Rapport de PFE-la Tour Escale

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LA TOUR ESCALE. . accueillir et inviter au voyage .

Clément GUENEGO. Master 2 . pfe. 5 Juillet 2013. directeurs d’étude:B. DE KOSMI / B. DESMOULIN Ecole Nationale Supérieure d’Architecture de Paris-Val de Seine

. rapport de Projet de Fin d’Etudes .


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ClĂŠment GUENEGO

191 rue de Charonne 75011 PARIS 06.95.25.72.35 clement.guenego@hotmail.com www.issuu.com/clement.guenego


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TABLE DES MATIERES.

INTRODUCTION PARTIE I. AUTRES RIVAGES. identité(s) d’un lieu

PARTIE II. LA FORME D’UNE VILLE. conception urbaine

PARTIE III. UNE CHAMBRE EN VILLE réflexions architecturales.

1. enjeux territoriaux: la métropole atlantique, l’estuaire comme matrice. 2. genius loci du port: théorie et imaginaire. 3. identité du lieu: analyse du site, histoire du lieu. 4. projet urbain Ville-Port: Saint-Nazaire reconquiert son port en 3 temps.

1. les 3 figures urbaines en présence: un tracé urbain conséquence de l’histoire du site. 2. la Ville Ancrée: définition théorique et conception projectuelle. 3. la Ville Flottante: définition théorique et conception projectuelle. 4. l’Estran Urbain: définition théorique et conception projectuelle. 5. la mise en relation des 3 Villes par leurs franges.

1. le logement sous 3 formes, une réponse aux demandes du plan urbain. 2. l’architecture du lieu: recherches, conclusions et interprétations. 3. une tour à la présence mouvante 4. le modèle du paquebot. 5. l’enjeu environnemental. 6. le jeu de la matérialité.

BIBLIOGRAPHIE CONCLUSION

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INTRODUCTION .

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Saint-Nazaire, Saint-Nazaire, Saint-Nazaire. L

«

Nerveuse de formes en mouvements permanents, ton ancrage est maritime pour un devenir balnéaire. Balise d’hydrocarbure, tu es prise entre la mer et le feu. Ici, un bateau communique facilement avec un immeuble, ils se côtoient, se toisent librement à même hauteur. De temps en temps, l’un percute l’autre sur les rails de ta gare. Altitude moderne où tout se confond, se fond, se mélange, le ciel et l’horizon. Micro-climat ligérien, passage clair obscur, une autre météo. [...] Du haut du Building, on compte les carrés. Autant de conteneurs dans un immeuble et un paquebot. Tous deux apprécient la démesure du voyage. [...] Saint-Nazaire, la main de l’homme dans cette bouche estuarienne.» Bureau de la Main d’œuvre Indigène, Guide Indigène de (dé)tourisme de Nante-s et Saint-Nazaire, 2009.

a ville. Le port. Le fleuve. L’estuaire, Le pont. Le quai.

Voilà autant de termes suscitant l’intérêt, agitateurs d’émotions urbaines et architecturales. Ils ont été de tout temps source de réflexion pour les architectes et les urbanistes. Du Pirée ou Alexandrie à la métamorphose récente de Rotterdam ou Hambourg, en passant par Londres et New-York, ces éléments ont bâti nombre de villes phares de ce monde. Ils sont aussi de ceux qui caractérisent la Forme d’une ville1, celle de Saint-Nazaire, plus modeste certes, mais aussi où ces notions existent tellement intensément. Cette ville, «nerveuse de formes en mouvements permanents», s’apparente à tant d’autres. Ainsi les membres de cette famille de villes-ports, se définissent à partir de ces notions, et sont ce qu’on peut appeler des Lieux, au sens le plus noble du terme, c’est à dire, fortement définis et porteurs d’une identité vivante.

Lieux d’interactions, d’échanges, de mouvements et de frictions urbaines, mais aussi de rêve et de poésie rugueuse et moderne. Lieux vivants, animés du va-et-vient des ouvriers à l’œuvre et des artistes cultivant leur imaginaire, des chalutiers et des cargos, des canots de plaisance et des paquebots transatlantiques. Ici, Lieu où le cours irrégulier et sauvage du torrent des hauteurs du Mézenc, devenu majestueux et

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royal en s’imprégnant de douceur angevine,vient rencontrer la profondeur atlantique des eaux océanes. Lieu où la permanence lourde du marais intérieur vient tempérer l’instabilité des eaux estuariennes. Saint-Nazaire, dont la naissance au XIXe siècle est intrinsèquement liée à Nantes, sa puissante voisine, est l’ultime ville ligérienne, à la pointe septentrionale de l’estuaire. Elle s’ouvre directement sur l’océan Atlantique. De cette position stratégique, Saint-Nazaire a tiré sa principale richesse: la construction de paquebots transatlantiques, assurant la liaison entre l’Europe et l’Amérique du Nord, et plus récemment reconvertis en paquebots de croisière. Le lien entre la ville et ses paquebots-fils a été de tout temps intense. L’imaginaire de ces navires transatlantiques, ces «villes flottantes», celui du voyage et de l’ailleurs, ont rythmé la vie nazairienne. Ainsi comme le dit le collectif utopique et poétique du Bureau de la main d’œuvre indigène, « Ici, un bateau communique facilement avec un immeuble, ils se côtoient, se toisent librement à même hauteur.». En effet, ici peut être plus qu’ailleurs l’architecture et l’architecture navale ne font qu’une. Il y est habituel de voir une moitié de ville croître et se détacher de la ville terrestre pour ne plus y revenir. Elle sera ensuite remplacée par une entité semblable qui à 1

