ELLE Belgique - Magazine FR - Summer 2021

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héroïne

elle

du mois

Tous les mois, Céline Pécheux met en lumiÚre une Wonder Woman du quotidien.

Cette logopĂšde de 38 ans accompagne des enfants atteints de trisomie 21, mais aussi de dysphasie dans des Ă©coles ordinaires. Une assistance essentielle pour leur apprentissage, mais aussi pour rendre notre sociĂ©tĂ© plus inclusive. En fĂ©vrier dernier, la Belgique a Ă©tĂ© condamnĂ©e par l’Europe pour son manque d’inclusion des enfants porteurs d’un handicap mental dans l’enseignement ordinaire
 Une problĂ©matique dont on parle peu et pour laquelle NoĂ©mie Zilberberg et l’association Saphir luttent au quotidien
 Tout commence lors d’un stage oĂč elle accompagne un petit garçon de cinq ans avec un handicap moteur dans une classe de maternelle
 « Ça a Ă©tĂ© le dĂ©clic! Il y avait une ouverture d’esprit, un dynamisme et une entraide particuliĂšre dans cet Ă©tablissement scolaire. J’ai rĂ©alisĂ© Ă  quel point l’école Ă©tait importante pour que ces enfants Ă©vitent le chemin tout tracĂ© qui leur est destinĂ© parce qu’ils sont trisomiques ou handicapĂ©s. » Elle postule alors Ă  l’ASBL Saphir (Service d’accompagnement pour personnes en situation de handicap – Inclusion et RĂ©seau – Bruxelles) oĂč elle est engagĂ©e comme accompagnatrice. Treize ans plus tard, elle s’occupe d’une dizaine d’enfants dysphasiques ou trisomiques comme Lena, 17 ans, qu’elle suit pas Ă  pas depuis sa premiĂšre maternelle. Ses journĂ©es sont minutĂ©es, rythmĂ©es par les activitĂ©s de ses « petits protĂ©gĂ©s », mais aussi par les rĂ©unions qu’elle organise pour aider leurs parents, enseignant·e·s, mĂ©decins et psychologues
 « Je suis une sorte de trait d’union entre l’enfant et toutes les personnes avec qui il est en contact. » MĂȘme si (thĂ©oriquement) les Ă©coles ordinaires ne peuvent plus refuser d’intĂ©grer des enfants handicapĂ©s, NoĂ©mie explique que son association rencontre encore pas mal de difficultĂ©s pour faire accepter l’idĂ©e : « Il y a une mĂ©connaissance de la trisomie 21 et beaucoup de prĂ©jugĂ©s sur l’inclusion.

Certains pensent que ces enfants n’arriveront Ă  rien dans la vie. Alors qu’ils sont tout Ă  fait capables d’apprendre! Mais Ă  leur rythme. » Et d’ajouter : « Tout n’est pas une question de QI. »

Un cadeau, pas un fardeau Heureusement, les mentalitĂ©s changent
 Il y a dix ans, les enfants trisomiques allaient presque obligatoirement dans des Ă©coles spĂ©cialisĂ©es de type 2 (pour les Ă©lĂšves avec retard mental modĂ©rĂ© Ă  sĂ©vĂšre). Maintenant, on constate que ces enfants relĂšvent souvent du type 1 (retard mental lĂ©ger) et qu’ils peuvent donc ĂȘtre intĂ©grĂ©s dans des Ă©coles classiques. « Il suffit d’un peu de bonne volontĂ© ! MĂȘme si beaucoup d’enseignants ont peur de ne pas ĂȘtre Ă  la hauteur du dĂ©fi, nous sommes lĂ  pour les assister, les former, les initier au “Sesame” (un langage simplifiĂ© qui aide ces enfants Ă  communiquer), rĂ©pondre Ă  leurs questions et mettre en place de nouveaux projets », explique celle qui se rend rĂ©guliĂšrement Ă  domicile pour soutenir des parents souvent dĂ©sƓuvrĂ©s face au manque de prise en compte de leurs enfants
 Car ĂȘtre la maman ou le papa d’un enfant atteint d’une trisomie ou d’une dysphasie, c’est se battre contre l’angoisse d’un avenir incertain : « Va-t-il savoir marcher, parler, manger seul ? Quels mĂ©tiers sera-t-il capable de faire ? Que va-t-il devenir quand nous ne serons plus lĂ  ? » Des questions pour lesquelles NoĂ©mie n’a pas forcĂ©ment les rĂ©ponses. « Mais ce qui est certain », explique-t-elle, « c’est qu’au plus tĂŽt commence la scolaritĂ© d’un enfant diffĂ©rent dans une Ă©cole “ordinaire”, mieux ça se passe ! Il y a dix ans, les Ă©coles avec lesquelles on travaillait se comptaient sur les doigts d’une main. Aujourd’hui, on collabore avec des dizaines d’établissements Ă  Bruxelles. On constate que les enfants progressent vite. Ils sont tirĂ©s vers le haut par les autres Ă©lĂšves qui les prennent sous leurs ailes. » Et de conclure : « C’est un cadeau d’accueillir un enfant diffĂ©rent au sein d’un Ă©tablissement scolaire. Un cadeau pour lui, mais aussi pour les autres Ă©lĂšves – sensibilisĂ©s Ă  la diffĂ©rence et Ă  l’entraide dĂšs le plus jeune Ăąge. Voir l’évolution d’un enfant et recevoir la reconnaissance de ses parents, il n’y a rien de plus gratifiant ! »

PRESSE

NOÉMIE ZILBERBERG

194 ELLE magazine

194_ELLEFR_211_HEROINE_flo_ND_MG_JDB_OK.indd 194

16/06/21 15:33


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