dépollution. Un allerretour "pollueur-dépollueur" assez stimulant entre ceux qui ont travaillé à l'époque, et ceux qui y travaillent aujourd'hui, pourrait se mettre en place nécessitant ainsi des espaces d'expositions et de dialogue. Ces espaces auraient à la fois une vocation pédagogique et historique, destinés à tous, visiteurs comme habitants, anciens comme nouveaux, mais aussi une vocation à transmettre une explication scientifique précise, détaillant ainsi tous les

Collage programmatique

procédés d'époque nécessaires à la production chimique, indispensable aux chercheurs en dépollution. Cet apport pouvant être incarné par les anciens ouvriers, suggérant ainsi un rapport horizontal entre scientifiques et ouvriers. Le lien avec le paysage est le dénominateur commun à tous ces usages car il est aussi attractif pour le visiteur qu'il est méconnu de l'autochtone. Il permet d'inscrire ces activités au sein d'un cadre exceptionnel et nous incite à imaginer le lieu d'une manière particulière. Malgré le danger que représente la pollution, la friche doit être un espace que l'on puisse traverser, qui vient connecter différentes polarités entre elles et ainsi conjuguer les usages. Les ressources du site suggèrent donc des enjeux spécifiques à chacune d'entre elles. En tentant de les accorder on dessine les contours d'un projet qui a ses propres enjeux et qui essaye de s'inscrire dans une dynamique nouvelle. Peu à peu des éléments programmatiques apparaissent, et la question du dessin architectural entre dans la réflexion. Quelle forme doit prendre une ambition telle ?

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TOURISTES, CYCLISTES, HABITANTS, ETUDIANTS

PAYSAGE

ÉTUDIANTS, CHERCHEURS, INDUSTRIELS.

HABITANTS DE PAIMBOEUF

PÉDAGOGIE RECHERCHE EXPERIMENTATION

MÉMOIRE TÉMOIGNAGES SUR L’INDUSTRIE

Interactions d'usagers et ressources

Photo aérienne du site 115


RÉFÉRENCES

il donne à voir sans vraiment toucher. Quelle forme prendrait donc le chantier d'archéologie de Kuhlmann ?

Vient ensuite le temps des références. Celles-ci permettent de se détacher du site et d'ouvrir de nouveaux imaginaires qui viennent nourrir le projet. Les enjeux et les éléments de programme étant assez hétéroclites, il faut parvenir à trouver des références qui racontent autre chose que de simples reconversions de friches. En revenant à la dimension postindustrielle, on peut considérer que l'exploiter comme un axe de projet majeur se rapprocherait en quelque sorte d'une forme d'archéologie du XX e siècle, celle qui vient creuser le passé récent. L'archéologie a cette particularité de prendre place dans des temps longs, souvent indéfinis. Les archéologues sont la phobie des aménageurs qui travaillent en tissu ancien, puisqu'ils ne sont jamais à l'abri de la découverte d'un trésor caché, susceptible de retarder les travaux pendant des années. La pollution a ces points communs avec ces richesses enfouies, elle vient souvent contraindre les calendriers et les prévisions budgétaires. Elle est en fait la couche la plus récente d'un palimpseste historique et géologique, la dépollution c'est étudier cette histoire récente qui a laissé son empreinte en profondeur dans le sol. Ainsi le chantier d'archéologie est une première référence, car il présente ces analogies multiples. C'est d'abord un lieu de recherche pour scientifiques, mais il propose aussi un attrait historique et paysager qui attire le visiteur. Comme un décor en mouvement extrêmement fragile il est à la fois éternel et inachevé,

Cependant une deuxième référence est nécessaire pour compléter la réflexion car l'archéologie n'intègre pas la question du risque. La pollution étant omniprésente sur le site, elle présente un risque réel qu'on ne peut pas négliger. Si certains usagers sont plus sujets que d'autres à ses effets néfastes, il faut prendre en compte cette dimension réelle dans la conception du projet, puisque c'est justement au nom du risque que la friche est engrillagée depuis toujours. Si on regarde comment dans l'histoire on a pu allier un risque important avec l'accueil du grand public, un exemple surgit. Même si Jurassic Park est le produit d'un film de science fiction sorti en 1993, il n'en est pas moins un projet singulier qui propose une vrai ambition. Il parvient à allier recherche scientifique, gestion du risque, accueil du public et paysage. Alors que dans un zoo, les visiteurs se promènent au milieu de différents enclos, Jurassic Park propose l'opposé en invitant les gens à se retrouver encloisonnés au milieu des dinosaures. Bien que certains spécimens soient mis à l'écart par le danger qu'ils représentent, les visiteurs peuvent se déplacer dans le parc suivant un parcours défini qui traverse l'espace de vie naturel de la plupart des espèces, ainsi des dispositifs pour mettre le visiteur à distance ou en sécurité du spectacle sont imaginés. Par ailleurs, toute la dimension scientifique est alliée à la visite en mélangeant cet engouement pour ces espèces disparues, dangereuses

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Un chantier archéologique à Chartres

Le bâtiment d'accueil principal de Jurassic Park

Le plan du parc

le scénario lui même, en associant par des procédés artistiques originaux la terreur et la fascination des dinosaures avec l'incroyable épopée scientifique à l'origine de leur recréation, le tout au sein d'un paysage unique de l'île déserte ayant son caractère exceptionnel à part entière.