GRACQ Julien, La Forme d’une Ville, Paris, José Corti, 1985.


la Loire Saint-Nazaire

Océan Atlantique

Nantes

Saint-Nazaire

Saint-Nazaire: . Loire Atlantique (sous préfecture), Pays de la Loire. Bretagne historique. . 46,79 km² . 67 031 habitants (aire urbaine: 210 574 habitants) . densité: 1 433 hab./km² (comparaison: Nantes: 4 371 hab./km², Paris: 21 289 hab./km²) . altitude: minimum: 0m / maximum 47m

Situation . 9


son tour larguera les amarres, dans un mouvement cyclique inéluctable de la ville de béton engendrant une ville de métal. Un tel lieu contrasté, animé de mouvements contradictoires s’est donc rapidement révélé être un site d’étude passionnant et riche, pleinement approprié à ce dernier projet venant clore mon cursus universitaire de l’architecture et de l’urbanisme.

C

oncevoir ce dernier projet dans un port s’inscrit dans une logique personnelle cohérente. Outre un attachement personnel à ma ville natale et aux espaces littoraux, rivulaires et estuariens qui ont habité mon enfance, au moment où naissait mon intérêt pour l’architecture et la géographie, mon cursus architectural m’a amené à régulièrement travailler, tant sur le plan projectuel que théorique, dans des espaces portuaires, marins ou fluviaux. Ces travaux ont portés sur le Quai de Bercy, les Quais d’Ivry, les Marais Salants de Guérande, l’île de Procida (Italie), les rives de l’Aniene (Italie), mon mémoire de licence sur la relation entre ville et fleuve ou encore un travail théorique sur l’identité du Tibre à Rome... Après une analyse approfondie, de l’échelle territoriale à l’espace public, nécessaire à la compréhension du site, le travail fut tout d’abord d’ordre urbain, sur un site de près de 30 hectares, à la limite entre ville et port, terre et eau. Issu de ce plan urbain, une tour s’élève. Elle est l’objet du projet architectural.

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Lié étroitement au plan dont elle est issue, le programme s’articule autour de la question du logement et de ses différentes formes quant à la durée. Un hôtel propose une offre de logement pour de courtes durées, une résidence hôtelière pour de moyennes durées. Plus indépendante, une résidence étudiante enrichit l’ensemble en apportant une forme de logement longue durée. Ainsi, par l’identité du lieu, l’imaginaire naval, du voyage et par l’offre de logement proposant des séjours variables, cette tour prend naturellement le nom de Tour Escale. «Accueillir et inviter au voyage», pourrait en être le sous-titre, tant cet aphorisme évoque à la fois son programme et ses volontés conceptuelles.

C

et écrit se propose être le pendant littéraire et théorique du projet, urbain dans un premier temps puis architectural qui compose mon projet de fin d’études. Dans un premier temps sera appréhendée l’identité du lieu, le genius loci de ce site spécifique. Sera exposé ensuite ma conception urbaine développée sur ce site et les références, aussi diverses soient-elles, qui ont alimenté la réflexion. Pour finir, j’évoquerai mes volontés architecturales, les recherches et problématiques théoriques préalables à la conception, les références qui les ont nourries et accompagnées, aussi lyriques et théoriques que techniques et concrètes.


Le Petit Maroc, le Building et les entrepôts frigorifiques, depuis l’angle sud de la base sous-marine . 11


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PARTIE I. AUTRES RIVAGES. identité(s) d’un lieu

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Je me permets d’emprunter le poétique titre de l’autobiographie de Vladimir Nabokov, qui m’a inspiré plus tard dans le travail, publié en 1951. Les Autres Rivages, se sont ici ceux de Saint Nazaire, de son bassin portuaire: les rivages intérieurs, donc; ceux de son littoral double estuarien et océanique, gris et bleu. Mais se sont aussi ceux, plus lointain, de la rive sud de l’estuaire, de celles fluviale de Nantes, celles balnéaire des Côtes d’Amour et de Jade, et surtout celles de la Loire, intérieure et des Amériques vers lesquels les paquebots sont lancés. Pour Nabokov, les Autres Rivages sont internes, autobiographiques, lui sont propres et secrets. Cette dimension personnelle vient en écho également à mon propre attachement à cette ville.

1. Enjeux territoriaux.

P

ar sa position dans le territoire, Saint-Nazaire se présente comme un trait d’union. En effet, située à l’embouchure de la Loire, la « main de l’homme dans cette bouche estuarienne»2, vient conclure l’estuaire et terminer le parcours ligérien, riche de plus de 1000 kilomètres, des contreforts du Massif Central à ces basses terres hautes-bretonnes, parcourant les coteaux bourguignons, l’Orléanais et le royal val de Loire à travers les vignes tourangelles et angevines. Loin de mettre un terme à ce cours, la ville regarde autant vers les eaux intérieures du fleuve, que celles immenses et ouvertes de l’océan, aux appels outreAtlantiques, cultivant l’imaginaire new-yorkais, an14

Trait d’union entre les eaux fluviales et salines, SaintNazaire se tient également en équilibre entre l’eau infiniment mouvante de l’estuaire, et celle stable du marais de Brière, zone marécageuse de près de 500 km², s’élargissant à l’arrière de la ville.

