Vivre la nature en ville Charlène Gruet
Sommaire Introduction.................................................... 6 Quelle approche ?........................................ 6 Préalable aux invitations............................ 7
Vous avez dit nature en ville ?......................... 8
Cultiver nos liens en ville. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 56
Vivre en ville : nature et santé au quotidien.. 10
Lien à soi..... . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 58
Pourquoi vivre la nature en ville ?................. 16
Comment ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 59
Syndrome de manque de nature............. 17 Comment la nature impacte-t-elle votre santé ?............................................... 20 La nature en ville, condition du « vivre ensemble ».. ............. 24 Amnésie environnementale générationnelle. . ........................................ 27
Où ?............ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 79
Apprentissage par l’expérience, mémoire et conscience écologique.......... 28
Chez soi. . .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 79 Trouver un coin nature.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 81 Marcher seul.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 82
De la nature en ville à la ville-nature.. ........... 31
Lien aux autres. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 84
À l’échelle locale........................................ 34
Rencontrer. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 84
La nature en interactions au-delà de la ville...................................... 34
Accueillir.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 86
D’autres représentations de la nature................................ 36 Selon chaque être vivant............................... 40 Une diversité de manières d’être sensible............................................ 40 Expériences de nature.. ............................. 45
Selon nos relations et cultures....................... 47
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Cultiver la présence. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 60 Respirer et s’ancrer.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 62 Ouvrir ses sens. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 65 Sensibilité et émotions. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 73 Identifier ses besoins. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 76 Apprendre par l’expérience avec la nature. . . . 77
Partager..... . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 89 Convivialité, abondance et partage. . . . . . . . . . . . . . 89 Confiance et coopération. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 90
Histoire et transmission. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 95 Près de chez soi au quotidien. . . . . . . . . . . . . . . . . . . 97
Lien à la nature. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 98 Mon écosystème en ville. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 98 Toucher et se laisser toucher. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 98 Oser prendre des risques, et laisser prendre des risques !. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 99 Accueillir les surprises.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 101 Cultiver le lien aux êtres vivants. . . . . . . . . . . . . . . . 103
Se rapprocher des cycles.. ....................... 105 Les cycles du vivant.................................. 106 Les saisons............................................... 108 Les éléments. . ........................................... 109
Créativité collective : rapprocher culture et nature.................. 110 Quand les mots rencontrent la nature.. ...... Le corps en mouvement dans l’espace naturel................................ Le chant et la musique.............................. La danse.................................................. Le théâtre................................................
113 114 116 117 118
Villes en transition : vers d’autres relations au vivant ?.. . . . . . . . . . . . . . . 138 Les enfants, l’avenir.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 138 Nature et… sens au travail.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 142 Nature et culture, les inséparables. . . . . . . . 143 Agir près de chez soi. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 144
Partager et agir.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 151 Conclusion. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 152
Explorer la nature urbaine..................... 120 Aller plus loin.. ......................................... 122 Redécouvrir son territoire......................... 122 Balades sensorielles.................................. 123 Un peu plus loin… dormir en forêt. . ........... 124
Annexes. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 156 Partager des expériences de nature.. . . . . . 156 Agir en collectif.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 156 Cultiver la ville. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 156
Agir pour une ville-nature.................... 126 Oser rêver. . ................................................. 129 Quel est votre rêve ?................................ 129 Tissage de rêves : vers des villes plus vivantes. . .................. 132 Lien à soi................................................. 132 Lien aux autres........................................ 134 Lien à la nature....................................... 135
Chez soi.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 157 Sensibiliser.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 157 Créer une initiative. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 158 S’informer. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 158 Réseaux professionnels.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 158
Remerciements.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 160
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Introduction Quand avez-vous ressenti pour la dernière fois la joie simple de marcher pieds nus dans l’herbe, écouter un oiseau, toucher l’écorce d’un arbre ? Ce livre se veut comme une invitation à ralentir, observer et cultiver nos liens au vivant de là où nous sommes, c’est-à-dire pour plus de 80 % des Français, en ville. Les liens aux autres et à la nature ont été largement impactés par différentes crises, notamment celle de la Covid-19. Ce livre donne de quoi garder vive l’envie de prendre le temps d’explorer avec curiosité et ouverture la nature en ville. Il souhaite contribuer à un quotidien plus paisible, dans la joie de s’émerveiller du vivant et de se sentir impliqué de manière créative en lien avec notre écosystème. Il s’agit d’oser rêver un futur souhaitable pour agir à partir de là où nous sommes.