et effrayantes, avec cette approche génétique et préhistorique en amont. Ainsi pédagogie, vulgarisation scientifique et histoire côtoient adrénaline, créatures gigantesques et safari en rendant les deux indissociables puisque la génétique est la condition des dinosaures. Spielberg a également su innover en introduisant un intérêt pour les dinosaures au sein de la société. En effet presque dix ans avant la sortie du premier film, les créateurs ont créé différents types de supports grands publics, dessins animés et documentaires pour générer un intérêt pour ces créatures fascinantes et encore méconnues par le grand public à l'époque. Si l'échelle de la friche de Paimboeuf n'est aucunement à la mesure du lieu et du risque qu'il contient, Jurassic Parc est une référence en termes d'association d'usages et d'intérêts. Que ce soit pour stimuler l'attrait du public envers le film ou dans

Les chantiers archéologiques et Jurassic Park nous racontent tous deux quelque chose, en terme d'histoire, de science, de recherche, d'esthétique, et d'intérêt pour le public. Le défi est de parvenir à donner à l'emprise Kuhlmann ces atouts.

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ORIENTATIONS DE PROJET

plus ouverts, pouvant donc devenir ces supports à l'échange, à l'intersection entre l'espace public, et l'espace destiné à une catégorie d'usagers. Ces deux familles d'éléments programmatiques, ayant des degrés de publicité très différents doivent donc trouver une façon de cohabiter, et même d'interagir, au sein d'un même lieu.

A partir de tous ces éléments, un projet commence à se dessiner. Convoquer des références permet de préciser les enjeux, le programme et la forme de l'intervention. Si on a vu comment les usages projetés étaient interdépendants les uns des autres, il s'agit maintenant de proposer une répartition dans l'espace et de faire des choix structurants dans l'aménagement du site.

Enfin la nécessité de donner à voir le site et de lier l'entrée de ville à la roselière en bord de Loire soulève une autre question, celle de l'accès au site pour le grand public. Les restrictions imposées par la pollution doivent donc orienter l'aménagement. Ainsi, la perspective de s'élever pour se mettre à distance du risque comme pour profiter de la vue d'ensemble, arrive au cœur du projet, avec l'idée d'une passerelle.

Il faut avant tout déterminer quelle stratégie d'implantation dans la friche en tenant compte de toutes les contraintes déjà évoquées. Cette stratégie doit avoir une dimension spatiale autant que temporelle. Etant donné l'échelle et la vocation du site, il est indispensable d'envisager les aménagements avec une mécanique évolutive. A partir d'un premier geste tel un acte fondateur, on commence le projet. Il faudra ensuite proposer un phasage pour les différentes interventions et aménagements, puis anticiper les mutations possibles sans pour autant les imposer. Elles doivent être le produit de l'utilisation et de l'intégration du lieu dans son territoire.

Un édifice incluant donc les différents éléments de programmes se définit donc, il se doit être un bâtiment d'entrée, un tremplin pour s'éloigner du sol pollué mais aussi un sas pour justement venir l'approcher. Pour les usagers venus d'ailleurs il constitue un point d'arrivée, et une base de travail. Pour les habitants de Paimboeuf c'est un point de départ pour (re)découvrir la friche et son histoire. C'est un lieu en partie clôt et réservé à des usagers très spécifiques mais aussi un lieu public destiné à accueillir tous les curieux. Ces dimensions à la fois paradoxales et complémentaires doivent être mises au service du projet pour engendrer des interactions nouvelles entre ces différents usages. L'architecture du bâtiment doit également nous raconter quelque chose sur sa vocation. Il doit inviter, intriguer, et appeler l'habitant à venir voir ce qu'il s'y passe, tout en s'intégrant parmi les constructions existantes. La métaphore du hangar nous rappelle l'industrie, alors que le fait de le soulever vient poser la question de ce qu'on y trouve en dessous. C'est l'objectif du projet, chercher ce qu'il y a en dessous, Que reste-

Si on se focalise d'abord sur l'intervention première sur le site, il faut bien garder à l'esprit le programme. Comme nous l'avons vu, il s'agit en premier lieu de créer des espaces dédiés à la recherche en dépollution, les laboratoires et espaces techniques sont donc une première famille structurant le programme. Deuxièmement, la mémoire et la pédagogie viennent s'ajouter à cette première famille. Aux espaces réservés uniquement aux scientifiques, il faut donc en plus proposer des espaces appropriables

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EVER

S’ÉL PÉNÉTRER

TRAVERSER

LIER

TERRAIN POLLUÉ

Espace technique lié à la gestion du sol

Schéma de principe

Espace de laboratoires

t-il depuis qu'on a retiré tous ces hangars et unités de production qui composaient l'usine? Une quantité d'images se succèdent. Celle du rocher qu'on retire pour trouver des petits crabes, celle du capot de voiture lisse et immaculé, cachant la complexité d'un moteur sale et odorant, ou pouvant encore être caché sous la cabine d'un camion qu'on a fait basculer pour y accéder, faisant d'abord penser à un accident. Ce nouvel édifice doit donc être cet acte fondateur de l'emprise Kuhlmann et s'inscrire dans cette dynamique post-industrielle en venant interroger toutes ses dimensions : à la fois mémorielle, symbolique, scientifique, historique, écologique, paysagère. Elle réhabilite une activité, en s'appuyant sur les externalité de celle qui l'a précédée. La post-industrie succède donc ici à l'industrie, et tente de prendre en compte toutes les variable que cette dernière a laissées en place.