Hier rivales malgré leur lien filial, Nantes et SaintNazaire se rapprochent aujourd’hui et allient leurs atouts pour un développement mutuel. Nantes, par son poids historique, politique et tertiaire, est logiquement le pôle principal de cette métropole tricéphale. Saint-Nazaire lui apporte un poids productif et économique. La zone littorale de GuérandeLa Baule, place touristique et hôtelière réputée, complète l’ensemble.

Ainsi, Saint-Nazaire évolue entre terre et eau; ville basse sur une pointe rocheuse frêlement avancée entre les eaux. Là encore, la dichotomie est évidente, la friction nette. Si l’estuaire, l’océan, les marais de Brière constituent, on l’a dit, l’altitude basse, les hauteurs sont constituées des sillons rocheux parallèles, vestiges du Massif Armoricain érodé. Le sillon de Bretagne proche voisin, offre une vision semi-lointaine sur la ville, tandis que celui de Guérande s’extirpe de l’eau sur le rocher même de Saint-Nazaire.

Laurent Théry, urbaniste de Saint-Nazaire puis de Nantes, Grand Prix d’Urbanisme en 2010 précise: «Les traits distinctifs de cette métropole sont la complémentarité et l’équilibre. Ce territoire est productif mais aussi public et résidentiel sans qu’aucune de ses spécialistations ne l’emporte parce qu’elles sont toutes présentes.»3. Cette métropole ligérienne possède donc conjointement les trois sources de revenus nécessaire à son développement : publique, productive et résidentielle4.

Saint-Nazaire est donc indéniablement en position d’équilibre entre des états géographiques, géologiques, culturels divers. Un lieu de passage donc. Rappelons à ce titre d’ailleurs que port tire son origine du latin portus et plus loin encore, du grec poros: passage.

Cette situation d’équilibre originale fait dire à la Délégation Interministérielle à l’Aménagement du Territoire et à l’Attractivité Régionale (DATAR), qu’avec Bordeaux, Nantes est la seule métropole de l’Ouest pouvant prétendre à une dimension européenne.5

tillais et sud-américain. Sa devise y fait clairement allusion: Aperit Et Nemo Claudit, soit «elle ouvre et personne ne ferme».

Bureau de la Main d’œuvre Indigène (collectif), Guide Indigène de (dé) tourisme de Nante-s et Saint-Nazaire, Nantes, A la criée, 2009, p 47. 3 THERY Laurent, Place Publique n.3, 2007 4 THERY Laurent et MAHE Stanislas Mahé, « L’estuaire, matrice de la métropole », Place Publique, n°3, 2007, p47. 5 MASBOUNGI Ariella, Nantes, la Loire dessine le projet, Paris, Editions de la Villette, 2003, p183. 2

Néanmoins, Saint-Nazaire possède également un réel poids, une stabilité et a une importance territoriale. La population de son aire urbaine s’élevant à plus de 200 000 habitants, elle est à ce titre un des pôles de la Métropole Atlantique, en construction.


La Turballe PNR Marais de Brière

Guérande

Marais Salants

SAINT NAZAIRE

ue iq nt la At

baie de la Baule

la Loire V TG

Le Croisic

Donges Montoir

Saint Brévin

NANTES

Océan Atlantique aéroport Nantes Atlantique

Lac de Grandlieu

Pornic

Ile de Noirmoutier

Légende zones de polarité

moblité et flux

Nantes, métropole de rang national zones de tourisme balnéaire zones industrielles

ville

pôles de tourisme vert

ligne TGV Atlantique

routes départementales

pôles économiques

ligne ter autoroutes routes nationales

chenal de l’estuaire de la Loire aéroport international

Analyse territoriale . 15


Saint-Nazaire est, en effet, un pôle productif et industriel majeur. Les Chantiers de l’Atlantique STX, poids lourd de la construction navale européenne, Airbus et l’aérospatiale, la construction d’éolienne en mer, le port autonome, 4e port au rang français, la raffinerie et le terminal méthanier de DongesMontoir, seconde raffinerie française n’en sont que les exemples les plus emblématiques. Notons que ces grandes firmes industrielles induisent également une multitude d’entreprises de plus petite taille sous-traitantes. La Loire est donc, dans son estuaire, industrieuse et ouvrière, et le demeure, tant bien que mal, malgré les fluctuations économiques parfois critiques.

L

e lien unificateur, la matrice de cette métropole atlantique n’est autre que l’estuaire: de Nantes à Saint Nazaire, et s’ouvrant ensuite sur la Côte d’Amour au nord, et la Côte de Jade au sud. A cette échelle territoriale et métropolitaine, SaintNazaire se trouve être encore un point d’équilibre.

2. Genius loci du port. Historiquement, les premières civilisations urbaines se sont implantées dans un petit nombre de vallées majeures : Nil, Tigre, Euphrate, Indus, Fleuve Jaune… Parmi les dix plus grandes agglomérations françaises, aucune n’est construite sans rapport à l’eau.

C

es deux constats mettent en lumière l’unique constante qui semble s’établir dans les façons de faire la ville, si différentes soient-elles, qu’on peut observer autour du monde: une ville semble ne pas pouvoir se développer sans rapport à l’eau. Confluence, île, méandre, embouchure, delta, estuaire, baie, golfe, rade, havre sont autant d’emplacements stratégiques où l’homme nomade s’est naturellement et prioritairement sédentarisé. Offrant un apport durable en eau, ressource vitale par excellence et nécessaire à l’essor d’une population citadine, une protection militaire par une géographie stratégique, une richesse économique par l’agriculture, l’industrie et surtout le commerce, l’eau apporte à la ville qu’elle baigne, développement et prospérité.