Quelle approche ? Ergothérapeute spécialisée dans les handicaps sensoriels, en voyage pendant un an, je réalise à quel point notre lien à la nature dépend de notre culture. De retour en France et en ville, j’approfondis les liens entre expériences de nature, santé et conscience écologique. J’explore l’intériorité avec la méditation et anime des ateliers de philosophie et pratique de l’attention. Je relie mes expériences et crée Nature et Sens pour accompagner le lien entre humain et nature en ville. Par des balades sensorielles, il s’agit de cultiver les liens au vivant : - Lien à soi par des expériences sensorielles : porter attention à nos sens et ressentir notre lien présent à l’écosystème (marche en aveugle, temps d’attention guidés sur les sens). - Lien aux autres par le partage de ressentis et d’apprentissages : ancrer l’expérience en mémoire et l’élargir avec les autres. - Lien à la nature par la créativité collective : mettre en mouvement notre lien à la nature en ville, par des discussions à partir de contes, chants, débats mouvants, land art, scénario de ville-nature idéale, etc.
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Préalable aux invitations Comme en balade, au fil des pa(ge)s, vous trouverez des invitations en lien à soi, aux autres et à la nature. Elles sont issues de croisements entre divers parcours de formation (ergothérapie, master handicaps sensoriels et cognitifs, animation d’ateliers de philosophie et d’attention) et d’expériences (sylvothérapie, connexion à la nature1, permaculture, pratique de la méditation, yoga et arts vivants), entre autres. Elles sont à chaque fois adaptées au contexte de nature en ville. Je vous invite à les découvrir au fil de la lecture et à vous les approprier pour les réaliser d’une manière qui ait du sens pour vous. Avant chaque invitation : - S’assurer d’être disponible pour ce temps. - Lâcher momentanément les sources de distractions, comme le téléphone. - Un cadre simple : écoute et respect. De soi, des autres et de la nature. Faire seulement ce qui vous parle, avec la liberté d’adapter les propositions pour qu’elles vous conviennent mieux.
« Bienvenue »
Invitation
• Je visualise un lieu que j’aime. Pour m’aider, je peux fermer les yeux. Je m’y installe tranquillement. • Je suis attentif à ce que je vois, j’entends, ce que je peux toucher, sentir. • J’explore quelques minutes plus en détail, puis je rouvre les yeux. • Avez-vous perçu de la nature ? À quelle distance de chez vous était ce lieu ? • Quand pour la dernière fois avez-vous été pleinement attentif à vos ressentis avec vos sens près de chez vous ?
1. Le modèle des 8 Shields utilise des principes communs aux cultures indigènes qui ont démontré leur capacité à vivre en harmonie avec leur environnement de manière durable, et ce, à travers le monde.
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Vous avez dit nature en ville ?
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Auparavant, je me représentais la nature uniquement comme des espaces à jardiner, randonner, courir, parfois contempler. Je portais alors attention à ma propre santé mais ne voyais pas vraiment de lien avec celle de mon milieu de vie. J’entendais les constats écologiques alarmants, mais tout cela me paraissait si lointain que je me sentais impuissante et fuyais ces informations qui alimentaient mon anxiété. J’attendais le week-end ou les vacances pour pouvoir enfin me sentir en nature, loin de la ville, et planifier le prochain voyage (très loin si possible).
