Coueron

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ESTUAIRE 2029

FAIRE LIEU DANS L’ENTRE-DEUX MÉNAGER DES ESPACES DE FRICTIONS

DĂ©rives des rives

Adeline Boulaire (PFE), Nicolas Bodet, Alice Khaled, Margot Moison (PFE) Directeurs d'études : Saweta Clouet, Chérif Hanna, Eric Chauvier ensa nantes - arts de faire

COUËRON


ESTUAIRE 2029

arts de faire - janvier 2016


Estuaire 2029 Estuaire de la Loire, territoire en mouvement

Equipe Ă©tudiants : Adeline Boulaire Nicolas Bodet Alice Khaled Margot Moison

Equipe enseignante : Chérif Hanna, Architecte Urbaniste Eric Chauvier, Anthropologue Saweta Clouet, Architecte

Intervenants : Jennifer Aujame, Cinéaste

Flore Grassiot, Architecte et Artiste Ricardo Basualdo, Artiste et Scénographe Urbain Marine Leroy, Architecte

ouvrage originel imprimé en 20 exemplaires en janvier 2016 réimpression et mise à jour en février 2016

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Estuaire 2029 Estuaire de la Loire, territoire en mouvement

Equipe Ă©tudiants : Adeline Boulaire Nicolas Bodet Alice Khaled Margot Moison

Equipe enseignante : Chérif Hanna, Architecte Urbaniste Eric Chauvier, Anthropologue Saweta Clouet, Architecte

Intervenants : Jennifer Aujame, Cinéaste

Flore Grassiot, Architecte et Artiste Ricardo Basualdo, Artiste et Scénographe Urbain Marine Leroy, Architecte

ouvrage originel imprimé en 20 exemplaires en janvier 2016 réimpression et mise à jour en février 2016

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PRÉFACE ChĂ©rif Hanna

DĂ©rives des rives MĂ©nager, amĂ©nager l’estuaire - un territoire en mouvement Le concept de « dĂ©rives des rives » Ă©voque Ă  l’évidence l’idĂ©e de bord. L’échange par nature se fait Ă  la frontiĂšre. Et la frontiĂšre n’est jamais seulement une clĂŽture. C’est un lieu de passage dans lequel on nĂ©gocie. Des lieux de transitions qui deviennent des lieux de transactions. Tous les lieux stratĂ©giques sont Ă  la lisiĂšre des centres. Le marchĂ© est l’espace fondateur de la ville. Pour ces raisons, Roland Barthes1 rappelle que depuis l’AntiquitĂ©, la pĂ©riphĂ©rie prĂ©cĂšde le centre.

Max Ernst (1891-1976) Le jardin de la France

La rive est au bord et le bord est Ă  la marge. La marge peut aussi expliquer certaines histoires et activitĂ©s affranchies de contraintes, Ă©vocatrices de libertĂ©, d’utopies. (
) un ailleurs oĂč se projettent les phantasmes. « La nappe d’eau a agi comme un trucage rĂ©ussi mais connu, les hommes ont eu le plaisir de voir des formes modifiĂ©es..(
) la crue a bouleversĂ© l’optique quotidienne (
) toute rupture un peu ample du quotidien introduit la fĂȘte : or, la crue n’a pas seulement choisi et dĂ©paysĂ© certains objets, elle a bouleversĂ© la cĂ©nesthĂ©sie du paysage, l’organisation ancestrale des horizons : Les lignes habituelles du cadastre, les rideaux d’arbres, les rangĂ©es de maisons, les routes, le lit mĂȘme du fleuve (
) le phĂ©nomĂšne le plus troublant est certainement la disparition mĂȘme du fleuve (
) l’eau n’a plus de cours, le ruban de la riviĂšre, cette forme Ă©lĂ©mentaire de toute perception gĂ©ographique (
) passe de la ligne au plan. »2

Sur les rives de l’estuaire ; principalement sur l’estran, les rives , les bords, les berges, les quais ne subissent pas seulement les mouvements naturels du fleuve ou de la mer, ils sont au bord d’un territoire continental ; lieu par excellence des passages et transactions qui animent, modifient , obligent Ă  rĂ©investir les espaces oĂč les hommes et marchandises embarquent ou dĂ©barquent Ă©quipements et formes, sensibles aux grandes mutations Ă©conomiques inscrites dans un rapport de mondialisation. Ces mutations sociales et Ă©conomiques accĂ©lĂšrent le rythme historique des mutations qui modifient son urbanisation et son paysage. Ce lieu, croisement des traversĂ©es, n’est pas un rĂ©ceptacle passif sur lequel s’exercent diffĂ©rentes transactions, mais un lieu rĂ©vĂ©lateur du changement, oĂč se mobilisent et se problĂ©matisent de nouvelles relations Ă  la valeur.

Relever le dĂ©fi de ce fleuve, qui paraĂźt dĂ©laissĂ© par l’industrie et les grandes activitĂ©s portuaires, des lieux oĂč des urbanitĂ©s se sont construites, des lieux oĂč il y a eu reconnaissance de cette urbanitĂ©. Paris n’a pas Ă©tĂ© inondĂ©, in Des mythologies de Rolland Barthes, Ă  propos de l’inondation de Paris en 1955.

Roland Barthes « L’empire des sens » Ă©d. Points coll.essais

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Si le territoire porte une mĂ©moire c’est qu’il y a un potentiel. A ce moment, il y une rĂ©activation possible dans une dynamique nouvelle. Ce qui se passe dans cette relation d’échange est plus qu’un retour sur le passĂ©. C’est la puissance du lieu dans sa dynamique actuelle.

Ɠuvre d’une problĂ©matique de l’amĂ©nagement d’un territoire en mouvement. L’Estuaire de la Loire L’estuaire de la Loire est, de son origine Ă  nos jours, le territoire de tous les dĂ©parts, celui des voyageurs, des aventuriers, celui des conquĂ©rants et des Ă©migrants. Les villes de l’estuaire se sont greffĂ©es sur les quais sur lesquels ont transitĂ© les hommes, les marchandises et la valeur. Ce territoire instable au rythme des crues, des marĂ©es, des creusements du lit d’un fleuve « sauvage » sur lequel se croisaient Ă©migrants et commerçants est devenu l’espace privilĂ©giĂ© d’une immigration. Le mouvement s’inverse, le territoire s’invente au fil de l’imaginaire et devient l’enjeu de multiples investissements.

Travailler sur les traces historiques qui se sont constituĂ©es une identitĂ© autour de cette idĂ©e de nĂ©gociation de la valeur. Le potentiel de ressourcement de l’estuaire est liĂ© Ă  cette redĂ©couverte des mobilitĂ©s Ă  travers la rĂ©vĂ©lation des lieux d’échanges. Ce retour sur les traces est une reconstruction des liens que la frontiĂšre met en tension avec d’autres territoires, lointains ou proches. Cette reconnaissance construit un champ dynamique de force ; le bord apparaĂźt parce qu’il sollicite ou sous tend une connexion plurielle oĂč s’articulent et se jouent des rapports et des fonctions diffĂ©rentes entre les hommes et les lieux. Cette reconnaissance en acte des traces qui tissent les relations potentielles d’un bord par rapport Ă  ses diffĂ©rents contextes permet d’évaluer, de choisir et de construire les liens qui placent chaque projet en attente d’une relation ou d’un Ă©change.

La valeur de ce territoire repose sur un hĂ©ritage, celui des mobilitĂ©s antĂ©rieures, dont les infrastructures conservent la mĂ©moire. Elle repose sur les dĂ©placements et mouvements qui les investissent aujourd’hui multipliant les croisements, liens et coĂŻncidences sur lesquels se jouent de nouveaux rapports de civilitĂ© et une nouvelle urbanitĂ©. Un monde s’invente au croisement de ces mouvements, une mĂ©tropole originale se construit sur les liens que les nouveaux et anciens habitants tissent sur un paysage redĂ©couvert donc rĂ©inventĂ©. La question du dĂ©placement demeure indissociable de celle de l’habiter.

A la quĂȘte de ressources qualitatives : des vocations nouvelles, ce qui est important n’est pas toujours la fonction premiĂšre, mais ce qu’elle induit comme rapports sociaux. Ce qu’on Ă©change dans l’échange. Ce n’est jamais ni l’objet lui mĂȘme ni son usage mais sa valeur qui est totalement relative Ă  la reconnaissance des partenaires qui sont dans l’échange.

La métropole estuarienne se construira sur une question délicate ; celle de la qualité de nouveaux « espaces-temps » lors la mise en résonance des différents territoires.

Sur un espace en mutation, la révélation de ce maillage dynamique est la premiÚre clé pour la mise en 4


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SOMMAIRE 4 5

PRÉFACE AVANT PROPOS

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UNE VILLE TRAVERSÉE

12 14 17 20

Premiers regards Ou sommes nous? En quĂȘte de repĂšre Discerner les limites

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AU DELÀ DES PARCOURS

26 28 32 36

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UNE ESCALE A COUËRON

40 Lancer le débat 42 Des lieux, des personnes, des rencontres 47 Ville territoire 48 Pratiques couëronnaises

POINTS DE FRICTIONS

52 54 56 58

Une histoire mĂ©tropolitaine Une Ă©conomie en pĂ©ril Vision mĂ©tropolitaine L’émergence d’une peur

L’inconscient du territoire Une interface en devenir

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Le projet ne s’arrĂȘte pas lĂ 

72 Le quai des uns, le jardin des autres Margot Moison (PFE)

Se requestionner Attachement au lieu Territoire ondulant Interaction en réseau

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63 65

59 COUËRON ON Y PASSE, LE TEMPS D’UN ARRÊT 60 NĂ©gociations 61 Au croisement de pĂŽles attractifs 6

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Jetée des marais Alice Khaled

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DĂ©sir de rives Adeline Boulaire (PFE)

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Quai suspendu Nicolas Bodet

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BIBLIOGRAPHIE

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REMERCIEMENTS


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AVANT PROPOS

« Parcourir le site et ses alentours en tous sens, observer et consigner toutes les configurations, toutes les choses jusqu’aux plus tĂ©nues et aux plus nĂ©gligeables. (...) C’est l’observation, l’investigation, la prise en compte de toutes les circonstances qui tissent, nos rapports aux choses qui feront que vos dĂ©cisions et vos projets seront inspirĂ©s, inspirĂ©s par le monde luimĂȘme.» Michel Corajoud, Lettre aux Ă©tudiants.

C’est ici l’histoire d’une traversĂ©e, une grande traversĂ©e longue et patiente, de six mois, ponctuĂ©e de haltes. Nous sommes allĂ©s Ă  la rencontre des rĂ©cits et des pratiques qui fabriquent un territoire, Nous avons arpentĂ© et nous nous sommes parfois perdus sur un terrain qui nous Ă©tait Ă  l’origine inconnu. C’est ici le rĂ©cit d’une expĂ©rience, d’abord Ă  quatre puis trĂšs vite avec de nombreuses autres personnes. Ces passeurs et passants rencontrĂ©s nous ont fait partager leur quotidien, nous ont amenĂ©s Ă  dĂ©couvrir leurs paradigmes. C’est ici la trace d’un passage sur un territoire qui ne nous a pas laissĂ©s indiffĂ©rents, qui dĂ©place notre savoir et construit la matiĂšre Ă  projet pour rĂ©pondre aux nĂ©cessitĂ©s prĂ©sentes et Ă  venir. C’est enfin la mĂ©moire de longues semaines de travail et d’un enseignement si singulier qui nous a remuĂ©s et mis en mouvement.

Voici donc la prĂ©sentation d’une dĂ©marche qui explique notre comprĂ©hension du territoire depuis nos premiers regards jusqu’aux enjeux et nos propositions pour son futur.

Embarquons pour Couëron !

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UN TERRITOIRE TRAVERSÉ PASSAGES ET INTUITIONS

la longue file d’attente pour le bac au moment du dĂ©barquement- embarquement 10


PREMIÈRES IMPRESSIONS Avant d’ĂȘtre fixĂ©, chacun, sur un territoire d’étude, nous sommes allĂ©s avec l’ensemble de l’option de projet faire le tour de l’estuaire. CouĂ«ron est le premier site que nous visitons pour ce pĂ©riple qui nous mĂšnera Ă  Cordemais, Donges, Paimboeuf puis Port Lavigne. Cette premiĂšre visite a jouĂ© un rĂŽle important dans notre apprĂ©hension du territoire, ce moment a cultivĂ© notre imaginaire et nous a gorgĂ©s de rĂ©cits. bistrot Ă©tabli au bord du quai.

La premiĂšre visite commence un matin de septembre, il est encore tĂŽt, l’air est frais et sec. CalĂ©s sur le siĂšge de la voiture nous traversons tranquillement CouĂ«ron, depuis son bord de Loire et ses quais. Nous filons sans arrĂȘt, en longeant les murs de pierre et la Tour Ă  Plomb puis les maisons du siĂšcle dernier, vers la pointe de la commune, au niveau de l’embarcadĂšre du bac, cette navette fluviale qui traverse la Loire.

Le bac dĂ©marre du Pellerin, village de la rive d’en face et arrive vers nous, chargĂ© de voitures, il remue l’eau et ajoute une pointe d’intĂ©rĂȘt dans ce tableau. Puis notre attention se fixe sur la zone humide qui s’étend autour de nous, ce sont les marais estuariens. Nous sommes Ă  l’orĂ©e de cette â€œĂ©charpe verte” qui compose la singularitĂ© du grand territoire de l’estuaire. Ici les marais se nomment “Audubon” en hommage au peintre naturaliste du XIX Ăšme, Jean-Jacques Audubon, nĂ© Ă  CouĂ«ron. L’histoire nous emporte Ă  nouveau.

ArrivĂ©s Ă  destination, la vue comble nos regards et rĂ©veille nos sens. La brume en suspension donne un caractĂšre onirique au lieu. Ce moment particulier marque nos esprits : nous prenons tous la mĂȘme photo de la cale Ă  moitiĂ© immergĂ©e.

Cet instant de dĂ©couverte passĂ©, nous remontons dans nos voitures et reprenons la route en sens inverse. Nous plongeons un instant dans les nouvelles zones d’habitations de la ville : les ZAC. Flambant neuf, ce dĂ©cor nous excĂšde par son aspect standard dĂ©jĂ  obsolĂšte. Nous bifurquons trĂšs rapidement pour rattraper la route vers Saint-Etiennede-MontLuc puis Cordemais, le prochain site Ă  visiter.

Les mĂąts des bateaux qui Ă©mergent sur la rive d’en face intriguent, ils rappellent l’histoire. En 1945, les Allemands coulent leur flotte pour bloquer l’accĂšs au port de Nantes crĂ©ant l’üle Bikini. De nombreux mystĂšres planent autour de ce lieu, au nom dĂ©jĂ  si singulier, “Le Paradis”. Une des lĂ©gendes raconte que les noyĂ©s de Nantes s’échouaient ici, mais personne ne sait l’explication vĂ©ritable de ce nom. Son souvenir reste marquĂ© sur la façade d’un petit

Finalement, nous n’avons vu de “CouĂ«ronnais” que le bac. L’épaisseur de la ville nous est encore obscure. 11


12


OÙ SOMMESNOUS? Territoire Ă©tendu entre marais, coteaux et Loire, concentrĂ© de

pavillons,

parsemé

de

hameaux, aux clochers perchés sur les collines.

Une complexitĂ© intrigante Ville mĂȘlĂ©e Ă  la mĂ©tropole nantaise, situĂ©e en deuxiĂšme couronne aprĂšs Saint-Herblain, ses limites physiques nous sont incomprĂ©hensibles. Sur le chemin nous n’avons pas su juger de ses bords, nous avons l’impression d’avoir traversĂ© plusieurs villes. Mais oĂč commence et oĂč s’arrĂȘte ce territoire ? OĂč se trouve la lisiĂšre, le bords ? Quand peut-on dire que l’on est Ă  CouĂ«ron ? Les marais seraientils la limite ? Ce sentiment est dĂ» aussi Ă  cette premiĂšre visite trĂšs furtive que nous avons vĂ©cue et qui nous a livrĂ© une description superficielle. Être perdu et dans le doute attisent notre curiositĂ©, les questionnements fourmillent dans nos esprits. Un rapport Ă  l’eau fascinant C’est un territoire oĂč l’on arrive principalement par les bords de l’eau, soit avec le bac par le sud, soit le long des rives par le nord et les industries. Le bac est un bout de voyage, un Ă©vĂ©nement, qui nous enthousiasme: “on va aller bosser en prenant le bateau”. Il est le premier lieu sur lequel nous embarquons mais aussi le premier lieu sur lequel nous

revenons lors de notre dĂ©couverte. Si particulier Ă  l’échelle du grand territoire, il est le dernier «pont» entre les rives sud et nord avant SaintNazaire, il apporte une singularitĂ© Ă  l’estuaire. Cependant CouĂ«ron est situĂ©e au nord de la Loire et donc pour nous, Nantais, la route est plus courte par cette rive, Ă  16km du centre-ville de Nantes, 20 minutes en voiture, nous sommes proches. Tout les matins, nous longeons la Loire, elle change de visage au niveau de 13


situation de CouĂ«ron Ă  l’échelle de la mĂ©tropole et du pĂ©rimĂštre communal

c’est surtout son rapport Ă  la Loire ! Ici il y a plein d’ambiances de Loire diffĂ©rentes, on ne la voit pas toujours mais on sait qu’elle est lĂ , avec les marais par exemple. J’emmĂšne souvent mes Ă©lĂšves en vĂ©los faire le tour entre les deux bacs en passant par la rive sud» nous raconte Bernard, professeur d’EPS au lycĂ©e JeanJacques Audubon, nous emmenant sur ce parcours lors de l’itinĂ©raire Ă  vĂ©lo fait ensemble.

Chantenay puis Indre, pour devenir plus portuaire, disparaissant parfois derriĂšre des masses industrielles que nous prenons plaisir Ă  observer dans leur ballet avec les bateaux. La derniĂšre usine passe, Arc-en-ciel, mais le fleuve ne se dĂ©couvre qu’à peine derriĂšre les arbres, il joue Ă  cache-cache jusqu’au bourg de CouĂ«ron oĂč enfin une esplanade le met Ă  nu. «A CouĂ«ron ce qui est intĂ©ressant 14


premier arrĂȘt au centre bourg de CouĂ«ron

passage sur le bac

les marais de la rive d’en face, la tour à plomb au loin

les usines c’est aussi la Loire

L’itinĂ©raire est une mĂ©thode d’enquĂȘte mis en place par JeanYves Petiteau, consistant Ă  se laisser guider par l’habitant dans des lieux qu’il connaĂźt bien et qu’il affectionne.

caractĂ©ristique physique semble dĂ©finir le «pĂ©ri-urbain», espace entre ville et campagne, Cependant le dernier point pose question car seulement 0,3 % de la population des actifs est agriculteur exploitant sur la commune. Les pratiques paysannes et agricoles diminuent au profit de modes de vies plus urbains. Notamment lorsque l’on voit les emplois majoritairement tertiaires (services) que les personnes exercent. Ou par l’habitat qui est principalement sous forme de maisons pavillonnaires sans rapport physique avec leur milieu.

Entre rural et urbain? CouĂ«ron est un territoire Ă  la confluence entre le pĂŽle urbain de la mĂ©tropole nantaise et le monde rural des marais estuarien. Des espaces de marais, de champs et de maraĂźchage couvrent 2/3 de la commune, qui est aussi peuplĂ©e d’environ 20 000 habitants. La complexitĂ© de cette tension d’entredeux alimente notre intĂ©rĂȘt. Cette

Ces dimensions sociales et physiques interrogent sur les contradictions qui peuvent exister sur ce territoire et ses Ă©volutions. Mais aussi sur l’idĂ©e de ruralitĂ© qui disparaĂźt au profit d’un urbain gĂ©nĂ©ralisĂ© : “aujourd’hui, vivre Ă  la campagne est sans doute une des postures les plus urbaines qui soient. Les nĂ©oruraux qui se revendiquent comme tels ne sont que des urbains qui empruntent une mythologie urbaine particuliĂšre – celle de la campagne et de la ruralitĂ©â€ nous dit Michel Lussault.

catégories socioprofessionnelles des actifs en 2012 (INSEE) 15


EN QUÊTE DE REPÈRES Tours et dĂ©tours, premiĂšres rencontres, premiĂšres impressions, des Ă  priori partagĂ©s avec les habitants. L’immensitĂ© de la commune A notre grande surprise, CouĂ«ron est vaste. La superficie de cette commune correspond Ă  l’une des plus Ă©tendue de la mĂ©tropole nantaise. (44 km2) MalgrĂ© l’existence de lignes de transports en commun, celles-ci ne couvrent qu’une petite partie du territoire, il est donc nĂ©cessaire d’ĂȘtre dotĂ© d’un vĂ©hicule particulier si l’on veut avoir l’opportunitĂ© de se dĂ©placer n’importe oĂč. Ce qui fait que les habitants et les passants circulent beaucoup en voiture. NousmĂȘmes, lors de nos pĂ©rĂ©grinations, nous sommes beaucoup allĂ©s d’un endroit Ă  un autre par ce mode de transport. Ainsi, l’expĂ©rimentation des Ă©tats de perceptions variĂ©es s’est faite au travers de la vitre. S’arrĂȘter, descendre, marquer un arrĂȘt prend alors une importance plus forte .

A la recherche d’une centralitĂ© Nous dĂ©ambulons entre une ZAC, les zones rĂ©sidentielles, une autre ZAC (ou peut-ĂȘtre la mĂȘme, elles semblent si similaires que nous nous y perdons), les champs, des hameaux, un lac, 
 A la recherche de repĂšre, nous trouvons en ce dernier lieu, une opportunitĂ© pour s’arrĂȘter. Nous garons pour la premiĂšre fois la voiture, sur la grande place du marchĂ© prĂšs du bourg historique. Nous trouvons quelques magasins ouverts qui persistent mais de nombreux autres ont dĂ©jĂ  mis la clĂ© sous la porte. Le bourg, si commun Ă  toutes les villes avec son clocher et le charme de ses petites rues qui serpentent, est frappĂ©, comme tous les autres proches, des centres mĂ©tropolitains attractifs, par une fragilitĂ© et une possible disparition. On devine de nombreuses anciennes devantures de magasins rĂ©habilitĂ©s en habitations. Quelques-unes ont Ă©tĂ© folkorisĂ©es pour les besoins d’un film d’AgnĂšs Varda, Jacquot de Nantes en 1991, au bonheur des passants. “en terme de commerces, CouĂ«ron n’est pas vraiment dynamique, les magasins vivotent,

L’une de nos premiĂšres rencontres s’est faite avec Pierre, habitant couĂ«ronnais depuis une dizaine d’annĂ©es. Il nous a emmenĂ©s avec sa voiture d’un point Ă  l’autre sans en descendre. «Alors lĂ  c’est les ZAC, puis je vais vous montrer le lac Beaulieu oĂč je vais lire quand je m’ennuie ». Cela nous dĂ©montre que cette commune ne se dĂ©couvre pas Ă  pied, que cela n’est pas dans l’habitude des habitants malgrĂ© le fait que certains pratiquent les chemins pĂ©destres, comme Pierre, qui descend au lac Beaulieu par les petits sentiers de randonnĂ©es depuis sa maison. 16


ils ferment tous. Il ne se passe rien.” Dominique, habitante que nous croisons dans l’église. Les commerces peinent Ă  survivre car ils sont en concurrence avec les grands centres commerciaux comme «Atlantis» (le plus grand d’Europe lors de son ouverture en 1990) situĂ© Ă  10 min en voiture au nord de la commune, Ă  Saint-Herblain. Ce bourg en perte de vitesse abrite encore un marchĂ© tous les jeudis matins, mais il ne contient plus autant de stands qu’avant, au grand regret des habitants. “le marchĂ© est tout petit par rapport Ă  celui du Pellerin ou de Basse-Indre, moi je ne vais jamais Ă  celui de CouĂ«ron” parole d’atelier public.

denses contrastent avec les endroits vides et inhabitĂ©s des quartiers rĂ©sidentiels ou du centre-bourg de CouĂ«ron avec ses magasins fermĂ©s. Cela n’incite pas Ă  s’arrĂȘter, mĂȘme pour nous, pourtant en quĂȘte de dĂ©couverte. Les lieux attendus dynamiques comme le bourg, symbole de centralitĂ© et de vie active, se rĂ©vĂšlent finalement vides. Nos premiers allers et venues sur le terrain, nous les avons inscrits au travers d’un travail vidĂ©o comme si nous rĂ©alisions notre propre itinĂ©raire. Cela nous a permis de garder trace de ces premiĂšres impressions qui montrent comment nous avons commencĂ© Ă  prendre conscience des problĂ©matiques du site et de sa complexitĂ©.