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LA PIERRE À L'OEIL

Un lieu en commun à Paimboeuf Tifenn Taillandier (PFE)

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"IL N'Y A RIEN À PAIMBOEUF" Au départ, j'aimerais revenir sur les émotions ressenties tout au long de notre démarche. « Il n'y a rien à Paimboeuf » pourtant le sublime y réside. Après avoir dépassé le caractère pittoresque et ligérien de Paimboeuf, nous avons été pris au cou par la violence des sentiments ressentis par les Paimblotins à l'égard de leur ville. Détail qui s'est avérée, dans un premier temps, troublant pour nous et dont nous avons eu bien du mal à nous en détacher. Car, lorsqu'on nous dressait le portrait de Paimboeuf et de ses habitants, cohabitaient alors dans la même phrase, les qualificatifs les plus moroses et cyniques avec les plus rêveurs et volontaires. Le rapport entretenu avec Paimboeuf a quelque chose de douloureux et de plaisant. Ces deux états sensibles élémentaires, liées à notre vécu, normalement séparés, se mêlent à Paimboeuf. Nous arrivons alors à une expérience où ces deux états sensibles s'enrichissent mutuellement, dans une tension perpétuelle entre le positif et le négatif. Dès lors, ce qui est considéré comme vil peut posséder une qualité esthétique, et ce qui est perçu comme négatif peut avoir son intérêt.

sommes tout au long de notre travail posé la question de comment ce faitil qu'une ville ayant un tel caractère n'est pas pu se renouveler ? C'est, donc, au travers de la mise en place d'une grille analytique convoquant la notion théorique des capitaux que nous avons pu réfléchir au comment du pourquoi [référence à la partie « capitaux »]. De manière assez simple, nous pouvons dire que Paimboeuf est en proie à une crise, en plus de celle économique, qu'on pourrait qualifier de culturelle. L'offre culturelle et la question d'héritage culturel n'a pas assez été réfléchit ou impacte peu la commune. D'autre part, une crise sociale traverse Paimboeuf. On observe une certaine étanchéité entre les habitants appartenant aux différents groupes sociaux qui habitent la commune. Ce constat pointé par un grand nombre

« Une sorte d'horreur délicieuse. De tranquilité mêlée de terreur » _ définition de la notion de Delight, Edmund Burke, 18ème siècle. Un manque de reconnaissance. Au delà des traumatismes que Paimboeuf a connu, nous nous

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d'habitants résulterait, selon eux, d'un manque de lieux et de temps partagés. Enfin, ces deux constats atteste d'un manque crucial de renaissance des intiatives habitantes par certains pouvoirs institutionnels et des Paimblotins face aux autres habitants des communes voisines. Ce qui amène alors certains Paimblotins à dénigrer volontairement leur ville et à adopter une posture attentiste et fataliste. Mais, tout au long de notre parcours, nous avons rencontré des paimblotins qui avaient des choses à dire, des espérances et des envies.

L'ATTENTE_ Face à la présence de la Loire. L'attente sur les rives de Paimbœuf est toujours occupée. Remplie par les jeux de lumière sur l'estuaire et, en face, sur la terre plate et mouvante de Lavau-sur-Loire. Envahi par le sifflement du vent, l'espace est plein. Car, celui qui s'assoit se retrouve paradoxalement ouvert au grand paysage et retenu dans ses pensées par le vent qui gronde et qui entoure chaque personne de ses tourbillons. Une réflexion interne et externe s'opère tandis que la pensée virevolte. « Il me sembla de voir la figure d'une pensée, pour la première fois placée dans notre espace... Ici, véritablement, l'étendu parlait, songeait, enfantait des formes temporelles. L'attente, le doute, la concentration étaient choses visibles. » Paul Valéry.

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LES TEMPS DE LA SOCIABILITÉ

Étatisation de la culture...

1959 Création des Maiso de la Culture. 1946 Adoption de la Constitution de 1946 garantissant « l’égal accès de l’enfant et de l’adulte à l’instruction, à la formation professionnelle et à la culture »

1906 Etablissement du repos dominical. Création du ministère du Travail.

1944 Droit de vote de femmes. Création de la Sécurité sociale

1936 Victoire du Front Populaire. Accord Matignon aboutissant à l’instauration de la semaine de quarante heures et des congés payés.

À Paimboeuf, la dynamique et la cohésion sociale se déroulait au rythme du labeur.

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Paimboeuf et les lieux rencontres au fil de l'histoire.

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CANAL DE LA MARTINIÈRE 1882-1892

À Paimboeuf, la dynamique et la cohésion sociale s’est construite avec et autour d’une dynamique économique et d'une fierté d’appartenance à cette dynamique. Les moments et les lieux pour pouvoir se rencontrer s'étaient formé au rythme du labeur. Que se soit, lors des temps de rassemblement et de festivités organisés par la confédération des Cordiers de Paimboeuf. Ou, lors des activités proposées par l’entreprise Kuhlmann.

Avant-port de Nantes XVII - XVIIIème

Les Corderies de Paimboeuf 1742

Quand y avait Kulhmann... 1919

Frise chronologique

« Quand y avait Kuhlmann ».

et festive de Paimboeuf et cela en dehors des heures de travail. Avec un budget important, l'entreprise offrait aux enfants de ses ouvriers les vacances scolaires, les cadeaux sous le sapin de noël, subventionnait les déplacements quotidiens des familles, etc. L'entreprise Kulhman possédait apparemment la moitié de la ville, et a participé à la fabrication de la ville : construction du premier gymnase de Paimboeuf, construction des maisons castor et des floralies, mise en place des jardins familiaux.

