Chimie organique

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L’étape lente d’une déshydratation est identique à celle d’une déshydrohalogénation (–HX). Pour une déshydratation qui fonctionne selon une réaction E1, cette étape lente correspond à la formation du carbocation par départ du groupe partant. Pour une déshydratation par réaction E2, l’étape limitante est l’étape d’élimination (et non la protonation). Il est toutefois important de noter que les conditions favorisent plutôt la réaction E1. D’abord, le nucléophile est faible : le A– est la base conjuguée d’un acide fort1. Ensuite, c’est l’alcool qui agit comme réactif, mais aussi comme solvant, et les alcools sont des solvants protiques. La déshydratation d’un alcool en alcène est plus facile lorsque le départ de l’alcool laisse un C+ stable.

Le fait que les conditions favorisent un mécanisme d’ordre 1 explique qu’un alcool tertiaire est déshydraté plus facilement qu’un alcool secondaire, lequel est déshydraté plus facilement qu’un alcool primaire. Par exemple, à une température de 85 °C et en présence d’acide sulfurique (H2SO4) à 20 %, on peut déshydrater un alcool tertiaire alors que la déshydratation d’un alcool primaire peut nécessiter l’emploi d’acide sulfurique concentré (98 %) et une température de 180 °C. De façon générale, plus le carbocation formé par un alcool est stable, plus les conditions nécessaires à sa déshydratation sont douces. Finalement, puisqu’il faut faire appel à des conditions assez violentes pour déshydrater les alcools primaires, les réactions indésirables, comme les réarrangements, sont assez fréquentes. Pour réussir à synthétiser un alcène en contournant ce problème, il peut être préférable d’éviter la déshydratation et, pour ce faire, procéder en deux étapes : • d’abord, en transformant l’alcool en halogénure d’alkyle à l’aide d’un réactif comme le SOCl2 ou le PBr3, par SN2 (voir p. 203) ; • puis en réalisant une déshydrohalogénation à l’aide d’une base forte (section 7.1). Le résultat final est le même et le rendement est souvent meilleur. Ces deux schémas réactionnels sont illustrés ci-dessous. R

OH

H+ E HX, PX3 ou SOCl2 R SN

Alcène X

base E

Deux méthodes pour transformer un alcool en alcène.

EXERCICE 8

Écrivez le mécanisme de la déshydratation de : a)

l’éthanol par l’acide sulfurique (H2SO4).

b)

du 2-méthylpropan-2-ol par l’acide phosphorique (H3PO4).

É quilibre entre hydratation et déshydratation Nous avons déjà abordé la réaction d’hydratation des alcènes, qui est l’inverse de la déshydratation des alcools et qui se déroule en catalyse acide, comme la déshydratation. Cela signifie qu’en milieu acide, l’hydratation et la déshydratation sont toutes les deux possibles. Les alcools formés par hydratation peuvent donc réagir à nouveau pour reformer l’alcène de départ2. À moins de trouver un moyen d’optimiser les conditions pour empêcher la réaction inverse de se produire, le rendement de la déshydratation ne sera pas très bon. Et à l’inverse, lorsque l’on veut déshydrater un alcool, il faut faire en sorte d’éviter l’hydratation. Comment y arriver ? 1. Il pourrait aussi arriver qu’une autre molécule d’alcool serve de base pour arracher l’hydrogène du carbone voisin. 2. De plus, en milieu acide, deux molécules d’alcool peuvent réagir entre elles pour former un éther (voir p. 198).

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Chapitre 7 • Élimination : la synthèse des alcènes

© 2013, Les Éditions CEC inc. • Reproduction interdite


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