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Vivre en ville : nature et santé au quotidien Quand vous êtes-vous émerveillé du vivant pour la dernière fois ? Où qu’il soit, l’humain partage un écosystème en commun avec d’autres êtres vivants. Et si on leur prêtait davantage attention en ville ?
« À la rencontre de la nature en ville » : en marchant, au moins 15 minutes
Invitation
• Passé le pas de la porte, je redécouvre mon quartier avec les yeux d’un enfant ou d’un voyageur. Comme si c’était la première fois que j’arrivais ici, je découvre les lieux. • Où est-ce que je perçois de la nature sur mon chemin ? Je suis attentif aux plus petits éléments que je peux voir, entendre, sentir, toucher. u’est-ce que je ressens quand je porte mon attention sur cette nature près •Q de chez moi ?
Par ses activités, chaque personne agit sur son environnement et en retour, l’environnement agit sur la personne2. Cette base en ergothérapie, élargie à la notion de nature, nourrit ma réflexion afin de chercher, en ville, des interactions bénéfiques à la santé des humains comme à l’écosystème dont ils font partie. En effet, vivre la nature en ville ne dépend pas seulement du lieu « ville », mais aussi de la manière dont on choisit de l’habiter. L’équilibre entre humain et nature en ville dépend alors des interactions entre facteurs personnels, habitudes de vie et environnement. Je me suis librement inspirée d’un outil utilisé en ergothérapie3 pour schématiser ces interactions :
2. Kielhofner G., 2008. 3. Modèle de développement humain - Processus de production du handicap 1998 puis 2010.
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Vous avez dit nature en ville ?
Vivre la nature en ville, une histoire d’équilibre Facteurs personnels
Facteurs environnementaux
représentation de la nature
culture
partage et coopération
groupes
sensibilité
connaissance de l’écosystème
personnes
lieux
Habitudes de vie sens
lien à l’écosystème
disponibilité
activités
Nos facteurs personnels, habitudes de vie et facteurs environnementaux interagissent dans une recherche d’équilibre, qui agit sur la santé de l’écosystème, parmi lesquels humains et non-humains.
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Les villes sont des lieux d’expositions cumulées à des risques liés au changement climatique : pollution chronique, canicule, isolement social, aggravation des problèmes respiratoires (allergies, asthme, insuffisance respiratoire chronique), mais aussi des maladies cardiovasculaires4. Au-delà des affections physiques, les risques concernent aussi la santé mentale. Si 85 % des Français se disent inquiets du réchauffement climatique5, certaines personnes éprouvent jusqu’à une profonde détresse psychique face à la situation actuelle. Des médecins parlent alors de solastalgie (deuil de ce qui est perdu) ou d’éco-anxiété (liée à ce qui peut arriver). Pour faire face à cela, les bénéfices associés à la présence de nature en ville pour la santé individuelle et collective sont aujourd’hui de plus en plus étudiés et nous sommes mis au défi de trouver des stratégies d’adaptation avec des co-bénéfices pour la santé et la biodiversité. Par chance, l’humain est capable de modifier et de réinventer sans cesse ses habitudes en tenant compte de ses besoins et des évolutions du milieu. Cela se révèle crucial car nos habitudes influencent la manière dont nous expérimentons la vie et la qualité de cette expérience reflète notre état de santé. Lorsque l’on s’engage à réaliser des activités dans lesquelles on trouve du sens et de la joie, on expérimente le flow ou expérience optimale (cf. schéma ci-contre), que ce soit individuellement ou collectivement (voir invitations correspondantes pp. 77 et 94). Pendant le confinement lié à la Covid-19, de nombreux citadins ont dû réorganiser leurs habitudes de vie, non sans difficultés parfois. Certains ont raconté comme ils s’émerveillaient alors d’entendre les chants d’oiseaux à leur fenêtre. Certes il y avait moins de bruits de circulation, mais prenait-on le temps de les entendre avant ? Et depuis ? La santé de l’humain dépend de la santé de l’écosystème. La crise de la Covid-19 a permis de rappeler que la perte de biodiversité, la déforestation, la monoculture, l’urbanisation, le commerce international sont
4. Migeot V. Dr en Santé Publique, MOOC Nature for city Life, 2020. 5. Sondage Ifop, octobre 2018.
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Vous avez dit nature en ville ?