Des flux incessants et des lieux vides Au quotidien le territoire est traversĂ© par diffĂ©rents flux, soumis aux mouvements pendulaires (travailhabitat). Tout le monde semble aller dans les mĂȘmes directions mais sans jamais se croiser. Ces passages

La citĂ©-dortoir ? “Oh mais qu’est ce que vous venez faire Ă  CouĂ«ron? C’est une citĂ©-dortoir, c’est pas dynamique. C’est un cul-de-sac faut vouloir y venir.» patron du bureau de tabac Ă  cĂŽtĂ© de l’église. Ces paroles revenaient constamment lors de nos rencontres, trĂšs vite effacĂ©es au fil des discussions, elles Ă©taient quand mĂȘme leurs introductions. DĂ©finie par l’encyclopĂ©die universalis, la citĂ©-dortoir “est une ville avec un marchĂ© du travail rĂ©duit et dont le principal but est de regrouper des logements. Les habitants sont donc employĂ©s dans une autre ville ce qui entraĂźne des dĂ©placements pendulaires entre la ville-dortoir et le bassin d’emploi.” CouĂ«ron avec la construction des nouvelles ZAC (Zone d’AmĂ©nagement ConcertĂ©) voit grandir sa population mais dĂ©cliner son Ă©conomie locale et le dynamisme de son centre-bourg. Nous constatons qu’elle pourrait 17


s’apparenter Ă  une citĂ©-dortoir. L’attrait, toujours plus grand des citadins pour l’air de la “campagne” reste liĂ© Ă  leur habitat. De nombreux mĂ©nages s’installent toujours plus loin des centre-villes pour concrĂ©tiser leur rĂȘve d’acquĂ©rir une maison individuelle avec jardin, tout en conservant un mode de vie citadin. Ainsi les personnes se croisent moins, prises par leur travail et leurs activitĂ©s personnelles. “les habitants semblent courir aprĂšs le temps, il y a beaucoup de circulation” ValĂ©rie, directrice du centre Pierre Legendre. Les nouvelles pratiques Ă©clatĂ©es de beaucoup d’habitants, dĂ©lient les interactions sociales.

Story-board de la video (extrait)

«des voitures qui vont toutes dans la mĂȘme direction, ...

... des frontiĂšres de feuillages,

Ce phĂ©nomĂšne questionne les fonctions et reprĂ©sentations des communes pĂ©ri-urbaines, car il ne favorise par leur diversitĂ© et l’attractivitĂ© de leurs activitĂ©s. Elles deviennent des extensions de la mĂ©tropole, en se vidant de leur substance de vie locale et de leurs spĂ©cificitĂ©s.

... mais oĂč courent tous ces gens ?

“Ces lieux situĂ©s Ă  mi-chemin entre deux milieux, Ă  cheval entre les rĂ©seaux de communications locaux et mondiaux soulĂšvent des problĂ©matiques liĂ©es Ă  l’absence d’inscription de ses lieux dans des dynamiques de proximitĂ©â€ nous dit Thomas Sieverts.

Alors que la ville est déserte, ...

Notre premiĂšre vision se lie parfaitement avec le premier discours des personnes rencontrĂ©es. Cette reprĂ©sentation du territoire partagĂ©e fait ressortir une problĂ©matique latente : celle de la diminution voir disparition des singularitĂ©s locales et d’une dĂ©pendance Ă©conomique, sociale Ă  une ville-centre dĂ©voreuse d’énergie.

les bords de Loire sont bien calmes , seuls des passants fantÎmes»

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DISCERNER LES LIMITES

terres bas ses de l abeur

CouĂ«ron est en fait une ville qui n’est pas une seule, c’est un

conglomérat, une juxtaposition, un collage de plusieurs entités.

Ăźle m

L’immersion sur le terrain, s’est accompagnĂ©e d’une Ă©tude cartographique. Celle-ci rĂ©vĂšle un territoire contraint, aux entitĂ©s marquĂ©s et aux lisiĂšres franches.

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Une composition fragmentĂ©e La construction de la ville prend la forme d’un papillon, avec deux entitĂ©s trĂšs distinctes que sont le bourg (historique) et la ChabossiĂšre. Ces deux ensembles fonctionnent de maniĂšre trĂšs indĂ©pendantes. Chacune se constitue d’un centre -ville avec son supermarchĂ© de proximitĂ©, ses boulangeries et bureaux de tabac. Sur le chemin de Nantes, le bourg de la Chab’ est nĂ©anmoins plus dynamique.

dérives des ßles - cartographie imaginaire

et qu’il y a une appartenance trĂšs marquĂ©e. Un habitant se dĂ©clarera CouĂ«ronnais ou Calbossien (« de la Chab’ ») selon son quartier de rĂ©sidence, selon son aile de papillon.

« Moi je vais faire mes courses au Super U lĂ -bas quand je rentre du travail, parce que CouĂ«ron-bourg quand on vient pas de lĂ , il faut vouloir y aller, c’est un cul-de-sac » parole d’une habitante du bourg de CouĂ«ron.

«Y’a deux Ă©quipes de foot, nous au collĂšge on ne parlait pas aux gens de la Chab, c’était pas nos amis » plaisante une jeune fille de 16 ans pĂȘcheuse rencontrĂ©e sur les bords du lac. “les gens de CouĂ«ron-bourg sont moins bourgeois que la Chab’ qui sont plus vers Nantes” habitante rencontrĂ©e sur la place du marchĂ©.

Les deux pĂŽles sont aussi dotĂ©s chacun d’écoles, de terrains de sports, d’un centre socio-culturel, d’une mairie ou mairie-relais,... Ce qui fait que les Ă©quipements de la commune existent tous en double,

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Ainsi, nous pouvons retrouver les Ăźlots rĂ©sidentiels de La ChabossiĂšre proche de Nantes, du bourg plus proche du sud et des hameaux dispersĂ©s dans la campagne. Mais aussi l’üle mystĂ©rieuse du Paradis avec le quai du bac, les Ăźles de loisirs comme celle du lac de Beaulieu, d’autres culturelles comme celle de la Tour Ă  Plomb avec la nouvelle mĂ©diathĂšque, des Ăźles regroupant des activitĂ©s Ă©conomiques comme celle de la zone d’activitĂ©s des Hauts de CouĂ«ron et enfin d’autres plus industrielles au Port Launay ou Ă  l’usine de traitements des dĂ©chets

Cette affirmation a Ă©tĂ© partagĂ©e ou dĂ©mentie plusieurs fois. Personne ne sait vraiment ce qui diffĂ©rencie les deux pĂŽles, ni pourquoi les habitants se moquaient les uns des autres, rien ne dĂ©finit vraiment l’identitĂ© de chaque bourg. Cette bipolaritĂ© contribue Ă  donner de CouĂ«ron une image de ville fragmentĂ©e dont les entitĂ©s qui la composent sont mono -fonctionnelles et autonomes, une ville riche d’insularitĂ©s qui se distinguent par leurs programmes et leurs Ă©chelles.

20


Arc-en-ciel. Ces fragmentations viennent sĂ©parer les fonctions de la ville et confirment ce sentiment de citĂ©-dortoir apparu dans le premier discours des habitants. Ces derniers vivent finalement dans des espaces essentiellement rĂ©sidentiels. Toutes les activitĂ©s sont dĂ©tachĂ©es de la ville : les usines ne font plus parties de leur quotidien (ce ne sont plus des bassins d’emplois) et les petites entreprises dans les Hauts de CouĂ«ron ou les fermes sont dĂ©tachĂ©es physiquement et socialement des poches de vie. Des contrastes autonomes Le territoire bĂąti est entourĂ© d’espaces ruraux comme la campagne et ses champs, les marais et la Loire qui le dĂ©limitent distinctement. Il existe Ă©galement un contraste fort entre la ville et la campagne. Le bĂąti semble s’ĂȘtre retournĂ© sur lui-mĂȘme et tourne le dos aux marais. Par exemple cela se traduit physiquement par l’implantation de maisons aux murs aveugles sur la route des marais dans le quartier de la ZAC Ouest CentreVille. Ce nouveau quartier accueille 1200 logements et de nombreuses nouvelles familles s’y sont installĂ©es depuis deux ans et ce jusqu’en 2017. Pour l’instant, entiĂšrement

constituĂ© d’habitats, cet espace s’ajoute comme un collage urbain supplĂ©mentaire qui ne dialogue que trĂšs peu avec les autres entitĂ©s. Des rives structurantes La distinction nette entre les diffĂ©rentes entitĂ©s s’explique au travers de la composition gĂ©ographique du territoire qui dĂ©finit diffĂ©rentes limites. Ce territoire au bord d’entitĂ©s bien distinctes marque des rives singuliĂšres, entre coteaux (bords de terres), Loire et marais (bords de mer). Le chenal de la Loire souligne CouĂ«ron d’une limite d’eau au sud.

façade sur marais 21


bords-à-bords - des entités géographiques qui fragmentent le territoire

des crues.” Marcel HĂ©naff, La ville qui vient.

Cette Loire caractĂ©rise aussi la forme du territoire par ses dĂ©bordements liquides et humides avec l’espace de marais situĂ© Ă  l’ouest de la commune. La topographie imposante du milieu avec l’écoulement du sillon de Bretagne au nord vient dessiner deux collines qui cisaillent le territoire et sur lesquelles se perchent les habitations. La genĂšse de la ville se contraint ainsi, comme beaucoup d’autre sur le territoire de l’estuaire.

Les usines s’établissent en contrebas de la ville au bord de l’eau sur des Ăźles, le Paradis est une ancienne Ăźle de Loire, le Port Launay (dont il n’a de port que le nom aujourd’hui) Ă©tait anciennement sur le bord de l’eau. Ces dispositions continuent d’influencer le dĂ©veloppement. de la ville. En 1850, la ligne de chemin de fer Nantes/Saint-Nazaire s’implante le long des lignes gĂ©ographiques et renforce la frontiĂšre d’urbanisation.

“Les villes ancestrales se sont Ă©tablies le long des cours d’eaux pour faciliter le transport des marchandises mais restaient sur des hauteurs protĂ©gĂ©es 22


23


AU DELÀ DES PARCOURS S’ARRÊTER

les anciens quais du Port Launay : la cale de la Pierre Tamis 24


SE REQUESTIONNER AprÚs nos premiers arpentages expérimentés dans le mouvement, nous avons ressenti la nécessité de faire halte et de reconnaßtre les discours majeurs. De cette envie nous avons cherché à questionner les évidences et remettre en perspective nos préjugés.

solitudes oĂč le va et vient des voitures ont Ă©tĂ© notre seule compagnie. L’éclipse de ces bruits se rĂ©vĂšle lors de l’arrivĂ©e d’une prĂ©sence humaine, qui, se faisant assez rare, la rend trĂšs importante. Nous ne dĂ©sespĂ©rons pas... La possibilitĂ© d’interaction sociale est tout de mĂȘme possible, Ă  l’image de ces enfants qui jouent dans cette rue ou de cet homme qui par le biais d’un chien nous interpelle. Notre prĂ©sence intrigue les quelques personnes que nous rencontrons. Nous nous retrouvons parfois Ă  Ă©crire sur un rocher, l’espace public Ă©tant rĂ©duit au trottoir, Ă  la route ou Ă  des jardins publics. Les enfants sont les seuls usagers qui dĂ©tournent les rĂšgles en jouant sur la route.

Nous nous sommes d’abord arrĂȘtĂ©s dans les nouvelles ZAC (celle Ă  l’ouest du centre-ville et celle de la MĂ©tairie Ă  la ChabossiĂšre). Ces zones Ă©taient le symbole au premier abord des problĂ©matiques de dĂ©veloppement urbain liĂ©es Ă  CouĂ«ron : espace mono-fonctionnel sans complexitĂ© sociale et sans singularitĂ© particuliĂšre. Tentative d’épuisement d’un lieu Le dispositif littĂ©raire a Ă©tĂ© un outil pour commencer une narration. DĂ©crire et Ă©crire la flĂąnerie c’est essayer de dĂ©construire la posture d’autoritĂ© que nous pouvions avoir sur les lieux en les jugeant vertueux ou non. Dans cette expĂ©rience nous Ă©tions Ă  la recherche du dĂ©tail troublant, de l’inconscient du territoire qui dĂ©placerait nos reprĂ©sentations. En s’inspirant de George Perec, dans son livre Tentative d’épuisement d’un lieu parisien, nous nous sommes arrĂȘtĂ©s longuement, en tentant de prendre en note tout ce que nous voyions. Nous avons tentĂ© de reprĂ©senter la vie quotidienne d’un lieu, sa monotonie, mais aussi notre perception, le dĂ©cor, le vivant.

Mise en place d’un mode d’écriture Ce moment nous a permis d’ĂȘtre dans une posture d’observation, pour capter l’essence du moment et la spontanĂ©itĂ© des actions, nous avons dĂ©crit d’une maniĂšre brĂšve, Ă  la volĂ©e notre vision du moment. Retenir l’espace qui s’écoule et se dilate dans le temps, en arrachant quelques bribes de ce qui dĂ©roule devant nous. “furtif : que l’on cherche Ă  dĂ©rober aux regards, qui ne dure qu’un bref instant.” dĂ©finition CNRTL

Description d’une expĂ©rience Nos rĂ©cits sont bruyants : le bourdonnement des voitures, le crissement des grues, le sifflement du vent ont Ă©tĂ© nos repĂšres. Nous avons essuyĂ© des moments de

Voici des extraits de trois dispositifs littéraires que nous avons faits chacun seul. 25


MERCREDI 14 OCTOBRE 2015 16h - ZAC OUEST CENTRE VILLE

MERCEDI 14 OCTOBRE 2015 14h15 - ZAC DE LA MÉTAIRIE

Au loin une voiture passe un sirĂšne retentit les oiseaux chantent un chien aboi Je lĂšve la tĂȘte car cette ambiance sonore est riche mais autour de moi personne ne passe un vespa une voiture au loin un avion qui vient couvrir les bruits une scie tourne Le bruit des travaux les grues les feuilles bougent de cette lĂ©gĂšre brise elles sont rouges et vertes en demi teinte ce qui annonce l’automne.

le temps est automnal avec quelques Ă©claircies. passage d’une voiture grincement de portiĂšre claquement de portes au loin une autre voiture sort de son garage le soleil revient. un chien aboie une femme au landau passe sur le boulevard. quelques oiseaux chantent une voiture repasse un lĂ©ger sifflement de marteau-piqueur une voiture sur le boulevard un jeune homme passe, promenant son chien l’animal s’arrĂȘte renifler Ă  mes pieds. “il est sympa votre chien, oĂč allez-vous le promener comme ça ?”. “au lac Beaulieu, ça fait un bout donc j’y vais en voiture”. “vous habitez dans le quartier ?”. “oui mais je vais partir, je fais construire une maison” la discussion continue briĂšvement sur la pluie et le beau temps puis se termine sur des salutations courtoises il repart dans sa voiture son chien Ă  l’arriĂšre une autre voiture arrive un enfant avec son vĂ©lo passe je le perds de vue trĂšs vite il est trois heures et quart le caillou sur lequel je suis assise me refroidit une voiture - j’en ai marre d’écrire ce mot - se gare au loin les feuilles des arbres bousculĂ©s par le vent sont les seuls mouvements permanents du quartier Pause.

Je m’assois sur un banc deux personnes empreinte un chemin de dĂ©sir J’ai l’impression quil m’observe Ils ont le choix droite ou gauche La droite mĂšne Ă  l’espace ou je suis hĂ©sitation il prĂ©fĂšre emprunter l’autre chemin les bruits du chantiers reprennent au loin Pause. DIMANCHE 18 OCTOBRE 2015 14h - ZAC OUEST CENTRE VILLE des enfants jouent au ballon ils crient le ballon est lancĂ© en cloche il est jaune crissement de pneu j’entends les voitures qui passent au loin le vent souffle les enfants continuent de jouer Maman !! bruit de ballon une voiture passe lentement et part il y a plus de voitures que de maisons les stores et les jardins sont fermĂ©s toujours les mĂȘmes enfants dans les mĂȘmes jardins sinon il n’y a que moi et mes copines les feuilles Pause.

un caillou comme assise 26


ATTACHEMENT AU LIEU Être Ă  l’écoute c’est amorcer

la reconnaissance de l’autre, ce qui dĂ©place notre vision

et donne de l’épaisseur au territoire.

coexistent

Ces

mais

personnes

elles

ont

la place de la mairie quand j’ai gamine, c’était lĂ  la place du marchĂ©.

Bah il y avait boulangerie, charc

Ici le jeudi c’était quelque chose d’important, donc c’était vraiment un

avait des opticiens, des bijoutier

centre qui était trÚs animé, moi je venais tous les jeudis matin avec

avoir... Et maintenant il y a une

mes grands-parents c’était un peu la fĂȘte d’aller au marchĂ© avec eux.

a des magasins qui vivotent et q

C’est rĂ©duit de peau de chagrin, il y a plus de marchands mĂȘme si il y

tellement de vie
 pff non on ne

a toujours le marché.

niveau du commerce, ça vivote...

On est sur le boulevard de l’Europe qui est relativement rĂ©cent en fait.

Alors les marais sur le plan affe

LĂ  il y avait des vignes Ă  l’époque, le grand-pĂšre de mon mari avait des

beaucoup parce que quand j’ét

vignes ici. LĂ  c’est le jardin de mes grands-parents. C’était un chemin

on allait souvent le dimanche a

de terre-battu, de chaque cĂŽtĂ© il y avait des petits ricoulets, c’était de

y avait les grands-parents, les p

l’herbe, c’était creusĂ©, et quand il pleuvait il y avait de l’eau, notre

enfin ça pĂȘchait tout ce monde

petit jeu c’était de faire passer les bateaux dans ces petits ruisseaux.

on vient ici.

chacune une façon d’habiter, une maniĂšre particuliĂšre d’ĂȘtre

et de percevoir leur lieu de vie. “Le vieux mot bauen auquel se rattache bin, nous rĂ©pond : “je suis”, “tu es”, veulent dire : j’habite, tu habites. La façon dont tu es et dont je suis, la maniĂšre dont nous autres hommes sommes sur terre est le bauen, l’habitation. ĂȘtre homme veut dire : ĂȘtre sur terre comme mortel, c’est-Ă -dire : habiter” Martin Heidegger Mais que veut dire “habiter” Ă  CouĂ«ron ? N’étant que des passeurs d’un temps sur ce territoire, il nous Ă©tait nĂ©cessaire d’aller Ă  la rencontre des personnes, de leurs pratiques et rĂ©cits qui les dĂ©finissent et les font habiter vĂ©ritablement.

transforme au grĂ© de nouvelles constructions, de destructions, de nouveaux arrivants. MalgrĂ© la disparition des chemins de son enfance elle retrace leurs lignes et nous emmĂšne dans son univers. Nous avons rendez-vous sur la place de la mairie, puis nous descendons au centre-bourg, fleuron de la vie passĂ©e Ă  CouĂ«ron. Dominique nous conte la familiaritĂ© qu’elle peut entretenir avec ce lieu car chaque boutique mĂȘme vide aujourd’hui, est marquĂ©e d’une mĂ©moire, d’un nom, d’une anecdote. Le parcours est ponctuĂ© de nombreux arrĂȘts car les rĂ©cits ne manquent pas et ils retracent des histoires de gĂ©nĂ©ration

Les paysages d’une histoire Nous avons rencontrĂ© Dominique, dĂšs nos premiers pas Ă  CouĂ«ron, dans l’église. C’est une personne du “coin”, elle habite ici depuis qu’elle est “gamine”. Elle nous a guidĂ©s sur les traces de son histoire, animĂ©e par cette envie de transmettre et de partager des rĂ©cits qui ne devraient pas ĂȘtre oubliĂ©s. Le territoire se 27


cuterie, tous les magasins de base, il y

dans le centre, il y a la presse qui marche avec les fumeurs, et lĂ  une

lĂ  vous voyez c’est marquĂ© “propriĂ©tĂ© privĂ©e” on se demande bien

rs enfin tout ce qu’une bourgade peut

boulangerie, c’est la troisiĂšme gĂ©nĂ©ration de boulangers, j’ai connu

pourquoi parce que l’on n’a pas envie de passer par là. C’est un passage

e charcuterie qui reste... et le reste il y

le grand-pÚre, qui faisait sa tournée dans un vieux Citroën gris à

qui a servi pendant la guerre. C’est un passage qui donne sur la Loire,

qui ferment. On peut pas dire qu’il y a

l’époque, il avait un klaxon particulier Ă  sa petite camionnette, et il

Et je pense qu’ils ont mis «propriĂ©tĂ© privĂ©e» pour ça, maintenant les

e peut pas dire que ce soit trĂšs vivant au

s’arrĂȘtait devant chez nous. c’est la troisiĂšme gĂ©nĂ©ration, le fils qui

nouveaux Couëronnais ils ne savent pas, ils ont dû en avoir marre

.

reprend. Il y a quand mĂȘme des choses qui durent.

d’avoir des gens qui voulaient aller voir.

ectif, c’est vraiment un lieu qui me plaüt

Il y a tout un systĂšme d’étiers et d’écluses pour rĂ©guler.Mais c’est un

En hiver il y a souvent de la glace, c’est magnifique. Quand les prĂ©s

tais gamine mon grand-pÚre péchait et

peu en dĂ©crĂ©pitude. LĂ  aussi ça me fait mal au cƓur car lĂ  aussi c’est

sont inondĂ©s et qu’il y a un peu de soleil, il y a des reflets magnifiques.

avec les glaciĂšres et les pique-niques, il

du patrimoine, c’est vraiment super d’avoir ça Ă  CouĂ«ron, car les gens

Quand il n’y pas de vent, l’eau ne bouge pas et ça fait des reflets

parents, le beau-frĂšre, mon grand-pĂšre

ils sont de plus en plus déconnectés de la nature

parfaits. Ça me fait plaisir de partager les choses qui me plaisent. Ici

e-là... C’est vraiment le paradis quand

le dimanche matin, il y plein de cyclistes et de coureurs à pied. Comme c’est plat. Nous on vient promener le chien ici.

