Prévenir les violences discriminatoires au niveau local : pratiques et recommandations

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European Forum for Urban Security

PrĂŠvenir les violences discriminatoires au niveau local : pratiques et recommandations


>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>> Notes de l’éditeur : Cet ouvrage n’utilise pas l'orthographe épicène (par exemple élu.e ou député.e) afin de préserver la facilité de lecture. Néanmoins, l'Efus considère que l'égalité entre les genres doit être systématique et constante et œuvre dans ce sens dans toutes ses activités. Cette publication utilise l'acronyme LGBT (Lesbiennes, Gays, Bi et Trans) pour désigner toutes les communautés de personnes non-hétérosexuelles et non-cisgenres, dont les personnes transsexuelles, fluides, queers, intersexuelles, pansexuelles, androgynes et asexuées, ainsi que leurs soutiens. Publié par le Forum européen pour la sécurité urbaine (Efus), cet ouvrage est l’aboutissement du projet « Just and Safer Cities for All », dont les travaux se sont déroulés entre 2015 et 2017. Il a été réalisé par Pilar de la Torre et Moritz Konradi, Chargés de mission, sous la supervision d’Elizabeth Johnston, Déléguée générale et de Carla Napolano, Directrice adjointe, avec la contribution de Sarah Martin, stagiaire, et les partenaires du projet. L’usage et la reproduction sont libres de droits, s’ils sont effectués à des fins non commerciales et à condition que la source soit spécifiée. Traduction : Céline Bellini Relecture et révision : MM International Communication et Nathalie Bourgeois Mise en page : Marie Aumont, micheletmichel.com Impression : Cloître Imprimeurs, Saint-Thonan - France ISBN: 978 – 2 -913181 – 56 – 4 Dépôt légal : Novembre 2017 Forum européen pour la sécurité urbaine 10, rue des Montiboeufs 75020 Paris - France Tél : +33 (0)1 40 64 49 00 contact@efus.eu - www.efus.eu

Ce projet est co-financé par le programme « Droit, égalité et citoyenneté » de l’Union européenne. Cette publication a été élaborée grâce au soutien financier du programme « Droit, Égalité et Citoyenneté » de l’Union européenne. Le contenu de cette publication n’engage que la responsabilité de ses auteurs et ne reflète en aucun cas le point de vue de la Commission européenne.


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Remerciements

>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>> Le projet « Just and Safer Cities for All » a pu être mené grâce à la contribution des représentants des institutions partenaires - Forum italien pour la sécurité urbaine (FISU) – Italie, Forum belge pour la prévention et la sécurité urbaine (FBPSU) – Belgique, Forum espagnol pour la prévention et la sécurité urbaine (FEPSU) – Espagne, Forum français pour la sécurité urbaine (FFSU) – France, Institut für Konfliktforschung (IKF) – Autriche, Associação Portuguesa de Apoio à Vítima (APAV) – Portugal, UFUQ – Allemagne, Université Jagellonne de Cracovie – Pologne, qui ont apporté leur expertise sur les différentes composantes de ce projet et ont participé à la rédaction d’une version préliminaire de la présente publication. Nous les remercions d’avoir eu la générosité de partager leurs connaissances et leurs expériences et d’avoir ainsi permis à ce projet d’aboutir. Nous tenons également à adresser nos remerciements aux représentants des 130 institutions, projets et initiatives qui ont répondu à l’appel à pratiques pour la prévention et la lutte contre les violences discriminatoires au niveau local. Leur engagement à travailler sans relâche pour combattre la haine et l’intolérance et promouvoir la cohésion sociale et une coexistence pacifique à travers l’Europe est une véritable inspiration. Notre gratitude va également aux participants aux nombreux événements, réunions et discussions organisés dans le cadre du projet. Leurs contributions pertinentes ont permis la formulation des idées exprimées dans cette publication. Enfin, nous exprimons notre reconnaissance à la Commission européenne pour son soutien financier sans lequel ce projet et cette publication n’auraient pu voir le jour.

Partenaires du projet Sara Filippini et Gian-Guido Nobili, Forum italien pour la sécurité urbaine (FISU) – Italie ; Laetitia Nolet et Tony Versaevel, Forum belge pour la préven-

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tion et la sécurité urbaine (FBPSU) – Belgique ; Gemma Pinyol et Josep Lahosa, Forum espagnol pour la prévention et la sécurité urbaine (FEPSU) – Espagne ; Myassa Djebara et Camille Jannel, Forum français pour la sécurité urbaine (FFSU) – France ; Helga Amesberger et Birgitt Haller, Institut für Konfliktforschung (IKF) – Autriche ; Rui Nunes Costa et Mafalda Valério, Associação Portuguesa de Apoio à Vítima (APAV) – Portugal ; Götz Nordbruch, Mariam Puvogel et Sindyan Qasem, UFUQ – Allemagne ; Katarzyna Jurzak-Mączka, Université Jagellonne de Cracovie – Pologne.

Autres intervenants Christina Aigner et Thomas Weninger (Österreichischer Städtebund, Autriche), Shams Asadi, Peter Florianschütz, Thomas Hie, Dr Michael Häupl et Angela Schwarz (Ville de Vienne, Autriche), Wolfgang Bogensberger, Petra Polgar et Dagmar Weingärtner (Représentation de la Commission européenne, Autriche), Patrick Charlier (Centre interfédéral pour l’égalité des chances, UNIA, Belgique), Marc Coester (École d'économie et de droit de Berlin, Allemagne), Jon Garland (Université de Surrey, RoyaumeUni), Katrin Gleirscher (Centre d'intervention contre la violence au sein de la famille, Vienne, Autriche), Francesc Guillen Lasierra et Àngels Vila Muntal (Gouvernement de Catalogne), Gertraud Kremsner (Université de Vienne, Autriche), Josep Lahosa et Anabel Rodriguez (Ville de Barcelone), Giuditta Lembo (Région de Molise, Italie), Erich Marks (Conseil de prévention de l'État Basse-Saxe, Allemagne), David Martin (Police municipale de Madrid, Espagne), Niraj Nathwani, Géraldine Guille et Anna Szczodry (Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne, FRA), Larry Olomofe (Bureau des institutions démocratiques et des droits de l’homme de l’OSCE, BIDDH), Anna Rau (Forum allemand pour la sécurité urbaine, Allemagne), Claudia Schäfer (ZARA, Autriche), Gerald Schöpfer (Commission européenne contre le racisme et l’intolérance, ECRI), Hans-Georg Schuhmacher (Ville de Mannheim, Allemagne), Gabriela Sonnleitner (Magdas Vienne, Autriche), James Tate et Natasha Plummer (MOPAC Londres, Royaume-Uni).

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Table des matières

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Avant-propos..................................................................p. 8 Introduction.................................................................p. 10 Partie 1 : Violences discriminatoires, crime de haine et intolérance – Définitions et stratégies de prévention.....................p. 13 1.Qu’est-ce que la violence discriminatoire ? Concepts et définitions.................................................................. p. 14 2. Stratégies européennes de lutte contre les violences discriminatoires....................................................... p. 21 3. Violences discriminatoires et sécurité urbaine – L’importance d’apporter des réponses au niveau local.................. p. 29

Partie 2 : Approches locales de prévention et de lutte contre les violences discriminatoires – Sélection de pratiques prometteuses........................p. 38 1. Améliorer les connaissances..................................................... p. 40 2. Sensibiliser............................................................................... p. 58 3. Autonomiser............................................................................. p. 80 4. Prévenir de façon ciblée............................................................ p. 98 5. Aider les victimes.................................................................... p. 118 6. Définir des stratégies transversales pour lutter contre les violences discriminatoires........................................... p. 135

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Partie 3 : Recommandations à destination des acteurs locaux...............................................................p. 152 1. Mieux connaître le phénomène grâce à des audits de sécurité ciblés......................................................................... p. 154 2. Prendre en compte le problème du sous-signalement............. p. 155 3. Proposer des services locaux d’aide aux victimes.................... p. 156 4. Les autorités locales et régionales à la tête des réseaux de prévention........................................................... p. 157 5. Un rôle visible pour les élus locaux et régionaux..................... p. 158 6. Former les professionnels de terrain et les autres agents au niveau local et régional............................ p. 159 7. Coopération avec les forces de maintien de l’ordre.................. p. 160 8. Diversité et prise en compte au sein des administrations locales et régionales.................................... p. 161 9. Promouvoir la prévention précoce/primaire............................ p. 162 10. Coopération et échanges avec les niveaux national et européen de gouvernance........................................................ p. 163 11. Coopération avec les médias locaux et régionaux.................. p. 164

Bibliographie.............................................................. p. 166

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Avant-propos

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Les actes de violence discriminatoire, qui visent une personne en raison de son appartenance, réelle ou perçue, à un groupe marqué par une caractéristique particulière comme par exemple l'origine ethnique, la religion, l'identité de genre ou l'orientation sexuelle, un handicap, l'âge, la langue ou le fait d'être sans-abri, sont différents des autres crimes. Non seulement ils ont un effet traumatisant sur la santé physique et psychique des victimes, mais ils envoient aussi un message à des groupes ou communautés dans leur ensemble, les menaçant de violence et de la négation de leur droit à participer à la société. De tels actes génèrent, par ailleurs, de la peur et de l'hostilité bien au-delà de l'environnement local et même les actes qui semblent isolés peuvent potentiellement entraîner une escalade, des tensions et des conflits à plus grande échelle. Enfin, les violences discriminatoires portent directement atteinte aux valeurs fondatrices de la démocratie, de la cohésion sociale et de la sécurité des citoyens, telles qu'affirmées dans la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne. Ces violences ont ainsi un impact dévastateur à bien des niveaux. Pourtant, jusqu'à présent, ce problème n'a pas toujours été considéré comme prioritaire dans les stratégies locales de prévention de la délinquance. Les praticiens de la sécurité n'interviennent pas systématiquement pour contrer la discrimination, car celle-ci est souvent considérée comme relevant d'autres services. L'Efus et ses membres veulent à présent changer les termes de ce débat.

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L’Efus a pour but d’améliorer la sécurité et le sentiment de sécurité pour l’ensemble des groupes de la société en trouvant un équilibre entre la prévention, la sanction et la cohésion sociale. Le Forum a toujours souligné l’importance de ne pas tenir compte seulement de l’opinion de la majorité, mais aussi de celle des minorités et des groupes marginalisés. Avec une approche inclusive et globale de la sécurité urbaine, nous pensons que les stratégies de lutte contre les violences discriminatoires doivent être à l’ordre du jour de la sécurité urbaine. Dans le cadre de son projet « Just and Safer Cities for All », l’Efus a créé un consortium de partenaires à travers l’Europe, réunissant un haut niveau d’expertise. L’Efus a dirigé les efforts communs du consortium pour promouvoir l’échange de pratiques prometteuses et mettre au point des recommandations pour les stratégies locales de lutte contre les violences discriminatoires. L’objectif de cette publication est de sensibiliser les autorités locales et régionales et de les assister dans leur lutte contre les violences discriminatoires au niveau local. Elle présente l’état de l’art des stratégies locales pour faire face à la haine et à l’intolérance, fournit une riche sélection de pratiques prometteuses mises en œuvre et reconnues à travers l’Europe. Elle propose également des recommandations pour l’élaboration de futures stratégies. L’Efus espère ainsi apporter un outil efficace de lutte contre les violences et la discrimination en Europe, qui contribuera à nos efforts communs pour construire des villes justes et plus sûres pour tous.

Elizabeth Johnston Déléguée Générale

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Introduction

>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>> Les violences discriminatoires et les crimes de haine sont des problèmes pressants des politiques de sécurité urbaine. Les membres de l’Efus1 sont confrontés depuis longtemps aux effets néfastes du racisme, de la xénophobie, du sexisme, de la LGBT-phobie, de la violence envers les handicapés et les sans-abri, envers les musulmans, les juifs, les Roms et les autres groupes victimes de la haine et de l’intolérance. Les autorités locales en Europe ont d’ailleurs plusieurs fois soulevé ces questions durant les réunions formelles ou informelles de l’Efus et ont proposé de les aborder dans le cadre d’un projet de coopération européenne. Ce sont leurs services locaux et les personnels de terrain qui gèrent au quotidien les conséquences des violences discriminatoires. Ils sont les premiers à être au contact des victimes d’agressions en raison de leur appartenance à un groupe de population particulier et ce sont eux qui répondent en premier à leur souffrance, leur deuil et leur colère justifiée. L’Efus a mis en place le projet européen « Just and Safer Cities for All » contre les violences discriminatoires avec le soutien de la Commission européenne, dans le cadre du programme « Droits, égalité et citoyenneté ». Entre septembre 2015 et décembre 2017, le consortium a organisé les activités et événements suivants :

 Un appel européen à pratiques sur la « Prévention et la lutte contre les violences discriminatoires », qui a reçu plus de 130 réponses de collectivités locales, d’organisations de la société civile, d’initiatives privées et d’instituts de recherche à travers l’Europe qui souhaitaient partager leur expérience et informer sur leurs activités. Cinquante pratiques ont été sélectionnées par le consortium du projet et sont présentées dans la deuxième partie de cet ouvrage ;

1- Établir une mesure statistique de la fréquence des violences discriminatoires et en dégager des tendances à la hausse ou à la baisse est une tâche complexe et souvent infructueuse. Si de nombreuses études indiquent que le nombre d’actes de violence discriminatoire en Europe augmente depuis environ cinq à dix ans, cette évolution n’est pas uniforme et ne doit pas être généralisée. Le Chapitre 1.1 présente ces données plus en détail.

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 Un séminaire européen intitulé « Prévenir et combattre les violences discriminatoires au niveau local », qui s’est tenu en mars 2017 à Vienne (Autriche) et qui a réuni plus de cent participants ;

 Des activités conduites au niveau local par chaque partenaire du projet pour lutter contre les violences discriminatoires dans leurs localités respectives, avec notamment des projets vidéo de jeunes et la mise en place de formations en ligne ou de stages de formation pour les représentants des autorités locales ;

 Un processus d’échanges internationaux dans le but d’élaborer des recommandations à destination des autorités locales et régionales ;

 Un séminaire d’information dans le cadre de la conférence internationale de l’Efus, « Sécurité, Démocratie et Villes », organisée en novembre 2017. Cette publication n’est pas le résultat du travail du seul consortium du projet. Un grand nombre d’intervenants, experts et praticiens venus de toute l’Europe et des professionnels issus de divers secteurs ont contribué à son contenu. À l’occasion des nombreuses et diverses activités organisées dans le cadre du projet, ils ont orienté leurs réflexions autour de trois axes principaux : à quels défis sommes-nous confrontés au niveau local pour prévenir et lutter contre les violences discriminatoires ? Quelles mesures doivent être prises pour lutter localement contre ce phénomène ? Et quel est/devrait être le rôle des autorités locales ? Cette publication comprend trois parties. La première partie introduit le sujet des violences discriminatoires. Elle établit la différence entre le concept de violence discriminatoire ainsi que les notions de crime de haine et de crime motivé par les préjugés. Elle présente également l'approche de l'Efus et aborde les stratégies des principales institutions européennes pour répondre à ce problème. Enfin, elle souligne la pertinence des approches équilibrées et fondées sur des données probantes pour lutter contre les violences discriminatoires au niveau local. La deuxième partie présente un recueil de 50 pratiques prometteuses actuellement mises en œuvre en Europe pour prévenir les violences discriminatoires. Il ne s'agit pas d'une collection complète et exhaustive mais plutôt d'une sélection de pratiques destinée à inspirer et soutenir

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les autorités locales et régionales dans leurs efforts à l'échelon local et pour renforcer leurs stratégies. Ces pratiques sont classées en six catégories : améliorer les connaissances, sensibiliser, autonomiser, prévenir de façon ciblée, aider les victimes et définir des stratégies transversales. Cette approche systématique permet d'avoir un panorama complet et global des différents types d'activités, de stratégies et de politiques que l'on peut appliquer au niveau local. La troisième partie comprend des recommandations pour les autorités locales et régionales. Celles-ci ont été élaborées au cours de nombreuses discussions entre les partenaires du projet, lors des réunions du Comité exécutif et de l'Assemblée générale de l'Efus, lors de réunions avec des experts et des techniciens, les représentants des autorités locales et régionales, les institutions européennes et des organisations de la société civile. Tous ont généreusement partagé leurs idées et leur expertise.

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Ces recommandations ont pour objectif de soutenir les activités locales contre les violences discriminatoires, d'enrichir le travail des municipalités qui sont déjà actives dans ce domaine et d'inspirer ceux qui initient de nouveaux projets.

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Partie 1

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Violences discriminatoires, crime de haine et intolérance – Définitions et stratégies de prévention

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1.1. Qu’est-ce que la violence discriminatoire ? Concepts et définitions

>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>> Définition de la violence inspirée par des motifs discriminatoires Les violences motivées par l’intolérance, la haine ou d’autres motifs discriminatoires sont une réalité quotidienne en Europe. Toutefois, réunir des données statistiques est une entreprise complexe. Il faut, en effet, méticuleusement examiner les chiffres et évaluer soigneusement leur signification afin d’éviter de renforcer la peur et le sentiment d’insécurité des groupes concernés et de la société dans son ensemble. 2 Néanmoins, de nombreuses observations récentes montrent qu’il s’agit d’un problème important et que les évolutions actuelles nous appellent à la plus haute vigilance. Les chiffres officiels pour la période 2005-2015 montrent que le nombre de violences à caractère antisémite est élevé dans une majorité d’États membres de l’Union européenne (cf. FRA 2016: 23ff). En France, l’année 2015 a connu une forte recrudescence d’actes et de menaces islamophobes avec une augmentation de 223 % du nombre de signalements par rapport à l’année précédente (cf. CNCDH 2016: 10). Depuis 2013, le ministère de l’Intérieur britannique (UK Home Office) enregistre chaque année un niveau élevé d’actes racistes, avec un pic lors du référendum sur le Brexit et de la campagne qui l’a précédé, en juillet 2016 (cf. Home Office 2016: 16ff). En Allemagne, le bureau fédéral pour les enquêtes criminelles a constaté une hausse considérable des crimes à motivation politique perpétrés contre les demandeurs d’asile en 2016 (cf. BKA 2017: 9f). De vastes enquêtes menées par l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne (FRA) ont révélé un nombre élevé et inquiétant d’actes de violence liés au sexisme, à la misogynie, au racisme envers 2- Sur la difficulté de rassembler et d’évaluer les données sur ce type d’incidents, voir ODIHR 2005: 21ff et Perry 2010: 351ff.

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la population tzigane ou encore aux préjugés à l’encontre de la communauté LGBT. En 2008, 18 % des Roms interrogés par la FRA ont déclaré avoir subi un acte criminel à motivation raciale au cours des 12 derniers mois (cf. FRA 2009: 9). En 2013, plus de 25 % des personnes LGBT interrogées pour un sondage d’envergure ont déclaré avoir subi au moins un acte de violence ou avoir été menacé en raison de leur orientation ou de leur identité sexuelle dans les cinq années précédentes (cf. FRA 2014a: 56). En 2014, une étude effectuée à échelle européenne sur les violences faites aux femmes a montré qu’une femme sur trois a souffert de violences physiques et/ou sexuelles avant l’âge de 15 ans (cf. RA 2014b: 27). Ces résultats peuvent paraître disparates, voire hétérogènes. Ils couvrent une variété de lieux et de contextes nationaux, ainsi qu’un ensemble de phénomènes très divers : la violence envers des groupes religieux, celle fondée sur l’origine ethnique, sur le statut de migrant ou de réfugié, sur l’orientation sexuelle ou l’identité de genre. Toutefois, un examen attentif révèle des similitudes significatives : il s’agit de formes de violence assez peu étudiées et dirigées vers des groupes spécifiques3. Les victimes ont été choisies parce qu’elles sont perçues comme appartenant à un groupe sujet à la discrimination, l’ostracisation, l’exclusion ou la marginalisation. Elles ont tendance à être identifiées comme « autre que », « différente de » ou « inférieure à » une norme socialement acceptée. Parce que les phénomènes décrits plus haut sont étroitement liés aux dynamiques sociales et à la discrimination, l’Efus les définit comme des violences discriminatoires.

Relations entre discrimination et violence Le terme de violences discriminatoires n’est pas forcément facile à comprendre. Il associe les notions de violence et de discrimination qui sont elles-mêmes complexes. Selon une définition commune et largement reconnue, la violence se comprend comme « l'utilisation intentionnelle de la force physique, de menaces à l’encontre des autres ou de soi-même, contre un groupe ou une communauté, qui entraîne ou 3- Par exemple contre des personnes handicapées, des personnes âgées, des sans-abri ou des travailleurs du sexe. La deuxième partie présente des exemples de pratiques visant à lutter contre les violences à l’égard de ces groupes.

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risque fortement d'entraîner un traumatisme, des dommages psychologiques, des problèmes de développement ou un décès » (WHO 2002: 5). En tenant compte également des relations de pouvoir, sans se limiter donc à la notion de violence physique, cette définition inclut les formes plus évidentes d’abus physiques ou sexuels ainsi que la maltraitance et différentes formes d’exclusion, de menace, de harcèlement, de brimade, d’intimidation et de traumatisme psychologique. On peut trouver dans la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale une définition de la discrimination reconnue internationalement et qui inclut « toute distinction, exclusion, restriction ou préférence (…), qui a pour but ou pour effet de détruire ou de compromettre la reconnaissance, la jouissance ou l'exercice, dans des conditions d'égalité, des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans les domaines politique, économique, social et culturel ou dans tout autre domaine de la vie publique. » (ICERD, Article 1). Le concept de violence discriminatoire associe ainsi ces deux notions pour décrire et problématiser toute forme de comportement violent ciblant des personnes en raison d’une partie de leur identité les rendant sujettes à une dynamique sociale de discrimination. Cela comprend les phénomènes de sexisme et de violence motivée par le genre, le racisme, l’islamophobie et le racisme antimusulman, l’antisémitisme, la xénophobie, la LGBT-phobie, l’homophobie et la transphobie, les violences capacitistes et les violences à l’encontre de personnes handicapées, l’âgisme, l’anti-tziganisme, l’anti-gitanisme, les violences contre les Roms et les Sintis, contre les sans-abri, les migrants, les réfugiés et les demandeurs d’asile et les travailleurs du sexe.4 Ceux qui se rendent coupables de violences discriminatoires sont motivés par des préjugés, des idées préconçues, l’intolérance et la haine à l’égard de ces groupes. Bien que les motivations sont individuelles et les coupables pleinement responsables de leurs actes, on ne peut pas dissocier ceux-ci d’une dy-

4- Il est important de noter qu’il ne s’agit pas là d’une liste exhaustive. Compiler des listes des groupes affectés par les violences discriminatoires est une entreprise nécessaire mais délicate, au risque de ne pas mentionner un groupe - et par là même de le rendre invisible, ce qui peut constituer un préjudice évident. Pour une analyse approfondie de ce problème, voir Garland.Hodkinson 2014 :613 ff

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namique sociale de discrimination plus large qui permet de les rendre intelligibles et de les appréhender comme un phénomène cohérent. Ils ont donc toute leur place dans les politiques de sécurité. Les actes de violence discriminatoire ont des conséquences néfastes que l’on peut classer en trois catégories. Tout d’abord, ils peuvent avoir des effets dévastateurs sur la santé physique et/ou mentale des victimes, de leur conjoint, de leur entourage amical et familial, voire des témoins de ces actes. Les recherches ont montré que les actes de violences discriminatoires sont souvent caractérisés par une brutalité extrême avec des conséquences particulièrement graves pour les victimes (cf. Kees et al. 2016 : 19ff). Ils sont ensuite porteurs d’une symbolique forte car il s’agit d’atteintes à l’identité (cf. Schneider 2009 : 298f). Leur but est d’intimider mais aussi de menacer d’exclusion et de violence tout un groupe social ou une communauté, en remettant en cause ses droits fondamentaux et sa participation à la sphère publique, lui transmettant ainsi un message de haine et de rejet. On peut donc aussi les considérer comme des crimes à messages (cf. ODIHR 2009a: 19ff). Enfin, ils instillent la peur et l’hostilité bien au-delà du contexte municipal, régional ou même national. Ils contribuent par là-même à alimenter des processus de polarisation et de radicalisation qui peuvent aboutir à un extrémisme violent5 et risquent d’aggraver les tensions existantes entre les différentes communautés, intensifiant le risque de conflits violents entre groupes sociaux. Une fois ces trois dimensions comprises et analysées, il apparaît clairement que les violences discriminatoires ne constituent pas seulement une menace contre des individus. Elles ont aussi un effet dévastateur sur notre coexistence pacifique, l’état de droit, l’ordre social, la cohésion et le principe d’égalité.

Crime de haine et violences discriminatoires Comme il n’existe aucune définition communément acceptée des violences discriminatoires, il peut être utile de délimiter cette notion en la 5-Le projet LIAISE (Institutions locales contre l’extrémisme violent) de l’Efus a mis en lumière les liens entre discrimination, stigmatisation et manque de cohésion sociale d’une part et les processus de radicalisation menant à l'extrémisme violent d’autre part. Voir Efus 2016b: 28ff.

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comparant à celle de crime de haine. Le crime de haine a été largement discuté en criminologie, en criminalistique et en politique criminelle, en particulier dans le monde anglophone et ce, depuis les années 1990. La définition proposée par la Canadienne Barbara Perry, criminologue et experte en crime de haine, a été abondamment reprise dans le monde universitaire : « Le crime de haine (...) implique des actes de violence et d’intimidation, il est dirigé en général vers un groupe déjà stigmatisé et marginalisé. Il s’agit donc d’un jeu de pouvoir et d’oppression, visant à réaffirmer les hiérarchies précaires qui caractérisent un ordre social donné. Il tente de recréer simultanément l’hégémonie menacée (de façon réelle ou imaginée) du groupe de l’auteur et l’identité soumise “appropriée”, du groupe de la victime. C’est un moyen de se replacer soi-même et l’autre de façon à rétablir les positions relatives “correctes”, comme affirmé et reproduit par des idéologies plus globales et des schémas récurrents d’inégalité sociale et politique (Perry 2001: 10) . » (Perry 2001: 10) La définition de Perry ancre très clairement le phénomène de crime de haine dans des processus sociaux plus larges de pouvoir et de soumission, de distinction entre soi et l’autre, entre le groupe et l’extérieur du groupe et des dynamiques d’inégalités, de hiérarchisation et de stigmatisation. Cette définition englobe une large part des processus et phénomènes que cette publication entend aborder. Cependant, elle réduit le concept à des crimes motivés par la haine – omettant toutes les formes d’agression n’entrant pas dans le champ des crimes et délits punis par le droit pénal en vigueur ainsi que les nombreux motifs discriminatoires qui ne correspondent pas au terme fort et connoté de haine (cf. Chakraborty/Garland 2009: 4ff). Tout aussi largement citée, la définition utilisée par le Bureau des institutions démocratiques et des droits de l’homme (BIDDH) de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) présente une approche plus pragmatique. Elle pose que les crimes de haine sont : « … des actes criminels commis en raison d’une motivation discriminatoire ou d’un préjugé envers certains groupes d’individus. Un crime de haine comporte donc deux éléments distincts : un acte constituant une infraction

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selon le droit pénal ; un préjugé ou un mobile discriminatoire à l’origine de l’acte. (ODIHR 2009b:15). » (ODIHR 2009b: 15) Il s’agit d’une définition concise et concrète des crimes de haine et se limite aux actes criminels couverts par le code pénal. Concernant les motivations, elle élargit le champ conceptuel pour inclure d’autres formes de rejet motivé par l’appartenance à un groupe tels que les préjugés ou les motifs discriminatoires. Elle constitue un socle commun pour les États membres de l’OSCE, leur permettant de discuter et de coordonner leurs stratégies de lutte contre les crimes de haine. Celle-ci se concentre sur l’harmonisation des mesures juridiques, avec notamment l’introduction de la notion de crime de haine dans toutes les législations nationales qui permet de délégitimer ces actes, d’éviter l’impunité des coupables et d’alourdir les peines lorsque les crimes sont, de façon évidente, motivés par des opinions biaisées, les préjugés ou la haine, mobilisant ainsi les pouvoirs législatifs et symboliques du code pénal pour protéger les droits fondamentaux des victimes de crime de haine (cf. ODIHR 2009a: 21ff). Alors que le concept de crime de haine et les débats qu’il engendre, tant dans les sphères universitaires que dans les milieux professionnels, constituent des points de référence importants pour toute discussion sur les phénomènes évoqués dans la présente publication, l’Efus a choisi d’utiliser la notion alternative de violences discriminatoires.

Définir les violences discriminatoires Le choix de l’Efus d’utiliser le terme de violences discriminatoires est le résultat de plusieurs considérations conceptuelles. Tout d’abord, il est fondamental de souligner les liens entre les violences discriminatoires, décrites comme des actes motivés par la haine, l’intolérance ou les préjugés, et des dynamiques sociales plus globales de discrimination, d’exclusion sociale, de marginalisation et d’ostracisation de certains groupes. La violence n’arrive jamais seule, mais devient une pratique sociale intelligible dans un contexte plus large de jeux de pouvoir et de construction d’un ordre social (cf. Arendt 1970: 53ff). Le terme de violences discriminatoires reflète ces interdépendances.

