Investir dans leconomie de demain

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Investir dans

l’économie

de demain

Texte approuvé par le Conseil d’Administration de la CRESS de Bretagne mercredi 15 octobre 2014


Investir dans

l’économie

de demain Quelle économie pour demain ? En attendant la croissance

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1 Voir, sur ce sujet, l’analyse de Thomas Piketty dans son ouvrage “ Le capital au XXIe siècle ”.

Le modèle économique de notre pays, bâti dans les années qui ont suivi la deuxième guerre mondiale, est à bout de souffle. Le modèle sociétal qui a été construit conjointement en est fortement menacé. Les plus défavorisés ont été les premiers touchés, mais progressivement, nombre de citoyens des classes moyennes se sont trouvés également fragilisés ou ont le sentiment qu’ils pourraient l’être demain. Aujourd’hui, beaucoup se questionnent sur les modalités de redressement de la France et plus généralement de l’Union Européenne. Au-delà des solutions simplistes préconisées par divers populismes, qui sait décrire le chemin qui mène vers un meilleur bien-être pour les générations futures ? L’absence d’une vision partagée esquissant une perspective de progrès, est mortifère. Le sentiment donné par l’écoute des médias et des analyses économiques qui en ressortent, est que seul le retour de la croissance est à même de sauver le modèle social européen. En son absence, il faut consentir à une précarisation encore plus grande des plus défavorisés, à une diminution des salaires que ce soit par l’augmentation du temps de travail ou par la diminution des cotisations sociales, à une fragilisation de la protection sociale, à l’augmentation des inégalités,… De ce point de vue, règne une assez grande cohérence dans les discours dominants, qu’ils viennent de la droite de l’échiquier politique ou de la gauche, qu’ils soient tenus par des économistes, des responsables politiques, patronaux ou syndicaux.

On peut se questionner sur la probabilité du retour structurel d’une croissance significative1. Faut-il alors se résoudre à voir progressivement disparaitre l’activité économique sur nos territoires et les emplois qui vont avec ? Le tissu économique, maintenu dans sa configuration actuelle en attendant des jours meilleurs, sera-t-il à même de construire l’économie de demain simplement en profitant des opportunités qui, inéluctablement, se dégageront de la croissance produite par la mondialisation ? La nature de la croissance devient une question centrale. Les choix économiques se sont effectués au regard des flux financiers qu’ils produisaient à court terme sans se préoccuper outre mesure de leurs effets à long terme sur l’environnement, la santé ou le bien-être des personnes. De plus, les activités de réparation des dégâts commis permettaient souvent de créer de nouvelles activités, favorisant l’augmentation du PIB, donc de la croissance. Ce modèle montre maintenant ses limites. Il est dorénavant nécessaire de privilégier des activités économiques qui maîtriseront les impacts sur leur environnement naturel, humain ou sociétal et qui sauront en minimiser les effets négatifs. Perspective ambitieuse mais qui pourrait être de nature à mobiliser les forces vives de notre Pays.