Paimboeuf comme d'autres petites villes de France, assume encore difficilement le changement d'époque. L'espoir d'un retour au plein emploi tend à perdurer dans les mentalités et le non oubli du temps où l'entreprise du village employait de père en fils ou de mère en fille reste gravé dans les mémoires. Comme si on se persuadait collectivement que ça allait revenir... La douleur ressentie de la part des habitants quand Kulhmann a fermé est encore palpable. À juste titre d'ailleurs, car au fur et à mesure des récits, on s'aperçoit que l'entreprise Kulhmann et sa vision paternaliste rythmait la vie sociale

Parallèlement, après mai 68 et la crise de 73, l’État français adopte la culture comme moyen de lutte contre la crise

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1956 Loi sur la 3ème semaine des congés payés.


Le culturel comme moyen de lutte contre la crise... La politique culturelle tend a passer d'une stratégie de l'offre à une stratégie de la demande.

Décentralisation... 1971 Conseil de développement culturel. 1968 Mai 1968

ons

1967 Loi de protection du Patrimoine

1975 Loi Littoral

1967 Création de l’ANPE

1975 Loi sur l’autorisation administrative de licenciement.

1963 Loi sur la 4ème semaine des congés payés.

1973 Création de la Confédération européenne des syndicats (CES). Loi sur la résiliation unilatérale du contrat de travail. Loi Royer sur la grande distribution qui, pour préserver le commerce et l'artisanat, oblige à requérir une autorisation pour ouvrir des grandes surfaces commerciales.

1982 Décret stipulant que « Le ministère chargé de la culture a pour mission : de permettre à tous les Français de cultiver leur capacité d’inventer et de créer, d’exprimer librement leurs talents et de recevoir la formation artistique de leur choix » et que la notion de patrimoine inclue la notion « de préserver le patrimoine culturel national, régional ou des divers groupes sociaux pour le profit commun de la collectivité tout entière » + création de la fête de la musique 1982 Loi sur la 5ème semaine des congés payés.

1993 Mutiplication des infrastructures culturelles dans les 10 première métropoles françaises.

2006 Intensification de l'offre culturelle de proximité, en encourageant la coopération entre petites communes et en développant des zones d'activités culturelles à proximité des centres commerciaux (ex : FNAC, Cultura, etc.)

1990 Le rapport Latarjet met en bon nombre de disparités et déséquilibres en matière d’aménagement culturel du territoire.

1988 Création du Revenu minimum d'insertion.

2003 Fixation de l’âge de la retraite à 65 ans

1983 Fixation de l’âge de la retraite à 60 ans

2005 Loi de Cohésion Sociale

Corso fleuri

1964

2013 1996

1965 Construction de la « Maison des Jeunes et de la Culture »

1993 La « Maison des Jeunes et de la Culture » devient le Centre Mireille Moyon. Le pôle jeunesse s’installe boulevard de l’Astrolabe et accueille le Guichet Unique Emploi

19.. Antenne de l’ANPE vient s’installer à la « Maison des Jeunes et de la Culture ».

Description de la frise

qui s’installe. Chaque groupement de commune aura sa Maison des Jeunes, son école de musique, son stade, etc. Cependant, à Paimboeuf ces efforts municipaux et étatiques sont apparus désuets voir n’ont pas été perçus par les Paimblotins. Suite à l’impact fort de l’entreprise dans l’organisation du rythme de la ville qui était restée gravée dans les mémoire. Aussi depuis lors à Paimboeuf on déclare de manière mi-amusée, mi-fière et mi-triste, qu’il n’« y a rien à Paimboeuf ! ».

La frise chronologique, permet de mettre en évidence les différentes activités économiques qui ont dynamisé pendant un temps Paimboeuf, avec les différentes lois étatiques relatives aux questions sociale et du travail. Les aplats jaunes, symbolise, quant à eux, la "cohésion sociale" induite par les différentes festivités et dynamisme social local. Aujourd'hui, nous pouvons observer un manque de sociabilité et de cohésion à l'échelle de Paimboeuf. Car il existe peu d'espaces et de temps de rencontre.

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L'impact des différentes politiques socio-culturelles et sportives dans l'organisation de Paimboeuf.

Viaud ou Corsept, le fait que toutes les communes possèdent les mêmes équipements atteste d'une certaine uniformalisation des moyens d'action ou l'utilisation d'un outil commun pour créer de la sociabilité. Que ce soit en zone urbaine, péri-urbaine ou péri-métropolitaine, chacun a construit son centre de loisir, son pôle sportif, etc ; sans forcément réfléchir au contexte culturel, social, environnemental et économique dans lequel il s'inscrit.

Aujourd’hui dans le paysage paimblotin, nous sommes face à un morcellement d’infrastructures socio-culturelles et sportives. En effet, la construction de chaque nouveau pôle [Maison des Jeunes, Pôle emploi jeune] provient de la mise en espace de plusieurs lois gouvernementales ayant pour but de lutter via l'éducation, la culture et le sport à des problèmes sociaux particuliers tel que le désoeuvrement, etc. 1 9 6 5

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La force associative dans l'espace péri-métropolitain. Comme déjà évoqué précédemment, la répartition des équipements publics, socio-culturels et sportifs au sein de la CCSE nous a semblé, dans un premier temps, peu favoriser le développement de Paimboeuf [voir partie « Paimboeuf mise à distance »]. Cependant, dans un second temps, nous avons constaté que cette dispersion d'infrastructures à l'échelle des cinq communes [Frossay, Saint-Viaud, Saint-Brévin, Saint-Père-en Retz et Paimboeuf] apportait un dynamisme intéressant. En effet, petit à petit, nous avons remarqué que cela a pu favoriser la création d'un maillage associatif important à l'échelle de la CCSE.