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Ensuite, la notion de violence discriminatoire inclut un champ plus large que celui des seuls actes criminels. S’il peut être justifié de se limiter aux activités criminelles pour élaborer des stratégies législatives aux échelons national et supranational, une telle restriction n’a aucune raison d’être au niveau local. Ici, tout acte menaçant la cohésion sociale et la coexistence pacifique et mettant en danger les populations aux niveaux local et régional doit être pris en considération. Toutes les formes de violence énumérées dans la définition de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) (voir supra), qu’elles entrent ou non dans le champ du droit pénal, doivent être prises en compte par les politiques urbaines de sécurité. Des études montrent, en effet, que les actes dits « mineurs », tels que les injures verbales ou le harcèlement, alors qu’ils ne constituent pas des infractions criminelles, sont les formes les plus courantes de violences discriminatoires (cf. inter alia, Hall 2013: 63ff). Enfin, le concept évite le terme « haine » pour lui préférer celui de motifs discriminatoires. La notion de discrimination est plus large que celle de haine et regroupe différents types de motivations hostiles qui peuvent être nommées de différentes façons : opinion biaisée, préjugé, haine, intolérance, rejet, ostracisme, marginalisation, exclusion. Par ailleurs, il est linguistiquement proche des termes qui décrivent les phénomènes en jeu, comme racisme, misogynie, homophobie, capacitisme, etc. et qui sont indispensables pour comprendre les violences discriminatoires. Suite à ces réflexions, l’Efus propose une définition pratique et concrète pour les violences discriminatoires :

>>>>>>> Un acte de violence discriminatoire est un incident violent que

la victime, un témoin ou toute autre personne perçoit comme étant incité par un préjugé ou un parti-pris, l’intolérance ou la haine, qu’il constitue ou non un délit ou un crime d’après le code pénal. Alors que ces phénomènes sont souvent compris soit comme des crimes de haine, et donc renvoyés directement au système répressif, soit comme de la discrimination, et donc délégués aux instances oeuvrant pour l’égalité et la non-discrimination, cette définition permet de les

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analyser de façon exhaustive et de prendre en compte leur signification politique et leurs effets sur la sécurité publique. Elle regroupe l’ensemble des phénomènes décrits dans les premiers paragraphes de ce chapitre et permet une large reconnaissance des pratiques, initiatives et projets qui sont élaborés et mis en œuvre dans de nombreuses collectivités à travers l’Europe pour contrecarrer ces phénomènes et combattre et prévenir toute forme de violence discriminatoire. Les mesures prises pour informer, sensibiliser, permettre l’autonomisation des publics cibles, prévenir les incidents de façon ciblée, aider les victimes, pour élaborer des stratégies transversales ou traditionnelles, jouent un rôle important et sont présentées plus en détail dans la deuxième partie.

1.2. Stratégies européennes de lutte contre les violences discriminatoires

>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>> Le cadre politique et législatif européen de lutte contre les violences discriminatoires Il est nécessaire de considérer les violences discriminatoires dans une perspective européenne. Au cœur même du projet européen, il y a la conviction que la différence et la diversité sont des caractéristiques intrinsèques des sociétés de notre continent. La diversité des identités culturelles, nationales et ethniques, des langues, des traditions et des institutions enrichit le patrimoine européen. Employées pour servir des intérêts particuliers et des intentions belliqueuses, ces différences ont provoqué des guerres aussi nombreuses que sanglantes, écrivant les pages les plus sombres de l’histoire européenne. C’est pour empêcher de tels excès et dans le but de garantir une paix durable que l’unification européenne a été mise en œuvre après la Seconde Guerre mondiale. La création du Conseil de l’Europe (CoE) en 1949 constitue l’une des grandes concrétisations de cette idée, avec l’adoption de la Convention européenne pour la sauvegarde des droits de l’homme et des libertés

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fondamentales par ses 47 États membres. Le Conseil de l’Europe a pour but de promouvoir la démocratie, l’état de droit, les droits humains et le développement social à travers l’Europe. La Convention établit une liste des droits fondamentaux et oblige les États membres à les garantir dans le droit national. L’article 14 de la Convention dispose que « la jouissance des droits et libertés reconnus dans la (…) Convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l’origine nationale ou sociale, l’appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation 6». En ce qui concerne l’Union européenne (UE), l’interdiction de la discrimination n’était applicable que dans le contexte professionnel jusqu’en 2000 (cf. FRA 2010 : 15ff). L’activisme de la société civile et le lobbying par des groupes d’intérêt public ont conduit à un renforcement considérable du principe de non-discrimination dans le droit européen, en particulier avec les directives sur l’égalité ethnique et l’égalité professionnelle et la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne de 2000, qui proclame les valeurs indivisibles et universelles de dignité humaine, de liberté, d'égalité et de solidarité. C’est à ce moment que « l’unité dans la diversité » est devenue la devise de l’Union européenne. L’article 21 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne interdit « toute discrimination fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, les origines ethniques ou sociales, les caractéristiques génétiques, la langue, la religion ou les convictions, les opinions politiques ou toute autre opinion, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance, un handicap, l'âge ou l'orientation sexuelle. » L’article 6 du Traité de Lisbonne donne à la Charte une valeur juridiquement contraignante tant pour les institutions européennes que pour les États membres, lorsque ces derniers appliquent le droit de l’Union7.

6- Convention européenne pour la protection des droits de l’homme et les libertés fondamentales, Article 14, interdiction de la discrimination. La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente Convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation. 7- Des dérogations ont été négociées pour le Royaume-Uni, la Pologne et la République tchèque.

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En ce qui concerne plus spécifiquement les violences discriminatoires, le Conseil de l’Union européenne a adopté une décision en 1996 (96/443/JHA) consacrée à la lutte contre le racisme et la xénophobie. Elle a par la suite été remplacée par la décision-cadre 2008/913/JHA sur la lutte contre certaines formes et manifestations de racisme et de xénophobie au moyen du droit pénal, qui permet une plus grande convergence des lois et règlements des différents États membres. Cette décision rend plus efficace la coopération judiciaire dont le principal obstacle est justement la différence entre les approches légales dans les États membres. En plus de définir les infractions liées au racisme et à la xénophobie, cet accord-cadre oblige les États membres à prendre les mesures nécessaires pour que les motifs racistes et xénophobes soient considérés comme une circonstance aggravante ou, à défaut, que ces éléments puissent être pris en compte par la justice pour la détermination des peines pour toute autre infraction. Par ailleurs, la décision-cadre oblige les États membres à prendre les mesures nécessaires pour faire en sorte que les personnes LGBT soient protégées, comme l’avaient déjà fait certains États membres (cf. FRA 2014: 16). Par ailleurs, la Directive des victimes (2012/29/EU) les oblige à évaluer les besoins des victimes de crimes de haine puis à les orienter vers les structures d’aide appropriées et les forces de l’ordre formées à cet effet. Ce cadre juridique au niveau européen a des conséquences directes sur les législations nationales. Un examen des lois des différents pays membres montre que la situation juridique et la reconnaissance des crimes de haine et de la violence discriminatoire est très variable : dans certains pays, ces notions ne figurent pas dans le code pénal ; dans d’autres, seuls certains groupes sont protégés par la loi. 8 L’Union européenne a le pouvoir d’obliger les États membres à appliquer le droit de l’Union par le biais du « recours en manquement » auprès de la Cour de Justice de l’Union européenne. Par ailleurs, la Commission européenne a affirmé sa volonté de prendre toutes les mesures nécessaires pour éviter que les actions d’une minorité d’extrémiste soient exploitées pour répandre la xénophobie et l’intolérance au sein de l’Union européenne. 8- Pour des informations détaillées sur ces cadres juridiques nationaux, veuillez consulter la base de données du BIDDR sur les lois contre les crimes de haine dans les pays participant à l'OSCE : www.legislationline.org/topics/subtopic/79/topic

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Prévenir les violences discriminatoires au niveau local : pratiques et recommandations

Cette courte présentation du cadre légal européen montre que les institutions européennes sont devenues moteur en matière de lutte contre la discrimination et de promotion des droits humains. Toutefois, cette position a été parfois remise en question.

Les violences discriminatoires dans une perspective européenne Ces dernières années, de nombreux événements en Europe ont contribué à créer un contexte social et politique tendu. Ceci a renforcé les inquiétudes relatives aux violences discriminatoires, telles que définies dans la partie précédente. On peut notamment citer la crise financière de 2008 et les politiques d’austérité fiscale qui ont suivi dans de nombreux États membres, avec pour conséquence des réductions drastiques des dépenses sociales et une augmentation du chômage, particulièrement chez les jeunes ; l’augmentation du nombre de migrants, originaires du Moyen-orient ou d’Afrique sub-saharienne, venus chercher asile en Europe et fuyant la guerre, les régimes totalitaires ou la pauvreté ; la montée des revendications d’extrême-droite et/ou de mouvements populistes dans de nombreux pays européens, prônant la suprématie des groupes majoritaires et les préjugés envers ceux considérés comme « différents » ; l’affaiblissement de la légitimité des institutions dans de nombreux États membres, notamment en Europe centrale et orientale et au Royaume-Uni, dont le Brexit est une illustration, ou encore l’inquiétude grandissante des populations face au terrorisme islamiste en Europe qui a poussé l’UE à vouloir renforcer les mesures antiterroristes. Par ailleurs, la mobilité accrue des populations, l’accroissement du niveau d’éducation et le processus général de la mondialisation ont conduit à une plus grande prise de conscience de la discrimination et de l’intolérance. Pour renforcer la coopération et la coordination, mieux prévenir et lutter sur le terrain contre les crimes de haine et les discours d’incitation à la haine, la Commission européenne a créé en 2016 le Groupe de haut niveau de l’UE sur la lutte contre le racisme, la xénophobie et d’autres formes d’intolérance. Dans son discours lors de la session inaugurale du groupe, la Commissaire européenne Věra Jourová a déclaré que la situation actuelle constituait un « défi sociétal sans précédent

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[pour] l’Europe » (Jourová 2016). Le Groupe de haut niveau rassemble des représentants des États membres, le Parlement européen, des organisations de la société civile, des représentants communautaires, l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne (FRA) et les organismes internationaux compétents comme la Commission européenne contre le racisme et l’intolérance (ECRI), le Bureau des institutions démocratiques et des droits de l’homme (BIDDH) et le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (UNHCR). Il a pour but d’encourager les synergies entre les différents acteurs et de développer des réponses afin de lutter efficacement contre toutes les formes de racisme et d’intolérance. Il doit par ailleurs mettre en place une méthodologie commune pour la collecte et l’enregistrement des données sur les crimes de haine.

Les stratégies des institutions européennes pour lutter contre les violences discriminatoires Trois principales institutions internationales luttent contre les violences discriminatoires, l’intolérance et les crimes de haine à l’échelon européen. Leur approche et leurs activités offrent des perspectives pertinentes et sont une source riche d’information et de pratique pour les acteurs locaux.

L’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne (FRA) L’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne (FRA) est le centre d’expertise des droits fondamentaux de l’UE. Elle a été fondée en 2007 pour apporter une aide et une expertise indépendantes et fondées sur des données probantes sur les droits fondamentaux aux institutions européennes ainsi qu’aux États membres. L’agence travaille sur de nombreux thèmes pertinents pour lutter contre les violences discriminatoires, en particulier :

 l’accès à la justice pour les victimes, y compris à l’indemnisation ;  l’intégration des Roms,  les droits des enfants ;

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Prévenir les violences discriminatoires au niveau local : pratiques et recommandations

 La discrimination fondée sur le genre, la « race », la couleur de peau, l’origine ethnique ou sociale, les caractéristiques génétiques, la langue, la religion ou la croyance, les opinions notamment politiques, l’appartenance à une minorité nationale, les possessions, la naissance, le handicap, l’âge ou l’orientation sexuelle ;

 l’immigration et l’intégration des migrants, les contrôles aux frontières, les visas et demandes d’asile ;

 le racisme, la xénophobie et l’intolérance associée. Pour lutter efficacement contre les actes de violences discriminatoires, il faut qu’ils aient une meilleure visibilité, que les auteurs soient poursuivis et que les victimes soient aidées. La directive des victimes (Directive 2012/29/EU), oblige les États membres à identifier les victimes de crimes de haine lors de leur premier contact avec un agent de police, afin de les informer sur leurs droits de victimes en tenant compte de leurs besoins spécifiques et de leur situation personnelle. La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a obligé, à de nombreuses reprises, les pays à « démasquer » la motivation discriminatoire d’une infraction criminelle. Par ailleurs, les études de la FRA ont systématiquement montré qu’il existe encore des différences importantes entre les États membres en matière de collecte et d’analyse de l’information et de données sur les crimes de haine. Il en résulte que de nombreux crimes de haine ne sont pas signalés et ne font pas non plus l’objet de poursuites, si bien qu’ils demeurent invisibles. L’agence a également créé une boîte à outils intitulée « Joining up Fundamental Rights » (« Adhésion aux droits fondamentaux »)9, qui fournit aux autorités locales, régionales et nationales des outils prêts à l’emploi et des méthodologies pour intégrer les droits fondamentaux dans la conception de leurs politiques, la prestation de leurs services et leurs pratiques administratives. En 2014, la FRA a lancé un groupe de travail en vue d’améliorer le signalement et l’enregistrement des crimes de haine au sein de l’UE avec des participants venant des 28 États membres et des organismes internationaux concernés. Celui-ci a notamment produit un recueil de bonnes pratiques10 pour lutter contre les crimes de haine, dont le but 9- Voir : www.fra.europa.eu/en/joinedup/home. 10- Voir : www.fra.europa.eu/en/theme/hate-crime/compendium-practices

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est de faciliter les échanges et le partage de stratégies efficaces au niveau européen.11 En 2016, la Commission européenne a demandé à l’agence de rejoindre son Groupe de haut niveau pour lutter contre le racisme, la xénophobie et les autres formes d’intolérance et de coordonner un sous-groupe dont la mission est de concevoir des méthodologies pour l’enregistrement et la collecte de données sur les crimes de haine. Pour la première période de deux ans (2017-2018), l’objectif du sous-groupe est de suggérer des éléments méthodologiques communs pour l’enregistrement et la collecte de données sur les crimes de haine afin d’améliorer la comparabilité des données entre les États membres et de les adapter si nécessaire aux spécificités nationales.

La Commission européenne contre le racisme et l’intolérance (ECRI) Le Conseil de l’Europe a fondé en 1993 la Commission européenne contre le racisme et l’intolérance (ECRI), une instance indépendante composée de 47 experts de tous les États membres du Conseil. À l’origine, la mission de l’ECRI était de suivre et de faire état de problèmes de racisme, de xénophobie, d’antisémitisme, d’intolérance et de discriminations fondées sur des critères comme la « race », la nationalité, l’origine ethnique, la couleur de peau, la citoyenneté, la religion et la langue (discrimination raciale) et d’adresser des recommandations aux État membres. Depuis 2013, la discrimination et l’intolérance à l’égard des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles et transsexuelles (LGBT) font aussi partie de son mandat. L’ECRI est chargée d’examiner les mesures politiques, législatives et sociétales prises par les États membres pour lutter contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie, l’antisémitisme et l’intolérance ainsi que leur efficacité. L’ECRI propose aussi des actions complémentaires et formule des recommandations de politique générale destinées aux États membres. L’ECRI est surtout connue pour ses rapports par pays12, qui examinent sur des cycles de cinq ans les politiques engagées par chaque État membre pour lutter contre la discrimination raciale et l’intolérance, en collaboration avec les institutions nationales, des organisations et initiatives non-gouvernementales, des agents de liaison,

11- Le travail de l’Efus relatif aux violences discriminatoires est en accord avec l’approche de la FRA et d’intenses échanges ont eu lieu durant le projet « Just and Safer Cities for All ». 12- Voir : www.coe.int/t/dghl/monitoring/ecri/activities/countrybycountry_en.asp

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etc. Les conclusions de l’ECRI, ainsi que ses recommandations quant à la manière dont chaque pays pourrait traiter les problèmes identifiés, sont publiées dans des rapports spécifiques.

Le Bureau pour les institutions démocratiques et les droits de l’homme (BIDDH) Le Bureau pour les institutions démocratiques et les droits de l’homme (BIDDH) de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) a pour mission de fournir aux États membres et à la société civile son aide, son assistance et son expertise pour promouvoir l’état de droit, les droits humains, la tolérance et la non-discrimination. Fondé en 1990, avec à l’origine pour mandat de promouvoir des élections libres, le service pour la tolérance et la non-discrimination du Bureau joue aujourd’hui un rôle important dans la lutte contre l’intolérance, la discrimination, la haine et les formes de violence et de criminalité qui y sont liées. Il lutte contre les crimes de haine à différents niveaux, en encourageant les gouvernements à concevoir des contre-stratégies et à les intégrer dans leurs politiques éducatives, policières et sociales, à améliorer et à harmoniser les systèmes d’enregistrement des crimes de haine, à modifier la loi pénale afin qu’elle reflète la gravité des actes motivés par les préjugés, à former les policiers, à concevoir des outils de suivi des crimes de haine, à aider les victimes et à favoriser des relations d’entente entre les divers groupes de population. Grâce à son système d’information de la tolérance et la non-discrimination (TANDIS), le BIDDH collecte des données des organismes gouvernementaux ou d’institutions nationales et organisations de la société civile sur les actes motivés par la haine, les rassemble et les publie en ligne13. Par ailleurs, il fournit des informations précises sur les législations nationales, les plans d’action, les rapports et les autres documents pertinents sur des pages consacrées à chaque pays. Il publie aussi des guides largement reconnus et des fiches informant sur les stratégies de lutte contre les crimes de haine.

13- Voir : www.tandis.odihr.pl

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Les violences discriminatoires, une priorité des politiques de sécurité urbaine en Europe Les initiatives internationales telles que celles prises par l’Union européenne, le Conseil de l’Europe, l’Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe et leurs organismes respectifs en charge de la lutte contre la discrimination et les différentes formes de violences associées constituent un cadre important pour lutter contre la discrimination. Néanmoins, ces initiatives doivent être poursuivies et complétées pour avoir un réel impact sur le terrain et protéger les populations vulnérables des attaques contre leur personne en raison de leur identité ethnique, leur orientation sexuelle ou leur handicap. En complément des initiatives « venues d’en haut » (top down), il est nécessaire de mettre en place des actions au niveau local qui reconnaissent pleinement la gravité du préjudice causé par les violences discriminatoires à une grande partie de la population. La coordination des mesures prises par les différents niveaux de gouvernance – local, régional, européen et international – et par les nombreuses parties prenantes doit être intensifiée tout comme les échanges entre les acteurs locaux à travers l’Europe et les relations entre les représentants des organismes nationaux et internationaux. L’intérêt central de cette publication est l’élaboration, la mise en oeuvre et l’évaluation de telles initiatives locales contre les violences discriminatoires, l’interaction et la coopération avec d’autres acteurs, comme présenté dans le chapitre qui suit.

1.3. Violences discriminatoires et sécurité urbaine – L’importance d’apporter des réponses au niveau local

>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>> Les villes européennes, des centres de diversité Les grandes villes et les métropoles incarnent la devise européenne d’unité dans la diversité. Elles sont des creusets qui attirent de

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Prévenir les violences discriminatoires au niveau local : pratiques et recommandations

nombreux groupes tels que les migrants, les minorités sexuelles, les communautés religieuses, les sans-abri, les expatriés et plus généralement des gens venus de tous horizons, qui côtoient les populations locales avant de s’y intégrer. De plus en plus, les villes accueillent des populations d’âges, origines géographiques ou ethniques, identités et préférences sexuelles, religions et statuts sociaux différents. Ces populations construisent des communautés et s’expriment d’une manière qui est propre à l’environnement urbain. L’intensification de l’urbanisation et des migrations vers les villes compte parmi les causes les plus évidentes de diversification des populations urbaines, mais cette évolution doit être envisagée de façon plus large. La stratification socio-économique, la ségrégation géographique et la fragmentation post-moderne des identités sont autant de facteurs qui contribuent à ces processus. Les individus n’appartiennent pas à une mais à plusieurs catégories issues tant de l’origine ethnique, la classe sociale, le genre ou d’autres marqueurs d’identité. Par ailleurs, ces catégories et leurs dénominations deviennent de plus en plus fluides et évolutives. Ce processus a été conceptualisé comme « l’hyper-diversification » des espaces urbains, largement reconnu comme une caractéristique fondamentale de la vie urbaine moderne et comme un facteur de développement socio-économique14. Pourtant, la diversité croissante des populations urbaines et des différentes communautés vivant ensemble dans les villes européennes ne s’organise pas toujours de façon fluide et pacifique. L’hétérogénéité de la société urbaine est aussi parfois source de tensions et de conflits. Par ailleurs, la croissance urbaine rapide en Europe peut aussi mener à une intensification des comportements d’intolérance et de discrimination, qui peuvent par la suite dégénérer en actes violents et criminels mettant en danger la cohésion sociale, la tranquillité et la sécurité des individus, des communautés, et la citoyenneté en général. La gestion de la diversité est ainsi un défi pour les gouvernements. La non-discrimination doit être placée au cœur du processus de prise de décision à toutes les étapes de conception des politiques publiques. Dans le cas contraire, les minorités comme la société dans son ensemble risquent de connaître des situations d’exclusion et de vulnérabilité.

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14- La notion d’hyper-diversité a été énoncée par le projet de recherche « DiverCities - Governing Urban Diversities », qui visait à de tels processus ainsi qu’à créer des instruments politiques novateurs répondant aux changements sociétaux qu’ils apportent. Voir Tasan-Kok et al. 2017: 8ff.


Pour saisir toute la portée de cela, il importe de comprendre que les violences discriminatoires ne concernent pas seulement les actes perpétrés par des membres de groupes radicaux ou qui prônent des opinions clairement extrémistes. Au contraire, les violences discriminatoires les plus insidieuses, et donc sans doute les plus dangereuses, peuvent passer pour des événements très ordinaires et quotidiens : « la petite violence des vitres brisées, les excréments dans la boîte aux lettres, les tapages nocturnes, les bousculades et coups furtifs donnés au passant sur le trottoir» (McClintock 2005: 5). S’il conviendrait de s’interroger sur la pertinence de la qualification de « petite violence » pour de tels actes, ils ont été, dans une certaine mesure, normalisés dans de nombreux milieux urbains (cf. Iganski 2008: 23ff). De tels incidents dits « mineurs » ont tendance à être banalisés et restent souvent sans réponse de la part de la police ou des autres autorités et institutions. Néanmoins, ils peuvent inspirer un profond sentiment d’insécurité, de défiance et de crainte chez les autres membres de la communauté touchée, qui peuvent être affectés psychologiquement tout autant que s’ils en avaient été les victimes (cf. ODIHR 2009b: 17). Cela peut ensuite avoir des effets extrêmement néfastes sur la cohésion sociale et la santé publique. La question des zones à très forte criminalité, où la sécurité publique serait mal assurée, souvent appelées « zones de non-droit » a fait l’objet de nombreux débats publics et scientifiques. Ces discussions génèrent une grande peur et déforment la perception générale de la sécurité dans les zones ainsi étiquetées. Souvent, il manque une analyse plus approfondie des types de crimes qui sont répandus dans ces quartiers et des groupes sociaux qui sont affectés ou en risque d’être victimes. Des études menées sur la répartition géographique des crimes de haine et des violences discriminatoires en zone urbaine montrent que l’homogénéité ethnique, le désavantage économique et la pauvreté sont des facteurs qui peuvent favoriser une concentration des situations à risque pour les groupes marginalisés, comme des attaques xénophobes, des incidents homophobes ou anti-LGBT, du harcèlement, des abus sexistes ou des violences antisémites (cf. Iganski 2008 : 45ff). Il conviendrait d’étudier de plus près ces dynamiques géographiques à travers des enquêtes et des audits de sécurité locaux afin d’ajuster les stratégies de prévention locales et régionales.

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Prévenir les violences discriminatoires au niveau local : pratiques et recommandations

Les violences discriminatoires, un défi pour les politiques de sécurité urbaine Les chapitres et paragraphes précédents montrent que les violences discriminatoires constituent indéniablement et sans ambiguïté un problème de sécurité. Pourtant, les mesures visant à garantir une coexistence pacifique entre les différentes communautés, et à prévenir et lutter contre les discriminations ne figurent bien souvent pas parmi les priorités des politiques de sécurité des villes européennes. Généralement, les services locaux en charge des questions de discrimination font partie des services de l’éducation, du logement, de l’emploi, de la culture, de l’égalité des genres ou d’autres programmes sociaux plutôt que des services de sécurité (cf. Crowley 2015: 11f). Ce rattachement est accepté de tous, puisque la discrimination et les formes de violences associées sont présentes dans toutes ces sphères de la vie sociale et doivent être traitées par les services administratifs compétents. Néanmoins, la discrimination, la haine et l’intolérance ont un impact sur la sécurité publique ainsi que sur les perceptions de la sécurité par le grand public. Ce lien doit être davantage exploré afin de démontrer pourquoi les professionnels de la sécurité urbaine doivent être impliqués dans la lutte contre les violences discriminatoires et comment les stratégies locales et régionales doivent intégrer cette problématique. Les intersections entre la diversité, la discrimination et la sécurité sont souvent envisagées par le prisme des risques et des menaces. Ainsi, les attaques terroristes fortement médiatisées qui ont touché de nombreuses villes européennes ont été présentées par certains politiciens et médias comme une conséquence de l’immigration et de l’afflux de réfugiés venus de régions dévastées par la guerre civile et les conflits armés. Cela a contribué à une perception des migrants, des réfugiés et des demandeurs d’asile, en particulier s’ils sont musulmans, comme une menace potentielle (cf. inter alia, Nunziata 2015: 697ff). Par ailleurs, il existe une croyance répandue, bien qu’injustifiée, selon laquelle le taux de criminalité est plus élevé parmi la population immigrée. Cela a conduit à justifier des pratiques policières discriminatoires, comme le contrôle au faciès. La présence d’autre groupes marginalisés comme les Roms ou les sans-abri dans les centre-villes est souvent perçue comme une menace à la sécurité urbaine.

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La diversité accrue est un défi pour la sécurité urbaine nécessitant des mesures appropriées. Toutefois, la diversité ne doit pas être considérée exclusivement comme une menace ou un risque. Une telle vision serait incomplète et contre-productive. Elle stigmatiserait des groupes déjà marginalisés et victimes de discriminations. Suggérer que ces groupes sont associés à la délinquance et la criminalité alors qu’il n’existe aucune preuve scientifique pourrait aggraver leur exclusion, leur stigmatisation et apporterait une justification supplémentaire à ceux qui prônent la haine et l’intolérance à leur égard. Il est donc indispensable d’envisager la diversité et la sécurité urbaine sous un autre angle. Il faut pour cela partir du postulat que la sécurité urbaine est un bien public fondé sur le respect des droits fondamentaux et la participation d’une grande diversité d’individus et de groupes à la société (sur ce sujet et ce qui va suivre, voir Efus 2012: 7ff). Les villes européennes souhaitent préserver et développer les espaces publics partagés par des populations diverses. Créer du lien social et de la convivialité est une priorité : la sécurité ne cherche pas à éloigner les citoyens les uns des autres mais à créer un espace partagé où la sécurité de tous est garantie. Les violences discriminatoires menacent d’exclure les groupes visés de la participation à la création de cet espace public et à l’exercice des libertés qu’il permet. Si les membres de ces groupes pensent qu’ils risquent d’être harcelés, insultés ou attaqués à cause de leur identité, d’être victimes d’actes discriminatoires en devenant visibles dans cet espace public, en participant au débat et aux affaires publics, leur contribution sera perdue. La participation sera alors limitée aux membres des groupes majoritaires dont les intérêts sont déjà représentés dans la sphère publique. Seule une politique de sécurité urbaine qui respecte, encourage et protège les droits des femmes, des minorités ethniques, religieuses et sexuelles, des personnes handicapées, des sans-abri et des groupes menacés de marginalisation et de violences discriminatoires peut permettre l’implication et la participation de ces groupes (cf. Efus 2007: 4ff). Etant donné que les violences discriminatoires, la haine et l’intolérance sont des préoccupations majeures pour ces groupes, les protéger de ces phénomènes est une condition sine qua non de leur bien-être, de leur intégration et de leur participation aux processus so-

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ciétaux. Ces questions doivent faire partie intégrante des stratégies de sécurité urbaine.