GuidĂ©s par ses rĂ©cits, nous parcourons la commune dans sa voiture, oĂč elle nous raconte l’importance de la famille dans son attachement au territoire. Quand elle Ă©tait plus jeune, elle ne pensait pas rester ici. Et pourtant aujourd’hui elle est trĂšs ancrĂ©e dans sa commune car sa famille, celle de son mari, habitent ici depuis cinq gĂ©nĂ©rations. Pour finir, elle nous emmĂšne dans les marais, qu’elle affectionne particuliĂšrement parce que ce lieu est un paysage Ă  la fois ressourçant et source d’un certain art , mais Ă©galement l’endroit de tout les souvenirs familiaux qui conditionnent son attachement au territoire.

en gĂ©nĂ©ration. Les commerces, le chantier Fouchard, se lĂ©guent de pĂšre en fils, de mĂšre en fille. La transmission conditionne son choix Ă  nous montrer le territoire, car il est essentiel que cela continue. “J’aimerais qu’il existe des lieux stables, immobiles, intangibles, enracinĂ©s (...) de tels lieux n’existent pas, et c’est parce qu’ils n’existent pas que l’espace devient question, cesse d’ĂȘtre Ă©vidence, cesse d’ĂȘtre incorporĂ©. l’espace est un doute : il me faut sans cesse le marquer, le dĂ©signer ; il n’est jamais Ă  moi, il ne m’est jamais donnĂ©, il faut que j’en fasse la conquĂȘte” Georges Perec 28


ho

Les gens sont J'ose mĂȘme plus pas mal au cƓur de voir

!

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LES MARAIS

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le oĂč l'Ă©co c'est Ah lĂ  ari, m mon Ăšre p pĂšre mon n grand- le. o co Ă© m l' t Ă  e ici, allĂ©s sont s amĂšne oris Vian B u Je vo thĂ©Ăątre le c'est

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je slongtems que trĂšs petit uis Ăšs trĂšs us des dep is tr -vo ça a a m endez ds r ten fait, ç st le 'en e e, j d'ĂȘtre re, c' oir qua in e L ste s d t ju tit s jard ord nt tou un pe s de a sb Le a vie l y a ont p i et ç n lĂ  ui n’ , bo ants q enf

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tout le monde connaßt Jean-Jacques Audubon, c'est un personnage qui est trÚs connu, il a habité un petit peu à Couëron,

*

il y avait les grands-parents, les parents, le beau-frĂšre, mon grand-pĂšre enfin ça pĂȘchait tout ce monde-lĂ ... On emmenait le scrabble,

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quand j'Ă©tais gamine

parce que mon grand-pÚre péchait et on allait souvent le dimanche avec les glaciÚres et les pique-niques,

Moi

c'est quand mĂȘme.... avec les maisons d'armateurs il paraĂźt qu’aux États-Unis

;

Alors les marais sur le plan affectif, c'est vraiment un lieu qui me plaĂźt beaucoup

te es ui tq ,e e né

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s marais et là, n lotissement. couëronnais qui trouve ça beau. gements en bois qui vieillissent trÚs mal.

orrifiés de la laideur.

sser à cet endroit, ça me fait trop comment ça a été défiguré.

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lieu de souvenir lieu d’émotion lieu conventionnĂ© lieu de rumeur


Bourellet «protecteur»

TERRITOIRE ONDULANT

Ligne de rives

“Si on disait ça Ă  quelqu’un qui n’est pas de CouĂ«ron il ne nous

croirait pas, mais ici c’est une terre qui ondule” Yannick

Cet agriculteur local nous a beaucoup inspirĂ©s dans notre dĂ©marche et a dĂ©clenchĂ© de nouvelles perspectives. Ce territoire ondulant est une association mĂ©taphorique inventĂ©e de plusieurs phĂ©nomĂšnes qui forment les singularitĂ©s de CoĂŒeron. Il prend sens car il exprime Ă  la fois le paysage changeant, entre les marĂ©es journaliĂšres et saisonniĂšres, mais aussi les mouvements d’immigrations sociales, ces marĂ©es humaines qui constituent une des spĂ©cificitĂ©s du territoire.

Prés de Loire

Un paysage en mouvement La Loire n’a pas qu’une rive mais des rives. Au rythme de ses dĂ©bordements elle essuie les terres le temps d’une heure, d’une journĂ©e, d’une saison. Les Ăźles de Loire sont frĂ©quemment inondĂ©es par le fleuve Ă  marĂ©e haute. Les prĂ©s et les marais internes quant Ă  eux ne sont submergĂ©s que lors des grandes marĂ©es d’hiver. Les marais de la vallĂ©e de la Musse se situent dans une cuvette marquĂ©e par un bourrelet “protecteur”qui les sĂ©parent des prĂ©s de Loire. Ces espaces sont donc en perpĂ©tuelle recomposition au fil des saisons et des marĂ©es. Ils sont considĂ©rĂ©s comme des zones fragiles Ă  prĂ©server pour la riche biodiversitĂ©

septembre

novembre

qu’ils accueillent.

31


Vallée de la musse

usines de la Tour Ă  Plomb

usines de basse-indre

Un territoire modelĂ© par l’homme Ce fonctionnement est en grande partie contrĂŽlĂ© par l’homme. L’évacuation des eaux est rĂ©gulĂ©e par des Ă©tiers et des digues, systĂšmes façonnĂ©s au XIIĂšme siĂšcle par les moines pour les besoins de l’agriculture. Le marais est donc un paysage fabriquĂ© par la main de l’homme et ce encore aujourd’hui. Le systĂšme hydraulique est gĂ©rĂ© par le syndicat des marais de Saint-Etiennede-Montluc/CouĂ«ron mais aussi par les agriculteurs. Ces amĂ©nagements sont indispensables Ă  l’exploitation agricole et donc Ă  la prĂ©servation du marais. L’entretien par le pĂąturage et

fonctionnement des marais et du systùme d’irrigation (coupe GIP Loire)

32


Des vagues d’immigrations Lors de nos rencontres, il nous a souvent Ă©tĂ© relatĂ© que “CouĂ«ron est la ville la plus cosmopolite de l’ouest, il y a eu jusqu’à 21 nationalitĂ©s diffĂ©rentes”. Cette diversitĂ© culturelle s’explique Ă  travers son histoire ouvriĂšre et encore aujourd’hui par des politiques publiques favorisant l’accueil de nouveaux arrivants.

le fauchage conserve la biodiversitĂ© de cet espace. “Il faut dire aux gens que les marais sont un lieu de travail” nous dit l’agriculteur. Chaque Ă©lĂ©ment est le fruit d’un amĂ©nagement par l’homme, jusqu’aux arbres-tĂȘtards caractĂ©ristiques du milieu qui ont une forme particuliĂšre due Ă  la rĂ©colte traditionnelle de leurs branches pour le feu de bois. Aujourd’hui ces arbres abritent une faune exceptionnelle. Les marais sont un lieu d’activitĂ©s singuliĂšres en relation avec l’eau, l’entreprise Fouchard abritĂ©e le long d’un Ă©tier fabrique des bateaux. “Il y a une culture traditionnelle, ils crĂ©ent de vieux grĂ©ements, des bateaux en bois, c’est une menuiserie” Dominique. La question du mouvement dans ces espaces est un rĂ©elle richesse “On a jamais une annĂ©e qui ressemble Ă  l’autre, il faut s’adapter et savoir bien observer” Yannick l’agriculteur.

Un peu d’histoire Le dĂ©veloppement de son parc industriel sur les bords de Loire au XIX et XXĂšme siĂšcles a participĂ© Ă  la constitution d’une histoire sociale et de la construction de la ville. En 1914, lors de la premiĂšre guerre mondiale, les usines, en quĂȘte de main d’oeuvre, ont recrutĂ© de nombreux ouvriers Ă©trangers. Entre 1921 et 1926 la population a augmentĂ© de 30% on notera dans les registres de la mairie 24% d’étrangers (dont 57% Polonais, 22% d’Espagnols). Ces afflux de populations ont fortement conditionnĂ© l’urbanisation de la ville. Les forges de BasseIndre ont notamment dĂ©terminĂ© le dĂ©veloppement de la ChabossiĂšre et les usines Pongibaud, l’implantation des citĂ©s ouvriĂšres du Bossis et Bessonneau. Les traces de cette culture de mĂ©tissage sont encore aujourd’hui trĂšs prĂ©sentes dans les discours et le patrimoine (Ă©glise polonaise, citĂ© ouvriĂšre).

Ce territoire Ă©volutif se comprend aussi autour de son histoire sociale.

Arbre TĂ©tard

Dans sa proximitĂ© avec Nantes, CouĂ«ron s’est continuellement construite autour de l’accueil des nouvelles populations qui avaient besoin d’ĂȘtre logĂ©es pour travailler. Avec l’attractivitĂ© des villes, depuis les annĂ©es 1950, la commune n’a cessĂ© de croĂźtre, de s’étendre. Dans les annĂ©es 1980, on note une explosion du tissu pavillonnaire et aujourd’hui

Chantier Fouchard

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encore avec la construction des ZAC, nouveaux quartiers dans la ville. La diversitĂ© sociale, une force pour bĂątir ensemble Cette histoire est importante Ă  rappeler car elle est l’amorce d’une ville qui a pour coutume l’accueil de nouvelles populations. Ces vagues d’immigration ont Ă©tĂ© la naissance d’une force et d’une certaine tolĂ©rance au sein de la commune.

Les forges de Basse Indre 1940

Nous avons rencontrĂ© RĂ©gine, Vasyl et Carlos autour d’une part de gĂąteau, un mercredi aprĂšs-midi. Tous trois issus de l’émigration polonaise ou espagnole, ils nous ont contĂ© comment l’histoire ouvriĂšre fut mĂšre d’une importante solidaritĂ© sociale. “Il y a eu des pĂ©riodes dĂ©licates de cohabitation, mais l’intĂ©gration s’est faite rapidement. Le travail Ă  l’usine c’était trĂšs dur. Comme tout le monde allait y travailler, comme tout le monde Ă©tait dans le mĂȘme bateau, il y avait une grande solidaritĂ© sociale et de l’entraide.” Ils nous dĂ©crivent un certain dynamisme de la vie Ă  cette Ă©poque. “Entre Polonais, Espagnols, Ă  CouĂ«ron on faisait la fĂȘte
 Le bal c’était sortie obligatoire, on allait au Pellerin danser, voir les filles. On avait pas le choix, il n’y avait pas de transports alors on se retrouvait toustle dimanche pour faire un foot”.

Les usines Pontgibaud début du XXÚme

La cité ouvriÚre Bessonneau

Les maisons Castors

“Les modes de vie ont Ă©voluĂ© c’est complĂštement diffĂ©rent maintenant” mais les CouĂ«ronnais s’investissent encore pour essayer de prĂ©server la vitalitĂ© de ce rĂ©seau social. Il persiste encore aujourd’hui: les nouveaux arrivants qui s’installent nombreux avec l’urbanisation intense de la ville, s’inscrivent souvent dans les associations et apportent de nouvelles dynamiques.

L’église polonaise 34


INTERACTIONS EN RESEAUX Plus nous avançons dans l’expĂ©rience, plus il nous est difficile de ne

pas reconnaĂźtre un visage, d’esquisser un bonjour, ou bien d’ĂȘtre nous-mĂȘme reconnus dans la rue.

associatifs se sont des endroits de rassemblement” nous explique Carlos. Les habitants regorgent d’initiatives toutes plus crĂ©atrices les unes que les autres, de l’association protectrice des pigeons aux tricoteuses d’arbres, ce sont surtout des prĂ©textes pour faire ensemble.

Nous dĂ©couvrons petit Ă  petit les parties cachĂ©es de l’iceberg. De nos premiĂšres impressions d’une ville oĂč peu de choses dialoguaient entre-elles, nous avons maintenant l’impression qu’ici, tout le monde se connaĂźt. «Quand on va quelque part on sait Ă  quelle heure on rentre mais on sait pas Ă  quelle heure on en sort» nous lance la maire. «Des fois, il vaut mieux rester cachĂ© plutĂŽt que de sortir de chez soi et ne pas pouvoir marcher tranquillement » nous dĂ©clare une autre habitante du Bourg d’Aval. Notre rencontre avec l’ancien postier nous fait Ă©galement sourire: Ă  CouĂ«ron il y aurait un canal radio nommĂ© “radio qui-baise-qui” . Nous remarquons que la plupart des personnes se connaissent presque dĂ©jĂ  toutes entre-elles, par le biais d’une association ou d’une autre personne. C’est une ville de 20000 habitants mais nous avons l’impression d’ĂȘtre dans un petit village oĂč tout se sait. «oh il paraĂźt que vous avez fait un stop au bac?» nous rĂ©plique un habitant que nous rencontrons suite Ă  notre atelier.

La volontĂ© de faire ensemble Nous avons commencĂ© Ă  dĂ©couvrir quelques-uns de ces lieux mais il y en a certainement bien d’autres, ce sont J’ai Ă©crit un article sur les femmes qui tiennent un bar Ă  CouĂ«ron. Le Paradis , c’était mon rĂȘve de gosse.

Christelle du Paradis (patronne du bar)

Le C Lo

En attendant le bac, les gens viennent prendre un verre. Le bac ça fait partie de la ville.

CouĂ«ron, c’

Bernard (Prof. de sport à Couëron)

Nathalie (Habitante) Tous les dimanches, c’est parc du bord de Loire.

Les bords de Loire ont été aménagés avec une esplanade et un square

J’emmùne souvent mes On se retrouve entre mamans à l’aire de jeux. enfants au square et je rencontre mes copines.

Ce rĂ©seau s’explique Ă©galement par un tissu associatif dense (plus de 140 associations). On compte Ă©galement deux centres socioculturels et beaucoup d’équipements publics relatifs au sport, Ă  la culture et Ă  l’enseignement. “Les lieux

Un réseau invisible

Audrey

Jocelyn

(Habitante)

(Habitante depui

Logan (Collégien)

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des trĂ©sors bien gardĂ©s. Il y a la “Cab Ă  Lulu”, oĂč l’on s’est arrĂȘtĂ© par hasard. C’est une baraque Ă  frites posĂ©e prĂšs du rond point du Carrefour Market. Il parait que c’est le repĂšre des CouĂ«ronnais nous dit le chef. Les ouvriers qui travaillent Ă  Arcelor Mittal vers Indret viennent jusqu’ici pour dĂ©jeuner car l’ambiance est lĂ , tout le monde se connaĂźt. En questionnant Lulu, il est plutĂŽt fier du lieu qu’il a crĂ©Ă©, “j’ai transformĂ© un champ de patates en champ de foire”, la pĂ©rennitĂ© de son activitĂ© n’était pas assurĂ©e, mais aujourd’hui ça marche et ça fait du lien social. «Lulu c’est trop bien qu’il soit ici parce qu’il met de l’animation ça fait des rĂ©unions tous les jours. Quand il fait beau c’est blindĂ©â€ client de Lulu.

Thierry (ancien postier) Je connais tout le Dans le Bourg d’Aval, monde dans le Bourg. il y a beaucoup d’entraide. Avec mes voisins, on s’occupe d’un petit jardin.

Floriane (habitante depuis 20 ans)

es nouveaux arrivants aiment CouĂ«ron pour sa proximitĂ© Ă  la oire. CouĂ«ron, on est Ă  la mer, il y a une appartenance Ă  la ’est la Loire. Loire. La premiĂšre chose que je voulais faire, c'Ă©tait de rebaptiser la ville CouĂ«ronsur-Loire.

té e e.

s e .

Patrick Naizin

Pierre (habitant du Bourg d’aval)

Didier de la médiathÚque

KĂ©vin

(nouvel arrivant)

(Habitant depuis 22 ans) La “maison en plastique”, C’est vraiment un dĂ©lire de l’architecte.

J’ai fait partie J'ai montĂ© une d’une liste liste Ă©lectorale. Ă©lectorale.

(Adjoint à l’urbanisme)

Les ZAC, je ne connais pas un CouĂ«ronnais qui aime Pour ces nouvelles ça. constructions, bravo, l’architecte s’est fait plaisir!

DOMINIQUE (Habitante depuis cinq générations)

Nous allons créer des aires d'accueil pour les gens du voyage. Je travaille avec des enfants roms.

Yannick

Il faut du temps pour faire des choses avec eux mais le lien c’est Ă  toutes les Ă©chelles.

ne

Quentin

is 4 ans)

(membre de l’AJAM)

Je vais manger chez lui assez souvent. Y a plein de kebab comme la “Cab Ă  Lulu”. Tout le monde vient manger ici : des ouvriers, des lycĂ©ens, des banquiers,...

Lulu (baraque Ă  frite)

D’autres rencontres nous ont marquĂ©s, comme celle de la JAM (Jardin AnimĂ© des Marais), une association qui utilise le “jardinage comme prĂ©texte pour renforcer le lien entre les personnes”. Ils sont actuellement en train de construire leur lieu de rencontre Ă  la lisiĂšre des marais. “la JAM ensemence de nombreux autres lieux comme les cours d’écoles qui se transforment en potager, en lieu de vie, de rencontre. On travaille aussi avec les agriculteurs en faisant connaĂźtre leurs activitĂ©s aux habitants, pour qu’il y ait du lien”. DerriĂšre ces visages, ces actions, il y a une rĂ©elle volontĂ© de retisser le territoire autour du lien social. “la vertu urbaine, l’urbanitĂ© est la construction collective de relations sociales”. Henri Lefevre. Ces attitudes habitantes envers leur territoire exprime donc un degrĂ© d’urbanitĂ© important, que nous percevons comme une vĂ©ritable force pour Ă©laborer la ville de demain.

Alors les marais sur le plan affectif, c’est vraiment un (Agriculteur) lieu qui me plaĂźt beaucoup. La majoritĂ© de l’annĂ©e, mes vaches sont dans les marais. L’AJAM travaille dans les marais. Le marais, c’est dangeureux, je n’y vais jamais.

RĂ©gine (habitante d’origine polonaise) On se retrouvait au bal. Les bals, c’était quelque chose. Ah, si on regardait les polonaises, gare Ă  36 la castagne.

Wasyl dit Piste-A-Poux (habitant d’origine ukrainienne)

Carlos

(habitant d’origine espagnole)


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UNE ESCALE A COUËRON S’ANCRER

le passage d’un bateau un dimanche aprĂšs-midi est un Ă©vĂšnement pour tous, le temps s’arrĂȘte 38


LANCER LE DEBAT Les

rencontres

ATELIER PUBLIC

Partageons

sur couËron du 4 au 8

novembre 2015

IL PARAIT QUE ... Couëron est un village des bords de Loire

fortuites,

entretiens longs ou moments intenses effectués lors de nos

Partageons

sur couËron

ATELIER PUBLIC du 4 au 8 novembre 2015

arpentages, nous ont permis d’ĂȘtre plus proche de ce que

IL PARAIT QUE ...

veut dire “habiter Ă  CouĂ«ron”.

Couëron est au bord de la mer

Pour continuer Ă  saisir ce sens, nous sommes entrĂ©s en immersion durant cinq jours en organisant des ateliers publics sur le terrain. Lors de nos rencontres avec les habitants, notre attention s’est arrĂȘtĂ©e sur des points sur lesquels les discours divergeaient. Nous nous sommes appuyĂ©s sur ces Ă©lĂ©ments pour tenter de lancer le dĂ©bat et inciter les habitants Ă  prendre position et se rĂ©pondre. Pour cela, nous avons voulu interpeller en utilisant un mode d’expression que nous avions prĂ©alablement dĂ©couvert lors de nos premiĂšres rencontre : la rumeur. A CouĂ«ron, les gens parlent et les nouvelles vont vite, trĂšs vite. “il parait que 
”

le dĂ©bat. Il s’agissait Ă©galement de questionner Ă  nouveau CouĂ«ron sur certaines Ă©vidences que nous avions dĂ©jĂ  commencĂ©es Ă  dĂ©construire. Les cartes postales et des affiches ont Ă©tĂ© distribuĂ©es dans les boutiques et Ă©quipements de la ville. Ainsi que dans quelques boites aux lettres individuelles.

Le mot rumeur vient du latin “rumor” qui signifie “bruit vague, bruit qui court, nouvelle sans certitude garantie”. La rumeur est sans doute le plus vieux mĂ©dia du monde. Pour communiquer cet atelier public, affiches et flyers sous formes de cartes postales ont Ă©tĂ© utilisĂ©s. Chacune avait une phrase d’ accroche et une photo en dĂ©calage afin de stimuler

La distribution des tracts a Ă©tĂ© une Ă©tape clĂ©. En effet, ce fut l’occasion d’inviter un passant qui ne nous 39


emporter la carte chez soi et commencer à discuter pour venir ensuite poursuivre le débat

promettait pas forcĂ©ment de venir mais au moins d’essayer, ou bien d’obtenir nos premiers Ă©changes sur les comptoirs des commerçants qui en voyant nos cartes postales dĂ©clenchaient dĂ©jĂ  le dĂ©bat. Dans nos arpentages nous dĂ©couvrions des lieux et des personnes comme le relais-mairie de la ChabossiĂšre, par exemple, invisible Ă  nous jusqu’alors, Pousser la porte nous a permis de faire la connaissance de son employĂ©e. Nous nous sommes assis

plusieurs heures pour discuter et dĂ©couvrir plein de nouvelles choses sur ce quartier de la ville. “C’est convivial ici, on peut discuter autour de cette table, souvent les gens restent comme vous. J’ai aussi un rĂŽle d’assistante sociale, j’écoute, j’aime beaucoup ça.” Au delĂ  d’un simple mĂ©dia ce moment fut un vĂ©ritable outil de reconnaissance auprĂšs des CouĂ«ronnais. 40


DES LIEUX, DES PERSONNES, DES ÉCHANGES A CouĂ«ron, encore une fois nous avons Ă©tĂ© guidĂ©s. Lors de notre

premier itinĂ©raire nous a Ă©tĂ© Ă©mis l’idĂ©e du centre socio-culturel pour notre atelier. Ici c’est un peu la ville idĂ©ale, toutes les portes se sont ouvertes Ă  nous.

Nous avons dĂ©cidĂ© de contacter la municipalitĂ© pour se faire connaĂźtre, et prĂ©senter notre dĂ©marche. Cette volontĂ© Ă  Ă©tĂ© prĂ©cĂ©dĂ©e par la rencontre fortuite avec l’adjoint Ă  l’urbanisme Patrick Naizain. TrĂšs intĂ©ressĂ© par notre dĂ©marche, il donnait son accord pour organiser les ateliers publics dans une salle municipale mais nous soumettais plutĂŽt de trouver un lieu sans attache politique afin de favoriser une certaine libertĂ© de parole. La maire, rencontrĂ©e plus tard, s’est elle aussi montrĂ©e enthousiaste et nous a trĂšs bien accueillis.

deux bourgs distincts, nous nous sommes trĂšs vite posĂ© la question de la pertinence d’un atelier fixe. En effet, nous avions peur de rĂ©colter des paroles d’habitants que d’un pĂŽle de la commune. C’est pourquoi, nous avons amĂ©nagĂ© un quartier gĂ©nĂ©ral fixe pendant deux jours au centre socio-culturel Pierre Legendre Ă  CouĂ«ron-bourg puis nous nous sommes dĂ©placĂ©s. Sur les deux marchĂ©s de la ville mais aussi devant la mĂ©diathĂšque et sur les bords de Loire. Pour les ateliers mobiles, un barnum nous a trĂšs facilement Ă©tĂ© prĂȘtĂ© par la mairie. Pour l’atelier fixe, aprĂšs vĂ©rification des disponibilitĂ©s, nous avons Ă©tĂ© invitĂ©s Ă  investir le forum, lieu central du bĂątiment.

Le choix du lieu Par l’étendue du territoire, avec ces

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assez Ă©mancipateur en ce qu’il nous permettait de sortir du cadre pĂ©dagogique, nous a aussi permis de se fĂ©dĂ©rer collectivement. Ces cinq jours n’étaient pas seulement l’atelier mais aussi un moment que l’on partageait Ă  quatre, qui nous a rĂ©unis autour de dĂ©bats parfois houleux sur l’architecture, la ville, notre futur. Les ateliers continuaient le soir en rentrant chez nous autour de table de discussions et de feuilles de papiers griffonnĂ©es qui ont Ă©tĂ© de bons supports pour synthĂ©tiser les journĂ©es.

