Sur l’art, le sport, le jeu

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auxquelles on aspire, tant chez les riches fatigués des sombres paysages romantiques que dans les masses prolétaires, emprisonnées dans les manufactures. Autant que la presse sportive, ce sont les artistes et les écrivains qui donneront forme à cette inclination nouvelle. Maupassant, joueur autant que champion de canotage, est un assidu des bords de Marne. Manet puis Monet et Caillebotte peindront les régates, et Cézanne, les baigneurs ; Degas les jockeys. On a sans doute un peu exagéré ce point, mais la plupart ont pris goût à l’extérieur, sortant de l’atelier pour aller peindre et dessiner sur le motif, fichant leur chevalet en pleine nature. La peinture impressionniste, quand elle représente les canotiers et autres amateurs de jeux de plein air, ne se cantonne pas dans un rôle d’enregistrement des motifs d’une époque, ce sont ses fondements mêmes qui en sont affectés : la lumière des impressionnistes est l’émanation directe des jeux physiques, des activités de plein air. De même, à l’aube du xxe siècle, la peinture et la sculpture futuristes, la photographie constructiviste d’un Rodtchenko, puisent leur nature dans les caractéristiques mêmes de leur sujet : mouvement, vitesse, enchaînement des gestes, affrontement, vertige… Plus tard, Yves Klein refusera de séparer sa peinture de sa pratique du judo, faisant de son art un sport de combat. Un autre nouveau réaliste, Gérard Deschamps [CAT. P. 18], mêlera jeux de plage et peinture d’un nouveau genre, aux couleurs joyeuses et aux formes constamment recyclées.

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