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Investir dans l’économie de demain Déterminer quels sont les secteurs de l’économie que les politiques publiques doivent soutenir est une question qu’il faut regarder avec attention. Les pouvoirs publics doivent équilibrer leur action entre, d’une part l’économie d’aujourd’hui afin d’amortir la disparition des emplois dans certains domaines d’activité et, d’autre part, préparer la montée en charge de l’économie de demain. Certes, il ne serait pas socialement admissible de concentrer toute l’énergie collective et tous les moyens uniquement sur des activités qui ne produiront leurs effets qu’à moyen terme. L’action publique doit continuer à soutenir, à court terme, les secteurs actuellement gros pourvoyeur d’emplois. Nous en savons quelque chose en Bretagne, confrontée aujourd’hui aux difficultés de l’agriculture et de l’agroalimentaire. Leur abandon créerait des difficultés insurmontables pour les salariés qui seraient victimes de la disparition des emplois sans possibilité réelle de se reconvertir. La question de la réduction des déficits est également un paramètre essentiel à prendre en compte et il ne revient pas à la Cress de Bretagne de se prononcer sur le rythme de leur diminution, bien que ce paramètre pèse énormément sur les marges de manœuvre des pouvoirs publics et par répercussion sur celles de tous les acteurs socioéconomiques. Force est de constater d’ailleurs que l’action des pouvoirs publics, ces dernières années, va essentiellement dans ce sens. Les modalités de mise en œuvre du CICE et l’annonce du pacte de responsabilité en sont une illustration éclairante. Or aujourd’hui, à côté de ces mesures visant le tissu économique actuel, il est de la responsabilité des pouvoirs publics d’investir pour accompagner ce qui sera à l’origine de l’économie de demain… avec ce que cela a d’incertain. Il est sans doute impossible de savoir avec certitude quelles sont les innovations qui rencontreront un succès économique dans les 20 ou 30 prochaines années. C’est pourtant à cet horizon qu’il convient de regarder la question de l’innovation. En complément d’investissements lourds indispensables comme les énergies marines renouvelables par exemple, il est important d’accompagner des projets dont l’impact économique peut être regardé aujourd’hui comme limité. Il faut donc, en quelque sorte, “ ratisser large ”. C’est là que se trouvent les gisements d’emploi de demain. Ces activités économiques ont l’ambition de contribuer au bien-être collectif en produisant une croissance soutenable, pour peu qu’elle ne soit pas regardée uniquement au regard du PIB. Elles visent à une meilleure répartition des richesses produites, en cette période d’explosion des inégalités, ce n’est pas tout à fait négligeable.

Les pouvoirs publics en ont-ils les moyens ? À entendre le discours récurrent, on pourrait en douter. La réduction du déficit semble absorber toutes les marges de manœuvre, autant en ce qui concerne l’État que les collectivités locales. Cela est affaire de choix. Les chiffres issus du rapport Queyranne2, font état de plus de 110 milliards d’argent public destiné au soutien des entreprises. Nombre d’économistes et d’acteurs socioéconomiques sont dubitatifs sur l’efficience de ces mesures. Préparer l’avenir suppose de réorienter l’économie, de réaffecter quelques fractions des moyens actuels pour permettre de construire les outils structurants d’accompagnement de l’émergence de l’économie de demain, en particulier pour ce qui concerne l’innovation sociale.

L’ESS, terreau de l’économie de demain 3

Jouer les atouts du modèle ESS « Produire autrement, entreprendre autrement, consommer autrement sont autant de formules qui illustrent les aspirations modernes à une plus grande maîtrise de l’activité économique pour satisfaire des préoccupations à long terme… L’Économie Sociale et Solidaire se définit comme un mode d’entreprendre apportant une réponse à ces préoccupations.3 » L’exposé des motifs du projet de loi relatif à l’ESS explicite de façon pertinente les enjeux sociétaux sur lesquels l’ESS est attendue. Notre propos ne consiste pas à prétendre que l’Économie Sociale et Solidaire détient à elle seule la solution pour l’économie de demain. Bien des solutions pertinentes se trouveront dans la collaboration entre des entreprises ou des réseaux, qu’ils soient de l’ESS ou non. Ce sont maintenant des pratiques ancrées dans les usages. Il s’agit de les conforter. Cependant, les acteurs de l’ESS postulent leur modèle d’entreprendre possède un certain nombre de spécificités qui lui donnent une résilience certaine et une forte capacité à répondre aux questions fondamentales qui se posent à nous. Il ne faudrait pas, non plus, que les dispositifs dont pourraient bénéficier les acteurs de l’ESS soient plus exigeants à leur encontre que ce qui est demandé à l’économie capitalistique : être plus innovant, présenter plus de fiabilité économique,… comme c’est souvent le cas actuellement.

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Rapport de mission Queyranne-DemaëlJürgensen sur les interventions économiques en faveur des entreprises – été 2013

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Extrait de l’exposé des motifs du projet de loi relatif à l’Économie Sociale et Solidaire – juillet 2013.