Les ports, lieux à l’identité forte, on l’a dit, sont animés d’un genius loci vivant. Cet «esprit du lieu», personnifié et divinisé par les Romains, est clairement identifiable dans un site portuaire: Shanghai, New York,

Rotterdam, Saint-Nazaire, ont cet esprit commun, malgré les particularités culturelles, géographiques, démographiques, climatiques. Le quai possède cette qualité rare de poser une limite franche à la ville. Il restaure ainsi l’idée d’une façade urbaine en interaction avec le paysage. Les villes terrestres d’aujourd’hui, par leur entrée de ville commerciales et industrielles impersonnelles, ont perdu cette qualité qu’elle possédait jadis. Olivier Rolin, écrivain voyageur se demande «où est la clarté classique des remparts d’autrefois, le temps où les villes avaient des portes comme les maisons? Après tout, les livres ont bien des couvertures. Or la mer, le rivage, restaurent cette exactitude perdue. Naturellement, ce n’est pas une inquiétante manie de l’ordre qui me fait parler ainsi, mais la considération de ce fait très simple. Là où il y a limite, il y a spectacle. Un port vue de la mer, cela se contemple, se saisit progressivement par touches impatientes et puis dans son ensemble dévoilé, ah!» 4. A ce propos, Patrick Deville, écrivain nazairien surenchérit en écrivant: «Les villes se lisent à livre ouvert sur leur port. Le seul endroit véritablement de lisible de Saint-Nazaire, c’est là.» 5. Seules les villes portuaires possèdent à présent cette qualité de skyline paysagère.

Olivier ROLIN, Sept Villes, Paris, Rivages, 1988, p.25 DEVILLE Patrick, in Place Publique Hors-Série: Saint-Nazaire Ville-Port: l’histoire d’une reconquête, 2010. 4 5

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Le port comme façade paysagère et le quai comme limite. Saint-Nazaire, Marseille, New York . 17


Par cette même limite franche, un port devient, de fait, lieu d’une dichotomie géographique spectaculaire: la terre, l’urbain, laisse soudainement place à la mer, le paysage. L’horizon s’ouvre. Pour Rolin, «le paradoxe est que, la mer apportant aux villes la limite qui permet le regard, les fait aussi appartenir à l’illimité.»6. Une ville portuaire est donc intrinsèquement sujette à cet appel du large, à cette envie de larguer les amarres, de suivre l’appel du vent marin et des cris des goélands.

L

e thème du voyage, du passage, de l’escale font l’âme d’un port, l’habite au plus haut point. Rappelons nous de l’étymologie du terme: poros, le passage. Un passage, ou plutôt des passages tant les échelles de temps sont multiples et diverses dans un port. Le cœur du port pulse à différentes vitesses. La pulsation semble être le terme approprié puisque le passage est avant tout partie prenante d’un cycle. Il est donc ici avant tout un départ, une absence, un retour. Parmi ces pulsations, il y celles naturelles, tout d’abord. Les marées en sont les plus marquantes. Les eaux vont et viennent deux fois par jour, et une fois par mois prennent une ampleur autre, parfois spectaculaire. Plus largement, un port vit selon les saisons, par la météo et ses usages, selon le jour et la nuit, la vie nocturne n’étant souvent pas moins animée que la vie diurne.

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M

ais ces pulsations sont surtout anthropiques. S’ajoutent aux rythmes humains de la vie urbaine classique, ceux industriels, productifs qui animent un port. Ainsi les pêcheurs en mer, qui partent au petit matin et reviennent le soir ou les ouvriers, à terre, qui affluent aux chantiers, les font fourmiller la journée et repartent, en vagues à heure fixe constitue la pulsation la plus rapprochée, celle quotidienne. Les cargos, les pétroliers, les méthaniers venant livrer leurs marchandises sont animés d’un second rythme, à l’amplitude plus longue. La pulsation la plus longue, la plus étonnante aussi, spécifique à un petit nombre de ports dont SaintNazaire, est certainement celle des paquebots qui durant des mois croissent dans les cales de constructions avant d’être lancés pour ne plus revenir, remplacés peu de temps après par un assemblage de feuilles de tôle soudées qui deviendra lui même un paquebot. Dans le cas de Saint-Nazaire, une pulsation de la vie urbaine croise celle du port. Ainsi le temps d’un week-end estival, presque 50 000 personnes investissent les terre-pleins portuaires du Petit Maroc, habituellement déserts et clos, dans le cadre du festival de musiques du monde des Escales.

Mondiale. Bombardée durement face à la ténacité de la résistance nazie (Saint-Nazaire et ses alentours ont la triste particularité d’avoir été les dernières terres européennes libérées, 3 jours après l’armistice du 8 mai 1945) elle est déserte au lendemain de la Guerre. Elle se reconstruira rapidement pour atteindre de nouveau le même nombre d’habitants et vivre une seconde période de prospérité. Les années 1970 toucheront durement les industries de la ville qui connaîtra alors une nouvelle période de déclin, avant de se diversifier vers l’économie tertiaire et s’allier à Nantes et la côte pour une nouvelle croissance.

