ESTUAIRE 2029
FAIRE LIEU DANS LâENTRE-DEUX MĂNAGER DES ESPACES DE FRICTIONS
DĂ©rives des rives
Adeline Boulaire (PFE), Nicolas Bodet, Alice Khaled, Margot Moison (PFE) Directeurs d'études : Saweta Clouet, Chérif Hanna, Eric Chauvier ensa nantes - arts de faire
COUĂRON
ESTUAIRE 2029
arts de faire - janvier 2016
Estuaire 2029 Estuaire de la Loire, territoire en mouvement
Equipe Ă©tudiants : Adeline Boulaire Nicolas Bodet Alice Khaled Margot Moison
Equipe enseignante : Chérif Hanna, Architecte Urbaniste Eric Chauvier, Anthropologue Saweta Clouet, Architecte
Intervenants : Jennifer Aujame, Cinéaste
Flore Grassiot, Architecte et Artiste Ricardo Basualdo, Artiste et Scénographe Urbain Marine Leroy, Architecte
ouvrage originel imprimé en 20 exemplaires en janvier 2016 réimpression et mise à jour en février 2016
1
Estuaire 2029 Estuaire de la Loire, territoire en mouvement
Equipe Ă©tudiants : Adeline Boulaire Nicolas Bodet Alice Khaled Margot Moison
Equipe enseignante : Chérif Hanna, Architecte Urbaniste Eric Chauvier, Anthropologue Saweta Clouet, Architecte
Intervenants : Jennifer Aujame, Cinéaste
Flore Grassiot, Architecte et Artiste Ricardo Basualdo, Artiste et Scénographe Urbain Marine Leroy, Architecte
ouvrage originel imprimé en 20 exemplaires en janvier 2016 réimpression et mise à jour en février 2016
1
PRĂFACE ChĂ©rif Hanna
DĂ©rives des rives MĂ©nager, amĂ©nager lâestuaire - un territoire en mouvement Le concept de « dĂ©rives des rives » Ă©voque Ă lâĂ©vidence lâidĂ©e de bord. LâĂ©change par nature se fait Ă la frontiĂšre. Et la frontiĂšre nâest jamais seulement une clĂŽture. Câest un lieu de passage dans lequel on nĂ©gocie. Des lieux de transitions qui deviennent des lieux de transactions. Tous les lieux stratĂ©giques sont Ă la lisiĂšre des centres. Le marchĂ© est lâespace fondateur de la ville. Pour ces raisons, Roland Barthes1 rappelle que depuis lâAntiquitĂ©, la pĂ©riphĂ©rie prĂ©cĂšde le centre.
Max Ernst (1891-1976) Le jardin de la France
La rive est au bord et le bord est Ă la marge. La marge peut aussi expliquer certaines histoires et activitĂ©s affranchies de contraintes, Ă©vocatrices de libertĂ©, dâutopies. (âŠ) un ailleurs oĂč se projettent les phantasmes. « La nappe dâeau a agi comme un trucage rĂ©ussi mais connu, les hommes ont eu le plaisir de voir des formes modifiĂ©es..(âŠ) la crue a bouleversĂ© lâoptique quotidienne (âŠ) toute rupture un peu ample du quotidien introduit la fĂȘte : or, la crue nâa pas seulement choisi et dĂ©paysĂ© certains objets, elle a bouleversĂ© la cĂ©nesthĂ©sie du paysage, lâorganisation ancestrale des horizons : Les lignes habituelles du cadastre, les rideaux dâarbres, les rangĂ©es de maisons, les routes, le lit mĂȘme du fleuve (âŠ) le phĂ©nomĂšne le plus troublant est certainement la disparition mĂȘme du fleuve (âŠ) lâeau nâa plus de cours, le ruban de la riviĂšre, cette forme Ă©lĂ©mentaire de toute perception gĂ©ographique (âŠ) passe de la ligne au plan. »2
Sur les rives de lâestuaire ; principalement sur lâestran, les rives , les bords, les berges, les quais ne subissent pas seulement les mouvements naturels du fleuve ou de la mer, ils sont au bord dâun territoire continental ; lieu par excellence des passages et transactions qui animent, modifient , obligent Ă rĂ©investir les espaces oĂč les hommes et marchandises embarquent ou dĂ©barquent Ă©quipements et formes, sensibles aux grandes mutations Ă©conomiques inscrites dans un rapport de mondialisation. Ces mutations sociales et Ă©conomiques accĂ©lĂšrent le rythme historique des mutations qui modifient son urbanisation et son paysage. Ce lieu, croisement des traversĂ©es, nâest pas un rĂ©ceptacle passif sur lequel sâexercent diffĂ©rentes transactions, mais un lieu rĂ©vĂ©lateur du changement, oĂč se mobilisent et se problĂ©matisent de nouvelles relations Ă la valeur.
Relever le dĂ©fi de ce fleuve, qui paraĂźt dĂ©laissĂ© par lâindustrie et les grandes activitĂ©s portuaires, des lieux oĂč des urbanitĂ©s se sont construites, des lieux oĂč il y a eu reconnaissance de cette urbanitĂ©. Paris nâa pas Ă©tĂ© inondĂ©, in Des mythologies de Rolland Barthes, Ă propos de lâinondation de Paris en 1955.
Roland Barthes « Lâempire des sens » Ă©d. Points coll.essais
2
1
3
Si le territoire porte une mĂ©moire câest quâil y a un potentiel. A ce moment, il y une rĂ©activation possible dans une dynamique nouvelle. Ce qui se passe dans cette relation dâĂ©change est plus quâun retour sur le passĂ©. Câest la puissance du lieu dans sa dynamique actuelle.
Ćuvre dâune problĂ©matique de lâamĂ©nagement dâun territoire en mouvement. LâEstuaire de la Loire Lâestuaire de la Loire est, de son origine Ă nos jours, le territoire de tous les dĂ©parts, celui des voyageurs, des aventuriers, celui des conquĂ©rants et des Ă©migrants. Les villes de lâestuaire se sont greffĂ©es sur les quais sur lesquels ont transitĂ© les hommes, les marchandises et la valeur. Ce territoire instable au rythme des crues, des marĂ©es, des creusements du lit dâun fleuve « sauvage » sur lequel se croisaient Ă©migrants et commerçants est devenu lâespace privilĂ©giĂ© dâune immigration. Le mouvement sâinverse, le territoire sâinvente au fil de lâimaginaire et devient lâenjeu de multiples investissements.
Travailler sur les traces historiques qui se sont constituĂ©es une identitĂ© autour de cette idĂ©e de nĂ©gociation de la valeur. Le potentiel de ressourcement de lâestuaire est liĂ© Ă cette redĂ©couverte des mobilitĂ©s Ă travers la rĂ©vĂ©lation des lieux dâĂ©changes. Ce retour sur les traces est une reconstruction des liens que la frontiĂšre met en tension avec dâautres territoires, lointains ou proches. Cette reconnaissance construit un champ dynamique de force ; le bord apparaĂźt parce quâil sollicite ou sous tend une connexion plurielle oĂč sâarticulent et se jouent des rapports et des fonctions diffĂ©rentes entre les hommes et les lieux. Cette reconnaissance en acte des traces qui tissent les relations potentielles dâun bord par rapport Ă ses diffĂ©rents contextes permet dâĂ©valuer, de choisir et de construire les liens qui placent chaque projet en attente dâune relation ou dâun Ă©change.
La valeur de ce territoire repose sur un hĂ©ritage, celui des mobilitĂ©s antĂ©rieures, dont les infrastructures conservent la mĂ©moire. Elle repose sur les dĂ©placements et mouvements qui les investissent aujourdâhui multipliant les croisements, liens et coĂŻncidences sur lesquels se jouent de nouveaux rapports de civilitĂ© et une nouvelle urbanitĂ©. Un monde sâinvente au croisement de ces mouvements, une mĂ©tropole originale se construit sur les liens que les nouveaux et anciens habitants tissent sur un paysage redĂ©couvert donc rĂ©inventĂ©. La question du dĂ©placement demeure indissociable de celle de lâhabiter.
A la quĂȘte de ressources qualitatives : des vocations nouvelles, ce qui est important nâest pas toujours la fonction premiĂšre, mais ce quâelle induit comme rapports sociaux. Ce quâon Ă©change dans lâĂ©change. Ce nâest jamais ni lâobjet lui mĂȘme ni son usage mais sa valeur qui est totalement relative Ă la reconnaissance des partenaires qui sont dans lâĂ©change.
La métropole estuarienne se construira sur une question délicate ; celle de la qualité de nouveaux « espaces-temps » lors la mise en résonance des différents territoires.
Sur un espace en mutation, la révélation de ce maillage dynamique est la premiÚre clé pour la mise en 4
5
SOMMAIRE 4 5
PRĂFACE AVANT PROPOS
10
UNE VILLE TRAVERSĂE
12 14 17 20
Premiers regards Ou sommes nous? En quĂȘte de repĂšre Discerner les limites
24
AU DELĂ DES PARCOURS
26 28 32 36
38
UNE ESCALE A COUĂRON
40 Lancer le débat 42 Des lieux, des personnes, des rencontres 47 Ville territoire 48 Pratiques couëronnaises
POINTS DE FRICTIONS
52 54 56 58
Une histoire mĂ©tropolitaine Une Ă©conomie en pĂ©ril Vision mĂ©tropolitaine LâĂ©mergence dâune peur
Lâinconscient du territoire Une interface en devenir
69
Le projet ne sâarrĂȘte pas lĂ
72 Le quai des uns, le jardin des autres Margot Moison (PFE)
Se requestionner Attachement au lieu Territoire ondulant Interaction en réseau
50
63 65
59 COUĂRON ON Y PASSE, LE TEMPS DâUN ARRĂT 60 NĂ©gociations 61 Au croisement de pĂŽles attractifs 6
86
Jetée des marais Alice Khaled
92
DĂ©sir de rives Adeline Boulaire (PFE)
105
Quai suspendu Nicolas Bodet
112
BIBLIOGRAPHIE
113
REMERCIEMENTS
7
AVANT PROPOS
« Parcourir le site et ses alentours en tous sens, observer et consigner toutes les configurations, toutes les choses jusquâaux plus tĂ©nues et aux plus nĂ©gligeables. (...) Câest lâobservation, lâinvestigation, la prise en compte de toutes les circonstances qui tissent, nos rapports aux choses qui feront que vos dĂ©cisions et vos projets seront inspirĂ©s, inspirĂ©s par le monde luimĂȘme.» Michel Corajoud, Lettre aux Ă©tudiants.
Câest ici lâhistoire dâune traversĂ©e, une grande traversĂ©e longue et patiente, de six mois, ponctuĂ©e de haltes. Nous sommes allĂ©s Ă la rencontre des rĂ©cits et des pratiques qui fabriquent un territoire, Nous avons arpentĂ© et nous nous sommes parfois perdus sur un terrain qui nous Ă©tait Ă lâorigine inconnu. Câest ici le rĂ©cit dâune expĂ©rience, dâabord Ă quatre puis trĂšs vite avec de nombreuses autres personnes. Ces passeurs et passants rencontrĂ©s nous ont fait partager leur quotidien, nous ont amenĂ©s Ă dĂ©couvrir leurs paradigmes. Câest ici la trace dâun passage sur un territoire qui ne nous a pas laissĂ©s indiffĂ©rents, qui dĂ©place notre savoir et construit la matiĂšre Ă projet pour rĂ©pondre aux nĂ©cessitĂ©s prĂ©sentes et Ă venir. Câest enfin la mĂ©moire de longues semaines de travail et dâun enseignement si singulier qui nous a remuĂ©s et mis en mouvement.
Voici donc la prĂ©sentation dâune dĂ©marche qui explique notre comprĂ©hension du territoire depuis nos premiers regards jusquâaux enjeux et nos propositions pour son futur.
Embarquons pour Couëron !
8
9
UN TERRITOIRE TRAVERSĂ PASSAGES ET INTUITIONS
la longue file dâattente pour le bac au moment du dĂ©barquement- embarquement 10
PREMIĂRES IMPRESSIONS Avant dâĂȘtre fixĂ©, chacun, sur un territoire dâĂ©tude, nous sommes allĂ©s avec lâensemble de lâoption de projet faire le tour de lâestuaire. CouĂ«ron est le premier site que nous visitons pour ce pĂ©riple qui nous mĂšnera Ă Cordemais, Donges, Paimboeuf puis Port Lavigne. Cette premiĂšre visite a jouĂ© un rĂŽle important dans notre apprĂ©hension du territoire, ce moment a cultivĂ© notre imaginaire et nous a gorgĂ©s de rĂ©cits. bistrot Ă©tabli au bord du quai.
La premiĂšre visite commence un matin de septembre, il est encore tĂŽt, lâair est frais et sec. CalĂ©s sur le siĂšge de la voiture nous traversons tranquillement CouĂ«ron, depuis son bord de Loire et ses quais. Nous filons sans arrĂȘt, en longeant les murs de pierre et la Tour Ă Plomb puis les maisons du siĂšcle dernier, vers la pointe de la commune, au niveau de lâembarcadĂšre du bac, cette navette fluviale qui traverse la Loire.
Le bac dĂ©marre du Pellerin, village de la rive dâen face et arrive vers nous, chargĂ© de voitures, il remue lâeau et ajoute une pointe dâintĂ©rĂȘt dans ce tableau. Puis notre attention se fixe sur la zone humide qui sâĂ©tend autour de nous, ce sont les marais estuariens. Nous sommes Ă lâorĂ©e de cette âĂ©charpe verteâ qui compose la singularitĂ© du grand territoire de lâestuaire. Ici les marais se nomment âAudubonâ en hommage au peintre naturaliste du XIX Ăšme, Jean-Jacques Audubon, nĂ© Ă CouĂ«ron. Lâhistoire nous emporte Ă nouveau.
ArrivĂ©s Ă destination, la vue comble nos regards et rĂ©veille nos sens. La brume en suspension donne un caractĂšre onirique au lieu. Ce moment particulier marque nos esprits : nous prenons tous la mĂȘme photo de la cale Ă moitiĂ© immergĂ©e.
Cet instant de dĂ©couverte passĂ©, nous remontons dans nos voitures et reprenons la route en sens inverse. Nous plongeons un instant dans les nouvelles zones dâhabitations de la ville : les ZAC. Flambant neuf, ce dĂ©cor nous excĂšde par son aspect standard dĂ©jĂ obsolĂšte. Nous bifurquons trĂšs rapidement pour rattraper la route vers Saint-Etiennede-MontLuc puis Cordemais, le prochain site Ă visiter.
Les mĂąts des bateaux qui Ă©mergent sur la rive dâen face intriguent, ils rappellent lâhistoire. En 1945, les Allemands coulent leur flotte pour bloquer lâaccĂšs au port de Nantes crĂ©ant lâĂźle Bikini. De nombreux mystĂšres planent autour de ce lieu, au nom dĂ©jĂ si singulier, âLe Paradisâ. Une des lĂ©gendes raconte que les noyĂ©s de Nantes sâĂ©chouaient ici, mais personne ne sait lâexplication vĂ©ritable de ce nom. Son souvenir reste marquĂ© sur la façade dâun petit
Finalement, nous nâavons vu de âCouĂ«ronnaisâ que le bac. LâĂ©paisseur de la ville nous est encore obscure. 11
12
Oà SOMMESNOUS? Territoire étendu entre marais, coteaux et Loire, concentré de
pavillons,
parsemé
de
hameaux, aux clochers perchés sur les collines.
Une complexitĂ© intrigante Ville mĂȘlĂ©e Ă la mĂ©tropole nantaise, situĂ©e en deuxiĂšme couronne aprĂšs Saint-Herblain, ses limites physiques nous sont incomprĂ©hensibles. Sur le chemin nous nâavons pas su juger de ses bords, nous avons lâimpression dâavoir traversĂ© plusieurs villes. Mais oĂč commence et oĂč sâarrĂȘte ce territoire ? OĂč se trouve la lisiĂšre, le bords ? Quand peut-on dire que lâon est Ă CouĂ«ron ? Les marais seraientils la limite ? Ce sentiment est dĂ» aussi Ă cette premiĂšre visite trĂšs furtive que nous avons vĂ©cue et qui nous a livrĂ© une description superficielle. Ătre perdu et dans le doute attisent notre curiositĂ©, les questionnements fourmillent dans nos esprits. Un rapport Ă lâeau fascinant Câest un territoire oĂč lâon arrive principalement par les bords de lâeau, soit avec le bac par le sud, soit le long des rives par le nord et les industries. Le bac est un bout de voyage, un Ă©vĂ©nement, qui nous enthousiasme: âon va aller bosser en prenant le bateauâ. Il est le premier lieu sur lequel nous embarquons mais aussi le premier lieu sur lequel nous
revenons lors de notre dĂ©couverte. Si particulier Ă lâĂ©chelle du grand territoire, il est le dernier «pont» entre les rives sud et nord avant SaintNazaire, il apporte une singularitĂ© Ă lâestuaire. Cependant CouĂ«ron est situĂ©e au nord de la Loire et donc pour nous, Nantais, la route est plus courte par cette rive, Ă 16km du centre-ville de Nantes, 20 minutes en voiture, nous sommes proches. Tout les matins, nous longeons la Loire, elle change de visage au niveau de 13
situation de CouĂ«ron Ă lâĂ©chelle de la mĂ©tropole et du pĂ©rimĂštre communal
câest surtout son rapport Ă la Loire ! Ici il y a plein dâambiances de Loire diffĂ©rentes, on ne la voit pas toujours mais on sait quâelle est lĂ , avec les marais par exemple. JâemmĂšne souvent mes Ă©lĂšves en vĂ©los faire le tour entre les deux bacs en passant par la rive sud» nous raconte Bernard, professeur dâEPS au lycĂ©e JeanJacques Audubon, nous emmenant sur ce parcours lors de lâitinĂ©raire Ă vĂ©lo fait ensemble.
Chantenay puis Indre, pour devenir plus portuaire, disparaissant parfois derriĂšre des masses industrielles que nous prenons plaisir Ă observer dans leur ballet avec les bateaux. La derniĂšre usine passe, Arc-en-ciel, mais le fleuve ne se dĂ©couvre quâĂ peine derriĂšre les arbres, il joue Ă cache-cache jusquâau bourg de CouĂ«ron oĂč enfin une esplanade le met Ă nu. «A CouĂ«ron ce qui est intĂ©ressant 14
premier arrĂȘt au centre bourg de CouĂ«ron
passage sur le bac
les marais de la rive dâen face, la tour Ă plomb au loin
les usines câest aussi la Loire
LâitinĂ©raire est une mĂ©thode dâenquĂȘte mis en place par JeanYves Petiteau, consistant Ă se laisser guider par lâhabitant dans des lieux quâil connaĂźt bien et quâil affectionne.
caractĂ©ristique physique semble dĂ©finir le «pĂ©ri-urbain», espace entre ville et campagne, Cependant le dernier point pose question car seulement 0,3 % de la population des actifs est agriculteur exploitant sur la commune. Les pratiques paysannes et agricoles diminuent au profit de modes de vies plus urbains. Notamment lorsque lâon voit les emplois majoritairement tertiaires (services) que les personnes exercent. Ou par lâhabitat qui est principalement sous forme de maisons pavillonnaires sans rapport physique avec leur milieu.
Entre rural et urbain? CouĂ«ron est un territoire Ă la confluence entre le pĂŽle urbain de la mĂ©tropole nantaise et le monde rural des marais estuarien. Des espaces de marais, de champs et de maraĂźchage couvrent 2/3 de la commune, qui est aussi peuplĂ©e dâenviron 20 000 habitants. La complexitĂ© de cette tension dâentredeux alimente notre intĂ©rĂȘt. Cette
Ces dimensions sociales et physiques interrogent sur les contradictions qui peuvent exister sur ce territoire et ses Ă©volutions. Mais aussi sur lâidĂ©e de ruralitĂ© qui disparaĂźt au profit dâun urbain gĂ©nĂ©ralisĂ© : âaujourdâhui, vivre Ă la campagne est sans doute une des postures les plus urbaines qui soient. Les nĂ©oruraux qui se revendiquent comme tels ne sont que des urbains qui empruntent une mythologie urbaine particuliĂšre â celle de la campagne et de la ruralitĂ©â nous dit Michel Lussault.
catégories socioprofessionnelles des actifs en 2012 (INSEE) 15
EN QUĂTE DE REPĂRES Tours et dĂ©tours, premiĂšres rencontres, premiĂšres impressions, des Ă priori partagĂ©s avec les habitants. LâimmensitĂ© de la commune A notre grande surprise, CouĂ«ron est vaste. La superficie de cette commune correspond Ă lâune des plus Ă©tendue de la mĂ©tropole nantaise. (44 km2) MalgrĂ© lâexistence de lignes de transports en commun, celles-ci ne couvrent quâune petite partie du territoire, il est donc nĂ©cessaire dâĂȘtre dotĂ© dâun vĂ©hicule particulier si lâon veut avoir lâopportunitĂ© de se dĂ©placer nâimporte oĂč. Ce qui fait que les habitants et les passants circulent beaucoup en voiture. NousmĂȘmes, lors de nos pĂ©rĂ©grinations, nous sommes beaucoup allĂ©s dâun endroit Ă un autre par ce mode de transport. Ainsi, lâexpĂ©rimentation des Ă©tats de perceptions variĂ©es sâest faite au travers de la vitre. SâarrĂȘter, descendre, marquer un arrĂȘt prend alors une importance plus forte .
A la recherche dâune centralitĂ© Nous dĂ©ambulons entre une ZAC, les zones rĂ©sidentielles, une autre ZAC (ou peut-ĂȘtre la mĂȘme, elles semblent si similaires que nous nous y perdons), les champs, des hameaux, un lac, ⊠A la recherche de repĂšre, nous trouvons en ce dernier lieu, une opportunitĂ© pour sâarrĂȘter. Nous garons pour la premiĂšre fois la voiture, sur la grande place du marchĂ© prĂšs du bourg historique. Nous trouvons quelques magasins ouverts qui persistent mais de nombreux autres ont dĂ©jĂ mis la clĂ© sous la porte. Le bourg, si commun Ă toutes les villes avec son clocher et le charme de ses petites rues qui serpentent, est frappĂ©, comme tous les autres proches, des centres mĂ©tropolitains attractifs, par une fragilitĂ© et une possible disparition. On devine de nombreuses anciennes devantures de magasins rĂ©habilitĂ©s en habitations. Quelques-unes ont Ă©tĂ© folkorisĂ©es pour les besoins dâun film dâAgnĂšs Varda, Jacquot de Nantes en 1991, au bonheur des passants. âen terme de commerces, CouĂ«ron nâest pas vraiment dynamique, les magasins vivotent,
Lâune de nos premiĂšres rencontres sâest faite avec Pierre, habitant couĂ«ronnais depuis une dizaine dâannĂ©es. Il nous a emmenĂ©s avec sa voiture dâun point Ă lâautre sans en descendre. «Alors lĂ câest les ZAC, puis je vais vous montrer le lac Beaulieu oĂč je vais lire quand je mâennuie ». Cela nous dĂ©montre que cette commune ne se dĂ©couvre pas Ă pied, que cela nâest pas dans lâhabitude des habitants malgrĂ© le fait que certains pratiquent les chemins pĂ©destres, comme Pierre, qui descend au lac Beaulieu par les petits sentiers de randonnĂ©es depuis sa maison. 16
ils ferment tous. Il ne se passe rien.â Dominique, habitante que nous croisons dans lâĂ©glise. Les commerces peinent Ă survivre car ils sont en concurrence avec les grands centres commerciaux comme «Atlantis» (le plus grand dâEurope lors de son ouverture en 1990) situĂ© Ă 10 min en voiture au nord de la commune, Ă Saint-Herblain. Ce bourg en perte de vitesse abrite encore un marchĂ© tous les jeudis matins, mais il ne contient plus autant de stands quâavant, au grand regret des habitants. âle marchĂ© est tout petit par rapport Ă celui du Pellerin ou de Basse-Indre, moi je ne vais jamais Ă celui de CouĂ«ronâ parole dâatelier public.
denses contrastent avec les endroits vides et inhabitĂ©s des quartiers rĂ©sidentiels ou du centre-bourg de CouĂ«ron avec ses magasins fermĂ©s. Cela nâincite pas Ă sâarrĂȘter, mĂȘme pour nous, pourtant en quĂȘte de dĂ©couverte. Les lieux attendus dynamiques comme le bourg, symbole de centralitĂ© et de vie active, se rĂ©vĂšlent finalement vides. Nos premiers allers et venues sur le terrain, nous les avons inscrits au travers dâun travail vidĂ©o comme si nous rĂ©alisions notre propre itinĂ©raire. Cela nous a permis de garder trace de ces premiĂšres impressions qui montrent comment nous avons commencĂ© Ă prendre conscience des problĂ©matiques du site et de sa complexitĂ©.