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La fragmentation des équipements socioculturels due à l'amoncellement des différentes stratégies soci-culturelles qui se sont diffusées dans l'espace

Cette mise en espace s'est faite de manière ponctuelle et diffuse dans la ville, faute d'un travail de cohérence à l'échelle urbaine. C'est alors que de cette vision urbaine « couche par couche » apparaissent de nombreux faits, pour certains problématiques. D'une part, un morcellement ressenti à l'échelle de Paimboeuf. En effet, l'implantation de manière diffuse, de ces lieux, pose question. Car chaque plusieurs équipements à Paimboeuf commence à devenir clairement insalubres [l'école de musique]. De plus, leur multiplication est à contrôler surtout dans une commune aussi dense que Paimoeuf. D'autre part, nous pourrions dire que la plupart de ces programmes [gymnase, salle polyvalente] et leurs dimensions ne paraissent pas avoir été conçus et adaptés au contexte paimblotin. Car, ces derniers sont pensés de manière hors-sol et d'un point de vue strictement fonctionnel. Aussi, que l'on soit à Frossay, Saint-

Suite à notre réflexion commune, nous avons tenté de dresser un inventaire de ce qu'on pourrait qualifier des « ressources » présentes sur place. Ces ressources s'incarnent à la fois de manière spatiales, humaines, matérielles, naturelles, historiques, etc. Ce maillage associatif nous est alors apparu comme un élément essentiel dans les atouts existant sur le territoire. Car, bien que peu visible, le tissu associatif offre un large panel d'activités s'adressant à tout âges. Et qui ont l'avantage de dynamiser Paimboeuf et d'entretenir des liens singuliers avec les autres communes voisines ; en dépassant les conflits politiques perçus au sein de la CCSE. 126


PAIMBOEUF CORSEPT

SAINT-BRÉVIN

SAINT-VIAUD FROSSAY

SAINT-PÈRE-EN-RETZ

Maillage associatif

À l'échelle de Paimboeuf, certaines activités possèdent un caractère bien particulier. On trouve un club nautique, un club de boule nantaise, une bibliothèque associative, ou encore une association patrimoniale qui tente à travers des visites et des expos de révéler l'épaisseur historique d'une ville comme Paimboeuf. La nouvelle association, les Ateliers Paimblotins vient également s'inscrire dans ce réseau. Ainsi, les différents clubs sportifs, et associations apparaissent comme un des acteurs majeurs dans le dynamisme social local et dans le stimuli de la vie en périphérie des grandes métropoles.

découragement... Ayant comme risque un désengagement associatif massif et un non renouvellement des générations dans les associations et clubs déjà existants. Or, ce sont eux qui incarnent aujourd'hui l'envie d'une cohésion sociale, et d'espaces de partages. Paimboeuf se doit alors de prendre sa place dans ce maillage associatif et offrir des lieux convenables pour pouvoir attirer les associations et les clubs. Sans quoi ces derniers vont devoir inscrire leurs activités dans d'autres communes voisines plus généreuses.

Cependant, la difficulté majeure rencontrée par ces acteurs locaux est celle du manque de visibilité, de reconnaissance et d'attribution de moyens. En effet, à l'heure qu'il est, à Paimboeuf, les associations et les clubs possèdent peu d'espaces pour travailler, pour se retrouver et créer ensemble un nouveau terreau fertile. À ces attentes il faut réagir urgemment ! Car, beaucoup de témoignages, nous relatent, l'apparition d'un

« Le peu de richesses que peut développer Paimboeuf aujourd'hui si on reste juste que sur le côté financier. Ces des gens vexés, et ce complexe d'infériorité que Paimboeuf c'est vilain ... [...] Et donc voilà ils baissent les bras... […] Y a pas de place piétonne par exemple... Où les gens s'arrêtent et discutent.. » _ un paimblotin 127


UN ESPACE POUR TOUS ? « la construction d'un ordre local commun implique que la demande sociale se fasse dans la coprésence des uns et des autres, dans un apprentissage collectif de l'avenir aménageable ensemble. »_ Gilles Novarina, « La construction des demandes sociales par le projet d'urbanisme » À partir des nombreux témoignages, envies et ambitions révélées à Paimboeuf, il nous a semblé important d'entamer une réflexion sur la création d'un espace commun pour les Paimblotins. Cependant, au préalable, il est intéressant de questionner dans quelle lignée un tel programme s'inscrit.

nouvelle perspective ; moins liée à la religion catholique et dans laquelle la culture pouvait devenir un levier révolutionnaire de transformation de la condition sociale. Ainsi, à Bruxelles, la Centrale d'Éducation Ouvrière inscrira à son programme de cycles de conférences, des architectes modernistes de premier plan. Le cycle de 1925, annonce Victor Bourgeois, Louis Van der Swaelmen, Henry van de Velde et Le Corbusier. La maison du peuple, incarne alors la prise en main d'un faire ensemble et la volonté de réfléchir sur les envies pour demain. Connue sous des dénominateurs différents, la maison du peuple consiste en l'investissement d'un lieu inédit, dont l'organisation spatiale et formelle « décloisonne les fonctions du théâtre, du café, de la tribune, de la bibliothèque, voire de l'atelier ou de l'école et les projette dans une seule matrice architecturale, d'un type inédit »2 Ce nouveau type ne possède alors pas de forme prédéfinie mais une volonté symbolique commune et provoque un champ de questionnements théoriques. Sa « première mission fût d'occuper le terrain » faire de la belle architecture qui pourra manifester en façade sa légitimité. Et, ainsi, se placer en opposition à la « ville pourrie »2, à l'ordre urbain déjà établi. Ainsi, la contruction et la plasticité d'une maison du peuple se trouve souvent dans une expression architecturale