E

nfin, une dernière pulsation, toujours propre à Saint-Nazaire mais plus métaphorique cette fois, peut être évoquée: celle de la ville même. En effet, d’un village de quelques centaines d’habitants, elle connaît un âge d’or et croît jusqu’à compter presque 45 000 habitants à la veille de la Seconde Guerre

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Olivier ROLIN, Sept Villes, Paris, Rivages, 1988, p.26


Le Quai Demange, désert, un après-midi de Novembre. La foule, au même lieu, pendant le festival musical des Escales.

Le pont tournant et le bassin portuaire depuis le Building. Le pont s’ouvre au passage d’un cargo entrant dans le bassin.

Le MSC Splendida, en travaux, à sec dans la Forme Joubert. L’Europa, en finitions, à flot dans le bassin de Penhoët.

Les pulsations d’un port. illustrations à Saint-Nazaire. 19


U

n port, enfin, est un lieu de mystère, de poésie moderne. De tous temps, la poésie, la littérature, le cinéma et l’art en général ont trouvé dans ces lieux l’inspiration qui leur était nécessaire. Les thèmes du voyage, du passage, de l’escale, de l’appel de l’ailleurs, qui on l’a dit lui sont inhérents, les différentes pulsations qui le rythment agissent comme des catalyseurs d’art, sont des créateurs d’émotions.

Lorsque les peintres sont sortis de leurs ateliers au XIXe siècle, le port est devenu un de leurs thèmes favoris. Eugène Boudin, et ses disciples impressionnistes inaugureront un sujet toujours traité aujourd’hui. Par les lumières jouant sur les eaux mouvantes, les fumées et l’activité des usines, les grands espaces bruts, le port a également attiré l’attention des photographes et cinéastes. Pour les thèmes auquel il renvoie et le mystère qui lui est propre, la littérature y a également puisé largement l’inspiration. Le genre du policier y est particulièrement attaché. Ainsi, Saint-Nazaire accueille la biennale d’art contemporain Estuaire, où des œuvres majeures sont venues animer le port (Felice Varini, Yann Kersalé, Gilles Clément...). La troupe Royal de Luxe y crée régulièrement des événements artistiques, chahutant l’espace urbain, dont ils ont le secret. Ils trouvent dans le port de Saint-Nazaire, l’espace et l’imaginaire nécessaire pour y laisser libre cours à leur créativité étonnante. Le festival de musique du monde des Escales attire les foules sur les terre-pleins du port en Août et in20

vite au voyage par sa programmation métissée. La Folle Journée, festival nantais de musique classique, s’y transporte régulièrement, y compris parfois dans la coque même d’un cargo.

Enfin, Saint-Nazaire est aussi le port où Tintin et le Capitaine Haddock s’embarquent à la recherche du professeur Tournesol dans les 7 boules de cristal et où Monsieur Hulot passe ses vacances.

La Maison des Ecrivains Etrangers et des Traducteurs est installée au plus près du port et y organise régulièrement des salons littéraires. Durant une quinzaine d’année, s’est tenu dans la ville un des principaux festivals en France de littérature policière: Délit d’encre.

Eugène Boudin, Dans le port de Bordeaux, 1874. Le peintre, père des impressionistes et natif de Honfleur, aura peint toute sa vie durant le port, la mer et ses scènes de vie. En cela, son héritage se ressent chez les Impressionistes. Et au delà.


Nantes dans Lola de Jacques Demy, 1961. Rochefort dans Les Demoiselles de Rochefort, de Jacques Demy, 1967. New-York dans Sur les quais, d’Elia Kazan, 1954. Nantes dans Une chambre en ville de Jacques Demy, 1982. Le Havre dans Le Havre d’Aki Kaurismäki, 2011. Cherbourg dans Les parapluies de Cherbourg de Jacques Demy. 1964. Le Havre dans Le quai des brumes de Marcel Carné, 1938.

Le Genius Loci du port dans le cinéma . 21


3. Identité du lieu.

L

e site d’étude choisi se situe au sud-est de la commune de Saint Nazaire. Il s’étend de l’église SaintNazaire au nord-ouest, du coté du centre ville, descend vers l’est jusqu’à l’île artificielle du Petit Maroc et se retourne vers le nord, de part et d’autre du bassin portuaire, pour venir côtoyer la base sousmarine et sa porte-écluse.

L

’impression de ville en équilibre qui caractérise Saint-Nazaire déjà évoquée précédemment, est poussée ici à son paroxysme. En effet, cette zone se situe à la transition entre les deux tissus urbains qui caractérisent la cité nazairienne: la ville, d’une part, avec sa trame orthogonale rigide et son homogénéité architecturale issue du plan de reconstruction de Noël Le Maresquier, des années 1950, et le port, d’autre part, avec son tissu fait de bâtiments-objets, répondant avant tout à une organisation technique et industrielle plus qu’urbaine. Je me permets ici de reprendre les propos de Coralie Hémon, auteur d’une thèse sur le paysage portuaire de l’estuaire de la Loire tant, ses propos sur l’architecture-objet sont justes: «Le port se présente de loin en loin comme une accumulation d’objets posés dans le paysage. J’emploie sciemment le terme d’objet car l’architecture semble avoir définitivement disparu du port. [...] Mais une grue, un silo à grain ou une cuve sont les même à Rotterdam ou à Montoir. Ce qui fait l’identité d’un port , c’est la confrontation de ses objets à une géographie: l’embouchure de la Meuse et du Rhin ne ressemble en rien à l’embouchure de la Loire. 22