Des flux incessants et des lieux vides Au quotidien le territoire est traversĂ© par diffĂ©rents flux, soumis aux mouvements pendulaires (travailhabitat). Tout le monde semble aller dans les mĂȘmes directions mais sans jamais se croiser. Ces passages
La citĂ©-dortoir ? âOh mais quâest ce que vous venez faire Ă CouĂ«ron? Câest une citĂ©-dortoir, câest pas dynamique. Câest un cul-de-sac faut vouloir y venir.» patron du bureau de tabac Ă cĂŽtĂ© de lâĂ©glise. Ces paroles revenaient constamment lors de nos rencontres, trĂšs vite effacĂ©es au fil des discussions, elles Ă©taient quand mĂȘme leurs introductions. DĂ©finie par lâencyclopĂ©die universalis, la citĂ©-dortoir âest une ville avec un marchĂ© du travail rĂ©duit et dont le principal but est de regrouper des logements. Les habitants sont donc employĂ©s dans une autre ville ce qui entraĂźne des dĂ©placements pendulaires entre la ville-dortoir et le bassin dâemploi.â CouĂ«ron avec la construction des nouvelles ZAC (Zone dâAmĂ©nagement ConcertĂ©) voit grandir sa population mais dĂ©cliner son Ă©conomie locale et le dynamisme de son centre-bourg. Nous constatons quâelle pourrait 17
sâapparenter Ă une citĂ©-dortoir. Lâattrait, toujours plus grand des citadins pour lâair de la âcampagneâ reste liĂ© Ă leur habitat. De nombreux mĂ©nages sâinstallent toujours plus loin des centre-villes pour concrĂ©tiser leur rĂȘve dâacquĂ©rir une maison individuelle avec jardin, tout en conservant un mode de vie citadin. Ainsi les personnes se croisent moins, prises par leur travail et leurs activitĂ©s personnelles. âles habitants semblent courir aprĂšs le temps, il y a beaucoup de circulationâ ValĂ©rie, directrice du centre Pierre Legendre. Les nouvelles pratiques Ă©clatĂ©es de beaucoup dâhabitants, dĂ©lient les interactions sociales.
Story-board de la video (extrait)
«des voitures qui vont toutes dans la mĂȘme direction, ...
... des frontiĂšres de feuillages,
Ce phĂ©nomĂšne questionne les fonctions et reprĂ©sentations des communes pĂ©ri-urbaines, car il ne favorise par leur diversitĂ© et lâattractivitĂ© de leurs activitĂ©s. Elles deviennent des extensions de la mĂ©tropole, en se vidant de leur substance de vie locale et de leurs spĂ©cificitĂ©s.
... mais oĂč courent tous ces gens ?
âCes lieux situĂ©s Ă mi-chemin entre deux milieux, Ă cheval entre les rĂ©seaux de communications locaux et mondiaux soulĂšvent des problĂ©matiques liĂ©es Ă lâabsence dâinscription de ses lieux dans des dynamiques de proximitĂ©â nous dit Thomas Sieverts.
Alors que la ville est déserte, ...
Notre premiĂšre vision se lie parfaitement avec le premier discours des personnes rencontrĂ©es. Cette reprĂ©sentation du territoire partagĂ©e fait ressortir une problĂ©matique latente : celle de la diminution voir disparition des singularitĂ©s locales et dâune dĂ©pendance Ă©conomique, sociale Ă une ville-centre dĂ©voreuse dâĂ©nergie.
les bords de Loire sont bien calmes , seuls des passants fantÎmes»
18
DISCERNER LES LIMITES
terres bas ses de l abeur
CouĂ«ron est en fait une ville qui nâest pas une seule, câest un
conglomérat, une juxtaposition, un collage de plusieurs entités.
Ăźle m
Lâimmersion sur le terrain, sâest accompagnĂ©e dâune Ă©tude cartographique. Celle-ci rĂ©vĂšle un territoire contraint, aux entitĂ©s marquĂ©s et aux lisiĂšres franches.
te
Une composition fragmentĂ©e La construction de la ville prend la forme dâun papillon, avec deux entitĂ©s trĂšs distinctes que sont le bourg (historique) et la ChabossiĂšre. Ces deux ensembles fonctionnent de maniĂšre trĂšs indĂ©pendantes. Chacune se constitue dâun centre -ville avec son supermarchĂ© de proximitĂ©, ses boulangeries et bureaux de tabac. Sur le chemin de Nantes, le bourg de la Chabâ est nĂ©anmoins plus dynamique.
dérives des ßles - cartographie imaginaire
et quâil y a une appartenance trĂšs marquĂ©e. Un habitant se dĂ©clarera CouĂ«ronnais ou Calbossien (« de la Chabâ ») selon son quartier de rĂ©sidence, selon son aile de papillon.
« Moi je vais faire mes courses au Super U lĂ -bas quand je rentre du travail, parce que CouĂ«ron-bourg quand on vient pas de lĂ , il faut vouloir y aller, câest un cul-de-sac » parole dâune habitante du bourg de CouĂ«ron.
«Yâa deux Ă©quipes de foot, nous au collĂšge on ne parlait pas aux gens de la Chab, câĂ©tait pas nos amis » plaisante une jeune fille de 16 ans pĂȘcheuse rencontrĂ©e sur les bords du lac. âles gens de CouĂ«ron-bourg sont moins bourgeois que la Chabâ qui sont plus vers Nantesâ habitante rencontrĂ©e sur la place du marchĂ©.
Les deux pĂŽles sont aussi dotĂ©s chacun dâĂ©coles, de terrains de sports, dâun centre socio-culturel, dâune mairie ou mairie-relais,... Ce qui fait que les Ă©quipements de la commune existent tous en double,
19
x
inardiĂšre la v
Z .A
lâĂ©tang b ern
Ăšres ini
la s
ard
.des Ha uts
lâer
riĂšre du
continent de la métropole
la b
lliĂšre azi
e de
g d âav l a le
lâaut re ri ve
si su
errit oir
le bour
la
stér i euse d parad u is
uâile resq habâ C
C ouest ZA
p
my
au cote s e d utes terres ha
n es
du b ord d e loire
Ainsi, nous pouvons retrouver les Ăźlots rĂ©sidentiels de La ChabossiĂšre proche de Nantes, du bourg plus proche du sud et des hameaux dispersĂ©s dans la campagne. Mais aussi lâĂźle mystĂ©rieuse du Paradis avec le quai du bac, les Ăźles de loisirs comme celle du lac de Beaulieu, dâautres culturelles comme celle de la Tour Ă Plomb avec la nouvelle mĂ©diathĂšque, des Ăźles regroupant des activitĂ©s Ă©conomiques comme celle de la zone dâactivitĂ©s des Hauts de CouĂ«ron et enfin dâautres plus industrielles au Port Launay ou Ă lâusine de traitements des dĂ©chets
Cette affirmation a Ă©tĂ© partagĂ©e ou dĂ©mentie plusieurs fois. Personne ne sait vraiment ce qui diffĂ©rencie les deux pĂŽles, ni pourquoi les habitants se moquaient les uns des autres, rien ne dĂ©finit vraiment lâidentitĂ© de chaque bourg. Cette bipolaritĂ© contribue Ă donner de CouĂ«ron une image de ville fragmentĂ©e dont les entitĂ©s qui la composent sont mono -fonctionnelles et autonomes, une ville riche dâinsularitĂ©s qui se distinguent par leurs programmes et leurs Ă©chelles.
20
Arc-en-ciel. Ces fragmentations viennent sĂ©parer les fonctions de la ville et confirment ce sentiment de citĂ©-dortoir apparu dans le premier discours des habitants. Ces derniers vivent finalement dans des espaces essentiellement rĂ©sidentiels. Toutes les activitĂ©s sont dĂ©tachĂ©es de la ville : les usines ne font plus parties de leur quotidien (ce ne sont plus des bassins dâemplois) et les petites entreprises dans les Hauts de CouĂ«ron ou les fermes sont dĂ©tachĂ©es physiquement et socialement des poches de vie. Des contrastes autonomes Le territoire bĂąti est entourĂ© dâespaces ruraux comme la campagne et ses champs, les marais et la Loire qui le dĂ©limitent distinctement. Il existe Ă©galement un contraste fort entre la ville et la campagne. Le bĂąti semble sâĂȘtre retournĂ© sur lui-mĂȘme et tourne le dos aux marais. Par exemple cela se traduit physiquement par lâimplantation de maisons aux murs aveugles sur la route des marais dans le quartier de la ZAC Ouest CentreVille. Ce nouveau quartier accueille 1200 logements et de nombreuses nouvelles familles sây sont installĂ©es depuis deux ans et ce jusquâen 2017. Pour lâinstant, entiĂšrement
constituĂ© dâhabitats, cet espace sâajoute comme un collage urbain supplĂ©mentaire qui ne dialogue que trĂšs peu avec les autres entitĂ©s. Des rives structurantes La distinction nette entre les diffĂ©rentes entitĂ©s sâexplique au travers de la composition gĂ©ographique du territoire qui dĂ©finit diffĂ©rentes limites. Ce territoire au bord dâentitĂ©s bien distinctes marque des rives singuliĂšres, entre coteaux (bords de terres), Loire et marais (bords de mer). Le chenal de la Loire souligne CouĂ«ron dâune limite dâeau au sud.
façade sur marais 21
bords-à -bords - des entités géographiques qui fragmentent le territoire
des crues.â Marcel HĂ©naff, La ville qui vient.
Cette Loire caractĂ©rise aussi la forme du territoire par ses dĂ©bordements liquides et humides avec lâespace de marais situĂ© Ă lâouest de la commune. La topographie imposante du milieu avec lâĂ©coulement du sillon de Bretagne au nord vient dessiner deux collines qui cisaillent le territoire et sur lesquelles se perchent les habitations. La genĂšse de la ville se contraint ainsi, comme beaucoup dâautre sur le territoire de lâestuaire.
Les usines sâĂ©tablissent en contrebas de la ville au bord de lâeau sur des Ăźles, le Paradis est une ancienne Ăźle de Loire, le Port Launay (dont il nâa de port que le nom aujourdâhui) Ă©tait anciennement sur le bord de lâeau. Ces dispositions continuent dâinfluencer le dĂ©veloppement. de la ville. En 1850, la ligne de chemin de fer Nantes/Saint-Nazaire sâimplante le long des lignes gĂ©ographiques et renforce la frontiĂšre dâurbanisation.
âLes villes ancestrales se sont Ă©tablies le long des cours dâeaux pour faciliter le transport des marchandises mais restaient sur des hauteurs protĂ©gĂ©es 22
23
AU DELĂ DES PARCOURS SâARRĂTER
les anciens quais du Port Launay : la cale de la Pierre Tamis 24
SE REQUESTIONNER AprÚs nos premiers arpentages expérimentés dans le mouvement, nous avons ressenti la nécessité de faire halte et de reconnaßtre les discours majeurs. De cette envie nous avons cherché à questionner les évidences et remettre en perspective nos préjugés.
solitudes oĂč le va et vient des voitures ont Ă©tĂ© notre seule compagnie. LâĂ©clipse de ces bruits se rĂ©vĂšle lors de lâarrivĂ©e dâune prĂ©sence humaine, qui, se faisant assez rare, la rend trĂšs importante. Nous ne dĂ©sespĂ©rons pas... La possibilitĂ© dâinteraction sociale est tout de mĂȘme possible, Ă lâimage de ces enfants qui jouent dans cette rue ou de cet homme qui par le biais dâun chien nous interpelle. Notre prĂ©sence intrigue les quelques personnes que nous rencontrons. Nous nous retrouvons parfois Ă Ă©crire sur un rocher, lâespace public Ă©tant rĂ©duit au trottoir, Ă la route ou Ă des jardins publics. Les enfants sont les seuls usagers qui dĂ©tournent les rĂšgles en jouant sur la route.
Nous nous sommes dâabord arrĂȘtĂ©s dans les nouvelles ZAC (celle Ă lâouest du centre-ville et celle de la MĂ©tairie Ă la ChabossiĂšre). Ces zones Ă©taient le symbole au premier abord des problĂ©matiques de dĂ©veloppement urbain liĂ©es Ă CouĂ«ron : espace mono-fonctionnel sans complexitĂ© sociale et sans singularitĂ© particuliĂšre. Tentative dâĂ©puisement dâun lieu Le dispositif littĂ©raire a Ă©tĂ© un outil pour commencer une narration. DĂ©crire et Ă©crire la flĂąnerie câest essayer de dĂ©construire la posture dâautoritĂ© que nous pouvions avoir sur les lieux en les jugeant vertueux ou non. Dans cette expĂ©rience nous Ă©tions Ă la recherche du dĂ©tail troublant, de lâinconscient du territoire qui dĂ©placerait nos reprĂ©sentations. En sâinspirant de George Perec, dans son livre Tentative dâĂ©puisement dâun lieu parisien, nous nous sommes arrĂȘtĂ©s longuement, en tentant de prendre en note tout ce que nous voyions. Nous avons tentĂ© de reprĂ©senter la vie quotidienne dâun lieu, sa monotonie, mais aussi notre perception, le dĂ©cor, le vivant.
Mise en place dâun mode dâĂ©criture Ce moment nous a permis dâĂȘtre dans une posture dâobservation, pour capter lâessence du moment et la spontanĂ©itĂ© des actions, nous avons dĂ©crit dâune maniĂšre brĂšve, Ă la volĂ©e notre vision du moment. Retenir lâespace qui sâĂ©coule et se dilate dans le temps, en arrachant quelques bribes de ce qui dĂ©roule devant nous. âfurtif : que lâon cherche Ă dĂ©rober aux regards, qui ne dure quâun bref instant.â dĂ©finition CNRTL
Description dâune expĂ©rience Nos rĂ©cits sont bruyants : le bourdonnement des voitures, le crissement des grues, le sifflement du vent ont Ă©tĂ© nos repĂšres. Nous avons essuyĂ© des moments de
Voici des extraits de trois dispositifs littéraires que nous avons faits chacun seul. 25
MERCREDI 14 OCTOBRE 2015 16h - ZAC OUEST CENTRE VILLE
MERCEDI 14 OCTOBRE 2015 14h15 - ZAC DE LA MĂTAIRIE
Au loin une voiture passe un sirĂšne retentit les oiseaux chantent un chien aboi Je lĂšve la tĂȘte car cette ambiance sonore est riche mais autour de moi personne ne passe un vespa une voiture au loin un avion qui vient couvrir les bruits une scie tourne Le bruit des travaux les grues les feuilles bougent de cette lĂ©gĂšre brise elles sont rouges et vertes en demi teinte ce qui annonce lâautomne.
le temps est automnal avec quelques Ă©claircies. passage dâune voiture grincement de portiĂšre claquement de portes au loin une autre voiture sort de son garage le soleil revient. un chien aboie une femme au landau passe sur le boulevard. quelques oiseaux chantent une voiture repasse un lĂ©ger sifflement de marteau-piqueur une voiture sur le boulevard un jeune homme passe, promenant son chien lâanimal sâarrĂȘte renifler Ă mes pieds. âil est sympa votre chien, oĂč allez-vous le promener comme ça ?â. âau lac Beaulieu, ça fait un bout donc jây vais en voitureâ. âvous habitez dans le quartier ?â. âoui mais je vais partir, je fais construire une maisonâ la discussion continue briĂšvement sur la pluie et le beau temps puis se termine sur des salutations courtoises il repart dans sa voiture son chien Ă lâarriĂšre une autre voiture arrive un enfant avec son vĂ©lo passe je le perds de vue trĂšs vite il est trois heures et quart le caillou sur lequel je suis assise me refroidit une voiture - jâen ai marre dâĂ©crire ce mot - se gare au loin les feuilles des arbres bousculĂ©s par le vent sont les seuls mouvements permanents du quartier Pause.
Je mâassois sur un banc deux personnes empreinte un chemin de dĂ©sir Jâai lâimpression quil mâobserve Ils ont le choix droite ou gauche La droite mĂšne Ă lâespace ou je suis hĂ©sitation il prĂ©fĂšre emprunter lâautre chemin les bruits du chantiers reprennent au loin Pause. DIMANCHE 18 OCTOBRE 2015 14h - ZAC OUEST CENTRE VILLE des enfants jouent au ballon ils crient le ballon est lancĂ© en cloche il est jaune crissement de pneu jâentends les voitures qui passent au loin le vent souffle les enfants continuent de jouer Maman !! bruit de ballon une voiture passe lentement et part il y a plus de voitures que de maisons les stores et les jardins sont fermĂ©s toujours les mĂȘmes enfants dans les mĂȘmes jardins sinon il nây a que moi et mes copines les feuilles Pause.
un caillou comme assise 26
ATTACHEMENT AU LIEU Ătre Ă lâĂ©coute câest amorcer
la reconnaissance de lâautre, ce qui dĂ©place notre vision
et donne de lâĂ©paisseur au territoire.
coexistent
Ces
mais
personnes
elles
ont
la place de la mairie quand jâai gamine, câĂ©tait lĂ la place du marchĂ©.
Bah il y avait boulangerie, charc
Ici le jeudi câĂ©tait quelque chose dâimportant, donc câĂ©tait vraiment un
avait des opticiens, des bijoutier
centre qui était trÚs animé, moi je venais tous les jeudis matin avec
avoir... Et maintenant il y a une
mes grands-parents câĂ©tait un peu la fĂȘte dâaller au marchĂ© avec eux.
a des magasins qui vivotent et q
Câest rĂ©duit de peau de chagrin, il y a plus de marchands mĂȘme si il y
tellement de vie⊠pff non on ne
a toujours le marché.
niveau du commerce, ça vivote...
On est sur le boulevard de lâEurope qui est relativement rĂ©cent en fait.
Alors les marais sur le plan affe
LĂ il y avait des vignes Ă lâĂ©poque, le grand-pĂšre de mon mari avait des
beaucoup parce que quand jâĂ©t
vignes ici. LĂ câest le jardin de mes grands-parents. CâĂ©tait un chemin
on allait souvent le dimanche a
de terre-battu, de chaque cĂŽtĂ© il y avait des petits ricoulets, câĂ©tait de
y avait les grands-parents, les p
lâherbe, câĂ©tait creusĂ©, et quand il pleuvait il y avait de lâeau, notre
enfin ça pĂȘchait tout ce monde
petit jeu câĂ©tait de faire passer les bateaux dans ces petits ruisseaux.
on vient ici.
chacune une façon dâhabiter, une maniĂšre particuliĂšre dâĂȘtre
et de percevoir leur lieu de vie. âLe vieux mot bauen auquel se rattache bin, nous rĂ©pond : âje suisâ, âtu esâ, veulent dire : jâhabite, tu habites. La façon dont tu es et dont je suis, la maniĂšre dont nous autres hommes sommes sur terre est le bauen, lâhabitation. ĂȘtre homme veut dire : ĂȘtre sur terre comme mortel, câest-Ă -dire : habiterâ Martin Heidegger Mais que veut dire âhabiterâ Ă CouĂ«ron ? NâĂ©tant que des passeurs dâun temps sur ce territoire, il nous Ă©tait nĂ©cessaire dâaller Ă la rencontre des personnes, de leurs pratiques et rĂ©cits qui les dĂ©finissent et les font habiter vĂ©ritablement.
transforme au grĂ© de nouvelles constructions, de destructions, de nouveaux arrivants. MalgrĂ© la disparition des chemins de son enfance elle retrace leurs lignes et nous emmĂšne dans son univers. Nous avons rendez-vous sur la place de la mairie, puis nous descendons au centre-bourg, fleuron de la vie passĂ©e Ă CouĂ«ron. Dominique nous conte la familiaritĂ© quâelle peut entretenir avec ce lieu car chaque boutique mĂȘme vide aujourdâhui, est marquĂ©e dâune mĂ©moire, dâun nom, dâune anecdote. Le parcours est ponctuĂ© de nombreux arrĂȘts car les rĂ©cits ne manquent pas et ils retracent des histoires de gĂ©nĂ©ration
Les paysages dâune histoire Nous avons rencontrĂ© Dominique, dĂšs nos premiers pas Ă CouĂ«ron, dans lâĂ©glise. Câest une personne du âcoinâ, elle habite ici depuis quâelle est âgamineâ. Elle nous a guidĂ©s sur les traces de son histoire, animĂ©e par cette envie de transmettre et de partager des rĂ©cits qui ne devraient pas ĂȘtre oubliĂ©s. Le territoire se 27
cuterie, tous les magasins de base, il y
dans le centre, il y a la presse qui marche avec les fumeurs, et lĂ une
lĂ vous voyez câest marquĂ© âpropriĂ©tĂ© privĂ©eâ on se demande bien
rs enfin tout ce quâune bourgade peut
boulangerie, câest la troisiĂšme gĂ©nĂ©ration de boulangers, jâai connu
pourquoi parce que lâon nâa pas envie de passer par lĂ . Câest un passage
e charcuterie qui reste... et le reste il y
le grand-pĂšre, qui faisait sa tournĂ©e dans un vieux CitroĂ«n gris Ă
qui a servi pendant la guerre. Câest un passage qui donne sur la Loire,
qui ferment. On peut pas dire quâil y a
lâĂ©poque, il avait un klaxon particulier Ă sa petite camionnette, et il
Et je pense quâils ont mis «propriĂ©tĂ© privĂ©e» pour ça, maintenant les
e peut pas dire que ce soit trĂšs vivant au
sâarrĂȘtait devant chez nous. câest la troisiĂšme gĂ©nĂ©ration, le fils qui
nouveaux Couëronnais ils ne savent pas, ils ont dû en avoir marre
.
reprend. Il y a quand mĂȘme des choses qui durent.
dâavoir des gens qui voulaient aller voir.
ectif, câest vraiment un lieu qui me plaĂźt
Il y a tout un systĂšme dâĂ©tiers et dâĂ©cluses pour rĂ©guler.Mais câest un
En hiver il y a souvent de la glace, câest magnifique. Quand les prĂ©s
tais gamine mon grand-pÚre péchait et
peu en dĂ©crĂ©pitude. LĂ aussi ça me fait mal au cĆur car lĂ aussi câest
sont inondĂ©s et quâil y a un peu de soleil, il y a des reflets magnifiques.
avec les glaciĂšres et les pique-niques, il
du patrimoine, câest vraiment super dâavoir ça Ă CouĂ«ron, car les gens
Quand il nây pas de vent, lâeau ne bouge pas et ça fait des reflets
parents, le beau-frĂšre, mon grand-pĂšre
ils sont de plus en plus déconnectés de la nature
parfaits. Ăa me fait plaisir de partager les choses qui me plaisent. Ici
e-lĂ ... Câest vraiment le paradis quand
le dimanche matin, il y plein de cyclistes et de coureurs Ă pied. Comme câest plat. Nous on vient promener le chien ici.
GuidĂ©s par ses rĂ©cits, nous parcourons la commune dans sa voiture, oĂč elle nous raconte lâimportance de la famille dans son attachement au territoire. Quand elle Ă©tait plus jeune, elle ne pensait pas rester ici. Et pourtant aujourdâhui elle est trĂšs ancrĂ©e dans sa commune car sa famille, celle de son mari, habitent ici depuis cinq gĂ©nĂ©rations. Pour finir, elle nous emmĂšne dans les marais, quâelle affectionne particuliĂšrement parce que ce lieu est un paysage Ă la fois ressourçant et source dâun certain art , mais Ă©galement lâendroit de tout les souvenirs familiaux qui conditionnent son attachement au territoire.
en gĂ©nĂ©ration. Les commerces, le chantier Fouchard, se lĂ©guent de pĂšre en fils, de mĂšre en fille. La transmission conditionne son choix Ă nous montrer le territoire, car il est essentiel que cela continue. âJâaimerais quâil existe des lieux stables, immobiles, intangibles, enracinĂ©s (...) de tels lieux nâexistent pas, et câest parce quâils nâexistent pas que lâespace devient question, cesse dâĂȘtre Ă©vidence, cesse dâĂȘtre incorporĂ©. lâespace est un doute : il me faut sans cesse le marquer, le dĂ©signer ; il nâest jamais Ă moi, il ne mâest jamais donnĂ©, il faut que jâen fasse la conquĂȘteâ Georges Perec 28
ho
Les gens sont J'ose mĂȘme plus pas mal au cĆur de voir
!