Le rôle stratégique des autorités locales et régionales dans la lutte contre les violences discriminatoires Différentes réponses ont été mises en place en Europe pour s’attaquer aux violences discriminatoires. Les plus répandues sont les réponses législatives et répressives ayant pour but d’intégrer des lois contre les crimes de haine dans les codes législatifs en vigueur, d’améliorer la reconnaissance des crimes motivés par les préjugés dans les jurisprudences des cours civiles et pénales et de coordonner et harmoniser ces réponses à travers l’Europe (cf. chapitre 1.2). Ces efforts sont significatifs dans la mesure où ils peuvent décourager les éventuels contrevenants et envoient aux victimes un message important de reconnaissance et de solidarité. Cependant, leur portée est limitée car la loi et sa mise en application ne prennent pas suffisamment en compte les raisons sous-jacentes des préjugés. Ces efforts doivent ainsi être soutenus par des mesures locales et régionales de lutte contre la haine, l’intolérance et les violences discriminatoires. Malgré la dimension européenne et internationale des violences discriminatoires et des crimes de haine, de nombreux facteurs à l’origine de ces phénomènes ont une composante locale. Les conditions de vie, l’influence des pairs, le manque de cohésion sociale, la désaffection des valeurs démocratiques et civiques, la stigmatisation de certains quartiers sont autant de facteurs locaux qui peuvent mettre à mal la coexistence pacifique entre différents groupes en milieu urbain et favoriser des phénomènes de haine, d’intolérance et de discrimination. Par ailleurs, en raison de leur proximité avec la population, les autorités locales et régionales sont souvent les premières à être confrontées aux demandes et aux revendications des citoyens : elles sont en contact direct avec eux, peuvent les informer et les conseiller. Elles dirigent les services publics et les principales institutions responsables de la sécurité publique, de la prévention et de l’intégration. Elles supervisent aussi les réseaux d’institutions, d’organisations et d’initiatives qui contribuent à fournir le bien public que constitue la sécurité urbaine

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(cf. Efus 2016b: 28ff). C’est donc en raison de leur étroite proximité avec les processus sociaux et leur capacité à prévoir et mettre en œuvre des mesures de répression, de prévention, mais aussi des mesures en faveur de la cohésion sociale que les autorités locales et régionales ont une contribution unique et indispensable à apporter à la prévention et la lutte contre les violences discriminatoires. En Europe, les autorités locales ont des compétences différentes en matière de sécurité en fonction des pays. Mais le rôle important qu’elles peuvent jouer dans la lutte contre des phénomènes tels que le racisme et l’intolérance est de plus en plus reconnu. Par exemple dans sa Résolution 149 (2003) « Cohésion sociale et régions en Europe : les politiques et l’action des régions en matière de cohésion sociale », le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe souligne que les gouvernements locaux et régionaux ont un rôle crucial à jouer dans le développement de la cohésion sociale pour réellement garantir aux minorités et aux groupes vulnérables une sécurité et une protection universelles. Dans sa résolution 296 (2010), le Conseil de l’Europe note qu’en raison de la proximité entre les citoyens et les élus locaux, les organes locaux et régionaux sont les mieux placés pour évaluer les situations où la protection des droits humains est menacé, d’identifier les problèmes et d’agir pour protéger les droits humains et fondamentaux des citoyens. Dans son guide méthodologique sur le sujet, le Conseil détaille l’importante contribution que les acteurs locaux peuvent faire dans ce domaine (cf. Conseil de l’Europe 2005: 50ff). De plus, les Nations unies ont constitué une Coalition européenne des villes contre le racisme (ECCAR) dans le cadre de l’UNESCO. L’ECCAR a publié un plan d’action pour lutter contre le racisme au niveau municipal, recueillant des engagements et des exemples d’actions sur une grande variété d’activités. L’une des dix sections du plan d’action a pour but « de soutenir ou établir des mécanismes pour traiter les crimes de haine et pour gérer les conflits » (ECCAR 2004: 7). Trois exemples d’action au niveau local sont proposés : constituer un comité d’experts pour conseiller la municipalité, établir un groupe pluridisciplinaire composé d’agents municipaux pour coordonner les actions et proposer des formations aux personnels des administrations locales et

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Prévenir les violences discriminatoires au niveau local : pratiques et recommandations

régionales. Ces éléments constituent une bonne base mais une expertise et des recommandations plus approfondies doivent être apportées aux professionnels de la sécurité au niveau local sur les moyens d’agir pour prévenir et lutter contre les violences discriminatoires. L’Efus préconise une approche globale et équilibrée pour prévenir et lutter contre les violences discriminatoires au niveau local. Elle doit associer des mesures préventives, une action répressive et des efforts pour continuellement améliorer la cohésion sociale. Elle doit inclure un large éventail d’acteurs et s’appuyer sur la participation de tous les groupes sociaux, en particulier ceux affectés par les phénomènes de discrimination, d’intolérance et des formes de violence qui y sont liées. Elle doit intégrer et travailler avec les ressources existantes dans les domaines de la prévention de la criminalité et inclure des moyens adéquats de communication et de dissémination. Une telle approche doit comprendre les efforts suivants :

 améliorer la connaissance des violences discriminatoires au niveau local grâce à des audits de sécurité avec une méthodologie ciblée ;

 gérer le problème généralisé de sous-signalement des actes discriminatoires et améliorer les données statistiques ;

 créer ou améliorer des services locaux ou communautaires d’aide aux victimes destinés à ceux qui ont subi des violences discriminatoires ;

 mettre en place et diriger des réseaux de prévention dédiés aux violences discriminatoires ou sensibiliser les réseaux existants sur cette problématique ;

 définir un rôle central et visible des élus locaux et régionaux dans le domaine de la lutte contre la haine et l’intolérance ;

 former les divers acteurs locaux et régionaux à mieux reconnaître et réagir aux actes de violences discriminatoires ;

 établir ou améliorer la coopération avec les forces de l’ordre pour renforcer les mesures préventives et répressives ;

 accroître la diversité et sensibiliser à la discrimination au sein des administrations locales et régionales ;

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 promouvoir des mesures de prévention précoce et/ou primaire des préjugés et des idées reçues dans les écoles et l’éducation civique ;

 favoriser la coopération et l’échange avec les gouvernements nationaux et les institutions européennes dans ce domaine ;

 coopérer avec les médias locaux et régionaux pour améliorer la qualité du traitement de ces sujets. Ces aspects seront développés plus en détail dans la partie 3, qui est consacrée aux recommandations sur la mise en œuvre de stratégies de prévention des violences discriminatoires destinées aux acteurs et responsables aux niveaux local et régional. La partie 2 présente un recueil de pratiques et de projets prometteurs menés en Europe.

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Prévenir les violences discriminatoires au niveau local : pratiques et recommandations

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Partie 2

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Approches locales de prévention et de lutte contre les violences discriminatoires – Sélection de pratiques prometteuses

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Introduction

>>>>>>>>>>>>>> Cette partie répertorie 50 exemples de pratiques de prévention et de lutte contre les violences discriminatoires aux échelons local et régional. Son but est de présenter aux acteurs locaux à travers l’Europe des exemples concrets et des sources d’inspiration pour leurs propres efforts en ce sens. Les cas présentés ici ont été sélectionnés parmi 130 pratiques soumises par des institutions et organisations de 16 pays européens en réponse à un appel lancé par l’Efus et ses partenaires en avril 2016. L’appel a été diffusé en anglais, français, italien, polonais, allemand, portugais et espagnol et les pratiques devaient être soumises avant décembre 2016. Toutes les pratiques reçues ont été discutées et analysées en détail par le consortium du projet. Le processus de sélection a duré plus de quatre mois. Tous les membres du consortium du projet ont examiné les pratiques à l’aide d’un formulaire d’évaluation fourni par l’Efus. Elles ont été évaluées en fonction des critères mentionnés dans l’appel à pratiques : qualité globale de la pratique, pertinence par rapport à la catégorie choisie, priorités et types d’actions menées, caractère innovant, transférabilité, durabilité, qualité des partenariats, rapport coût/bénéfice, participation des citoyens et durée. Une présélection a été effectuée sur la plateforme collaborative de l’Efus, Efus Network, à l’issue de laquelle une liste restreinte de 70 pratiques a été établie. En mars 2017, les 50 pratiques retenues ont été choisies lors d’une réunion de coordination du projet à Vienne (Autriche), à laquelle ont assisté tous les membres du consortium et deux représentants de l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne. Le consortium a estimé que les pratiques présentées ici étaient les plus adaptées pour lutter contre les violences discriminatoires, la haine et l’intolérance. Elles ont aussi été sélectionnées avec l’objectif de représenter la diversité des pratiques de terrain, y compris des initiatives venant de différents pays et régions européens et menées par des acteurs variés, ciblant un large éventail de sous-phénomènes,

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Prévenir les violences discriminatoires au niveau local : pratiques et recommandations

travaillant avec plusieurs groupes cibles et appliquant différentes stratégies et techniques. La sélection de pratiques ici n’a pas vocation à donner une représentation complète ou exhaustive des initiatives mises en œuvre dans ce domaine. Même si l’équipe du projet s’est efforcée de diffuser l’appel à pratiques aussi largement que possible en Europe, nous avons bien conscience que tous les porteurs de projets n’ont pas pu être informés ou n’ont pas répondu à l’appel. La sélection n’est donc pas représentative. Il convient de la considérer comme complémentaire à d’autres listes de pratiques, tel que le recueil de bonnes pratiques pour lutter contre les crimes de haine de l’Agence pour les droits fondamentaux de l’Union européenne. Afin de mettre en lumière les principaux types d’activités de lutte contre les violences discriminatoires, les six catégories suivantes ont été choisies : améliorer les connaissances, sensibiliser, autonomiser, prévenir de façon ciblée, aider les victimes et définir des stratégies transversales.

2.1. Améliorer les connaissances

>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>> Afin de concevoir et de mettre en place des réponses efficaces aux violences discriminatoires au niveau local ainsi que d’en prévenir les effets néfastes, il est crucial d’avoir une connaissance solide et exhaustive du phénomène, de sa répartition et de sa dynamique ainsi que de ses conséquences et de ses effets15. Pourtant, actuellement la connaissance du phénomène et les informations concernant les actes de violences à motifs discriminatoires restent incomplètes à plusieurs niveaux. Comme montré dans le chapitre 1.1, plusieurs questions épineuses restent en suspens notamment en ce qui concerne les concepts, définitions et formulations. Par ailleurs, les données fiables sur la prévalence des violences discriminatoires ou sur les actes individuels restent rares

15- « ... pour répondre efficacement au crime de haine et réduire ses effets, nous devons tout d’abord avoir une connaissance approfondie de la distribution et de la dynamique du crime de haine. » (Perry 2010: 267).

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ou incomplètes. Les données officielles collectées par les institutions étatiques telles que la police ne suffisent pas à représenter toute l’étendue du phénomène pour un certain nombre de raisons, notamment les différentes législations et définitions juridiques, le manque de sensibilisation des agents chargés de faire respecter la loi, l’absence de cohérence entre les systèmes de suivi ainsi qu’un taux important de sous-signalement. En outre, la quantité des données disponibles varie considérablement selon le type de violence discriminatoire. Tandis que les incidents racistes ou anti-LGBT sont plus souvent enregistrés, ceux visant les personnes handicapées ou sans-abri font moins souvent l’objet de statistiques officielles16. Ainsi, des moyens supplémentaires de collecte de données et de production de supports d’information sont nécessaires dans la lutte contre les violences discriminatoires. Les acteurs et autorités locaux et régionaux, ainsi que les organisations de la société civile ont un rôle important à jouer dans la collecte de données additionnelles en raison de leur proximité avec les communautés touchées. Ce qui leur permet d’enregistrer les cas. Les pratiques présentées dans cette section contribuent à cet impératif de diverses façons. Elles documentent les incidents individuels de violence discriminatoire, en enregistrant ou en archivant le témoignage des victimes ou des témoins. Elles rassemblent ces informations et/ou les incluent dans un rapport qu’elles publient ou distribuent à des décisionnaires ou à d’autres professionnels. Ces données permettent d’améliorer la connaissance du phénomène, d’inspirer l’élaboration de stratégies de lutte et d’améliorer les politiques et les procédures en place afin d’éviter de futurs incidents.

16- Le Système d’information de la tolérance et la non-discrimination (TANDIS) du BIDDH est un bon exemple, montrant que des données collectées par différents acteurs à différents niveaux - les États participant à l’OSCE, les institutions spécialisées et d’autres organisations - peuvent être associées pour établir une évaluation plus réaliste de la prévalence des violences discriminatoires et permettre ainsi aux intervenants concernés d’élaborer des politiques adaptées. Voir www.hatecrime. osce.org.

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PRATIQUE : Brunatna Księga Organisation: Association Never Again Statut : Organisation non gouvernementale Lieu : Niveau national, Pologne Principaux financements : Activités bénévoles Site web et email : www.nigdywiecej.org/brunatna-ksiega, edakcja@nigdywiecej.org Mission et objectifs L’association Never Again (« Plus jamais ça ») œuvre pour documenter les actes néofascistes commis en Pologne chaque année. Elle en informe le public afin de rompre le silence autour des problèmes de racisme et de xénophobie et de promouvoir une société multiculturelle respectant la diversité.

Activités générales L’association enregistre et répertorie les crimes dans un « Livre brun » (« Brunatna Księga ») publié chaque année. Elle est aussi impliquée dans d’autres projets, dont « Effacer le racisme », « Musique contre le racisme » et « Chassons le racisme des stades ». Elle a également organisé le programme « Respecter la diversité » de l’UEFA pour l’EURO 2012. Depuis 1994, elle publie un magazine sur ces questions intitulé Plus jamais ça.

Stratégies pour améliorer la connaissance du phénomène Depuis 1987, l’association publie chaque année un « Livre brun » documentant les actes néofascistes commis en Pologne, dont les incidents xénophobes, discriminatoires et racistes. Les crimes décrits dans cette publication vont des actes de violences physiques ou agressions aux meetings néofascistes et aux graffitis haineux.

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Le Livre brun a pour objectif de sensibiliser la population et d’encourager les citoyens et les institutions à mettre en œuvre des programmes de prévention, produire des supports éducatifs, mener des activités scientifiques contre les comportements discriminatoires et encourager la coopération entre les différentes institutions, communautés et ONG luttant contre le néo-fascisme.

Partenariats et réseaux L’association collabore notamment avec les médias, les organisations de minorités, les communautés religieuses et les institutions éducatives et scientifiques. Elle coopère également avec des organisations internationales comme le Conseil de l’Europe, les Nations unies et l’OSCE et participe aux réseaux UNITED pour l’action interculturelle, aux réseaux RAN (Radicalisation Awareness Network, Réseau de sensibilisation à la radicalisation), FARE (Football Against Racism in Europe, le football contre le racisme), Helsinki Citizens’ Assembly (hCa) et au réseau antifasciste pour la recherche et l’éducation (Antifanet).

Résultats et défis Le Livre brun a été cité par la classe politique, la presse, et les organisations gouvernementales et non-gouvernementales dans leurs déclarations condamnant les comportements racistes et xénophobes. Le livre et les différents programmes menés par l’association ont donné une visibilité au problème des violences racistes et xénophobes. Le magazine Plus jamais ça est aujourd’hui considéré comme le principal journal anti-raciste d’Europe centrale et orientale.

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PRATIQUE : Rapport annuel sur le racisme Organisation: Fédération SOS Racismo Statut : Fédération d’organisations non-gouvernementales de lutte contre le racisme Lieu : Niveau national, Espagne Principaux financements : Le projet s’appuie sur le bénévolat. Des subventions ont occasionnellement été accordées par le ministère de l’Emploi et de la Sécurité sociale ainsi que par le Fonds européen Asile, Migration et Intégration. Site Web et email : www.sosracismomadrid.es/web/blog/category/ informe-anual Mission et objectifs SOS Racismo a pour but de rassembler et d’analyser des informations collectées sur les incidents et agressions liés au racisme, aux crimes de haine, à l’extrême-droite et aux abus de la police en Espagne afin de sensibiliser le public. Ses groupes cibles comprennent des organisations de la société civile, les autorités, les victimes et le monde académique.

Activités générales Depuis 1995, la Fédération SOS Racismo publie des rapports annuels consacrés en particulier à des sujets tels que les discours d’incitation à la haine, les centres de détention de migrants, les Roms, le respect des droits humains à la frontière espagnole et les agressions racistes ou discriminatoires en Espagne.

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Stratégies pour améliorer la connaissance du phénomène Les stratégies incluent la collecte d’informations pour le rapport annuel, suivie de sa publication et de sa distribution afin de sensibiliser le public au racisme et aux autres formes de discrimination en Espagne.

Partenariats et réseaux Le rapport annuel est produit par la Fédération nationale de SOS Racismo, conjointement avec huit antennes territoriales d’Aragon, des Asturies, de Biscaye, de Catalogne, de Galice, de Guipuscoa, de Madrid et de Navarre et grâce à l’aide de bénévoles dans tout le pays. Le centre pour les études et la documentation sur le racisme et la xénophobie, MUGAK, est aussi un partenaire.

Résultats et défis Le rapport 2016 recense 247 incidents à caractère raciste qui se sont produits en Espagne, ainsi que 100 cas de crimes de haine. Ces données révèlent un problème de société qui a encore peu de visibilité en Espagne. Selon le rapport, 28 % des cas répertoriés en 2016 sont liés à des conflits et des agressions racistes, 22 % à des plaintes portant sur des comportements racistes au sein d’établissements, 18 % à des cas liés à la sécurité publique, 12 % à des refus d’accès aux services ou allocations publics, 10 % à de la discrimination au travail, 6 % au refus d’accès à des services privés, 3 % à des problèmes avec des agents de sécurité privés ou à des cas liés à l’extrême-droite ou à des discours haineux (1 %).

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PRATIQUE : ZARA Statut: Organisation non gouvernementale Zone : Ville de Vienne et niveau fédéral, Autriche Principaux financements : et personnel : ZARA a quatre employés à temps plein et six bénévoles. Financés par la ville de Vienne, des institutions de l’État, la Commission européenne et des donateurs privés. Site Web et email : www.zara.or.at, office@zara.or.at Mission et objectifs ZARA – Zivilcourage und Anti-Rassismus-Arbeit (Courage civil et travail contre le racisme) est une organisation non-gouvernementale de lutte contre le racisme fondée en 1999. Sa mission est d’encourager le courage civil et de contribuer à bâtir une société libérée du racisme, de combattre toutes les formes de racisme et de promouvoir l’égalité de traitement de tous les citoyens résidant en Autriche, quelles que soient leur couleur de peau, leur langue, leur apparence, leur religion, leur nationalité et/ou leur origine. Le mandat de ZARA est fondé sur trois piliers : apporter de l’aide, autonomiser et informer. L’association accompagne les victimes de discrimination et sensibilise le public par l’information et la prévention.

Activités générales ZARA est la seule entité au niveau fédéral offrant des conseils, de l’information et un centre de documentation aux victimes et témoins d’actes racistes en Autriche ainsi qu’une assistance légale aux personnes touchées. À travers l’information, les mesures éducatives ciblant différents groupes, l’organisation d’activités et la publication de documentation portant sur le racisme et les sujets liés, ZARA a pour objectif de sensibiliser le public aux questions liées à la discrimination et au racisme.

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Stratégies pour améliorer la connaissance du phénomène Depuis 2000, ZARA publie un rapport annuel sur le racisme en Autriche en allemand et en anglais. Ce rapport offre des données qualitatives sur les actes racistes qui se produisent en Autriche, en explique les raisons et le contexte et documente les événements individuels. C’est une source unique et riche de renseignements et d’informations sur les violences motivées par le racisme dans la société autrichienne. Cette connaissance est diffusée grâce au rapport mais aussi grâce à toute une série de brochures, de publications, de vidéos, de communiqués de presse, de newsletters, de débats publics et de campagnes ciblées, notamment durant les élections fédérales.

Partenariats et réseaux ZARA coopère et travaille en réseau avec diverses institutions ou initiatives aux échelons local, national et international. Elle fait partie de plusieurs réseaux, notamment la plateforme de solidarité civique, le réseau international contre la haine sur Internet (INACH), le réseau pour la responsabilité sociale (NeSoVe) et le réseau d’action interculturelle UNITED.

Résultats et défis Le rapport et les brochures d’information de ZARA sont largement reconnus et cités comme une source fiable de données sur les violences et les discriminations raciales en Autriche. ZARA enregistre jusqu’à 1000 incidents par an et apporte aide et conseils à des centaines de victimes. Le principal défi reste l’ancrage profond des pratiques discriminatoires dans la société autrichienne.

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PRATIQUE : Równi i Bezpieczni Organisation: Association pour l’Intervention Légale (SIP selon le sigle en polonais) et Lambda Warsaw Statut : SIP est une organisation à but non lucratif. Lambda Warsaw est une organisation d’intérêt public pour l’inclusion des personnes LGBT. Zone : Niveau national, Pologne Principaux financements : Citizens for Democracy, financé par le mécanisme financier de l’Espace économique européen, mis en œuvre par la bourse de la Fondation Stefan Batory Sites Web : www.interwencjaprawna.pl/en, www.lambdawarszawa.org Mission et objectifs L’Association pour l’intervention légale combat l’exclusion sociale en proposant une aide juridique gratuite à des personnes dont les droits ou libertés sont menacés ou violés. Elle est responsable de la totalité du projet. L’association Lambda Warsaw est en charge de la coordination du travail de la coalition pour lutter contre les violences discriminatoires et les crimes de haine. Il s’agit de la plus ancienne des associations LGBT en Pologne. Elle a pour but de donner une image positive de l’identité gay et lesbienne et de favoriser la tolérance envers les minorités sexuelles. Les deux associations offrent une aide juridique gratuite aux victimes.

Activités générales Ces deux associations dirigent le projet « Égaux et en sécurité » (« Równi i Bezpieczni »), dont le but est de sensibiliser les législateurs, les tribunaux et la police aux crimes motivés par le racisme, le nationalisme ou la haine envers les personnes LGBT. Il a également pour objectif d’améliorer la coopération entre les organismes impliqués dans la lutte contre les crimes motivés par la haine et les préjugés à travers l’échange d’expériences.

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Stratégies pour améliorer la connaissance du phénomène Le projet organise des réunions et soutient les associations luttant contre les crimes motivés par la haine et les préjugés. Elle offre une assistance juridique gratuite aux victimes de crimes de haine et missionne des experts pour participer à des procès concernant des crimes motivés par la haine et les préjugés. Elle participe activement à des conférences, des réunions avec des décisionnaires et évalue documents politiques, gouvernementaux et légaux ayant trait à ce sujet.

Partenariats et réseaux Partenaires officiels : Association pour l’intervention légale et Lambda Warsaw Partenaires associés : membres de la Coalition contre les crimes de guerre.

Résultats et défis La Coalition contre les crimes de haine a organisé huit rencontres publiques. 70 personnes ont bénéficié d’une assistance juridique dans le cadre d’un crime de haine et des avocats des deux associations ont participé à sept procès. De façon générale, les législateurs polonais sont aujourd’hui davantage sensibilisés aux conséquences des crimes motivés par les préjugés et les associations luttant contre les crimes motivés par la haine et les préjugés coopèrent plus. Le projet reste à être développé afin de bénéficier aux victimes résidant loin des grandes villes.

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PRATIQUE : Observatoire HATENTO Organisation: Fondation RAIS Statut : Organisation non gouvernementale Zone : Niveau national, Espagne Principaux financements : Financée initialement par le mécanisme financier de l’Espace économique européen. Actuellement financée par des fonds espagnols et par les ressources de la fondation RAIS. Site Web : www.hatento.org/hatento Mission et objectifs En 2014, la Fondation RAIS a créé l’observatoire Hatento, un groupe d’associations pour la prise en charge des sans-abri et pour les droits humains dont le but est de mettre en commun leurs connaissances et leurs ressources pour permettre une compréhension plus globale des crimes de haine commis contre des personnes souffrant d’exclusion sociale extrême. Les principaux objectifs de l’observatoire sont d’améliorer les connaissances sur la fréquence des crimes de haine et des autres actes discriminatoires contre les sans-abri ; d’examiner les principaux types de violences subies par les sans-abri et motivés par l’intolérance et les préjugés contre les sans-abri ; d’analyser les facteurs qui pourraient influencer la vulnérabilité des individus face aux crimes de haine et de mener une analyse détaillée des incidents ou crimes de haine identifiés.

Activités générales Pour repérer et analyser les crimes de haine et les violences dont souffrent les sans-abri en Espagne, l’observatoire rassemble des données sur ces incidents et ces crimes. Hatento a également mis au point des formations destinées aux professionnels, des outils de détection et d’intervention, a mené des campagnes pour sensibiliser le grand public

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aux crimes de haine contre les sans-abri et assurer la reconnaissance de ces crimes de haine et a organisé des réunions publiques pour informer les citoyens sur ce problème.

Stratégies pour améliorer la connaissance du phénomène Hatento publie un rapport de recherche sur l’état des crimes de haine contre les sans-abri en Espagne. Ce rapport offre des informations précises et fiables sur le sujet. Il détaille la nature des incidents ou crimes de haine, les schémas les plus souvent répétés, et les caractéristiques spécifiques des crimes de haine commis contre les sans-abri (type d’agresseur, lieu, heure, etc.). Il propose enfin des pistes pour l’élaboration de politiques de sécurité, détaille les réactions des témoins de ces incidents lorsqu’il y en a et précise quelles victimes ont besoin d’aide et lesquelles portent plainte.

Partenariats et réseaux L’observatoire s’appuie sur la coopération avec de multiples acteurs. Des partenariats ont été établis avec les associations Zubietxe, Bokatas, RAIS Euskadi, ainsi que l'Union nationale des chefs et directeurs de police locale (Unijepol) et le refuge ASSIS.

Résultats et défis Le rapport et les campagnes d’Hatento ont donné une visibilité aux agressions, humiliations et intimidations subies par les sans-abri et motivées par l’intolérance et les préjugés. Les personnes en situation de vulnérabilité, le public et les institutions en Espagne ont désormais une meilleure connaissance de ce problème. Le principal défi est de faire reconnaître comme crimes de haine les attaques contre les sans-abri motivées par l’intolérance et les préjugés.

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PRATIQUE : PUFII Organisation: Conseil de prévention de la criminalité de Basse-Saxe, Congrès allemand pour la prévention de la criminalité, Forum allemand pour la sécurité urbaine. Statut : Coopération entre une institution régionale et des organisations de la société civile Lieu : niveau fédéral, Allemagne Principaux financements : Les associations participantes fournissent du personnel (un employé), un bureau et des fournitures. Site Web et email : www.pufii.de, info@pufii.de Mission et objectifs PUFII (Präventive Unterstützung für Integrations-Initiativen – Soutien préventif aux initiatives d’intégration) a été créé en réaction à l’importante augmentation du nombre de réfugiés demandeurs d’asile en Allemagne à partir de 2015. Dans de nombreuses municipalités allemandes qui les ont accueilli, il y a eu des réactions hostiles, y compris des attaques de centres d’accueil et d’autres formes de violences discriminatoires. Les autorités locales et régionales ont eu beaucoup de difficulté à assurer l’intégration et une coexistence pacifique entre les communautés établies et les nouveaux arrivants. PUFII a pour but de soutenir la diffusion d’informations, la collaboration et l’échange entre les professionnels œuvrant dans le domaine de l’intégration.

Activités générales Géré par trois organisations expérimentées de prévention de la criminalité, PUFII met en relation les acteurs aux échelons local et régional œuvrant pour la prévention de la violence et de la criminalité contre les réfugiés et les migrants, en leur offrant une plateforme de collaboration, d’échange et de partage d’informations au niveau fédéral. Les informations sont collectées et diffusées en ligne.

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Stratégies pour améliorer la connaissance du phénomène PUFII fournit une plateforme centralisée pour l’échange et le stockage d’informations en accès libre pour tous les professionnels et bénévoles impliqués dans l’aide aux réfugiés, offrant ainsi une ressource importante dans un domaine qui s’est développé très vite en réponse à une demande en très forte croissance et qui par conséquent manquait de coordination et de moyens pour échanger des informations. Il propose de nombreux outils, des informations sur les projets, les événements, les possibilités de financement, les formations, des renseignements juridiques, des guides et des manuels. Le site web de PUFII est mis à jour quotidiennement et toute l’information nécessaire sur l’aide aux réfugiés est également rassemblée dans une newsletter hebdomadaire.

Partenariats et réseaux PUFII a été formé à travers un partenariat formel des institutions membres. Un réseau informel regroupant de nombreux acteurs travaillant dans les domaines de l’intégration et de l’aide aux réfugiés a aussi été établi.

Résultats et défis Les publications en ligne et les newsletters de PUFII sont lues par un nombre croissant de professionnels travaillant avec des réfugiés. Une plateforme d’échanges a été créée pour les acteurs contribuant à l’intégration des réfugiés et à la prévention de la violence anti-réfugiés. Garantir les ressources nécessaires pour développer les activités du projet reste un défi majeur.

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PRATIQUE : Observatoire bordelais de l’égalité Organisation: Ville de Bordeaux Statut : Municipalité Lieu: Métropole de Bordeaux, France Principaux financements : Fonds propres Site Web et email : www.bordeaux.fr, i.amicel@mairie-bordeaux.fr Mission et objectifs En 2000, la ville de Bordeaux a lancé une politique volontariste contre les discriminations et pour l’égalité des chances. Ce travail a préparé la création du Comité de veille et d'Action contre les Discriminations et pour l'Égalité (COBADE). Le dernier rapport du COBADE a souligné la nécessité de quantifier les discriminations subies et ressenties afin de mieux les comprendre et les prévenir. À cette fin, le rapport recommandait la mise en place d’un observatoire de l’égalité dont la mission consisterait à faire un état des lieux des incidents discriminatoires, des violences et des phénomènes de harcèlement, réels ou perçus.

Activités générales L’Observatoire bordelais de l’égalité a mené une étude parmi les habitants de la Métropole de Bordeaux à travers des groupes de discussion. Le conseil municipal voulait, en effet, rassembler des données qualitatives et quantitatives sur les discriminations, aussi bien subies que perçues par les habitants.

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Stratégie pour améliorer la connaissance du phénomène Une des premières actions entreprises dans le cadre de cette recherche a été la création d’un questionnaire en ligne accessible directement par les habitants, qui a été diffusé par le conseil municipal et les associations locales lors de la première Quinzaine de l’égalité, en novembre 2014. Les résultats ont été présentés en mai 2015 à l’occasion de l’inauguration des états généraux de l’égalité. Cet événement rassemblait des associations, des représentants de la société civile, des fonctionnaires de la municipalité et de la métropole pour discuter des différentes questions identifiées dans l’étude menée par l’Observatoire. En parallèle, des activités de sensibilisation ont été menées en soirée à destination du grand public. À l’issue de cette initiative participative, une première version du futur projet d’action contre les discriminations a été présentée et validée par les participants aux états généraux de l’égalité. Un groupe de travail du conseil municipal de Bordeaux sur la lutte contre les discriminations, composé d’agents de tous les services de la municipalité y participant pour la plupart bénévolement, a ensuite retravaillé et finalisé cette version.

Partenariats et réseaux L’Observatoire bordelais de l’égalité est composé de chercheurs (en sciences sociales, sciences politiques, droit), d’associations anti-discrimination, du COBADE, de personnalités, d’élus locaux et de représentants de la municipalité. Le comité scientifique apporte son savoir dans quatre domaines : la santé et le handicap, l’égalité entre les genres, les questions LGBT ainsi que l’origine et l’appartenance.

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PRATIQUE : La lutte contre les violences faites aux femmes Organisation: Ville de Valence Statut : Municipalité Lieu : Ville de Valence, France Principaux financements : Les financements proviennent principalement du budget de la municipalité. Certaines activités ponctuelles sont financées par les partenaires. Site Web & email : www.valence.fr/fr/re-decouvrir-la-ville/ ville-solidaire/actions-en-faveur-de-l-egalite-entre-les-femmes-etles-hommes.html, bertrand.leost@mairie-valence.fr Mission et objectifs En tant que signataire depuis 2009 de la Charte européenne pour l’égalité des genres, la ville de Valence s’est engagée à éradiquer les violences faites aux femmes et à sensibiliser la population sur ce sujet. En outre, le projet a pour but d’élaborer des procédures et une culture communes parmi ses partenaires afin de proposer une meilleure assistance aux victimes.