haut
Schéma du flow, adapté d’après Csíkszentmihályi
Éveil
Flo w
é ét
xi
Opportunités d’action (défis)
An
Contrôle
Préocupation
n
Ap
tio
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la Re
bas
Ennui
bas
Capacités d’action (compétences)
haut
tous des facteurs qui contribuent à l’émergence de maladies infectieuses. Une approche plus holistique de la santé permettrait donc, en prévention, de trouver comment « soigner le terrain », dans tous les sens du terme. De plus en plus de personnes vivent en ville. En 1950, cela concernait près de 30 % de la population mondiale. Depuis 2008, c’est plus de la moitié. La ville se caractérise par une densité de population humaine et de bâti très forte. Souvent perçue comme un espace de croissance, elle continue de s’étendre et les zones périurbaines s’agglomèrent en métropoles. Cette forte urbanisation a des conséquences sur l’écosystème local : les espèces se retrouvent avec de petits habitats, fragmentés,
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Invitées surprises.
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Vous avez dit nature en ville ?
isolés, ce qui engendre une difficulté à se déplacer. Cela est accentué par l’artificialisation du sol, la diminution des espèces endémiques, les îlots de chaleur urbain, l’eau rapidement évacuée et les pollutions. Les communautés animales et végétales ont tendance à s’homogénéiser en ville. Certaines espèces deviennent communes aux villes, que ce soit des animaux (pigeon, étourneau, moineau) ou des plantes (pâturin annuel, capselle bourse-à-pasteur), tandis que les espèces locales déclinent et que le fonctionnement des écosystèmes s’appauvrit. Pour Edith Planche, ethnologue, au-delà du besoin de nature, notre besoin de naturel et d’authenticité naît en réaction à l’uniformisation qui atteint la biodiversité. C’est la recherche du « vivant » face au règne de l’artefact6. Chaque ville conserve pourtant une part de spécificités locales qu’il est important de maintenir. Augmenter la part de nature en ville est primordial : des études montrent qu’à partir d’une superficie minimum de 30 % d’espace de nature dans un rayon de 300 m autour de l’habitat des citadins, les écosystèmes peuvent fonctionner de manière efficace et les urbains maintenir leur santé psychologique7.
6. Planche E., Éduquer à l’environnement par l’approche sensible, Chroniques sociales, 2018. 7. Muratet A., Chercheuse sur le fonctionnement écologique des villes, MOOC nature for city life, 2020.
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Sous le béton, la biodiversité de nos villes ! Quel citadin n’a jamais ressenti un irrépressible besoin de nature ? Que ce soit pour notre santé physique et psychologique, comme pour celle de l’écosystème, (re)nouer un lien équilibré avec la nature s’avère indispensable. Alors pourquoi limiter nos contacts à la nature aux seules échappées hors de la ville ? Vivre la nature en ville propose aux urbains une multitude d’idées concrètes pour mieux appréhender la nature dans notre vie de tous les jours bien souvent trop stressante, bétonnée et où le temps nous échappe. Véritable invitation à ralentir, observer et à cultiver nos liens au vivant, cet ouvrage donne l’impulsion et les clés nécessaires pour prendre le temps d’explorer au quotidien, avec curiosité et ouverture, la nature en ville. Il est grand temps de mettre nos sens en éveil pour mieux percevoir le vivant en milieu urbain.
ISBN : 978-2-37922-145-3
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