,
LES MARAIS
,
le oĂč l'Ă©co c'est Ah lĂ ari, m mon Ăšre p pĂšre mon n grand- le. o co Ă© m l' t Ă e ici, allĂ©s sont s amĂšne oris Vian B u Je vo thĂ©Ăątre le c'est
t
plĂš Ă©c om t Ă©t i on
'Ă©ta it ne, c pag lĂšte om p ad es e ndr oits qui Ă©ta ien tc
t
i t u n e n dro
i e,
la p
* LĂ
a ir
[
il y
câes
MAIRIE ed lac
av ait
el
Je m
de sv ig ne sĂ
r la Loi
l en ppe e ra
Ă©ta
a nt g
min
y e, il
l'Ă© po qu e, le
En
pa ral lĂš
le
de
gr an dpĂš re de m on
sa l on gu eu r
it ava
ute ur t o
fame
use
ec zain u in la q
e fĂȘt
de
t ,e nts rça me
om sc
is su
[
cir cu lat ion s
oĂč
mais
on
...
t la
*
en
re, lĂ
i Ă©ta , c' iale
,
ine
je ue is q pu r de le e l r bo s pa ule end v a rd j'ent de l'Europe, celui dont
nfi n
ner pa
rc me
ps
gam
qu'a iens souv e Je m
a
s tins avec me les jeudis ma c'Ă©tait ts grands paren au r e d'alle un peu la fĂȘt
e yc ro
Mainte nant avec l'app
m
v
roll
]
*
29
[
il y
[ la
emme
boui....
ans
is
a
LĂ voyez quoi s de Mercier immobili a pa er il n'y câĂ©tait un marc d'air, hand de fruits ants et lĂ©gumes, c'Ă©ta cour it un des acteu n de ei rs au niveau du commerce, est pl c'Ă©tait une figur el, c' e au niveau de CouĂ«ron, il tionn s'appelait fonc t pas Bournigal le mon Auguste c'es ise, sieur.... l'Ă©gl c'Ă©tait un vrai r de autou re cent boui Et le
..
er rĂȘt 's ar va ue on toriq . e is in 'us t h e l men d u u lie mon e l r sĂ© t su t clas s e TOUR A PLOMB 'es on lĂ car c c ] r on es oke au p [ D inut ĂȘme uait o j , on 5 m and m gine fran ma c qu e v
,
q
réduit de le jeudi c'est grin, il y a peau de cha ant mais i plus de march le marché. l y a toujours
nn
!
d e s c o u e ro
om
uis
!
LA LOIRE
je avec r u te ven plan suis lĂšves la, et s Ă© rbre e m et a car c rare ait n o c'Ă©t it Ă©ta le Ă©co Ă© priv
ie
,
mai n mai tenant vis p son da on a d n ro e peu rsonn s l'eau, it Ă la el, ç , Ă j e m pre sq trouv a mâa on a je v ue un e que gace u o c a n je n is pas ffront 'est dâes e a u p x e Ă ce th S u gen x pas Ă©tique DF⊠a re d e ch dhĂ©rer ose s....
e, atair i célib ici... mo était qui u billard lauque Úre a g un fr i jouait n lieu , et on s u de avait ait it u Úre ux et q t c'éta n fum ntrait o re e d-m ,e gran ait chez me ça e tabac, and on er Ma tr m u loge ute co plein d cle⊠q de ren qui ha était on is uille j'éta que c' er mon u la tro h e e ... parc it cherc is un p mmes. a a ven es, j'av bonho s rs cou tous se c ave
je slongtems que trĂšs petit uis Ăšs trĂšs us des dep is tr -vo ça a a m endez ds r ten fait, ç st le 'en e e, j d'ĂȘtre re, c' oir qua in e L ste s d t ju tit s jard ord nt tou un pe s de a sb Le a vie l y a ont p i et ç n lĂ ui nâ , bo ants q enf
... cret e s e sag pas
me nt
;
st I M P ORTANT d
uffe
i so
i j'a
Mo
en
aine rt de ça,
la h
EGLISE
LE PORT
rivé le p
cam
!
t lic e pub
ie
!
d ren rep nt n, tio qui ure Ă©ra fils qui d Ă©n le e g re et oses m h par pĂš s c isiĂš uĂ©e tro re, le e de marq Ăš ĂȘm st la trĂšs C'e rand-pnd m Ă©tĂ© j'ai le g a qua e de il y squ it pre ava il y
e le entr ole l'éc u de ivea n u on a gati gré la sé
des prĂš s
et q u
*
lĂ une boulangerie c'est la troisiĂšme gĂ©nĂ©ration de boulangers, j'ai connu le grand-pĂšre, qui venait, il faisait sa tournĂ©e dans un vieux CitroĂ«n gris Ă l'Ă©poque, il venait faire une tournĂ©e dans la campagne, il avait un klaxon particulier Ă sa petite camionnette, et il s'arrĂȘtait devant chez nous⊠c'Ă©tait toujours « ah il y a le pain »
qu
... , car je vous emmĂšne au Port Launay
*
e je ut qu tĂ© il fa erre propriĂ© n nâa Ă© la gu lâo ant marqu e que rc pend z c'est oi pa dote ye anec vous vo pourqu re... tite en guer e pe e.... LĂ de bi t la Il y un racont deman par lĂ . i pendan vous on se passer i a serv Ă©e priv vie de age qu en ss pas t un pa C'es
t que u a f l [I
Tout ça, câĂ©tait des ça se construit en Je connais pas un Ils ont fait des log
les vélos, les pique-niques et c'était vraiment super
vous
tout le monde connaßt Jean-Jacques Audubon, c'est un personnage qui est trÚs connu, il a habité un petit peu à Couëron,
*
il y avait les grands-parents, les parents, le beau-frĂšre, mon grand-pĂšre enfin ça pĂȘchait tout ce monde-lĂ ... On emmenait le scrabble,
vie de j'ai en
]
quand j'Ă©tais gamine
parce que mon grand-pÚre péchait et on allait souvent le dimanche avec les glaciÚres et les pique-niques,
Moi
c'est quand mĂȘme.... avec les maisons d'armateurs il paraĂźt quâaux Ătats-Unis
;
Alors les marais sur le plan affectif, c'est vraiment un lieu qui me plaĂźt beaucoup
te es ui tq ,e e né
ça ,s
m ar i
ur le pĂŽ le
de
av ec de sv ig ne s ic i
l
s marais et là , n lotissement. couëronnais qui trouve ça beau. gements en bois qui vieillissent trÚs mal.
orrifiés de la laideur.
sser à cet endroit, ça me fait trop comment ça a été défiguré.
LA ZAC
lo des
s. C ent em tiss
'est
or nsf
tra
ci en mé
pause courte
pause plus longue
arrĂȘt
gamine
je prenais un
petit chemin
eux. marché avec
parition d'Atlantis et des gran des s urfa c
la
es, d
;
es p
LĂ je
quand j'Ă©tais
vou s
emm
Ăšne
vers u
n au
tre l
ieu..
.
tem ent t
r an sfo rmé
sp
our fair e
du ré
si d enti
t el e
, ; .
]
oi r ort té d
*
pour aller ch ez mes gran ds-parents, il y avait des caniveaux av ec de l'eau
ĂŽles ,
le c
entr e
de C
ouë ro
na
beau cou p
, be
auco up, b
eauc
Ch a
Ăa s'appelait la Combe, et
bo ssi Ăšre ,q ui
est
un au tr
ep
ĂŽle
de C
ils venaient faire les vendag es
*
oup b
aiss Ă©
]
quand ils Ă©taient gamins
ou Ă«
ron ,
il y
au nd
yn am ism eb ea uc ou
pp
lus
im po rta nt, i
ly
au ns
]
up er U
30
* ! [] ...
lieu de souvenir lieu dâĂ©motion lieu conventionnĂ© lieu de rumeur
Bourellet «protecteur»
TERRITOIRE ONDULANT
Ligne de rives
âSi on disait ça Ă quelquâun qui nâest pas de CouĂ«ron il ne nous
croirait pas, mais ici câest une terre qui onduleâ Yannick
Cet agriculteur local nous a beaucoup inspirĂ©s dans notre dĂ©marche et a dĂ©clenchĂ© de nouvelles perspectives. Ce territoire ondulant est une association mĂ©taphorique inventĂ©e de plusieurs phĂ©nomĂšnes qui forment les singularitĂ©s de CoĂŒeron. Il prend sens car il exprime Ă la fois le paysage changeant, entre les marĂ©es journaliĂšres et saisonniĂšres, mais aussi les mouvements dâimmigrations sociales, ces marĂ©es humaines qui constituent une des spĂ©cificitĂ©s du territoire.
Prés de Loire
Un paysage en mouvement La Loire nâa pas quâune rive mais des rives. Au rythme de ses dĂ©bordements elle essuie les terres le temps dâune heure, dâune journĂ©e, dâune saison. Les Ăźles de Loire sont frĂ©quemment inondĂ©es par le fleuve Ă marĂ©e haute. Les prĂ©s et les marais internes quant Ă eux ne sont submergĂ©s que lors des grandes marĂ©es dâhiver. Les marais de la vallĂ©e de la Musse se situent dans une cuvette marquĂ©e par un bourrelet âprotecteurâqui les sĂ©parent des prĂ©s de Loire. Ces espaces sont donc en perpĂ©tuelle recomposition au fil des saisons et des marĂ©es. Ils sont considĂ©rĂ©s comme des zones fragiles Ă prĂ©server pour la riche biodiversitĂ©
septembre
novembre
quâils accueillent.
31
Vallée de la musse
usines de la Tour Ă Plomb
usines de basse-indre
Un territoire modelĂ© par lâhomme Ce fonctionnement est en grande partie contrĂŽlĂ© par lâhomme. LâĂ©vacuation des eaux est rĂ©gulĂ©e par des Ă©tiers et des digues, systĂšmes façonnĂ©s au XIIĂšme siĂšcle par les moines pour les besoins de lâagriculture. Le marais est donc un paysage fabriquĂ© par la main de lâhomme et ce encore aujourdâhui. Le systĂšme hydraulique est gĂ©rĂ© par le syndicat des marais de Saint-Etiennede-Montluc/CouĂ«ron mais aussi par les agriculteurs. Ces amĂ©nagements sont indispensables Ă lâexploitation agricole et donc Ă la prĂ©servation du marais. Lâentretien par le pĂąturage et
fonctionnement des marais et du systĂšme dâirrigation (coupe GIP Loire)
32
Des vagues dâimmigrations Lors de nos rencontres, il nous a souvent Ă©tĂ© relatĂ© que âCouĂ«ron est la ville la plus cosmopolite de lâouest, il y a eu jusquâĂ 21 nationalitĂ©s diffĂ©rentesâ. Cette diversitĂ© culturelle sâexplique Ă travers son histoire ouvriĂšre et encore aujourdâhui par des politiques publiques favorisant lâaccueil de nouveaux arrivants.
le fauchage conserve la biodiversitĂ© de cet espace. âIl faut dire aux gens que les marais sont un lieu de travailâ nous dit lâagriculteur. Chaque Ă©lĂ©ment est le fruit dâun amĂ©nagement par lâhomme, jusquâaux arbres-tĂȘtards caractĂ©ristiques du milieu qui ont une forme particuliĂšre due Ă la rĂ©colte traditionnelle de leurs branches pour le feu de bois. Aujourdâhui ces arbres abritent une faune exceptionnelle. Les marais sont un lieu dâactivitĂ©s singuliĂšres en relation avec lâeau, lâentreprise Fouchard abritĂ©e le long dâun Ă©tier fabrique des bateaux. âIl y a une culture traditionnelle, ils crĂ©ent de vieux grĂ©ements, des bateaux en bois, câest une menuiserieâ Dominique. La question du mouvement dans ces espaces est un rĂ©elle richesse âOn a jamais une annĂ©e qui ressemble Ă lâautre, il faut sâadapter et savoir bien observerâ Yannick lâagriculteur.
Un peu dâhistoire Le dĂ©veloppement de son parc industriel sur les bords de Loire au XIX et XXĂšme siĂšcles a participĂ© Ă la constitution dâune histoire sociale et de la construction de la ville. En 1914, lors de la premiĂšre guerre mondiale, les usines, en quĂȘte de main dâoeuvre, ont recrutĂ© de nombreux ouvriers Ă©trangers. Entre 1921 et 1926 la population a augmentĂ© de 30% on notera dans les registres de la mairie 24% dâĂ©trangers (dont 57% Polonais, 22% dâEspagnols). Ces afflux de populations ont fortement conditionnĂ© lâurbanisation de la ville. Les forges de BasseIndre ont notamment dĂ©terminĂ© le dĂ©veloppement de la ChabossiĂšre et les usines Pongibaud, lâimplantation des citĂ©s ouvriĂšres du Bossis et Bessonneau. Les traces de cette culture de mĂ©tissage sont encore aujourdâhui trĂšs prĂ©sentes dans les discours et le patrimoine (Ă©glise polonaise, citĂ© ouvriĂšre).
Ce territoire Ă©volutif se comprend aussi autour de son histoire sociale.
Arbre TĂ©tard
Dans sa proximitĂ© avec Nantes, CouĂ«ron sâest continuellement construite autour de lâaccueil des nouvelles populations qui avaient besoin dâĂȘtre logĂ©es pour travailler. Avec lâattractivitĂ© des villes, depuis les annĂ©es 1950, la commune nâa cessĂ© de croĂźtre, de sâĂ©tendre. Dans les annĂ©es 1980, on note une explosion du tissu pavillonnaire et aujourdâhui
Chantier Fouchard
33
encore avec la construction des ZAC, nouveaux quartiers dans la ville. La diversitĂ© sociale, une force pour bĂątir ensemble Cette histoire est importante Ă rappeler car elle est lâamorce dâune ville qui a pour coutume lâaccueil de nouvelles populations. Ces vagues dâimmigration ont Ă©tĂ© la naissance dâune force et dâune certaine tolĂ©rance au sein de la commune.
Les forges de Basse Indre 1940
Nous avons rencontrĂ© RĂ©gine, Vasyl et Carlos autour dâune part de gĂąteau, un mercredi aprĂšs-midi. Tous trois issus de lâĂ©migration polonaise ou espagnole, ils nous ont contĂ© comment lâhistoire ouvriĂšre fut mĂšre dâune importante solidaritĂ© sociale. âIl y a eu des pĂ©riodes dĂ©licates de cohabitation, mais lâintĂ©gration sâest faite rapidement. Le travail Ă lâusine câĂ©tait trĂšs dur. Comme tout le monde allait y travailler, comme tout le monde Ă©tait dans le mĂȘme bateau, il y avait une grande solidaritĂ© sociale et de lâentraide.â Ils nous dĂ©crivent un certain dynamisme de la vie Ă cette Ă©poque. âEntre Polonais, Espagnols, Ă CouĂ«ron on faisait la fĂȘte⊠Le bal câĂ©tait sortie obligatoire, on allait au Pellerin danser, voir les filles. On avait pas le choix, il nây avait pas de transports alors on se retrouvait toustle dimanche pour faire un footâ.
Les usines Pontgibaud début du XXÚme
La cité ouvriÚre Bessonneau
Les maisons Castors
âLes modes de vie ont Ă©voluĂ© câest complĂštement diffĂ©rent maintenantâ mais les CouĂ«ronnais sâinvestissent encore pour essayer de prĂ©server la vitalitĂ© de ce rĂ©seau social. Il persiste encore aujourdâhui: les nouveaux arrivants qui sâinstallent nombreux avec lâurbanisation intense de la ville, sâinscrivent souvent dans les associations et apportent de nouvelles dynamiques.
LâĂ©glise polonaise 34
INTERACTIONS EN RESEAUX Plus nous avançons dans lâexpĂ©rience, plus il nous est difficile de ne
pas reconnaĂźtre un visage, dâesquisser un bonjour, ou bien dâĂȘtre nous-mĂȘme reconnus dans la rue.
associatifs se sont des endroits de rassemblementâ nous explique Carlos. Les habitants regorgent dâinitiatives toutes plus crĂ©atrices les unes que les autres, de lâassociation protectrice des pigeons aux tricoteuses dâarbres, ce sont surtout des prĂ©textes pour faire ensemble.
Nous dĂ©couvrons petit Ă petit les parties cachĂ©es de lâiceberg. De nos premiĂšres impressions dâune ville oĂč peu de choses dialoguaient entre-elles, nous avons maintenant lâimpression quâici, tout le monde se connaĂźt. «Quand on va quelque part on sait Ă quelle heure on rentre mais on sait pas Ă quelle heure on en sort» nous lance la maire. «Des fois, il vaut mieux rester cachĂ© plutĂŽt que de sortir de chez soi et ne pas pouvoir marcher tranquillement » nous dĂ©clare une autre habitante du Bourg dâAval. Notre rencontre avec lâancien postier nous fait Ă©galement sourire: Ă CouĂ«ron il y aurait un canal radio nommĂ© âradio qui-baise-quiâ . Nous remarquons que la plupart des personnes se connaissent presque dĂ©jĂ toutes entre-elles, par le biais dâune association ou dâune autre personne. Câest une ville de 20000 habitants mais nous avons lâimpression dâĂȘtre dans un petit village oĂč tout se sait. «oh il paraĂźt que vous avez fait un stop au bac?» nous rĂ©plique un habitant que nous rencontrons suite Ă notre atelier.
La volontĂ© de faire ensemble Nous avons commencĂ© Ă dĂ©couvrir quelques-uns de ces lieux mais il y en a certainement bien dâautres, ce sont Jâai Ă©crit un article sur les femmes qui tiennent un bar Ă CouĂ«ron. Le Paradis , câĂ©tait mon rĂȘve de gosse.
Christelle du Paradis (patronne du bar)
Le C Lo
En attendant le bac, les gens viennent prendre un verre. Le bac ça fait partie de la ville.
CouĂ«ron, câ
Bernard (Prof. de sport à Couëron)
Nathalie (Habitante) Tous les dimanches, câest parc du bord de Loire.
Les bords de Loire ont été aménagés avec une esplanade et un square
JâemmĂšne souvent mes On se retrouve entre mamans Ă lâaire de jeux. enfants au square et je rencontre mes copines.
Ce rĂ©seau sâexplique Ă©galement par un tissu associatif dense (plus de 140 associations). On compte Ă©galement deux centres socioculturels et beaucoup dâĂ©quipements publics relatifs au sport, Ă la culture et Ă lâenseignement. âLes lieux
Un réseau invisible
Audrey
Jocelyn
(Habitante)
(Habitante depui
Logan (Collégien)
35
des trĂ©sors bien gardĂ©s. Il y a la âCab Ă Luluâ, oĂč lâon sâest arrĂȘtĂ© par hasard. Câest une baraque Ă frites posĂ©e prĂšs du rond point du Carrefour Market. Il parait que câest le repĂšre des CouĂ«ronnais nous dit le chef. Les ouvriers qui travaillent Ă Arcelor Mittal vers Indret viennent jusquâici pour dĂ©jeuner car lâambiance est lĂ , tout le monde se connaĂźt. En questionnant Lulu, il est plutĂŽt fier du lieu quâil a crĂ©Ă©, âjâai transformĂ© un champ de patates en champ de foireâ, la pĂ©rennitĂ© de son activitĂ© nâĂ©tait pas assurĂ©e, mais aujourdâhui ça marche et ça fait du lien social. «Lulu câest trop bien quâil soit ici parce quâil met de lâanimation ça fait des rĂ©unions tous les jours. Quand il fait beau câest blindĂ©â client de Lulu.
Thierry (ancien postier) Je connais tout le Dans le Bourg dâAval, monde dans le Bourg. il y a beaucoup dâentraide. Avec mes voisins, on sâoccupe dâun petit jardin.
Floriane (habitante depuis 20 ans)
es nouveaux arrivants aiment CouĂ«ron pour sa proximitĂ© Ă la oire. CouĂ«ron, on est Ă la mer, il y a une appartenance Ă la âest la Loire. Loire. La premiĂšre chose que je voulais faire, c'Ă©tait de rebaptiser la ville CouĂ«ronsur-Loire.
té e e.
s e .
Patrick Naizin
Pierre (habitant du Bourg dâaval)
Didier de la médiathÚque
KĂ©vin
(nouvel arrivant)
(Habitant depuis 22 ans) La âmaison en plastiqueâ, Câest vraiment un dĂ©lire de lâarchitecte.
Jâai fait partie J'ai montĂ© une dâune liste liste Ă©lectorale. Ă©lectorale.
(Adjoint Ă lâurbanisme)
Les ZAC, je ne connais pas un CouĂ«ronnais qui aime Pour ces nouvelles ça. constructions, bravo, lâarchitecte sâest fait plaisir!
DOMINIQUE (Habitante depuis cinq générations)
Nous allons créer des aires d'accueil pour les gens du voyage. Je travaille avec des enfants roms.
Yannick
Il faut du temps pour faire des choses avec eux mais le lien câest Ă toutes les Ă©chelles.
ne
Quentin
is 4 ans)
(membre de lâAJAM)
Je vais manger chez lui assez souvent. Y a plein de kebab comme la âCab Ă Luluâ. Tout le monde vient manger ici : des ouvriers, des lycĂ©ens, des banquiers,...
Lulu (baraque Ă frite)
Dâautres rencontres nous ont marquĂ©s, comme celle de la JAM (Jardin AnimĂ© des Marais), une association qui utilise le âjardinage comme prĂ©texte pour renforcer le lien entre les personnesâ. Ils sont actuellement en train de construire leur lieu de rencontre Ă la lisiĂšre des marais. âla JAM ensemence de nombreux autres lieux comme les cours dâĂ©coles qui se transforment en potager, en lieu de vie, de rencontre. On travaille aussi avec les agriculteurs en faisant connaĂźtre leurs activitĂ©s aux habitants, pour quâil y ait du lienâ. DerriĂšre ces visages, ces actions, il y a une rĂ©elle volontĂ© de retisser le territoire autour du lien social. âla vertu urbaine, lâurbanitĂ© est la construction collective de relations socialesâ. Henri Lefevre. Ces attitudes habitantes envers leur territoire exprime donc un degrĂ© dâurbanitĂ© important, que nous percevons comme une vĂ©ritable force pour Ă©laborer la ville de demain.
Alors les marais sur le plan affectif, câest vraiment un (Agriculteur) lieu qui me plaĂźt beaucoup. La majoritĂ© de lâannĂ©e, mes vaches sont dans les marais. LâAJAM travaille dans les marais. Le marais, câest dangeureux, je nây vais jamais.
RĂ©gine (habitante dâorigine polonaise) On se retrouvait au bal. Les bals, câĂ©tait quelque chose. Ah, si on regardait les polonaises, gare Ă 36 la castagne.
Wasyl dit Piste-A-Poux (habitant dâorigine ukrainienne)
Carlos
(habitant dâorigine espagnole)
37
UNE ESCALE A COUĂRON SâANCRER
le passage dâun bateau un dimanche aprĂšs-midi est un Ă©vĂšnement pour tous, le temps sâarrĂȘte 38
LANCER LE DEBAT Les
rencontres
ATELIER PUBLIC
Partageons
sur couĂron du 4 au 8
novembre 2015
IL PARAIT QUE ... Couëron est un village des bords de Loire
fortuites,
entretiens longs ou moments intenses effectués lors de nos
Partageons
sur couĂron
ATELIER PUBLIC du 4 au 8 novembre 2015
arpentages, nous ont permis dâĂȘtre plus proche de ce que
IL PARAIT QUE ...
veut dire âhabiter Ă CouĂ«ronâ.
Couëron est au bord de la mer
Pour continuer Ă saisir ce sens, nous sommes entrĂ©s en immersion durant cinq jours en organisant des ateliers publics sur le terrain. Lors de nos rencontres avec les habitants, notre attention sâest arrĂȘtĂ©e sur des points sur lesquels les discours divergeaient. Nous nous sommes appuyĂ©s sur ces Ă©lĂ©ments pour tenter de lancer le dĂ©bat et inciter les habitants Ă prendre position et se rĂ©pondre. Pour cela, nous avons voulu interpeller en utilisant un mode dâexpression que nous avions prĂ©alablement dĂ©couvert lors de nos premiĂšres rencontre : la rumeur. A CouĂ«ron, les gens parlent et les nouvelles vont vite, trĂšs vite. âil parait que âŠâ
le dĂ©bat. Il sâagissait Ă©galement de questionner Ă nouveau CouĂ«ron sur certaines Ă©vidences que nous avions dĂ©jĂ commencĂ©es Ă dĂ©construire. Les cartes postales et des affiches ont Ă©tĂ© distribuĂ©es dans les boutiques et Ă©quipements de la ville. Ainsi que dans quelques boites aux lettres individuelles.