Activités générales La ville de Valence travaille en étroite collaboration avec les acteurs locaux intervenant auprès de femmes victimes de violences. Elle mène des activités avec les associations et institutions locales afin de sensibiliser sur le sujet, notamment les personnels d’accueil dans les administrations publiques ainsi que les établissements et praticiens de santé, les pharmacies et les établissements scolaires.

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Stratégie pour améliorer la connaissance du phénomène Le projet a trois principaux domaines d’intervention. Le premier est de proposer aux femmes victimes de violences un appartement-relais pour une période de trois mois. Les femmes bénéficient également d’une assistance psychologique, administrative et juridique durant cette période. Le deuxième consiste en la publication et la distribution d’une brochure intitulée Victimes de violences, quels recours avezvous ? qui donne des conseils et informations pratiques. Le troisième concerne l’organisation d’événements publics et de débats avec les représentants des institutions et des associations locales.

Partenariats et réseaux Le projet a adopté une approche globale et transversale afin d’inclure un large éventail d’associations. Par ailleurs, il est associé avec le Centre d'information sur les droits des femmes et des familles (CIDFF) pour la gestion des appartements-relais.

Résultats et défis Le projet a réussi à mobiliser les contributeurs (en particulier les personnels sanitaires d’urgence) et la population. En effet, le réseau de contributeurs a triplé et le projet est reconnu au-delà des limites de la ville de Valence. Les principaux défis sont le manque de statistiques précises et le sous-signalement de cas de violence envers les femmes, le manque d’aide accessible aux femmes qui sont en train de se séparer de leur conjoint, et le fait que les victimes ignorent qui peut les aider et quelles procédures suivre.

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Prévenir les violences discriminatoires au niveau local : pratiques et recommandations

2.2. Sensibiliser

>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>> En plus des disparités de connaissances, le manque de sensibilisation de la population aux violences discriminatoires et à ses effets néfastes sur la société et la sécurité publique constitue un défi majeur dans la lutte contre ces phénomènes. Tandis que de nombreuses études et statistiques montrent que la discrimination et les formes de violences qui y sont liées sont répandues et qu’une large part de la population17 a personnellement connu de tels incidents, elles sont beaucoup moins présentes dans le débat public que d’autres menaces envers la sécurité urbaine, telles que le terrorisme ou le crime organisé. La discrimination et l’intolérance semblent souvent être acceptées et normalisées en tant que comportement interpersonnel. Ainsi, la violence de telles conduites passe souvent inaperçue ou n’attire l’attention du public que lorsqu’elle prend des formes extrêmes, comme les mauvais traitements incluant de violentes agressions physiques causant de graves blessures. En conséquence, une condamnation publique claire et un message de solidarité envers les victimes ou les personnes à risque font souvent défaut. Pour combattre cette tendance à la normalisation et à la banalisation, des mesures ciblées visant à sensibiliser sur les effets graves et néfastes de la discrimination et des formes de violences qui y sont liées sont nécessaires. La Commission européenne reconnaît cette lacune et réclame un accroissement des activités de sensibilisation : « seulement un tiers des citoyens européens ont pleinement conscience d’être juridiquement protégés contre la discrimination. Il est crucial pour la réussite des mesures anti-discrimination de faire savoir que la diversité

17- Par exemple, d’après l’étude réalisée en 2014 par l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne (FRA) sur la population LGBT de toute l’Europe, 50 % des personnes interrogées se sentaient victimes de discrimination, environ 20 % avaient subi des violences verbales et 6 % des violences physiques au cours des 12 mois précédant la réalisation de l’étude (cf. FRA 2014).

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est une valeur que l’Europe place haut et qu’elle prend la discrimination au sérieux. Il est vital de sensibiliser sur les lois anti-discrimination afin que les droits soient connus, utilisés et compris » (EC 2017). À travers l’Europe, de nombreuses initiatives menées au niveau local par les autorités publiques prennent en compte ce besoin et contribuent à sensibiliser le public. Elles proposent divers types d’outils éducatifs ou de formations faisant la lumière sur les préjugés, l’intolérance et la discrimination afin de relever le niveau d’attention et de sensibilité face à ces dynamiques sociales. Elles fournissent et diffusent des supports informatifs tels que brochures et vidéos ou diffusent des campagnes sur les comportements discriminatoires et la nécessité d’être solidaire avec les groupes marginalisés. Elles s’adressent à de très larges publics cibles : des étudiants, des enseignants, des journalistes, des membres d’associations sportives, des décideurs politiques, les forces de l'ordre et des représentants des autorités publiques, pour n’en nommer que quelques-uns.

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PRATIQUE : Vier Schrauben für Zivilcourage Initiative Organisation: Kein Platz für Rassismus und Gewalt (Pas de place pour le racisme et la violence) Statut : Initiative de la société civile Zone : Düren, Allemagne Principaux financements : Fonds propres et donations Site Web et email : www.fussballvereine-gegen-rechts.de, www.facebook.com/4Schrauben, gegen-rechts@arcor.de Mission et objectifs Le projet « Quatre vis pour le courage civil » (« Vier Schrauben für Zivilcourage Initiative ») a pour but de lutter contre le racisme et les violences subies par les joueurs de football, dirigeants et supporters issus de l’immigration, en particulier dans les clubs amateurs.

Activités générales L’initiative contre l’extrême-droite a pour but d’encourager le respect et la coopération dans le football à travers des apparitions publiques et des campagnes visant à exclure le racisme et la violence des stades de football en Allemagne. Chaque année depuis 2011, l’initiative a présenté un membre ou une équipe de la région de Düren aux « Trophées de l’intégration par les buts ». Les campagnes en cours (mi2017) sont Quatre vis, Photos d’équipe contre l’extrême droite et On ne loue pas aux Nazis.

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Stratégies de sensibilisation Afin de sensibiliser les joueurs et membres de clubs aux questions du racisme et de la violence, le projet distribue dans les clubs des plaques portant l’inscription « Pas de place pour le racisme et la violence » afin qu’elles soient placées de façon très visible dans les stades (près de l’entrée, des vestiaires, etc.). Les clubs participent à la campagne en la diffusant à travers la presse locale ou sur les réseaux sociaux.

Partenariats et réseaux L’association fédérale allemande de football et la fondation Amadeu Antonio, une organisation non-gouvernementale consacrée au « renforcement de la démocratie et du civisme dans la société » et combattant « toutes les formes de haine et d'intolérance et de sectarisme en Allemagne ».

Résultats et défis De nombreux clubs ont donné des retours positifs et ont observé un changement dans le comportement des joueurs et des spectateurs à l’égard des migrants et des étrangers. En juillet 2017, plus de 855 clubs amateurs avaient participé à la campagne et les organisateurs avaient reçu plus de 200 demandes de plaques.

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Prévenir les violences discriminatoires au niveau local : pratiques et recommandations

PRATIQUE : Chartes scolaires pour l’égalité de traitement Organisation: Fondation pour la diversité sociale (Fundacja na rzecz Różnorodności Społecznej) Statut : Organisation non gouvernementale Lieu : Varsovie, Pologne Principaux financements : Fonds européen d’intégration de ressortissants de pays tiers et programme de financement « Citoyens pour la démocratie » de l’Espace économique européen. Sites Web : www.ffrs.org.pl/, www.ffrs.org.pl/aktualne-dzialania/programy Mission et objectifs La mission de la Fondation pour la diversité sociale (FRS d’après l'acronyme polonais) est de favoriser l’ouverture et la diversité dans notre société en encourageant le dialogue interculturel et l’intégration sociale, en luttant contre la discrimination, en développant les connaissances et en mettant au point des outils qui améliorent l’intégration sociale et l’égalité. Une des principales activités de la fondation est de mener un programme pour diffuser et soutenir l’élaboration de normes d’égalité dans les écoles. Son but est de favoriser l’ouverture envers la diversité, de renforcer l’intégration sociale et de lutter contre la discrimination dans les écoles en Pologne.

Activités générales Le programme pour des règles d’égalité à l’école a pour but de lutter contre les stéréotypes, les préjugés, les discriminations et les violences dans les communautés scolaires. Le programme est une réponse directe aux personnels des écoles et aux parents face à la nécessité d’améliorer l’égalité à l’école en favorisant la consultation et le dialogue avec les communautés scolaires (y compris les élèves, les professeurs, le personnel, les parents, les directeurs etc.).

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Stratégies de sensibilisation L’initiative visant à développer des standards d’égalité dans chaque école participant au projet est un programme fondé sur la participation des différentes communautés, le dialogue et la consultation. Son but est de sensibiliser sur la discrimination, la diversité sociale et l’égalité. Pour ce faire, des méthodes interactives sont utilisées, comme des formations, des ateliers et des réunions qui incluent tous les membres des communautés scolaires. La charte finale de standards acceptée dans chaque école vise à garantir une protection large et intersectorielle contre la discrimination, la participation de divers groupes d’intervenants de la communauté scolaire et un engagement sur le long-terme en faveur de l’égalité.

Partenariats et réseaux Avec le parrainage honoraire du centre pour le développement de l’éducation, le Médiateur et le Plénipotentiaire gouvernemental pour le traitement égalitaire. Partenaire organisationnel : Centre pour le développement de l’éducation

Résultats et défis Le programme a suscité l’intérêt des institutions éducatives aux échelons local, régional et national. De nombreuses écoles dans le pays se sont inspirées de cette initiative en adoptant leurs propres standards indépendamment du FSD. Le développement du programme est un défi parce qu’il demande le soutien individuel des écoles participantes afin de garantir un résultat satisfaisant. Par ailleurs, le climat politique actuel en Pologne (avec un gouvernement nationaliste et conservateur au pouvoir depuis 2015) remet profondément en question toute initiative consacrée à l’égalité et à la lutte contre les discriminations.

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Prévenir les violences discriminatoires au niveau local : pratiques et recommandations

PRATIQUE : Lutter contre les discours de haine Organisation: Concordia Statut : Organisation non gouvernementale Lieu : Aquitaine, France Principaux financements : Projet porté par des bénévoles Site Web et email : www.concordia.fr/lassociation/regions/aquitaine, info@concordia.fr Mission et objectifs Concordia est une association à but non-lucratif non-gouvernementale assurant la promotion de la paix et des échanges interculturels à travers des chantiers bénévoles internationaux depuis 1950.

Activités générales Concordia œuvre pour la défense des valeurs de tolérance et de paix. Dans ce but, des volontaires diffusent le message « No hate Speech » (Non à la haine) du Conseil de l’Europe en particulier auprès des enfants et des jeunes.

Stratégies de sensibilisation Le projet Lutter contre les discours de haine a pour but de lutter contre les discours de haine en ligne, un problème insuffisamment reconnu en France. Pour ce faire, il s’agit de prendre conscience de nos différences pour être en mesure de les discuter, de les comprendre et de les accepter. Le but est aussi d’encourager les alternatives aux discours de haine et de trouver des solutions ou des réponses à ces discours. Il s’agit enfin d’avoir une idée générale des différents types de discours de haine en ligne.

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L’une des stratégies du projet consiste à faire réfléchir des groupes de participants à des exemples de discours de haine et de leur demander d’y trouver une solution ou une réponse créative à travers une performance artistique, comme de la danse ou du théâtre. Le groupe met au point la performance avant de la montrer aux autres. Cette méthode a été testée lors d’un camp international de jeunes. Une autre action a été la création d’un jeu de société de questions-réponses destiné à des enfants de 6 à 11 ans pour encourager le débat et la réflexion autour des différences entre les personnes. Une autre stratégie consiste à envoyer des bénévoles à la rencontre du public pour les informer de l’existence du mouvement Non à la haine.

Partenariats et réseaux Partenaires des camps internationaux de jeunes, plusieurs municipalités (dont Haux et Paillet), de clubs d’activités périscolaires et la délégation nationale de l’association Concordia.

Résultats et défis Pendant le camp, les différentes activités ont mené à des débats animés sur l’importance des différences culturelles. Les jeunes ont abordé des questions essentielles qu’ils n’auraient pas soulevées autrement, telle que l’homosexualité. La principale difficulté est de gérer les opinions extrêmes : le rôle du modérateur des débats est alors crucial pour assurer leur bon déroulement.

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Prévenir les violences discriminatoires au niveau local : pratiques et recommandations

PRATIQUE : Nie lajkuję – reaguję Organisation: Fondation pour la diversité sociale (Fundacja na rzecz Różnorodności Społecznej) Statut : Organisation non gouvernementale Zone : Varsovie, Pologne Principaux financements : l’action a été organisée dans le cadre du projet « Réfugiés ? Bienvenue ! » mis en œuvre par la Fondation pour la diversité sociale dans le cadre du programme Citoyens pour la démocratie, financé par l’Espace économique européen. Site Web : www.ffrs.org.pl/aktualne-dzialania/media-w-spoleczenstwie-roznorodnym/nie-lajkuje-reaguje/ Mission et objectifs La fondation pour la diversité sociale (FRS selon l’acronyme polonais) a pour but de promouvoir une société ouverte et diverse à travers le dialogue interculturel, l’intégration sociale, la lutte contre la discrimination, la diffusion de l’information et l’élaboration d’outils visant à renforcer l’intégration sociale et l’égalité. Le projet « Nie lajkuję – reaguję » (« Je ne ‘like’ pas, je réagis ») a pour but de combattre un discours toujours plus présent dans le discours public en Pologne concernant les migrants et les réfugiés en apprenant aux utilisateurs des réseaux sociaux à répondre aux commentaires en ligne discriminatoires et pleins de préjugés .

Activités générales Cette initiative a pour but de promouvoir une société ouverte et diversifiée qui lutte contre la discrimination et pour l’intégration sociale à une époque où les discours négatifs xénophobes, islamophobes, racistes et porteurs de divisions se développent en Pologne.

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Stratégies de sensibilisation Un groupe de travail de 12 personnes a été établi, regroupant des représentants d’ONG, d’agences de réseaux sociaux et du monde universitaire. Un manuel contre le discours de haine a été rédigé, intitulé « Je ne ‘like’ pas, je réagis » - combattre les discours de haine sur les réseaux sociaux. Il a été publié et diffusé à travers divers forums, conférences et réunions avec les agences de réseaux sociaux et les agences de relations publiques, avec pour objectif d’apporter à leurs personnels les compétences nécessaires et les sensibiliser aux discours de haine en ligne.

Partenariats et réseaux Partenaires stratégiques : The Common Space Foundation (Fondation Espace commun) et l’association pour l’éducation contre la discrimination (Anti-discrimination Education Association -TEA) Partenaires organisationnels : le centre multiculturel de Varsovie. Un représentant d’Isobar Poland (qui travaillait auparavant à l’agence numérique Digitals) a coordonné la participation des réseaux sociaux et des agences de relations publiques à l’initiative.

Résultats et défis Améliorer les compétences des agences de réseaux sociaux pour répondre directement aux posts et commentaires contribuant à renforcer les stéréotypes, les préjugés et incitant à la discrimination. Le principal défi rencontré par l’initiative est l’obtention de financements, ce qui lui permettrait d’être diffusée plus largement à l’avenir.

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Prévenir les violences discriminatoires au niveau local : pratiques et recommandations

PRATIQUE : Campagne “Stop au cybersexisme” Organisation: Centre Hubertine Auclert Statut : Centre de ressources consacré à la promotion de l’égalité des genres et composé d’ONG, d’autorités locales et de syndicats. Zone : Île-de-France, France Principaux financements : conseil régional et ministère de l’Éducation Site Web et email : www.stop-cybersexisme.com, www.centre-hubertine-auclert.fr, aurelie.latoures@hubertine.fr Mission et objectifs Le centre Hubertine Auclert contribue à la lutte contre les inégalités et les discriminations fondées sur le sexe et le genre et œuvre pour promouvoir l’égalité hommes-femmes. Le centre compte actuellement 171 membres : 127 associations, 13 syndicats et 31 autorités locales.

Activités générales Le sexisme en ligne à l’encontre des femmes est en augmentation, en particulier auprès des jeunes femmes ; comme le révèle la première étude sur les cyber-violences fondées sur le genre parmi les ados, menée par le centre en 2015-1016. Dans la lignée de son travail pour promouvoir l’égalité entre les genres et à la lumière de ces évolutions, le centre a lancé un projet dont le but est d’informer et d’éduquer les jeunes et les adultes sur ce problème et les façons d’y réagir. La campagne a été menée en 2015 et 2016. La campagne « Stop au cybersexisme » a pour but de sensibiliser sur la gravité du sexisme en ligne et de faire prendre conscience aux jeunes de leur responsabilité pour prévenir de tels actes de violence lorsqu’ils utilisent les réseaux sociaux. Elle vise également à offrir des conseils aux victimes et aux témoins sur comment réagir.

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Stratégies de sensibilisation Les stratégies incluent la conception et la distribution d’un kit de démarrage pour lutter contre le cybersexisme. Composé d’affiches et de brochures destinées aux jeunes et aux adultes, il les informe sur la nature du cybersexisme et les moyens d’y répondre. D’autres activités ont été organisées, comme la diffusion de messages publicitaires dans les transports publics, les réseaux sociaux et une offre de sessions de formation. Le site web www.stop-cybersexisme.com a été lancé en 2017.

Partenariats et réseaux Pour la conception de la campagne : trois administrations locales de l’Éducation nationale, le Conseil régional d’Île-de-France, des chercheurs, des associations travaillant dans les écoles et des représentants de la police. Pour sa promotion : Ministère de l’Éducation nationale, conseil régional, conseils du Val-de-Marne, du Val d’Oise et de Paris, l’association E-Enfance, des youtubeuses, Fun Radio, les chaînes TF1, M6 et France Ô.

Résultats et défis Durant la campagne 2016, les occurrences du terme « cybersexisme » ont fortement augmenté et il a été vu 22 millions de fois sur Twitter. Les résultats de recherches sur Google ont également montré l’émergence soudaine du mot « cybersexisme », qui a donné 107 000 résultats en septembre 2016 (contre 2 800 en février 2015). De nombreux professionnels ont ainsi pris connaissance du problème et ont procédé à des actions préventives. En 2016-2017, le centre a mené un projet prévention pilote présenté à 1 500 collégiens de la région Île-de-France. Parmi les défis à venir, il faudrait permettre aux éducateurs et professionnels de mieux ajuster les stratégies de prévention à travers des formations conçues par le centre.

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Prévenir les violences discriminatoires au niveau local : pratiques et recommandations

PRATIQUE: Singular do Plural Organisation: EAPN Portugal (Réseau européen de lutte contre la pauvreté) Statut : Organisation non gouvernementale pour le développement Lieu : niveau national, Portugal Principaux financements : Gouvernement portugais Site Web et email : www.eapn.pt, geral@eapn.pt Mission et objectifs Le Réseau européen de lutte contre la pauvreté (European Anti-Poverty Network, EAPN) est le plus vaste réseau européen regroupant des réseaux nationaux, régionaux et locaux d'ONG et d'associations ainsi que des organisations européennes actives dans la lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale. L'EAPN estime que la lutte contre la discrimination doit comprendre la mise à disposition d'informations exactes sur les Roms et leur mode de vie, car l'ignorance est en grande partie responsable des préjugés et stéréotypes à leur encontre.

Activités générales Les membres de l'EAPN participent à diverses activités, notamment d'éducation et de formation, mais aussi de mise à disposition de services pour l'autonomisation des personnes victimes de la pauvreté et de l'exclusion sociale. Singular do Plural s'inscrit dans le cadre de la campagne nationale « la discrimination est un manque d'éducation » (« A Discriminação é Falta de Educação ») promue par l'EAPN Portugal, qui vise à créer une société plus égalitaire et unie en sensibilisant le public à la discrimination envers les communautés roms au Portugal, en déconstruisant les mythes et stéréotypes négatifs qui les entourent et en montrant que les Roms ont leur place dans la société portugaise.

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Stratégies de sensibilisation Le projet a conçu et mis en place une campagne de sensibilisation dans tout le pays. Elle comprend un livre intitulé Singular do Plural ainsi qu'une exposition de photographies dont l'objectif est de déconstruire les stéréotypes négatifs sur les Roms. À partir d'entretiens, l'exposition et l'ouvrage présentent 20 témoignages montrant différents chemins de vie, espoirs et attentes de 20 professions, 20 personnes, 20 Roms.

Partenariats et réseaux Secrétariat d'État pour la Citoyenneté et l'Égalité et Haut commissariat à la migration

Résultats et défis Le public a été sensibilisé au sujet de la discrimination contre les communautés roms et de nombreuses activités ont reçu des retours très positifs. Après sa première présentation publique, le Secrétariat d'État pour la Citoyenneté et l'Égalité a décidé de soutenir l'initiative en finançant une deuxième édition de l'ouvrage afin de le diffuser plus largement dans tout le Portugal. L'exposition de photographies a circulé dans le pays et des réunions publiques ont été organisées dans les villes où elle était organisée afin de sensibiliser le public et de présenter le livre. Le défi principal est d'attirer l'attention des médias de façon positive et de les impliquer dans la campagne.

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Prévenir les violences discriminatoires au niveau local : pratiques et recommandations

PRATIQUE : Projet Heartstone Organisation: Heartstone Statut : Organisation non gouvernementale Zone : Royaume-Uni Principaux financements : Autorités locales du Royaume-Uni, gouvernement écossais, financements privés notamment de Delancey et Rolls Royce. Site Web et email : www.heartstonechandra.com, sitakumari@heartstone.co.uk Mission et objectifs Suite à l'augmentation des crimes de haine au Royaume-Uni enregistrée après le référendum sur le Brexit, le projet Heartstone intervient dans les établissements scolaires du primaire et du secondaire afin d'offrir un cadre sûr pour des discussions ouvertes et franches sur les crimes de haine. Le projet cherche à ouvrir les échanges avec les différentes communautés afin de traiter le sujet des crimes de haine inspirés par l'extrême-droite, le fondamentalisme religieux ou d'autres formes d'extrémisme en promouvant une approche d'égal à égal entre les enfants et les jeunes.

Activités générales Heartstone dirige diverses activités et initiatives afin de lutter contre les crimes de haine au Royaume-Uni, notamment en travaillant avec des établissements scolaires, en formant des enseignants et en organisant des expositions à destination du grand public.

Stratégies de sensibilisation Après avoir reçu une formation de deux heures et des ressources bibliographiques et photographiques de la part de Heartstone, les enseignants organisent de nombreuses sessions en classe sur le sujet des

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crimes de haine. Les élèves prennent part à des discussions sur le sujet et participent à diverses activités créatives et pratiques pour mieux le comprendre (à l'aide des ressources fournies par Heartstone). Ils créent des panneaux d'affichage et organisent des assemblées pour sensibiliser le reste de la communauté scolaire. Des intervenants extérieurs sont également invités dans les établissements scolaires. Les établissements scolaires sont également invités à une grande exposition publique organisée par Heartstone dans la région au cours de l'année.

Partenariats et réseaux Autorités locales (pour mobiliser les établissements scolaires, organiser les sessions de formation, suivre la progression, soutenir l'événement final), photographes partenaires (accès spécial pour les photoreportages) et organisateurs partenaires qui mettent à disposition des lieux de rassemblement de qualité.

Résultats et défis Les enfants, en particulier ceux de 9 à 12 ans, ont été bien sensibilisés aux crimes de haine. Ils ont développé des interventions positives en tant que témoins et ont renforcé leur confiance en eux ainsi que leurs capacités de communication, afin de pouvoir soutenir les victimes et victimes potentielles et de réagir face aux auteurs de ces crimes. Le projet offre une intervention pratique, efficace et à long terme qui peut être facilement intégrée au programme scolaire. Les principaux obstacles rencontrés sont :

 réunir des financements pour lancer un projet,  promouvoir le projet dans la région afin de le diffuser dans de nouveaux établissements scolaires et identifier des sources de financement supplémentaires après le lancement,

 divers défis avec les enseignants : par exemple, il faut au moins un enseignant motivé pour mener le projet à bien dans un établissement scolaire ; si cet enseignant n'est plus disponible (en cas de maladie ou autre), le projet risque d'être interrompu.

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Prévenir les violences discriminatoires au niveau local : pratiques et recommandations

PRATIQUE : Sensibilisierungsakademie Organisation: ServiceCenter ÖGS barrierefrei Statut : Organisation non gouvernementale Zone : Vienne, Autriche Principaux financements : Ministère fédéral du Travail, des Affaires sociales et de la Protection des consommateurs Site Web et email : www.oegsbarrierefrei.at, office@oegsbarrierefrei.at Mission et objectifs L'objectif principal de ce projet est d'encourager et d'assurer l’égalité des chances et de traitement pour les sourds en Autriche, ainsi que de sensibiliser le public à leurs besoins et aux obstacles auxquels ils font face. Il vise également à encourager les contacts entre les entendants et les sourds et l'apprentissage de la langue des signes autrichienne. Sur la base de la Convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées ainsi que des lois autrichiennes comme la loi fédérale sur l'égalité et le handicap (BGStG), la loi sur l'emploi et le handicap (BEinstG) et la constitution fédérale (B-VG), l'objectif est de mettre un terme à la discrimination envers les sourds, en particulier dans la vie professionnelle et dans l'accès à l'information, afin de leur permettre d’être plus autonomes dans tous les aspects de leur vie.

Activités générales Fondé en 2005, le centre de services ÖGS barrierefrei conduit divers projets et initiatives. Il agit comme intermédiaire entre les entendants et les sourds dans l'objectif d'améliorer les droits et l'égalité réelle de ces derniers.

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Stratégies de sensibilisation Les ateliers de l'Académie de sensibilisation donnent des informations sur la surdité et la langue des signes autrichienne. Des signeurs de naissance enseignent quelques signes et des éléments essentiels sur la vie et la culture sourdes. Ces ateliers s'adressent à différents groupes, notamment les jeunes, les entreprises et ONG ainsi que le personnel médical.

Partenariats et réseaux Le ministère fédéral du Travail, des Affaires sociales et de la Protection des consommateurs et les établissements scolaires et institutions où les ateliers ont eu lieu.

Résultats et défis En 2015, 1000 personnes ont participé aux ateliers. La police fédérale de Vienne et de Basse-Autriche a notamment engagé plusieurs employés sourds et organisé des ateliers pour aider leur personnel à mieux intégrer leurs nouveaux collègues. Le plus gros défi pour développer le programme est son financement : en raison d'une augmentation des demandes, des fonds supplémentaires sont nécessaires pour étendre l'offre de services.

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Prévenir les violences discriminatoires au niveau local : pratiques et recommandations

PRATIQUE : Respect Zone Organisation: Respect Zone Statut : Organisation non gouvernementale Zone : Toute la Belgique francophone (phase 1), néerlandophone (phase 2), Belgique Principaux financements : Limité, financements ponctuels de diverses sources privées Site Web : www.respectzone.org Mission et objectifs Respect Zone encourage les internautes à se montrer respectueux en ligne. Tout en assurant la liberté d'expression, cette initiative vise à protéger les internautes des commentaires haineux. Elle cherche à dénoncer la violence, à combattre la discrimination et à encourager l'autodiscipline en ligne en sensibilisant tous les internautes. Respect Zone rassemble divers professionnels (en particulier issus des domaines du droit et de l'histoire) pleinement conscients des problèmes de cyber-harcèlement et de diffusion de contenus haineux en ligne.

Activités générales Les activités de Respect Zone sont centrées sur le « Label Respect Zone », créé en 2014. Cette nouvelle initiative en ligne lutte contre les publications excessivement négatives. Le Label Respect Zone est affiché sur le site internet des organisations qui l'adoptent et acceptent de suivre sa charte, afin d'encourager les visiteurs du site à y réfléchir davantage avant de publier tout contenu haineux ou offensant.

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Stratégies de sensibilisation Les établissements scolaires qui adoptent le Label Respect Zone prennent part à différentes activités : placer le logo sur leur site, former des ambassadeurs à ce sujet, disposer des affiches indiquant que les salles informatiques sont des Respect Zones et organiser des ateliers et des conférences. Les organisations qui adoptent le Label Respect Zone sont conviées à une cérémonie officielle. Une stratégie de communication sur Facebook, Twitter et LinkedIn est également déployée afin de sensibiliser le public.

Partenariats et réseaux Les organisations suivantes sont des partenaires officiels ou des collaborateurs informels du projet : l’UNESCO, le ministère de l'Éducation nationale et de la Recherche (France), campagne éducative #Nonauharcèlement, plateforme Égalité contre le racisme, Barreau de Paris, InternetSansCrainte.fr, Défenseur des Droits de la République française, Observatoire international de la violence à l’école, salon Paris Games Week, Syndicat des éditeurs de logiciels de loisirs (SELL), SOS homophobie et La ligue internationale contre le racisme et l'antisémitisme (LICRA).

Résultats et défis En 2016, plus de 400 articles de presse, 95 articles en ligne, 10 émissions de télévision et 9 émissions de radio ont été consacrés au projet. Le ministère de l'Éducation a envoyé une lettre à toutes les écoles francophones de Belgique au sujet de Respect Zone. L'un des défis actuels est le manque d'investissement de la part des grands groupes médiatiques, ainsi qu'un manque de ressources humaines et financières.

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Prévenir les violences discriminatoires au niveau local : pratiques et recommandations

PRATIQUE : La Charte des bonnes pratiques de la sécurité privée Organisation: Ministère de l'Intérieur du Gouvernement de Catalogne Statut : Gouvernement régional Zone : Catalogne, Espagne Principaux financements : Ministère de l'Intérieur du Gouvernement de Catalogne Site Web et email : cristina.secades@gencat.cat bustia.seguretat.privada@gencat.cat Mission et objectifs Le ministère de l'Intérieur du Gouvernement de Catalogne, par l'intermédiaire de la Direction régionale de l'administration de la sécurité et dans le cadre de sa stratégie globale de prévention et de détection des victimes de discrimination, a dirigé un groupe de travail constitué de professionnels, d'institutions éminentes et de syndicats issus du domaine de la sécurité en Catalogne, y compris le secteur de la sécurité privée en raison de son importance dans le système de sécurité publique catalan. Ce secteur, qui regroupe plus de 13 900 professionnels, peut jouer un rôle majeur dans l'amélioration de la prévention, de la détection et du traitement des crimes liés à la haine et à la discrimination.