Par ailleurs, le centre socio-culturel a Ă©tĂ© intĂ©ressĂ© par notre dĂ©marche car il se trouve actuellement dans l’élaboration de son projet social qu’il renouvelle tous les quatre ans afin d’avoir l’agrĂ©ment de la CAF et ainsi obtenir des subventions. Ce projet consiste Ă  comprendre les besoins et dĂ©sirs des habitants inscrits ou non au centre pour ensuite proposer un panel d’activitĂ©s qui leur correspond. Ainsi, notre volontĂ© d’atelier permettait au centre de commencer Ă  rĂ©colter des informations. Dans cette relation d’échange, nous avons Ă©tĂ© invitĂ©s Ă  partager notre expĂ©rience et nos premiĂšres analyses suite Ă  nos ateliers publics lors d’une rĂ©union devant les membres du centre socioculturel. Nous sommes amenĂ©s Ă  poursuivre cet Ă©change suite Ă  l’écriture de ce mĂ©moire.

Cet atelier public a Ă©tĂ© trĂšs riche, beaucoup d’habitants se sont prĂȘtĂ©s au jeu. “Apparemment vous avez fait de l’effet.” nous a Ă©crit Dominique dans un sms suite aux ateliers.

Se poser des questions et ĂȘtre Ă  l’écoute Ce moment nous a permis de prendre une posture d’écoute, pour recevoir les rĂ©cits, les Ă©motions, les souvenirs des habitants sur leur territoire. Beaucoup passaient sans avoir la volontĂ© de livrer Ă©normĂ©ment mais finissaient parfois par rester plus d’une heure en notre compagnie. Chacune des rencontres fut singuliĂšre, tant de rencontres nous ont plongĂ©s en Ă©tat d’effervescence oĂč nous avions le sentiment de progressivement habiter le territoire et d’acquĂ©rir une connaissance plus fine bien que restante subjective. Le temps des ateliers publics a Ă©tĂ© une expĂ©rience intense de notre immersion dans le territoire. Un temps d’arrĂȘt nĂ©cessaire, qui a marquĂ© une Ă©tape dans notre rĂ©flexion et surtout une opportunitĂ© de se poser des questions. Ce moment

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Les dispositifs des ateliers

baladaient. De la mĂȘme maniĂšre, le hors-cadre Ă©tait posĂ© pour Ă  priori ne pas ĂȘtre rempli, car nous attendions des lieux spontanĂ©s et inattendus au sein de la commune.

Ces moments de nĂ©gociations ont avant tout permis d’établir un dialogue commun, un vĂ©ritable espace d’échanges avec ceux qui pratiquent et connaissent le territoire. 1. CouĂ«ron, on y passe
 et 
 on y reste Deux premiers ateliers ont Ă©tĂ© pensĂ©s de maniĂšre complĂ©mentaire : Ă  l’image des discours binaires que nous avions dĂ©celĂ©s, entre une vie Ă  grande Ă©chelle et une vie locale. Le premier atelier visait Ă  questionner les trajets quotidiens Ă  grande Ă©chelle. Nous cherchions Ă  infirmer ou confirmer la problĂ©matique de la citĂ©-dortoir. Il se prĂ©sentait sous la forme d’une carte Ă  l’échelle mĂ©tropolitaine avec un cadre dĂ©sopacifiĂ© pour sous-entendre le horscadre sur lequel les participants dessineraient probablement la plupart de leurs trajets.

Cet atelier a surtout Ă©tĂ© un support pour parler spontanĂ©ment des pratiques. Nous l’avons fait Ă©voluer lors des ateliers itinĂ©rants, en le transformant en une question: “CouĂ«ron, la ville idĂ©ale?”. Un dĂ©bat s’est alors construit entre les habitants, ville idĂ©ale pour certaines tranches d’ñges de la population elle l’est moins pour d’autres, notamment pour les jeunes.

2. CouĂ«ron demain L’un des ateliers se composait d’une grande feuille blanche sur laquelle les habitants pouvaient Ă©crire, dessiner et coller des images. Il s’agissait de les questionner sur l’avenir de CouĂ«ron, comme ils l’imaginaient ou ce qu’ils souhaitaient pour leur ville. Les gens pouvaient rajouter des Ă©lĂ©ments ou bien rĂ©pondre aux souhaits des premiers habitants.

Le second atelier quant Ă  lui, interrogeait les lieux de vies Ă  l’échelle locale. Les participants indiquaient sur une carte Ă  l’échelle de la commune les endroits oĂč ils faisaient les courses, oĂč ils se

Ainsi, Ă  l’issue de la semaine, se sont engagĂ©es sur cette feuille de papier, des discussions. Les personnes ont 43


3. Suivez le guide Le troisiĂšme atelier Ă©tait intitulĂ© “Suivez le guide - Moi Ă©tranger, oĂč m’emmĂšnerais tu Ă  CouĂ«ron? “. Sur une feuille blanche, les participants avaient la possibilitĂ© de dessiner ou bien d’écrire sous forme de liste les endroits qu’il Ă©tait important pour eux de nous montrer. Les enfants ont Ă©tĂ© les premiers intĂ©ressĂ©s par cet atelier, nous racontant oĂč ils se posaient. La rencontre marquante avec Ilhan et ses copains, jeunes CouĂ«ronnais de 12 ans nous a appris qu’ils prenaient le bus simplement pour faire des allers-retours sans se soucier de la destination mais pour ĂȘtre au chaud, nous racontant oĂč ils allaient jouer, qu’ils aimaient la Loire, acheter des bonbons au Carrefour Market.

fini par se rĂ©pondre entre-elles, complĂ©tant les dires de chacun acquiesçant ou contredisant ce qui venait d’ĂȘtre Ă©crit. Ce qui est ressorti principalement est que l’avenir de CouĂ«ron s’est rĂ©vĂ©lĂ© ĂȘtre source d’inquiĂ©tude.

Cet atelier a donc permis de faire Ă©merger un dĂ©bat, une volontĂ© inconsciente ou latente de la part des habitants d’engager une discussion autour de la problĂ©matique que nous avons nommĂ©e : “Nantes, la mĂ©tropole et nous” (en clin d’oeil au dĂ©bat “Nantes, la Loire et nous” proposĂ© par la MĂ©tropole en 2015). Cela marque une envie des habitants d’ĂȘtre intĂ©grĂ©s dans le dynamisme d’évolution de leur cadre de vie, d’ĂȘtre considĂ©rĂ©s comme des acteurs inhĂ©rents aux prospectives territoriales.

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4. La boĂźte Ă  rumeurs Sur une table, nous avions crĂ©Ă© une boĂźte avec une fente Ă  travers laquelle les habitants pouvaient y glisser des rĂ©ponses aux flyers “Il paraĂźt que 
”. Nous les invitions Ă  se positionner par rapport aux rumeurs que nous avions lancĂ©es et Ă  nous raconter d’autres histoires. Certaines rĂ©ponses ont Ă©tĂ© surprenantes. A la rumeur “CouĂ«ron, c’est dynamique”, beaucoup de personnes ont soulignĂ© le manque de commerces mais ont notĂ© le dynamisme associatif. 5. Stop-bac Le bac, lieu de fascination pour tous, autant pour nous qui a Ă©veillĂ© notre imaginaire dĂšs le premier jour, que pour les habitants qui nous en parlaient toujours avec des Ă©toiles dans les yeux. Ce lieu Ă©merveille parce qu’il est un Ă©vĂšnement dans le quotidien des gens. Beaucoup le prennent comme alternative au pont de ChevirĂ©: “prendre le bateau relaxe et est un moment de pause dansVers lala Mer Saint-Michel journĂ©e, on prĂ©fĂšre ça plutĂŽt que La Bernerie Pornic d’ĂȘtre coincĂ© dans les bouchons Ă  ChevirĂ©â€ couple habitants du Pellerin. Au-delĂ  de savoir oĂč les personnes venaient et dans quel but, nous Ă©tions intriguĂ©s de jouer avec eux ce moment d’attente que provoque le

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bac. Une longue file patiente chaque soir avant de monter. Nous avons organisĂ© une performance sous la forme d’un stop, une expĂ©rience dans l’expĂ©rience : “vous avez le temps d’attendre, et si nous prenions ce temps ensemble?” proposionsnous. Des portiĂšres se sont ouvertes, et nous avons partagĂ© ce temps de traversĂ©e avec des personnes. Le but Ă©tait de susciter l’imaginaire par une Saint-Etienne-de-Montluc discussion banale: “merci de nous Super U avoir pris, il fait vraiment froid dehors, mais ce bac c’est vraiment super, vous en pensez quoi?” IntriguĂ©es Balade du dimanche autour du lac de Beaulieu par notre prĂ©sence, les personnes qui avaient acceptĂ© se Centre sontSocio-Culturel prises Pierre Legendre Carrefour market au jeu et ont dĂ©crit leurs sensations Promenade dans les marais Audubon de ce moment. Nous sommes CouĂ«ron bourg La Ch mĂȘme montĂ©s dans la cabine du MarchĂ© jeudi Sup bateau oĂč les marins nous ont racontĂ© leur quotidien quelque peuBords de Loire Cap vers le Sud monotone Canal de la mais MartiniĂšre “aucune traversĂ©e I ne se ressemble avec les marĂ©es et le Mar bord passage d’autres bateaux, Le Pellerin mĂȘme si le MarchĂ© dans les Halles le samedi temps peut paraĂźtre long”.


VILLE TERRITOIRE Avec la diminution de l’attraction locale en terme de travail et de commerces, les habitants ont tissĂ©, au fil du temps, une vie dispersĂ©e. Une attractivitĂ© mitigĂ©e L’amĂ©nagement des quais de Loire en 2004 et la rĂ©habilitation du site de la Tour Ă  Plomb ont crĂ©Ă© des points d’attractivitĂ©. Il n’est donc pas surprenant de voir des personnes, provenant d’autres communes, venir se balader sur les bords du fleuve le week-end. Cependant, les gens viennent mais ne font que passer: “on ne monte pas dans la ville quand on vient se balader lĂ , il n’y a rien dans le bourg” promeneurs sur les quais.

A travers les ateliers, CouĂ«ron nous est apparue comme un territoire qui se pratique Ă  grande Ă©chelle. L’attraction de Nantes est forte notamment concernant l’emploi et les commerces. Les mouvements pendulaires sont intenses. Au quotidien le territoire est donc constamment empruntĂ©. Aussi par les habitants de la rive sud qui prennent le bac pour aller travailler sur Nantes.

Atlantis

habossiĂšre

per U

Porte vers le sud La ville est en effet trĂšs connectĂ©e au sud grĂące Ă  ce bac qui permet en moins deOrvault 20 minutes de traverser la Loire. Cet espace est dĂ©crit par les habitants Ă  travers les lieux de loisirs Saint-Herblain comme le Canal de la MartiniĂšre propice aux balades ou la mer vers Pornic. La notion de proximitĂ© s’étend alors bien au-delĂ  de la mĂ©tropole nantaise.

Ville traversĂ©e CouĂ«ron aurait pu devenir un cul-desac car elle est bornĂ©e par la Loire et les marais. Cependant, la connexion au sud par le bac la dĂ©senclave. Les pratiques s’y effectuent Ă  l’échelle mĂ©tropolitaine dans une relation Ă©conomique et plus largement Ă  une Ă©chelle estuarienne dans une relation de loisirs.

Nantes Saint-Etienne-de-Montluc Super U

rché le dimanche en d de Loire

Orvault

Atlantis

Indre

Travail

Saint-Herblain Balade du dimanche autour du lac de Beaulieu

Commerces MarchĂ© ActivitĂ© du centre Aux bords de l’eau

Promenade dans les

marais Audubon

Promenades

Centre Socio-Culturel Pierre Legendre Carrefour market

Couëron bourg

La ChabossiĂšre

Marché jeudi

Super U

Nantes Bords de Loire

Canal de la MartiniĂšre

Cap vers le Sud

Indre Marché le dimanche en bord de Loire

Le Pellerin Marché dans les Halles le samedi

Vers la Mer Saint-Michel La Bernerie Pornic

Travail Commerces Marché

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ActivitĂ© du centre Aux bords de l’eau Promenades


PRATIQUES COUËRONNAISES Les sphĂšres d’influences de cette vie satellite se rĂ©duisent pour les moments de dĂ©tente. La commune se pratique alors principalement Ă  pied autour d’espaces de proximitĂ©s. Des repĂšres communs L’étendue du territoire des habitants, se concentre particuliĂšrement dans un rapport incontournable Ă  l’eau. Il est important dans le quotidien des CouĂ«ronnais surtout pour les moments de dĂ©tente et de loisirs. La plupart des habitants font leur jogging ou se baladent autour du lac de Beaulieu ou sur les bords de Loire. Beaucoup traversent le fleuve pour aller au Canal de La

MartiniĂšre. Et certains prennent simplement le bac pour faire des allers-retours. La Tour Ă  Plomb et le lac de Beaulieu sont des Ă©lĂ©ments marqueurs autant pour les habitants que pour les passants. Ils sont inscrits comme participants de l’identitĂ© de CouĂ«ron. Le besoin d’espaces verts “Les moments de pause manquent”, “pas assez de bancs”, d’”espaces

Cette carte a été déduite des paroles récoltées lors de nos rencontres. 47


remarquable que la maison dans l’eau” pĂšre de KĂ©vin, rencontrĂ© au club de billard.

verts”. Cette derniĂšre remarque nous a beaucoup surpris sachant que la ville est entourĂ©e de champs, de sentiers, ... Les habitants regrettent en fait plus de lieux de rencontres associĂ©s Ă  des lieux de verdures. Cependant, certains pratiquent les espaces ouverts des champs et des marais par les nombreux chemins de randonnĂ©es : “on vient de faire 2h de balade Ă  pied sans prendre une seule route avec des voitures” habitants rencontrĂ©s un dimanche aprĂšsmidi. CouĂ«ron est alors pratiquĂ©e Ă  pied, certaines personnes nous ont expliquĂ© qu’elles avaient l’habitude de se balader dans la ZAC Ouest Centre-ville. “Avec ma femme on continue de rejoindre les marais par lĂ , mĂȘme si il y a la ZAC, on garde des repĂšres avec la grange en pierre qu’ils ont conservĂ©e, mais on passe toujours devant la maison en plastique, un dĂ©lire d’architecte qui nous fait marrer et qui est plus

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Court-circuits Ces pratiques marquent aussi des contre-usages dans le territoire. Les personnes Ă  la mobilitĂ© rĂ©duite, qui sont aussi les personnes ĂągĂ©es, parcourent la ville principalement Ă  pied ou en transport en commun et vivent Ă  une Ă©chelle plus rĂ©duite. Leur maison, leur rue et le quartier prennent beaucoup d’importance. Les habitants des hameaux, isolĂ©s, ont des tactiques similaires pour ĂȘtre indĂ©pendants., Ils s’organisent en association de quartiers pour se fĂ©dĂ©rer entre-eux, du fait de leur difficultĂ© de se joindre Ă  la vie locale des centres urbains. Si la commune de CouĂ«ron garde encore des pratiques locales, elles rentrent en concurrence avec une vie mĂ©tropolitaine Ă  plus grande Ă©chelle qui dĂ©lie et dissout les rencontres de proximitĂ©. Le rapport de complĂ©mentaritĂ© entre les deux Ă©chelles entre en frictions/tensions.

eu

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49


POINTS DE FRICTIONS MISE EN DÉBAT

au loin le pont de ChevirĂ© Ă©merge de l’horizon 50


L’estuaire de la Loire un chapelet d’üles

UNE HISTOIRE METROPOLITAINE La situation de CouĂ«ron sur le fleuve fut constamment une source de richesse, mais aussi de convoitise Ă  l’échelle d’une mĂ©tropole.

IV av JC Couëron est la grande place commerciale gauloise sur le Liger

Au dĂ©part, CouĂ«ron est un petit village des bords de Loire avec une culture et des mĂ©tiers liĂ©s au fleuve: artisans, pĂȘcheurs, gabariers, tonneliers, marchands et nĂ©gociants peuplaient la ville. C’est en 1620 que CouĂ«ron, avec sa rade bien abritĂ©e du Port-Launay devient l’un des avantports de Nantes. Elle est dĂ©chue de son rĂŽle au profit de Paimboeuf plus proche de l’embouchure de l’estuaire. Avec les travaux de chenalisation du fleuve, les ingĂ©nieurs nantais destituent la ville de son rapport au fleuve. C’est au XIXĂšme siĂšcle que le dĂ©veloppement de la ville s’industrialise en s’inscrivant dans le complexe industrialo-portuaire de l’estuaire de la Loire. La ville s’agrandit avec les maisons-Castors ou les constructions pavillonnaires qui ont connu un essor dans les annĂ©es 1960. Aujourd’hui, l’extension de la ville se poursuit, CouĂ«ron est un lieu de rĂ©sidence recherchĂ© pour sa proximitĂ© Ă  Nantes. Ainsi l’urbanisation se pose principalement sur une typologie rĂ©sidentielle. Cette vocation questionne l’évolution de CouĂ«ron, comme expansion spatiale de Nantes dans un rĂŽle de couronne pĂ©ri-urbaine.

Un traitĂ© du comm Castille, les pĂȘcherie essor considĂ©rable, le

1620 CouĂ«ron devient un des avantports de Nantes une relation d’appartenance

Couëron

1750 Le pouvoir des ingénieurs Nantais Couëron voit son rapport à la Loire modifié.

Couëron devient la banlieue de Nantes ?

Cette cartographie illustre Ă  travers des anecdotes, des faits politiques, ce rapport de frictions entre des intĂ©rĂȘts locaux et ceux de la mĂ©tropole.

Coueron avant port de Nantes

1620 51

Forges de Basse indre

1822

Comblement de l’ile neuve port launay

1837

Usine de Coueron

1860


Couëron

1400 Charles Blois interdit «que l’on fasse forteresse en notre ville de Coyron» car les bourgeois nantais craignaient que de telles forifications puissent ĂȘtre conquises et se retourner contre eux..

1399 merce fut passé avec le roi de es de la basse Loire prirent un es lamproies étaient réputées...

1500 Anne de Bbretagne autorisa la destruction des pĂȘcheries qui gĂȘnaient la navigation, au dĂ©triment des pĂȘcheurs de CouĂ«ron

1860 Construction de l’usine de CouĂ«ron au lieu dit du « Bourget» Ă  l’emplacement du port ensablĂ© de la canche un endroit ou s’assemblait la population couĂ«ronnaise.

1789 Il rÚgne encore une forte activité, les navires embarquent ou débarquent les marchandises, le fleuve est silloné sans relùche, les canots et les gabares descendent le courant.

1866 CONTESTATIONS Les ingĂ©nieurs des Ponts et ChaussĂ©es proposent de complĂ©ter l’endiguement et d’augmenter la taille de l’üle Neuve. Le Port Launay est dĂ©finitivement coupĂ© du fleuve. Les intĂ©rĂȘts couĂ«ronnais sont secondaires par rapport aux intĂ©rĂȘts du commerce maritime nantais. «Il a bien fallu que CouĂ«ron en prit son parti»

Couëron

Tour Ă  plomb

1877

Association avec l’ETS Pongibaud

Les prĂ©mices d’une mĂ©tropole Groupe urbain de 15 communes

ACRN

1879

1961

1967

Fermeture de l’usine Pontgibaud

1980 52

Usine Arc en ciel

Communauté urbaine

1994

2001

Nantes métropole

2015


UNE ÉCONOMIE EN PÉRIL Les industries pratiquement disparues posent la question du dynamisme Ă©conomique et des ressources locales du territoire. Arcelor Mittal, Arc-en-ciel, DCNS, Lambert-Manufil,
 autant de mots qui n’ont que trĂšs peu rĂ©sonnĂ© dans les paroles des habitants. Ces usines ne font plus parties du quotidien des CouĂ«ronnais. Elles ont pour nous trĂšs peu fait partie de la dĂ©couverte du territoire. En effet, un pourcentage trĂšs faible de la population locale est ouvriĂšre ou employĂ©e dans les industries qui persistent encore aujourd’hui.

importante des petites et moyennes entreprises de la commune. Seulement, son emplacement physique Ă©loignĂ© des centralitĂ©s bĂąties de CouĂ«ron ne la marque pas comme partie intĂ©grante d’une dynamique locale pour les habitants. Cela la situe plus en rapport avec la zone d’activitĂ© d’Atlantis et donc plus rattachĂ©e Ă  Nantes.

L’économie locale se situe principalement dans la zone d’activitĂ©s des Hauts de CouĂ«ron au nord prĂšs du pĂ©riphĂ©rique nantais. Cet espace concentre une part

DerriĂšre les murs, ça fume toujours “quand une industrie fumait c’est que tout allait bien, il y avait du dynamisme et de l’emploi” nous raconte un habitant. Aujourd’hui les usines ne fument plus mais elles fonctionnent quand mĂȘme. Nous avons rencontrĂ©

certaines machines de l’époque sont encore utilisĂ©es

derriĂšre la porte on fabrique des vis et des pointes

des bùtiments vétustes, patrimoine industriel

les cheminées : seul indice de la présence des usines

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cependant fragile. “Aujourd’hui il n’y a plus qu’un agriculteur pour cent hier, les fermes sont plus grandes, autour de la mienne il y en avait treize maintenant je suis tout seul” nous dit l’un des agriculteurs de la commune.

GrĂ©gory qui travaille Ă  l’usine Lambert-Manufil. Il nous a emmenĂ©s parcourir son usine. SituĂ©e dans les anciens bĂątiments de TrĂ©fimĂ©taux, encore debout malgrĂ© l’état quelque peu vĂ©tuste, l’espace ne manque pas. “On pense Ă  diversifier notre activitĂ© pour continuer Ă  exister mais la concurrence est rude” nous dit GrĂ©gory. Cette visite a confirmĂ© la fragilitĂ© et le dĂ©tachement de l’économie locale au vu de la ville.

GrĂące Ă  la qualitĂ© particuliĂšre des terres marĂ©cageuses, l’agriculture est prĂ©servĂ©e d’une production vertueuse, sans engrais chimiques. Les alluvions du fleuve qui sont dĂ©posĂ©s sur cette terres l’enrichissent tellement que tout au long de l’annĂ©e, l’herbe pousse. Il ne sert Ă  rien d’ajouter quoi que ce soit, la production intensive viendrait dĂ©truire l’écosystĂšme de ces espaces. Le rapport Ă  l’eau constitue encore aujourd’hui une vĂ©ritable ressource pour prĂ©server quelques activitĂ©s et un dynamisme local. Cependant leur ancrage social au terrain s’appauvrit du fait de leur manque de visibilitĂ© et d’interactions Ă  la vie locale.