Plus d’ouvrage, plus d’architecture, les paysages portuaires naissent du rapport entre les objets et un horizon.»7. Ainsi, il se situe à la charnière de deux formes de villes radicalement différentes: une architecture normée et organisée d’une part et une architecture singulière et disparate d’autre part. A l’échelle du paysage, le site se trouve encore en position de transition entre plusieurs états naturels: le bassin portuaire, calme, protégé et immobile au nord, l’estuaire aux eaux changeantes aux flux réguliers mais fluctuants, animés de passages à l’est et l’océan, au sud-ouest. De plus, d’un point de vue géologique, le site est encore un trait d’union: le sillon de Guérande, ligne de relief dans le paysage d’une vingtaine de kilomètres s’extirpe des eaux en partie sur le site même du Petit Maroc, entouré de part et d’autre des eaux et des vasières planes du paysage estuarien. Le nom surprenant du lieu tire d’ailleurs son origine de ce fait. Un éventuel lien avec le Maroc n’en est pas la raison, bien que des pêcheurs de la région partaient en campagne de pêche, semble-t-il, jusque au large de l’Afrique du Nord. Petit Maroc serait plus vraisemblablement une déformation francisée de Ty ar Roch, la maison sur le rocher en breton vannetais.

Coralie HEMON, Paysage portuaire, Reconquête des espaces portuaires marginalisés. Port Autonome de Nantes-St Nazaire. Plan construction et architecture, programme citéprojet, Ministère du logement, 1994, p.94 7


chantiers de l’Atlantique base sous-marine bassin du port

porte-écluse

centre-ville

av. De Gaulle

le Building

le Petit Maroc

avant-port

Océan Atlantique

ech. 1.1000e Echelle locale: site d’étude . 23


Une compréhension de l’évolution historique du site est nécessaire à la bonne appréhension du lieu. Nous relaterons ici les étapes marquantes de l’histoire, à l’échelle du site d’étude, et à celle territoriale. Avant le XIXe siècle, Saint-Nazaire n’est autre qu’un modeste village comme il en existe tant sur la côte bretonne, aux maisons massées autour de son église sur une pointe rocheuse s’avançant dans l’eau, entre marais et estuaire. La pêche en mer et surtout le pilotage en Loire, consistant à guider les navires commerciaux durant la remontée de l’estuaire mouvant et dangereux jusqu’au port de Nantes, sont les principales activités économiques. En effet, Nantes a longtemps été un des principaux ports de commerce français, et l’estuaire de la Loire était alors un axe très emprunté.

«Là-bas, sur la droite, avec ce resserrement de tous leurs toits que les ports de mer présentent entre les roches, Saint-Nazaire s’avançant au bord des flots, son clocher en vigie sur la hauteur, sa jetée continuant la rue jusqu’au large. Entre les maisons, des mâts se dressaient, se croisaient, mêlés de loin les uns aux autres, et si serrés qu’on eût dit qu’un seul coup de vent avait poussé ce paquet de vergues dans l’abri du port»

Saint-Nazaire village de pêcheurs et pilotes en Loire

Estuaire voie commerciale très fréquentée

Nantes pouvoir historique, industriel, commercial

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Amériq

Alphonse Daudet, Jack, moeurs contemporaines, 1875.

1.Evolution historique: Jusqu’au XIXe siècle . 24


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Au XIXe siècle, les bateaux à tirant d’eau toujours plus importants peinent à remonter l’estuaire de la Loire qui s’envase. Napoléon III décide alors, le 21 avril 1838 de désigner Saint-Nazaire comme avantport. La vasière est aménagée et le premier bassin portuaire est créé. La ligne de chemin de fer de Paris à Nantes est prolongée. Le village se développe alors. La ville bourgeoise et industrielle se développe sur le coteau à l’ouest du bassin. La vitesse de cette extension urbaine est telle que Saint-Nazaire est surnommée alors «petite Californie de l’Ouest». En 1862, Saint-Nazaire est déclarée tête de ligne postale pour l’Amérique centrale et du sud. Au même moment, les premiers chantiers navals lancent les transatlantiques vers les Amériques. La ville devient alors une escale importante pour les trajets transatlantiques. L’économie se développe ainsi autour de deux pôles: l’hôtellerie, dans la ville haute, bourgeoise, et l’industrie, dans le port, ouvrier.

«Saint Nazaire n’était pas une de ces vieilles idoles de villes, immobiles, rêvassant dans un corset de murailles, de bastions, et de mémoire, où tous les coins racontent une antiquité dont les gens se souviennent avec orgueil. [...] La ville [...] était une invention de l’Empire.» Paul Nizan, Antoine Bloyé, 1933.

Saint-Nazaire création de l’avant-port de Nantes

Estuaire faible tirant d’eau Nantes déclin du port

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2.Evolution historique: XIXe siècle . 26


27


Face à cette rapide croissance, le port se trouve rapidement à l’étroit. Un nouveau bassin est ainsi creusé et une écluse est percée dans le rocher, au sud, permettant ainsi à des bateaux plus importants de rentrer dans le bassin et un accès plus direct depuis l’océan, protégé par deux longues jetées. Le nouvel accès transperce littéralement le centre historique et transforme ainsi le Petit Maroc en une île artificielle. Cette «cicatrice» dans la vieille ville est longtemps restée vivace. Par ailleurs, en pleine Belle Epoque, le tourisme se développe sur la côte. Le train arrive jusqu’à la Baule.