De la maison du peuple à la maison pour tous, retour historique sur l'espace en commun. La maison du peuple puise ses origines dans l'histoire de la politisation et de l'émancipation ouvrière. Provenant au départ, d'un mot d'ordre militant clair, la figure de la maison du peuple, s'est peu à peu transformée en machine complexe avec le début de l'apparition d'une politique sociale commune étatique. De 1870 à 1940, et de pays en pays, les maisons du peuple ont constitué, dans un premier temps, une sorte de bastion ouvrier. Puis, dans un second temps, elles se sont transformées, avec des vitesses locales plus ou moins élevées, au contact de l'art et des avant-gardes, en lieux de re-génération sociale avec des fonctions polyvalentes. La création de ces maisons du peuple ont également provoquée l'intérêt et la participation de la bourgeoisie urbaine qui s'intéressait au question de dette sociale et qui dans la création d'un tel édifice et dans les idées convoquées, percevait une 128


Collage subjectif : l'acte de bâtir.

expérimentale.

possibilité, pour que lui soit ouvert un espace où se déployer. Des repères organisent des initiatives. Une carte permet des voyages. Des représentations reçues inaugurent une nouvelle crédibilité en même temps qu'elles l'expriment " _ Michel de Certeau, La culture au pluriel.

La nécessité de faire image. Cependant, bien que les maisons du peuple s’inscrivent dans un contexte urbain, il n'empêche que certaines caractéristiques poussent à la réflexion. Ainsi, la question de faire acte et de bâtir permet l'invention d'un nouveau lieu en commun. Et de ce fait, favorise la création de nouveaux lieux culturels et manières de faire. Une réponse au manque de reconnaissance, précédemment évoqué, passe ainsi par le travail de la symbolique. Aussi, la construction d'un nouvel espace en commun peut redonner une prise aux Paimblotins dans l'espace public - publicité, au sens premier du terme - de leur ville.

Gilles Novarina, "La construction des demandes sociales par le projet d'urbanisme", Les Annales de la Recherche Urbaine N°80 / 81, Déc 1998, p.173-179 1

"À toute volonté constructive, il faut des signes de reconnaissance et ces accords tacites sur des conditions de

Annick Brauman et Maurice Culot, p.7- 11, "Architecture pour le peuple : maison du peuple", AAM Editions, 1982. 2

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LE PARC À PAIMBOEUF Le parc alias la forêt, ne ressemble pas ce qu’on qualifie de parc en ville. Ici, la réglementation de ne pas marcher sur les pelouses n’existe pas.

Le terrain vague, la plaine, la forêt.

métropolitain et de jouer avec les différents paradoxes que cette situation provoquent. Ici, la forêt de Paimboeuf se trouve prise en pince entre deux paysages majestueux et changeants: les marais, et la Loire. Suite aux différents témoignages, ce lieu apparaît comme un espace de contemplation à la fois solitaire ou accompagné. Lieu de sociabilité et d’abandon, la puissance de son ambiance et de son esthétique provient de l’arrière plan qu’il laisse entrevoir.

L'existance du "parc" de Paimboeuf ne découle pas d’un hygiénisme urbain, qui a précaunisé l’importance de la sauvegarde de la nature en ville mais du fait que la mairie, en 1957 a grapillé quelques 150 000 m2 sur la Loire. Ce sable, issu des travaux permettant d’élargir le chenal, a permis d’offrir un espace naturel et de loisirs en plein air afin que les paimblotins puissent s’essayer au frisbee, inventé la même année. La base nautique fraîchement installée vient alors renouer avec la pratique du canotage fluvial estuarien. Cependant, aujourd’hui notre regard a changé. Les impératifs d’émancipation ne sont plus ceux d’autrefois. À savoir la destruction du caractère particulier des villes, pour pouvoir répondre aux besoins exigés par la modernité : comblement des bras de Loire pour créer des artères automobiles, le grapillage d’un bout de Loire pour créer un centre touristique et de loisir. Aujourd’hui, l’émancipation passe par la requalification et la reprise en main des stratégies territoriales. Ainsi, Paimboeuf se doit d’assumer son statut de territoire péri-

Un statut particulier à assumer. Le parc de Paimboeuf, n'est pas ce qu'on appelle, communément, dans les agglomérations urbaines, un « espace vert ». La notion d'espace vert appartient au vocabulaire de la planification urbaine et paysagère. Les parcs, jardins, squares, plantations d'alignement et arbres d'ornement sont réglementés par des circulaires préfectorales qui visent à articuler les réglementations existantes, coordonner les initiatives des services techniques, assurer leur ouverture au public, etc. Ces

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circulaires rappellent également que l'espace vert constitue un équipement structurant et d'intérêt général au sein des villes, dont le statut juridique spécifique peut faire valoir des règles et des servitudes opposables au tiers.