Le mot rumeur vient du latin ârumorâ qui signifie âbruit vague, bruit qui court, nouvelle sans certitude garantieâ. La rumeur est sans doute le plus vieux mĂ©dia du monde. Pour communiquer cet atelier public, affiches et flyers sous formes de cartes postales ont Ă©tĂ© utilisĂ©s. Chacune avait une phrase dâ accroche et une photo en dĂ©calage afin de stimuler
La distribution des tracts a Ă©tĂ© une Ă©tape clĂ©. En effet, ce fut lâoccasion dâinviter un passant qui ne nous 39
emporter la carte chez soi et commencer à discuter pour venir ensuite poursuivre le débat
promettait pas forcĂ©ment de venir mais au moins dâessayer, ou bien dâobtenir nos premiers Ă©changes sur les comptoirs des commerçants qui en voyant nos cartes postales dĂ©clenchaient dĂ©jĂ le dĂ©bat. Dans nos arpentages nous dĂ©couvrions des lieux et des personnes comme le relais-mairie de la ChabossiĂšre, par exemple, invisible Ă nous jusquâalors, Pousser la porte nous a permis de faire la connaissance de son employĂ©e. Nous nous sommes assis
plusieurs heures pour discuter et dĂ©couvrir plein de nouvelles choses sur ce quartier de la ville. âCâest convivial ici, on peut discuter autour de cette table, souvent les gens restent comme vous. Jâai aussi un rĂŽle dâassistante sociale, jâĂ©coute, jâaime beaucoup ça.â Au delĂ dâun simple mĂ©dia ce moment fut un vĂ©ritable outil de reconnaissance auprĂšs des CouĂ«ronnais. 40
DES LIEUX, DES PERSONNES, DES ĂCHANGES A CouĂ«ron, encore une fois nous avons Ă©tĂ© guidĂ©s. Lors de notre
premier itinĂ©raire nous a Ă©tĂ© Ă©mis lâidĂ©e du centre socio-culturel pour notre atelier. Ici câest un peu la ville idĂ©ale, toutes les portes se sont ouvertes Ă nous.
Nous avons dĂ©cidĂ© de contacter la municipalitĂ© pour se faire connaĂźtre, et prĂ©senter notre dĂ©marche. Cette volontĂ© Ă Ă©tĂ© prĂ©cĂ©dĂ©e par la rencontre fortuite avec lâadjoint Ă lâurbanisme Patrick Naizain. TrĂšs intĂ©ressĂ© par notre dĂ©marche, il donnait son accord pour organiser les ateliers publics dans une salle municipale mais nous soumettais plutĂŽt de trouver un lieu sans attache politique afin de favoriser une certaine libertĂ© de parole. La maire, rencontrĂ©e plus tard, sâest elle aussi montrĂ©e enthousiaste et nous a trĂšs bien accueillis.
deux bourgs distincts, nous nous sommes trĂšs vite posĂ© la question de la pertinence dâun atelier fixe. En effet, nous avions peur de rĂ©colter des paroles dâhabitants que dâun pĂŽle de la commune. Câest pourquoi, nous avons amĂ©nagĂ© un quartier gĂ©nĂ©ral fixe pendant deux jours au centre socio-culturel Pierre Legendre Ă CouĂ«ron-bourg puis nous nous sommes dĂ©placĂ©s. Sur les deux marchĂ©s de la ville mais aussi devant la mĂ©diathĂšque et sur les bords de Loire. Pour les ateliers mobiles, un barnum nous a trĂšs facilement Ă©tĂ© prĂȘtĂ© par la mairie. Pour lâatelier fixe, aprĂšs vĂ©rification des disponibilitĂ©s, nous avons Ă©tĂ© invitĂ©s Ă investir le forum, lieu central du bĂątiment.
Le choix du lieu Par lâĂ©tendue du territoire, avec ces
41
assez Ă©mancipateur en ce quâil nous permettait de sortir du cadre pĂ©dagogique, nous a aussi permis de se fĂ©dĂ©rer collectivement. Ces cinq jours nâĂ©taient pas seulement lâatelier mais aussi un moment que lâon partageait Ă quatre, qui nous a rĂ©unis autour de dĂ©bats parfois houleux sur lâarchitecture, la ville, notre futur. Les ateliers continuaient le soir en rentrant chez nous autour de table de discussions et de feuilles de papiers griffonnĂ©es qui ont Ă©tĂ© de bons supports pour synthĂ©tiser les journĂ©es.
Par ailleurs, le centre socio-culturel a Ă©tĂ© intĂ©ressĂ© par notre dĂ©marche car il se trouve actuellement dans lâĂ©laboration de son projet social quâil renouvelle tous les quatre ans afin dâavoir lâagrĂ©ment de la CAF et ainsi obtenir des subventions. Ce projet consiste Ă comprendre les besoins et dĂ©sirs des habitants inscrits ou non au centre pour ensuite proposer un panel dâactivitĂ©s qui leur correspond. Ainsi, notre volontĂ© dâatelier permettait au centre de commencer Ă rĂ©colter des informations. Dans cette relation dâĂ©change, nous avons Ă©tĂ© invitĂ©s Ă partager notre expĂ©rience et nos premiĂšres analyses suite Ă nos ateliers publics lors dâune rĂ©union devant les membres du centre socioculturel. Nous sommes amenĂ©s Ă poursuivre cet Ă©change suite Ă lâĂ©criture de ce mĂ©moire.
Cet atelier public a Ă©tĂ© trĂšs riche, beaucoup dâhabitants se sont prĂȘtĂ©s au jeu. âApparemment vous avez fait de lâeffet.â nous a Ă©crit Dominique dans un sms suite aux ateliers.
Se poser des questions et ĂȘtre Ă lâĂ©coute Ce moment nous a permis de prendre une posture dâĂ©coute, pour recevoir les rĂ©cits, les Ă©motions, les souvenirs des habitants sur leur territoire. Beaucoup passaient sans avoir la volontĂ© de livrer Ă©normĂ©ment mais finissaient parfois par rester plus dâune heure en notre compagnie. Chacune des rencontres fut singuliĂšre, tant de rencontres nous ont plongĂ©s en Ă©tat dâeffervescence oĂč nous avions le sentiment de progressivement habiter le territoire et dâacquĂ©rir une connaissance plus fine bien que restante subjective. Le temps des ateliers publics a Ă©tĂ© une expĂ©rience intense de notre immersion dans le territoire. Un temps dâarrĂȘt nĂ©cessaire, qui a marquĂ© une Ă©tape dans notre rĂ©flexion et surtout une opportunitĂ© de se poser des questions. Ce moment
42
Les dispositifs des ateliers
baladaient. De la mĂȘme maniĂšre, le hors-cadre Ă©tait posĂ© pour Ă priori ne pas ĂȘtre rempli, car nous attendions des lieux spontanĂ©s et inattendus au sein de la commune.
Ces moments de nĂ©gociations ont avant tout permis dâĂ©tablir un dialogue commun, un vĂ©ritable espace dâĂ©changes avec ceux qui pratiquent et connaissent le territoire. 1. CouĂ«ron, on y passe⊠et ⊠on y reste Deux premiers ateliers ont Ă©tĂ© pensĂ©s de maniĂšre complĂ©mentaire : Ă lâimage des discours binaires que nous avions dĂ©celĂ©s, entre une vie Ă grande Ă©chelle et une vie locale. Le premier atelier visait Ă questionner les trajets quotidiens Ă grande Ă©chelle. Nous cherchions Ă infirmer ou confirmer la problĂ©matique de la citĂ©-dortoir. Il se prĂ©sentait sous la forme dâune carte Ă lâĂ©chelle mĂ©tropolitaine avec un cadre dĂ©sopacifiĂ© pour sous-entendre le horscadre sur lequel les participants dessineraient probablement la plupart de leurs trajets.
Cet atelier a surtout Ă©tĂ© un support pour parler spontanĂ©ment des pratiques. Nous lâavons fait Ă©voluer lors des ateliers itinĂ©rants, en le transformant en une question: âCouĂ«ron, la ville idĂ©ale?â. Un dĂ©bat sâest alors construit entre les habitants, ville idĂ©ale pour certaines tranches dâĂąges de la population elle lâest moins pour dâautres, notamment pour les jeunes.
2. CouĂ«ron demain Lâun des ateliers se composait dâune grande feuille blanche sur laquelle les habitants pouvaient Ă©crire, dessiner et coller des images. Il sâagissait de les questionner sur lâavenir de CouĂ«ron, comme ils lâimaginaient ou ce quâils souhaitaient pour leur ville. Les gens pouvaient rajouter des Ă©lĂ©ments ou bien rĂ©pondre aux souhaits des premiers habitants.
Le second atelier quant Ă lui, interrogeait les lieux de vies Ă lâĂ©chelle locale. Les participants indiquaient sur une carte Ă lâĂ©chelle de la commune les endroits oĂč ils faisaient les courses, oĂč ils se
Ainsi, Ă lâissue de la semaine, se sont engagĂ©es sur cette feuille de papier, des discussions. Les personnes ont 43
3. Suivez le guide Le troisiĂšme atelier Ă©tait intitulĂ© âSuivez le guide - Moi Ă©tranger, oĂč mâemmĂšnerais tu Ă CouĂ«ron? â. Sur une feuille blanche, les participants avaient la possibilitĂ© de dessiner ou bien dâĂ©crire sous forme de liste les endroits quâil Ă©tait important pour eux de nous montrer. Les enfants ont Ă©tĂ© les premiers intĂ©ressĂ©s par cet atelier, nous racontant oĂč ils se posaient. La rencontre marquante avec Ilhan et ses copains, jeunes CouĂ«ronnais de 12 ans nous a appris quâils prenaient le bus simplement pour faire des allers-retours sans se soucier de la destination mais pour ĂȘtre au chaud, nous racontant oĂč ils allaient jouer, quâils aimaient la Loire, acheter des bonbons au Carrefour Market.
fini par se rĂ©pondre entre-elles, complĂ©tant les dires de chacun acquiesçant ou contredisant ce qui venait dâĂȘtre Ă©crit. Ce qui est ressorti principalement est que lâavenir de CouĂ«ron sâest rĂ©vĂ©lĂ© ĂȘtre source dâinquiĂ©tude.
Cet atelier a donc permis de faire Ă©merger un dĂ©bat, une volontĂ© inconsciente ou latente de la part des habitants dâengager une discussion autour de la problĂ©matique que nous avons nommĂ©e : âNantes, la mĂ©tropole et nousâ (en clin dâoeil au dĂ©bat âNantes, la Loire et nousâ proposĂ© par la MĂ©tropole en 2015). Cela marque une envie des habitants dâĂȘtre intĂ©grĂ©s dans le dynamisme dâĂ©volution de leur cadre de vie, dâĂȘtre considĂ©rĂ©s comme des acteurs inhĂ©rents aux prospectives territoriales.
44
4. La boĂźte Ă rumeurs Sur une table, nous avions crĂ©Ă© une boĂźte avec une fente Ă travers laquelle les habitants pouvaient y glisser des rĂ©ponses aux flyers âIl paraĂźt que âŠâ. Nous les invitions Ă se positionner par rapport aux rumeurs que nous avions lancĂ©es et Ă nous raconter dâautres histoires. Certaines rĂ©ponses ont Ă©tĂ© surprenantes. A la rumeur âCouĂ«ron, câest dynamiqueâ, beaucoup de personnes ont soulignĂ© le manque de commerces mais ont notĂ© le dynamisme associatif. 5. Stop-bac Le bac, lieu de fascination pour tous, autant pour nous qui a Ă©veillĂ© notre imaginaire dĂšs le premier jour, que pour les habitants qui nous en parlaient toujours avec des Ă©toiles dans les yeux. Ce lieu Ă©merveille parce quâil est un Ă©vĂšnement dans le quotidien des gens. Beaucoup le prennent comme alternative au pont de ChevirĂ©: âprendre le bateau relaxe et est un moment de pause dansVers lala Mer Saint-Michel journĂ©e, on prĂ©fĂšre ça plutĂŽt que La Bernerie Pornic dâĂȘtre coincĂ© dans les bouchons Ă ChevirĂ©â couple habitants du Pellerin. Au-delĂ de savoir oĂč les personnes venaient et dans quel but, nous Ă©tions intriguĂ©s de jouer avec eux ce moment dâattente que provoque le
45
bac. Une longue file patiente chaque soir avant de monter. Nous avons organisĂ© une performance sous la forme dâun stop, une expĂ©rience dans lâexpĂ©rience : âvous avez le temps dâattendre, et si nous prenions ce temps ensemble?â proposionsnous. Des portiĂšres se sont ouvertes, et nous avons partagĂ© ce temps de traversĂ©e avec des personnes. Le but Ă©tait de susciter lâimaginaire par une Saint-Etienne-de-Montluc discussion banale: âmerci de nous Super U avoir pris, il fait vraiment froid dehors, mais ce bac câest vraiment super, vous en pensez quoi?â IntriguĂ©es Balade du dimanche autour du lac de Beaulieu par notre prĂ©sence, les personnes qui avaient acceptĂ© se Centre sontSocio-Culturel prises Pierre Legendre Carrefour market au jeu et ont dĂ©crit leurs sensations Promenade dans les marais Audubon de ce moment. Nous sommes CouĂ«ron bourg La Ch mĂȘme montĂ©s dans la cabine du MarchĂ© jeudi Sup bateau oĂč les marins nous ont racontĂ© leur quotidien quelque peuBords de Loire Cap vers le Sud monotone Canal de la mais MartiniĂšre âaucune traversĂ©e I ne se ressemble avec les marĂ©es et le Mar bord passage dâautres bateaux, Le Pellerin mĂȘme si le MarchĂ© dans les Halles le samedi temps peut paraĂźtre longâ.
VILLE TERRITOIRE Avec la diminution de lâattraction locale en terme de travail et de commerces, les habitants ont tissĂ©, au fil du temps, une vie dispersĂ©e. Une attractivitĂ© mitigĂ©e LâamĂ©nagement des quais de Loire en 2004 et la rĂ©habilitation du site de la Tour Ă Plomb ont crĂ©Ă© des points dâattractivitĂ©. Il nâest donc pas surprenant de voir des personnes, provenant dâautres communes, venir se balader sur les bords du fleuve le week-end. Cependant, les gens viennent mais ne font que passer: âon ne monte pas dans la ville quand on vient se balader lĂ , il nây a rien dans le bourgâ promeneurs sur les quais.
A travers les ateliers, CouĂ«ron nous est apparue comme un territoire qui se pratique Ă grande Ă©chelle. Lâattraction de Nantes est forte notamment concernant lâemploi et les commerces. Les mouvements pendulaires sont intenses. Au quotidien le territoire est donc constamment empruntĂ©. Aussi par les habitants de la rive sud qui prennent le bac pour aller travailler sur Nantes.
Atlantis
habossiĂšre
per U
Porte vers le sud La ville est en effet trĂšs connectĂ©e au sud grĂące Ă ce bac qui permet en moins deOrvault 20 minutes de traverser la Loire. Cet espace est dĂ©crit par les habitants Ă travers les lieux de loisirs Saint-Herblain comme le Canal de la MartiniĂšre propice aux balades ou la mer vers Pornic. La notion de proximitĂ© sâĂ©tend alors bien au-delĂ de la mĂ©tropole nantaise.
Ville traversĂ©e CouĂ«ron aurait pu devenir un cul-desac car elle est bornĂ©e par la Loire et les marais. Cependant, la connexion au sud par le bac la dĂ©senclave. Les pratiques sây effectuent Ă lâĂ©chelle mĂ©tropolitaine dans une relation Ă©conomique et plus largement Ă une Ă©chelle estuarienne dans une relation de loisirs.
Nantes Saint-Etienne-de-Montluc Super U
rché le dimanche en d de Loire
Orvault
Atlantis
Indre
Travail
Saint-Herblain Balade du dimanche autour du lac de Beaulieu
Commerces MarchĂ© ActivitĂ© du centre Aux bords de lâeau
Promenade dans les
marais Audubon
Promenades
Centre Socio-Culturel Pierre Legendre Carrefour market
Couëron bourg
La ChabossiĂšre
Marché jeudi
Super U
Nantes Bords de Loire
Canal de la MartiniĂšre
Cap vers le Sud
Indre Marché le dimanche en bord de Loire
Le Pellerin Marché dans les Halles le samedi
Vers la Mer Saint-Michel La Bernerie Pornic
Travail Commerces Marché
46
ActivitĂ© du centre Aux bords de lâeau Promenades
PRATIQUES COUĂRONNAISES Les sphĂšres dâinfluences de cette vie satellite se rĂ©duisent pour les moments de dĂ©tente. La commune se pratique alors principalement Ă pied autour dâespaces de proximitĂ©s. Des repĂšres communs LâĂ©tendue du territoire des habitants, se concentre particuliĂšrement dans un rapport incontournable Ă lâeau. Il est important dans le quotidien des CouĂ«ronnais surtout pour les moments de dĂ©tente et de loisirs. La plupart des habitants font leur jogging ou se baladent autour du lac de Beaulieu ou sur les bords de Loire. Beaucoup traversent le fleuve pour aller au Canal de La
MartiniĂšre. Et certains prennent simplement le bac pour faire des allers-retours. La Tour Ă Plomb et le lac de Beaulieu sont des Ă©lĂ©ments marqueurs autant pour les habitants que pour les passants. Ils sont inscrits comme participants de lâidentitĂ© de CouĂ«ron. Le besoin dâespaces verts âLes moments de pause manquentâ, âpas assez de bancsâ, dââespaces
Cette carte a été déduite des paroles récoltées lors de nos rencontres. 47
remarquable que la maison dans lâeauâ pĂšre de KĂ©vin, rencontrĂ© au club de billard.
vertsâ. Cette derniĂšre remarque nous a beaucoup surpris sachant que la ville est entourĂ©e de champs, de sentiers, ... Les habitants regrettent en fait plus de lieux de rencontres associĂ©s Ă des lieux de verdures. Cependant, certains pratiquent les espaces ouverts des champs et des marais par les nombreux chemins de randonnĂ©es : âon vient de faire 2h de balade Ă pied sans prendre une seule route avec des voituresâ habitants rencontrĂ©s un dimanche aprĂšsmidi. CouĂ«ron est alors pratiquĂ©e Ă pied, certaines personnes nous ont expliquĂ© quâelles avaient lâhabitude de se balader dans la ZAC Ouest Centre-ville. âAvec ma femme on continue de rejoindre les marais par lĂ , mĂȘme si il y a la ZAC, on garde des repĂšres avec la grange en pierre quâils ont conservĂ©e, mais on passe toujours devant la maison en plastique, un dĂ©lire dâarchitecte qui nous fait marrer et qui est plus
u li
ea
lac de b
Court-circuits Ces pratiques marquent aussi des contre-usages dans le territoire. Les personnes Ă la mobilitĂ© rĂ©duite, qui sont aussi les personnes ĂągĂ©es, parcourent la ville principalement Ă pied ou en transport en commun et vivent Ă une Ă©chelle plus rĂ©duite. Leur maison, leur rue et le quartier prennent beaucoup dâimportance. Les habitants des hameaux, isolĂ©s, ont des tactiques similaires pour ĂȘtre indĂ©pendants., Ils sâorganisent en association de quartiers pour se fĂ©dĂ©rer entre-eux, du fait de leur difficultĂ© de se joindre Ă la vie locale des centres urbains. Si la commune de CouĂ«ron garde encore des pratiques locales, elles rentrent en concurrence avec une vie mĂ©tropolitaine Ă plus grande Ă©chelle qui dĂ©lie et dissout les rencontres de proximitĂ©. Le rapport de complĂ©mentaritĂ© entre les deux Ă©chelles entre en frictions/tensions.
eu
48
49
POINTS DE FRICTIONS MISE EN DĂBAT
au loin le pont de ChevirĂ© Ă©merge de lâhorizon 50
Lâestuaire de la Loire un chapelet dâĂźles
UNE HISTOIRE METROPOLITAINE La situation de CouĂ«ron sur le fleuve fut constamment une source de richesse, mais aussi de convoitise Ă lâĂ©chelle dâune mĂ©tropole.
IV av JC Couëron est la grande place commerciale gauloise sur le Liger
Au dĂ©part, CouĂ«ron est un petit village des bords de Loire avec une culture et des mĂ©tiers liĂ©s au fleuve: artisans, pĂȘcheurs, gabariers, tonneliers, marchands et nĂ©gociants peuplaient la ville. Câest en 1620 que CouĂ«ron, avec sa rade bien abritĂ©e du Port-Launay devient lâun des avantports de Nantes. Elle est dĂ©chue de son rĂŽle au profit de Paimboeuf plus proche de lâembouchure de lâestuaire. Avec les travaux de chenalisation du fleuve, les ingĂ©nieurs nantais destituent la ville de son rapport au fleuve. Câest au XIXĂšme siĂšcle que le dĂ©veloppement de la ville sâindustrialise en sâinscrivant dans le complexe industrialo-portuaire de lâestuaire de la Loire. La ville sâagrandit avec les maisons-Castors ou les constructions pavillonnaires qui ont connu un essor dans les annĂ©es 1960. Aujourdâhui, lâextension de la ville se poursuit, CouĂ«ron est un lieu de rĂ©sidence recherchĂ© pour sa proximitĂ© Ă Nantes. Ainsi lâurbanisation se pose principalement sur une typologie rĂ©sidentielle. Cette vocation questionne lâĂ©volution de CouĂ«ron, comme expansion spatiale de Nantes dans un rĂŽle de couronne pĂ©ri-urbaine.
Un traitĂ© du comm Castille, les pĂȘcherie essor considĂ©rable, le
1620 CouĂ«ron devient un des avantports de Nantes une relation dâappartenance
Couëron
1750 Le pouvoir des ingénieurs Nantais Couëron voit son rapport à la Loire modifié.
Couëron devient la banlieue de Nantes ?
Cette cartographie illustre Ă travers des anecdotes, des faits politiques, ce rapport de frictions entre des intĂ©rĂȘts locaux et ceux de la mĂ©tropole.
Coueron avant port de Nantes
1620 51
Forges de Basse indre
1822
Comblement de lâile neuve port launay
1837
Usine de Coueron
1860
Couëron
1400 Charles Blois interdit «que lâon fasse forteresse en notre ville de Coyron» car les bourgeois nantais craignaient que de telles forifications puissent ĂȘtre conquises et se retourner contre eux..
1399 merce fut passé avec le roi de es de la basse Loire prirent un es lamproies étaient réputées...
1500 Anne de Bbretagne autorisa la destruction des pĂȘcheries qui gĂȘnaient la navigation, au dĂ©triment des pĂȘcheurs de CouĂ«ron
1860 Construction de lâusine de CouĂ«ron au lieu dit du « Bourget» Ă lâemplacement du port ensablĂ© de la canche un endroit ou sâassemblait la population couĂ«ronnaise.
1789 Il rÚgne encore une forte activité, les navires embarquent ou débarquent les marchandises, le fleuve est silloné sans relùche, les canots et les gabares descendent le courant.
1866 CONTESTATIONS Les ingĂ©nieurs des Ponts et ChaussĂ©es proposent de complĂ©ter lâendiguement et dâaugmenter la taille de lâĂźle Neuve. Le Port Launay est dĂ©finitivement coupĂ© du fleuve. Les intĂ©rĂȘts couĂ«ronnais sont secondaires par rapport aux intĂ©rĂȘts du commerce maritime nantais. «Il a bien fallu que CouĂ«ron en prit son parti»
Couëron
Tour Ă plomb
1877
Association avec lâETS Pongibaud
Les prĂ©mices dâune mĂ©tropole Groupe urbain de 15 communes
ACRN
1879
1961
1967
Fermeture de lâusine Pontgibaud
1980 52
Usine Arc en ciel
Communauté urbaine
1994
2001
Nantes métropole
2015
UNE ĂCONOMIE EN PĂRIL Les industries pratiquement disparues posent la question du dynamisme Ă©conomique et des ressources locales du territoire. Arcelor Mittal, Arc-en-ciel, DCNS, Lambert-Manufil,⊠autant de mots qui nâont que trĂšs peu rĂ©sonnĂ© dans les paroles des habitants. Ces usines ne font plus parties du quotidien des CouĂ«ronnais. Elles ont pour nous trĂšs peu fait partie de la dĂ©couverte du territoire. En effet, un pourcentage trĂšs faible de la population locale est ouvriĂšre ou employĂ©e dans les industries qui persistent encore aujourdâhui.
importante des petites et moyennes entreprises de la commune. Seulement, son emplacement physique Ă©loignĂ© des centralitĂ©s bĂąties de CouĂ«ron ne la marque pas comme partie intĂ©grante dâune dynamique locale pour les habitants. Cela la situe plus en rapport avec la zone dâactivitĂ© dâAtlantis et donc plus rattachĂ©e Ă Nantes.