Activités générales Le groupe de travail a pour objectif de contribuer à professionnaliser le secteur de la sécurité privée en Catalogne, d'améliorer le système de sécurité publique catalan et de susciter une plus grande confiance parmi les citoyens. Ce groupe a conçu la Charte des bonnes pratiques de la sécurité privée, un document de quinze paragraphes établissant des règles et des principes éthiques dans différents domaines de la sécurité privée. Diverses activités sont mises en place afin d'appliquer cette charte et d'appuyer ses messages.

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Stratégies de sensibilisation Grâce à la conception d'une Charte des bonnes pratiques, ce groupe de travail cherche à établir des politiques-cadres à destination des entreprises de sécurité souhaitant s’engager contre la discrimination, en promouvant la diversité dans le recrutement et l'égalité des chances. De plus, il vise à garantir une gestion exemplaire de la relation avec les citoyens dans le cadre des services de sécurité. Afin de parvenir à une prévention ciblée, la Charte met un point d'honneur à promouvoir des règles pour la prévention, la détection et le traitement des actes de discrimination. Les organisations qui adhèrent aux principes de la Charte reçoivent un label de qualité qu'elles peuvent afficher sur leur documentation, leur site internet, etc. Afin d'adhérer à la Charte, tout le personnel responsable de la sécurité privée en Catalogne doit recevoir une formation de l'Institut de Sécurité de Catalogne, qui comprend une conférence sur les pratiques de non-discrimination.

Partenariats et réseaux Parmi les partenaires associés figurent l'Institut de Sécurité publique de Catalogne, la police régionale catalane (les Mossos d’Esquadra), des représentants de différents domaines de la sécurité privée, les associations les plus représentatives des sociétés et du personnel de sécurité privée, ainsi que des syndicats.

Résultats et défis De nombreuses sociétés de sécurité privée travaillent sur le problème de la discrimination et se sont montrées intéressées par l'adhésion à la Charte. Le principal défi est de faire adopter la Charte par autant d'opérateurs de sécurité privée catalans que possible.

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Prévenir les violences discriminatoires au niveau local : pratiques et recommandations

2.3. Autonomiser

>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>> La notion d’autonomisation englobe un autre ensemble de stratégies pour lutter contre les violences discriminatoires au niveau local en Europe. Le terme est emprunté au domaine des sciences sociales mais est aujourd’hui largement employé dans les domaines de la prévention de la criminalité et de la sécurité urbaine. Il fait référence, à « l’expansion de la liberté de choix et d’action pour façonner sa propre vie. Cela implique le contrôle sur les ressources et les décisions » (Narayan 2013: 4). L’autonomisation décrit donc un processus individuel ou collectif qui consiste à devenir plus fort et prendre confiance dans ses propres capacités, en particulier pour maîtriser sa vie et faire respecter ses droits. Cela peut inclure des mesures pour améliorer l’indépendance économique, la participation politique ou l’éducation. C’est particulièrement pertinent pour les groupes confrontés à l’intolérance, l’exclusion et la discrimination, car ces dynamiques sociales ont un impact grave sur ceux qu’ils visent, les empêchant de se considérer comme des membres à part entière de la société, diminuant ainsi leur confiance dans leur capacité à façonner leur vie et à la vivre comme bon leur semble. Les pratiques rassemblées dans cette section s’adressent aux groupes sociaux qui sont effectivement ou potentiellement touchés par la discrimination et les formes de violence qui y sont liées – c’est-à-dire pas seulement les individus qui en ont été (directement ou indirectement) victimes, mais aussi ceux qui risquent d’en être victimes. Elles ont pour but de renforcer la confiance en eux des membres de ces groupes en restaurant leur sens général des valeurs et de la dignité, qui est constamment menacé par l’intolérance, la haine et les formes d’agressions qui y sont liées. Elles leur permettent de développer différentes sortes de compétences, notamment dans le sport, l’éducation, l’apprentissage des langues, la formation professionnelle, ou encore la production médias, ce qui leur apporte un sentiment général d’auto-satisfaction. Ces activités ne font pas des groupes cibles des bénéfi-

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ciaires passifs mais au contraire les valorisent et les encouragent à adopter une posture active. Les pratiques présentées ci-dessous s’adressent à divers groupes aux prises avec les effets des violences discriminatoires, notamment les réfugiés et demandeurs d’asile, les sans-abri, les personnes handicapées et les femmes migrantes. Elles déploient différentes méthodologies et activités, comme les espaces ouverts, les formations médias ou les projets de jardinage. Elles permettent d’autonomiser efficacement les groupes ciblés, de renforcer leurs points forts, de les aider à faire face à des situations exigeantes ainsi que de leur donner confiance en eux et dans les institutions publiques, réduisant ainsi leur risque de devenir des victimes.

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Prévenir les violences discriminatoires au niveau local : pratiques et recommandations

PRATIQUE : Conclusio Organisation: L’Académie de l'avenir (SPES Zukunftsakademie) Statut : Organisation non gouvernementale Zone : Haute-Autriche, Autriche Principaux financements : Dons et cotisations Site Web et email : www.conclusio-hilft.at, conclusio@spes.co.at Mission et objectifs L'Académie de l'avenir a été créée pour soutenir les demandeurs d'asile et favoriser leur intégration dans la société autrichienne en leur donnant accès à du travail bénévole dans le cadre autorisé par la loi.

Activités générales SPES se concentre sur les aspects potentiellement conflictuels de la société autrichienne. L’Académie travaille dans différents domaines, comme l'éducation des adultes et le développement régional et local. Elle teste et diffuse des projets innovants, parmi lesquels « Conclusio », pour un avenir positif et durable. Dans l'objectif de promouvoir l'intégration au sein d'une société unie et multiculturelle, Conclusio rassemble des Autrichiens et des demandeurs d'asile afin qu'ils effectuent ensemble des activités de bénévolat.

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Stratégies d’autonomisation des personnes à risque Ce projet a pour but d'autonomiser les demandeurs d'asile en leur donnant l'occasion de participer à des projets de bénévolat avec les habitants. Cela leur permet de mettre leurs compétences au service de leur nouvelle communauté, de mieux s'y intégrer et d'améliorer leur connaissance de la langue et du contexte socioculturel pendant que la procédure d'asile suit son cours. L’initiative réduit également les préjugés parmi la population locale, qui voit ainsi l'impact positif que les demandeurs d'asile ont au sein de leur communauté. Le projet est organisé en quatre étapes : événements d'information, établissement de groupes locaux et de branches régionales, élaboration et planification du travail effectué par les bénévoles au sein des municipalités et mise en place.

Partenariats et réseaux Partenaires locaux au sein des municipalités (associations, militants politiques et bénévoles, entreprises et personnes intéressées par le projet), l'association caritative Caritas, un précédent projet de SPES (association « Time Bank 55+ »).

Résultats et défis À l'automne 2016, il existait 20 groupes de bénévoles en Haute-Autriche, comptant environ 600 membres au total, et le projet s’étendait aux provinces voisines et même dans le Land allemand du Bade-Wurtemberg. Les demandeurs d'asile réagissent de façon positive à l'initiative. Ils considèrent que les projets pour lesquels ils sont bénévoles leur apportent fierté et autonomisation, et leur permettent de rencontrer des habitants et de s'intégrer au sein de la communauté.

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Prévenir les violences discriminatoires au niveau local : pratiques et recommandations

PRATIQUE : Welfare dell’aggencio Organisation: Municipalité de Cervia Statut : Municipalité Zone : Cervia, Italie Principaux financements : Réglementation nationale et financement de la municipalité de Cervia Site Web : www.comunecervia.it Mission et objectifs La municipalité de Cervia met en place un vaste projet afin d'améliorer la façon dont les demandeurs d'asile sont reçus et acceptés au sein de la communauté locale, intitulé Projet Sentinelles - Assistance par l'engagement. L'idée est de tirer parti des talents de personnes autres que les spécialistes de l'aide sociale, comme les concierges, les coiffeurs ou les professeurs de sports, qui se voient confier le rôle de « sentinelles de la communauté » et ont pour mission d'assurer la liaison entre les réfugiés et les services d'aide locaux.

Activités générales Le projet consiste à accueillir les migrants, leur trouver un logement, les diriger vers les services municipaux concernés, les informer sur leurs droits et devoirs, et leur confier des tâches bénévoles dans la communauté locale en fonction de leurs aptitudes.

Stratégies d’autonomisation des personnes à risque Dans le cadre du projet Sentinelles, l'initiative Assistance par l'engagement/Accueil des réfugiés (Welfare dell’aggencio) vise à dissiper les préjugés à l'encontre des réfugiés et à créer une culture d'acceptation à leur égard. De plus, elle évite aux réfugiés de se sentir inutiles et apathiques, ou pire, de s'adonner à des activités illégales, en leur confiant une misson. Enfin, le projet vise à établir un protocole d'accueil pour les demandeurs d'asile.

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L'idée est d'autonomiser les demandeurs d'asile en les encourageant à utiliser leurs compétences pour effectuer des travaux bénévoles pour les institutions et les petites entreprises locales, par exemple en travaillant dans une cantine pour les démunis, en faisant des travaux de peinture, de décoration ou de menuiserie dans des bâtiments publics ou autres, ou toute autre tâche qu'ils maîtrisent.

Partenariats et réseaux Les partenaires sont la coopérative sociale Zerocento et la coopérative Stem qui gèrent le service de réception, qui ont été identifiées par le biais de procédures publiques, ainsi que des organisations sportives et des associations.

Résultats et défis Bien qu'il n'y ait pas eu d'évaluation formelle, les habitants de Cervia ont manifestement moins de stéréotypes au sujet des demandeurs d'asile qu'avant le début du programme, grâce à leur travail ayant contribué positivement à la communauté locale. On peut aussi dire que de façon générale, les habitants se sentent plus en sécurité. Le défi majeur est l'augmentation du nombre de demandeurs d'asile arrivant dans la ville et la poursuite des financements.

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Prévenir les violences discriminatoires au niveau local : pratiques et recommandations

PRATIQUE : GRUND Organisation: Initiative jardin communautaire Statut : Organisation non gouvernementale Zone : Sankt Pölten, Autriche Principaux financements : Plateforme de financement participatif respekt.net et levées de fonds. Le programme est géré par des bénévoles. Site Web et email : www.gartenprojekt.at, www.facebook.com/ derGRUND, antoniatitscher@yahoo.de Mission et objectifs Les principaux objectifs de ce projet sont de promouvoir l'inclusion et les interactions sociales entre les demandeurs d'asile et les habitants, d'encourager les premiers à être actifs dans la communauté locale, et de leur permettre d’avoir accès à une alimentation fraîche et de bonne qualité à faible coût.

Activités générales Le programme organise divers événements et initiatives au sein de la communauté locale, notamment autour d'un jardin principalement entretenu par des demandeurs d'asile. Les jardiniers (demandeurs d'asile et habitants) ont transformé un champ en jardin fertile produisant des fleurs et des légumes. GRUND fait partie des Jardins communautaires de Basse-Autriche de « Natur im Garten », qui proposent des ateliers de jardinage, des conférences et des excursions. Certains participants se sont impliqués dans l'élaboration du projet. Des réunions d'organisation et d'évaluation ont lieu avant et après chaque session de jardinage.

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Stratégies d’autonomisation des personnes à risque Le projet cherche à autonomiser les demandeurs d'asile en leur offrant une parcelle dans un jardin communautaire local afin qu'ils puissent cultiver leurs propres fleurs et légumes. Diverses activités ont lieu, notamment des réunions pour discuter de jardinage, des excursions, mais aussi de simples plages de temps libre entre participants. Ceux-ci passent régulièrement des soirées ensemble à cuisiner les légumes qu'ils ont fait pousser. Travailler au jardin offre aux demandeurs d'asile une certaine routine quotidienne et leur permet de passer du temps avec les autres jardiniers et les visiteurs, ce qui les aide à apprendre la langue.

Partenariats et réseaux GRUND travaille en étroite coopération avec les clubs LAMES et Sonnenpark.

Résultats et défis Le projet fonctionne depuis 2014 et certains jardiniers en font partie depuis le début. Il permet aux demandeurs d'asile et aux habitants de se rencontrer pour échanger. Il y a actuellement 22 jardiniers. En raison d'un manque de ressources financières, le projet est soutenu par le travail bénévole et n'est pas en capacité de faire face à l'augmentation de la demande.

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Prévenir les violences discriminatoires au niveau local : pratiques et recommandations

PRATIQUE : KAMA Linz Organisation: KAMA Linz Statut : Organisation non gouvernementale Zone : Linz, Autriche Principaux financements : Dons volontaires, le programme est géré par des bénévoles. Site Web et contact : www.kama.or.at/linz, www.facebook.com/kama.linz Mission et objectifs KAMA Linz est une organisation qui a pour vocation de créer des espaces permettant aux habitants de Linz et aux migrants de faire connaissance dans un esprit de respect mutuel et de coexistence, afin d'encourager une participation positive à la société et de décourager toute forme de discrimination.

Activités générales Les activités comprennent des ateliers animés par des demandeurs d'asile, des campagnes de sensibilisation et la coordination d'événements et de réunions afin de s'assurer de la cohérence de l'organisation.

Stratégies d’autonomisation des personnes à risque KAMA Linz organise des ateliers (par exemple de cuisine, langue, danse) animés par des demandeurs d'asile et des migrants dans l'objectif de les faire sortir de leur rôle habituel de destinataires des cours et formations. Cela permet aux demandeurs d'asile et migrants de s'impliquer dans le travail bénévole. L'idée est de créer une culture de respect mutuel et d'offrir des espaces dans lesquels habitants et migrants peuvent se retrouver, partager leurs expériences et s'efforcer de créer ensemble une société plus tolérante.

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La stratégie comprend l'organisation d'ateliers dans lesquels les participants sont encouragés à réfléchir à la réalité de la vie quotidienne des demandeurs d'asile, et la tenue d'un « Café du Lundi » pour que les gens se fréquentent chaque semaine dans un cadre informel. Les demandeurs d'asile et migrants peuvent se porter volontaires pour animer des cours, ce qui leur donne un objectif et contribue à renforcer la cohésion de la communauté.

Partenariats et réseaux KAMA Vienne, centre municipal d'Auwiesen, association Arcobaleno, association Jeunesse et Temps libre, communauté protestante d'Urfahr, centre pour la jeunesse de Treffling.

Résultats et défis Depuis le début du projet à Linz en 2014, 254 ateliers ont été organisés pour un total de 2 159 participants. Les réactions ont été très positives. Les participants apprécient notamment la sensation d'autonomisation qu'ils en retirent et les échanges interculturels. Le financement reste l'un des principaux défis. Le projet aurait besoin de deux employés à temps plein, notamment pour gérer les aspects administratifs, promouvoir l'initiative et former les bénévoles.

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Prévenir les violences discriminatoires au niveau local : pratiques et recommandations

PRATIQUE : La Xixa Fem Comunitat Organisation: Association théâtrale La Xixa Statut : Organisation non gouvernementale Zone : Barcelone, Espagne Principaux financements : Principalement de la part du programme Erasmus+, ainsi que de subventions publiques et contrats avec les institutions sociales. Fonctionne grâce à la collaboration de 30 bénévoles. Site Web et email : www.laxixateatre.org, laxixa@laxixateatre.com Mission et objectifs L'association théâtrale La Xixa promeut l'égalité raciale et de genre et l'idée d'une société diversifiée et inclusive en organisant des activités culturelles ouvertes aux personnes de tous âges et milieux.

Activités générales L'association théâtrale La Xixa organise, dans le cadre du projet Renforcement communautaire, diverses activités associées à la recherche, l'élaboration et la diffusion d'outils de transformation sociale par le biais du théâtre et de l'éducation populaire, notamment des ateliers et des sessions de formation.

Stratégies d’autonomisation des personnes à risque L'association organise des ateliers pour les formateurs pour encourager l'action artistique au niveau local et international. Elle le fait grâce à l'aide de ses bénévoles, qui ont tous été formés dans des domaines tels que les sciences sociales, la pédagogie ou l'art. Les thèmes abordés dans cette action comprennent l'interculturalité, le racisme, la xénophobie, le genre et la citoyenneté active.

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Partenariats et réseaux La Xixa collabore avec les administrations locales et régionales, les universités et diverses organisations de la société civile. De plus, elle fait partie de plusieurs réseaux, notamment le Réseau hispano-américain du théâtre communautaire, le Réseau international de théâtre de l'opprimé et le Réseau scolaire pour l'égalité et la non-discrimination.

Résultats et défis Plus de 10 000 personnes ont participé aux présentations, ateliers ou formations proposés par l'association depuis sa création. Dix groupes du Théâtre de l'opprimé ont été créés dans toute la Catalogne. De nombreux thèmes ont été abordés par le biais des activités et ateliers de La Xixa, notamment la diversité culturelle et le genre.

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Prévenir les violences discriminatoires au niveau local : pratiques et recommandations

PRATIQUE : Frauen stärken Frauen Organisation: Police de Mönchengladbach en coopération avec les clubs sportifs de la police de Mönchengladbach Statut : Coopération entre les forces de police et une organisation de la société civile Zone : Mönchengladbach, Allemagne Principaux financements : Aucun financement/budget nécessaire. Les formations sont organisées dans les locaux mis à disposition par le partenaire et les équipements sont ceux des clubs sportifs de la police. Site web : https://www.polizei.nrw.de/moenchengladbach/ artikel__10816.html Mission et objectifs Le projet « Des femmes rendent des femmes plus fortes » (« Frauen stärken Frauen ») a été lancé pour aider les femmes venues du monde entier installées à Mönchengladbach à vivre une vie sans violence et à les soutenir dans leur intégration. Plus spécifiquement, le projet a pour but de tisser des liens de confiance entre les femmes immigrées et la police locale. En effet, de nombreuses femmes migrantes ont des réticences vis-à-vis de la police. Les objectifs sont de renforcer leur confiance dans les institutions publiques et d’encourager ces femmes à participer à la vie publique.

Activités générales La police est impliquée dans une série d’activités visant à faciliter l’intégration et à améliorer la confiance dans la police, y compris l’organisation de sessions de formation à destination de femmes migrantes et des événements culturels tels que les journées portes ouvertes dans les mosquées et les festivals interculturels. Les agents de police impliqués dans le projet pensent que le rôle des forces de l’ordre est de promou-

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voir l’inclusion et ils contribuent aux festivals interculturels, présentations et événements publics dans les mosquées ou autres sites religieux.

Stratégies pour autonomiser les personnes à risque Les sessions de formation pour enseigner aux femmes immigrées à reconnaître et gérer des situations stressantes et éviter de devenir des victimes sont organisées depuis 2012. Les cours s’étalent sur deux jours, chaque session durant 3 à 4 heures. La gestion des conflits et les bases de l’auto-défense font partie des sujets enseignés. Ces activités renforcent la résilience des femmes et contribuent à les protéger. De plus, elles améliorent leur confiance dans la police. Elles leur permettent d’acquérir les connaissances nécessaires pour reconnaître une situation dangereuse et y réagir de façon appropriée si elles sont confrontées à des violences xénophobes ou racistes.

Partenariats et réseaux Le club sportif de la police de Möchengladbach, le conseil pour l’intégration de la ville de Mönchengladbach, l’officier pour l’intégration de la ville de Mönchengladbach, les services sociaux de l’Eglise protestante (Diakonisches Werk), le centre pour l’éducation familiale (Familienbildungsstätte), le service de l’école et des sports, l’association SKM Rheydt.

Résultats et défis Les retours des participantes sont positifs. Elles affirment que le projet leur donne confiance dans la police et qu’elles feraient appel à elle en cas de besoin. L’une des participantes a notamment contacté la police par la suite pour lui confier ses inquiétudes au sujet de son neveu, qu’elle soupçonnait d’être en voie de radicalisation, ce qui a permis à la police d’intervenir.

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Prévenir les violences discriminatoires au niveau local : pratiques et recommandations

PRATIQUE : Happy Centre Organisation: Municipalité de Bologne Statut : Municipalité Zone : Bologne, Italie Principaux financements : Financements publics Site Web et email : www.piazzagrande.it/, happycenterbolognina@piazzagrande.it Mission et objectifs Le Happy Centre de Bologne est un service communautaire de la municipalité de Bologne. Il a été créé en 2015 pour promouvoir l’inclusion et faciliter les échanges entre les sans-abri et les habitants de la ville afin de gérer le problème de la marginalisation des sans-abri et de les aider à s’intégrer dans la société.

Activités générales Une exposition itinérante, des ateliers de bricolage et des échanges linguistiques ont été organisés. Le Happy Centre a pour but de remédier à l’isolement des sans-abri en renforçant leurs compétences sociales et d’encourager le respect mutuel entre ceux-ci et la communauté locale. Le centre organise aussi des projets pour aider les individus, notamment des cours utilisant des méthodes pédagogiques non traditionnelles.

Stratégies d’autonomisation des personnes à risque Différentes activités sont organisées au cours de la journée. Le matin, l’accès est réservé à des individus ayant du mal à interagir avec les autres. Ils peuvent venir au centre pour discuter, utiliser l’ordinateur, préparer le déjeuner en groupe et participer à des activités comme les échecs ou le groupe de lecture du journal.

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L’après-midi, le centre est ouvert à tous ceux qui souhaitent participer aux activités. Chaque jour de la semaine est réservé à une activité donnée, choisie en fonction des besoins et envies des habitants et des sans-abris. Chaque activité est animée par un modérateur et deux bénévoles. Il s’agit notamment de conversations italien-anglais, du recyclage de papier, de la couture, de la danse et du théâtre, des cours d’informatique, improvisation musicale, philosophie et team building.

Partenariats et réseaux Collaboration avec des universités italiennes et américaines (stages et recherche scientifique), organisations sociales et culturelles, groupes de scouts et groupes informels. Le projet se concentre également sur la communauté locale et le quartier où se situe le centre.

Résultats et défis Le centre a déjà aidé plusieurs personnes en situation difficile ou vulnérables que les services sociaux n’auraient pas pu assister. Il leur donne l’occasion de rencontrer des personnes diverses dans un cadre accueillant et chaleureux. L’un des défis est le manque de place. Il n’y a que deux salles pour les activités et une salle en plus serait utile. Autre difficulté, les services sociaux ne reconnaissent pas toujours le bénéfice que le centre représente pour les sans-abri et les compétences qu’ils y acquièrent.

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Prévenir les violences discriminatoires au niveau local : pratiques et recommandations

PRATIQUE : Medienbüro Organisation: Alpha Nova Statut : Société de prestation de services sociaux Zone : Graz, Autriche Principaux financements : Financements issus de l’acte sur le handicap de l’État fédéral de Styrie. Site Web et email : www.alphanova.at/medienbuero.html, doris.gusel@alphanova.at Mission et objectifs L’objectif de l’association Alpha Nova est de venir en aide aux personnes désavantagées en raison de leur handicap ou d’autres circonstances. Pour atteindre cet objectif, l’association a créé la société Alpha Nova en 1992.

Activités générales Alpha Nova offre aux personnes handicapées la possibilité de participer à diverses activités créatives ou centrées sur les médias. Elles peuvent ainsi concevoir leurs propres émissions, ce qui leur confère une autonomie et un espace public pour s’exprimer.

Stratégies d’autonomisation des personnes à risque Le projet Media Office a pour but de développer certaines compétences chez les personnes handicapées, comme par exemple la prise de décision autonome. Il vise par ailleurs à identifier les vocations des participants à lutter contre les stéréotypes et idées préconçues de la population à leur égard. Les personnes handicapées sont autonomisées parce qu’on leur donne l’occasion de développer un certain nombre de compétences créatives,

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technologiques et sociales. Ainsi, elles peuvent enregistrer et faire la publicité d’un programme radiophonique mensuel intitulé Inouï, un programme sans barrières et une émission télé, Inouï, enquête TV. Ces émissions leur permettent d’être entendus et vus par le public et de montrer qu’elles sont créatives et même parfois drôles.

Partenariats et réseaux Coopération avec Radio Helsinki (Graz)

Résultats et défis La présence à la radio et sur YouTube et Facebook crée un sentiment d’inclusion. Le projet montre que les personnes handicapées n’ont pas à se cacher. Par ailleurs, en plus d’acquérir des compétences pratiques en matière de production média, elles apprennent à prendre la parole et à évoluer en public.

 www.facebook.com/unerhoertTV  www.facebook.com/radi.ounerhort  www.youtube.com/user/Unerhoertgehoert La situation financière est le plus grand défi car ce sont les contraintes financières qui empêchent le projet de se développer.

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Prévenir les violences discriminatoires au niveau local : pratiques et recommandations

2.4. Prévenir de façon ciblée

>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>> Les mesures préventives visant à éviter les incidents jouent un rôle central dans tous les domaines des politiques de sécurité urbaine. Néanmoins, l’Efus et d’autres acteurs estiment que les réponses répressives aux phénomènes de violence et de crime sont encore trop souvent prédominantes. C’est tout aussi vrai pour les violences discriminatoires, un domaine dans lequel la mise en application de lois sur les crimes de haine, c’est-à-dire des réformes du code pénal qui alourdissent les peines des coupables de crime ayant agi avec des motivations discriminatoires, est souvent au centre des débats internationaux, que cela soit en criminologie ou en politique. On peut distinguer trois principales catégories de mesures préventives : la prévention primaire ou universelle, la prévention secondaire ou sélective et la prévention tertiaire ou indiquée (cf. Brantingham/Faust 1976: 288). En suivant ce classement largement utilisé, une grande variété d’activités couvrant des initiatives globales d’éducation et de sensibilisation ainsi que des mesures spécifiques pour éviter la récidive chez les victimes individuelles ou les coupables peuvent être catégorisées comme de la prévention. Pour cette publication, le terme « prévention ciblée » a été choisi pour désigner des pratiques qui visent à prévenir des actes de violences discriminatoires de façon concrète et spécifique. Les mesures de prévention ciblée sont destinées aux lieux et aux contextes où les préjugés, la haine et l’intolérance règnent, oeuvrent contre les dynamiques de discrimination et de violence et fournissent des outils pour briser ces cycles et introduire des formes moins hostiles et plus inclusives d’interaction. Les pratiques présentées ci-après proposent des mesures pour prévenir des actes de violence discriminatoire dans différentes sphères de la vie sociale. Elles travaillent avec différents groupes cibles tels que les professionnels du maintien de l’ordre, des journalistes, des leaders religieux, les enseignants et des étudiants, des organisations de la société civile et des bénévoles et traitent de situations et de contextes qui comportent certains

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risques d’incidents, comme les lieux de vie nocturne et de fêtes, les manifestations sportives, etc. Ces mesures sont souvent adaptées aux risques spécifiques que rencontrent les différentes communautés, dont les groupes religieux, tels que les musulmans et les juifs, la communauté LGBT, les travailleurs du sexe ou les personnes handicapées.

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Prévenir les violences discriminatoires au niveau local : pratiques et recommandations

PRATIQUE : Turning the Spotlight on Hate Crime Organisation: AWAZ Cumbria Statut : Entreprise sociale et organisation de développement communautaire Zone : Cumbrie, Royaume-Uni Principaux financements : Financé par le Commissariat de police et du crime de Cumbrie Site Web et email : www.awazcumbria.org, aftab@awaz.info Mission et objectifs AWAZ signifie « voix » dans plusieurs langues d’Asie et du Moyen-Orient. Depuis 2005, AWAZ Cumbria cherche à faire entendre la voix des communautés sous-représentées et marginalisées. AWAZ a pour but de faire de la Cumbrie une région plus accueillante et bienveillante en mettant les différentes communautés en relation, en faisant progresser l’égalité, en célébrant la diversité, en luttant contre les préjugés, en encourageant le développement des communautés et en favorisant l’intégration et les initiatives.

Activités générales Pour accomplir sa mission, AWAZ Cumbria organise différentes activités, comme la défense des droits des personnes subissant le racisme et la discrimination dans les politiques publiques ; promouvoir l’engagement dans la communauté ; faire entendre la voix de ceux qui sont généralement peu écoutés, et favoriser leur participation à des consultations stratégiques et dans les forums locaux de prise de décision. AWAZ Cumbria propose également du conseil et des formations sur le développement des communautés locales, la gestion des crimes de haine, l’égalité, la diversité ainsi que les droits humains et développe des ressources en ligne.

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Stratégies de prévention ciblée Le programme « Donner un coup de projecteur sur les crimes de haine» (« Turning the Spotlight on Hate Crime ») comprend des activités pour lutter contre les préjugés, les crimes de haine et les incidents motivés par la haine et pour favoriser de bonnes relations en aidant les individus à réfléchir à leurs actes et attitudes qui font du mal aux personnes originaires de diverses communautés. Le projet vise à aider et soutenir les auteurs de crimes de haine ou les personnes qui risquent d’en commettre. Il a pour but de les éloigner de comportements fondés sur des préjugés en les aidant à comprendre les crimes d’hostilité et de haine, à respecter la diversité et la dignité humaine, à développer leurs compétences et leur estime de soi, à travailler avec les autres dans un environnement positif et à stimuler l’empathie pour les victimes et le respect des droits de l’homme. Le programme reçoit des personnes envoyées par des organisations ou des individus qui aident des personnes ayant commis ou risquant de commettre des crimes motivés par la haine. Lorsque la personne arrive, le coordinateur du programme la reçoit et la soumet à un premier test d’évaluation du risque. Une fois la personne acceptée dans le programme, on lui attribue un parrain. On lui offre la possibilité de participer à des formations accréditées, de gagner en expérience à travers un stage dans une organisation partenaire et on l’encourage à travailler pour atteindre ses objectifs personnels. À l’issue du programme, elle peut devenir ambassadeur du programme.

Partenariats et réseaux Cumbria Reducing Offending Partnership (CROPT), Youth Alliance de Cumbrie, Carlisle MENCAP, OutREACH Cumbrie et le projet « The Heathlands ».