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Le développement de l’emploi, une priorité dans l’ESS Les pouvoirs publics, à juste titre, considèrent que la situation de l’emploi dans notre pays est un problème majeur récurrent, sans perspective d’amélioration à court terme. En 2013, en Bretagne, alors que la conjoncture n’a pas été plus favorable (ou moins défavorable) aux entreprises de l’ESS qu’aux autres, elles ont maintenus leur volume d’emploi alors que l’ensemble de l’économie en détruisait 1%4. Il est clair que ce n’est ni un effet ponctuel limité dans le temps et spécifique à l’année 2013, ni un phénomène particulier à la Bretagne. Les chiffres URSSAF montrent qu’entre 2000 et 2012, sur l’ensemble du territoire national, l’ESS a créée 23% d’emploi alors que le reste de l’économie n’en créait que 7%. La précédente majorité en avait fait le constat. Suite à la crise financière de 2008, les entreprises de l’ESS continuaient à créer de l’emploi, ce qui dénotait notablement avec le reste de l’économie. Cela avait donné lieu à la mission parlementaire confiée à Francis Vercamer dont le rapport a été l’un des préludes à la loi sur l’ESS. Sans doute est-ce, dans l’ESS, une volonté de rentabilité financière moins importante, liée à un coût du capital beaucoup plus faible (bénéfices majoritairement consacrés à l’activité de l’entreprise, réserves impartageables,…). Sans doute est-ce une volonté de conserver les compétences au sein des entreprises, donc les personnes qui les possèdent : face aux difficultés économiques l’emploi n’est pas alors la première variable d’ajustement.

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Ce résultat est d’autant plus remarquable que les politiques publiques nationales ont très peu accompagné cet effort. En effet, une partie importante de l’ESS a été exclue des mesures structurelles d’accompagnement des entreprises que ce soit lors de la mise en place du CICE ou du Pacte de responsabilité. Et ce n’est pas, quoiqu’en dise le Ministre du Budget de l’époque, la mise en place des emplois d’avenir ou l’augmentation de l’abattement de la taxe sur les salaires qui compensent cet écart. Soyons déraisonnables : imaginons que ces mesures aient concerné l’ensemble des entreprises, y compris celles de l’ESS. La stagnation des emplois de l’ESS en Bretagne en 2013 ce serait transformée en une augmentation de… Nous ne le saurons jamais. L’innovation une dimension consubstantielle de l’ESS

Source : Cress de Bretagne - observatoire régional de l’ESS chiffres URSSAF et MSA 2013. 4

Parce que l’ESS est une économie de citoyens qui s’organisent collectivement pour répondre à des besoins ou des enjeux, elle a été à l’origine d’innovations sociales qui ont connu un certain succès : les complémentaires santé, l’action sociale, le commerce équitable, les dispositifs d’accueil des enfants, la finance solidaire, l’aide et les soins à domicile, le tourisme social,… arrêtons là l’énumération même si elle est loin d’être complète.

