héroïne
elle
du mois
Tous les mois, Céline Pécheux met en lumiÚre une Wonder Woman du quotidien.
Cette logopĂšde de 38 ans accompagne des enfants atteints de trisomie 21, mais aussi de dysphasie dans des Ă©coles ordinaires. Une assistance essentielle pour leur apprentissage, mais aussi pour rendre notre sociĂ©tĂ© plus inclusive. En fĂ©vrier dernier, la Belgique a Ă©tĂ© condamnĂ©e par lâEurope pour son manque dâinclusion des enfants porteurs dâun handicap mental dans lâenseignement ordinaire⊠Une problĂ©matique dont on parle peu et pour laquelle NoĂ©mie Zilberberg et lâassociation Saphir luttent au quotidien⊠Tout commence lors dâun stage oĂč elle accompagne un petit garçon de cinq ans avec un handicap moteur dans une classe de maternelle⊠« Ăa a Ă©tĂ© le dĂ©clic! Il y avait une ouverture dâesprit, un dynamisme et une entraide particuliĂšre dans cet Ă©tablissement scolaire. Jâai rĂ©alisĂ© Ă quel point lâĂ©cole Ă©tait importante pour que ces enfants Ă©vitent le chemin tout tracĂ© qui leur est destinĂ© parce quâils sont trisomiques ou handicapĂ©s. » Elle postule alors Ă lâASBL Saphir (Service dâaccompagnement pour personnes en situation de handicap â Inclusion et RĂ©seau â Bruxelles) oĂč elle est engagĂ©e comme accompagnatrice. Treize ans plus tard, elle sâoccupe dâune dizaine dâenfants dysphasiques ou trisomiques comme Lena, 17 ans, quâelle suit pas Ă pas depuis sa premiĂšre maternelle. Ses journĂ©es sont minutĂ©es, rythmĂ©es par les activitĂ©s de ses « petits protĂ©gĂ©s », mais aussi par les rĂ©unions quâelle organise pour aider leurs parents, enseignant·e·s, mĂ©decins et psychologues⊠« Je suis une sorte de trait dâunion entre lâenfant et toutes les personnes avec qui il est en contact. » MĂȘme si (thĂ©oriquement) les Ă©coles ordinaires ne peuvent plus refuser dâintĂ©grer des enfants handicapĂ©s, NoĂ©mie explique que son association rencontre encore pas mal de difficultĂ©s pour faire accepter lâidĂ©e : « Il y a une mĂ©connaissance de la trisomie 21 et beaucoup de prĂ©jugĂ©s sur lâinclusion.
Certains pensent que ces enfants nâarriveront Ă rien dans la vie. Alors quâils sont tout Ă fait capables dâapprendre! Mais Ă leur rythme. » Et dâajouter : « Tout nâest pas une question de QI. »
Un cadeau, pas un fardeau Heureusement, les mentalitĂ©s changent⊠Il y a dix ans, les enfants trisomiques allaient presque obligatoirement dans des Ă©coles spĂ©cialisĂ©es de type 2 (pour les Ă©lĂšves avec retard mental modĂ©rĂ© Ă sĂ©vĂšre). Maintenant, on constate que ces enfants relĂšvent souvent du type 1 (retard mental lĂ©ger) et quâils peuvent donc ĂȘtre intĂ©grĂ©s dans des Ă©coles classiques. « Il suffit dâun peu de bonne volontĂ© ! MĂȘme si beaucoup dâenseignants ont peur de ne pas ĂȘtre Ă la hauteur du dĂ©fi, nous sommes lĂ pour les assister, les former, les initier au âSesameâ (un langage simplifiĂ© qui aide ces enfants Ă communiquer), rĂ©pondre Ă leurs questions et mettre en place de nouveaux projets », explique celle qui se rend rĂ©guliĂšrement Ă domicile pour soutenir des parents souvent dĂ©sĆuvrĂ©s face au manque de prise en compte de leurs enfants⊠Car ĂȘtre la maman ou le papa dâun enfant atteint dâune trisomie ou dâune dysphasie, câest se battre contre lâangoisse dâun avenir incertain : « Va-t-il savoir marcher, parler, manger seul ? Quels mĂ©tiers sera-t-il capable de faire ? Que va-t-il devenir quand nous ne serons plus lĂ ? » Des questions pour lesquelles NoĂ©mie nâa pas forcĂ©ment les rĂ©ponses. « Mais ce qui est certain », explique-t-elle, « câest quâau plus tĂŽt commence la scolaritĂ© dâun enfant diffĂ©rent dans une Ă©cole âordinaireâ, mieux ça se passe ! Il y a dix ans, les Ă©coles avec lesquelles on travaillait se comptaient sur les doigts dâune main. Aujourdâhui, on collabore avec des dizaines dâĂ©tablissements Ă Bruxelles. On constate que les enfants progressent vite. Ils sont tirĂ©s vers le haut par les autres Ă©lĂšves qui les prennent sous leurs ailes. » Et de conclure : « Câest un cadeau dâaccueillir un enfant diffĂ©rent au sein dâun Ă©tablissement scolaire. Un cadeau pour lui, mais aussi pour les autres Ă©lĂšves â sensibilisĂ©s Ă la diffĂ©rence et Ă lâentraide dĂšs le plus jeune Ăąge. Voir lâĂ©volution dâun enfant et recevoir la reconnaissance de ses parents, il nây a rien de plus gratifiant ! »
PRESSE
NOĂMIE ZILBERBERG
194 ELLE magazine
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16/06/21 15:33