“Aujourd’hui les gens ne voient pas qu’il y a une usine ici, les hauts murs ne laissent pas deviner ce qu’il se passe derriĂšre, on voit simplement les cheminĂ©es, notre production est silencieuse, les machines ne s’entendent pas quand on ferme les portes, ce qui fait que l’on est invisible au yeux des habitants qui ne remarquent pas notre prĂ©sence”. Un artisanat en voie de disparition L’artisanat persiste avec la construction de bateaux en bois des chantiers Fouchard situĂ©s dans les marais, mais les normes europĂ©ennes rĂ©duisent leur marchĂ©, et ne leur permettent que d’effectuer des rĂ©habilitations. Les pĂȘcheurs quant Ă  eux ne sont plus que six. “moi j’ai vendu mon bateau Ă  un gars de Paimboeuf y’a quelques annĂ©es” Roger, ancien pĂȘcheur d’anguilles. Cependant les chantiers navals d’Alu Marine sont venus s’installer sur la zone du Port Launay depuis quelques annĂ©es et profitent de cet emplacement privilĂ©giĂ© sur la Loire. L’agriculture quant Ă  elle est considĂ©rĂ©e comme ressource future Ă  prĂ©server pour une alimentation de proximitĂ© Ă  l’échelle de la mĂ©tropole. Sa qualitĂ© d’agriculture raisonnĂ©e (sous forme de petites exploitations Ă  production Ă©cologique) est

le port de Couëron

les bĂȘtes sont encore dehors au mois de dĂ©cembre

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VISION MÉTROPOLITAINE Aujourd’hui encore CouĂ«ron

est trÚs liée, au niveau de sa politique, à la métropole

nantaise, inscrite dans le SCOT Nantes/Saint-Nazaire, son PLU va devenir mĂ©tropolitain. L’avenir s’engage en commun, le territoire mĂ©tropolitain Nantes/SaintNazaire envisage l’accueil de 300000 nouveaux habitants d’ici 2030. La construction d’un PLU-MĂ©tropolitain pour l’agglomĂ©ration nantaise en 2017, rassemble ses 24 communes et s’établit dans la volontĂ© d’accueillir ces nouveaux habitants (+100 000 habitants). Dans le respect de ces volontĂ©s politiques, la commune se place donc dans une perspective de croissance dĂ©mographique qui entraĂźne un besoin de logements.

SCoT Pays de Retz

Nantes MĂ©tropole

“reconstruire la ville sur ellemĂȘme” c’est-Ă -dire de densifier les centralitĂ©s bĂąties dĂ©jĂ  existantes. La construction de la ZAC Ouest Centre-Ville a reproduit un schĂ©ma d’urbanisation mitĂ© (peu dense) qui posait dĂ©jĂ  problĂšme avant “il convient de ne pas se tromper pour les prochains projets” nous dit l’adjoint Ă  l’urbanisme. La construction dans les hameaux quant Ă  elle est trĂšs limitĂ©e, afin de prĂ©server les entitĂ©s dĂ©jĂ  formĂ©es et conserver ainsi l’espace agricole, grenier de la mĂ©tropole. Les textes exacerbent une opposition ville/campagne mais sans jamais parler d’un quelconque dialogue entre ces entitĂ©s, les enfermant dans leurs limites. “On se sent la zone de

Le bon Ă©lĂšve de la mĂ©tropole La proximitĂ© politique de CouĂ«ron avec Nantes (l’ancien maire PS JeanPierre Fougerat a Ă©tĂ© le supplĂ©ant de Jean-Marc Ayrault) fait de la commune le “bon Ă©lĂšve” de la mĂ©tropole, qui respecte le “quota”1 des 174 nouveaux logements par an Ă©tablis par la politique mĂ©tropolitaine et inscrit dans le PLU de la commune. Pour y rĂ©pondre, la commune urbanise des zones sous la forme de ZAC. Une urbanisation contrĂŽlĂ©e Les Ă©lus locaux parlent aussi de

1 nommé ainsi dans le PADD et le PLU 55


C.C Coeur d’Estuaire

Nantes MĂ©tropole

non-droit, Ă  l’écart de la commune” nous dit un habitant des hameaux.

et de promenade. Un dynamisme local Ă  renforcer ? Le rapport Ă  la densitĂ© est aussi liĂ© Ă  la diversitĂ©, “promouvoir une urbanisation diversifiĂ©e ajoutant des commerces et des Ă©quipements” selon le PLU communal. Cependant cette volontĂ© n’est pas clairement dĂ©finie, d’autant que les commerces dĂ©jĂ  existants s’essouflent. La proximitĂ© Ă  Nantes quant Ă  elle est renforçée avec la crĂ©ation d’un nouveau pĂŽle gare Ă  la ChabossiĂšre et la restructuration de l’actuelle gare de CouĂ«ron-bourg. Les volontĂ©s politiques tendent Ă  reproduire un schĂ©ma dĂ©jĂ  en place de dĂ©pendance Ă  l’attractivitĂ© mĂ©tropolitaine.

L’image de marque des marais Les espaces de zones humides sont protĂ©gĂ©s par les rĂ©glementations environnementales (Natura 2000, ZNIEFF). Cet espace abrite une sorte de rĂ©seau de promenade permettant d’accueillir un projet de Loire Ă  VĂ©lo nord soutenue par la communautĂ© de commune Coeur d’Estuaire. Cet itinĂ©raire bis par rapport Ă  celui existant, traverserait les marais et semble ĂȘtre stratĂ©gique pour la reconquĂȘte et la valorisation paysagĂšre de ce territoire. Rebaptiser les marais “Audubon” il y a quelques annĂ©es, a Ă©tĂ© la premiĂšre pierre pour repenser cet espace en lieu de loisir 56


L’ÉMERGENCE D’UNE PEUR La “mĂ©tropolisation” se dĂ©finirait par la peur de l’anonymat, de

l’individualisme, d’une perte de singularitĂ©, et d’une uniformisation des modes de vies sur le territoire. maisons oĂč l’on sent qu’elles ont une histoire disparaissent” parole d’atelier public. Les habitants s’inquiĂštent de la pĂ©rennitĂ© des singularitĂ©s. Les nouvelles pratiques mĂ©tropolitaines, oĂč les habitants n’habitent pas la ville mais un territoire Ă  grande Ă©chelle, fragilisent la vie locale. Beaucoup sont inquiets de ne pouvoir maĂźtriser l’évolution de leur ville : “on ne sait pas si on pourra continuer Ă  accueillir comme on l’a toujours fait, on a moins

Les habitants sont pris entre la volontĂ© de se rapprocher de plus en plus de la grande ville (et d’accĂ©der Ă  ses services, ses emplois) et celle d’ĂȘtre proche d’un paysage de marais, de champs: “la ville Ă  la campagne”. Cet entre-deux est mis en bascule aujourd’hui notamment par l’urbanisation intense de la ville. “Les immeubles poussent de terre, on rase des quartiers entiers pour construire d’autres bĂątiments. Des

collage qui est ressorti de l’atelier «CouĂ«ron demain» :

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de moyens pour permettent aux gens de se rencontrer” s’inquiĂšte un membre du centre Pierre Legendre. C’est une grande inquiĂ©tude de ne pas pouvoir rĂ©pondre Ă  l’accueil des nouveaux arrivants et de ne pas leur offrir une place “je n’ai pas le temps de connaĂźtre mes voisins, ils changent trop souvent” Jocelyne. Enfin une phrase marquante est ressortie : “on se fait mĂ©tropoliser” dĂ©crit la JAM. Comme une sorte d’envahissement incontrĂŽlĂ©, les habitants ont la sensation de subir plus que d’ĂȘtre intĂ©grĂ©s dans les changements du territoire. Cette inquiĂ©tude face au dĂ©veloppement de la ville dĂ©montre que les habitants se sentent dĂ©possĂ©dĂ©s de leur lieu de vie.

Quentin de la JAM qui sĂšme des jardins

singularitĂ©s par l’uniformisation des pratiques et vers une non reconnaissance des rĂ©cits. Des habitants qui se mobilisent Cependant l’évolution de la ville et des modes de vies amĂšnent aussi Ă  de nouvelles interactions. La mise en place de ventes directes ou de chantiers d’insertions Ă  la ferme par les agriculteurs offre un nouvel espace de partage entre exploitants et habitants. Ce type d’échange s’effectuent aussi par l’arrivĂ©e de jeunes associations, comme la JAM ou l’association Jardin’ñge qui renforce aussi des rapports de solidaritĂ© en proposant de partager des jardins privĂ©s entre ceux qui ne peuvent plus s’en occuper et ceux qui en recherchent. Dans cette volontĂ© de faire lieu pour faire lien, de nouveaux espaces de vies sociales se crĂ©ent avec la Cab’à’Lulu qui rallie ouvrier, jeunes ou retraitĂ©s. La richesse des interactions en lien avec le territoire, persistent et montrent une volontĂ© de continuer Ă  “faire ensemble”, le lien social apparaĂźt comme source de solution permettant la mixitĂ© des usages et des groupes. MalgrĂ© leur force et la multiplication des exemples, ces pratiques n’effacent toutefois pas l’impression de manque de lien dont beaucoup nous ont fait part.

Des conflits d’usages Du point de vue paysager, l’extension de la ville tend Ă  recouvrir de plus en plus de terres agricoles. “La ZAC! je n’ai rien vu venir, on ne m’a pas prĂ©venu, j’ai perdu plusieurs terres qui me sont nĂ©cessaires pour mes vaches, ce sont des terres de repli pour que mes troupeaux n’aient pas les pieds dans l’eau en hiver” Yannick. De plus, l’espace rural se dĂ©finit, par une majeure partie des habitants, plus par le cadre qu’il offre que par ce qu’on y fait «on est venu habiter ici pour ĂȘtre au calme, proche de la campagne». Un dĂ©calage se crĂ©e entre la campagne telle qu’elle est perçue et telle qu’elle est appropriĂ©e par ceux qui y vivent de leur activitĂ© de production “On essaye d’ĂȘtre fair-play, quand des promeneurs se baladent dans les marais je ralentis mon tracteur, mais les gens ne comprennent pas le bruit des machines et une vache qui meugle”. Tout cela raconte bien une inquiĂ©tude par rapport Ă  l’écologie sociale du territoire, Ă  une possible perte des 58


COUERON ON Y PASSE, LE TEMPS D’UN ARRET STRATEGIE GLOBALE

l’embarcadĂšre du bac devient un lieu de rencontre pour l’association A.L.O. (Aviron Loire OcĂ©an) 59


NÉGOCIATIONS Les rencontres et allers-retours sur le terrain, ont suscitĂ© chez nous un rapport empathique aux lieux et aux personnes, induisant un engagement. S’engager pour nous, pour continuer Ă  ĂȘtre accueillis, notre prĂ©sence n’a pas suscitĂ© l’indiffĂ©rence, il paraĂźt “qu’on fait de l’effet ”. S’engager pour cultiver cette reconnaissance de l’autre. S’engager pour les agriculteurs de l’eau comme Yannick, qui par une pratique ancestrale, construisent un savoirfaire, gage de qualitĂ© favorisant une Ă©conomie locale. S’engager contre l’uniformisation des modes de vies, il ne faut pas oublier les rĂ©cits singuliers comme celui d’Ilhan et ses copains qui prennent le bus simplement pour se retrouver, qui dĂ©tournent les fonctions du lieu pour des usages crĂ©atifs et personnels. S’engager pour un environnement qui change de visage chaque jour et nous transmet son histoire, sa sagesse et son savoir. C’est une apologie et une reconnaissance des marais et des marĂ©es qui nous permettent de voyager. S’engager pour Pierre qui cultive les pieds dans l’eau, “je suis ici et pas lĂ -bas”, prendre conscience de son territoire et de sa richesse, de son caractĂšre ondulant qui nous Ă©voque la tolĂ©rance de l’autre. Alors comment projeter tout en conservant des attitudes de reconnaissance ? La rĂ©ponse pourrait ĂȘtre donnĂ©e par Lucien Kroll : “L’architecte ne devrait pas chercher Ă  inventer, mais seulement Ă  ĂȘtre Ă  l’écoute de la complexitĂ©â€. Et donc Ă  mettre en mouvement, Ă  impulser, des usages nouveaux ou non. 60


AU CROISEMENT DE PÔLES ATTRACTIFS Il est nĂ©cessaire d’accompagner CouĂ«ron comme une partie spĂ©cifique de la mĂ©tropole qui soit en mesure de conserver ses singularitĂ©s et ses richesses tout en s’adaptant aux Ă©volutions. Au bord de l’estuaire, aux abords de la mĂ©tropole Le territoire de CouĂ«ron tient une position particuliĂšre Ă  l’échelle de l’estuaire. TrĂšs contrastĂ©, il se situe Ă  la croisĂ©e de la mĂ©tropole et des marais. Il a donc une situation gĂ©ographique d’entre-deux privilĂ©giĂ©e. Il est aussi l’une des seules communes au bord de l’eau et trĂšs connectĂ© au sud. Ce statut particulier confĂšre Ă  cette zone des forces que nous souhaitons dĂ©velopper, mais aussi des faiblesses. En effet, cet espace d’entre-deux est marquĂ© par un dĂ©sĂ©quilibre entre

les entitĂ©s : l’urbanisation de la mĂ©tropole se dĂ©veloppe et empiĂšte sur des richesses du site. Comme nous l’avons vu prĂ©cĂ©demment, c’est un territoire menacĂ© par une dissolution de ses singularitĂ©s et une dĂ©pendance Ă  la mĂ©tropole. L’arrivĂ©e intense de nouveaux arrivants induit une perte de contact social et un manque d’appropriation du lieu. Ceci fragilise l’écosystĂšme environnemental et social de ce milieu. La mĂ©moire et les pratiques de la rĂ©gion tendent Ă  s’effacer Ă  travers une homogĂ©nĂ©isation

bord d’eau

Bac bord d’eau

61

pont de Cheviré


SAINT ETIENNE DE MONT LUC

LES HAUTS DE COUERON

LES MARAIS

SAINT HERBLAIN

NANTES

INDRE CHANTHENAY

VERS LE SUD

CHEVIRE

LE PERIPHERIQUE

Un territoire de traverses

par des habitants qui la vivent Ă  grande Ă©chelle. Sa proximitĂ© Ă  Nantes est un atout mais les modes de vie Ă©clatĂ©s qu’elle entraĂźne dĂ©shĂ©ritent le territoire de sa vie locale. En effet, elle n’est bien souvent qu’un espace de passage, entre la rive sud et nord, dont la vie locale ne tire que trĂšs peu parti. Comment penser ce territoire autrement que comme un espace de passage et de connexion ? Comment peut-il ĂȘtre envisagĂ© comme un espace de rencontre porteur de dynamique locale ?

des modes de vie et une perte de contact entre les acteurs des lieux. Aujourd’hui ces entitĂ©s sont donc dissociĂ©es, sans rĂ©el dialogue entreelles. “Il n’y a de vivre ensemble que lĂ  oĂč l’ensemble ne se forme pas et ne se ferme pas, lĂ  oĂč le vivre ensemble conteste la complĂ©tude, la fermeture d’un ensemble clos, identique Ă  soi.” Jacques Derrida CouĂ«ron par sa situation, pourrait se rĂ©vĂ©ler charniĂšre entre les entitĂ©s. L’idĂ©e est de faire Ă©merger cette position gĂ©ographique comme une interface entre les systĂšmes qui se cĂŽtoient.

Une volontĂ© de faire ensemble Un autre potentiel est Ă  faire valoir sur ce territoire : c’est la capacitĂ© des habitants Ă  se regrouper, former des associations, coopĂ©rer, rĂ©inventer de nouvelles maniĂšres de faire ensemble ou coloniser l’espace public pour rĂ©veiller des lieux en attente. Il est un atout Ă  mĂ©nager pour construire la ville de demain.

Paysages traversĂ©s Par sa proximitĂ© Ă  la ville-centre et l’ouverture des mobilitĂ©s, CouĂ«ron est peu enclavĂ©e, trĂšs connectĂ©e. Comme nous avons pu le constater par nos premiĂšres intuitions et nos rencontres, CouĂ«ron est traversĂ©e 62


ZAC ouest centre ville

le soleil revient

passage d’une voiture

la postiĂšre passe dans la rue

ah

c’e s

t la nou velle po stiĂšre, e lle

m

. tout .. du monde p ar a y l i

e rem salut Floriane ! tu tombe p la s bien ... ce

eh la

prio rité !

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. Salut !! ur ! pote o j n n mo bo ait

jour bon

63

radio «qui baise qui ?»

une seule personne a souvent plusieurs casqu les gens ont beaucoup de liaisons.


L’inconscient du territoire Ce titre Ă©voque ce qui Ă©chappe aux analyses, ce qui se cache dans les espaces habitĂ©s : les relations spontanĂ©es. Nous avions rendez-vous Ă  la Tour Ă  Plomb afin d’y retrouver Floriane, historienne et coordinatrice Ouest France. Elle voulait nous emmener sur les traces de la balade KMK (en gris). C’est un parcours commentĂ© qui a Ă©tĂ© imaginĂ© par des artistes entre le centre-bourg et la ZAC en 2015. Il avait pour objectif de susciter la relation entre ses anciens et nouveaux quartiers, par le biais de l’imaginaire, invitant Ă  redĂ©couvrir ces lieux sous un autre regard. Nous l’avons donc suivi, mais l’itinĂ©raire tel qu’il Ă©tait prĂ©vu n’a jamais eu lieu. Nous avons parcouru Ă  peine 200 mĂštres (en noir), nous sommes allĂ©s Ă  cĂŽtĂ© de l’église et de la boulangerie. Nous nous arrĂȘtons Ă  la rencontre d’une connaissance de Floriane, puis deux, puis Thierry l’ancien postier qui connaĂźt tout le monde. Nous Ă©tions lĂ , sur ce trottoir sans forme, nous lançions des bonjours par-ci, des bonjours par-lĂ ... Ce fut un feu d’artifice de rencontres et de paroles. “ On va essayer d’aller au Bourg d’Aval” lance notre guide amusĂ©e, mais en vain, nous sommes restĂ©s lĂ , et nous en avions envie. L’horloge de l’église sonne, cela fait presque deux heures. Il est temps de partir car nous avons respectivement des impĂ©ratifs. “Ce sera pour la prochaine fois la balade KMK
”

passage d’une voiture

passage d’une voiture

passage d’une voiture DOong, DOong, il est midi, l’heure sonne toujours au bourg

vero ! alut .. ça va s va ?. h a ç

e

!

le temps est plus lent ouh la il va se p

rend re un PV l ui

une voiture

uettes, mariage entre cousins

...

un jeune homme traverse la route une jeune ïŹlle longe le trottoir pour rentrer chez elle

Tour Ă  Plomb

Ce moment a Ă©tĂ© trĂšs important pour nous car il a dĂ©placĂ© notre regard. En repartant nous est venue cette idĂ©e : “ la mobilitĂ© crĂ©e la connexion, mais l’immobilitĂ© permet la rencontre.” 64


UNE INTERFACE EN DEVENIR Comment penser l’évolution du territoire de CouĂ«ron dans un Ă©quilibre entre une tension locale et mĂ©tropolitaine ? Comment

favoriser le dialogue entre ces différents éléments tout en préservant leurs qualités ? des terres agricoles.

A l’horizon 2030, environ 7000 personnes sont attendues Ă  CouĂ«ron. Il faut donc crĂ©er les conditions pour les accueillir au mieux, offrir une place hospitaliĂšre pour ces personnes tout en mĂ©nageant les richesses et singularitĂ©s du territoire.

Mais conserver la singularitĂ© des entitĂ©s dans leurs limites actuelles ne suffit pas, car cela persiste Ă  crĂ©er des mondes introvertis. Notre volontĂ© est de mettre en place des lieux d’interfaces qui tendent Ă  rendre les limites plus poreuses et ainsi de valoriser une dialectique de reconnaissance mutuelle entre les pratiques, les acteurs et leur milieux.

Comment passer de la ville rĂ©sidentielle Ă  la ville intense, aux usages multiples, sans perdre la qualitĂ© de ces entitĂ©s? En accompagnant le territoire par la mise en place de lieux oĂč la vie locale peut prendre place, oĂč les spĂ©cificitĂ©s peuvent ĂȘtre mise en valeur, lieux de croisement de la vie Ă  grande Ă©chelle et vie locale dans une inter-dĂ©pendance. Notre stratĂ©gie s’appuie sur trois orientations principales qui permettent une action cohĂ©rente sur l’ensemble du territoire. C’est Ă  partir de ce processus que les projets prennent forme.

La porositĂ© de ses lisiĂšres permet d’ancrer les modes d’habiter avec leur territoire au sens oĂč l’habiter, s’inscrit dans un lien physique et social avec le milieu auquel il appartient. C’est l’idĂ©e de retourner la ville sur les pratiques et l’environnement qui l’entoure et mettre en avant la richesse de son rapport Ă  l’eau et des pratiques agricoles. En agissant de part et d’autre de ces bords, c’est avant tout relier des actes et des personnes.

1. des lisiĂšres poreuses (prĂ©rogatives) Il convient de trouver des alternatives au mitage des terres arables engendrĂ© par l’extension du pavillonnaire et l’urbanisation par les ZAC. Notre stratĂ©gie se base dans la continuitĂ© des volontĂ©s politiques inscrites dans le PLU qui prĂŽnent la “reconstruction de la ville sur ellemĂȘme” et restreignent l’urbanisation

2. crĂ©er des haltes pour faire lieu (de la traverse Ă  l’escale) Afin de mĂ©nager des espaces de dialogue, notre stratĂ©gie se teinte de l’expĂ©rience vĂ©cue Ă  travers l’itinĂ©raire avec Floriane, qui a rĂ©vĂ©lĂ© l’arrĂȘt comme potentiel de rencontre et gĂ©nĂ©rateur de lieu. Cela nous permet d’affirmer la volontĂ© de proposer des dispositifs de haltes 65


les mouvements et amorcer de nouvelles dynamiques. Ces endroits de passages rĂ©vĂšlent la connexion comme outil pour crĂ©er des arrĂȘts. Les interventions viennent donc ponctuer le territoire et rĂ©vĂ©ler des points de dialogue potentiels.

qui se lisent comme des points d’accroches au territoire,points de rencontres physiques entre les diffĂ©rents acteurs et leurs usages. Ces haltes s’intĂšgrent sur des passages inscrits, sur des parcours quotidiens ou momentanĂ©s. Ces passages s’entendent Ă  la fois physiquement par les mouvements pendulaires qui entraĂźnent des flux journaliers ou par les mouvements temporaires des promeneurs du dimanche, mais aussi socialement par les “vagues” d’installation des nouveaux habitants. Sur ce territoire traversĂ© la densitĂ© du passage est un potentiel pour capter

Comme le dit Christopher Alexander “la ville n’est pas un arbre mais un rĂ©seau de noeuds, chacun tendant Ă  la spĂ©cialisation de ses activitĂ©s.” La multiplication de ces espaces spĂ©cialisĂ©s apparaĂźt comme un gage d’inter-dĂ©pendance entre-eux Ă  l’échelle locale mais aussi par rapport Ă  la ville-centre Ă  l’échelle territoriale.

des haltes qui ponctuent les passages au bord des entités 66


3. ménager des espaces de frictions

Ces interfaces viennent se dĂ©finir par rapport Ă  des frictions qui existent aujourd’hui sur le territoire. Ces frictions caractĂ©risent des conflits d’usages et de reprĂ©sentations entre les Ă©chelles mĂ©tropolitaine et locale. Ces rapports de force s’expliquent par cette volontĂ© mĂ©tropolitaine de valoriser des singularitĂ©s du territoire mais qui ne servent pas Ă  impulser de nouvelles dynamiques locales et parfois gĂ©nĂšrent mĂȘme des mises Ă  distance.

prairies humides

Nous allons nous intéresser particuliÚrement à des dissenssus que nous avons repérés sur le territoire.

vue

Jetée des marais ZAC coulée

Tout d’abord, celui liĂ© Ă  la figure du bon Ă©lĂšve que reprĂ©sente CouĂ«ron dans sa capacitĂ© de ville d’accueil en supportant une pression d’urbanisation importante. Mais cela est vĂ©cu par les habitants comme une peur face Ă  la saturation des moyens en terme d’équipements ou de vie associative.

berges jardins

Il y a aussi le rapport Ă  l’eau notamment les marais qui est une image de marque fabriquĂ©e pour des pratiques de loisirs et de dĂ©tentes aux dĂ©triments d’une reconnaissance de l’activitĂ© agricole et ne favorisant pas l’activitĂ© locale. Et enfin, le monde agricole qui doit ĂȘtre conservĂ©, est considĂ©rĂ© comme le grenier de la mĂ©tropole, un potentiel nourricier mais dont la production extensive de qualitĂ© Ă  paradoxalement du mal Ă  persister en tant que telle.

des lieux de frictions

Notre volontĂ© est de requestionner ces frictions comme des potentiels de dĂ©veloppement parce qu’elles portent un intĂ©rĂȘt Ă  la fois Ă  l’échelle de vie locale mais aussi mĂ©tropolitaine. Notre stratĂ©gie est de mĂ©nager ces frictions comme des espaces de mises en relation, de dialogue Ă  diffĂ©rentes Ă©chelles. Il semble nĂ©cessaire de 67


fermes cultures

Gare maraĂźchĂšre les pavillons potagers

quartier de la verrerie point de vue

Désir de rives innondabilité

habiter

Quai suspendu tour Ă  plomb

interactions. Ils s’inscrivent sur les haltes et ponctuent le territoire. Les interventions se rĂ©pondent sans lien hiĂ©rarchique mais dans une logique commune de rĂ©ciprocitĂ©.

construire des espaces de partage qui permettent l’interaction sociale entre les habitants, les inscrivants ainsi dans un projet commun qui favorise l’intĂ©gration. Ces espaces de frictions sont pensĂ©s comme des points de rencontres entre les acteurs, leurs pratiques et le territoire. Ils rendent compte des spĂ©cificitĂ©s locales et gĂ©nĂšrent des

Faire lieu c’est aussi faire repĂšre Ces lieux de rencontres s’inscrivent comme des nouveaux repĂšres, des nouvelles polaritĂ©s sur le territoire. 68


LE PROJET NE S’ARRÊTE PAS LÀ L’HISTOIRE CONTINUE

69


ET APRÈS...