Mais n’est-ce là que de l’histoire ancienne ? On peut en douter quand on constate comment, pour mettre en place la manifestation Innov’Deiz en 2013, il a été aisé d’identifier, en Bretagne, une centaine d’innovations sociales émergentes initiées par des acteurs de l’ESS. Effectivement, aucune d’entre elles n’est en capacité de créer des centaines d’emplois dès 2015. Cependant, très peu de leurs créateurs ont mobilisé des fonds publics. Dans l’ensemble, elles n’ont pas bénéficié des dispositifs publics de soutien à l’emploi ni à ceux de l’innovation, sauf parfois ceux qui sont dédiés à l’ESS et mis en place par les collectivités locales. Aujourd’hui, les réseaux d’accompagnement de l’innovation actifs en Bretagne, n’ont bien souvent pas la compétence, ni la volonté d’accompagner des projets d’innovation sociale. L’auraient-ils que cela demanderait de modifier leurs méthodologies et leurs pratiques pour prendre en compte les spécificités de l’ESS : une propriété et une gouvernance collective, pour ne citer que ces deux-là. Quels seraient les effets d’un dispositif cohérent de soutien à l’émergence et d’accompagnement à la création d’activité adapté aux spécificités de l’ESS qui prendrait inévitablement dans ses filets un nombre conséquent d’innovations sociales ? L’ancrage territorial, au cœur de l’action de l’ESS Dans une période où la mise en concurrence des territoires est la règle, l’ESS inscrit son action dans une économie de proximité maillant le territoire breton d’activités dont les emplois, par nature et par choix, ne sont pas délocalisables. Elle participe donc à la construction d’un tissu économique stable peu affecté par les questions de compétitivité entre les territoires, jeu souvent à somme nulle. De plus, la nature des activités portées par les entreprises de l’ESS contribue largement à l’animation de la vie sociale locale, particulièrement dense dans notre région. Une image d’authenticité, un environnement relativement bien protégé, la solidarité en œuvre sur les territoires, une animation dynamique de la vie locale,… autant de paramètres indispensables à l’attractivité de la Bretagne et au bien-être de ses habitants, facteurs essentiels au bon fonctionnement des entreprises, qu’elles soient de l’ESS ou pas. Faut-il rappeler le rôle prépondérant qu’y jouent les entreprises de l’ESS des secteurs culturels, environnementaux, de l’action sociale, de l’Insertion par l’Activité Économique, du sport, des loisirs, du tourisme, de l’animation socioculturelle,… au-delà des emplois et des flux économiques qu’elles créent ? Rajoutons, l’intérêt que représente, pour le dynamisme du territoire, la mobilisation des citoyens autour de projets collectifs et d’intérêt général proposés par l’ESS.

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Au-delà des idées reçues Les événements de ces derniers mois, que ce soit au plan national (vote de la loi relative à l’ESS, 1ère visite du nouveau ministre de l’économie à une entreprise consacrée à une Scop,…) ou régional (place des entreprises de l’ESS dans la SRDEII, la programmation européenne ou le CPER,…), ont permis à l’ESS de gravir un nouveau palier quant à sa reconnaissance en tant qu’acteur économique. La pertinence de son modèle est de plus en plus reconnue. Nul ne s’aventurerait plus aujourd’hui, au moins en Bretagne, à dénier à l’ESS sa contribution positive au développement économique et social de nos territoires. Cependant, bien des idées reçues circulent encore sur l’ESS auprès de certains décideurs socioéconomiques dans notre région et au-delà. Comme toutes les idées reçues, elles ne résistent pas à une analyse sérieuse. Mais, comme toutes les idées reçues, elles ont une capacité de résistance au-delà de ce qui peut apparaître comme raisonnable.

tation d’entretien des routes pour une entreprise de travaux publics. Le versement d’une subvention publique acte le caractère d’intérêt général de l’action menée, justifiant que lui soit alors alloué des moyens issus de la solidarité nationale s’exprimant à travers l’impôt. De plus, le rapport Queyranne, sorti à l’été 2013, fait état de 110 milliards d’aides publiques aux entreprises, ce qui semble légitime puisque les pouvoirs publics, qu’ils soient nationaux ou locaux, ne les ont pas remis en cause. Il semble donc pertinent que les pouvoirs publics investissent pour soutenir le développement économique… que ce soit pour les entreprises capitalistiques ou celles de l’ESS et donc y compris sous forme de subvention lorsque c’est la forme juridique adéquate.

L’ESS, une économie marginale ?