campagnes est un peu lié à l'origine des systèmes modernes de parcs. Gérer des ressources - des terres ou des savoirs- hors du marché ou de l'Etat, c'est en fait aussi vieux que l'économie politique. « Pour comprendre le terme, il faut revenir à la campagne anglaise qui jusqu'au XVIIIe siècle était pour l’essentiel ouverte, avec peu de champ clos, peu de propriétés privées marquées par des clotûres », explique l'économiste Benjamin Coriat2. « C'est de ces champs ouverts que les communautés villageoises tiraient leur subsistance, en les utilisant comme pâturage, en extrayant de la tourbe pour se chauffer. C’était les communs, les commons ». Ces terres étaient alors régies par des règles d'usage. Ainsi, à Paimboeuf quand le parc était encore une prairie, les vaches laitières de l'hôpital de Paimboeuf venaient y paître. La notion des Communs se définit par l'existance de trois choses : une communauté qui cherche à répondre à un besoin social. Une ressource qui est partagée selon un régime qui n'est pas la propriété ni privée, ni publique mais « en commun ». Une gouvernance, un ensemble de règles que la communauté élabore pour à la fois protéger cette ressource mais aussi la faire fructifier, la partager. L'ensemble de ces trois critères sous-entend une réflexion à mener sur la conception et l'entretien d'un tel lieu. Peut-être les Paimblotins peuvent-ils s'inspirer des community gardens qui dès les années 70 , avaient réfléchit aux premiers jardins collectifs et à la recherche d'une appropriation commune de l'espace public ?

Cependant, à Paimboeuf, se pose la question quant à la pertinence d'un espace vert à cet endroit. Car, rappelons-le, ce parc fait face au paysage majestueux de la Loire et permet d'y accéder. Aussi, pourrionsnous dire que seul l'espace de quelques mètres suffisent à rendre cet accès possible. Comme le propose par ailleurs les quais, situés dans le prolongement du parc. Mais, ici, le parc et son importante superficie pose autant question qu'elle est appréciable et appréciée des Paimblotins. En effet, à l'échelle de la commune, la zone où est implanté le « parc », reste l'une des seules zones sauf de toute urbanisation. De plus, cet endroit est approprié par tous. Que l'on vienne de l'arrière, de l'avant, du haut ou du bas Paimboeuf, tous vont au « parc ». Aussi, cet espace apparaît comme un des rares lieux en commun à Paimboeuf. C'est pourquoi, son statut sa représentation et son entretien pourrait être imaginé et vu d'une manière différente. En effet, la représentation et l'entretien de ce parc se fait encore au travers d'un mimétisme métropolitain. Or, le parc de Paimboeuf incarne bel et bien se qu'on pourrait qualifier d'espace public, voir de place publique. Cet espace materialiserait alors ce que définit Paul Samuelson1 en 1954, comme un espace de bien collectif. Car s'y opère un critère de non-exclusion [on ne peut exclure personne de son usage] et un critère de non-rivalité [l'usage par individu n'empêche pas un même usage].

Paul Samuelson (1915-2009) est un économiste américain considéré avec John Hicks comme un père de la microéconomie traditionnelle actuelle. 1

Benjamin Coriat (1948) est un économiste français, membre du collectif Economistes Attérés.

Les communs, la gestion mutualiste et les parcs ruraux.

2

Le concept de communs dans les 131


LA PIERRE À L'OEIL, UN ESPACE EN COMMUN L'implantation de ce programme ne peut se faire que dans un terrain commun à tout les paimblotains, à savoir ce qu'on appelle communément le "parc". Si l'on prend Paimboeuf dans son ensemble, entouré de son paysage, à savoir la Loire et les différents marais. Ce qu'on appelle le parc, construction complétement artificielle d'un point de vue physique, apparait comme le seul terrain commun à Paimboeuf, ainsi que nous l'on avions dit précédemment. La figure du parc est alors vue ici, à Paimboeuf, comme la dilatation de la bande des un mètre appartienant à tous et qui borde les littoraux.

Un terrain en commun à Paimboeuf

Le terrain dit "parc". Ce terrain, appelé tantôt le parc, tantôt la forêt, est, dans sa première partie ponctué de reliques - dans le sens du terme restes d'un temps révolu - et d'éléments attendu dans un parc. Monuments aux morts, scénographie en plein air de canon en fonte, terrain de boules qui lui est fortement utilisé, tentative de fontaine, jeux d'enfants, etc. Les traces. Ces reliques incarnent alors des traces qui peuvent incarner des points d'accroche et de leviers pour

Plan masse du parc de Paimboeuf 132


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un futur travail paysager. Le terrain "découvert". Dans sa deuxième partie, non décrétée comme parc, le terrain se découvre par la balade. L'accès à celui-ci se fait entre le camping et le port à sec. Se donne alors à voir, un espace plus secret, en marge mais cependant ouvert au grand paysage.

« Oui la Loire, et après y’a un espèce de fleuve on dirait, et en face un peu, ça fait un peu comme l’argent, j’suis, j’suis allé… Euh… Y’a le parc et si tu continues, t’as la grille à bateaux, et après y’a un p’tit chemin qui va là! Oui un peu, ça fait… Oui c’est ça oui l’argent...