LâĂ©conomie locale se situe principalement dans la zone dâactivitĂ©s des Hauts de CouĂ«ron au nord prĂšs du pĂ©riphĂ©rique nantais. Cet espace concentre une part
DerriĂšre les murs, ça fume toujours âquand une industrie fumait câest que tout allait bien, il y avait du dynamisme et de lâemploiâ nous raconte un habitant. Aujourdâhui les usines ne fument plus mais elles fonctionnent quand mĂȘme. Nous avons rencontrĂ©
certaines machines de lâĂ©poque sont encore utilisĂ©es
derriĂšre la porte on fabrique des vis et des pointes
des bùtiments vétustes, patrimoine industriel
les cheminées : seul indice de la présence des usines
53
cependant fragile. âAujourdâhui il nây a plus quâun agriculteur pour cent hier, les fermes sont plus grandes, autour de la mienne il y en avait treize maintenant je suis tout seulâ nous dit lâun des agriculteurs de la commune.
GrĂ©gory qui travaille Ă lâusine Lambert-Manufil. Il nous a emmenĂ©s parcourir son usine. SituĂ©e dans les anciens bĂątiments de TrĂ©fimĂ©taux, encore debout malgrĂ© lâĂ©tat quelque peu vĂ©tuste, lâespace ne manque pas. âOn pense Ă diversifier notre activitĂ© pour continuer Ă exister mais la concurrence est rudeâ nous dit GrĂ©gory. Cette visite a confirmĂ© la fragilitĂ© et le dĂ©tachement de lâĂ©conomie locale au vu de la ville.
GrĂące Ă la qualitĂ© particuliĂšre des terres marĂ©cageuses, lâagriculture est prĂ©servĂ©e dâune production vertueuse, sans engrais chimiques. Les alluvions du fleuve qui sont dĂ©posĂ©s sur cette terres lâenrichissent tellement que tout au long de lâannĂ©e, lâherbe pousse. Il ne sert Ă rien dâajouter quoi que ce soit, la production intensive viendrait dĂ©truire lâĂ©cosystĂšme de ces espaces. Le rapport Ă lâeau constitue encore aujourdâhui une vĂ©ritable ressource pour prĂ©server quelques activitĂ©s et un dynamisme local. Cependant leur ancrage social au terrain sâappauvrit du fait de leur manque de visibilitĂ© et dâinteractions Ă la vie locale.
âAujourdâhui les gens ne voient pas quâil y a une usine ici, les hauts murs ne laissent pas deviner ce quâil se passe derriĂšre, on voit simplement les cheminĂ©es, notre production est silencieuse, les machines ne sâentendent pas quand on ferme les portes, ce qui fait que lâon est invisible au yeux des habitants qui ne remarquent pas notre prĂ©senceâ. Un artisanat en voie de disparition Lâartisanat persiste avec la construction de bateaux en bois des chantiers Fouchard situĂ©s dans les marais, mais les normes europĂ©ennes rĂ©duisent leur marchĂ©, et ne leur permettent que dâeffectuer des rĂ©habilitations. Les pĂȘcheurs quant Ă eux ne sont plus que six. âmoi jâai vendu mon bateau Ă un gars de Paimboeuf yâa quelques annĂ©esâ Roger, ancien pĂȘcheur dâanguilles. Cependant les chantiers navals dâAlu Marine sont venus sâinstaller sur la zone du Port Launay depuis quelques annĂ©es et profitent de cet emplacement privilĂ©giĂ© sur la Loire. Lâagriculture quant Ă elle est considĂ©rĂ©e comme ressource future Ă prĂ©server pour une alimentation de proximitĂ© Ă lâĂ©chelle de la mĂ©tropole. Sa qualitĂ© dâagriculture raisonnĂ©e (sous forme de petites exploitations Ă production Ă©cologique) est
le port de Couëron
les bĂȘtes sont encore dehors au mois de dĂ©cembre
54
VISION MĂTROPOLITAINE Aujourdâhui encore CouĂ«ron
est trÚs liée, au niveau de sa politique, à la métropole
nantaise, inscrite dans le SCOT Nantes/Saint-Nazaire, son PLU va devenir mĂ©tropolitain. Lâavenir sâengage en commun, le territoire mĂ©tropolitain Nantes/SaintNazaire envisage lâaccueil de 300000 nouveaux habitants dâici 2030. La construction dâun PLU-MĂ©tropolitain pour lâagglomĂ©ration nantaise en 2017, rassemble ses 24 communes et sâĂ©tablit dans la volontĂ© dâaccueillir ces nouveaux habitants (+100 000 habitants). Dans le respect de ces volontĂ©s politiques, la commune se place donc dans une perspective de croissance dĂ©mographique qui entraĂźne un besoin de logements.
SCoT Pays de Retz
Nantes MĂ©tropole
âreconstruire la ville sur ellemĂȘmeâ câest-Ă -dire de densifier les centralitĂ©s bĂąties dĂ©jĂ existantes. La construction de la ZAC Ouest Centre-Ville a reproduit un schĂ©ma dâurbanisation mitĂ© (peu dense) qui posait dĂ©jĂ problĂšme avant âil convient de ne pas se tromper pour les prochains projetsâ nous dit lâadjoint Ă lâurbanisme. La construction dans les hameaux quant Ă elle est trĂšs limitĂ©e, afin de prĂ©server les entitĂ©s dĂ©jĂ formĂ©es et conserver ainsi lâespace agricole, grenier de la mĂ©tropole. Les textes exacerbent une opposition ville/campagne mais sans jamais parler dâun quelconque dialogue entre ces entitĂ©s, les enfermant dans leurs limites. âOn se sent la zone de
Le bon Ă©lĂšve de la mĂ©tropole La proximitĂ© politique de CouĂ«ron avec Nantes (lâancien maire PS JeanPierre Fougerat a Ă©tĂ© le supplĂ©ant de Jean-Marc Ayrault) fait de la commune le âbon Ă©lĂšveâ de la mĂ©tropole, qui respecte le âquotaâ1 des 174 nouveaux logements par an Ă©tablis par la politique mĂ©tropolitaine et inscrit dans le PLU de la commune. Pour y rĂ©pondre, la commune urbanise des zones sous la forme de ZAC. Une urbanisation contrĂŽlĂ©e Les Ă©lus locaux parlent aussi de
1 nommé ainsi dans le PADD et le PLU 55
C.C Coeur dâEstuaire
Nantes MĂ©tropole
non-droit, Ă lâĂ©cart de la communeâ nous dit un habitant des hameaux.
et de promenade. Un dynamisme local Ă renforcer ? Le rapport Ă la densitĂ© est aussi liĂ© Ă la diversitĂ©, âpromouvoir une urbanisation diversifiĂ©e ajoutant des commerces et des Ă©quipementsâ selon le PLU communal. Cependant cette volontĂ© nâest pas clairement dĂ©finie, dâautant que les commerces dĂ©jĂ existants sâessouflent. La proximitĂ© Ă Nantes quant Ă elle est renforçée avec la crĂ©ation dâun nouveau pĂŽle gare Ă la ChabossiĂšre et la restructuration de lâactuelle gare de CouĂ«ron-bourg. Les volontĂ©s politiques tendent Ă reproduire un schĂ©ma dĂ©jĂ en place de dĂ©pendance Ă lâattractivitĂ© mĂ©tropolitaine.
Lâimage de marque des marais Les espaces de zones humides sont protĂ©gĂ©s par les rĂ©glementations environnementales (Natura 2000, ZNIEFF). Cet espace abrite une sorte de rĂ©seau de promenade permettant dâaccueillir un projet de Loire Ă VĂ©lo nord soutenue par la communautĂ© de commune Coeur dâEstuaire. Cet itinĂ©raire bis par rapport Ă celui existant, traverserait les marais et semble ĂȘtre stratĂ©gique pour la reconquĂȘte et la valorisation paysagĂšre de ce territoire. Rebaptiser les marais âAudubonâ il y a quelques annĂ©es, a Ă©tĂ© la premiĂšre pierre pour repenser cet espace en lieu de loisir 56
LâĂMERGENCE DâUNE PEUR La âmĂ©tropolisationâ se dĂ©finirait par la peur de lâanonymat, de
lâindividualisme, dâune perte de singularitĂ©, et dâune uniformisation des modes de vies sur le territoire. maisons oĂč lâon sent quâelles ont une histoire disparaissentâ parole dâatelier public. Les habitants sâinquiĂštent de la pĂ©rennitĂ© des singularitĂ©s. Les nouvelles pratiques mĂ©tropolitaines, oĂč les habitants nâhabitent pas la ville mais un territoire Ă grande Ă©chelle, fragilisent la vie locale. Beaucoup sont inquiets de ne pouvoir maĂźtriser lâĂ©volution de leur ville : âon ne sait pas si on pourra continuer Ă accueillir comme on lâa toujours fait, on a moins
Les habitants sont pris entre la volontĂ© de se rapprocher de plus en plus de la grande ville (et dâaccĂ©der Ă ses services, ses emplois) et celle dâĂȘtre proche dâun paysage de marais, de champs: âla ville Ă la campagneâ. Cet entre-deux est mis en bascule aujourdâhui notamment par lâurbanisation intense de la ville. âLes immeubles poussent de terre, on rase des quartiers entiers pour construire dâautres bĂątiments. Des
collage qui est ressorti de lâatelier «CouĂ«ron demain» :
57
de moyens pour permettent aux gens de se rencontrerâ sâinquiĂšte un membre du centre Pierre Legendre. Câest une grande inquiĂ©tude de ne pas pouvoir rĂ©pondre Ă lâaccueil des nouveaux arrivants et de ne pas leur offrir une place âje nâai pas le temps de connaĂźtre mes voisins, ils changent trop souventâ Jocelyne. Enfin une phrase marquante est ressortie : âon se fait mĂ©tropoliserâ dĂ©crit la JAM. Comme une sorte dâenvahissement incontrĂŽlĂ©, les habitants ont la sensation de subir plus que dâĂȘtre intĂ©grĂ©s dans les changements du territoire. Cette inquiĂ©tude face au dĂ©veloppement de la ville dĂ©montre que les habitants se sentent dĂ©possĂ©dĂ©s de leur lieu de vie.
Quentin de la JAM qui sĂšme des jardins
singularitĂ©s par lâuniformisation des pratiques et vers une non reconnaissance des rĂ©cits. Des habitants qui se mobilisent Cependant lâĂ©volution de la ville et des modes de vies amĂšnent aussi Ă de nouvelles interactions. La mise en place de ventes directes ou de chantiers dâinsertions Ă la ferme par les agriculteurs offre un nouvel espace de partage entre exploitants et habitants. Ce type dâĂ©change sâeffectuent aussi par lâarrivĂ©e de jeunes associations, comme la JAM ou lâassociation JardinâĂąge qui renforce aussi des rapports de solidaritĂ© en proposant de partager des jardins privĂ©s entre ceux qui ne peuvent plus sâen occuper et ceux qui en recherchent. Dans cette volontĂ© de faire lieu pour faire lien, de nouveaux espaces de vies sociales se crĂ©ent avec la CabâĂ âLulu qui rallie ouvrier, jeunes ou retraitĂ©s. La richesse des interactions en lien avec le territoire, persistent et montrent une volontĂ© de continuer Ă âfaire ensembleâ, le lien social apparaĂźt comme source de solution permettant la mixitĂ© des usages et des groupes. MalgrĂ© leur force et la multiplication des exemples, ces pratiques nâeffacent toutefois pas lâimpression de manque de lien dont beaucoup nous ont fait part.
Des conflits dâusages Du point de vue paysager, lâextension de la ville tend Ă recouvrir de plus en plus de terres agricoles. âLa ZAC! je nâai rien vu venir, on ne mâa pas prĂ©venu, jâai perdu plusieurs terres qui me sont nĂ©cessaires pour mes vaches, ce sont des terres de repli pour que mes troupeaux nâaient pas les pieds dans lâeau en hiverâ Yannick. De plus, lâespace rural se dĂ©finit, par une majeure partie des habitants, plus par le cadre quâil offre que par ce quâon y fait «on est venu habiter ici pour ĂȘtre au calme, proche de la campagne». Un dĂ©calage se crĂ©e entre la campagne telle quâelle est perçue et telle quâelle est appropriĂ©e par ceux qui y vivent de leur activitĂ© de production âOn essaye dâĂȘtre fair-play, quand des promeneurs se baladent dans les marais je ralentis mon tracteur, mais les gens ne comprennent pas le bruit des machines et une vache qui meugleâ. Tout cela raconte bien une inquiĂ©tude par rapport Ă lâĂ©cologie sociale du territoire, Ă une possible perte des 58
COUERON ON Y PASSE, LE TEMPS DâUN ARRET STRATEGIE GLOBALE
lâembarcadĂšre du bac devient un lieu de rencontre pour lâassociation A.L.O. (Aviron Loire OcĂ©an) 59
NĂGOCIATIONS Les rencontres et allers-retours sur le terrain, ont suscitĂ© chez nous un rapport empathique aux lieux et aux personnes, induisant un engagement. Sâengager pour nous, pour continuer Ă ĂȘtre accueillis, notre prĂ©sence nâa pas suscitĂ© lâindiffĂ©rence, il paraĂźt âquâon fait de lâeffet â. Sâengager pour cultiver cette reconnaissance de lâautre. Sâengager pour les agriculteurs de lâeau comme Yannick, qui par une pratique ancestrale, construisent un savoirfaire, gage de qualitĂ© favorisant une Ă©conomie locale. Sâengager contre lâuniformisation des modes de vies, il ne faut pas oublier les rĂ©cits singuliers comme celui dâIlhan et ses copains qui prennent le bus simplement pour se retrouver, qui dĂ©tournent les fonctions du lieu pour des usages crĂ©atifs et personnels. Sâengager pour un environnement qui change de visage chaque jour et nous transmet son histoire, sa sagesse et son savoir. Câest une apologie et une reconnaissance des marais et des marĂ©es qui nous permettent de voyager. Sâengager pour Pierre qui cultive les pieds dans lâeau, âje suis ici et pas lĂ -basâ, prendre conscience de son territoire et de sa richesse, de son caractĂšre ondulant qui nous Ă©voque la tolĂ©rance de lâautre. Alors comment projeter tout en conservant des attitudes de reconnaissance ? La rĂ©ponse pourrait ĂȘtre donnĂ©e par Lucien Kroll : âLâarchitecte ne devrait pas chercher Ă inventer, mais seulement Ă ĂȘtre Ă lâĂ©coute de la complexitĂ©â. Et donc Ă mettre en mouvement, Ă impulser, des usages nouveaux ou non. 60
AU CROISEMENT DE PĂLES ATTRACTIFS Il est nĂ©cessaire dâaccompagner CouĂ«ron comme une partie spĂ©cifique de la mĂ©tropole qui soit en mesure de conserver ses singularitĂ©s et ses richesses tout en sâadaptant aux Ă©volutions. Au bord de lâestuaire, aux abords de la mĂ©tropole Le territoire de CouĂ«ron tient une position particuliĂšre Ă lâĂ©chelle de lâestuaire. TrĂšs contrastĂ©, il se situe Ă la croisĂ©e de la mĂ©tropole et des marais. Il a donc une situation gĂ©ographique dâentre-deux privilĂ©giĂ©e. Il est aussi lâune des seules communes au bord de lâeau et trĂšs connectĂ© au sud. Ce statut particulier confĂšre Ă cette zone des forces que nous souhaitons dĂ©velopper, mais aussi des faiblesses. En effet, cet espace dâentre-deux est marquĂ© par un dĂ©sĂ©quilibre entre
les entitĂ©s : lâurbanisation de la mĂ©tropole se dĂ©veloppe et empiĂšte sur des richesses du site. Comme nous lâavons vu prĂ©cĂ©demment, câest un territoire menacĂ© par une dissolution de ses singularitĂ©s et une dĂ©pendance Ă la mĂ©tropole. LâarrivĂ©e intense de nouveaux arrivants induit une perte de contact social et un manque dâappropriation du lieu. Ceci fragilise lâĂ©cosystĂšme environnemental et social de ce milieu. La mĂ©moire et les pratiques de la rĂ©gion tendent Ă sâeffacer Ă travers une homogĂ©nĂ©isation
bord dâeau
Bac bord dâeau
61
pont de Cheviré
SAINT ETIENNE DE MONT LUC
LES HAUTS DE COUERON
LES MARAIS
SAINT HERBLAIN
NANTES
INDRE CHANTHENAY
VERS LE SUD
CHEVIRE
LE PERIPHERIQUE
Un territoire de traverses
par des habitants qui la vivent Ă grande Ă©chelle. Sa proximitĂ© Ă Nantes est un atout mais les modes de vie Ă©clatĂ©s quâelle entraĂźne dĂ©shĂ©ritent le territoire de sa vie locale. En effet, elle nâest bien souvent quâun espace de passage, entre la rive sud et nord, dont la vie locale ne tire que trĂšs peu parti. Comment penser ce territoire autrement que comme un espace de passage et de connexion ? Comment peut-il ĂȘtre envisagĂ© comme un espace de rencontre porteur de dynamique locale ?
des modes de vie et une perte de contact entre les acteurs des lieux. Aujourdâhui ces entitĂ©s sont donc dissociĂ©es, sans rĂ©el dialogue entreelles. âIl nây a de vivre ensemble que lĂ oĂč lâensemble ne se forme pas et ne se ferme pas, lĂ oĂč le vivre ensemble conteste la complĂ©tude, la fermeture dâun ensemble clos, identique Ă soi.â Jacques Derrida CouĂ«ron par sa situation, pourrait se rĂ©vĂ©ler charniĂšre entre les entitĂ©s. LâidĂ©e est de faire Ă©merger cette position gĂ©ographique comme une interface entre les systĂšmes qui se cĂŽtoient.
Une volontĂ© de faire ensemble Un autre potentiel est Ă faire valoir sur ce territoire : câest la capacitĂ© des habitants Ă se regrouper, former des associations, coopĂ©rer, rĂ©inventer de nouvelles maniĂšres de faire ensemble ou coloniser lâespace public pour rĂ©veiller des lieux en attente. Il est un atout Ă mĂ©nager pour construire la ville de demain.
Paysages traversĂ©s Par sa proximitĂ© Ă la ville-centre et lâouverture des mobilitĂ©s, CouĂ«ron est peu enclavĂ©e, trĂšs connectĂ©e. Comme nous avons pu le constater par nos premiĂšres intuitions et nos rencontres, CouĂ«ron est traversĂ©e 62
ZAC ouest centre ville
le soleil revient
passage dâune voiture
la postiĂšre passe dans la rue
ah
câe s
t la nou velle po stiĂšre, e lle
m
. tout .. du monde p ar a y l i
e rem salut Floriane ! tu tombe p la s bien ... ce
eh la
prio rité !
câĂ© t
. Salut !! ur ! pote o j n n mo bo ait
jour bon
63
radio «qui baise qui ?»
une seule personne a souvent plusieurs casqu les gens ont beaucoup de liaisons.
Lâinconscient du territoire Ce titre Ă©voque ce qui Ă©chappe aux analyses, ce qui se cache dans les espaces habitĂ©s : les relations spontanĂ©es. Nous avions rendez-vous Ă la Tour Ă Plomb afin dây retrouver Floriane, historienne et coordinatrice Ouest France. Elle voulait nous emmener sur les traces de la balade KMK (en gris). Câest un parcours commentĂ© qui a Ă©tĂ© imaginĂ© par des artistes entre le centre-bourg et la ZAC en 2015. Il avait pour objectif de susciter la relation entre ses anciens et nouveaux quartiers, par le biais de lâimaginaire, invitant Ă redĂ©couvrir ces lieux sous un autre regard. Nous lâavons donc suivi, mais lâitinĂ©raire tel quâil Ă©tait prĂ©vu nâa jamais eu lieu. Nous avons parcouru Ă peine 200 mĂštres (en noir), nous sommes allĂ©s Ă cĂŽtĂ© de lâĂ©glise et de la boulangerie. Nous nous arrĂȘtons Ă la rencontre dâune connaissance de Floriane, puis deux, puis Thierry lâancien postier qui connaĂźt tout le monde. Nous Ă©tions lĂ , sur ce trottoir sans forme, nous lançions des bonjours par-ci, des bonjours par-lĂ ... Ce fut un feu dâartifice de rencontres et de paroles. â On va essayer dâaller au Bourg dâAvalâ lance notre guide amusĂ©e, mais en vain, nous sommes restĂ©s lĂ , et nous en avions envie. Lâhorloge de lâĂ©glise sonne, cela fait presque deux heures. Il est temps de partir car nous avons respectivement des impĂ©ratifs. âCe sera pour la prochaine fois la balade KMKâŠâ
passage dâune voiture
passage dâune voiture
passage dâune voiture DOong, DOong, il est midi, lâheure sonne toujours au bourg
vero ! alut .. ça va s va ?. h a ç
e
!
le temps est plus lent ouh la il va se p
rend re un PV l ui
une voiture
uettes, mariage entre cousins
...
un jeune homme traverse la route une jeune ïŹlle longe le trottoir pour rentrer chez elle
Tour Ă Plomb
Ce moment a Ă©tĂ© trĂšs important pour nous car il a dĂ©placĂ© notre regard. En repartant nous est venue cette idĂ©e : â la mobilitĂ© crĂ©e la connexion, mais lâimmobilitĂ© permet la rencontre.â 64
UNE INTERFACE EN DEVENIR Comment penser lâĂ©volution du territoire de CouĂ«ron dans un Ă©quilibre entre une tension locale et mĂ©tropolitaine ? Comment
favoriser le dialogue entre ces différents éléments tout en préservant leurs qualités ? des terres agricoles.
A lâhorizon 2030, environ 7000 personnes sont attendues Ă CouĂ«ron. Il faut donc crĂ©er les conditions pour les accueillir au mieux, offrir une place hospitaliĂšre pour ces personnes tout en mĂ©nageant les richesses et singularitĂ©s du territoire.
Mais conserver la singularitĂ© des entitĂ©s dans leurs limites actuelles ne suffit pas, car cela persiste Ă crĂ©er des mondes introvertis. Notre volontĂ© est de mettre en place des lieux dâinterfaces qui tendent Ă rendre les limites plus poreuses et ainsi de valoriser une dialectique de reconnaissance mutuelle entre les pratiques, les acteurs et leur milieux.
Comment passer de la ville rĂ©sidentielle Ă la ville intense, aux usages multiples, sans perdre la qualitĂ© de ces entitĂ©s? En accompagnant le territoire par la mise en place de lieux oĂč la vie locale peut prendre place, oĂč les spĂ©cificitĂ©s peuvent ĂȘtre mise en valeur, lieux de croisement de la vie Ă grande Ă©chelle et vie locale dans une inter-dĂ©pendance. Notre stratĂ©gie sâappuie sur trois orientations principales qui permettent une action cohĂ©rente sur lâensemble du territoire. Câest Ă partir de ce processus que les projets prennent forme.
La porositĂ© de ses lisiĂšres permet dâancrer les modes dâhabiter avec leur territoire au sens oĂč lâhabiter, sâinscrit dans un lien physique et social avec le milieu auquel il appartient. Câest lâidĂ©e de retourner la ville sur les pratiques et lâenvironnement qui lâentoure et mettre en avant la richesse de son rapport Ă lâeau et des pratiques agricoles. En agissant de part et dâautre de ces bords, câest avant tout relier des actes et des personnes.