«Chaque matin pour me rendre au Petit Maroc, je dois franchir un pont mobile qui se lève et s’abaisse, non pas bien sur à mon intention mais à celle des bateaux qui ont choisi d’entrer dans un rectangle d’eau, le «bassin»; or dès que je pénètre sur cette espèce d’île, je découvre un réseau de cafés - l’un d’eux se nomme le Pont levant - qui pourrait boucler l’infime traversée inaugurée par le passage du pont.»

Guérande, La Baule développement Saint-Nazaire touristique développement de la Estuaire faible tirant d’eau ville et du port

St Brévin développement touristique

Nantes développement le dos au port

r Pa

is

rique

Amé

César Aira, Nouvelles impressions du Petit Maroc, 1991.

3.Evolution historique: début du XXe siècle . 28


29


Pendant la Seconde Guerre Mondiale, pour son rôle stratégique Saint-Nazaire est désignée par l’organisation Todt pour accueillir une base sous-marine, pièce maîtresse du Mur de l’Atlantique. Face à l’impossibilité de détruire ces mètres-cube de béton armé, les Alliés décident de l’isoler et bombardent la ville. En 1945, elle est détruite à 85%. Elle est rapidement reconstruite suivant un plan directeur de Noël Le Maresquier. Dans une vision moderniste et hygiéniste, issue de la Charte d’Athènes, la ville nouvelle se développe parallèlement à son port et non plus perpendiculairement. Une zone verte est mise en place pour mettre le port à bonne distance de la ville. Pour la première fois, la ville se développe donc tournant le dos à la mer et au port. A la même époque, le port perd son statut prestigieux de tête de ligne pour l’Amérique Centrale et du Sud, au profit du Havre. Le port de commerce décline alors. En revanche, le port industriel prend son essor.

«Elle était tellement différente, comme les autres villes de la Reconstruction, des villes traditionnelles, des villes historiques, que l’on était un peu déboussolé pour y retrouver des valeurs que l’on ne connaissait pas auparavant.»

Guérande, La Baule pôle touristique Saint-Nazaire reconstruction de la ville, développement du port industriel, déclin du port de commerce, Estuaire lien rompu envasé, dégradé

Nantes métropole nationale fermeture partielle du port s Pari

St Brévin pôle touristique

Joël Batteux, maire de Saint-Nazaire, discours d’ouverture du colloque du CAUE44, 2006.

4.Evolution historique: 2e moitié du XXe siècle . 30


31


A la fin des années 1980, sous l’impulsion de Joël Batteux, maire de la ville, qui a toujours cru à l’urbanisme comme moyen de levier urbain, la ville opère un retour vers son axe originel. Le centre mono-directionnel s’ouvre vers l’est et le port. A travers le Projet Urbain Ville-Port 1, dirigé par Manuel de Solà-Morales et l’Atelier Ruelle dans les années 1990, puis Ville-Port 2, de Bernardo Secchi et Paola Vigano dans les années 2000, la ville renoue avec le port. La base sous marine est progressivement réappropriée et accueille désormais des grands équipements publics. La ceinture verte du plan originel rapidement transformée en zone d’entrepôts est réurbanisée, par du logement, des commerces et des équipements publics à l’échelle de l’agglomération. Conjointement, un retour vers l’océan s’opère: les espaces publics sont réaménagés, les zones délaissées réurbanisées... Ainsi, la ville semble retrouver progressivement son équilibre perdu.

«A y regarder de plus près, on voit comme SaintNazaire peu à peu se pose, comme le temps se dépose sur ses façades et ses docks, comme l’océan l’a faite sienne à présent qu’elle ne tourne plus le dos à ses plages qu’elle, la laborieuse, regardait jadis de travers.»

Guérande, La Baule pôle touristique Saint-Nazaire restructuration de la ville vers le port, pôle industriel et technologique, Estuaire déclin des transatlantiques. Nantes matrice de la métropole pôle politique et économique, réouverture du port r Pa

is

St Brévin, Pornic pôle touristique

Jean Rouaud, préface in C. Nicol et C. Macel, SaintNazaire, ville maritime et portuaire, 2004.

5.Evolution historique: fin du XXe siècle/début du XXIe siècle . 32


33


L

es travaux menés lors des projets Ville Port 1 et Ville Port 2 se sont concentrés sur des zones entre la ville et le port au potentiel plus fort et à la situation plus urgente. Mon périmètre de travail n’a ainsi été encore que très peu réaménagé et révèle une potentialité forte. Tout d’abord, le bâti issu du plan de reconstruction des années 1950, bien que rigide et fortement organisé, révèle des failles. De nombreux bâtiments sont désaffectés ou appelés à être démolis dans un futur proche. Plusieurs rues sont également bordées de garages fermés. Par ailleurs, le site est parsemé de zones ouvertes et inoccupées ou mal exploitées. Les terre-pleins portuaires sont clos au public et inexploités sauf occasionnellement. La Place du Commando, à la situation privilégiée ouverte sur l’océan, est livrée au stationnement.