Résultats et défis Le programme a eu des retombées positives pour ceux qui l’ont suivi. Après l’avoir terminé avec succès, trois des participants explorent actuellement des opportunités de développement de carrière et veulent s’engager dans diverses initiatives dans la collectivité.

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Prévenir les violences discriminatoires au niveau local : pratiques et recommandations

PRATIQUE : Alerte aux discours de haine Organisation: INTERKULTURALNI PL Statut : Organisation non gouvernementale Zone : National, Pologne Principaux financements : Fonds de l’Espace économique européen. Un groupe de 11 bénévoles formés a travaillé sur le projet en faisant une veille des médias. Sites Web : www.hatespeechalert.org.pl, www.facebook.com/HSA.org, www.interkulturalni.pl, interkulturalnipl@gmail.com Mission et objectifs INTERKULTURALNI PL et la fondation Dialog-Pheniben oeuvrent pour la réduction des discours d’incitation à la haine en Pologne alors que la xénophobie est en hausse suite à la crise des migrants. Ils s’efforcent de promouvoir une société ouverte et multiculturelle en agissant pour faire évoluer le cadre juridique, en proposant une éducation culturelle et en faisant la promotion des différentes cultures.

Activités générales Une part importante de leur travail est de faire la veille des discours d’incitation à la haine en ligne et dans les médias grâce au travail de bénévoles et à travers diverses activités (ateliers, formations, rédaction de manuels) visant à éduquer des personnalités publiques importantes sur l’impact de la parole publique et la propagation de discours de haine. Le projet vise à réduire les discours de haine sur le long-terme.

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Stratégies de prévention ciblée En se concentrant particulièrement sur trois groupes identifiés comme étant les plus susceptibles d’être victimes de discours de haine en Pologne (musulmans, juifs et communauté LGBT), le projet œuvre pour prévenir les discours de haine en informant des journalistes et des décideurs politiques sur l’effet négatif que l’expression d’opinions haineuses peut avoir sur ces groupes minoritaires et sur l’opinion et le comportement de la population en général. Deux manuels, l’un à l’intention des journalistes, l’autre des responsables politiques, ont été rédigés, publiés et diffusés à plusieurs centaines de journalistes et aux parlementaires pour les informer sur ces problèmes. Des formations, des débats et des ateliers ont été organisés afin de poursuivre le travail de sensibilisation sur l’importance de ne pas répandre publiquement la haine et de ne pas influencer l’opinion publique.

Partenariats et réseaux Fondation Dialog-Pheniben

Résultats et défis Au total, 97 journalistes et décideurs politiques ont assisté aux ateliers. L’association a eu l’occasion de continuer à diffuser son message grâce à sa participation à de nombreux événements (émissions de télévision et campagnes de lutte contre le discours de haine). Une réduction notable des discours de haine sur les comptes des réseaux sociaux des responsables politiques a été constatée. Une des limites du projet est qu’aucun journaliste ou homme politique de premier rang n’a assisté aux formations, ni aucun de ceux particulièrement connus pour leurs discours d’incitation à la haine.

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Prévenir les violences discriminatoires au niveau local : pratiques et recommandations

PRATIQUE : Together! Organisation: SOS Racismo Gipuzkoa (Espagne), SOS Racisme Catalunya (Espagne), KISA (Chypre); OPU (République tchèque), Camera del Lavoro di Milano (Italie), Lunaria (Italie), Università di Roma-observatorio contra il Razzismo (Italie) Statut : Projet Together Zone : Pays basque et Catalogne (Espagne), Milan et Rome (Italie), Prague (République tchèque), Chypre. Principaux financements : Le programme de l’Union européenne « Droits fondamentaux et citoyenneté » et contributions des organisations membres. Site Web : www.togetherproject.eu/about/ Mission et objectifs Ce projet a pour but d’améliorer les capacités des autorités policières et de la société civile à rendre les crimes de haine visibles dans la société européenne, ce qui constitue le premier pas pour réduire ce type de crime et aborder les violations des droits fondamentaux.

Activités générales Le projet œuvre dans quatre principaux domaines : il propose des programmes de formations sur les crimes de haine aux agences de maintien de l’ordre, aux ONG et aux associations locales. Il développe des outils de collecte de données destinés aux ONG pour le signalement des crimes de haine et des procédures destinées aux agences de maintien de l’ordre. Il fait la promotion de mécanismes d’échange d’informations entre la société civile et les autorités de police dans les pays impliqués. Il établit des rapports nationaux et un rapport comparatif sur les crimes de haine sur la base de données collectées par les organisations de la société civile grâce à l’outil de collecte de données et organise des conférences internationales sur le sous-signalement des crimes de haine.

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Stratégies de prévention ciblée Le projet est mené en quatre phases : 1) développer le programme et le matériel de formation, dont l’un comprend 13 modules et l’autre (une version abrégée) 10 modules, disponibles en anglais et dans les langues nationales du projet (espagnol, italien, grec et tchèque) ; 2) f ormer les formateurs des organisations partenaires afin qu’ils soient en mesure de reproduire la formation pour les membres de la société civile et les autorités de police dans les pays participants ; 3) élaborer des rapports nationaux utilisant l’outil standard de collecte de données créé par le projet ; 4) diffuser les résultats du projet à travers le site web dédié, une conférence internationale et d’autres outils de diffusion.

Partenariats et réseaux L’Union nationale des chefs et directeurs de police locale (Unijepol), l’association catalane de chefs et directeurs de la police locale (AAPOLC) et d’autres administrations publiques.

Résultats et défis 501 membres des agences de maintien de l’ordre et 267 professionnels venus de la société civile ont été formés à identifier et signaler les crimes de haine. La collaboration et l’échange d’informations entre les forces de maintien de l’ordre et la société civile ont été renforcés et le projet a permis de rendre les crimes de haine plus visibles dans la société européenne à travers l’élaboration de cinq rapports approfondis sur le sujet.

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PRATIQUE : Ouvre les yeux Organisation: Association ALC Statut : Organisation non gouvernementale Zone : Nice, France Principaux financements : les frais de personnel sont pris en charge par le budget opérationnel du centre Les Lucioles, Centre d'hébergement et de réinsertion sociale Site Web et email : www.association-alc.net, p.hauvuy@association-alc.org Mission et objectifs Fondée en 1958, ALC est une association qui agit pour et avec les personnes confrontées à des difficultés sociales et qui sont exclues de la société ou sur le point de l’être. À l’origine, ALC s’occupait principalement de jeunes filles risquant de tomber dans la prostitution. Mais avec le temps, les interventions se sont diversifiées et concernent aujourd’hui une grande variété de groupes, depuis les jeunes enfants jusqu’aux sans-abri.

Activités générales ALC est une organisation qui ne cesse de se renouveler et a mis au point un ensemble de méthodes, incluant les échanges en face à face, les actions collectives, les visites à domicile, les tournées dans la rue, les ateliers et les contacts en ligne. Le projet Ouvre les yeux a pour but de lutter contre les stéréotypes et préjugés de la population locale à l’égard de la prostitution et de la traite des êtres humains à Nice et dans le département des Alpes maritimes en France afin de combattre le sentiment d’exclusion et de discrimination des victimes. Il vise également à former le public et les professionnels à identifier et protéger les victimes. Dans le cadre du projet, une grande diversité d’activités ont été organisées, allant d’une conférence à la création d’un groupe de travail, et diverses séances de médiation et de formation.

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Stratégies de prévention ciblée Un groupe de travail composé de représentants locaux de trois partis politiques et de la municipalité de la métropole Nice Côte d’Azur a été créé. Son travail a permis la mise en œuvre de différentes actions, notamment une médiation culturelle à l’intention des travailleuses du sexe nigérianes, en raison du nombre élevé de femmes en risque de tomber dans la prostitution présentes dans cette région ; la création de fichiers de liaison et l’organisation d’une conférence sur la traite des êtres humains. D’autres mesures de sensibilisation de la population aux réalités de la prostitution ont été prises, comme la médiation entre des habitants et des travailleuses du sexe et la formation de personnels des services sociaux, médicaux et d’aide aux victimes et des forces de l’ordre.

Partenariats et réseaux Services de la ville de Nice (Conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance et élus locaux), des services publics (Service des Droits des femmes et préfecture), des organisations spécialisées dans l’aide aux victimes, le refuge municipal de Nice pour les victimes, les services de sécurité urbaine et les membres de la Commission contre les violences faites aux femmes.

Résultats et défis L’association a reçu des retours positifs de non-professionnels qui ont déclaré que leur vision des prostitués avait changé grâce au programme. Le 19 juin 2016, 200 personnes ont participé à la conférence sur la traite des êtres humains en Méditerranée.

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PRATIQUE : Programme Significativo Azul Organisation: Fédération nationale des coopératives caritatives sociales (Fenacerci) et la police de sûreté publique (PSP) Statut : Coopératives et police de sûreté publique Zone : National, Portugal Principaux financements : Fonds propres de Fenacerci et de PSP Site Web et email : www.fenacerci.pt, fenacerci@fenacerci.pt, www.psp.pt Mission et objectifs Les objectifs principaux de ce projet sont de former des professionnels travaillant dans le domaine du handicap mental et de la réhabilitation ainsi que des policiers afin de prévenir les mauvais traitements de personnes handicapées et de leur permettre d’exercer leurs droits et libertés fondamentaux. Le projet vise également à promouvoir la coopération entre les institutions spécialisées et la police et à améliorer les compétences de la police en matière de communication et d’information.

Activités générales Le projet propose trois types d’activités : la formation, la mise en œuvre, le développement et la surveillance. Elles impliquent un grand nombre d’acteurs et d’intervenants, y compris des professionnels travaillant dans le domaine du handicap, des familles de personnes handicapées et la police.

Stratégies de prévention ciblée Pendant la phase de formation du projet, les formations sont organisées pour des professionnels travaillant dans le domaine du handicap et de la réhabilitation pour les informer du cadre légal dans lequel la police est en droit d’intervenir, des procédures à suivre pour identifier les violations des droits des handicapés et collecter des preuves, et leur donner des clés pour

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communiquer efficacement avec la police. Dans la phase de mise en œuvre, le projet fait la promotion du programme « estou aqui » (je suis là), qui a été créé par la police portugaise pour munir les adultes vulnérables ainsi que les enfants de bracelets permettant à la police de pouvoir facilement retrouver la famille ou les soignants dans les cas où la personne se trouve en détresse dans un espace public. Le projet mène aussi campagne pour informer les familles des droits des personnes souffrant d’handicap mental et pour aborder le problème des violences domestiques. Dans les phases de mise en œuvre et de surveillance, des forums et des débats entre la police et les organisations partenaires de Fenacerci sont organisés dans le but de sensibiliser sur les droits des personnes souffrant d’handicap mental et de créer des synergies.

Partenariats et réseaux Police de sûreté publique (PSP), la Fédération nationale des coopératives caritatives sociales (Fenacerci), l’Institut national de réhabilitation (INR, I.P.) et la Confédération nationale des institutions solidaires (CNIS).

Résultats et défis Le programme a réussi à mettre en lumière le phénomène social de la violence liée au handicap. Selon les données disponibles, en 2015, 1 351 agents de police ont été formés dans le cadre du programme et 229 sessions de sensibilisation locales ont été organisées. En 2016, 68 sessions de sensibilisation se sont adressées aux professionnels, aux personnes handicapées et leurs proches. En outre, la police est intervenue dans 209 cas de violences envers des personnes souffrant de problèmes de santé mentale ou de handicap et 39 délits ont été enregistrés.

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Prévenir les violences discriminatoires au niveau local : pratiques et recommandations

PRACTICE : Meet2respect Organisation: Leadership Berlin – Netzwerk Verantwortung e.V. Statut : Organisation non gouvernementale Zone : Berlin, Allemagne Principaux financements : La commission Culture du Sénat de Berlin cofinance les frais de personnel. La Fondation Axel Springer a fourni un financement ponctuel pour le projet. Site Web et email : www.meet2respect.de, susanne.kappe@meet2respect.de Mission et objectifs Leadership Berlin – Netzwerk Verantwortung e.V promeut la diversité, l'engagement civique et la pensée critique, ainsi qu'une culture du dialogue et de la communication. Son public cible comprend les dirigeants et décideurs des institutions publiques, organisations de la société civile et entreprises privées. Son projet « Rencontrer pour respecter » (« Meet2respect ») vise tout particulièrement à encourager le dialogue, le respect et la tolérance parmi les jeunes afin de prévenir la violence et la discrimination liées à la religion ainsi que la méfiance entre les différents groupes religieux.

Activités générales L'association organise et coordonne divers projets et activités sur les sujets de l'antisémitisme, l'homophobie, l'islamophobie, les sans-abri, les réfugiés ou la délinquance chez les jeunes. Le projet Meet2respect promeut la tolérance religieuse en organisant des visites d'établissements scolaires par des chefs religieux de différentes confessions, des sorties scolaires dans des synagogues et mosquées et des promenades à vélo avec des leaders religieux juifs et musulmans.

Stratégies de prévention ciblée Un élément essentiel du projet Meet2respect est l'organisation de visites

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d'établissements scolaires par des chefs religieux chrétiens, musulmans et juifs. Les établissements principalement fréquentés par des élèves musulmans luttent de façon préventive contre l'antisémitisme en accueillant la visite d'un imam et d'un rabbin, le premier soutenant le second au cours des séances. À l'inverse, les classes dans lesquelles les élèves musulmans sont peu nombreux reçoivent la visite d'imams pour faciliter le contact entre les élèves et un représentant de l'islam afin de prévenir les préjugés islamophobes. Au cours de ces visites, les chefs religieux encouragent le respect entre les religions et dénoncent l'exclusion, la discrimination et la violence. D'autres stratégies de prévention de la discrimination religieuse comprennent les visites de synagogues et de mosquées ainsi que des visites au cours desquelles les rabbins et imams se rendent dans différents sites et institutions religieux de Berlin en vélo tandem. De plus, des échanges entre les communautés musulmanes et LGBT ont également lieu afin d'encourager la tolérance.

Partenariats et réseaux Partenaires associés : mosquée de Sehitlik à Berlin, communauté juive de Berlin et Chabad Loubavitch. Partenaires informels : réseau LGBT Völklinger Kreis, Berliner Missionswerk « Dialogue interreligieux », divers établissements scolaires et congrégations juives, chrétiennes et musulmanes.

Résultats et défis Jusqu'ici, 45 classes, comptant 25 élèves chacune en moyenne, ont reçu la visite de chefs religieux dans le cadre du projet. Le projet a aidé les jeunes à concevoir une pensée critique au sujet des stéréotypes religieux et a permis à ceux qui n'étaient jamais entrés en contact avec un juif ou un musulman d'en rencontrer pour la première fois dans un environnement positif et encadré. Les principaux défis sont la méfiance de certains établissements scolaires et administrations locaux vis-à-vis des intervenants musulmans. Il existe également des problèmes de financement car seuls les nouveaux projets sont financés et les frais de personnel sont difficiles à couvrir.

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PRATIQUE : Groupes religieux et crimes de haine Organisation: Communities Inc. Statut : Entreprise sociale Zone : Nottingham, Royaume-Uni Principaux financements : Soutien financier de Faith Action, Together in Service et abondement par les ressources de Communities Inc. Site Web et email : www.communitiesinc.org.uk, shamsher@communitiesinc.org.uk Mission et objectifs Communities Inc. est une entreprise sociale nationale dirigée par des personnes noires ou issues de minorités ethniques, dont l'objectif principal est de créer des projets innovants afin de répondre aux besoins des entreprises, communautés et organisations au service des communautés les plus vulnérables de la société. Elle s'efforce d'impliquer les groupes marginalisés afin qu'ils puissent faire entendre leur voix et leurs besoins, d'influencer le public et les pouvoirs publics pour mettre en place des solutions réalistes et durables, et développer des approches/projets créatifs afin de renforcer les capacités des individus et organisations.

Activités générales L'objectif principal de Communities Inc. est de faire tomber les barrières et d'offrir autonomie, motivation et développement aux individus comme aux organisations. Cela passe par le renforcement des capacités ainsi que des projets/initiatives qui encouragent l'intégration durable et le travail en partenariat.

Stratégies de prévention ciblée Pour ce projet, Communities Inc. a soutenu différents groupes religieux afin de réfléchir à la façon de promouvoir des messages de tolérance, de cohésion et de lutte contre les inégalités au sein des communautés et au travail.

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Le projet Faith Groups and Hate Crime (Groupes religieux et crimes de haine) cherche à sensibiliser les groupes religieux au sujet des crimes de haine, à conseiller ces groupes quant à la façon d'intégrer la reconnaissance et la prévention des crimes de haine ainsi que le soutien face à ceux-ci dans leurs activités et à encourager l'unité et la cohérence en mettant en valeur l'engagement de différents responsables religieux. Dans le cadre de ce projet, un guide succinct a été produit à l'intention des groupes religieux décrivant les actions qu'ils peuvent entreprendre pour lutter contre les crimes de haine et soutenir les victimes. Des responsables religieux chrétiens, hindous, sikhs, juifs et musulmans ont contribué à ce guide et ont été consultés sur la façon de sensibiliser aux crimes de haine et d'offrir davantage d’aide aux victimes. Afin de maximiser l'impact et le soutien à la mise en œuvre, le guide a été diffusé au cours d'ateliers. Plusieurs ateliers ont été organisés avec les responsables religieux et ont permis de diffuser le guide auprès de plus de 400 groupes religieux.

Partenariats et réseaux Les partenaires officiels du projet étaient les huit groupes religieux ayant contribué au guide, le diocèse de Southwell, Nottingham City Homes et le docteur Sanghera, universitaire et chercheur interconfessionnel.

Résultats et défis À la suite du projet, certains groupes religieux participants ont lancé des activités autour des crimes de haine, en particulier en ce qui concerne la sensibilisation de leur congrégation et le soutien aux victimes. Certains groupes religieux et leurs responsables ont indiqué que leurs connaissances et leur confiance quant à la gestion des crimes de haine s'étaient améliorées. Le guide a obtenu une récompense nationale de prévention des crimes de haine. L'un des principaux obstacles était la différence d'intérêt manifesté par les divers groupes religieux. Cela a nui à la cohérence des messages que le projet espérait pouvoir faire circuler au sein des communautés religieuses. Le guide a été diffusé à tous les groupes religieux du Nottinghamshire.

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PRATIQUE : La Quinzaine de la Diversité Organisation: Réseau Bruno@ttitudes, zone de police « Polbruno » Statut : Police locale Zone : Zone de police Schaerbeek/Evere/Saint-Josse-ten-Noode, Bruxelles, Belgique Principaux financements : Aucun financement spécifique, les membres du réseau consacrent une partie de leur temps de travail au projet Site Web et email : www.polbruno.be/, theo.vangasse@polbruno.be, dirprox@polbruno.be Mission et objectifs Bruno@ttitudes est un réseau de personnes de référence créé en 2008 pour promouvoir la diversité. Ce réseau cible la police locale de Bruxelles, en Belgique. Il vise à promouvoir une culture de la diversité et à lutter contre les discours et actions discriminatoires, ainsi qu'à agir contre la discrimination, le racisme et l'homophobie au travail comme dans la sphère privée.

Activités générales Les thèmes abordés par le réseau comprennent la sensibilisation à la diversité, les valeurs morales dans le cadre professionnel, le respect de la diversité dans la gestion des ressources humaines et le respect des droits humains, en particulier au cours des processus de sélection. Des documents d'information sont régulièrement publiés et diffusés, notamment un magazine mensuel. De plus, le réseau organise la Quinzaine de la Diversité tous les deux ans.

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Stratégies de prévention ciblée La Quinzaine de la Diversité consiste en une dizaine d'ateliers de formation à destination des policiers, sur des sujets comme la non-discrimination, l'égalité et la diversité. Une conférence de presse a lieu à la fin de la Quinzaine.

Partenariats et réseaux Centre interfédéral pour l'égalité des chances (UNIA) Les organisations invitées à participer à la Quinzaine comprennent Fedasil, Rainbow Cops, Womenpol, la police fédérale et Foyer.

Résultats et défis L'objectif visant à sensibiliser les policiers a été atteint. Au cours des deux Quinzaines organisées jusqu'ici (2013 et 2015), environ 300 employés de la police locale ont participé à au moins un atelier et leurs retours ont été positifs. Certains ateliers ont même dû être programmés plusieurs fois en raison de leur popularité.

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PRATIQUE : Gestion de la diversité par la police Organisation: Municipalité de Madrid, municipalité de Silla, Plateforme pour la gestion de la diversité par la police Statut : Police locale Zone : niveau national, Espagne Principaux financements : Financement municipal et soutien des partenaires Site Web et email : Madrid : delitosdeodio@madrid.es, Silla : www. polciaydiversidad.es Platform: davidgarfellagil@gmail.com Mission et Objectifs La Plateforme pour la gestion de la diversité par la police a été fondée en 2010 comme point de rencontre entre les organisations de la société civile représentant la diversité en Espagne et la police. Son objectif est d'encourager et promouvoir des changements dans les institutions policières afin d'améliorer leurs procédures opérationnelles et de garantir une égalité de traitement et une absence de discrimination pour tous, en particulier pour les minorités.

Activités générales Les activités menées par la Plateforme pour la gestion de la diversité par la police visent à sensibiliser au besoin de développer des politiques de gestion de la diversité sociale, à encourager l’amélioration de la formation policière sur la gestion de la diversité et les relations entre les services de police et les minorités, et à définir des critères pour les pratiques de contrôle et de fouille par la police. La plateforme a poussé les forces de police municipale de Madrid et Silla (une municipalité de la province de Valence) à soutenir et collaborer avec les communautés locales afin d'améliorer les relations police-population et l'acceptation de la diversité.

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Stratégies de prévention ciblée À Silla, dans le cadre du projet « Police et Diversité », diverses stratégies sont suivies, notamment des débats et des formations à la citoyenneté pour les étudiants, un renforcement de la législation pénale sur les crimes de haine et une formation de la police à la gestion de la diversité. À Madrid, dans le cadre de « l’Unité pour la gestion de la diversité », les stratégies comprennent des contacts renforcés avec la société civile afin d'améliorer les relations police-population, le traitement des plaintes pour crimes de haine commis à la fois en personne et sur les réseaux sociaux ainsi que l'assistance, la protection et le soutien aux victimes.

Partenariats et réseaux Les partenaires de la plateforme comprennent notamment l'Union nationale des chefs et directeurs de police locale (Unijepol), la Fondation du secrétariat gitan (Fundación Secretariado Gitano), la Fondation RAIS, l'Association des policiers gays et lesbiens (Gaylespol) et le programme Open Society Justice Initiative (OSJI). Bien qu'il n'y ait aucun partenaire officiel pour le projet de Silla, le travail sur le terrain est effectué par les ONG Movement against Intolerance, Welcome Network et le Centre culturel islamique valencien.

Résultats et défis À Silla, les signes de haine (graffiti, stéréotypes, préjugés et crimes de haine) ont décliné de façon remarquable. On note en particulier une baisse de 79 % des situations discriminatoires. Les obstacles rencontrés jusqu'ici comprennent le racisme intériorisé au sein de la police et le manque de ressources financières.

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2.5 Aider les victimes

>>>>>>>>>>>>>>>>>>> Si les violences discriminatoires concernent la société dans son ensemble et doivent être gérées à tous les échelons, il ne faut pas oublier les victimes individuelles. Des incidents tels que des insultes, le harcèlement, l’intimidation, une agression sexuelle ou des blessures peuvent causer divers dommages physiques ou psychologiques. Les victimes sont visées en raison de caractéristiques qui font partie intégrante de leur identité, indissociables du cœur de leur existence, et cela peut contribuer à aggraver les conséquences de ces agressions (cf. Keles et al 2016: 19f). Laisser les victimes livrées à elles-mêmes sans leur apporter une aide adaptée pourrait entraîner une colère, une frustration, ainsi qu’une perte de confiance dans les institutions, voire dans la société dans son ensemble, une baisse ou une interruption totale de la participation à la collectivité et aux processus sociaux, une perte de respect pour les normes et les valeurs d’une société qui n’a pas su réagir et les prendre en charge en tant que victime. C’est dans ce contexte que l’aide envers ceux qui ont été victimes d’agressions aussi inacceptables sur leur chemin vers la justice constitue une partie cruciale des stratégies de lutte contre les violences discriminatoires. Ce qui est requis, c’est l’aide aux victimes par des organisations et agences qualifiées qui offrent par exemple une prise en charge psychologique par des professionnels, une aide juridique, un soutien psychosocial, facilitent l’accès aux services médicaux, peuvent offrir une assistance financière si nécessaire, accompagnent les victimes dans leurs démarches auprès des assurances, etc18. Les pratiques décrites dans cette section mobilisent une série de services offerts dans les municipalités et les régions. Elle offrent une aide professionnelle ciblée aux victimes de violences discriminatoires et de crimes de haine et s’adresse à différents groupes, dont les victimes d’incidents anti-LGBT, les femmes et les enfants victimes de violence fondées sur le genre ou d’en-

18- Le caractère nécessaire de tels services est de plus en plus reconnu, y compris au niveau transnational. Au niveau européen, la Directive des victimes (2012/29/EU) est relativement récente et exige des États membres qu’ils évaluent les besoins des victimes de crimes de haine et les dirigent vers des institutions d’aide appropriées et la police, qui doit être formée.

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fants qui ont souffert de comportements discriminatoires à l’école. Ces services sont surtout proposés par des organisations de la société civile qui ont une grande expérience en matière de conseil psychosocial et une connaissance approfondie du groupe cible. Néanmoins, des unités spécialisées gérées par les autorités locales ou des agents de liaison de la police sont également susceptibles de proposer de tels services, d’y contribuer ou de coopérer avec des institutions consacrées à l’aide aux victimes.

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PRATIQUE : ADAS Organisation: Life e.V. Statut : Organisation non gouvernementale Zone : Berlin, Allemagne Principaux financements : Fondation de la loterie allemande Site Web et email : www.adas-berlin.de/, yegane@adas-berlin.de Mission et objectifs LIFE e.V. est une organisation indépendante à but non lucratif qui offre ses services dans les domaines de l'éducation, de l'assistance et de la mise en relation depuis 1988. Le projet ADAS (Anlaufstelle für Diskriminierungsschutz an Schulen - Centre d'assistance sur la discrimination en milieu scolaire) a pour objectif de contribuer à la non-discrimination dans les établissements scolaires en améliorant la protection offerte par les institutions contre la discrimination. Il vise également à aider les élèves, parents, enseignants et le personnel scolaire qui vivent des situations de discrimination en milieu scolaire ainsi qu'à soutenir les établissements dans la mise en place de règles anti-discrimination.

Activités générales Ce projet comprend un centre d'assistance pour les victimes de discrimination en milieu scolaire et un système interne de gestion des plaintes pour les établissements scolaires, de façon à lutter contre le vaste problème de la discrimination dans les écoles allemandes.

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Stratégies d'aide aux victimes Le centre d'assistance ADAS offre une assistance spécialisée et indépendante aux élèves, parents, personnels scolaires ou tiers, victimes de discrimination. Il répertorie et évalue toutes les situations de discrimination. De plus, il développe un système interne de gestion des plaintes pour les situations de discrimination et des mesures préventives pour la non-discrimination et l'inclusion dans le cadre scolaire, et publie des recommandations pour les établissements sur la gestion des situations de discrimination. Il met également en place des recommandations pour un cadre institutionnel de gestion des plaintes afin de traiter efficacement les situations de discrimination dans le cadre scolaire, à partir des résultats et données rassemblés au cours du projet.

Partenariats et réseaux Commission Éducation du Sénat de Berlin, Bureau de l'arrondissement de Neukölln, Bureau du Land de Berlin pour l'égalité de traitement et contre la discrimination (LADS), diverses organisations de la société civile du secteur de l'éducation non traditionnelle et organisations représentant différents groupes (LGBT, migrants, musulmans, Roms et Sinti).

Résultats et défis Jusqu'ici, on observe une meilleure sensibilisation et plus d’actions en milieu scolaire à propos de toutes les formes de discrimination, ainsi qu'une ouverture progressive des institutions éducatives au traitement de la discrimination.

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PRATIQUE : Programme d’aide aux victimes de crimes de haine Organisation: Office pour la police et la criminalité de la mairie de Londres (MOPAC) Statut : Organe fonctionnel de l'Autorité du Grand Londres Zone : Boroughs londoniens de Westminster et Hackney, Royaume-Uni Principaux financements : Une convention de subvention pour la prestation du service pendant un an dans deux boroughs londoniens est fournie par le fonds des services aux victimes du MOPAC Site Web : www.london.gov.uk/what-we-do/mayors-office-policing-and-crime-mopac/our-strategies/hate-crime Mission et objectifs Le maire a pris dix engagements clairs contre les crimes de haine dans son Plan pour la police et la criminalité. Parmi ceux-ci, l'incitation aux victimes à se faire connaître grâce à des mesures comme les applications pour smartphones et les solutions en ligne pour signaler les crimes de haine, et l'extension du programme d’aide aux victimes de crimes de haine à la totalité du territoire de Londres. L'objectif du Programme d’aide aux victimes de crimes de haine est de pallier le manque d'indications et de recommandations permettant aux victimes de crimes de haine à Londres de bénéficier d'une assistance adaptée. Ce problème peut donner lieu à des difficultés à se remettre de son agression, à une victimisation répétée et à l'abandon des procédures pénales si la victime n'est pas suffisamment bien orientée dans le système judiciaire.

Activités générales Initié en avril 2016, le dispositif pilote de ce projet emploie des professionnels pour fournir des services de première ligne en assistant les victimes de crimes de haine de façon individuelle. Le dispositif cible les victimes

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impliquées dans des situations complexes, pouvant être identifiées comme « vulnérables » ou « à haut risque ».