1. des lisiĂšres poreuses (prĂ©rogatives) Il convient de trouver des alternatives au mitage des terres arables engendrĂ© par lâextension du pavillonnaire et lâurbanisation par les ZAC. Notre stratĂ©gie se base dans la continuitĂ© des volontĂ©s politiques inscrites dans le PLU qui prĂŽnent la âreconstruction de la ville sur ellemĂȘmeâ et restreignent lâurbanisation
2. crĂ©er des haltes pour faire lieu (de la traverse Ă lâescale) Afin de mĂ©nager des espaces de dialogue, notre stratĂ©gie se teinte de lâexpĂ©rience vĂ©cue Ă travers lâitinĂ©raire avec Floriane, qui a rĂ©vĂ©lĂ© lâarrĂȘt comme potentiel de rencontre et gĂ©nĂ©rateur de lieu. Cela nous permet dâaffirmer la volontĂ© de proposer des dispositifs de haltes 65
les mouvements et amorcer de nouvelles dynamiques. Ces endroits de passages rĂ©vĂšlent la connexion comme outil pour crĂ©er des arrĂȘts. Les interventions viennent donc ponctuer le territoire et rĂ©vĂ©ler des points de dialogue potentiels.
qui se lisent comme des points dâaccroches au territoire,points de rencontres physiques entre les diffĂ©rents acteurs et leurs usages. Ces haltes sâintĂšgrent sur des passages inscrits, sur des parcours quotidiens ou momentanĂ©s. Ces passages sâentendent Ă la fois physiquement par les mouvements pendulaires qui entraĂźnent des flux journaliers ou par les mouvements temporaires des promeneurs du dimanche, mais aussi socialement par les âvaguesâ dâinstallation des nouveaux habitants. Sur ce territoire traversĂ© la densitĂ© du passage est un potentiel pour capter
Comme le dit Christopher Alexander âla ville nâest pas un arbre mais un rĂ©seau de noeuds, chacun tendant Ă la spĂ©cialisation de ses activitĂ©s.â La multiplication de ces espaces spĂ©cialisĂ©s apparaĂźt comme un gage dâinter-dĂ©pendance entre-eux Ă lâĂ©chelle locale mais aussi par rapport Ă la ville-centre Ă lâĂ©chelle territoriale.
des haltes qui ponctuent les passages au bord des entités 66
3. ménager des espaces de frictions
Ces interfaces viennent se dĂ©finir par rapport Ă des frictions qui existent aujourdâhui sur le territoire. Ces frictions caractĂ©risent des conflits dâusages et de reprĂ©sentations entre les Ă©chelles mĂ©tropolitaine et locale. Ces rapports de force sâexpliquent par cette volontĂ© mĂ©tropolitaine de valoriser des singularitĂ©s du territoire mais qui ne servent pas Ă impulser de nouvelles dynamiques locales et parfois gĂ©nĂšrent mĂȘme des mises Ă distance.
prairies humides
Nous allons nous intéresser particuliÚrement à des dissenssus que nous avons repérés sur le territoire.
vue
Jetée des marais ZAC coulée
Tout dâabord, celui liĂ© Ă la figure du bon Ă©lĂšve que reprĂ©sente CouĂ«ron dans sa capacitĂ© de ville dâaccueil en supportant une pression dâurbanisation importante. Mais cela est vĂ©cu par les habitants comme une peur face Ă la saturation des moyens en terme dâĂ©quipements ou de vie associative.
berges jardins
Il y a aussi le rapport Ă lâeau notamment les marais qui est une image de marque fabriquĂ©e pour des pratiques de loisirs et de dĂ©tentes aux dĂ©triments dâune reconnaissance de lâactivitĂ© agricole et ne favorisant pas lâactivitĂ© locale. Et enfin, le monde agricole qui doit ĂȘtre conservĂ©, est considĂ©rĂ© comme le grenier de la mĂ©tropole, un potentiel nourricier mais dont la production extensive de qualitĂ© Ă paradoxalement du mal Ă persister en tant que telle.
des lieux de frictions
Notre volontĂ© est de requestionner ces frictions comme des potentiels de dĂ©veloppement parce quâelles portent un intĂ©rĂȘt Ă la fois Ă lâĂ©chelle de vie locale mais aussi mĂ©tropolitaine. Notre stratĂ©gie est de mĂ©nager ces frictions comme des espaces de mises en relation, de dialogue Ă diffĂ©rentes Ă©chelles. Il semble nĂ©cessaire de 67
fermes cultures
Gare maraĂźchĂšre les pavillons potagers
quartier de la verrerie point de vue
Désir de rives innondabilité
habiter
Quai suspendu tour Ă plomb
interactions. Ils sâinscrivent sur les haltes et ponctuent le territoire. Les interventions se rĂ©pondent sans lien hiĂ©rarchique mais dans une logique commune de rĂ©ciprocitĂ©.
construire des espaces de partage qui permettent lâinteraction sociale entre les habitants, les inscrivants ainsi dans un projet commun qui favorise lâintĂ©gration. Ces espaces de frictions sont pensĂ©s comme des points de rencontres entre les acteurs, leurs pratiques et le territoire. Ils rendent compte des spĂ©cificitĂ©s locales et gĂ©nĂšrent des
Faire lieu câest aussi faire repĂšre Ces lieux de rencontres sâinscrivent comme des nouveaux repĂšres, des nouvelles polaritĂ©s sur le territoire. 68
LE PROJET NE SâARRĂTE PAS LĂ LâHISTOIRE CONTINUE
69
ET APRĂS...
Nous prĂ©sentons les projets dans le cadre de lâoption de projet en ce dĂ©but dâannĂ©e et câest une Ă©tape importante. Cependant, notre dĂ©marche ne sâarrĂȘte pas Ă ce rendu. Il nous est nĂ©cessaire ensuite dâorganiser un retour auprĂšs des habitants. Ce moment permettra de poursuivre les questionnements sur nos projets. Ainsi la parole de lâhabitant que nous avons Ă©coutĂ© ne soit pas quâun matĂ©riau mais bien un Ă©change continu. Nous prĂ©parons cet atelier dans un rĂŽle pĂ©dagogique dans une notion de lien. Et ce afin de se sentir acteur pour savoir partager au mĂȘme titre quâun citoyen notre vision du territoire.
Nous attendons donc cet atelier auprĂšs des habitants que nous ferons au mois de mars.
70
71
LE QUAI DES UNS, LE JARDIN DES AUTRES MARGOT MOISON
Quai, n., m. : lieu oĂč lâon arrive, attend, se rencontre, observe pour mieux repartir. Jardin, n., m. : lieu harmonieux que lâon apprĂ©cie, oĂč sâĂ©panouit certaines richesses et dont on dispose comme si lâon Ă©tait chez soi.
la gare ensommeillée laisse passer les trains 72
POINT DE CROISEMENT Dans les mouvements incessants qui traversent le territoire, oĂč trouver un lieu dâhospitalitĂ© ? Un lieu qui permet une porositĂ© entre diffĂ©rents milieux en invitant Ă lâinteraction et Ă lâaccueil ? que tout le monde vit au quotidien ? CouĂ«ron ne porte t-il pas dĂ©jĂ ces rĂ©ponses jusque lĂ endormies ou indistinct aux yeux de tous ?
A CouĂ«ron on y vit, on y dort, on y travaille aussi, comme agriculteur pour Yannick, comme professeur des Ă©coles pour Dominique, ⊠Mais pour la plupart des autres personnes, on y travaille peu en fait. On prend surtout sa voiture tous les matins, et on file sur Nantes, dans la mĂȘme direction que les autres, sur les mĂȘmes routes. Cette situation assez univoque tend Ă se renforcer, lâinstallation croissante de nouveaux arrivants Ă CouĂ«ron convoque de plus en plus ce mode de vie. Pouvoir habiter ici implique la possibilitĂ© dâĂȘtre propriĂ©taire dâune maison avec jardin, grĂące au foncier encore attractif, tout en Ă©tant proche de la ville-centre qui offre travail, services et cultures. Cette situation qui au fond se complĂ©mente bien a aussi ses limites quand on observe que le lien entre les habitants et leur territoire sâĂ©tiole peu Ă peu. Et que cela risque de rĂ©duire la commune Ă sa fonction rĂ©sidentielle de satellite : qui ne survivrait que par sa proximitĂ© Ă la mĂ©tropole. Lâintense expĂ©rience de terrain nous montre quâil existe une diversitĂ© de quotidiens et pourtant le trajet le plus banal qui est celui de rejoindre son travail nâa que trĂšs peu dâalternative sur CouĂ«ron. âQuand je vois le nombre de gens sur les routes, tout le monde va travailler sur Nantes, je me dis quâil y a un moment ça va saturer, comment on va circuler ? â parole dâatelier public. Comment rĂ©pondre Ă cette histoire
Une gare comme lieu dâhospitalitĂ© Dans ce scĂ©nario saturable quelque chose dâautre peut sâinventer pour retrouver le rapport Ă lâautre et au territoire dans un parcours quotidien. Il existe Ă CouĂ«ron une gare qui relie Nantes et Saint-Nazaire en peu de temps. Elle est un potentiel pour sâintensifier mais aussi pour ĂȘtre un carrefour dâhospitalitĂ© et de rencontre. La gare reprĂ©sente dans son principe mĂȘme un lieu dâarrivĂ©e et de dĂ©part mais aussi ce temps de repos interrompant une activitĂ© de dĂ©placement. Elle est un lieu dâhĂ©bergement permettant lâinterruption dâun mouvement oĂč le voyageur peut y trouver refuge. Elle reprĂ©sente lâoccasion dâun nĆud de contact entre plusieurs pratiques du territoire, entre les voyageurs et les autres ouvrant la possibilitĂ© de crĂ©oliser les diffĂ©rentes subjectivitĂ©s. Cette expĂ©rience de rencontre devient possible dans la qualitĂ© mĂȘme du mouvement qui induit le dĂ©placement vers lâAutre. De cette expĂ©rience peut naĂźtre des points de sociabilitĂ© en tirant profit du moment dâattente. La gare, ce point dâarrĂȘt, devient un lieu privilĂ©giĂ© de la dĂ©couverte. 73
collage - au cĆur de lâaccident
RENTRER DANS LE PAYSAGE
vie. Ces Ă©lĂ©ments sâimbriquent et se reposent sur les marais. Cet espace est une richesse commune Ă tous et il est la source dâun rapport particulier au territoire. Lieu de rĂȘverie, de ballade mais aussi de labeur, il est aussi fragile. Lâaccident de voiture symbolise lâarrĂȘt, la rencontre, la dĂ©rive au chemin et la dĂ©couverte dâun ailleurs. Son immobilitĂ© forme un lieu et pose un poids dans le mĂ©canisme qui alors sâalourdit. La voiture sâancre progressivement dans le terrain et prend ses couleurs. Les travailleurs en costard cravate attendent dans les rouages de leur quotidien, et observent alors autour dâeux le paysage. DerriĂšre cette brume indicible se cache une partie du territoire quâils ne connaissent pas mais dont ils commencent Ă en percevoir lâintĂ©rĂȘt. Ce collage exprime lâintĂ©rĂȘt dâun espace de rencontre invitant Ă tisser de nouveaux liens pour ne pas laisser disparaĂźtre les spĂ©cificitĂ©s du territoire.
LâexpĂ©rience du collage constitue un point charniĂšre dans la dĂ©marche du projet. La volontĂ© de mettre en place des lieux de haltes et de rencontres se joue aussi ici. Ce collage a Ă©tĂ© fait suite aux ateliers publics, toute sa structure est basĂ©e sur un mĂ©canisme de roulement infini, sur lequel se pose diffĂ©rents Ă©lĂ©ments. Cette machine infernale qui symbolise aussi le temps qui passe, fonctionne Ă la fois sur des aspects palpables comme sur dâautres plus immatĂ©riels. LâĂ©quilibre semble fragile : Nantes avec ses tours symboliques, les nouvelles maisons des ZAC, prennent un poids diffĂ©rent de la vieille bĂątisse des siĂšcles passĂ©es, relĂ©guĂ©e, par lequel se murmure les histoires dâautrefois qui sâenvolent avec lâoiseau vers les nouvelles constructions. La volontĂ© de transmission et de partage est un lien fort que les habitants tentent de conserver pour prolonger les rĂ©cits et les ancrer dans leur lieu de 74
RENDRE VISIBLE Aujourdâhui la gare est un lieu gĂ©ographiquement en lisiĂšre et enclavĂ©, comment pourrait-elle ĂȘtre placĂ©e au cĆur des mobilitĂ©s quotidiennes ?
champs, marais
pavillons
bourg historique
Le terminus de la mĂ©tropole Le train au quotidien peut ne pas ĂȘtre considĂ©rĂ© comme avantageux car il est contraire Ă un idĂ©al de mobilitĂ© individualisĂ© qui permet une plus grande libertĂ© de mouvement. Mais ici la proximitĂ© de Nantes, 1/4 dâh, permet une connexion rapide. De plus, intĂ©grĂ© dans la mĂ©tropole nantaise la gare offre la possibilitĂ© de prendre le train au prix dâun ticket de transport en commun TAN (1,7 âŹ).
Loire
trois ou quatre passages du TER en direction de Nantes. Quelques minutes avant son arrivĂ©e les travailleurs descendent du bus, 91 quâils ont pris depuis chez eux, et se dirigent sans attendre sur le quai. Le train arrive avec quelques minutes de retard, les passagers grimpent Ă bord, un groupe de jeunes descendent pour aller rejoindre Ă pied le lycĂ©e Jean-Jacques Audubon. âJe nâai pas de clientĂšle de la gare, on me dit que jâai de la chance dâĂȘtre proche dâune gare mais ça ne mâapporte rien, je fonctionne
Au quotidien, un simple passage Un matin Ă la gare se ponctue de
«en 15 minutes pour 1,5 euros je suis Ă Nantes» parole dâatelier public 75
plutĂŽt avec les habituĂ©s du quartierâ barman du cafĂ© de la gare Ce que sous entend lâexpĂ©rience câest que ces voyageurs ne reprĂ©sentent que 7% des actifs couĂ«ronnais qui vont travailler pour 80% avec leur vĂ©hicule personnel. Au cours de nos rencontres et lors des ateliers publics on nous a peu parlĂ© de ce lieu sauf pour y maugrĂ©er quelques remarques dĂ©criant par exemple sur manque dâaccessibilitĂ©. âCâest nâimporte quoi, je ne peux mĂȘme pas monter dans le train avec mon vĂ©lo car la passerelle en escalier ne me permet pas de le transporter.â parole dâatelier public
marchandises, on trouve sur place un vieux hangar de stockage et un quai surĂ©levĂ© qui servent aujourdâhui Ă la SNCF pour ranger le matĂ©riel des techniciens de la ligne. âOn vient une fois par jour par Ă©quipe de deux pour entretenir la ligne. On a dans des algecos qui ont toujours Ă©tĂ© lĂ , un espace pour manger, se changer et se reposer.â dĂ©crivent deux employĂ©s SNCF rencontrĂ©s avec chance, car leurs activitĂ©s sont trĂšs discrĂštes. Le guichet dâaccueil de la gare quant Ă lui, nâouvre que le matin, il est situĂ© dans le bĂątiment dâĂ©poque en partie dĂ©safectĂ©. Le reste du site est en friche et tient lieu de parking sauvage.
Une gare invisible La gare est construite Ă la fin du XIXĂšme siĂšcle lors de la mise en place de la ligne ferroviaire Nantes/ Saint-Nazaire. Elle sâimplante le long de la topographie du terrain. Cette position gĂ©ographique contrainte la rend excentrĂ©e des centralitĂ©s de bourg ou dâĂ©quipement mais aussi de la Loire. Elle tient une position trĂšs discrĂšte au sein du paysage de la commune. Aux limites du bĂąti, son accessibilitĂ© est limitĂ©e, la gare se situe dans un cul-de-sac. Une friche qui discrĂštement remue Anciennement gare de
âLe soir Ă 18h câest vide alors il y a de la place pour ma clientĂšle, notamment pour la voiture de Bernard qui reste jusquâĂ 1hâ plaisante le barman du cafĂ© de la gare. Ce point dâintensitĂ© quâest le cafĂ© sert de lieu de rencontre pour le club de flĂ©chettes ou celui de cartes de la commune, les membres se rĂ©unissent ici toutes les semaines et bondent la petite salle du cafĂ©. Au fond un billard offre des parties endiablĂ©s jusque tard dans la nuit pour les connaisseurs. Câest aussi un refuge oĂč se cĂŽtoient les jeunes qui prennent Ă manger le midi et les plus ĂągĂ©s qui viennent tenir le bar.
la friche des anciens réseaux ferrés de France
une gare dissimulée derriÚre un parking 76
physique, qui requestionnent notre rapport au monde, aux autres et Ă nous-mĂȘme. Il convient donc dâaccompagner le lieu de la gare comme un carrefour de parcours et dâusages qui interagissent entre eux. Il est le point stratĂ©gique qui ne tend quâa ĂȘtre rĂ©vĂ©lĂ© pour sâadapter Ă cette nouvelle façon de penser les transports et nos quotidiens comme lieux de frictions social. Cela pose la question plus globale du devenir des gares françaises dans les petites communes qui aujourdâhui ferment les unes aprĂšs les autres alors que la population vit de plus en plus dans ces milieux tout en se dĂ©plaçant quotidiennement dans les grandes villes.
STIMULER Pratiquer la gare comme lieu de vie au quotidien pour rĂ©activer le quartier et apporter une dialectique entre champs, marais et pavillons. Une routine enrichie âSur le chemin aprĂšs le travail, je mâarrĂȘte Ă Atlantis Ă Saint-Herblain, câest pratique aprĂšs je suis Ă 10 minutes de chez moiâ parole dâatelier public. La faible frĂ©quentation du train se lit Ă travers lâefficacitĂ© de la voiture qui offre la possibilitĂ© de coupler dĂ©placement au travail et arrĂȘt au supermarchĂ© pour faire les courses le soir avant de rentrer chez soi. Les trajets sont efficaces, on ne perd pas son temps Ă faire des aller-retours. Seulement ce schĂ©ma a un impact Ă©cologique Ă©levĂ© quâil semble de plus en plus urgent de rĂ©duire. Mais aussi un impact Ă©conomique pour les familles qui, de ces dĂ©placements, connaissent de nombreuses dĂ©penses. De plus, dans ces logiques implacables la ville est individualisĂ©e et les rencontres spontanĂ©es se font plus rares. Il semble Ă©vident que pour ranimer la dynamique du train dans le quotidien pour rĂ©duire lâimpact des dĂ©placements pendulaires individualisĂ©s ne pourra se faire sans proposer une âplus-valueâ dans les parcours. LâĂ©volution de la gare doit sâinscrire dans la recherche dâune Ă©cosophie qui est dĂ©finie par FĂ©lix Guattari comme une articulation des Ă©cologies sociale, mentale et
Ouverture dâune gare sur son milieu Sur cette commune encore rurale (76% dâespaces naturels), notre rencontre avec Yannick, exploitant agricole des marais, fut dĂ©cisive. Il nous a rĂ©vĂ©lĂ© sa volontĂ© de promouvoir la production mais aussi les pratiques liĂ©es Ă son mĂ©tier. âLes gens qui viennent Ă la campagne
aujourdâhui
demain ? Une efficacité à accompagner 77
un fort réseau de vente directe à la ferme, donner une visibilité aux capacités de production locale
ne comprennent pas le bruit des moteurs de tracteurs et les vaches qui traversent les routes. Jâessaye dâĂȘtre le plus fair-play possible, je fais de belles rencontres avec les joggeurs qui me parlent de mes vaches ou des marais mais il manque dâespaces pour se rencontrer et quâil y ait du dialogue.ânous dit-il. Cet agriculteur comme de nombreux autres sur la commune a vu sâinstaller prĂšs de son lieu de travail, des familles citadines qui recherchaient calme et verdure mais ce sont retrouvĂ©s confrontĂ©s au vacarme des champs. Sans aucune animositĂ© et pour au contraire multiplier les rencontres et faire prendre conscience de la richesse de sa production, une quinzaine de fermes organisent des ventes directes rĂ©guliĂšres. âOn vend une partie de nos produits en direct, câest ce qui nous sauve, on arrive Ă vivre de lâagriculture extensive car les gens recherchent de la qualitĂ©, ils sont prĂȘt Ă venir de loin, jâai des clients de SaintLuce-sur-Loire. Surtout câest le rapport humain que les gens recherchentâ. Bien conscients des enjeux de demain, ces producteurs sâengagent pour une meilleure alimentation mais aussi pour favoriser le lien entre
des mondes qui communiquent trĂšs peu, voire plus du tout. Certains agriculteurs sâorganisent aussi autour dâune AMAP (rassemblant une dizaine de fermes) qui a lieu sous le prĂ©au de lâĂ©cole Ă la ChabossiĂšre. Ces stratĂ©gies collectives sont multiples. Un chantier dâinsertion autour du maraĂźchage bio tient une place importante au sein de la commune. Il y a aussi la ferme autogĂ©rĂ©e de la CouteliĂšre qui depuis quelques annĂ©es est engagĂ©e autour dâun projet politique et social pour mettre la terre en commun entre chĂŽmeurs et paysans. Si on soutenait ces initiatives, ces potentialitĂ©s pour faire ensemble, qui existent dĂ©jĂ au travers dâune mise en coopĂ©ration ? LâidĂ©e est de penser la gare comme un support de valorisation des circuits-courts entre producteurs et acheteurs en y inscrivant alors une «coopĂ©rative» agricole avec un lieu de vente. Ainsi sâajouterait au quotidien des travailleurs la possibilitĂ© de rentrer chez soi chaque jour un panier de lĂ©gumes frais Ă la main. Ce lieu serait aussi lâoccasion de tisser des liens et dâĂȘtre source dâĂ©vĂ©nements permettant de dĂ©velopper de nouvelles solidaritĂ©s. 78
une gare Ă rĂȘver (collage dâidĂ©es)
collectif pour tuer eux-mĂȘmes leurs bĂȘtes, lâidĂ©al serait ça â nous glisse Yannick, agriculteur. âIl y a pas mal dâagriculteurs qui vont plus loin que la vente directe avec une autonomie des semences et une transformation sur place de leurs produits, la ferme du GAEC des Roches par exemple ils sont au top dans cette dynamique ! â membres de la JAM. Ces initiatives pourraient se multiplier pour favoriser une grande proximitĂ© dans la production.
Favoriser la filiĂšre courte Le mode de distribution sâorganiserait sur un terreau de volontĂ©s citoyennes dĂ©jĂ fertiles, qui montrent une envie de faire Ă©merger des circuits de proximitĂ©. âJe voulais ouvrir une Ă©picerie locale dans cette maison du bourg mais la commune va la dĂ©truire.â parole atelier public. âNous on veut monter un micromarchĂ© des producteurs oĂč lâon proposerait des plats prĂ©parĂ©sâ les membres de la JAM. Ces Ă©nergies pourraient permettre de porter la plate-forme de vente en agissant comme prestataires de services au quotidien. OĂč les producteurs fixeraient leur prix librement et ces acteurs ponctionneraient un pourcentage du prix de vente pour crĂ©er des emplois sous la forme dâune entreprise sociale et collaborative. Le systĂšme nâouvrirait ses portes quâaux producteurs de la rĂ©gion. Ainsi dĂ©velopper les circuits courts, câest rĂ©duire le nombre dâintermĂ©diaires avant la vente mais câest Ă©galement rĂ©duire les distances de transports des produits eux-mĂȘmes. Lâimpact environnemental et financier de la livraison dâune marchandise Ă sa production est a rĂ©duire, tout autant que le transport des consommateurs vers le lieu de vente. âA Puceul, les agriculteurs ont montĂ©s un
RĂ©-ancrer son alimentation Cette dĂ©marche pose la question de lâagriculture et du lien avec ce qui nous entoure. CouĂ«ron possĂšde une culture agricole forte, comme de nombreuses communes autour de lâEstuaire. Principalement orientĂ©e autour de lâĂ©levage bovin ou laitier, il existe Ă©galement une tradition de culture maraĂźchĂšre. Beaucoup moins forte quâavant, oĂč chaque ouvrier avait son lopin de terre pour cultiver, elle rĂ©apparaĂźt nĂ©anmoins mais sous de nouvelles formes. Nous pouvons voir des jardins collectifs naĂźtre dans la commune, le dernier en date se situe au cĆur de la ZAC. Mis en place derniĂšrement par lâamicale laĂŻque de CouĂ«ron il propose des parcelles Ă cultiver aux habitants. Autour de ce projet pourrait donc sâinscrire un investissement de la friche ferroviaire autour de dispositifs de cultures. 79
DIALOGUER Une mise en connexion qui se lit Ă la fois Ă une Ă©chelle mĂ©tropolitaine et locale. systĂšme de fret (ex: le city cargo dâAmsterdam)
Ce modĂšle serait reproduit dans diffĂ©rentes gares de lâEstuaire et desservirait ainsi la production alimentaire Ă lâĂ©chelle du pĂŽle intermĂ©tropolitain Nantes / Saint-Nazaire. Ainsi les gares autrefois appelĂ©es «embarcadĂšres», lors de la rĂ©volution industrielle et de lâorganisation des villes du XIXĂšme siĂšcle, renouent avec leur ancien langage.
