EXXPERT
Le travail du kinésithérapeute et ses répercussions Giulia Ioppi
Bien que les kinésithérapeutes soient par définition de fins connaisseurs de l’anatomie et des lois biomécaniques et physiopathologiques, ils constituent un secteur de travail amplement touché par les troubles musculosquelettiques (TMS).
Introduction Selon l’Organisation mondiale de la Santé, les TMS recueillent un large spectre de troubles de nature inflammatoire (aigüe) et dégénérative (chronique) qui se traduisent par la présence de douleur et limitations fonctionnelles. Dans la même définition, nous retrouvons le lien de causalité avec l’activité de travail et le caractère multifactoriel. La définition est assez large et dans la littérature, les TMS sont dénommés sur les termes de douleur, gène, engourdissement, rigidité et faiblesse1,2,3,4. Nous nous sommes intéressés à cette problématique car le travail des kinésithérapeutes implique des gestes physiquement intenses en contact direct avec le patient. Dans cette population, la prévalence des TMS se situe entre 53 % et 95 % et varie d’un pays à l’autre. Après le dos, le membre supérieur (MS) est la deuxième région la plus concernée, mais il y a peu d’études qui ciblent cette partie du corps. En Belgique, aucune étude ne traite du sujet, alors que la prise en charge des TMS a un coût économique et un impact négatif sur la vie des kinésithérapeutes, ainsi que sur la qualité des prises en charge. Le problème reste mal connu et par conséquent peu pris en considération3,5,6.
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JUIN 2021
En espérant que la récolte de données permettrait de décrire le phénomène et contribuerait au développement des stratégies de prévention, nous avons étudié les caractéristiques et les facteurs de risque des TMS du MS sur une population de kinésithérapeutes francophones et/ou néerlandophones exerçant en Belgique. Nous avons mené une enquête descriptive observationnelle et avons commencé par l’adaptation d’un questionnaire sélectionné de la littérature, que nous avons traduit en français et en néerlandais. Nous l’avons ensuite distribué auprès d’un groupe d’experts afin qu’ils le complètent/critiquent. Le recrutement des kinés a été effectué via AXXON ainsi que quelques sites web et la diffusion a quant à elle été réalisée par le biais de la plateforme Google Forms . L’analyse descriptive des données récoltées est accompagnée par des tests statistiques en adéquation avec les variables étudiées7.
Aboutissements de l’étude Les 110 questionnaires retenus indiquent que les ¾ des kinésithérapeutes souffrent d’un TMS-MS et selon la plupart d’entre eux, l’exercice de la kinésithérapie en est la cause principale. La prévalence semble être élevée par rapport aux pourcentages que nous retrouvons dans la littérature pour le corps entier [Figure 1]5,6.