Stratégies d'aide aux victimes Le Programme d’aide aux victimes de crime de haine a été conçu pour offrir une meilleure assistance aux victimes grâce à un service adapté, dans le but de leur permettre de prendre des décisions en toute connaissance de cause, de les aider à se prémunir contre la victimisation à répétition et de collaborer avec des organismes partenaires afin de garantir la meilleure issue possible aux victimes, qu'elles choisissent ou non de donner des suites judiciaires. Le dispositif pilote emploie un consortium de professionnels issus de groupes couvrant tous les domaines des crimes de haine intitulé l'Alliance communautaire contre la haine (Community Alliance to Combat Hate, CATCH). Le dispositif a été créé pour fournir des services de première ligne en assistant un certain nombre de victimes de crimes de haine de façon individuelle. CATCH a lancé un programme de communication et d'engagement auprès de la police, des autorités locales et des groupes communautaires afin de faire connaître le dispositif. Des systèmes de soutien psychologique et pratiques sont fournis, ainsi qu'un aiguillage au sein du système judiciaire. Le dispositif cible les victimes pouvant être identifiées comme « vulnérables » ou « à haut risque ».

Partenariats et réseaux Le groupement CATCH applique le dispositif dans le cadre d'une convention de subvention.

Résultats et défis Les victimes reçoivent un soutien spécialisé adapté auquel ils n’avaient pas accès avant. Des agents de liaison de la Metropolitan Police spécialisés en crimes de haine travaillent désormais avec le consortium pour soutenir les victimes et limiter la victimisation à répétition.

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PRATIQUE : Refuge pour les femmes et enfants victimes de violences domestiques Organisation: Municipalité d'Héraklion Statut : Municipalité Zone : Héraklion, Grèce Principaux financements : Financé par le programme européen ESPA (couvrant les salaires, équipements et dépenses). Site Web et email : www.heraklion.gr, filoxenia@heraklion.gr Mission et objectifs Ce projet vise à fournir protection et sécurité aux femmes confrontées à la discrimination ou à la violence. Il a également un objectif d'éducation contre la violence sexiste afin de prévenir celle-ci sur le territoire d'Héraklion.

Activités générales Les activités comprennent la mise à disposition d'un refuge offrant logement et assistance aux femmes de tout milieu ayant été ou risquant d'être victimes de violences domestiques ou de discrimination, ainsi qu'à leurs enfants. Le refuge fait également campagne contre la violence sexiste. Il peut héberger jusqu'à 21 personnes et est dirigé par une équipe de professionnels (un gestionnaire administratif, un travailleur social, un psychologue, un pédopsychologue et des agents de sécurité présents 24h sur 24).

Stratégies d'aide aux victimes Les femmes bénéficiaires peuvent passer jusqu'à trois mois au refuge (le séjour peut être prolongé en cas de besoin). Elles sont protégées et reçoivent une assistance psychologique sous la forme de séances individuelles et en groupe. Elles reçoivent aussi de l'aide pour accéder aux services

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publics (établissements scolaires, hôpitaux, ministère public et aide sociale), des informations sur leurs droits et de l'aide pour trouver un travail. Le personnel du refuge organise également des interventions au sein de la communauté locale pour prévenir la discrimination et la violence domestique. Des documents d'information (prospectus, affiches, etc.) sont distribués dans tous les services de la municipalité pour sensibiliser à la violence domestique. De plus, des campagnes sont organisées à l'occasion de la Journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes (25 novembre), avec distribution de flyers, l’organisation d’une conférence de presse et d’une exposition d'œuvres inspirées par l'expérience de la maltraitance subie par ces femmes.

Partenariats et réseaux La municipalité d'Héraklion et la Région de Crète mettent en œuvre le projet, qui est appliqué par l'Agence hellénique pour le développement et le gouvernement local, sous l'égide du ministère de l'Intérieur. Les autres partenaires sont des centres d’assistance, des refuges, services de numéros d’urgence, la police, les services à l'enfance et les services du procureur. Un partenariat formel a été signé avec un hôpital.

Résultats et défis Le refuge a permis aux femmes bénéficiaires de reprendre leur vie en main. La plupart des femmes ayant quitté le refuge ont emménagé dans un nouveau logement. La plupart de celles qui étaient sans emploi ont pu trouver un travail.

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PRATIQUE : SAVE Organisation: Casa Delle Donne per Non Subire Violenza (Maison des femmes pour ne pas subir la violence) Statut : Organisation non gouvernementale Zone : Bologne, Italie Principaux financements : Financé par le Département pour l'égalité des chances de la Présidence du Conseil des ministres, bureau du Président du Conseil, gouvernement italien Site Web : www.casadonne.it Mission et objectifs Casa Delle Donne per Non Subire Violenza est une organisation qui lutte contre toutes les formes de violences sexistes en Italie. Les objectifs de son projet SAVE (Sécurité et hospitalité pour les victimes en situation d'urgence) comprennent la protection des femmes et enfants victimes de violences, la création d'un réseau spécialisé dans l'hébergement de victimes à haut risque et l'amélioration de la confiance envers les institutions d’aide aux victimes.

Activités générales Le projet fait partie d'une stratégie globale visant à encourager les réseaux locaux et nationaux à travailler en collaboration de façon à protéger les femmes et les enfants des violences sexistes. L'objectif général est d'offrir un refuge d'urgence aux femmes victimes de violences. Les recommandations sont effectuées par la police, les services d'urgence ou les services sociaux d'urgence.

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Stratégie d’aide aux victimes Casa Delle Donne offre divers services aux femmes victimes de violences sexistes : le refuge d'urgence SAVE (neuf lits) permet d'héberger temporairement les femmes et leurs enfants. Plusieurs appartements dont l'adresse est tenue secrète sont également disponibles. Le programme propose aussi aux femmes une écoute, une assistance juridique, une médiation culturelle et des séances en groupe.

Partenariats et réseaux Ce projet a été soutenu par la municipalité et la province de Bologne, l'Union des femmes en Italie (Unione Donne in Italia, UDI), les Carabiniers (l’équivalent de la Gendarmerie française) et la police.

Résultats et défis Entre novembre 2012 et mi-juin 2017, le refuge d'urgence SAVE a hébergé un total de 293 femmes et enfants. Sur les 142 femmes hébergées, 116 ont décidé de rester pour se protéger elles et leurs enfants de la violence. Après avoir quitté le refuge, elles ont reçu l'aide du réseau. Certaines ont emménagé dans des logements fournis par Casa Delle Donne ou d'autres logements disponibles dans la région. Certaines sont rentrées chez elles, mais seulement après avoir obtenu une ordonnance de protection à l'encontre de leur conjoint. 26 femmes ont décidé de tenter de se réconcilier avec leur conjoint.

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PRATIQUE: Application de signalement des crimes de haine Organisation: Office pour la police et la criminalité de la mairie de Londres (Mayor of London’s Office for Policing and Crime, MOPAC) Statut : Organe fonctionnel de l'Autorité du Grand Londres Zone : District de la Metropolitan Police de Londres, Royaume-Uni Principaux financements : Fonds des services aux victimes du MOPAC Site web: www.london.gov.uk Mission et objectifs L'Office pour la police et la criminalité de la mairie de Londres est chargé de la supervision stratégique de la Metropolitan Police, la plus importante force de police du Royaume-Uni. En 2014, le MOPAC a publié « Une stratégie contre les crimes de haine à Londres 2014-2017 », la première stratégie de la ville visant à lutter contre toutes les formes de crimes de haine. Le maire souhaite s'appuyer sur les réussites de cette stratégie en adoptant une approche « tolérance zéro » envers toutes les formes d'intolérance, d'extrémisme et de haine à Londres. Dans sa lutte contre les crimes de haine, le MOPAC a quatre objectifs principaux : développer des outils de signalement des crimes de haine plus accessibles, améliorer le soutien des victimes de crimes de haine, développer leur approche des crimes de haine en ligne et améliorer la supervision et la transparence des mesures de justice pénale aux crimes de haine.

Activités générales Le maire a pris dix engagements clairs contre les crimes de haine dans son Plan pour la police et la criminalité. Parmi ceux-ci, encourager plus de victimes à se faire connaître grâce à des mesures comme les applications mobiles et les solutions en ligne pour signaler les crimes de haine, et l'extension du programme de soutien aux victimes de crimes de haine dans tout Londres.

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Stratégies pour l’aide aux victimes Commandée en 2015, l'application de signalement des crimes de haine est gratuite et disponible sur Apple et Android. Elle permet aux victimes de signaler immédiatement un incident. Les informations sont directement transmises à la police grâce à un serveur sécurisé. Les utilisateurs peuvent joindre des photos et vidéos à leur signalement et envoyer une déclaration verbale ou un enregistrement de l'incident. Ainsi, le signalement d'un crime de haine peut se faire de façon simple. Les preuves peuvent être obtenues et conservées facilement et les victimes peuvent immédiatement avoir accès à des informations sur les services de soutien existants.

Partenariats et réseaux Witness Confident, le développeur de l'application bénéficiaire d'une convention de subvention, le Metropolitan Police Service (MPS).

Résultats et défis Au début, le nombre de signalements effectués grâce à l'application était décevant : 200 au cours de la première année. Mais ce nombre a augmenté à la suite d'un programme de sensibilisation et grâce à une notoriété grandissante parmi les victimes, les différentes communautés et les agents de police. L'application s'est avérée particulièrement utile pour les victimes à répétition. Elle est utilisée pour signaler tous les crimes, y compris les crimes de haine, et les agents du Metropolitan Police Service ont indiqué vouloir étendre son utilisation aux actes de violence domestique.

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PRATIQUE Programme intégré contre les violences domestiques Organisation: Ville de Malmö Statut : Municipalité Lieu : Malmö, Suède Principaux financements : Fonds municipaux Site web : www.malmo.se Mission et objectifs Le conseil municipal de Malmö a confié au conseil administratif du district central sud la création d'un programme d'action de prévention des violences faites aux femmes pour toute la commune. Les agences concernées devaient mettre au point une opération conjointe, basée sur les problèmes et besoins des femmes et enfants victimes de violences. Les objectifs principaux sont de donner de la visibilité aux violences ayant lieu dans la sphère privée et d'offrir le soutien nécessaire pour que les femmes puissent signaler ces violences en toute sécurité.

Activités Pour atteindre cet objectif et soutenir les victimes, des activités d'information et de sensibilisation sont organisées conjointement par les différents partenaires. Des informations sur le problème et sur l'existence d'initiatives spécialisées sont transmises aux femmes et enfants victimes ainsi qu’aux auteurs de violences. Les médias ont joué un rôle essentiel dans la diffusion de ces informations. Différents groupes ont été sensibilisés grâce à des interventions dans les établissements scolaires, les clubs et associations, ainsi que dans diverses entreprises, menées notamment par des représentants de la police et des services sociaux. Comme 26 % de la population de Malmö est d'origine étrangère, les brochures d'information sont disponibles en huit langues.

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Stratégies d’aide aux victimes Le programme intégré contre les violences domestiques a été conçu à partir d'une vision concrète des besoins des femmes victimes de violences : des soins en cas de blessures physiques (services médicaux), la possibilité de porter plainte (police) et une assistance (municipalité) pour leur permettre de mettre un terme à la relation abusive. Le programme d'action reçoit le soutien de décideurs et professionnels à différents niveaux : dans le domaine politique, parmi les responsables concernés et les personnes chargées des cas individuels. Le programme dispose de son propre comité de pilotage composé de cadres des services sociaux, de la police, du secteur médical et des services de prison et de probation, ainsi que d'un groupe de coordination constitué de représentants des agences concernées.

Partenariats et réseaux Les partenaires principaux sont la municipalité, la police et le secteur médical.

Résultats et défis Depuis le lancement du projet en 1996, le nombre de signalements par les femmes d'agressions par leur compagnon a augmenté de 50 %. Ces signalements conduisent à des poursuites plus fréquemment qu'avant le début du projet.

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PRATIQUE : MANEO Organisation: Mann-O-Meter e.V., Centre d'information pour les homosexuels à Berlin Statut : Organisation non gouvernementale Lieu : Berlin, Allemagne Principaux financements : Partiellement financée par la commission Justice du Sénat de Berlin, elle reçoit également d’autres dons et financements complémentaires Site web et Email : www.maneo.de/eng, maneo@maneo.de Mission et objectifs MANEO a été fondée en 1990, en réaction au nombre inquiétant d’actes homophobes et transphobes, afin de lutter contre la discrimination des personnes LGBT à Berlin et d'instaurer le dialogue avec la police de Berlin dans le but de modifier la façon dont celle-ci opérait dans le milieu LGBT et le considérait. MANEO est le projet anti-violence homophobe le plus expérimenté et le plus connu d'Allemagne. Son équipe assiste plus de 300 victimes de violences par an, répertorie les actes de violence homophobes et effectue des interventions publiques de prévention de la violence.

Activités générales MANEO a quatre principaux domaines d'activité: offrir un soutien aux victimes de violences homophobes, répertorier les situations d'homophobie et de transphobie à Berlin et les publier dans un rapport annuel, agir pour prévenir les violences homophobes et favoriser l’autonomisation des communautés LGBT berlinoises afin qu'elles puissent lutter pour leurs droits et contre la discrimination.

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MANEO s'efforce de sensibiliser les professionnels du système judiciaire à la violence homophobe et aux crimes de haine et d'améliorer la coopération entre les autorités judiciaires et les communautés LGBT berlinoises. De plus, le centre cherche à améliorer le signalement des crimes homophobes et les poursuites judiciaires en renforçant la confiance des personnes LGBT envers la police et la justice.

Stratégies pour l’aide aux victimes Le centre d’information MANEO propose assistance et soutien professionnels aux victimes de violence et de discrimination. Les victimes se sentent souvent impuissantes et ont l'impression de servir les intérêts d'autrui (la police, la justice, les compagnies d'assurance ou les médias). MANEO prend très au sérieux les craintes et inquiétudes des victimes et témoins de violences, et les aide dans les situations difficiles. Il explique comment remplir un dépôt de plainte, comment se déroule la procédure pénale, et aide à étudier les potentielles alternatives . Le centre met en relation les victimes avec des avocats spécialisés, des médecins et d'autres organismes de soutien. Il accompagne également les victimes aux entretiens avec la police et au cours des procédures judiciaires, même s’il s’agit bien souvent de longues procédures. Le dépôt d'une plainte n'est pas un prérequis pour obtenir assistance et soutien.

Partenariats et réseaux Police de Berlin et ministère public de Berlin; SOS Homophobie (France), Lambda/KPH (Pologne); The Rainbow Project (Irlande du Nord) et Pink Cross (Suisse), partenariat officiel avec plus de 140 organismes et institutions au sein de la “Berlin Tolerance Alliance” coordonnée par MANEO.

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Prévenir les violences discriminatoires au niveau local : pratiques et recommandations

Résultats et défis L'engagement de MANEO auprès des autorités a conduit au recrutement d'agents de liaison spécialisés au sein de la police de Berlin (1992) et du ministère public de Berlin (2012). Ce modèle a été salué par la Commission européenne contre le racisme et l'intolérance (ECRI) ainsi que par de nombreux experts en droit pénal. De plus, la police de Berlin reconnaît désormais les crimes de haine homophobes et publie des statistiques à ce sujet depuis 2008. Par ailleurs, la confiance des communautés LGBT envers les autorités judiciaires s'améliore, comme le montrent de nombreux rapports.

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2.6 Définir des stratégies transversales pour lutter contre les violences discriminatoires

>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>> Les violences discriminatoires sont un phénomène complexe, aux multiples facettes, et les stratégies de lutte contre celle-ci le sont tout autant. Les stratégies présentées dans les sections précédentes ont été choisies pour leur objectif clair et précis et les mesures cohérentes et concrètes qu'elles proposent pour lutter efficacement contre les violences discriminatoires. Les pratiques qui suivent comportent, quant à elles, des procédures multiples. Elles mettent en place des stratégies plus larges, déterminent une série d'objectifs et de sous-objectifs dans le cadre de la lutte contre la discrimination et la violence, et proposent des mesures et activités variées pour les atteindre. Les pratiques présentées dans cette section ont bien intégré l'idée que la haine, l'intolérance et les violences discriminatoires sont présentes de façon transversale dans toutes les facettes de la société. Ces pratiques sont donc elles aussi transversales, dans le sens où elles associent différentes stratégies, impliquent de nombreux intervenants et/ou visent ouvertement à mettre en œuvre des mesures pour lutter contre la discrimination et les violences discriminatoires dans des domaines variés. Par exemple, une ville peut travailler sur le sujet de la discrimination en impliquant plusieurs services municipaux, ainsi que divers élus, magistrats et agents. De cette façon, elle étend le savoir-faire et les ressources qui alimentent ses stratégies et élargit l'accès aux ressources ainsi que les occasions de dissémination. Autre exemple, un centre communautaire peut, au lieu de se concentrer sur un aspect en particulier, opter pour une approche plus globale en associant différentes mesures d'autonomisation communautaire, de soutien aux victimes et de travail de prévention. De plus, cela peut permettre de constituer des réseaux regroupant divers acteurs, coordonnés par un service municipal ou un organisme de la société civile.

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Prévenir les violences discriminatoires au niveau local : pratiques et recommandations

PRATIQUE: Plan d’action berlinois contre l’homophobie et la transphobie Organisation: Bureau du Land de Berlin pour l'égalité de traitement et contre la discrimination Statut : Administration du Land Lieu : Berlin, Allemagne Principaux financements : Financé par la ville de Berlin au lancement (2010) Site web : www.berlin.de Mission et objectifs Ce plan d'action est fondé sur une résolution de la Chambre des députés de Berlin ; l'initiative « Berlin soutient l'autodétermination et la reconnaissance de la diversité d'orientation sexuelle » est en place depuis 2010. Elle comprend divers objectifs, notamment la lutte contre l'homophobie et la transphobie, l'amélioration de l'éducation et des informations fournies dans les établissements scolaires, l'amélioration de la recherche LGBT à Berlin, l'augmentation de la participation des organisations LGBT aux comités consultatifs et l'amélioration de l'égalité de traitement juridique dans toute l'Allemagne.

Activités Le plan d'action d'origine comprend plus de 60 mesures réparties dans six domaines d'action afin de lutter contre l'homophobie et la transphobie, parmi lesquelles : commander des travaux de recherche, agir dans le domaine de l'anti-violence et encourager l'engagement international. Ces activités visent tous les habitants de Berlin, en particulier les membres de la communauté LGBT, ainsi que les enseignants et les élèves.

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Stratégies de lutte contre les violences discriminatoires Dans le domaine de l'anti-violence, les mesures prises comprenaient l'installation d'un bureau de contact au sein du ministère public pour les personnes LGBT victimes de crimes de haine, la diffusion d'une campagne multimédia afin de sensibiliser le public et l'amélioration de la coopération entre les institutions fédérales (par exemple les bureaux du ministère public) et les projets anti-violence. Les recherches centrées sur l'anti-violence lancées dans le cadre du projet comprenaient des études portant sur les expériences de violence, de discrimination et de reconnaissance de la diversité d'orientation sexuelle dans les établissements scolaires et dans le droit allemand, en lien avec d'éventuelles discriminations. Les activités d'engagement international comprenaient la cofondation du Rainbow Cities Network (Réseau villes arc-en-ciel) en 2013, qui vise à lutter contre la discrimination basée sur l'orientation sexuelle ou l'identité de genre au niveau local en Europe par l'échange de connaissances et d'expériences. Plus de 30 villes européennes font désormais partie du réseau, ainsi que Mexico (Mexique) et Sao Paulo (Brésil).

Partenariats et réseaux Land de Berlin, Bureau du Land de Berlin pour l'égalité de traitement et contre la discrimination (LADS) sous l'égide de la commission du Sénat pour la Justice, la protection des consommateurs et la lutte contre la discrimination, toutes les autres commissions du Sénat de Berlin, communautés LGBT et ONG

Résultats et défis Jusqu'ici, les résultats de ce plan d'action comprennent une augmentation du nombre de structures de soutien à destination de la communauté LGBT et davantage de recommandations et d'activités de sensibilisation pour la communauté sur des thèmes comme les droits, l'accès au marché du travail et la protection. Un rapport d'évaluation sur les résultats de ce plan d'action a été publié en 2012 et est disponible sur www.berlin.de.

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PRATIQUE : Modèle pour l'intégration des immigrants Organisation: Marie de Gdansk Statut : Municipalité Lieu : Gdansk, Pologne Principaux financements : Contribution financière de la mairie. Financements extérieurs du Fonds Asile Migration et d'autres programmes, dons et parrainages. Site web : www.gdansk.pl/migracje/ Model-Integracji-Imigrantow,a,61064 Mission et objectifs Ce projet est la première initiative polonaise pour une approche systématique de l'immigration au niveau d'une ville. Il vise à développer les capacités d’accueil des migrants dans toutes les institutions publiques et sociales de Gdansk et à améliorer l'intégration et le bien-être des immigrants dans tous les aspects de la vie locale.

Activités générales Le Modèle pour l'intégration des immigrants (Model Integracji Imigrantów, MII) qui sert de base à ce programme est un plan d'action pour la mise en place des programmes opérationnels de la stratégie de développement « Gdansk 2030 Plus ». Il comprend divers domaines, dont l'éducation, la culture, l'action sociale, le logement, la prévention de la violence et de la discrimination, les communautés locales, l'emploi et la santé.

Stratégies pour l’aide aux victimes Les stratégies établies par le document comprennent notamment l'ajustement des structures universitaires afin de mieux répondre aux besoins des étudiants étrangers, la création et le développement d'un réseau de coordinateurs locaux pour l'intégration, l'inclusion des immigrants dans la vie

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sociale et culturelle de la ville, le développement et la mise en place de chartes antidiscrimination dans les institutions municipales, le développement d'une campagne sociale pour l'égalité de traitement, la mise à disposition de bourses et de programmes d'emploi pour les immigrants et d'aides au logement pour les réfugiés.

Partenariats et réseaux Divers intervenants ont participé aux activités menées dans l'objectif de créer des synergies et une coopération entre divers services de la mairie, le centre municipal de soutien à la famille, le bureau pour l'emploi du district, la police municipale, le centre de solidarité européenne, le centre de soutien aux immigrants de Gdansk (ONG), le centre municipal de gestion des crises ainsi que diverses institutions culturelles, éducatives et médicales et les médias régionaux et nationaux. À l'international, la participation active de Gdansk au réseau Eurocities (des villes européennes) est l'occasion d’échanger et de bénéficier de l'expérience d'autres villes en matière de migration.

Résultats et défis Un nombre plus important d'immigrants ont pu améliorer leurs compétences linguistiques et leur situation sociale, médicale, psychologique et économique grâce à un service public plus efficace. Le nombre de cours gratuits de polonais et d'anglais à destination des immigrants a également augmenté, ainsi que le nombre d'institutions et organismes impliqués dans le processus d'intégration des immigrants, et le nombre d'immigrants ayant commencé à s'intégrer dans la société polonaise grâce à leur participation aux projets proposés par le MII.

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Prévenir les violences discriminatoires au niveau local : pratiques et recommandations

PRATIQUE Coalition pour la diversité de la vie communale Organisation: « Coalition de Mannheim » Statut : Alliance d'acteurs et intervenants de la société civile et des institutions économiques, politiques et administratives, coordonnée par la commission Intégration du conseil municipal. Lieu : Mannheim, Allemagne Principaux financements : Certains projets sont financés par le programme fédéral « demokratie leben » (vivre la démocratie) (ministère allemand des Affaires sociales, de la Famille et de la Jeunesse) Site web : www.mannheim.de/de/service-bieten/integrationmigration/mannheimer-buendnis-fuer-ein-zusammenleben-in-vielfalt Mission et objectifs Ce projet a pour but de promouvoir le respect mutuel et la coexistence et de lutter contre la discrimination à Mannheim. Il vise également à promouvoir la mise en réseau et la diffusion des connaissances ainsi qu'à améliorer la visibilité des prises de position contre la discrimination.

Activités Les actions de la coalition sont centrées sur son fonctionnement interne (grâce à la communication continue entre les partenaires) et sur les acteurs et structures communaux externes (grâce à des activités communes). Elle agit comme une plateforme regroupant les différents intervenants de la société civile de Mannheim.

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Stratégies de lutte contre les violences discriminatoires Les stratégies comprennent des campagnes de communication via des newsletters et le site internet de la coalition, ainsi que diverses réunions entre les partenaires de la coalition afin de faciliter l’échange de connaissances et d’expériences, la mise à disposition d'assistance antiracisme et antidiscrimination, ainsi que l'organisation de journées d'action.

Partenariats et réseaux Les partenaires du projet sont des organismes divers. Tous les partenaires de la coalition sont signataires de la Déclaration de la Ville de Mannheim pour le vivre-ensemble dans la diversité et s'engagent à promouvoir la diversité. La déclaration a été rédigée de façon collaborative et ratifiée par le conseil municipal de Mannheim. Le réseau comprend des ONG, des mouvements citoyens, des groupes religieux, des partis politiques et quelques grandes entreprises.

Résultats et défis Plus de 100 institutions et organismes ont déjà participé aux événements organisés par la coalition. Cela qui a conduit, par exemple, à ce que ces participants acceptent de partager les valeurs mises en avant par la Déclaration de Mannheim. Les partenaires de la coalition mettent en place jusqu'à 20 projets par an. Plus de 250 partenaires de la coalition et de son réseau ont assisté à la cérémonie marquant la création officielle de la coalition (les journées d'action de la coalition « Vielfalt im Quadrat »). L'un des défis principaux a été de définir la portée et les limites des actions de chacun des membres de la coalition.

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PRATIQUE : Pôle de l’égalité des chances Organisation: Ville de Mouscron Statut : Municipalité Lieu : Mouscron, Belgique Principaux financements : Financé par la municipalité pour la mise en place de divers projets, la visibilité du pôle et la formation de l'équipe. Site web et Email : www.mouscron.be, egalite@mouscron.be Mission et objectifs Le programme stratégique transversal de la ville de Mouscron se fonde sur les besoins et aspirations des habitants. Grâce à un dialogue constant avec les citoyens, la commune a identifié les problèmes majeurs liés à la discrimination : un manque de connaissance des mécanismes en place pour lutter contre la discrimination (stéréotypes, préjugés) et gérer le ressenti des personnes concernées. À la suite de ses observations, la municipalité de Mouscron a créé le Pôle de l’égalité des chances en 2007, dans le but de prévenir les comportements discriminatoires, de sensibiliser le public et de provoquer un changement d'attitude des autorités et des citoyens afin d'améliorer l'intégration des personnes issues d'autres communautés et cultures.

Activités générales Le Pôle de l’égalité des chances a quatre missions principales : l'écoute des citoyens, l'information, le relais auprès des instances compétentes en matière de discrimination et la mise en place de projets de sensibilisation.

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Stratégies de lutte contre les violences discriminatoires Les activités du Pôle de l’égalité des chances comprennent des animations visant à sensibiliser le public aux concepts de stéréotypes, préjugés et discrimination et à leurs relations. Une Charte de l'égalité des chances a été créée pour fournir à l'administration communale des informations sur le cadre législatif lié à la discrimination et à l'égalité des chances. Le Pôle collabore avec la Cellule d’Actions Solidaires contre le Harcèlement (CASH) et le Réseau d’Alphabétisation mouscronnois (RAM). Il a créé des actions autour du handisport, organisé un comité d'habitants pour éviter les conflits, promu des activités culturelles et établi un réseau avec les communes voisines.

Partenariats et réseaux Les autorités municipales, divers services de la commune, l'ONG anti-discrimination Unia, l'Institut fédéral pour l'égalité des femmes et des hommes, des associations, divers établissements scolaires, le centre d'action Picardie laïque et diverses municipalités. Des conventions ont été signées avec la CASH et le RAM.

Résultats et défis Le nombre de demandes d'information, d'aide, de partenariats et de contacts avec les associations et projets d'égalité des chances a augmenté. De nombreuses requêtes ont été menées à bien en collaboration avec les autorités compétentes, ou sont encore en cours. L'un des défis majeurs est le manque de temps car les membres de l'équipe doivent partager leur temps entre le travail sur l'égalité des chances et d'autres projets centrés sur la jeunesse.

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PRATIQUE : Le réseau de vigilance et l'observatoire des discriminations de Villeurbanne Organisation: Ville de Villeurbanne Statut : Municipalité Lieu : Villeurbanne, France Principaux financements : Cofinancé par la ville et l'État. Site web et Email : www.villeurbanne.fr, joanna@tralalere.com Mission et objectifs En 2008, la Ville de Villeurbanne a mis en place un réseau de vigilance pour l'égalité de traitement et la non-discrimination dans le but de repérer et traiter les situations de discrimination, d'informer les victimes sur leurs droits et de les orienter vers une assistance juridique. En 2010, ce projet a été appuyé par la création d'un observatoire des discriminations, qui enregistre les situations de discrimination potentielles identifiées dans la ville et la façon dont elles ont été traitées. Il vise à prendre la mesure de la discrimination dans le secteur, afin d'identifier les mécanismes qui en sont à l’origine et de développer des stratégies pour les contrer. De plus, l'observatoire cherche à identifier les structures proposant des ressources aux victimes.

Activités Le réseau de vigilance et l'observatoire mènent diverses activités, notamment des sessions de formation, la mise à disposition d'outils d'information sur la discrimination et la publication de différents documents sur ce thème.

Stratégies de lutte contre les violences discriminatoires Le réseau a jusqu'ici entrepris différentes actions afin de lutter contre la discrimination, dont la formation de professionnels issus d'organisations partenaires au sujet du réseau, la tenue de réunions à intervalles réguliers entre les correspondants des organisations membres, la mise à disposition

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du public d'outils d'information sur la discrimination, la création d'un service juridique afin d'informer et de conseiller les victimes de discrimination à propos de leurs droits, et la production d'un guide d'information à destination des professionnels et des partenaires, visant à faciliter la qualification juridique des situations de discrimination. L'observatoire publie et diffuse un rapport annuel. De plus, en 2013, il a organisé un sondage auprès des habitants à propos de leur expérience de la discrimination et de leur connaissance du cadre juridique contre la non-discrimination.

Partenariats et réseaux Actuellement composé d'une quinzaine d'organismes locaux, le réseau est progressivement devenu un espace de collaboration entre les conseillers d'aide à l'emploi, les spécialistes du logement et de l'action sociale, les professionnels du droit (juristes, avocats, procureurs), les forces de l'ordre et les sociologues.