Une distribution augmentĂ©e LâopportunitĂ© du train et de son intensification offre la possibilitĂ© dâassocier Ă cette dĂ©marche un processus de transport de marchandises. Cette initiative sâappuie sur lâexemple du tramway de transport de fret Ă Dresde (CarGoTram) qui approvisionne lâusine Volkswagen pour les piĂšces automobiles. A lâĂ©chelle de la production locale, un train entier serait dĂ©mesurĂ© mais le compartiment dâun wagon du TER pourrait ĂȘtre habilitĂ© Ă recevoir de la nourriture. Le systĂšme sâĂ©tablirait sur un standard de container qui viendrait se caler dans le gabarit du train. Ainsi la gare de CouĂ«ron pourrait accueillir un quai de fret.
A portĂ©e de train La gare se dĂ©ploie comme un point de dĂ©part, elle attise le dĂ©sir dâun ailleurs. Elle sâouvre alors comme une fenĂȘtre sur la ville. Le projet entre en connexion avec la future zone de loisir prĂ©vue dans lâactuelle carriĂšre ainsi que le lac Beaulieu situĂ©s au nord de la ligne. Et sâinscrit dans des cheminements doux qui plongent dans les champs et les chemins de
mise en rĂ©seau au niveau local Ă lâĂ©chelle de la ville
80
une gare comme nouvelle centralité et repÚre dans le paysage
elle viendrait surplomber le paysage et se dĂ©marquer Ă lâhorizon. Depuis cette passerelle, la gare prend part Ă un systĂšme dâĂ©changes visuels et de communications Ă travers le territoire local et mĂ©tropolitain. Le projet est un point de contact physique, en cherchant Ă qualifier la lisiĂšre, un nouvelle dialectique sâinstalle entre entitĂ© bĂątie et entitĂ© rurale. Câest une rĂ©elle porte vers un mĂ©tissage des usages de ces milieux. La volontĂ© porte ici Ă induire une relation plus longue avec le lieu. Le passage sâallonge et accorde une mise en relation au cĆur des pratiques. Lieu de coopĂ©ration, il permet aux habitants de former des initiatives. Un espace appropriable au grĂ© des envies le cafĂ© de la gare organise un tournoi de pĂ©tanque, le chantier dâinsertion propose des cours dâhorticulture etc ...
randonnĂ©es dâun cĂŽtĂ© ; et vers la coulĂ©e verte de la ZAC de lâautre pour ensuite sâimmerger dans les marais. Le futur projet de la Loire Ă VĂ©lo Nord suit ce dernier tracĂ©. Enfin la gare est un point dâaccroche pour rejoindre le bourg historique et les bords de Loire. Ces relations locales offrent une opportunitĂ© de visibilitĂ© sur le territoire. Et permettent des propositions alternatives aux parcours par des traversĂ©es piĂ©tonnes et cyclables afin de rejoindre le centre-ville, le lycĂ©e professionnel ou les bords de Loire. Un repĂšre commun Dans ce schĂ©ma dâinter-relation le point de gare fonctionne comme un nouveau repĂšre, un possible point de rendez-vous. Le but est dây adjoindre une nouvelle passerelle pour permettre le passage Ă tous,
Future place de la gare ? 81
LIEUX COMMUNS Le coeur du projet câest aussi un faire ensemble, une entente collective qui gĂ©nĂšre des mises en partage et promet une intensification du quartier.
éléments de programmes (plan schématique)
Tisser les liens Dans le but dâimpulser une nouvelle dynamique, le programme multiplie les rencontres et un rĂ©cit collectif commence. Le foyer des ouvriers de la SNCF quitte ses algecos actuels pour se mutualiser Ă la coopĂ©rative. Ce lieu sâouvre parfois pour des Ă©vĂ©nements ponctuels lors des fĂȘtes de quartiers gĂ©rĂ©es par lâassociation du âquartier de la gareâ dĂ©jĂ en place. Le guichet actuel se mutualise Ă la coopĂ©rative et permet ainsi une ouverture du bĂątiment au quotidien. Les services de la SNCF gardent le mĂȘme rythme tout en offrant la possibilitĂ© aux voyageurs dâaccĂ©der Ă une borne et un espace dâattente Ă lâabri. Mutualiser les ressources et crĂ©er du collectif sâarticule aussi dans une plus claire articulation entre les champs, marais et les habitations situĂ©s sur les reliefs. Le quai de fret se place face au grand paysage et
des fermes perchĂ©es sur les collines avoisinantes. La gare sâinscrit dans une traversĂ©e transversale qui dĂ©coule vers des atmosphĂšres diffĂ©rentes. LâenchaĂźnement entre les deux milieux propose une progression douce, une gradation, des champs vers les habitations et vice-versa. Ainsi le projet va tenter un travail sur des percĂ©es visuelles, des avancĂ©es, qui seront tous autant un jeux de regards, de visions que de vĂ©ritables connexions. LâattractivitĂ© du quartier est grandissante avec ce nouveau dynamisme de la gare. Les cadences de bus et de train augmentent. Mais surtout le quartier prend une nouvelle ampleur. Le projet de la gare opĂšre comme une action incitative pour stimuler le tissus pavillonnaire existant et quâil soit amenĂ© Ă se reconstruire sur lui-mĂȘme. 82
de la lisiĂšre au cĆur du quartier
De la gare Ă la Jaunaie La municipalitĂ© soutient des actions dâespaces partagĂ©s pour accompagner le processus de densification et ainsi rĂ©pondre Ă la demande dâhabitats Ă©dictĂ©e par les volontĂ©s politiques mĂ©tropolitaine de 140 nouveaux logements par an. Ces espaces forment alors un rĂ©seau au sein du quartier et constituent un nouveaux parcours, support dâactivitĂ©s en commun. Ces actions sont des dĂ©clencheurs publics dâun jeu dâintensification et de mise en partage. Tout dâabord, la place basse
en lisiĂšre du bĂąti au niveau de la gare agit comme une scĂšne urbaine qui vit aux diffĂ©rentes temporalitĂ©s de la gare et de ses voyageurs. Dans un deuxiĂšme temps, une place haute est constituĂ©e au niveau des logements HLM de la Jaunaie. Ces deux espaces viennent en rĂ©sonance physiquement par des venelles existantes, prolongĂ©s ou crĂ©Ă©es, mais aussi dans leurs qualitĂ©s pratiques. La place de la Jaunaie devient un espace commun de jardins qui pourrait prendre place autour dâune initiative associative avec lâamicale
83
avec le bailleur social et y initier des installations de jeux pour enfants par exemple. Ainsi une partie du jardin de la Jaunaie serait amĂ©nagĂ© et lâautre serait mis en nĂ©gociation habitante pour diffĂ©rents usages. Mettre en jeu cet espace câest offrir une valeur ajoutĂ©e au sein du quartier et dĂ©clencher alors une intensification.
laĂŻque et serait soutenue par la coopĂ©rative de la gare. Dans cette derniĂšre on trouverait des graines que les agriculteurs vendent et produisent en auto-gestion (ferme du GAEC des Roches), on pourrait avoir des conseils, etc ... Ce lieu oĂč se dĂ©placerait les maraĂźchers mais aussi les Ă©tudiants du lycĂ©e agricole et qui permettrait dâenseigner, transmettre, de montrer et raconter lâagriculture en la pratiquant. Lâenjeu mĂȘme dâacheter une nourriture plus saine est enrichie, et la relation au producteur prime.
Fils rouges Ainsi, dans un troisiĂšme temps, le projet porterait une densification dâhabitats. Les venelles existantes ou celles crĂ©Ă©es deviennent des supports de lâintensification et de la stimulation du quartier rĂ©sidentiel. Dans ce jeu dâintensification, la mairie est amenĂ©e Ă modifier ses outils techniques, et donc le PLU communal. Tout en continuant de fixer des rĂšgles, les rĂ©glementations doivent permettre la dynamique. Ainsi les parcelles, diffĂ©rentes typologies dâhabitats pourraient se dĂ©velopper. Le processus proposĂ© peut donc sâincrĂ©menter et proposer dâautres usages qui dĂ©tournent les propositions. Lâessentiel rĂ©side dans la dynamique que provoque cet espace.
1+1= 3 Les zones pavillonnaires du quartier sont caractĂ©ristiques dâune urbanisation individuelle sans prise collective. Ce quartier reste dans lâattente dâun vĂ©ritable projet dâensemble, il devient nĂ©cessaire pour accueillir de nouvelles populations de bĂątir ces zones dans la concertation au travers de nouveaux espaces de mise en dialogue. Pour construire ensemble ces Ăźlots communs il est envisageable de mobiliser des associations de la commune, comme JardinâĂąge qui colonise les fonds de jardin pour proposer un espace de partage autour du potager entre ceux qui en ont trop et dâautres pas assez. Dans ce quartier oĂč il nây a que trĂšs peu dâespaces publics, la mairie pourrait prĂ©empter ce lieu en coordination
âCâest par la mise en place dâun âsujetâ que lâarchitecture peut nouer ou renouer un sentiment de complicitĂ© avec le milieuâ Lucien Kroll.
des venelles qui se dessinent
des espaces verts en attentes 84
85
JETïŸćł DES MARAIS ALICE KHALED
depuis le bord des maisons la brume du matin dïŸïœ©voile des marais mystïŸïœ©rieux 86
TRAVERSER Les marais, une fois quâon y a mis les pieds, on ne peut plus sâen
passer. En vĂ©lo ou Ă pied, pour un pique-nique ou simplement pour voir les vaches, on y retourne. Ce paysage façonnĂ© par lâhomme Ă©volue selon les saisons et nâest jamais identique dâaprĂšs
Dominique. Pourtant, CouĂ«ron vit Ă cĂŽtĂ©, sans vraiment en profiter, sans vraiment se rendre compte de toutes ses opportunitĂ©s. La ZAC Ouest Centre-Ville, ce nouveau quartier Depuis 2012, un nouveau quartier sâĂ©rige Ă lâouest du centre-ville et est bornĂ© par les marais avec lesquels il ne dialogue pas. La ZAC sâarticule autour dâune coulĂ©e verte piĂ©tonne qui permet de connecter la gare au centre-bourg. LĂ encore, les
habitations sont tournĂ©es sur les rues, nâoffrant aucune connexion directe avec cet immense espace vert. Et pourtant, les CouĂ«ronnais apprĂ©cient sây promener et traverser la ZAC sâen sâarrĂȘter.
une proximité à la gare et au cetre-ville, à la lisiÚre des marais et de la ZAC Ouest Centre-Ville
La gare La Jetée des Marais
87
Cordemais Saint-Etiennede-Montluc
ir e Lo Ă©lo Ă v
N or d
Lo ire
Ă v Ă©lo
Su d
Couëron
Le Pellerin
richesses des marais et de la Loire, entre artisanat, histoire et biodiversité
La Loire Ă VĂ©lo Nord, une reconnexion avec la rive nord La communautĂ© de communes CĆur dâEstuaire cherche Ă crĂ©er une Loire Ă VĂ©lo Nord. Aujourdâhui, celleci traverse CouĂ«ron, mais rejoint le sud par le bac en Ă©vitant les marais Audubon. Avec lâamĂ©nagement de la gare et la rĂ©habilitation du quartier Bel Air, la coulĂ©e verte de la ZAC Ouest Centre-Ville pourrait devenir support de cette Loire Ă VĂ©lo. Par un bras de la coulĂ©e, le parcours quitterait la ZAC pour se poursuivre Ă travers les marais et rejoindre Cordemais. Ainsi, les cyclistes pourraient dĂ©couvrir les richesses des marais comme son systĂšme dâirrigation, sa biodiversitĂ© et ses pratiques liĂ©es Ă lâagriculture, Ă lâartisanat et dâautres plus intimes liĂ©es Ă la famille.
photographies de marais au niveau de la cale de la Pierre Tamis
88
SE RENCONTRER Vue du site vers les marais
Le projet vient sâinscrire entre
les espaces de la ZAC et des
et de leurs groupes plus informels et dâun cafĂ©/restaurant. Les deux
rencontre entre les habitants
Jeux de cadrage Afin dâattiser la convoitise des habitants et voyageurs, des cadrages sur les marais sont amĂ©nagĂ©s grĂące Ă des jeux de passerelles, chemins singuliers de CouĂ«ron, de pentes de toit et de tailles de fenĂȘtres. Le regard est alors guidĂ© vers ces espaces humides invitant lâhabitant Ă aller plus loin, Ă les rejoindre pour les dĂ©couvrir davantage. A la maniĂšre dâune jetĂ©e qui amĂšne vers la mer sans vraiment la toucher en offrant des points de vue, le projet lâinvite vers les marais pour dĂ©couvrir cette ambiance de Loire humide.
marais afin de créer un lieu de du nouveau quartier mais aussi
dâailleurs et ceux de passage. Il sâagit dâune halte au bord des marais, Ă©tape invitant Ă poursuivre son chemin.
Lâavant-goĂ»t Le projet vient se positionner au bout de lâaxe reliant les commerces et la nouvelle Ă©cole primaire, en limite de la ZAC bĂątie. Il devient une Ă©tape sur le trajet de la Loire Ă VĂ©lo, une halte pour les promeneurs de la coulĂ©e verte ou bien une envie de sâĂ©chapper de la rĂ©alitĂ© urbaine. A lâimage dâune jetĂ©e, il invite Ă contempler non seulement les marais mais aussi la ZAC. Il est pour tous, habitants rĂ©sidents ou bien simplement de passage, un avantgoĂ»t des marais. Il est composĂ© de salles associatives de tailles diverses afin de rĂ©pondre aux besoins des CouĂ«ronnais, de leurs associations
Vue du site vers la ZAC et sa coulée verte
Le toit ondulant 89
Passerelle, Au Bossis, Ă la Combe ou ailleurs dans CouĂ«ron, ces Ă©troits chemins Ă©taient empruntĂ©s par les ouvriers pour se rendre Ă lâusine. RĂ©seau parallĂšle aux grands axes, elle est parfois malmenĂ©e par les nouvelles voies automobiles ou revalorisĂ©e dans les nouveaux quartiers. Pour certains, elle court-circuite les routes et facilite lâaccĂšs au centre-bourg. Pour moi et tant dâautres, elle est le lieu de balades extraordinaires hors des trottoirs goudronnĂ©s, un voyage Ă travers cette architecture ondulante.
Passerelle du Bossis
Passerelle dans la ZAC
Passerelle du Plessis
Passerelle le long de la voie ferrée
Le dispositif littĂ©raire sur les passerelles est prĂ©sentĂ© ci-dessus. Il a Ă©tĂ© rĂ©alisĂ© selon la mĂ©thode dâEric Chauvier.
Les marais au loin 90
91
DĂSIR DE RIVES ADELINE BOULAIRE
les maisons de la verrerie ont parfois «les pieds dans lâeau» 92
DES DESIRS DE RIVES
collage «le désir de rives»
Marc Desportes
«Longtemps les hommes ont entretenu un dialogue Ă©troit avec le monde qui les entourait.Le changement des saisons rythmait le cours de la vie ; le relief, la force des vents, les matĂ©riaux disponibles inspiraient la disposition de lâhabitat, qui elle mĂȘme reflĂ©tait une conception de lâunivers ; les vĂȘtements, les objets usuels rĂ©pondaient Ă lâenvironnement par leur forme, leur couleur, leur dĂ©coration. Un relation affective unissait lâhomme au sol quâil foulait »
Simple
comme si
et extr aordin
aire
le titre ne suffisait pas One of the bes t and most unexpecte d delight
Dépaysement assuré comme quoi le dépaysement existe bien
Magique
Le paradis
Content
au
bate
tu rĂ©flĂ©chis Esprit de partir un dĂ©tour RĂȘve Ambiance couchĂ© de soleil occasion agrĂ©able
le pa
Un lieu qui peut ne pas ĂȘtre remarquer, qui est ouvert que le midi mais qui permet de voyager dans le monde entier sans quitterla rĂ©gion
radis
exis te
Suite aux ateliers publics,ce collage exprime le dĂ©sir dâinterroger la lisiĂšre comme potentiel dâinteraction entre deux milieux : les bords de Loire et lâespace dâhabitations. Cette perspective interroge cet espace comme potent La vague symbolise le territoire ondulant, si caractĂ©ristique Ă CouĂ«ron dans son rapport quotidien aux marĂ©es. Ce Les paysages dessinĂ©s par ce mouvement fascinant
Un endroit ou il
fait bon se
poser Aujourdâhui un peu de Jazz beaucoup de soleil et de gentillesse merci le paradis
93
nous invite au voyage,laisse libre cours Ă lâimagination,lâĂ©vasion. Extraordinaire,ce rapport Ă lâeau nous transporte et invite toute personne qui y passe Ă voyager. Sur ce dessin, on observe une personne marchant au bord de la rive,symbole dâun espace entre deux milieux : lâeau et la terre. LâĂ©quilibre du personnage semble fragile,son pas doit ĂȘtre sĂ»r sous peine de tomber,et passer cette limite dangeureuse. Le rapport Ă lâeau. ,envoĂ»te,interroge et se pose alors lâenvie et la volontĂ© de mettre en valeur cette singularitĂ© du territoire : les rives du bord de Loire..
«Pour le futur moi je vois une loire vivante» prĂ©sident de lâassociation ALO Les bords de Loire sont un lieu de rendez-vous. Ils sont vecteur de lien, un espace de bien commun. Cette rive du bord de Loire est un potentiel de pratique Ă mettre en valeur. Le long de cette rive de bords de Loire, nous pouvons remarquer diffĂ©rents points dâintensitĂ© sujet dâenchantement des Coueronnais.
Un dĂ©sir partagĂ© par les habitants Cette relation trĂšs forte entre les habitants et le mouvement fluctuant de lâeau ,des marĂ©es est ressentie comme une grande richesse. Les bords de lâeau sont Ă©galement des lieux support dâinteraction sociale. Chacun est libre de venir, sây arrĂȘter, sây retrouver spontanĂ©ment.
Le lieu dit du paradis situĂ© prĂšs du BAC oĂč lâimpression de voyage emporte les passagers du bateau, est un moment dâexception qui marque le quotidien. Mais Ă©galement le quartier de la verrerie dont nous parle Jacqueline dĂ©gage un parfum de mystĂšre. «les jardins de la verrerie inondĂ©s par lâeau au grĂ©s des marĂ©es, câest mon vietnam Ă moi, des riziĂšres, des jardins inondĂ©s au grĂšs des marĂ©es».
des jeunes qui se donnent rdv sur les quais Ici câest mon riziĂšres
petit VIETNAM
retrouve Loire on sây les bords de nager dans la loire jâai appris Ă
pour de
sévÚnem
utiliser la loi
re comme
ents spor tifs, cultu rels moyen po ur relier Ă nantes
Carte des paroles enchantĂ©es par ce rapport Ă lâeau 94
les bords de
Loire on sâ
UN ELOIGNEMENT DE LâEAU
carte ancienne 1825
1837
Ce rapport Ă lâeau a Ă©tĂ© « malmenĂ© » au cours de lâhistoire, on observe Ă travers les cartes anciennes cet Ă©loignement de la rive. CouĂ«ron a Ă©tĂ© un des avant-ports de Nantes. Ce rapport de proximitĂ© de la ville assez particulier dans lâestuaire dans le sens oĂč la ville a (avait) une relation directe et frontale avec lâeau.
1857
Au milieu du XVIII Ăšme siĂšcle, les difficultĂ©s de navigation dans lâestuaire font de Paimboeuf, le nouvel avant-port de Nantes, au dĂ©triment du Port Launay. Au XIX Ăšme siĂšcle, les travaux de Chenalisation de la Loire ont dĂ©connectĂ© le Port Launay du cours principal. Il va devenir un port dâintĂ©rĂȘt local et ne va plus ĂȘtre baignĂ© que par un bras de Loire.
Port de couëron
1949
Ce bras de Loire va progressivement sâenvaser et se combler intĂ©gralement. Aujourdâhui le Port launay nâa de port que le nom, le port de CouĂ«ron sâimplante dans le dernier bras de Loire.
1999
Ce traumatisme a connu son « point final » lors de la fermeture des usines Pontgibaud sur le bord de Loire
2015
Aujourdâhui cet Ă©loignement de lâeau est Ă©galement marquĂ© par les nouvelles normes PPRI (Plan PrĂ©vention Risque Innondations) qui limite lâurbanisation au niveau des bords de Loire. 95
A LA RECONQUETE DES BORDS DE LOIRE des Coueronnais avec les bords de Loire ». Entre lâĂ©tier de la Bouma et le centre bourg câest un lieu de traverse, un boulevard de mobilitĂ© oĂč la route, les vĂ©los et les piĂ©tons se juxtaposent, «il nây a pas vraiment dâendroit pour sâarrĂȘter dâespace pour se retrouver» nous dit lâancien postier.
Aujourdâhui, Ă lâĂ©chelle mĂ©tropolitaine, il y a une certaine volontĂ© de reconquĂȘte des bords de Loire. La ville de CouĂ«ron soutenue et financĂ©e par Nantes mĂ©tropole a engagĂ© la rĂ©habilitation des quais en 2003. Comme nous dit lâadjoint Ă lâurbanisme sâil faut retenir une chose des volontĂ©s de lâancien maire câest quâil a « impulsĂ© la rĂ©conciliation
réhabilitaiton des quais
Des prospectives territoriales Lâhistoire se poursuit avec une volontĂ© mĂ©tropolitaine de crĂ©er deux nouvelles infrastructures au niveau de lâĂźle de la libertĂ© et du quartier de la verrerie, en continuitĂ© de ses bords de Loire. Le premier projet serait dâachever lâitinĂ©raire de la Loire Ă vĂ©lo entre le port et le Paradis en un chemin piĂ©ton, vĂ©lo qui traverserait ces zones inondables. Le deuxiĂšme projet serait une route digue au niveau du quartier de la verrerie qui vise Ă amĂ©liorer la circulation et de prĂ©venir des futurs
inondations qui menacent le quartier dâhabitat situĂ© dans une cuvette topographique. Nantes mĂ©tropole a dĂ©jĂ fait lâacquisition de la majoritĂ© des parcelles et des maisons qui se trouvent sur ce tracĂ©. Ces deux infrastructures caractĂ©risent deux enjeux importants pour le dĂ©veloppement de cette rive : la volontĂ© de la mĂ©tropole de relier les territoires Ă travers lâitinĂ©raire de la Loire Ă vĂ©lo et du tourisme, ainsi que les risques dus Ă sa proximitĂ© avec lâeau.
risque dâalĂ©a fort 1m TracĂ© de la loire Ă vĂ©lo 96
Route digue
REQUESTIONNER SES INFRASTRUCTURES « La route ? Ăa va servir Ă quoi, câest pas parce quâil y a un virage Ă la con quâil faut tout dĂ©foncer pour faire une route ».(Yves du quartier de la verrerie) Ce morceau de ville entre terre et eau avec toute la poĂ©tique quâil nous amĂšne caractĂ©rise Ă©galement ce lien fort que peuvent entretenir les personnes avec leur milieu. Ce futur projet ne marquera t-il pas une frontiĂšre dĂ©finitive entre lâhabitat et cette rive, ne privera-t-il pas une nouvelle fois les CouĂ«ronnais de ce rapport Ă lâeau? Une route dangereuse ? «Quand je veux aller sur les bords de Loire câest compliquĂ© parce que la Rue Waldeck Rousseau il y a de quoi se faire tailler un short » habitante du port Launay Le problĂšme principal de cet axe de mobilitĂ© vient de la superposition des mobilitĂ©s entre piĂ©ton et voiture parce quâil nây a pas de trottoir.
Ceci nâest pas un boulevard.. La collectivitĂ© a engagĂ©, avec lâarrivĂ©e des nouveaux habitants, la construction dâinfrastructures de mobilitĂ© structurant la ville par un systĂšme efficace de boulevard ( de lâEurope, lâocĂ©an, la libĂ©ration). La crĂ©ation de cette nouvelle portion de route en bord de Loire Ă©tablierait une nouvelle frontiĂšre entre la ville et son rapport Ă lâeau. La rive est un lieu excpetionnel Ă mĂ©nager comme un potentiel de vie et non comme un espace de flux ou il ne serait pas possible de sâarrĂȘter. Il sâagit de miser sur le plaisir de ressentir le fleuve, de sâĂ©loigner du bourdonnement urbain et dâapprĂ©cier des Ă©vĂ©nements temporaires qui pourraient y prendre place.