1. Les deux entités qui compose le parc.

C : Au niveau des cailloux ? Non, de l’eau C : Ah oui d’accord Un peu comme de la glace ! »

Le terrain en commun de Paimboeuf, se compose alors de deux entités. L'une tournée vers la ville [voir graph 1.]. L'autre en ouverture sur le grand paysage. Ces deux entités ne se contredisent pas mais viennent au contraire s'alimenter et offrir un caractère très particulier au site. Se pose alors la question de l'interstice, du passage d'un monde à l'autre et de comment ces deux entités viennent travailler avec le lieu commun qui sera proposé.

Plan masse du parc de Paimboeuf 134


Ces deux photographies témoignent de la différence entre les deux entités paysagères.

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ABRITER Héberger, garantir, cacher, protéger, offrir, se réfugier, sauvegarder,... tout ces verbes accompagnent le fait d'abriter.

MAISON DES CLUBS

S'offrir un abri . Entre les deux entités du parc, viendra se placer un nouveau bâtiment. Ce lieu en commun abritera alors les différentes associations paimblotines et les clubs sportifs partenaires du projet. Mais également les différents événements qui naîtront peut-être de cette nouvelle cohabitation. Abriter l'opportunité. Abriter lorsque le projet s'inscrit dans un site paysager, c'est aussi permettre de se protéger des imprévus. Et d'offrir d'une certaine manière un refuge. De ces imprévus peuvent alors éclore de nouvelles dynamiques porteuses ou non mais au moins vécues. Un toit. Le projet se compose de deux dalles surélevées par rapport au sol. Le rez-de-chaussée, accessible par tout temps, est laissé ouvert sur le paysage. Il abritera les jeunes et les moins jeunes pour le temps d'une partie de basket. L'étage quant à lui, offre des espaces davantage privatifs pour les associations et directions des clubs, et l'école de musique. En son coeur, deux gradins se font face. Ils matérialisent, à la fois le point d'accès à l'étage, l'entrée du bâtiment mais également son lieu de représentation. Vue du bâtiment commun. 136


MAISON DES ASSOCIATIONS MAISON DES JEUNES

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BIBLIOGRAPHIE Françoise LELIÈVRE, Paimboeuf, un avant-port de Nantes, Editions 303, 2015 Christophe GUILLUY, La France périphérique, comment on a sacrifié les classes populaires, Flammarion, 2014 Pierre RAHBI, Vers la sobriété heureuse, Editions Actes Sud, Arles, 2010 André CORBOZ, Le territoire comme palimpseste, In Diogène, 121 p, janv.mars 1983 Liliana MOTTA, Le sol en ville, et Gabe et Emeline EUDES, Aux armes, jardiniers et habitants ! in Manola A ANTONIOLI, Machines de guerre urbaines, 303 p., Loco / Forum vies mobiles, 2015 Galen CRANZ, The politics of park design : history of urban parks in America, The MIT press, 1982 Éric CHAUVIER, Contre Télérama, Éditions Allias, janvier 2011, 64 p. Médiagraphie : Le site de la Région pays de la Loire qui présente le patrimoine de la région : http://www.patrimoine.paysdelaloire.fr/patrimoine/detail-notices/ IA44004533/ Le site de la chambre d’agriculture de la Loire Atlantique : http://www.loire-atlantique.chambagri.fr Filmographie : Florent TILLON, Détroit, ville sauvage, Ego Production, 2010 Cyril DION, Mélanie LAURENT, Demain, Move Movie, 2015

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REMERCIEMENTS NOS REMERCIEMENTS VONT À Thierry Brutus, Maire de Paimboeuf pour sa disponibilité et sa vision de la commune qu'il a su nous faire partager. Patrick Leconte, conducteur d'opération à la mairie de Paimboeuf, pour le temps qu'il nous a accordé et les connaissances qu'il a mis en partage, ainsi que l'ensemble des services techniques Véronique ainsi que tous les membres de l'association du quai des arts et du parimoine paimblotin pour leur accueil chaleureux et leur volonté de transmettre et partager l'histoire de leur pays Rachel de l'office du tourisme pour ses conseils avisés Malika pour la place qu'elle a su nous faire au sein des Ateliers Paimblotins ainsi qu'à l'Atelier Re'Gain sans quoi les Ateliers publics n'auraient pu avoir lieu Liliane pour son engagment et son hospitalité Arnaud, Martine et Augusta pour leur hospitalité et les repas partagés ensemble Tous les participants aux Ateliers publics pour leurs encouragements Les animateurs du pôle jeune ainsi que les jeunes pour leur participation aux ateliers Stéphanie, agricultrice à St Viaud, pour le partage de son quotidien Jean Claude, pour sa participation active et la balade dans le parc Patrice pour avoir su nous guider dans le paimboeuf de son enfance mais aussi celui de demain Les cafés de l'Avenir et de La loire, pour le refuge qu'ils ont su nous offrir La crêperie de l'Estuaire et la pizeeria isola del sole pour leur accueil Toutes les personnes que nous avons pu croiser lors de cette aventure Paimblotine et que nous n'aurions pas citées Laurent Devisme pour ses références d'ouvrages sur la condition périmétropolitaine Merci à tous les Paimblotin(e)s pour votre accueil !

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ESTUAIRE 2029

Dérives des rives

Ce livret relate une aventure collective à travers laquelle Paimboeuf nous a été donnée à voir par ses habitants, et par ceux qui y passent ou qui y travaillent. Ce livret fait part d'une réflexion propre à la commune de Paimboeuf, suggérée par les étudiants en Ecole d'Architecture, et alimentée par les habitants, tout au long de ces cinq derniers mois. C'est donc de Paimboeuf dont nous allons parler...

arts de faire - janvier 2016


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