Depuis de nombreuses années, les pouvoirs publics ont une certaine défiance pour les structures qui accompagnent les entreprises. Ces organismes sont réputés coûter cher et engendrant des frais de fonctionnement au détriment du développement économique direct des entreprises. Certes, çà et là, certains ont abusé de leur position et leur efficience peut être interrogée. Appuyé sur cette généralisation simplificatrice, le raisonnement consiste à dire qu’il y aurait pléthore de structures d’accompagnement des entreprises. Il ne serait donc pas nécessaire d’en créer d’autres. Il suffirait alors d’ouvrir les dispositifs existants aux entreprises de l’ESS. L’ESS souffre aujourd’hui, en Bretagne comme ailleurs, d’un déficit de moyens attribués aux réseaux d’accompagnement de ses entreprises. Leurs financements n’ont pas été construits à la période où se mettaient en place ceux qui s’adressent aux entreprises capitalistiques. Développer l’ESS n’était, à l’époque, pas à l’ordre du jour. Cela ne serait pas dommageable si les porteurs de projet en ESS trouvaient, dans les réseaux actuels, les accompagnements dont ils ont besoin. Le diagnostic élaboré, en 2013, dans le cadre de la Stratégie Régionale de Développement de l’ESS6 (SRDESS), montre qu’il n’en est rien. Sans doute, il ne serait pas pertinent de doubler tous les réseaux existants par d’autres dédiés à l’ESS. Sans doute il est nécessaire de faire évoluer les modalités d’actions et les outils des structures accompagnant les entreprises capitalistiques afin qu’elles sachent agir auprès de celles de l’ESS. Il est cependant nécessaire de mettre en place les quelques nouveaux outils structurants de l’accompagnement des entreprises de l’ESS et de pérenniser ceux qui existent. S’appuyant sur une connaissance fine des modalités d’entreprendre des entreprises de l’ESS, ils sauront soutenir leur développement économique de façon pertinente et efficiente. À défaut, le potentiel de développement et de création d’emploi de l’ESS ne sera exprimé que très partiellement.

Le travail fait avec l’INSEE a permis d’inscrire l’ESS dans les règles de la statistique nationale. Cela permet d’obtenir des comparaisons, des évolutions aussi fiables que pour les autres domaines de cette statistique. Associations, coopératives, fondations ou mutuelles qu’elles soient de santé ou d’assurance, l’ESS est présente dans tous les secteurs d’activité, prenant une part importante, voire prépondérante dans certains d’entre eux : assurance, action sociale, économie circulaire, banque, sport, animation, tourisme,… L’ESS représente plus de 10 % des emplois au plan national (14% en ne comptant que l’emploi privé) et près de 14 % au plan régional (18% de l’emploi privé), presque 150 000 salariés, 13 500 établissements5,… Peut-on négliger une part aussi importante de l’économie régionale et prétendre travailler à son développement ? L’ESS, une économie assistée ? Bien que cela soit de plus en plus rare, il arrive encore que l’ESS soit considérée comme une économie subventionnée, dont le modèle économique ne repose que sur les aides publiques. Cela induirait que les entreprises de l’ESS ne peuvent se développer que si les “ vraies entreprises ” créent des richesses afin de pouvoir les redistribuer. Il est vrai que certaines associations reçoivent des subventions qui, parfois, constituent la majeure partie de leurs ressources. Encore faudrait-il identifier, parmi ces subventions, ce qui est l’achat d’une prestation non soumise aux règles des marchés publics et qui, alors, est versée sous forme de subvention. Cela est très courant dans les services aux personnes, par exemple, ou dans l’action sociale. Elles ne constituent pas plus des aides à l’entreprise que l’achat, par les pouvoirs publics, d’un véhicule auprès d’un constructeur automobile ou d’une pres-

L’ESS, une économie sans réseaux d’accompagnement des entreprises ?

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Source observatoire régional de l’ESS de Bretagne – INSEE CLAP 2012

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Stratégie Régionale de Développement de l’ESS a été élaborée entre 2010 et 2012 par les acteurs de l’ESS de Bretagne en collaboration étroite avec les collectivités locales engagées dans la mise en place d’une politique de développement de l’ESS. Son élaboration a été animée par la Cress. Depuis 2012, elle est en phase de mise en œuvre, en cohérence avec la Stratégie Régionale de Développement Économique d’Innovation et d’internationalisation (SRDEII) votée par le Conseil Régional en décembre 2013.