Nous prĂ©sentons les projets dans le cadre de l’option de projet en ce dĂ©but d’annĂ©e et c’est une Ă©tape importante. Cependant, notre dĂ©marche ne s’arrĂȘte pas Ă  ce rendu. Il nous est nĂ©cessaire ensuite d’organiser un retour auprĂšs des habitants. Ce moment permettra de poursuivre les questionnements sur nos projets. Ainsi la parole de l’habitant que nous avons Ă©coutĂ© ne soit pas qu’un matĂ©riau mais bien un Ă©change continu. Nous prĂ©parons cet atelier dans un rĂŽle pĂ©dagogique dans une notion de lien. Et ce afin de se sentir acteur pour savoir partager au mĂȘme titre qu’un citoyen notre vision du territoire.

Nous attendons donc cet atelier auprĂšs des habitants que nous ferons au mois de mars.

70


71


LE QUAI DES UNS, LE JARDIN DES AUTRES MARGOT MOISON

Quai, n., m. : lieu oĂč l’on arrive, attend, se rencontre, observe pour mieux repartir. Jardin, n., m. : lieu harmonieux que l’on apprĂ©cie, oĂč s’épanouit certaines richesses et dont on dispose comme si l’on Ă©tait chez soi.

la gare ensommeillée laisse passer les trains 72


POINT DE CROISEMENT Dans les mouvements incessants qui traversent le territoire, oĂč trouver un lieu d’hospitalitĂ© ? Un lieu qui permet une porositĂ© entre diffĂ©rents milieux en invitant Ă  l’interaction et Ă  l’accueil ? que tout le monde vit au quotidien ? CouĂ«ron ne porte t-il pas dĂ©jĂ  ces rĂ©ponses jusque lĂ  endormies ou indistinct aux yeux de tous ?

A CouĂ«ron on y vit, on y dort, on y travaille aussi, comme agriculteur pour Yannick, comme professeur des Ă©coles pour Dominique, 
 Mais pour la plupart des autres personnes, on y travaille peu en fait. On prend surtout sa voiture tous les matins, et on file sur Nantes, dans la mĂȘme direction que les autres, sur les mĂȘmes routes. Cette situation assez univoque tend Ă  se renforcer, l’installation croissante de nouveaux arrivants Ă  CouĂ«ron convoque de plus en plus ce mode de vie. Pouvoir habiter ici implique la possibilitĂ© d’ĂȘtre propriĂ©taire d’une maison avec jardin, grĂące au foncier encore attractif, tout en Ă©tant proche de la ville-centre qui offre travail, services et cultures. Cette situation qui au fond se complĂ©mente bien a aussi ses limites quand on observe que le lien entre les habitants et leur territoire s’étiole peu Ă  peu. Et que cela risque de rĂ©duire la commune Ă  sa fonction rĂ©sidentielle de satellite : qui ne survivrait que par sa proximitĂ© Ă  la mĂ©tropole. L’intense expĂ©rience de terrain nous montre qu’il existe une diversitĂ© de quotidiens et pourtant le trajet le plus banal qui est celui de rejoindre son travail n’a que trĂšs peu d’alternative sur CouĂ«ron. “Quand je vois le nombre de gens sur les routes, tout le monde va travailler sur Nantes, je me dis qu’il y a un moment ça va saturer, comment on va circuler ? ” parole d’atelier public. Comment rĂ©pondre Ă  cette histoire

Une gare comme lieu d’hospitalitĂ© Dans ce scĂ©nario saturable quelque chose d’autre peut s’inventer pour retrouver le rapport Ă  l’autre et au territoire dans un parcours quotidien. Il existe Ă  CouĂ«ron une gare qui relie Nantes et Saint-Nazaire en peu de temps. Elle est un potentiel pour s’intensifier mais aussi pour ĂȘtre un carrefour d’hospitalitĂ© et de rencontre. La gare reprĂ©sente dans son principe mĂȘme un lieu d’arrivĂ©e et de dĂ©part mais aussi ce temps de repos interrompant une activitĂ© de dĂ©placement. Elle est un lieu d’hĂ©bergement permettant l’interruption d’un mouvement oĂč le voyageur peut y trouver refuge. Elle reprĂ©sente l’occasion d’un nƓud de contact entre plusieurs pratiques du territoire, entre les voyageurs et les autres ouvrant la possibilitĂ© de crĂ©oliser les diffĂ©rentes subjectivitĂ©s. Cette expĂ©rience de rencontre devient possible dans la qualitĂ© mĂȘme du mouvement qui induit le dĂ©placement vers l’Autre. De cette expĂ©rience peut naĂźtre des points de sociabilitĂ© en tirant profit du moment d’attente. La gare, ce point d’arrĂȘt, devient un lieu privilĂ©giĂ© de la dĂ©couverte. 73


collage - au cƓur de l’accident

RENTRER DANS LE PAYSAGE

vie. Ces Ă©lĂ©ments s’imbriquent et se reposent sur les marais. Cet espace est une richesse commune Ă  tous et il est la source d’un rapport particulier au territoire. Lieu de rĂȘverie, de ballade mais aussi de labeur, il est aussi fragile. L’accident de voiture symbolise l’arrĂȘt, la rencontre, la dĂ©rive au chemin et la dĂ©couverte d’un ailleurs. Son immobilitĂ© forme un lieu et pose un poids dans le mĂ©canisme qui alors s’alourdit. La voiture s’ancre progressivement dans le terrain et prend ses couleurs. Les travailleurs en costard cravate attendent dans les rouages de leur quotidien, et observent alors autour d’eux le paysage. DerriĂšre cette brume indicible se cache une partie du territoire qu’ils ne connaissent pas mais dont ils commencent Ă  en percevoir l’intĂ©rĂȘt. Ce collage exprime l’intĂ©rĂȘt d’un espace de rencontre invitant Ă  tisser de nouveaux liens pour ne pas laisser disparaĂźtre les spĂ©cificitĂ©s du territoire.

L’expĂ©rience du collage constitue un point charniĂšre dans la dĂ©marche du projet. La volontĂ© de mettre en place des lieux de haltes et de rencontres se joue aussi ici. Ce collage a Ă©tĂ© fait suite aux ateliers publics, toute sa structure est basĂ©e sur un mĂ©canisme de roulement infini, sur lequel se pose diffĂ©rents Ă©lĂ©ments. Cette machine infernale qui symbolise aussi le temps qui passe, fonctionne Ă  la fois sur des aspects palpables comme sur d’autres plus immatĂ©riels. L’équilibre semble fragile : Nantes avec ses tours symboliques, les nouvelles maisons des ZAC, prennent un poids diffĂ©rent de la vieille bĂątisse des siĂšcles passĂ©es, relĂ©guĂ©e, par lequel se murmure les histoires d’autrefois qui s’envolent avec l’oiseau vers les nouvelles constructions. La volontĂ© de transmission et de partage est un lien fort que les habitants tentent de conserver pour prolonger les rĂ©cits et les ancrer dans leur lieu de 74


RENDRE VISIBLE Aujourd’hui la gare est un lieu gĂ©ographiquement en lisiĂšre et enclavĂ©, comment pourrait-elle ĂȘtre placĂ©e au cƓur des mobilitĂ©s quotidiennes ?

champs, marais

pavillons

bourg historique

Le terminus de la mĂ©tropole Le train au quotidien peut ne pas ĂȘtre considĂ©rĂ© comme avantageux car il est contraire Ă  un idĂ©al de mobilitĂ© individualisĂ© qui permet une plus grande libertĂ© de mouvement. Mais ici la proximitĂ© de Nantes, 1/4 d’h, permet une connexion rapide. De plus, intĂ©grĂ© dans la mĂ©tropole nantaise la gare offre la possibilitĂ© de prendre le train au prix d’un ticket de transport en commun TAN (1,7 €).

Loire

trois ou quatre passages du TER en direction de Nantes. Quelques minutes avant son arrivĂ©e les travailleurs descendent du bus, 91 qu’ils ont pris depuis chez eux, et se dirigent sans attendre sur le quai. Le train arrive avec quelques minutes de retard, les passagers grimpent Ă  bord, un groupe de jeunes descendent pour aller rejoindre Ă  pied le lycĂ©e Jean-Jacques Audubon. “Je n’ai pas de clientĂšle de la gare, on me dit que j’ai de la chance d’ĂȘtre proche d’une gare mais ça ne m’apporte rien, je fonctionne

Au quotidien, un simple passage Un matin Ă  la gare se ponctue de

«en 15 minutes pour 1,5 euros je suis Ă  Nantes» parole d’atelier public 75


plutĂŽt avec les habituĂ©s du quartier” barman du cafĂ© de la gare Ce que sous entend l’expĂ©rience c’est que ces voyageurs ne reprĂ©sentent que 7% des actifs couĂ«ronnais qui vont travailler pour 80% avec leur vĂ©hicule personnel. Au cours de nos rencontres et lors des ateliers publics on nous a peu parlĂ© de ce lieu sauf pour y maugrĂ©er quelques remarques dĂ©criant par exemple sur manque d’accessibilitĂ©. “C’est n’importe quoi, je ne peux mĂȘme pas monter dans le train avec mon vĂ©lo car la passerelle en escalier ne me permet pas de le transporter.” parole d’atelier public

marchandises, on trouve sur place un vieux hangar de stockage et un quai surĂ©levĂ© qui servent aujourd’hui Ă  la SNCF pour ranger le matĂ©riel des techniciens de la ligne. “On vient une fois par jour par Ă©quipe de deux pour entretenir la ligne. On a dans des algecos qui ont toujours Ă©tĂ© lĂ , un espace pour manger, se changer et se reposer.” dĂ©crivent deux employĂ©s SNCF rencontrĂ©s avec chance, car leurs activitĂ©s sont trĂšs discrĂštes. Le guichet d’accueil de la gare quant Ă  lui, n’ouvre que le matin, il est situĂ© dans le bĂątiment d’époque en partie dĂ©safectĂ©. Le reste du site est en friche et tient lieu de parking sauvage.

Une gare invisible La gare est construite Ă  la fin du XIXĂšme siĂšcle lors de la mise en place de la ligne ferroviaire Nantes/ Saint-Nazaire. Elle s’implante le long de la topographie du terrain. Cette position gĂ©ographique contrainte la rend excentrĂ©e des centralitĂ©s de bourg ou d’équipement mais aussi de la Loire. Elle tient une position trĂšs discrĂšte au sein du paysage de la commune. Aux limites du bĂąti, son accessibilitĂ© est limitĂ©e, la gare se situe dans un cul-de-sac. Une friche qui discrĂštement remue Anciennement gare de

“Le soir Ă  18h c’est vide alors il y a de la place pour ma clientĂšle, notamment pour la voiture de Bernard qui reste jusqu’à 1h” plaisante le barman du cafĂ© de la gare. Ce point d’intensitĂ© qu’est le cafĂ© sert de lieu de rencontre pour le club de flĂ©chettes ou celui de cartes de la commune, les membres se rĂ©unissent ici toutes les semaines et bondent la petite salle du cafĂ©. Au fond un billard offre des parties endiablĂ©s jusque tard dans la nuit pour les connaisseurs. C’est aussi un refuge oĂč se cĂŽtoient les jeunes qui prennent Ă  manger le midi et les plus ĂągĂ©s qui viennent tenir le bar.

la friche des anciens réseaux ferrés de France

une gare dissimulée derriÚre un parking 76


physique, qui requestionnent notre rapport au monde, aux autres et Ă  nous-mĂȘme. Il convient donc d’accompagner le lieu de la gare comme un carrefour de parcours et d’usages qui interagissent entre eux. Il est le point stratĂ©gique qui ne tend qu’a ĂȘtre rĂ©vĂ©lĂ© pour s’adapter Ă  cette nouvelle façon de penser les transports et nos quotidiens comme lieux de frictions social. Cela pose la question plus globale du devenir des gares françaises dans les petites communes qui aujourd’hui ferment les unes aprĂšs les autres alors que la population vit de plus en plus dans ces milieux tout en se dĂ©plaçant quotidiennement dans les grandes villes.

STIMULER Pratiquer la gare comme lieu de vie au quotidien pour rĂ©activer le quartier et apporter une dialectique entre champs, marais et pavillons. Une routine enrichie “Sur le chemin aprĂšs le travail, je m’arrĂȘte Ă  Atlantis Ă  Saint-Herblain, c’est pratique aprĂšs je suis Ă  10 minutes de chez moi“ parole d’atelier public. La faible frĂ©quentation du train se lit Ă  travers l’efficacitĂ© de la voiture qui offre la possibilitĂ© de coupler dĂ©placement au travail et arrĂȘt au supermarchĂ© pour faire les courses le soir avant de rentrer chez soi. Les trajets sont efficaces, on ne perd pas son temps Ă  faire des aller-retours. Seulement ce schĂ©ma a un impact Ă©cologique Ă©levĂ© qu’il semble de plus en plus urgent de rĂ©duire. Mais aussi un impact Ă©conomique pour les familles qui, de ces dĂ©placements, connaissent de nombreuses dĂ©penses. De plus, dans ces logiques implacables la ville est individualisĂ©e et les rencontres spontanĂ©es se font plus rares. Il semble Ă©vident que pour ranimer la dynamique du train dans le quotidien pour rĂ©duire l’impact des dĂ©placements pendulaires individualisĂ©s ne pourra se faire sans proposer une “plus-value“ dans les parcours. L’évolution de la gare doit s’inscrire dans la recherche d’une Ă©cosophie qui est dĂ©finie par FĂ©lix Guattari comme une articulation des Ă©cologies sociale, mentale et

Ouverture d’une gare sur son milieu Sur cette commune encore rurale (76% d’espaces naturels), notre rencontre avec Yannick, exploitant agricole des marais, fut dĂ©cisive. Il nous a rĂ©vĂ©lĂ© sa volontĂ© de promouvoir la production mais aussi les pratiques liĂ©es Ă  son mĂ©tier. “Les gens qui viennent Ă  la campagne

aujourd’hui

demain ? Une efficacité à accompagner 77


un fort réseau de vente directe à la ferme, donner une visibilité aux capacités de production locale

ne comprennent pas le bruit des moteurs de tracteurs et les vaches qui traversent les routes. J’essaye d’ĂȘtre le plus fair-play possible, je fais de belles rencontres avec les joggeurs qui me parlent de mes vaches ou des marais mais il manque d’espaces pour se rencontrer et qu’il y ait du dialogue.”nous dit-il. Cet agriculteur comme de nombreux autres sur la commune a vu s’installer prĂšs de son lieu de travail, des familles citadines qui recherchaient calme et verdure mais ce sont retrouvĂ©s confrontĂ©s au vacarme des champs. Sans aucune animositĂ© et pour au contraire multiplier les rencontres et faire prendre conscience de la richesse de sa production, une quinzaine de fermes organisent des ventes directes rĂ©guliĂšres. “On vend une partie de nos produits en direct, c’est ce qui nous sauve, on arrive Ă  vivre de l’agriculture extensive car les gens recherchent de la qualitĂ©, ils sont prĂȘt Ă  venir de loin, j’ai des clients de SaintLuce-sur-Loire. Surtout c’est le rapport humain que les gens recherchent”. Bien conscients des enjeux de demain, ces producteurs s’engagent pour une meilleure alimentation mais aussi pour favoriser le lien entre

des mondes qui communiquent trĂšs peu, voire plus du tout. Certains agriculteurs s’organisent aussi autour d’une AMAP (rassemblant une dizaine de fermes) qui a lieu sous le prĂ©au de l’école Ă  la ChabossiĂšre. Ces stratĂ©gies collectives sont multiples. Un chantier d’insertion autour du maraĂźchage bio tient une place importante au sein de la commune. Il y a aussi la ferme autogĂ©rĂ©e de la CouteliĂšre qui depuis quelques annĂ©es est engagĂ©e autour d’un projet politique et social pour mettre la terre en commun entre chĂŽmeurs et paysans. Si on soutenait ces initiatives, ces potentialitĂ©s pour faire ensemble, qui existent dĂ©jĂ  au travers d’une mise en coopĂ©ration ? L’idĂ©e est de penser la gare comme un support de valorisation des circuits-courts entre producteurs et acheteurs en y inscrivant alors une «coopĂ©rative» agricole avec un lieu de vente. Ainsi s’ajouterait au quotidien des travailleurs la possibilitĂ© de rentrer chez soi chaque jour un panier de lĂ©gumes frais Ă  la main. Ce lieu serait aussi l’occasion de tisser des liens et d’ĂȘtre source d’évĂ©nements permettant de dĂ©velopper de nouvelles solidaritĂ©s. 78


une gare Ă  rĂȘver (collage d’idĂ©es)

collectif pour tuer eux-mĂȘmes leurs bĂȘtes, l’idĂ©al serait ça ” nous glisse Yannick, agriculteur. “Il y a pas mal d’agriculteurs qui vont plus loin que la vente directe avec une autonomie des semences et une transformation sur place de leurs produits, la ferme du GAEC des Roches par exemple ils sont au top dans cette dynamique ! ” membres de la JAM. Ces initiatives pourraient se multiplier pour favoriser une grande proximitĂ© dans la production.

Favoriser la filiĂšre courte Le mode de distribution s’organiserait sur un terreau de volontĂ©s citoyennes dĂ©jĂ  fertiles, qui montrent une envie de faire Ă©merger des circuits de proximitĂ©. “Je voulais ouvrir une Ă©picerie locale dans cette maison du bourg mais la commune va la dĂ©truire.” parole atelier public. “Nous on veut monter un micromarchĂ© des producteurs oĂč l’on proposerait des plats prĂ©parĂ©s” les membres de la JAM. Ces Ă©nergies pourraient permettre de porter la plate-forme de vente en agissant comme prestataires de services au quotidien. OĂč les producteurs fixeraient leur prix librement et ces acteurs ponctionneraient un pourcentage du prix de vente pour crĂ©er des emplois sous la forme d’une entreprise sociale et collaborative. Le systĂšme n’ouvrirait ses portes qu’aux producteurs de la rĂ©gion. Ainsi dĂ©velopper les circuits courts, c’est rĂ©duire le nombre d’intermĂ©diaires avant la vente mais c’est Ă©galement rĂ©duire les distances de transports des produits eux-mĂȘmes. L’impact environnemental et financier de la livraison d’une marchandise Ă  sa production est a rĂ©duire, tout autant que le transport des consommateurs vers le lieu de vente. “A Puceul, les agriculteurs ont montĂ©s un

RĂ©-ancrer son alimentation Cette dĂ©marche pose la question de l’agriculture et du lien avec ce qui nous entoure. CouĂ«ron possĂšde une culture agricole forte, comme de nombreuses communes autour de l’Estuaire. Principalement orientĂ©e autour de l’élevage bovin ou laitier, il existe Ă©galement une tradition de culture maraĂźchĂšre. Beaucoup moins forte qu’avant, oĂč chaque ouvrier avait son lopin de terre pour cultiver, elle rĂ©apparaĂźt nĂ©anmoins mais sous de nouvelles formes. Nous pouvons voir des jardins collectifs naĂźtre dans la commune, le dernier en date se situe au cƓur de la ZAC. Mis en place derniĂšrement par l’amicale laĂŻque de CouĂ«ron il propose des parcelles Ă  cultiver aux habitants. Autour de ce projet pourrait donc s’inscrire un investissement de la friche ferroviaire autour de dispositifs de cultures. 79


DIALOGUER Une mise en connexion qui se lit Ă  la fois Ă  une Ă©chelle mĂ©tropolitaine et locale. systĂšme de fret (ex: le city cargo d’Amsterdam)

Ce modĂšle serait reproduit dans diffĂ©rentes gares de l’Estuaire et desservirait ainsi la production alimentaire Ă  l’échelle du pĂŽle intermĂ©tropolitain Nantes / Saint-Nazaire. Ainsi les gares autrefois appelĂ©es «embarcadĂšres», lors de la rĂ©volution industrielle et de l’organisation des villes du XIXĂšme siĂšcle, renouent avec leur ancien langage.

Une distribution augmentĂ©e L’opportunitĂ© du train et de son intensification offre la possibilitĂ© d’associer Ă  cette dĂ©marche un processus de transport de marchandises. Cette initiative s’appuie sur l’exemple du tramway de transport de fret Ă  Dresde (CarGoTram) qui approvisionne l’usine Volkswagen pour les piĂšces automobiles. A l’échelle de la production locale, un train entier serait dĂ©mesurĂ© mais le compartiment d’un wagon du TER pourrait ĂȘtre habilitĂ© Ă  recevoir de la nourriture. Le systĂšme s’établirait sur un standard de container qui viendrait se caler dans le gabarit du train. Ainsi la gare de CouĂ«ron pourrait accueillir un quai de fret.

A portĂ©e de train La gare se dĂ©ploie comme un point de dĂ©part, elle attise le dĂ©sir d’un ailleurs. Elle s’ouvre alors comme une fenĂȘtre sur la ville. Le projet entre en connexion avec la future zone de loisir prĂ©vue dans l’actuelle carriĂšre ainsi que le lac Beaulieu situĂ©s au nord de la ligne. Et s’inscrit dans des cheminements doux qui plongent dans les champs et les chemins de

mise en rĂ©seau au niveau local Ă  l’échelle de la ville

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une gare comme nouvelle centralité et repÚre dans le paysage

elle viendrait surplomber le paysage et se dĂ©marquer Ă  l’horizon. Depuis cette passerelle, la gare prend part Ă  un systĂšme d’échanges visuels et de communications Ă  travers le territoire local et mĂ©tropolitain. Le projet est un point de contact physique, en cherchant Ă  qualifier la lisiĂšre, un nouvelle dialectique s’installe entre entitĂ© bĂątie et entitĂ© rurale. C’est une rĂ©elle porte vers un mĂ©tissage des usages de ces milieux. La volontĂ© porte ici Ă  induire une relation plus longue avec le lieu. Le passage s’allonge et accorde une mise en relation au cƓur des pratiques. Lieu de coopĂ©ration, il permet aux habitants de former des initiatives. Un espace appropriable au grĂ© des envies le cafĂ© de la gare organise un tournoi de pĂ©tanque, le chantier d’insertion propose des cours d’horticulture etc ...

randonnĂ©es d’un cĂŽtĂ© ; et vers la coulĂ©e verte de la ZAC de l’autre pour ensuite s’immerger dans les marais. Le futur projet de la Loire Ă  VĂ©lo Nord suit ce dernier tracĂ©. Enfin la gare est un point d’accroche pour rejoindre le bourg historique et les bords de Loire. Ces relations locales offrent une opportunitĂ© de visibilitĂ© sur le territoire. Et permettent des propositions alternatives aux parcours par des traversĂ©es piĂ©tonnes et cyclables afin de rejoindre le centre-ville, le lycĂ©e professionnel ou les bords de Loire. Un repĂšre commun Dans ce schĂ©ma d’inter-relation le point de gare fonctionne comme un nouveau repĂšre, un possible point de rendez-vous. Le but est d’y adjoindre une nouvelle passerelle pour permettre le passage Ă  tous,

Future place de la gare ? 81


LIEUX COMMUNS Le coeur du projet c’est aussi un faire ensemble, une entente collective qui gĂ©nĂšre des mises en partage et promet une intensification du quartier.