Projet de la route dans le quartier de la verrerie 97
Rue waldeck rousseau
Une route digue ? Le quartier de la verrerie qui est aujourdâhui soumis aux rĂ©glementations PPRI (Plan de PrĂ©vention Risque Inondable) se situe en Zone dâalĂ©a fort soit avec un risque de montĂ©e des eaux de 1m. Cette infrastructure pose question. Dans la gestion du risque il faut mentionner plusieurs stratĂ©gies fondamentales : Sâen Ă©loigner (stratĂ©gie normes PPRI : ne pas construire et limiter lâurbanisation), RĂ©sister ou laisser passer lâeau. Dans notre situation, le quartier est une zone principalement dâhabitat qui est dâautant plus fragilisĂ©e quâil se situe dans une cuvette
topographique qui le rend encore plus vulnĂ©rable. Il sâagit donc de prendre en considĂ©ration cette contrainte mais comment pourraitelle devenir un atout pour de nouvelles stratĂ©gies dâurbanisation? Une berge en devenir En arpentant le site et en Ă©changeant avec ses habitants je me suis rendue compte que le quartier dans sa morphologie amorçait dĂ©jĂ une rĂ©silience avec ce rapport Ă l'eau. Le front bĂąti dĂ©jĂ existant composĂ© d'habitations et de murs endosse ce rĂŽle de protection. Cependant il est aujourd'hui incomplet et est une opportunitĂ© Ă rĂ©vĂ©ler.
98
UNE INTERFACE ENTRE LA TERRE ET LâEAU dâĂ©change entre la population locale et le voyageur. Il nous rĂ©vĂšle Ă©galement les anciens jardins de la verrerie comme un nouvel espace Ă investir, Ă se rĂ©unir autour de la culture de la terre.
Le projet de ces nouvelles infrastructures viendrait aujourdâhui accentuer lâĂ©loignement de la population dans son rapport Ă lâeau. Mon projet propose une rĂ©interprĂ©tation de ces infrastructures mĂ©tropolitaines en affirmant que les rives des bords de Loire sont Ă envisager comme un espace de vie permettant des interactions entre les personnes et leur milieu. Cependant ce nouveau projet urbain est motivĂ© par la menace de la montĂ©e des eaux mais surtout par cette envie de retrouver un rapport Ă lâeau en venant lâhabiter.
Mise en rĂ©seau Cette nouvelle traversĂ©e va Ă©galement permettre une mise en rĂ©seau Ă Ă©chelle locale de plusieurs mobilitĂ©s. Câest une colonne vertĂ©brale dâintermodalitĂ© entre des pĂŽles dĂ©jĂ existants (arrĂȘts de bus, espaces de covoiturages, la future navette fluviale entre Nantes et CouĂ«ron) En permettant la connexion entre le centre bourg et le port Launay cette infrastructure se veut ĂȘtre une alternative au souci de la dangerositĂ© de la rue Marcel Provost. Depuis le bourg le chemin de la Loire Ă vĂ©lo est une invitation au marais, depuis le port Launay cela permet dâaccĂ©der au bourg et au bords de Loire en toute tranquillitĂ©.
StratĂ©gie Dans un premier temps, il sâagira dâamorcer une densification dans les dents creuses du front bĂąti existant. Ceci permettra dâoffrir de nouveaux habitats, des espaces publiques, un nouveau lieu de halte pour la Loire Ă vĂ©lo en rapport avec les marais et ses jardins tout en permettant la rĂ©habilitation dâun espace de protection. Il faut garder Ă lâesprit que « Le risque zĂ©ro nâ existe pas », mĂȘme sâil prĂ©sente un danger spĂ©cifique il peut ĂȘtre aussi la raison de lâamĂ©lioration dâun territoire. Favoriser la culture du risque en proposant de rendre cette rive habitable câest amorcer une dĂ©marche de rĂ©silience avec ce rapport Ă lâeau. Le dessin de cette nouvelle rive sâaccompagne dâun nouveau tracĂ© de la Loire Ă vĂ©lo qui nâest plus pensĂ© comme une simple infrastructure de connexion mais comme un potentiel 99
Temporalités Le nouveau tracé de la Loire à vélo est pensé comme un parcours ponctué de haltes et de nouveaux espaces publics : nouveaux espaces de pique-niques face aux jardins de la verrerie ainsi que de nouveaux espaces ludiques.
nouvelle rive est une opportunitĂ© pour lâimplantation de nouveaux logements en relation directe avec lâespace de marais. Dans un troisiĂšme temps, il sâagira de tirer profit du passage de la Loire Ă vĂ©lo et de lâattractivitĂ© touristique pour en faire une nouvelle force du dĂ©veloppement des bords de Loire. Lâimplantation dâun nouveau programme hĂ©bergements associatifs sur les bords de Loire va permettre dâimpulser une nouvelle dynamisme Ă©conomique et dâapporter de nouveaux espaces de sociabilitĂ© entre les habitants, les associations et les personnes de passage.
Ce nouvel espace public dans les marais va permettre dâaccompagner la densification du quartier environnant parce quâil sera lâespace plus, un nouveau jardin commun. Il va participer Ă lâattractivitĂ© et entamer une intensification du tissu urbain. Face Ă la pression de demande de logement de la commune , cette
DĂ©veloppement dâune nouvelle Ă©conomie
Accueil nouvelle population
Loire à vélo EAU
T2 T1
parc urbain
Nouveaux espaces de sociabilités
Nouveau tracé de la Loire à vélo
100
T3
HABITER LA RIVE En continuitĂ© des amĂ©nagements des bords de Loire, ce nouveau tracĂ© est pensĂ© comme un parcours ponctuĂ© de nouveaux petits Ă©vĂšnements qui vont favoriser lâarrĂȘt. Leur formes aura pour double usage de renforcer le systĂšme de protection. Espace ludique
Redonner vie aux Jardins Les espaces de marais sont des terres exceptionnelles pour la culture et le maraĂźchage du fait quâelles soit essuyĂ©es temporairement par les marĂ©es. Les alluvions de la Loire rendent ces terres fertiles et propices Ă des espaces de jardinage. « Quand jâĂ©tais gamin jâai connu les parcelles de jardin de la verrerie jusquâau champ, car dans le temps il y avait des vaches.. Le pĂšre Martin il passait ses vaches dans la ville, il Ă©tait emmerdĂ©, pour pas que ces vaches aillent foutre le bordel autour de lâĂ©glise. Moi jâai connu çà câĂ©tait Ă celui qui avait la plus belle parcelle.. AprĂšs lâusine tout le monde se retrouvait dans le jardin, ils discutaient, prenaient lâapĂ©ro.. Quand il y avait les ouvriers de Treffimetaux, tout Ă©tait superbement entretenu, mais maintenant comme personne entretient câest la Pampa.. » Habitant de la verrerie
Collage intention - redonner vie aux jardins
verrerie câest le plaisir et lâimaginaire dâune consommation dâaliment presque comme sâil venait dâĂȘtre rĂ©colter. Des espaces ludiques « Lâespace de jeux sur les bords de Loire câest le repĂšre des petits CouĂ«ronnais qui nâont pas de jardin, il est trĂšs prisé»
Permettre lâarrĂȘt « Sur les bords de Loire on manque dâespaces pour se poser » jeune rencontrĂ© Ă la mĂ©diathĂšque « Les bords de Loire câest un espace conçu pour les vĂ©los, on ne peut pas vraiment sây arrĂȘter »
Avec la densification envisagĂ©e sur lâĂźlot des tourterelles et lâarrivĂ©e de nouvelles populations ainsi que la proximitĂ© du complexe sportif on pourrait imaginer la crĂ©ation dâun nouvel espace ludique pour les enfants.
Sur le parcours un nouvel espace de pique-niques face aux jardins de la 101
Densification future envisagé
Habiter Habiter la la rive rive
la halte pique- nique vue sur les jardins
auberge associative Jardiner dans la verrerie
Habiter en bord de rive Face Ă la pression de demande de logements, le dessin de cette nouvelle rive est lâopportunitĂ© pour participer rien quâun tout petit peu Ă lâaccueil de ces nouveaux arrivants.CouĂ«ron est aujourdâhui trĂšs attractive pour les familles car son cadre de vie est Ă la fois proche de la «campagne» et proche de la mĂ©tropole mais aussi pour son dynamisme au niveau des Ă©quipements.
oĂč le stress, lâagitation font contraste avec le retour chez soi. Câest pouvoir pratiquer des activitĂ©s en extĂ©rieur, dans un cadre exceptionnel. Habiter les rives offre un espace de vie qualitatif en renforcant le lien entre lâhomme et la nature, entre lâhomme et lâeau.
Habiter sur la rive est un mode de vie, un moyen de se retourner sur La loire. Câest jouir au quotidien des couleurs et de la sĂ©rĂ©nitĂ© dâun estuaire, lieu apaisant aprĂšs une journĂ©e de travail
Photo du site «habiter la rive» 102
LE TOURISME UNE FORME DâESCALE Un lieu stratĂ©gique, la croisĂ©e du bourg, de la Loire et des marais
Des volontés partagées Aujourd'hui il y a une volonté communale et métropolitaine de développer le tourisme en favorisant l'implantation de nouveaux espaces d'hébergements temporaires sur le parcours de la Loire. Cette envie est partagée par les habitants et des associations locales (UTAN) qui cherchent à faire partager les richesses de leur territoire.
Un dimanche aprĂšs-midi, nous nous baladions sur les bords de Loire Ă CouĂ«ron, jâai Ă©tĂ© surprise tant il y avait de monde qui se promenait sur les quais. En discutant avec quelques passants, je me suis rendue compte quâil y avait beaucoup de Nantais, mais aussi des personnes dâun peu partout.. Une contradiction assez marquante, malgrĂ© cette grande attractivitĂ© on remarque un centre bourg qui se meurt, « les passants qui ne remontent pas» nous dit la maire.. Comment CouĂ«ron pourrait tirer parti de son attractivitĂ© touristique pour permettre le dĂ©veloppement dâune vie locale? En proposant lâimplantation de lâauberge associative dans le quartier de la verrerie, câest une position stratĂ©gique qui permettrait de redynamiser le centre bourg, un point dâarrĂȘt et dâinterface entre la ville, la Loire et les marais. Au point de dĂ©part de cette nouvelle berges les passants pourront emprunter ce nouveau chemin inondĂ©s au grĂ©s des marĂ©es.
«CouĂ«ron, on y passe, parfois on y reste et on sây attache. Beaucoup y passent mais voudraient sây arrĂȘter au moins pour une nuit sans y trouver des lieux dâaccueils » un habitant pendant les Ateliers publics Le dĂ©veloppement du tourisme est une opportunitĂ© pour construire de nouveaux espaces de partages, d'Ă©changes entre des populations qui ne se croisent pas toujours: entre le voyageur et la population. La richesse du voyage ne s'inscrit pas seulement dans la dĂ©couverte d'un territoire mais surtout dans l'expĂ©rience qu'il est possible d'en tirer et des rencontres sur le chemin. Câest une expĂ©rience que nous avons vĂ©cu lors de notre passage Ă CouĂ«ron, oĂč les habitants nous ont transmis des histoires singuliĂšres, des secrets et la naissance d'une certaine amitiĂ©.
Le centre bourg
Les marais
Loire à vélo
La Loire
103
Auberge associative Câest sur un modĂšle associatif fort Ă CouĂ«ron que lâauberge associative se veut ĂȘtre un nouveau lieu de vie Ă lâĂ©chelle du quartier et un lieu dâhospitalitĂ© pour le voyageur. Il existe aujourdâhui Ă CouĂ«ron cette forte volontĂ© dâentreprendre en alliant Ă la fois une activitĂ© et un dĂ©veloppement social.
Maison du XIX Úme à réhabiliter
Le deuxiĂšme pĂŽle se situe Ă lâentrĂ©e du marais, dans une des dents creuses de la rive. Cet espace serait un espace de halte et dâhĂ©bergement , vue sur les marais, composĂ© dâun cafĂ© associatif permettant Ă la fois un lieu de rencontre entre les associations, les habitants et les voyageurs. Cet espace permettra dâaccueillir des Ă©vĂšnements Ă la libre imagination des associations et des habitants. CotĂ© rue il y aurait des espaces mutualisable avec les personnes du quartier comme des locaux vĂ©los, un espace buanderie. CotĂ© marais des espaces de stockage pour jardiner et faire revivre les jardins de la verrerie comme un nouvel espace de vie.
Comme nous lâavons dit auparavant, Nantes mĂ©tropole, avec son projet de route possĂšde des maisons du XIXĂšme sur le port qui sont aujourdâhui abandonnĂ©es, ainsi quâune partie des terrains situĂ©s sur ce chemin. Lâauberge sâĂ©tablierait en deux pĂŽles : le refuge maritime sur les bords de Loire, qui permettrait la revalorisation des batisses sur le port. Le programme comprendrait un espace pour lâassociation Aviron Loire ocean qui aujourdâhui nâa pas de locaux et lui permettrait donc un accĂšs direct sur la Loire, un commerce ainsi quâun logement de fonction, et des hĂ©bergements.
104
105
QUAI SUSPENDU NICOLAS BODET
une friche en attente 106
Autrefois le thĂ©atre dâune activitĂ© industrielle foisonnante, les bords de Loire se sont peu Ă peu dĂ©solidarisĂ©s de CouĂ«ron. Cette insularitĂ© sâest dĂ©finie par la Loire au Sud et une rĂ©surgence du Sillon de Bretagne au Nord. Il y a donc un travail de remaillage du territoire. Pour tisser le haut et le bas, le nord et le sud, les industries et le rĂ©sidentiel, CouĂ«ron avec la Loire.
Site de projet
Centre Bourg
+ 20m Falaise
+ 5m Future Zac rives de Loires MĂ©diathĂšque
+ 0m
Enjeux du site
107
Bord de Loire
Section Nord - Sud, poétique
de Loire et il possĂšde une orientation plein sud. Câest un endroit privilĂ©giĂ©. Lâemplacement de la futur ZAC revĂȘt donc un intĂ©rĂȘt stratĂ©giques. Tout dâabord elle permet dâassurer une continuitĂ© dans le front bĂąti du bord de Loire. Actuellement, le site industriel avec le pĂŽle culturel de la mĂ©diathĂšque apparaĂźt comme un ilĂŽt dĂ©solidarisĂ© du reste du bourg. Il sâagit donc de venir complĂ©ter la sĂ©quence urbaine en bord de Loire, pour assurer une cohĂ©rence Ă lâensemble et de reconnecter le pĂŽle culturel avec le reste du tissu urbain. Une autre particularitĂ© de ce site, est la falaise qui forme une limite physique aujourdâhui infranchissable. Le projet propose une balade dâest en ouest pour relier visuellement et symboliquement CouĂ«ron avec la Loire et donner Ă voir les industries qui la bordent. Cette balade comprendra des dispositifs de franchissements entre le haut et le bas de la falaise. Sur le collage ci-contre, On lit les diffĂ©rentes sĂ©quences qui marquent cette espace. Tout dâabord le haut de la falaise qui est aujourdâhui vĂ©cu comme une limite, une frontiĂšre mais qui possĂšdent un fort potentiel, puis lâaire industrielle, la route qui borde la Loire et la Loire elle-mĂȘme.
Un site Ă la croisĂ©e des bords La ville de CouĂ«ron est trĂšs marquĂ©e par son passĂ© ouvrier. La tour Ă plomb est le symbole de cette histoire singuliĂšre. SituĂ©e en bord de Loire, lâactivitĂ© industrielle a façonnĂ© tant le paysage bĂąti que le tissu social de CouĂ«ron. Avec la fermeture des usines en 1986, CouĂ«ron perd un fort vivier dâemplois ainsi que sa relation privilĂ©giĂ©e au fleuve. Actuellement pris entre la falaise au nord et les bords de Loire au sud, le site industriel semble comme isolĂ© de CouĂ«ron. La rĂ©habilitation en mĂ©diathĂšque dâune partie du patrimoine industriel illustre une dynamique de rĂ©conciliation de la ville avec son passĂ©, qui part Ă la reconquĂȘte des bords de Loire. Cependant un vide marque la rupture entre le bourg et le site industriel. Il sâagit de lâemplacement de la future ZAC Loire. Ce projet vise Ă proposer une vision dâamĂ©nagement de cette ZAC dans sa relation plus large avec le fleuve, le patrimoine industriel, le bourg mais aussi certaines pratiques mĂ©tropolitaines. La premiĂšre carte illustre lâemprise du projet. Ce site prĂ©sente deux caractĂ©ristiques exceptionnelles. Il est situĂ© en bord 108
Des flux parallĂšles
Aujourdâhui
Des flux qui se rencontrent
industries sont une des spĂ©cificitĂ©s de CouĂ«ron et sont la marque dâune histoire chargĂ©e de sens et de lâĂ©nergie des ouvriers qui y ont travaillĂ©s. Ce projet en reconnectant visuellement et physiquement le site industriel avec le bourg, vise Ă favoriser une reconnaissance de la valeur de ce lieu. De plus ce site possĂšde de nombreux Ă©quipements tel que la mĂ©diathĂšque, aujourdâhui isolĂ©e, la salle Estuaire et des terrains de sports. Il est donc Ă la croisĂ©e dâĂ©lĂ©ments architecturaux revĂȘtant une importance Ă grande Ă©chelle. A travers la construction des logements coopĂ©ratifs et la constitution dâun jardin commun, le projets permet dâarticuler, de mettre en relation ces diffĂ©rents Ă©lĂ©ments. Le jardin sâĂ©tend sur la partie nord, en hauteur permettant de relier la futur ZAC avec les anciens habitants. Conçu comme un jardin partagĂ©, il permet aux habitants de sâapproprier cette espace. Câest donc un espace de dialogue qui permet aux nouveaux habitants de se familiariser avec le lieu et de rencontrer les anciens. Câest aussi un lieu de passage pour permettre au passant dâun jour dâaller Ă la rencontre du passant de tous les jours.
AprÚs réalisation du projet
Relier pour exprimer les potentialitĂ©s du lieu Aujourdâhui, des flux bordent ce site au nord et au sud mais nây pĂ©nĂštrent pas. Ces flux pĂ©riphĂ©riques participent Ă lâenclavement du lieu. Le projet souhaite proposer un lieu de croisement, de rencontre de ces flux pour ouvrir un dialogue entre les diffĂ©rents espaces et acteurs qui participent Ă la vie de ce territoire. Dâun cĂŽtĂ© les promeneurs du dimanche qui viennent apprĂ©cier le cadre des bords de Loire pourront prendre de la hauteur pour vivre le territoire de CouĂ«ron Ă travers son rapport Ă la Loire, mais Ă©galement les couĂ«ronnais pourront entretenir un lien plus quotidien avec le fleuve Ă travers une plus grande porositĂ© entre «ville basse» et «ville haute». Les deux photos tĂ©moignent dâune volontĂ© dâappropriation du lieu. Câest un endroit de dĂ©sir, qui laisse entrevoir son charme, et appelle le passant. Le projet propose Ă©galement de mettre en valeur les industries. Celles-ci fonctionnent actuellement Ă un rĂ©gime moindre, ce qui laisse penser quâelles ont disparu du paysage. Cependant ces 109
Un lieu au potentiel stratégique
Jardin suspendu
Front bĂąti
Intentions projectuelles
Panorama sur la loire estuairienne
Exemple dâappropriation du lieu 110
BIBLIOGRAPHIE
DOCUMENTS SUR COUĂRON Gaston Boucault, La ChabossiĂšre de CouĂ«ron et ses environs, 1986, Nantes Raymond Briant, Histoire de CouĂ«ron et de la Loire Armoricaine, 1982, ouvrage familial Raymond Briant, CouĂ«ron en carte postale anciennes, Zaltbommel, 1976 Raymond Briant, Au pays des nanmĂštes: histoire de couĂ«ron et de la Loire armoricaine, Nantes 1982 Peter Dontzow, La Citouche : regard sur la « Navale », Centre dâhistoire du travail, Nantes, 1997 Roger GuĂ©rin, Ce que je nâai pas oubliĂ©, de 1926 Ă 1950, ouvrage familial imprimĂ© par Ampage , mai 2012, CouĂ«ron
OUVRAGES Michel Corajoud, «Le projet de paysage, Lettre aux Ă©tudiants», in Jean-Luc Brisson, Le jardinier, lâartiste et lâingĂ©nieur, 2000. Marc Desportes, Paysages en mouvement. Transports et perception de lâespace XVIIIe-XXe siĂšcle, Editions Gallimard, Paris, 1970. FĂ©lix Guattari, Les trois Ecologies, Editions GalilĂ©e, Paris, 1989 Evelyne Grossman, « Appartenir, selon Derrida », Rue Descartes 2006/2 (n° 52), p. 6-15. Martin Heidegger, Batir, Habiter, Penser, essais et confĂ©rence, 1951. Marcel HĂ©naff, La Ville qui vient, Editions de lâHerne, Paris, 2008 Lucien Kroll, Tout est paysage, Editions Sens et Tonka, Paris, 2001 Michel Lussault, LâavĂšnement du monde. Essai sur lâhabitation humaine de la Terre, Editions du Seuil, 2013. Michel MariĂ© et Jean Viard, La Campagne inventĂ©e, Actes Sud, Paris, 1988 Georges Perec, EspĂšce dâespaces, GalilĂ©e, 1974. Georges Perec, Tentative dâĂ©puisement dâun lieu parisien, Christian Bourgois Ă©diteur, Paris, 1975. Thomas Sieverts, Entre-ville : une lecture de la Zwischenstadt, Editions ParenthĂšses, Marseille, 2004.
111
REMERCIEMENTS Merci Ă Carole Grelaud, maire de CouĂ«ron, et Patrick Naizain, adjoint Ă lâurbanisme de la ville de CouĂ«ron, pour le temps quâils nous ont accordĂ© et la vision du territoire quâils nous ont partagĂ©e ; ValĂ©rie Le Calvez et toute lâĂ©quipe du centre socio-culturel pour nous avoir accueillis pendant trois jours au sein de leurs locaux ; Dominique BrĂ©tĂ©cher, Floriane Corre et Bernard Boulaire pour nous avoir fait partager leurs pratiques lors dâitinĂ©raires ; Yannick Radigois, KĂ©vin et son pĂšre ainsi que RĂ©gine, Vasyl et Carlos pour leur disponibilitĂ© et la richesse de nos entretiens ; Lulu pour son accueil Ă sa Cabâ et ses bonnes frites ; Quentin et Quentin de lâassociation JAM, pour nous avoir fait dĂ©couvrir leurs jardins ; Michel Prampart, pour les cartes postales plein de âmâ ; LâintĂ©gralitĂ© des habitants ayant participĂ© aux ateliers publics et qui nous ont aidĂ©s Ă comprendre un peu plus ce territoire ainsi que toutes les personnes que nous avons rencontrĂ©es au cours de notre prĂ©sence sur le terrain ; Eric Chauvier, Saweta Clouet et ChĂ©rif Hanna, enseignants Ă lâENSA Nantes, pour leur soutien dans notre dĂ©marche et leurs conseils avisĂ©s ; Jennifer Aujame, cinĂ©aste, pour sa collaboration de notre traversĂ©e filmĂ©e ; Flore Grassiot et Antoine Mialon, architectes DPLG et urbanistes, pour nous avoir fait partager leurs savoir-faires afin de mener Ă bien les ateliers publics ; Margaux Vigne, paysagiste, pour avoir donnĂ© Ă voir nos travaux rĂ©alisĂ©s en studio ; Ricardo Basualdo, artiste et scĂ©nographe urbain, pour sa clairvoyance ; Marine Leroy, architecte, pour son regard neuf portĂ© sur notre dĂ©marche ; Borha Chauvet, Rossila Goussanou et Pierre GuĂ©rin, moniteurs au sein du studio, pour leur aide prĂ©cieuse, Pierre Cahurel, graphiste, pour son aide pour la rĂ©alisation de cet ouvrage ; Evelyne Thoby, responsable de la reprographie de lâENSA-Nantes, pour son travail. Merci enfin Ă nos collĂšgues de studio, pour avoir partagĂ© ces quelques mois Ă nos cĂŽtĂ©s.
ESTUAIRE 2029
DĂ©rives des rives
LâarrivĂ©e Ă CouĂ«ron sâest faite doucement, paisiblement, comme au grĂ© du courant. Cette arrivĂ©e, marquait le dĂ©but dâune aventure. Celle qui, pendant ces quatre derniers mois, nous a habitĂ©s. En fil rouge, la dĂ©marche projectuelle dâEstuaire 2029 guide nos pas. Petit Ă petit, au grĂ© de nos arpentages, de nos dĂ©rives et de nos rencontres, le portrait dâun territoire qui nous Ă©tait autrefois Ă©tranger sâesquisse. De cette lecture, nous construisons une narration Ă la croisĂ©e de la matĂ©rialitĂ© du terrain, des subjectivitĂ©s, des diffĂ©rentes Ă©chelles et de la synthĂšse projectuelle. Câest cette narration qui se tisse au fil de lâAutre que nous vous partageons.
arts de faire - janvier 2016