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Investir dans le développement de l’Économie Sociale et Solidaire Après des premiers pas prometteurs … Depuis une dizaine d’années, des étapes ont été franchies. Les Conseils Régionaux et les Conseils Généraux, puis les autres collectivités locales ont développé des politiques publiques visant à soutenir le développement de l’ESS. Cela a été le cas en Bretagne sans doute plus qu’ailleurs. L’État, en créant un ministère de l’ESS qui s’est attaché à faire voter une loi dédiée à ce secteur, a emboité de pas. Ces premières étapes franchies ne sauraient constituer un aboutissement. La finalité de l’ESS n’est pas d’être reconnue par les pouvoirs publics et les institutions socioéconomiques, mais de proposer « une alternative pertinente, une autre façon de faire de l’économie soucieuse de ses responsabilités sociétales, du partage des richesses qu’elle produit, de la qualité des emplois qu’elle crée, de l’implication des citoyens dans le pilotage des projets…6 » C’est cette étape-là qui est maintenant devant nous. Nous ne sommes donc pas au bout du chemin.

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Rapport moral de la Cress de Bretagne – juin 2013. 7

Stratégie Régionale de Développement Économique d’Innovation et d’internationalisation – rapport adopté par le Conseil Régional de Bretagne en décembre 2013 ; page 28.

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Idem page 24

La loi relative à l’ESS en est un exemple édifiant. Importante symboliquement, elle positionne l’ESS comme un acteur socioéconomique reconnu. C’était donc une étape indispensable. De plus, elle a permis de régler certaines problématiques techniques auxquelles se heurtaient des acteurs de l’ESS. Si on en reste là, c’est insuffisant. Faute d’une traduction concrète, l’ambition forte affichée par le gouvernement, renforcée par bien des élus nationaux de tous bords lors du débat parlementaire, n’aurait alors été qu’une déclaration d’intention. Ne resterait donc qu’un effet d’affichage qui serait, à terme, contre-productif. Il en est de même au niveau local. L’investissement dans la SRDEII (Stratégie Régionale de Développement Économique d’Innovation et d’internationalisation), dans la définition des domaines d’innovation stratégiques (les S3 de la commission européenne), dans le CPER (Contrat de Plan État Région) ne peut pas s’être effectué en pure perte, sans effet sur le développement économique de notre territoire. En effet, que ce soit au niveau national ou en Bretagne, depuis 2010 lors de l’élaboration de la Stratégie Régionale de Développement de l’ESS, les acteurs de l’ESS se sont mobilisés pour travailler au service de l’intérêt général. Ils ont repris à leur compte les ambitions politiques affichées. Imaginons que leur investissement ne produise aucun résultat concret. Cela aurait un effet délétère et rendrait très difficile une prochaine mobilisation.

… des priorités pour poursuivre le chemin 2015 sera donc une période charnière. Alors que la loi sur l’ESS se mettra en place, alors que les cadres du développement économique de la Bretagne se construisent pour les 6 années à venir, les pouvoirs publics nationaux et en région auront-ils l’audace politique d’investir dans les programmes ambitieux indispensables pour faire émerger l’économie de demain dans laquelle l’ESS prétend occuper une place importante ? Le chemin à parcourir a été tracé dans ses grandes lignes par la Stratégie Régionale de Développement de l’ESS en 2012. Le travail effectué depuis, notamment en ce qui concerne le développement de l’entrepreneuriat en ESS, a permis de préciser ce qu’il faut mettre en place : • rattraper le déficit de structuration des réseaux d’accompagnement du développement des entreprises de l’ESS, • mettre en place une démarche proactive d’ouverture des dispositifs de financement des entreprises à celles de l’ESS. Au-delà d’une reconnaissance symbolique, au-delà d’un environnement idéologique favorable, il est temps de mettre en place le premier acte concret du changement d’échelle de l’ESS dans son ensemble et en Bretagne en particulier. En effet, contrairement à une idée trop répandue, développer l’ESS n’est pas une éventualité soumise à la bonne santé de l’économie capitalistique, la “ cerise sur le gâteau ” pour les périodes économiques fastes. Une ESS forte et dynamique est, au contraire, une condition de mise en place d’une économie durable. Les acteurs de l’ESS en Bretagne se sont engagés sur cette voie depuis plusieurs années. La construction de la SRDESS en a été l’une des premières étapes significatives. Ils sont toujours prêts à se mobiliser pour continuer à relever ce défi. Cependant, ils sont en attente de signes concrets de la part des pouvoirs publics montrant leur intérêt à s’impliquer dans un partenariat pour construire cette nouvelle économie. L’ESS est prête à mettre à disposition du redressement économique de notre pays, son potentiel de mobilisation et d’innovation pour aider à « l’émergence de nouveaux modèles économiques7 » afin de viser « un modèle de développement durable capable de (ré)concilier performance économique, recherche du progrès social et impératif énergétique et écologique8 ».