éléments de programmes (plan schématique)

Tisser les liens Dans le but d’impulser une nouvelle dynamique, le programme multiplie les rencontres et un rĂ©cit collectif commence. Le foyer des ouvriers de la SNCF quitte ses algecos actuels pour se mutualiser Ă  la coopĂ©rative. Ce lieu s’ouvre parfois pour des Ă©vĂ©nements ponctuels lors des fĂȘtes de quartiers gĂ©rĂ©es par l’association du “quartier de la gare” dĂ©jĂ  en place. Le guichet actuel se mutualise Ă  la coopĂ©rative et permet ainsi une ouverture du bĂątiment au quotidien. Les services de la SNCF gardent le mĂȘme rythme tout en offrant la possibilitĂ© aux voyageurs d’accĂ©der Ă  une borne et un espace d’attente Ă  l’abri. Mutualiser les ressources et crĂ©er du collectif s’articule aussi dans une plus claire articulation entre les champs, marais et les habitations situĂ©s sur les reliefs. Le quai de fret se place face au grand paysage et

des fermes perchĂ©es sur les collines avoisinantes. La gare s’inscrit dans une traversĂ©e transversale qui dĂ©coule vers des atmosphĂšres diffĂ©rentes. L’enchaĂźnement entre les deux milieux propose une progression douce, une gradation, des champs vers les habitations et vice-versa. Ainsi le projet va tenter un travail sur des percĂ©es visuelles, des avancĂ©es, qui seront tous autant un jeux de regards, de visions que de vĂ©ritables connexions. L’attractivitĂ© du quartier est grandissante avec ce nouveau dynamisme de la gare. Les cadences de bus et de train augmentent. Mais surtout le quartier prend une nouvelle ampleur. Le projet de la gare opĂšre comme une action incitative pour stimuler le tissus pavillonnaire existant et qu’il soit amenĂ© Ă  se reconstruire sur lui-mĂȘme. 82


de la lisiùre au cƓur du quartier

De la gare Ă  la Jaunaie La municipalitĂ© soutient des actions d’espaces partagĂ©s pour accompagner le processus de densification et ainsi rĂ©pondre Ă  la demande d’habitats Ă©dictĂ©e par les volontĂ©s politiques mĂ©tropolitaine de 140 nouveaux logements par an. Ces espaces forment alors un rĂ©seau au sein du quartier et constituent un nouveaux parcours, support d’activitĂ©s en commun. Ces actions sont des dĂ©clencheurs publics d’un jeu d’intensification et de mise en partage. Tout d’abord, la place basse

en lisiĂšre du bĂąti au niveau de la gare agit comme une scĂšne urbaine qui vit aux diffĂ©rentes temporalitĂ©s de la gare et de ses voyageurs. Dans un deuxiĂšme temps, une place haute est constituĂ©e au niveau des logements HLM de la Jaunaie. Ces deux espaces viennent en rĂ©sonance physiquement par des venelles existantes, prolongĂ©s ou crĂ©Ă©es, mais aussi dans leurs qualitĂ©s pratiques. La place de la Jaunaie devient un espace commun de jardins qui pourrait prendre place autour d’une initiative associative avec l’amicale

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avec le bailleur social et y initier des installations de jeux pour enfants par exemple. Ainsi une partie du jardin de la Jaunaie serait amĂ©nagĂ© et l’autre serait mis en nĂ©gociation habitante pour diffĂ©rents usages. Mettre en jeu cet espace c’est offrir une valeur ajoutĂ©e au sein du quartier et dĂ©clencher alors une intensification.

laĂŻque et serait soutenue par la coopĂ©rative de la gare. Dans cette derniĂšre on trouverait des graines que les agriculteurs vendent et produisent en auto-gestion (ferme du GAEC des Roches), on pourrait avoir des conseils, etc ... Ce lieu oĂč se dĂ©placerait les maraĂźchers mais aussi les Ă©tudiants du lycĂ©e agricole et qui permettrait d’enseigner, transmettre, de montrer et raconter l’agriculture en la pratiquant. L’enjeu mĂȘme d’acheter une nourriture plus saine est enrichie, et la relation au producteur prime.

Fils rouges Ainsi, dans un troisiĂšme temps, le projet porterait une densification d’habitats. Les venelles existantes ou celles crĂ©Ă©es deviennent des supports de l’intensification et de la stimulation du quartier rĂ©sidentiel. Dans ce jeu d’intensification, la mairie est amenĂ©e Ă  modifier ses outils techniques, et donc le PLU communal. Tout en continuant de fixer des rĂšgles, les rĂ©glementations doivent permettre la dynamique. Ainsi les parcelles, diffĂ©rentes typologies d’habitats pourraient se dĂ©velopper. Le processus proposĂ© peut donc s’incrĂ©menter et proposer d’autres usages qui dĂ©tournent les propositions. L’essentiel rĂ©side dans la dynamique que provoque cet espace.

1+1= 3 Les zones pavillonnaires du quartier sont caractĂ©ristiques d’une urbanisation individuelle sans prise collective. Ce quartier reste dans l’attente d’un vĂ©ritable projet d’ensemble, il devient nĂ©cessaire pour accueillir de nouvelles populations de bĂątir ces zones dans la concertation au travers de nouveaux espaces de mise en dialogue. Pour construire ensemble ces Ăźlots communs il est envisageable de mobiliser des associations de la commune, comme Jardin’ñge qui colonise les fonds de jardin pour proposer un espace de partage autour du potager entre ceux qui en ont trop et d’autres pas assez. Dans ce quartier oĂč il n’y a que trĂšs peu d’espaces publics, la mairie pourrait prĂ©empter ce lieu en coordination

“C’est par la mise en place d’un “sujet“ que l’architecture peut nouer ou renouer un sentiment de complicitĂ© avec le milieu“ Lucien Kroll.

des venelles qui se dessinent

des espaces verts en attentes 84


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JETïŸƒćł DES MARAIS ALICE KHALED

depuis le bord des maisons la brume du matin dvoile des marais mystrieux 86


TRAVERSER Les marais, une fois qu’on y a mis les pieds, on ne peut plus s’en

passer. En vĂ©lo ou Ă  pied, pour un pique-nique ou simplement pour voir les vaches, on y retourne. Ce paysage façonnĂ© par l’homme Ă©volue selon les saisons et n’est jamais identique d’aprĂšs

Dominique. Pourtant, CouĂ«ron vit Ă  cĂŽtĂ©, sans vraiment en profiter, sans vraiment se rendre compte de toutes ses opportunitĂ©s. La ZAC Ouest Centre-Ville, ce nouveau quartier Depuis 2012, un nouveau quartier s’érige Ă  l’ouest du centre-ville et est bornĂ© par les marais avec lesquels il ne dialogue pas. La ZAC s’articule autour d’une coulĂ©e verte piĂ©tonne qui permet de connecter la gare au centre-bourg. LĂ  encore, les

habitations sont tournĂ©es sur les rues, n’offrant aucune connexion directe avec cet immense espace vert. Et pourtant, les CouĂ«ronnais apprĂ©cient s’y promener et traverser la ZAC s’en s’arrĂȘter.

une proximité à la gare et au cetre-ville, à la lisiÚre des marais et de la ZAC Ouest Centre-Ville

La gare La Jetée des Marais

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Cordemais Saint-Etiennede-Montluc

ir e Lo Ă©lo Ă v

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Couëron

Le Pellerin

richesses des marais et de la Loire, entre artisanat, histoire et biodiversité

La Loire Ă  VĂ©lo Nord, une reconnexion avec la rive nord La communautĂ© de communes CƓur d’Estuaire cherche Ă  crĂ©er une Loire Ă  VĂ©lo Nord. Aujourd’hui, celleci traverse CouĂ«ron, mais rejoint le sud par le bac en Ă©vitant les marais Audubon. Avec l’amĂ©nagement de la gare et la rĂ©habilitation du quartier Bel Air, la coulĂ©e verte de la ZAC Ouest Centre-Ville pourrait devenir support de cette Loire Ă  VĂ©lo. Par un bras de la coulĂ©e, le parcours quitterait la ZAC pour se poursuivre Ă  travers les marais et rejoindre Cordemais. Ainsi, les cyclistes pourraient dĂ©couvrir les richesses des marais comme son systĂšme d’irrigation, sa biodiversitĂ© et ses pratiques liĂ©es Ă  l’agriculture, Ă  l’artisanat et d’autres plus intimes liĂ©es Ă  la famille.

photographies de marais au niveau de la cale de la Pierre Tamis

88


SE RENCONTRER Vue du site vers les marais

Le projet vient s’inscrire entre

les espaces de la ZAC et des

et de leurs groupes plus informels et d’un cafĂ©/restaurant. Les deux

rencontre entre les habitants

Jeux de cadrage Afin d’attiser la convoitise des habitants et voyageurs, des cadrages sur les marais sont amĂ©nagĂ©s grĂące Ă  des jeux de passerelles, chemins singuliers de CouĂ«ron, de pentes de toit et de tailles de fenĂȘtres. Le regard est alors guidĂ© vers ces espaces humides invitant l’habitant Ă  aller plus loin, Ă  les rejoindre pour les dĂ©couvrir davantage. A la maniĂšre d’une jetĂ©e qui amĂšne vers la mer sans vraiment la toucher en offrant des points de vue, le projet l’invite vers les marais pour dĂ©couvrir cette ambiance de Loire humide.

marais afin de créer un lieu de du nouveau quartier mais aussi

d’ailleurs et ceux de passage. Il s’agit d’une halte au bord des marais, Ă©tape invitant Ă  poursuivre son chemin.

L’avant-goĂ»t Le projet vient se positionner au bout de l’axe reliant les commerces et la nouvelle Ă©cole primaire, en limite de la ZAC bĂątie. Il devient une Ă©tape sur le trajet de la Loire Ă  VĂ©lo, une halte pour les promeneurs de la coulĂ©e verte ou bien une envie de s’échapper de la rĂ©alitĂ© urbaine. A l’image d’une jetĂ©e, il invite Ă  contempler non seulement les marais mais aussi la ZAC. Il est pour tous, habitants rĂ©sidents ou bien simplement de passage, un avantgoĂ»t des marais. Il est composĂ© de salles associatives de tailles diverses afin de rĂ©pondre aux besoins des CouĂ«ronnais, de leurs associations

Vue du site vers la ZAC et sa coulée verte

Le toit ondulant 89


Passerelle, Au Bossis, Ă  la Combe ou ailleurs dans CouĂ«ron, ces Ă©troits chemins Ă©taient empruntĂ©s par les ouvriers pour se rendre Ă  l’usine. RĂ©seau parallĂšle aux grands axes, elle est parfois malmenĂ©e par les nouvelles voies automobiles ou revalorisĂ©e dans les nouveaux quartiers. Pour certains, elle court-circuite les routes et facilite l’accĂšs au centre-bourg. Pour moi et tant d’autres, elle est le lieu de balades extraordinaires hors des trottoirs goudronnĂ©s, un voyage Ă  travers cette architecture ondulante.

Passerelle du Bossis

Passerelle dans la ZAC

Passerelle du Plessis

Passerelle le long de la voie ferrée

Le dispositif littĂ©raire sur les passerelles est prĂ©sentĂ© ci-dessus. Il a Ă©tĂ© rĂ©alisĂ© selon la mĂ©thode d’Eric Chauvier.

Les marais au loin 90


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DÉSIR DE RIVES ADELINE BOULAIRE

les maisons de la verrerie ont parfois «les pieds dans l’eau» 92


DES DESIRS DE RIVES

collage «le désir de rives»

Marc Desportes

«Longtemps les hommes ont entretenu un dialogue Ă©troit avec le monde qui les entourait.Le changement des saisons rythmait le cours de la vie ; le relief, la force des vents, les matĂ©riaux disponibles inspiraient la disposition de l’habitat, qui elle mĂȘme reflĂ©tait une conception de l’univers ; les vĂȘtements, les objets usuels rĂ©pondaient Ă  l’environnement par leur forme, leur couleur, leur dĂ©coration. Un relation affective unissait l’homme au sol qu’il foulait »

Simple

comme si

et extr aordin

aire

le titre ne suffisait pas One of the bes t and most unexpecte d delight

Dépaysement assuré comme quoi le dépaysement existe bien

Magique

Le paradis

Content

au

bate

tu rĂ©flĂ©chis Esprit de partir un dĂ©tour RĂȘve Ambiance couchĂ© de soleil occasion agrĂ©able

le pa

Un lieu qui peut ne pas ĂȘtre remarquer, qui est ouvert que le midi mais qui permet de voyager dans le monde entier sans quitterla rĂ©gion

radis

exis te

Suite aux ateliers publics,ce collage exprime le dĂ©sir d’interroger la lisiĂšre comme potentiel d’interaction entre deux milieux : les bords de Loire et l’espace d’habitations. Cette perspective interroge cet espace comme potent La vague symbolise le territoire ondulant, si caractĂ©ristique Ă  CouĂ«ron dans son rapport quotidien aux marĂ©es. Ce Les paysages dessinĂ©s par ce mouvement fascinant

Un endroit ou il

fait bon se

poser Aujourd’hui un peu de Jazz beaucoup de soleil et de gentillesse merci le paradis

93


nous invite au voyage,laisse libre cours Ă  l’imagination,l’évasion. Extraordinaire,ce rapport Ă  l’eau nous transporte et invite toute personne qui y passe Ă  voyager. Sur ce dessin, on observe une personne marchant au bord de la rive,symbole d’un espace entre deux milieux : l’eau et la terre. L’équilibre du personnage semble fragile,son pas doit ĂȘtre sĂ»r sous peine de tomber,et passer cette limite dangeureuse. Le rapport Ă  l’eau. ,envoĂ»te,interroge et se pose alors l’envie et la volontĂ© de mettre en valeur cette singularitĂ© du territoire : les rives du bord de Loire..

«Pour le futur moi je vois une loire vivante» prĂ©sident de l’association ALO Les bords de Loire sont un lieu de rendez-vous. Ils sont vecteur de lien, un espace de bien commun. Cette rive du bord de Loire est un potentiel de pratique Ă  mettre en valeur. Le long de cette rive de bords de Loire, nous pouvons remarquer diffĂ©rents points d’intensitĂ© sujet d’enchantement des Coueronnais.

Un dĂ©sir partagĂ© par les habitants Cette relation trĂšs forte entre les habitants et le mouvement fluctuant de l’eau ,des marĂ©es est ressentie comme une grande richesse. Les bords de l’eau sont Ă©galement des lieux support d’interaction sociale. Chacun est libre de venir, s’y arrĂȘter, s’y retrouver spontanĂ©ment.

Le lieu dit du paradis situĂ© prĂšs du BAC oĂč l’impression de voyage emporte les passagers du bateau, est un moment d’exception qui marque le quotidien. Mais Ă©galement le quartier de la verrerie dont nous parle Jacqueline dĂ©gage un parfum de mystĂšre. «les jardins de la verrerie inondĂ©s par l’eau au grĂ©s des marĂ©es, c’est mon vietnam Ă  moi, des riziĂšres, des jardins inondĂ©s au grĂšs des marĂ©es».

des jeunes qui se donnent rdv sur les quais Ici c’est mon riziùres

petit VIETNAM

retrouve Loire on s’y les bords de nager dans la loire j’ai appris à

pour de

sévÚnem

utiliser la loi

re comme

ents spor tifs, cultu rels moyen po ur relier Ă  nantes

Carte des paroles enchantĂ©es par ce rapport Ă l’eau 94

les bords de

Loire on s’


UN ELOIGNEMENT DE L’EAU

carte ancienne 1825

1837

Ce rapport Ă  l’eau a Ă©tĂ© « malmenĂ© » au cours de l’histoire, on observe Ă  travers les cartes anciennes cet Ă©loignement de la rive. CouĂ«ron a Ă©tĂ© un des avant-ports de Nantes. Ce rapport de proximitĂ© de la ville assez particulier dans l’estuaire dans le sens oĂč la ville a (avait) une relation directe et frontale avec l’eau.

1857

Au milieu du XVIII Ăšme siĂšcle, les difficultĂ©s de navigation dans l’estuaire font de Paimboeuf, le nouvel avant-port de Nantes, au dĂ©triment du Port Launay. Au XIX Ăšme siĂšcle, les travaux de Chenalisation de la Loire ont dĂ©connectĂ© le Port Launay du cours principal. Il va devenir un port d’intĂ©rĂȘt local et ne va plus ĂȘtre baignĂ© que par un bras de Loire.

Port de couëron

1949

Ce bras de Loire va progressivement s’envaser et se combler intĂ©gralement. Aujourd’hui le Port launay n’a de port que le nom, le port de CouĂ«ron s’implante dans le dernier bras de Loire.

1999

Ce traumatisme a connu son « point final » lors de la fermeture des usines Pontgibaud sur le bord de Loire

2015

Aujourd’hui cet Ă©loignement de l’eau est Ă©galement marquĂ© par les nouvelles normes PPRI (Plan PrĂ©vention Risque Innondations) qui limite l’urbanisation au niveau des bords de Loire. 95


A LA RECONQUETE DES BORDS DE LOIRE des Coueronnais avec les bords de Loire ». Entre l’étier de la Bouma et le centre bourg c’est un lieu de traverse, un boulevard de mobilitĂ© oĂč la route, les vĂ©los et les piĂ©tons se juxtaposent, «il n’y a pas vraiment d’endroit pour s’arrĂȘter d’espace pour se retrouver» nous dit l’ancien postier.

Aujourd’hui, Ă  l’échelle mĂ©tropolitaine, il y a une certaine volontĂ© de reconquĂȘte des bords de Loire. La ville de CouĂ«ron soutenue et financĂ©e par Nantes mĂ©tropole a engagĂ© la rĂ©habilitation des quais en 2003. Comme nous dit l’adjoint Ă  l’urbanisme s’il faut retenir une chose des volontĂ©s de l’ancien maire c’est qu’il a « impulsĂ© la rĂ©conciliation

réhabilitaiton des quais

Des prospectives territoriales L’histoire se poursuit avec une volontĂ© mĂ©tropolitaine de crĂ©er deux nouvelles infrastructures au niveau de l’üle de la libertĂ© et du quartier de la verrerie, en continuitĂ© de ses bords de Loire. Le premier projet serait d’achever l’itinĂ©raire de la Loire Ă  vĂ©lo entre le port et le Paradis en un chemin piĂ©ton, vĂ©lo qui traverserait ces zones inondables. Le deuxiĂšme projet serait une route digue au niveau du quartier de la verrerie qui vise Ă  amĂ©liorer la circulation et de prĂ©venir des futurs

inondations qui menacent le quartier d’habitat situĂ© dans une cuvette topographique. Nantes mĂ©tropole a dĂ©jĂ  fait l’acquisition de la majoritĂ© des parcelles et des maisons qui se trouvent sur ce tracĂ©. Ces deux infrastructures caractĂ©risent deux enjeux importants pour le dĂ©veloppement de cette rive : la volontĂ© de la mĂ©tropole de relier les territoires Ă  travers l’itinĂ©raire de la Loire Ă  vĂ©lo et du tourisme, ainsi que les risques dus Ă  sa proximitĂ© avec l’eau.

risque d’alĂ©a fort 1m TracĂ© de la loire Ă  vĂ©lo 96

Route digue


REQUESTIONNER SES INFRASTRUCTURES « La route ? Ça va servir Ă  quoi, c’est pas parce qu’il y a un virage Ă  la con qu’il faut tout dĂ©foncer pour faire une route ».(Yves du quartier de la verrerie) Ce morceau de ville entre terre et eau avec toute la poĂ©tique qu’il nous amĂšne caractĂ©rise Ă©galement ce lien fort que peuvent entretenir les personnes avec leur milieu. Ce futur projet ne marquera t-il pas une frontiĂšre dĂ©finitive entre l’habitat et cette rive, ne privera-t-il pas une nouvelle fois les CouĂ«ronnais de ce rapport Ă  l’eau? Une route dangereuse ? «Quand je veux aller sur les bords de Loire c’est compliquĂ© parce que la Rue Waldeck Rousseau il y a de quoi se faire tailler un short » habitante du port Launay Le problĂšme principal de cet axe de mobilitĂ© vient de la superposition des mobilitĂ©s entre piĂ©ton et voiture parce qu’il n’y a pas de trottoir.

Ceci n’est pas un boulevard.. La collectivitĂ© a engagĂ©, avec l’arrivĂ©e des nouveaux habitants, la construction d’infrastructures de mobilitĂ© structurant la ville par un systĂšme efficace de boulevard ( de l’Europe, l’ocĂ©an, la libĂ©ration). La crĂ©ation de cette nouvelle portion de route en bord de Loire Ă©tablierait une nouvelle frontiĂšre entre la ville et son rapport Ă  l’eau. La rive est un lieu excpetionnel Ă  mĂ©nager comme un potentiel de vie et non comme un espace de flux ou il ne serait pas possible de s’arrĂȘter. Il s’agit de miser sur le plaisir de ressentir le fleuve, de s’éloigner du bourdonnement urbain et d’apprĂ©cier des Ă©vĂ©nements temporaires qui pourraient y prendre place.

Projet de la route dans le quartier de la verrerie 97


Rue waldeck rousseau

Une route digue ? Le quartier de la verrerie qui est aujourd’hui soumis aux rĂ©glementations PPRI (Plan de PrĂ©vention Risque Inondable) se situe en Zone d’alĂ©a fort soit avec un risque de montĂ©e des eaux de 1m. Cette infrastructure pose question. Dans la gestion du risque il faut mentionner plusieurs stratĂ©gies fondamentales : S’en Ă©loigner (stratĂ©gie normes PPRI : ne pas construire et limiter l’urbanisation), RĂ©sister ou laisser passer l’eau. Dans notre situation, le quartier est une zone principalement d’habitat qui est d’autant plus fragilisĂ©e qu’il se situe dans une cuvette

topographique qui le rend encore plus vulnĂ©rable. Il s’agit donc de prendre en considĂ©ration cette contrainte mais comment pourraitelle devenir un atout pour de nouvelles stratĂ©gies d’urbanisation? Une berge en devenir En arpentant le site et en Ă©changeant avec ses habitants je me suis rendue compte que le quartier dans sa morphologie amorçait dĂ©jĂ  une rĂ©silience avec ce rapport Ă  l'eau. Le front bĂąti dĂ©jĂ  existant composĂ© d'habitations et de murs endosse ce rĂŽle de protection. Cependant il est aujourd'hui incomplet et est une opportunitĂ© Ă  rĂ©vĂ©ler.