Résultats et défis Depuis la création du réseau, plus de 500 situations de discrimination ont été enregistrées. 200 situations ont été traitées par les organismes partenaires, 200 professionnels de ce domaine ont été formés et environ 3000 documents d'information sur la discrimination sont diffusés chaque année au public par les partenaires. Les personnes ayant reçu l'aide du réseau ont indiqué s'être senties soutenues et avoir repris confiance en elles ainsi qu'envers les institutions. De plus, la discrimination a gagné en visibilité et est davantage sanctionnée à Villeurbanne. Ce projet en a inspiré d'autres notamment à Paris, Grenoble et Lyon.

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PRATIQUE : Course de relais scolaire “Stop Mowie Nienawiści” Organisation: Ville de Wroclaw, Centre pour le développement social de Wroclaw (Miasto Wrocław, Wrocławskie Centrum Rozwoju Społecznego, WCRS) Statut : Administration de la municipalité de Wroclaw Lieu: Wroclaw, Pologne Principaux financements : Entièrement financé par la municipalité de Wroclaw Site web : www.wielokultury.wroclaw.pl/stopmowienienawisci Mission et objectifs Lancée en octobre 2014, la Course de relais scolaire « Stop Mowie Nienawiści » (Halte aux discours de haine) est un projet éducatif urbain. Il est conçu pour les élèves, les enseignants ainsi que le personnel scolaire. L'objectif principal est de sensibiliser la communauté scolaire aux discours de haine et aux situations de discrimination. Les objectifs secondaires sont de sensibiliser aux conséquences judiciaires et psychologiques des crimes de haine et inciter les participants à s'opposer activement aux comportements discriminatoires auxquels ils assistent.

Activités Le projet de relais comprend des interventions, ateliers et expositions pédagogiques, chaque contenu étant adapté aux différents membres de la communauté scolaire.

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Stratégies de lutte contre les violences discriminatoires L'une des stratégies essentielles du projet est l'intervention auprès du personnel scolaire à propos des symboles de haine (notamment la croix gammée et la croix celtique), de la façon dont les groupes extrémistes attirent les jeunes et des méthodes permettant d'éviter de tels agissements dans les établissements scolaires. Pour les élèves, des ateliers interactifs « Stéréotypes, préjugés, discrimination » d'une durée de deux heures sont organisés pour les informer sur ce qu'est un stéréotype, quelle est la différence entre stéréotypes et préjugés, et comment ils peuvent mener à la discrimination. Ces activités sont complétées par la possibilité d'accueillir gratuitement une exposition-rencontre avec 10 citoyens de Wroclaw d'origines diverses, appartenant à des groupes souvent victimes de discrimination, qui parlent de leur vie et de la tolérance.

Partenariats et réseaux L'École d'Économie et d'Administration (Zespół Szkół Ekonomiczno-Administracyjnych), la Représentation régionale de la Commission européenne à Wroclaw, l'hôtel Hilton Ovo, le club sportif WKS Slask, le chef de la police pour la protection des droits humains, la garde municipale de Wroclaw, le centre pour l'intégration de Wroclaw et d'autres services de la municipalité de Wroclaw.

Résultats et défis D'après des sondages effectués après les interventions, 90 à 100 % des participants indiquent que leur connaissance des aspects judiciaires et psychologiques des discours de haine s'est améliorée grâce au projet.

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PRATIQUE : Stratégie anti-rumeurs de Barcelone Organisation: Service municipal des droits des citoyens et de la diversité, Conseil municipal de Barcelone Statut : Municipalité Lieu : Barcelone, Espagne Principaux financements : Entièrement financé par la municipalité Site web et email : www.ajuntament.barcelona.cat/bcnacciointercultural/en/ Mission et objectifs En 2010, la Ville de Barcelone a lancé un programme interculturel dont l'objectif était de transformer la « Barcelone multiculturelle », où des citoyens d’origine différente cohabitent, en une « Barcelone interculturelle », c’est-à-dire une ville diversifiée qui se construit de façon collaborative. Ce programme a été créé suite au Plan Interculturalité de Barcelone, réalisé grâce à un processus participatif. Ce plan identifiait la méconnaissance des autres comme l'un des plus grands freins à l'interculturalité, car elle se transforme souvent en peur ou en méfiance et donne lieu à des rumeurs et des stéréotypes infondés.

Activités générales Le Programme Interculturalité de Barcelone génère ses propres ressources pour la ville tout en travaillant avec la ville, en soutenant les activités interculturelles lancées par les organisations, services, programmes, lieux, établissements scolaires, médias, etc. Actuellement, l'un de ses axes de travail principaux est la Stratégie anti-rumeurs de Barcelone, qui vise à dissiper les rumeurs, préjugés et stéréotypes sur la diversité culturelle, et ainsi prévenir les attitudes racistes et les pratiques discriminatoires envers certains groupes et communautés.

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Stratégies de lutte contre les violences discriminatoires Les activités de la Stratégie anti-rumeurs s’articulent autour de trois axes principaux : 1) Sensibiliser : produire des ressources (guides, manuels, bandes dessinées) et formations à destination des professionnels, agents des services sociaux et des citoyens déjà sensibilisés afin qu'ils deviennent à leur tour des « agents anti-rumeurs » et puissent déconstruire les stéréotypes et rumeurs. 2) Communiquer : ouvrir des espaces et organiser des événements (ateliers, pièces de théâtre, débats, etc.) afin de rencontrer et de collaborer avec les médias locaux. Ce travail comprend la diffusion d'informations visant à contrer les rumeurs ou proposer des expériences positives. 3) Participer : promouvoir le travail coordonné avec les acteurs locaux impliqués dans le réseau anti-rumeurs.

Partenariats et réseaux Le réseau anti-rumeurs, également promu par la municipalité de Barcelone, réunit un millier de membres, dont des organisations, des individus mais aussi la municipalité de Barcelone.

Résultats et défis D'importants changements ont lieu en termes de participation, de domaines d'action, de discours contre les rumeurs et stéréotypes, et de façons de transmettre le message. Plus de 1800 agents anti-rumeurs ont été formés entre 2010 et 2015, et plus de 300 activités ont été organisées sur la même période.

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PRATIQUE : Prévention des violences et de la criminalité envers les seniors Organisation: Valenciennes Statut : Municipalité Lieu : Valenciennes, France Principaux financements : initiative autofinancée Site web et Email : www.valenciennes.fr, eaznar@ville-valenciennes.fr Mission et objectifs Le nombre de seniors à Valenciennes, légèrement supérieur à 6000 en 2010, est passé à environ 8000 en 2016. Les seniors sont devenus la cible de diverses violences et délits en raison de leur faiblesse physique ou de leur méconnaissance de certains risques comme les fraudes, ou même de crimes perpétrés par des proches, des amis ou des fraudeurs se faisant passer pour tels. Ce phénomène de société n'est pas encore bien pris en compte par les décideurs politiques locaux. Mais le conseil municipal de Valenciennes, faisant figure de précurseur, a décidé dès 2010 d'inclure les besoins spécifiques des seniors en matière de sécurité dans tous ses plans d'action concernés.

Activités L'objectif général du projet est de créer un environnement accueillant et sécurisant pour les seniors, afin qu'ils ne se sentent pas isolés et vulnérables. La ville a intégré la prévention de la criminalité à tous les aspects de sa politique pour les seniors. Trois domaines d'actions ont été définis : repérer les seniors vulnérables pour les protéger, sensibiliser les seniors afin qu'ils puissent se défendre seuls ou au moins interpeller les institutions si nécessaire, et prendre en compte leurs besoins spécifiques et y répondre de façon adaptée.

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Stratégies pour l’aide aux victimes Les activités sont menées sur tout le territoire municipal. Dans le cadre de ce projet, les actions sont : 1) Identification et soutien des personnes vulnérables : les agents de médiation sociale, les responsables de la Conciergerie seniors et les bénévoles du Conseil des seniors rencontrent régulièrement les habitants âgés afin de détecter d'éventuelles situations inquiétantes. 2) Sensibilisation : les seniors peuvent participer à diverses activités d’information, comme des formations à la prévention des fraudes ou de la cybercriminalité sous la forme d'ateliers d'initiation à l'informatique ou de formations à la sécurité dans le tram. 3) Prise en compte des besoins particuliers des seniors dans la politique générale de sécurité et de prévention de la criminalité : plusieurs comités de travail liés au conseil des seniors effectuent des recommandations sur les différents aspects de la vie quotidienne des seniors pouvant affecter ou être affectés par - la stratégie locale de prévention de la criminalité.

Partenariats et réseaux Les partenaires principaux du projet sont la municipalité de Valenciennes et la Caisse Communale d’Action sociale (CCAS) qui en sont aussi les principaux contributeurs financiers.

Résultats et défis L'évaluation des actions individuelles a produit des résultats très positifs. En 2015, environ 8000 seniors ont bénéficié au moins une fois des services de prévention.

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PrĂŠvenir les violences discriminatoires au niveau local : pratiques et recommandations

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Partie 3 >>>>>>>>>>>>>>>>>>>>

Recommandations Ă destination des acteurs locaux >>>>>>>>>>>>>>>>>>>>

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Introduction

>>>>>>>>>>>>>>>>> Cette partie est consacrée aux recommandations adressées aux autorités locales et régionales sur les moyens de lutter contre les violences discriminatoires au niveau local. Comme expliqué dans le chapitre 1.3, les autorités locales et régionales ont un rôle central à jouer dans cet effort, notamment en fixant un cadre politique, en allouant les ressources appropriées et en coordonnant différentes mesures mises en œuvre par tous les acteurs qui peuvent participer à cet effort. Avec les recommandations qui suivent, l’Efus souhaite aider et accompagner les autorités locales et régionales dans leurs actions en leur proposant des idées concrètes et fournir des suggestions. Ces recommandations sont un des principaux aboutissements du projet « Just and Safer Cities for All » , lui-même issu des discussions entre les partenaires du projet, les membres de l’Efus, les chercheurs et les praticiens ayant participé aux nombreuses activités organisées par le projet. Si elles visent à couvrir de nombreux aspects importants dans l’élaboration de telles approches, ces recommandations ne sont pas pour autant exhaustives. Elles ne seront pas non plus toutes également adaptées au contexte local ou régional – la réalité des violences discriminatoires ainsi que du cadre juridique et administratif qui encadre la lutte contre ces phénomènes sont si variés que des adaptations et des révisions fréquentes de ces recommandations seront nécessaires. L’Efus espère que ces recommandations seront discutées et amendées et que des débats seront engagés avec les autorités et les autres acteurs prêts à contribuer à l’effort commun nécessaire pour prévenir et lutter contre les violences discriminatoires au niveau local.

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Prévenir les violences discriminatoires au niveau local : pratiques et recommandations

3.1 Mieux connaître le phénomène grâce à des audits de sécurité ciblés

>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>> De nombreuses autorités locales et régionales ne disposent pas d’une connaissance approfondie et détaillée des faits de violences discriminatoires. Il s’ensuit un manque de clarté dans la définition des concepts ainsi qu’une absence de visibilité sur la prévalence, la dynamique, l’impact et la répartition géographique et temporelle des actes de violences discriminatoires dans une collectivité. Cela empêche une allocation adaptée des ressources ainsi que l’élaboration de mesures de prévention efficaces. Il est donc crucial d’améliorer la connaissance des violences discriminatoires et de fournir des données factuelles. Afin d’améliorer la connaissance sur les violences discriminatoires et d’apporter une base de données scientifiques à partir desquelles élaborer des mesures de prévention, l’Efus recommande aux autorités locales et régionales de :  mener des enquêtes ou des audits de sécurité au niveau local en matière de violences discriminatoires en utilisant les méthodologies adaptées et en s’appuyant sur l’aide d’experts19;  revoir et évaluer régulièrement les stratégies de prévention existantes sur la base des connaissances nouvellement acquises et des faits récents ;  publier régulièrement des données sur les violences discriminatoires sur le territoire de la municipalité ou de la région, par exemple dans un rapport annuel ;  former les techniciens locaux de la sécurité sur les processus à suivre pour enregistrer et observer les violences discriminatoires sur le territoire.

19- L’Efus fournit l’aide d’experts et une assistance technique pour de tels audits et a constitué un corpus de méthodes et d’outils pour une approche stratégique de la sécurité urbaine, voir Efus 2016a.

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3.2 Prendre en compte le problème du sous-signalement

>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>> Pour de nombreux experts, le sous-signalement des incidents inspirés par la haine, l’intolérance ou d’autres motifs discriminatoires est un problème majeur. De nombreuses études soulignent que les victimes et les témoins de violences discriminatoires hésitent à signaler de tels actes auprès de la police ou des institutions publiques. Leur hésitation peut avoir divers motifs : une minimisation de leur expérience de victime, un sentiment de honte ou de culpabilité par rapport à ce qui s’est passé ou la peur d’être discriminé par l’agent recevant leur plainte. L’absence de signalement d’un acte de violence discriminatoire est problématique pour plusieurs raisons. Elle empêche de poursuivre les coupables. Elle freine le recueil de données et la connaissance de la nature, de la répartition, de la dynamique et de l’impact des crimes de haine. En conséquence, elle constitue un obstacle à l’élaboration de stratégies de prévention. C’est pourquoi l’Efus recommande aux autorités locales et régionales de :  soutenir ou prendre l’initiative de campagnes incitant les victimes de violences discriminatoires à les signaler et à se mettre en relation avec la police ;  coopérer avec les communautés locales et leurs représentants pour autonomiser les victimes de violences discriminatoires et renforcer leur confiance dans les institutions publiques ;  offrir des possibilités de formation aux forces de police locales et aux autres agents du service public sur les besoins des victimes de violences discriminatoires ainsi que sur les procédures institutionnelles à suivre lorsque de tels actes sont signalés ;  développer d’autres mesures pour faciliter le signalement, par exemple en offrant la possibilité de le faire dans une langue étrangère.

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Prévenir les violences discriminatoires au niveau local : pratiques et recommandations

3.3 Proposer des services locaux d’aide aux victimes

>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>> Les victimes de violences discriminatoires peuvent traverser des difficultés particulières en raison de l’agression qu’elles ont subie. Afin de limiter les conséquences parfois très importantes de ces actes, il est nécessaire que les administrations et les institutions publiques, qui représentent l’État aux yeux des communautés locales, expriment clairement aux victimes un message de soutien et de solidarité. Les autorités locales et régionales constituent l’échelon de gouvernance le plus proche des communautés locales, elles sont donc très bien placées pour mettre en place des services professionnels et accessibles d’aide aux victimes. Pour soutenir les victimes de violences discriminatoires, nous recommandons aux autorités locales et régionales de :  coopérer avec la société civile locale et ses représentants pour fournir des services d’aide aux victimes, qui soient accessibles20, professionnels et s’appuient sur les communautés locales afin de répondre aux besoins spécifiques des victimes de racisme, LGBT-phobie, sexisme, antisémitisme et d’autres types de discrimination ;  s’assurer que les services psycho-sociaux, médicaux et juridiques soient disponibles et accessibles à toutes les victimes, quelle que soit leur situation, y compris les personnes qui vivent dans la pauvreté, les sans-abri et les personnes en situation de handicap ;  collaborer avec les communautés locales pour fournir un refuge aux victimes forcées de fuir pour échapper aux violences sexistes, racistes, anti-LGBT ou d’autres formes de violences discriminatoires ;  encourager et coordonner les échanges entre les organisations d’aide aux victimes et les institutions publiques comme les forces de l’ordre, les écoles, les universités, les hôpitaux et les centres culturels.

20-Il convient d’accorder une attention particulière à l’accessibilité des personnes handicapées qui doivent affronter des difficultés supplémentaires lorsqu’elles ont besoin de soins et de conseils.

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3.4 Les autorités locales et régionales à la tête des réseaux de prévention

>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>> Les autorités locales et régionales sont souvent à la tête des réseaux ou des conseils locaux de prévention de la criminalité, qui gèrent toute sorte de problématiques de sécurité urbaine. De nombreux acteurs participent à de tels réseaux, notamment la police, les écoles, les clubs sportifs, les associations pour la jeunesse, les paroisses, etc. et peuvent contribuer à l’élaboration, la mise en œuvre et la dissémination des activités de prévention. Les violences discriminatoires ne font pas toujours partie des priorités de ces conseils ou réseaux, qui n’ont parfois pas les ressources ou l’expertise nécessaires, ou qui estiment qu’il s’agit de la responsabilité d’autres services ou directions de leur administration. L’Efus recommande aux autorités locales et régionales de:  encourager la prise en compte des violences discriminatoires dans la liste des sujets traités par les réseaux/conseils locaux de prévention de la délinquance et de s’assurer qu’ils disposent de moyens suffisants ;  encourager les interactions et les échanges entre les acteurs de la prévention et les dirigeants des communautés locales marginalisées ou visées par les violences discriminatoires afin que les besoins et préoccupations de ces groupes soient pris en compte dans le travail de prévention local ;  mettre au point des critères et standards clairs que les partenaires doivent respecter afin d’éviter de légitimer ou de coopérer avec des acteurs qui soutiendraient des préjugés ou l’intolérance.

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Prévenir les violences discriminatoires au niveau local : pratiques et recommandations

3.5 Un rôle visible pour les élus locaux et régionaux

>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>> Les maires et les élus locaux et régionaux jouent un rôle important dans l’élaboration des politiques de sécurité urbaine. Il leur incombe de rassembler tous les habitants de leur ville au quotidien, comme en cas de crise, et ce, quels que soient leur origine ethnique, culturelle ou religieuse, leur identité ou leur orientation sexuelles, leur statut juridique ou socio-économique, leur handicap, ou le fait qu’ils aient un logement ou non. Il leur appartient également de définir les mesures encadrant le travail des administrations locales, des travailleurs sociaux municipaux, des organisations de la société civile et d’autres acteurs pour lutter contre les violences discriminatoires. Ils déterminent les priorités politiques, influencent les choix budgétaires et ont un impact significatif sur le débat public. Afin d’utiliser pleinement les pouvoirs des élus locaux et régionaux dans la lutte contre les violences discriminatoires, l’Efus recommande qu’ils :  prennent position publiquement contre toute forme de discrimination et contre les formes de violence qui y sont liées, en particulier après les cas ayant eu une forte visibilité, afin de délégitimer fermement de tels actes et de les placer clairement hors-la-loi ;  mènent et coordonnent des coalitions locales et régionales contre les violences discriminatoires et veillent à ce qu’elles soient largement reconnues et diffusées au sein de la société civile, améliorant ainsi la coopération entre les institutions ;  contribuent aux campagnes de contre-discours, faisant la promotion d’alternatives claires et intéressantes aux préjugés, à la haine et à l’intolérance 21.

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21- Sur la signification des campagnes de contre-discours dans la prévention de la radicalisation menant à des extrémismes violents, voir Efus 2016b: 77ff. Le contre-discours est tout aussi crucial dans la lutte contre les violences discriminatoires.

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3.6 Former les professionnels de terrain et les autres agents au niveau local et régional

>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>> Les violences discriminatoires sont un sujet complexe. La diffusion d’informations et de connaissances est donc un élément crucial. Cela ne concerne pas seulement l’étude du phénomène, sa prévalence et la dynamique des actes discriminatoires, mais également les pratiques de lutte et de prévention de telles violences. De nombreuses stratégies et méthodes ont été élaborées et mises en œuvre à cette fin par une série d’acteurs dans différentes autorités locales, mais le plus souvent, ces pratiques ne sont pas largement partagées. Or les connaissances et les informations collectées sur le sujet peuvent inspirer les stratégies de prévention à venir. Les programmes de formation sont un moyen bien établi de diffuser des informations et des connaissances sur de nombreux thèmes liés à la violence et à la criminalité. Les formations qui incluent la possibilité pour les participants de mettre en pratique des comportements et des stratégies sont particulièrement efficaces pour prévenir et lutter contre les violences discriminatoires. Il y a trois groupes de professionnels auxquels il est important de proposer des formations : les forces du maintien de l’ordre, les travailleurs sociaux et le personnel du système juridique. Il convient de leur proposer une formation initiale pour introduire les concepts, mais aussi une formation continue adaptée à leurs tâches quotidiennes. L’Efus recommande de proposer des formations, qui s’adressent aux :  forces de l’ordre, afin de leur permettre de mieux identifier les cas de violence discriminatoire, d’offrir une meilleure prise en charge aux victimes et de garantir qu’ils assurent le respect et la promotion des droits humains et la non-discrimination ;  travailleurs en contact direct avec les populations locales tels que les travailleurs sociaux, les enseignants et autres éducateurs ainsi que le personnel médical pour les informer des protocoles existants pour lutter contre la haine et l’intolérance et aider les victimes ;

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 personnel du système juridique afin de garantir que les crimes de haine et autres actes violents motivés par la discrimination soient instruits et aillent jusqu’au bout de la procédure judiciaire.

3.7 Coopération avec les forces de maintien de l’ordre

>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>> Les agents des forces de l’ordre jouent un rôle primordial dans la réaction sociétale aux crimes de haine et aux violences discriminatoires. En effet, ils sont généralement les premiers arrivés sur une scène de crime afin de venir en aide aux victimes et enquêter sur les faits. L’intervention des procureurs et des juges est importante également pour la reconnaissance des motifs discriminatoires ayant inspiré l’acte et leur incidence sur les victimes et la société dans son ensemble. La police comme le système judiciaire jouent un rôle clé pour enregistrer et documenter les violences discriminatoires, ce qui permet d’apporter des preuves et des données sur ces phénomènes. Cela constitue une condition préalable à l’élaboration et au développement de stratégies de prévention efficaces (ODIHR 2009b: 27). L’Efus encourage depuis longtemps une étroite collaboration des autorités locales et régionales avec les forces de l’ordre, essentielle pour la réussite de l’approche globale et intégrée de la sécurité urbaine qu’il préconise. Les autorités locales et régionales ont un rôle important à jouer pour améliorer la communication entre la police, le système judiciaire et la population.22 Pour favoriser l’implication des forces de maintien de l’ordre dans les stratégies de lutte contre les violences discriminatoires, nous recom-

22- Pour ce faire, l’Efus préconise des partenariats formalisés entre les autorités locales et régionales et la police, l’intégration de formations pour les agents sur la prévention et les codes de conduite, des échanges inter-communaux pour les forces de maintien de l’ordre, et des programmes d’actions pour favoriser la communication et le contact entre la police et les populations, en particulier les plus jeunes, voir Efus 2012: 21.

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mandons aux autorités locales et régionales et aux forces de maintien de l’ordre de :  envisager la création de postes d’agents de liaison qui seraient le point de contact des victimes de violences discriminatoires23;  collaborer pour intensifier les échanges et la communication avec les communautés locales touchées par les violences discriminatoires, comme les migrants, les personnes LGBT, les réfugiés ou les membres de la communauté rom ;  créer des groupes de travail à l’échelon local ou régional avec les dirigeants des communautés visées afin d’établir des échanges fréquents avec eux dans le but de suivre l’évolution des violences discriminatoires et d’élaborer des stratégies communes de prévention.

3.8 Diversité et prise en compte au sein des administrations locales et régionales

>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>> Les autorités locales et régionales proposent des services publics essentiels pour les populations locales, quelles que soient leur origine ethnique ou religieuse, leur situation de handicap, leur situation économique, leur orientation ou leur identité sexuelles, etc. Afin de pouvoir tenir compte des préoccupations et des besoins de populations aussi diverses, leurs représentants doivent être à l’image de cette diversité. L’objectif est de promouvoir une fonction publique représentative de la diversité de la population afin de garantir une plus grande confiance dans ces services, tout en atténuant les critiques qui les accusent de préjugés envers certains groupes sociaux. À une époque où les services

23- Certaines villes et régions disposent déjà de tels points de contact au sein de leurs forces de maintien de l’ordre ou de leur administration, ce qui est généralement reconnu comme une bonne pratique, voir par exemple ECRI 2014: 24f.

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publics font l’objet de pressions et d’une attention croissantes, il est plus important que jamais d’accroître la diversité, la représentativité et la confiance grâce à des efforts déterminés. Nous recommandons donc aux autorités locales et régionales de :  recruter des personnes appartenant à des groupes minoritaires ainsi que des femmes pour mieux représenter dans leurs effectifs la diversité des populations qu’elles servent ;  coopérer avec les communautés locales afin d’analyser le travail de leurs services pour identifier et réduire les barrières institutionnelles qui empêchent certains groupes sociaux d’accéder à ces services ;  travailler avec des chercheurs et des praticiens pour élaborer des programmes, des standards et des références pour les formations sur la diversité et les violences discriminatoires et former leurs employés à transmettre ces connaissances à leurs collègues.24

3.9 Promouvoir la prévention précoce/ primaire

>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>> Pour prévenir les violences discriminatoires, les mesures pour sensibiliser les enfants et les plus jeunes - comme leur enseigner à porter un regard critique sur la diversité, les différences, les idées préconçues et les préjugés - sont d’une importance capitale et se sont révélées efficaces. Afin d’atteindre ce public et lui fournir des outils pour résister face à la haine et l’intolérance, il faut impliquer tous les acteurs intervenant dans l’éducation des enfants et des jeunes. Afin de renforcer la prévention précoce/primaire, nous recommandons aux autorités locales et régionales de :  se positionner comme intermédiaire entre le système éducatif – de la crèche à l’université – et les communautés locales et leurs dirigeants afin de permettre l’élaboration et la mise en œuvre de programmes de prévention précoce ;

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24- Sur la nécessité de telles formations, voir aussi Coester 2017: 1f.


 contribuer à la création de plans d’action pour lutter contre la haine et l’intolérance au sein des établissements éducatifs ;  soutenir l’élaboration de programmes d’éducation civique et de modules de formation visant à sensibiliser sur la discrimination et les préjugés et à améliorer la résilience face à l’intolérance et la haine à destination de tous les groupes d’âge.

3.10 Coopération et échanges avec les niveaux national et européen de gouvernance

>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>> L’Efus préconise depuis longtemps une coordination étroite entre les villes, les régions ainsi que les gouvernements et institutions aux échelons national et supranational. L’Efus y voit un facteur essentiel pour élaborer des politiques efficaces et réussies destinées à améliorer la sécurité des communautés locales (cf. Efus 2012: 46ff).25 Pourtant, l’interaction entre les différents niveaux de gouvernance pourrait être améliorée dans de nombreux pays. Cela permettrait de clarifier la répartition des missions et des responsabilités entre ces niveaux et d’améliorer la confiance des citoyens dans ces institutions. Afin de combattre et prévenir efficacement les violences discriminatoires, les compétences et capacités des différents niveaux de gouvernance doivent être articulées avec efficacité et complémentarité. Il faut partager les connaissances, coordonner les mesures et les stratégies, identifier et développer les synergies potentielles. Afin d’améliorer la coordination et la coopération entre les différents niveaux de gouvernance, l’Efus recommande aux autorités locales et régionales de :  s’appuyer sur les connaissances, l’expertise et les outils fournis par la FRA, l’ECRI, le BIDDH et d’autres organismes supranationaux ainsi que par les institutions nationales pertinentes, par exemple 25- Pour une analyse approfondie sur ce sujet, voir aussi Crowley 2015.

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afin de planifier et mettre en œuvre des sessions de formation pour les professionnels locaux ;  encourager la création de groupes de travail rassemblant les acteurs locaux, régionaux et nationaux pour rassembler des données pertinentes sur les violences discriminatoires et les partager avec les institutions supranationales26;  promouvoir les outils et les aides mises à disposition par les institutions européennes, y compris les possibilités de financement d’activités contre l’intolérance et la haine et faciliter l’accès des ONG locales à ces soutiens.

3.11 Coopération avec les médias locaux et régionaux

>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>> Les médias locaux et régionaux ont un rôle important à jouer dans la réponse apportée aux violences discriminatoires. Leur traitement des actes haineux, des pratiques discriminatoires et des effets qu’ils ont sur des victimes isolées peuvent contribuer à influencer la perception du public. Les médias peuvent informer, sensibiliser mais aussi attiser l’intolérance et les préjugés. Une couverture médiatique peut attirer l’attention du public sur les violences discriminatoires, et ainsi contribuer à les inscrire dans le débat public et politique. Toutefois, pour pouvoir rapporter les événements de façon appropriée et équilibrée, les journalistes doivent disposer de connaissances et d’informations sur le sujet. Ils doivent aussi inclure le point de vue des victimes et tenir compte des conséquences de leur couverture sur ces groupes. Par ailleurs, les réseaux sociaux ont une responsabilité particulière à répondre aux discours haineux postés sur leurs plateformes.

25- Pour une analyse approfondie sur ce sujet, voir aussi Crowley 2015.

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Afin de favoriser une couverture appropriée par les médias locaux et régionaux, l’Efus propose aux autorités locales et régionales de :  coopérer avec les médias locaux et régionaux pour leur fournir des informations sur les violences discriminatoires sur leur territoire et partager avec eux la vision des autorités et des communautés touchées ;  engager des discussions entre les représentants des médias et les communautés locales sur les parutions problématiques et leurs répercussions ;  s’assurer de l’existence de mécanismes de contrôle du contenu des programmes télévisés ou des informations publiées par voie de presse ou mises en ligne pour éviter tout discours discriminatoire et pouvoir le cas échéant débattre de ces contenus.

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Prévenir les violences discriminatoires au niveau local : pratiques et recommandations Les violences discriminatoires sont répandues en Europe et constituent une véritable menace pour la sécurité des citoyens, la cohésion sociale et l’intégration. Il convient d’apporter des réponses globales au niveau local afin d’améliorer les connaissances et la sensibilisation sur le sujet, de renforcer les pouvoirs des communautés locales, de prévenir les incidents, de soutenir les victimes et d’encourager la coopération entre les acteurs à différents niveaux. Cette publication introduit le concept de violence discriminatoire, présente 50 initiatives locales prometteuses en Europe et adresse des recommandations aux acteurs locaux sur les meilleurs moyens pour lutter contre la haine, l’intolérance et les préjugés.

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