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L’Économie Sociale et Solidaire,

une réalité économique

10,3% 13,9%

de l’emploi français

de l’emploi breton

2,34 144 000

millions

de salariés en France

salariés bretons

222 800 13 500

établissements employeurs français

établissements employeurs bretons

L’Économie Sociale et Solidaire est le mouvement social et économique que constituent les entreprises qui se réfèrent, dans leurs statuts et dans leurs pratiques, à un modèle d’entrepreneuriat s’appuyant sur une propriété et une gouvernance collective, se revendiquant de valeurs de solidarité, de démocratie et d’émancipation de la personne. Elle apparaît aujourd’hui comme une alternative pertinente, une autre façon de faire de l’économie soucieuse de ses responsabilités sociétales, du partage des richesses qu’elle produit, de la qualité des emplois qu’elle crée, de l’implication des citoyens dans le pilotage des projets… Autant d’exigences qui, pour s’inscrire dans la pérennité, nécessitent d’être performant sur le plan économique. Historiquement composée d’associations, de coopératives et de mutuelles qui en constituent encore aujourd’hui l’ossature, l’ESS s’est élargie à de nouvelles formes d’entrepreneuriat : économie solidaire, insertion par l’activité économique (IAE), et entreprises adaptées… et, plus récemment, l’entrepreneuriat social. Elle est aujourd’hui présente dans l’ensemble des secteurs d’activité depuis les services aux entreprises et aux personnes jusqu’à l’industrie, en passant par l’agriculture, le commerce ou le bâtiment ; et sur l’ensemble du territoire national, y compris là où les services publics et les entreprises capitalistiques ont disparu aussi bien dans le milieu rural que dans les banlieues des grandes villes. Partie prenante de l’économie comme de la dynamique globale de la société civile, l’ESS contribue à la production de richesses, à l’emploi, au lien social, à l’innovation sociale et organisationnelle et à la réponse aux besoins sociaux. Elle contribue également pleinement à l’économie de proximité et au développement des territoires. Les collectivités territoriales et l’Etat trouvent en elle un partenaire pour répondre à leurs préoccupations, et plus généralement à celles des citoyens. Forte de ses valeurs et de ses principes, l’ESS représente une réalité économique incontournable qui a fait la preuve, suite à la crise de 2008 de sa meilleure résilience aux aléas financiers, en raison, sans doute, d’une vision plus patiente et moins avide du développement économique.

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Composition du Conseil d’Administration de la Cress de Bretagne

Coopératives : Caisse d’Epargne Bretagne Pays de Loire Coopérer pour Entreprendre Crédit Coopératif Crédit Mutuel de Bretagne Les Scop de l’Ouest Union Régionale des HLM Mutuelles : Mutualité française Bretagne Mutualité française Côtes d’Armor Mutualité française Finistère et Morbihan Mutualité française Ille et Vilaine Harmonie Mutuelle MACIF MAIF MATMUT Associations : Conférence Permanente des Coordinations Associatives (CPCA) Union Nationale de l’Aide, des Soins et des Service aux Domiciles (UNA) Union Régionale pour l’Habitat des Jeunes Union Régionale des Entreprises d’Insertion Union Régionale des Pupilles de l’Enseignement Public (UR PEP) ASKORIA Collège Coopératif de Bretagne Compagnons Bâtisseurs Association de Développement de l’Économie Sociale et Solidaire du Pays de Brest, Groupement des Employeurs de l’Économie Sociale Employeurs de l’Économie Sociale et Solidaire : UDES UNIFED

187 rue de Chatillon | 35200 Rennes T 02 99 85 89 53 | cress@cress-bretagne.org | www.ess-bretagne.org


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