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UNE INTERFACE ENTRE LA TERRE ET L’EAU d’échange entre la population locale et le voyageur. Il nous rĂ©vĂšle Ă©galement les anciens jardins de la verrerie comme un nouvel espace Ă  investir, Ă  se rĂ©unir autour de la culture de la terre.

Le projet de ces nouvelles infrastructures viendrait aujourd’hui accentuer l’éloignement de la population dans son rapport Ă  l’eau. Mon projet propose une rĂ©interprĂ©tation de ces infrastructures mĂ©tropolitaines en affirmant que les rives des bords de Loire sont Ă  envisager comme un espace de vie permettant des interactions entre les personnes et leur milieu. Cependant ce nouveau projet urbain est motivĂ© par la menace de la montĂ©e des eaux mais surtout par cette envie de retrouver un rapport Ă  l’eau en venant l’habiter.

Mise en rĂ©seau Cette nouvelle traversĂ©e va Ă©galement permettre une mise en rĂ©seau Ă  Ă©chelle locale de plusieurs mobilitĂ©s. C’est une colonne vertĂ©brale d’intermodalitĂ© entre des pĂŽles dĂ©jĂ  existants (arrĂȘts de bus, espaces de covoiturages, la future navette fluviale entre Nantes et CouĂ«ron) En permettant la connexion entre le centre bourg et le port Launay cette infrastructure se veut ĂȘtre une alternative au souci de la dangerositĂ© de la rue Marcel Provost. Depuis le bourg le chemin de la Loire Ă  vĂ©lo est une invitation au marais, depuis le port Launay cela permet d’accĂ©der au bourg et au bords de Loire en toute tranquillitĂ©.

StratĂ©gie Dans un premier temps, il s’agira d’amorcer une densification dans les dents creuses du front bĂąti existant. Ceci permettra d’offrir de nouveaux habitats, des espaces publiques, un nouveau lieu de halte pour la Loire Ă  vĂ©lo en rapport avec les marais et ses jardins tout en permettant la rĂ©habilitation d’un espace de protection. Il faut garder Ă  l’esprit que « Le risque zĂ©ro n’ existe pas », mĂȘme s’il prĂ©sente un danger spĂ©cifique il peut ĂȘtre aussi la raison de l’amĂ©lioration d’un territoire. Favoriser la culture du risque en proposant de rendre cette rive habitable c’est amorcer une dĂ©marche de rĂ©silience avec ce rapport Ă  l’eau. Le dessin de cette nouvelle rive s’accompagne d’un nouveau tracĂ© de la Loire Ă  vĂ©lo qui n’est plus pensĂ© comme une simple infrastructure de connexion mais comme un potentiel 99


Temporalités Le nouveau tracé de la Loire à vélo est pensé comme un parcours ponctué de haltes et de nouveaux espaces publics : nouveaux espaces de pique-niques face aux jardins de la verrerie ainsi que de nouveaux espaces ludiques.

nouvelle rive est une opportunitĂ© pour l’implantation de nouveaux logements en relation directe avec l’espace de marais. Dans un troisiĂšme temps, il s’agira de tirer profit du passage de la Loire Ă  vĂ©lo et de l’attractivitĂ© touristique pour en faire une nouvelle force du dĂ©veloppement des bords de Loire. L’implantation d’un nouveau programme hĂ©bergements associatifs sur les bords de Loire va permettre d’impulser une nouvelle dynamisme Ă©conomique et d’apporter de nouveaux espaces de sociabilitĂ© entre les habitants, les associations et les personnes de passage.

Ce nouvel espace public dans les marais va permettre d’accompagner la densification du quartier environnant parce qu’il sera l’espace plus, un nouveau jardin commun. Il va participer Ă  l’attractivitĂ© et entamer une intensification du tissu urbain. Face Ă  la pression de demande de logement de la commune , cette

DĂ©veloppement d’une nouvelle Ă©conomie

Accueil nouvelle population

Loire à vélo EAU

T2 T1

parc urbain

Nouveaux espaces de sociabilités

Nouveau tracé de la Loire à vélo

100

T3


HABITER LA RIVE En continuitĂ© des amĂ©nagements des bords de Loire, ce nouveau tracĂ© est pensĂ© comme un parcours ponctuĂ© de nouveaux petits Ă©vĂšnements qui vont favoriser l’arrĂȘt. Leur formes aura pour double usage de renforcer le systĂšme de protection. Espace ludique

Redonner vie aux Jardins Les espaces de marais sont des terres exceptionnelles pour la culture et le maraĂźchage du fait qu’elles soit essuyĂ©es temporairement par les marĂ©es. Les alluvions de la Loire rendent ces terres fertiles et propices Ă  des espaces de jardinage. « Quand j’étais gamin j’ai connu les parcelles de jardin de la verrerie jusqu’au champ, car dans le temps il y avait des vaches.. Le pĂšre Martin il passait ses vaches dans la ville, il Ă©tait emmerdĂ©, pour pas que ces vaches aillent foutre le bordel autour de l’église. Moi j’ai connu çà c’était Ă  celui qui avait la plus belle parcelle.. AprĂšs l’usine tout le monde se retrouvait dans le jardin, ils discutaient, prenaient l’apĂ©ro.. Quand il y avait les ouvriers de Treffimetaux, tout Ă©tait superbement entretenu, mais maintenant comme personne entretient c’est la Pampa.. » Habitant de la verrerie

Collage intention - redonner vie aux jardins

verrerie c’est le plaisir et l’imaginaire d’une consommation d’aliment presque comme s’il venait d’ĂȘtre rĂ©colter. Des espaces ludiques « L’espace de jeux sur les bords de Loire c’est le repĂšre des petits CouĂ«ronnais qui n’ont pas de jardin, il est trĂšs prisé»

Permettre l’arrĂȘt « Sur les bords de Loire on manque d’espaces pour se poser » jeune rencontrĂ© Ă  la mĂ©diathĂšque « Les bords de Loire c’est un espace conçu pour les vĂ©los, on ne peut pas vraiment s’y arrĂȘter »

Avec la densification envisagĂ©e sur l’ülot des tourterelles et l’arrivĂ©e de nouvelles populations ainsi que la proximitĂ© du complexe sportif on pourrait imaginer la crĂ©ation d’un nouvel espace ludique pour les enfants.

Sur le parcours un nouvel espace de pique-niques face aux jardins de la 101


Densification future envisagé

Habiter Habiter la la rive rive

la halte pique- nique vue sur les jardins

auberge associative Jardiner dans la verrerie

Habiter en bord de rive Face Ă  la pression de demande de logements, le dessin de cette nouvelle rive est l’opportunitĂ© pour participer rien qu’un tout petit peu Ă  l’accueil de ces nouveaux arrivants.CouĂ«ron est aujourd’hui trĂšs attractive pour les familles car son cadre de vie est Ă  la fois proche de la «campagne» et proche de la mĂ©tropole mais aussi pour son dynamisme au niveau des Ă©quipements.

oĂč le stress, l’agitation font contraste avec le retour chez soi. C’est pouvoir pratiquer des activitĂ©s en extĂ©rieur, dans un cadre exceptionnel. Habiter les rives offre un espace de vie qualitatif en renforcant le lien entre l’homme et la nature, entre l’homme et l’eau.

Habiter sur la rive est un mode de vie, un moyen de se retourner sur La loire. C’est jouir au quotidien des couleurs et de la sĂ©rĂ©nitĂ© d’un estuaire, lieu apaisant aprĂšs une journĂ©e de travail

Photo du site «habiter la rive» 102


LE TOURISME UNE FORME D’ESCALE Un lieu stratĂ©gique, la croisĂ©e du bourg, de la Loire et des marais

Des volontés partagées Aujourd'hui il y a une volonté communale et métropolitaine de développer le tourisme en favorisant l'implantation de nouveaux espaces d'hébergements temporaires sur le parcours de la Loire. Cette envie est partagée par les habitants et des associations locales (UTAN) qui cherchent à faire partager les richesses de leur territoire.

Un dimanche aprĂšs-midi, nous nous baladions sur les bords de Loire Ă  CouĂ«ron, j’ai Ă©tĂ© surprise tant il y avait de monde qui se promenait sur les quais. En discutant avec quelques passants, je me suis rendue compte qu’il y avait beaucoup de Nantais, mais aussi des personnes d’un peu partout.. Une contradiction assez marquante, malgrĂ© cette grande attractivitĂ© on remarque un centre bourg qui se meurt, « les passants qui ne remontent pas» nous dit la maire.. Comment CouĂ«ron pourrait tirer parti de son attractivitĂ© touristique pour permettre le dĂ©veloppement d’une vie locale? En proposant l’implantation de l’auberge associative dans le quartier de la verrerie, c’est une position stratĂ©gique qui permettrait de redynamiser le centre bourg, un point d’arrĂȘt et d’interface entre la ville, la Loire et les marais. Au point de dĂ©part de cette nouvelle berges les passants pourront emprunter ce nouveau chemin inondĂ©s au grĂ©s des marĂ©es.

«CouĂ«ron, on y passe, parfois on y reste et on s’y attache. Beaucoup y passent mais voudraient s’y arrĂȘter au moins pour une nuit sans y trouver des lieux d’accueils » un habitant pendant les Ateliers publics Le dĂ©veloppement du tourisme est une opportunitĂ© pour construire de nouveaux espaces de partages, d'Ă©changes entre des populations qui ne se croisent pas toujours: entre le voyageur et la population. La richesse du voyage ne s'inscrit pas seulement dans la dĂ©couverte d'un territoire mais surtout dans l'expĂ©rience qu'il est possible d'en tirer et des rencontres sur le chemin. C’est une expĂ©rience que nous avons vĂ©cu lors de notre passage Ă  CouĂ«ron, oĂč les habitants nous ont transmis des histoires singuliĂšres, des secrets et la naissance d'une certaine amitiĂ©.

Le centre bourg

Les marais

Loire à vélo

La Loire

103


Auberge associative C’est sur un modĂšle associatif fort Ă  CouĂ«ron que l’auberge associative se veut ĂȘtre un nouveau lieu de vie Ă  l’échelle du quartier et un lieu d’hospitalitĂ© pour le voyageur. Il existe aujourd’hui Ă  CouĂ«ron cette forte volontĂ© d’entreprendre en alliant Ă  la fois une activitĂ© et un dĂ©veloppement social.

Maison du XIX Úme à réhabiliter

Le deuxiĂšme pĂŽle se situe Ă  l’entrĂ©e du marais, dans une des dents creuses de la rive. Cet espace serait un espace de halte et d’hĂ©bergement , vue sur les marais, composĂ© d’un cafĂ© associatif permettant Ă  la fois un lieu de rencontre entre les associations, les habitants et les voyageurs. Cet espace permettra d’accueillir des Ă©vĂšnements Ă  la libre imagination des associations et des habitants. CotĂ© rue il y aurait des espaces mutualisable avec les personnes du quartier comme des locaux vĂ©los, un espace buanderie. CotĂ© marais des espaces de stockage pour jardiner et faire revivre les jardins de la verrerie comme un nouvel espace de vie.

Comme nous l’avons dit auparavant, Nantes mĂ©tropole, avec son projet de route possĂšde des maisons du XIXĂšme sur le port qui sont aujourd’hui abandonnĂ©es, ainsi qu’une partie des terrains situĂ©s sur ce chemin. L’auberge s’établierait en deux pĂŽles : le refuge maritime sur les bords de Loire, qui permettrait la revalorisation des batisses sur le port. Le programme comprendrait un espace pour l’association Aviron Loire ocean qui aujourd’hui n’a pas de locaux et lui permettrait donc un accĂšs direct sur la Loire, un commerce ainsi qu’un logement de fonction, et des hĂ©bergements.

104


105


QUAI SUSPENDU NICOLAS BODET

une friche en attente 106


Autrefois le thĂ©atre d’une activitĂ© industrielle foisonnante, les bords de Loire se sont peu Ă  peu dĂ©solidarisĂ©s de CouĂ«ron. Cette insularitĂ© s’est dĂ©finie par la Loire au Sud et une rĂ©surgence du Sillon de Bretagne au Nord. Il y a donc un travail de remaillage du territoire. Pour tisser le haut et le bas, le nord et le sud, les industries et le rĂ©sidentiel, CouĂ«ron avec la Loire.

Site de projet

Centre Bourg

+ 20m Falaise

+ 5m Future Zac rives de Loires MĂ©diathĂšque

+ 0m

Enjeux du site

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Bord de Loire


Section Nord - Sud, poétique

de Loire et il possĂšde une orientation plein sud. C’est un endroit privilĂ©giĂ©. L’emplacement de la futur ZAC revĂȘt donc un intĂ©rĂȘt stratĂ©giques. Tout d’abord elle permet d’assurer une continuitĂ© dans le front bĂąti du bord de Loire. Actuellement, le site industriel avec le pĂŽle culturel de la mĂ©diathĂšque apparaĂźt comme un ilĂŽt dĂ©solidarisĂ© du reste du bourg. Il s’agit donc de venir complĂ©ter la sĂ©quence urbaine en bord de Loire, pour assurer une cohĂ©rence Ă  l’ensemble et de reconnecter le pĂŽle culturel avec le reste du tissu urbain. Une autre particularitĂ© de ce site, est la falaise qui forme une limite physique aujourd’hui infranchissable. Le projet propose une balade d’est en ouest pour relier visuellement et symboliquement CouĂ«ron avec la Loire et donner Ă  voir les industries qui la bordent. Cette balade comprendra des dispositifs de franchissements entre le haut et le bas de la falaise. Sur le collage ci-contre, On lit les diffĂ©rentes sĂ©quences qui marquent cette espace. Tout d’abord le haut de la falaise qui est aujourd’hui vĂ©cu comme une limite, une frontiĂšre mais qui possĂšdent un fort potentiel, puis l’aire industrielle, la route qui borde la Loire et la Loire elle-mĂȘme.

Un site Ă  la croisĂ©e des bords La ville de CouĂ«ron est trĂšs marquĂ©e par son passĂ© ouvrier. La tour Ă  plomb est le symbole de cette histoire singuliĂšre. SituĂ©e en bord de Loire, l’activitĂ© industrielle a façonnĂ© tant le paysage bĂąti que le tissu social de CouĂ«ron. Avec la fermeture des usines en 1986, CouĂ«ron perd un fort vivier d’emplois ainsi que sa relation privilĂ©giĂ©e au fleuve. Actuellement pris entre la falaise au nord et les bords de Loire au sud, le site industriel semble comme isolĂ© de CouĂ«ron. La rĂ©habilitation en mĂ©diathĂšque d’une partie du patrimoine industriel illustre une dynamique de rĂ©conciliation de la ville avec son passĂ©, qui part Ă  la reconquĂȘte des bords de Loire. Cependant un vide marque la rupture entre le bourg et le site industriel. Il s’agit de l’emplacement de la future ZAC Loire. Ce projet vise Ă  proposer une vision d’amĂ©nagement de cette ZAC dans sa relation plus large avec le fleuve, le patrimoine industriel, le bourg mais aussi certaines pratiques mĂ©tropolitaines. La premiĂšre carte illustre l’emprise du projet. Ce site prĂ©sente deux caractĂ©ristiques exceptionnelles. Il est situĂ© en bord 108


Des flux parallĂšles

Aujourd’hui

Des flux qui se rencontrent

industries sont une des spĂ©cificitĂ©s de CouĂ«ron et sont la marque d’une histoire chargĂ©e de sens et de l’énergie des ouvriers qui y ont travaillĂ©s. Ce projet en reconnectant visuellement et physiquement le site industriel avec le bourg, vise Ă  favoriser une reconnaissance de la valeur de ce lieu. De plus ce site possĂšde de nombreux Ă©quipements tel que la mĂ©diathĂšque, aujourd’hui isolĂ©e, la salle Estuaire et des terrains de sports. Il est donc Ă  la croisĂ©e d’élĂ©ments architecturaux revĂȘtant une importance Ă  grande Ă©chelle. A travers la construction des logements coopĂ©ratifs et la constitution d’un jardin commun, le projets permet d’articuler, de mettre en relation ces diffĂ©rents Ă©lĂ©ments. Le jardin s’étend sur la partie nord, en hauteur permettant de relier la futur ZAC avec les anciens habitants. Conçu comme un jardin partagĂ©, il permet aux habitants de s’approprier cette espace. C’est donc un espace de dialogue qui permet aux nouveaux habitants de se familiariser avec le lieu et de rencontrer les anciens. C’est aussi un lieu de passage pour permettre au passant d’un jour d’aller Ă  la rencontre du passant de tous les jours.

AprÚs réalisation du projet

Relier pour exprimer les potentialitĂ©s du lieu Aujourd’hui, des flux bordent ce site au nord et au sud mais n’y pĂ©nĂštrent pas. Ces flux pĂ©riphĂ©riques participent Ă  l’enclavement du lieu. Le projet souhaite proposer un lieu de croisement, de rencontre de ces flux pour ouvrir un dialogue entre les diffĂ©rents espaces et acteurs qui participent Ă  la vie de ce territoire. D’un cĂŽtĂ© les promeneurs du dimanche qui viennent apprĂ©cier le cadre des bords de Loire pourront prendre de la hauteur pour vivre le territoire de CouĂ«ron Ă  travers son rapport Ă  la Loire, mais Ă©galement les couĂ«ronnais pourront entretenir un lien plus quotidien avec le fleuve Ă  travers une plus grande porositĂ© entre «ville basse» et «ville haute». Les deux photos tĂ©moignent d’une volontĂ© d’appropriation du lieu. C’est un endroit de dĂ©sir, qui laisse entrevoir son charme, et appelle le passant. Le projet propose Ă©galement de mettre en valeur les industries. Celles-ci fonctionnent actuellement Ă  un rĂ©gime moindre, ce qui laisse penser qu’elles ont disparu du paysage. Cependant ces 109


Un lieu au potentiel stratégique

Jardin suspendu

Front bĂąti

Intentions projectuelles

Panorama sur la loire estuairienne

Exemple d’appropriation du lieu 110


BIBLIOGRAPHIE

DOCUMENTS SUR COUËRON Gaston Boucault, La ChabossiĂšre de CouĂ«ron et ses environs, 1986, Nantes Raymond Briant, Histoire de CouĂ«ron et de la Loire Armoricaine, 1982, ouvrage familial Raymond Briant, CouĂ«ron en carte postale anciennes, Zaltbommel, 1976 Raymond Briant, Au pays des nanmĂštes: histoire de couĂ«ron et de la Loire armoricaine, Nantes 1982 Peter Dontzow, La Citouche : regard sur la « Navale », Centre d’histoire du travail, Nantes, 1997 Roger GuĂ©rin, Ce que je n’ai pas oubliĂ©, de 1926 Ă  1950, ouvrage familial imprimĂ© par Ampage , mai 2012, CouĂ«ron

OUVRAGES Michel Corajoud, «Le projet de paysage, Lettre aux Ă©tudiants», in Jean-Luc Brisson, Le jardinier, l’artiste et l’ingĂ©nieur, 2000. Marc Desportes, Paysages en mouvement. Transports et perception de l’espace XVIIIe-XXe siĂšcle, Editions Gallimard, Paris, 1970. FĂ©lix Guattari, Les trois Ecologies, Editions GalilĂ©e, Paris, 1989 Evelyne Grossman, « Appartenir, selon Derrida », Rue Descartes 2006/2 (n° 52), p. 6-15. Martin Heidegger, Batir, Habiter, Penser, essais et confĂ©rence, 1951. Marcel HĂ©naff, La Ville qui vient, Editions de l’Herne, Paris, 2008 Lucien Kroll, Tout est paysage, Editions Sens et Tonka, Paris, 2001 Michel Lussault, L’avĂšnement du monde. Essai sur l’habitation humaine de la Terre, Editions du Seuil, 2013. Michel MariĂ© et Jean Viard, La Campagne inventĂ©e, Actes Sud, Paris, 1988 Georges Perec, EspĂšce d’espaces, GalilĂ©e, 1974. Georges Perec, Tentative d’épuisement d’un lieu parisien, Christian Bourgois Ă©diteur, Paris, 1975. Thomas Sieverts, Entre-ville : une lecture de la Zwischenstadt, Editions ParenthĂšses, Marseille, 2004.

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REMERCIEMENTS Merci Ă  Carole Grelaud, maire de CouĂ«ron, et Patrick Naizain, adjoint Ă  l’urbanisme de la ville de CouĂ«ron, pour le temps qu’ils nous ont accordĂ© et la vision du territoire qu’ils nous ont partagĂ©e ; ValĂ©rie Le Calvez et toute l’équipe du centre socio-culturel pour nous avoir accueillis pendant trois jours au sein de leurs locaux ; Dominique BrĂ©tĂ©cher, Floriane Corre et Bernard Boulaire pour nous avoir fait partager leurs pratiques lors d’itinĂ©raires ; Yannick Radigois, KĂ©vin et son pĂšre ainsi que RĂ©gine, Vasyl et Carlos pour leur disponibilitĂ© et la richesse de nos entretiens ; Lulu pour son accueil Ă  sa Cab’ et ses bonnes frites ; Quentin et Quentin de l’association JAM, pour nous avoir fait dĂ©couvrir leurs jardins ; Michel Prampart, pour les cartes postales plein de “m” ; L’intĂ©gralitĂ© des habitants ayant participĂ© aux ateliers publics et qui nous ont aidĂ©s Ă  comprendre un peu plus ce territoire ainsi que toutes les personnes que nous avons rencontrĂ©es au cours de notre prĂ©sence sur le terrain ; Eric Chauvier, Saweta Clouet et ChĂ©rif Hanna, enseignants Ă  l’ENSA Nantes, pour leur soutien dans notre dĂ©marche et leurs conseils avisĂ©s ; Jennifer Aujame, cinĂ©aste, pour sa collaboration de notre traversĂ©e filmĂ©e ; Flore Grassiot et Antoine Mialon, architectes DPLG et urbanistes, pour nous avoir fait partager leurs savoir-faires afin de mener Ă  bien les ateliers publics ; Margaux Vigne, paysagiste, pour avoir donnĂ© Ă  voir nos travaux rĂ©alisĂ©s en studio ; Ricardo Basualdo, artiste et scĂ©nographe urbain, pour sa clairvoyance ; Marine Leroy, architecte, pour son regard neuf portĂ© sur notre dĂ©marche ; Borha Chauvet, Rossila Goussanou et Pierre GuĂ©rin, moniteurs au sein du studio, pour leur aide prĂ©cieuse, Pierre Cahurel, graphiste, pour son aide pour la rĂ©alisation de cet ouvrage ; Evelyne Thoby, responsable de la reprographie de l’ENSA-Nantes, pour son travail. Merci enfin Ă  nos collĂšgues de studio, pour avoir partagĂ© ces quelques mois Ă  nos cĂŽtĂ©s.


ESTUAIRE 2029

DĂ©rives des rives

L’arrivĂ©e Ă  CouĂ«ron s’est faite doucement, paisiblement, comme au grĂ© du courant. Cette arrivĂ©e, marquait le dĂ©but d’une aventure. Celle qui, pendant ces quatre derniers mois, nous a habitĂ©s. En fil rouge, la dĂ©marche projectuelle d’Estuaire 2029 guide nos pas. Petit Ă  petit, au grĂ© de nos arpentages, de nos dĂ©rives et de nos rencontres, le portrait d’un territoire qui nous Ă©tait autrefois Ă©tranger s’esquisse. De cette lecture, nous construisons une narration Ă  la croisĂ©e de la matĂ©rialitĂ© du terrain, des subjectivitĂ©s, des diffĂ©rentes Ă©chelles et de la synthĂšse projectuelle. C’est cette narration qui se tisse au fil de l’Autre que nous vous partageons.

arts de faire - janvier 2016


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