L

es caractéristiques même du port révèle aussi des potentialités encore mal exploitées. Ainsi les attaches à la terre des jetées d’une part et des ponts d’autre part sont souvent mal définies. Seules quelques façades et fronts urbains forts (le Building, la porte-écluse) tiennent clairement l’espace. Les autres sont ouverts et fuyants, souvent encombrés de petites installations anecdotiques ou livrés au stationnement sauvage.

L’avant port est.

La zone centrale des terre pleins portuaire, close au public.

Le plan de reconstruction est articulé autour de grands îlots de logements mitoyens à 2 ou 3 niveaux La Place du Commando, utlisée comme parking.

Les cœurs de ces îlots ont la particularité d’être communs et ouverts sur la rue. Ces espaces sont devenus avec le temps délaissés et réduits au statut de servitude technique.

Les garages de la rue l’Ancien Hotel de Ville.

34


entrepôts portuaires entrepôts frigorifiques

3

Place du Commando sous-prefecture

vieux môle

1

jetée ouest

2

Légende. bâtiments désaffectés ou transférés sous peu, garages espaces vides, non-valorisés

jetée est

potentiel en «dent creuse»: coeurs d’ilôt délaissés attaches des jetées: zones vagues, mal définies attaches des ponts: zones vagues, mal définies attaches des ponts: façades, fronts forts définissant l’espace

Etat des lieux des potentialités du site . 35


4. Le projet urbain Ville-Port: Saint-Nazaire renoue avec son port en trois actes.

E

n 1983, Joël Batteux, adjoint à l’urbanisme, est élu maire de la ville et est réélu continuellement depuis8. A cette époque, la crise frappe l’industrie nazairienne de plein fouet. Ce jeune maire a alors l’heureuse intuition de croire en l’urbanisme comme outil de levier pour sa ville. Ce leitmotiv est resté au cœur de sa politique durant ses 5 mandats successifs. Très vite, accompagné de l’urbaniste Laurent Théry, il lance le retour de la ville vers son port, insuffle une rotation à angle droit de son plan rigide pour lui faire retrouver son axe originel. Ce retour s’opère par la réappropriation de la base sous-marine, alors honnie par la population et sa prise en compte en tant que monument nazairien à part entière.

L

ancé en 1994, le projet urbain Ville-Port 1 est l’aboutissement de cette réflexion. Les objectifs sont clairs: «réorienter le centre ville de la reconstruction vers le port et l’estuaire, revaloriser le quartier portuaire en y implantant une mixité de fonctions urbaines, économiques, touristiques, culturelles et identitaires.»9. Le catalan Manuel de Solà-Morales est alors retenu. Sa stratégie est simple, mais inédite: domestiquer la base sous-marine, «chercher à la dynamiser plutôt qu’à la dynamiter, transposer ses handicaps en atouts pour la mettre au service du projet, pour en faire le premier trait d’union entre la ville et le port, un trait d’union emblématique entre passé et avenir…»10. 36

La base symbolisait à elle seule, la rupture de l’histoire urbaine, le récit inachevé. Continuer à écrire l’histoire de la ville imposait de dialoguer avec ce symbole. Ce postulat rencontra d’abord de vives réactions de la part de la population et des acteurs locaux, qui ont toujours été intégrés dans le processus urbain. Le premier acte fort, bien avant le réel début des travaux, fut de lancer une passerelle à l’assaut du toit de la base. Les protestations furent vite balayées par un engouement populaire: en 2 mois, plus de 70 000 personnes visitèrent les lieux, découvrant ainsi un nouveau visage de leur ville. L’histoire urbaine était de nouveau en marche. L’accent fut d’abord mis sur la problématique du tourisme, afin d’opérer une diversification des activités vitale face à la crise des industries. Escal’Atlantic vaste musée consacré à l’histoire des transatlantiques fut le premier acte de cette réappropriation de la base. Il contribua à créer une réelle nouvelle destination portuaire. Les espaces publics alentours, nouvellement aménagés, commencèrent alors à accueillir des événements culturels d’ampleur.

mercial le Paquebot et la base) dans une nouvelle centralité étirée vers le port, conforter la vocation culturelle de la destination portuaire, poursuivre la réappropriation du quartier par la programmation de logements, poursuivre la reconversion des lieux identitaires et la requalification des espaces portuaires. Bernardo Secchi et Paola Vigano remportèrent le concours. La dimension culturelle cette fois articula le projet: le VIP, salle de musiques actuelles, et le LIFE, «lieu international des formes émergentes» investirent la base, un théâtre fut projeté. A mi-chemin entre la base et l’avenue de la République, un centre commercial, le Ruban Bleu, est venu créer la liaison urbaine et commerciale qui faisait encore défaut. L’urbanisation s’est poursuivie par la démolition de nombreux entrepôts désaffectés, de faible intérêt, remplacé par 850 logements. Enfin, La même attention a été portée à la qualité des espaces publics.

E

n 2002, la municipalité lance la concertation Ville Port 2. Le travail s’étend cette fois entre l’Avenue de la République, axe majeur et la base sous marine, dans cette frange entre ville et port. La dynamique est prolongée à partir de 4 nouveaux objectifs: relier les 2 pôles d’attractivité du centre ville (le pôle com-

son mandat actuel, courant jusqu’en 2014 sera, il l’ annoncé, le dernier. 9 10 BATTEUX Joël, Nantes/Saint-Nazaire: «Faire du projet urbain, un espace de création et de narration», in New World, New Challenge: 12th International Conference Cities and Ports, 15-19 Novembre 2010, Buenos Aires, Argentine, 2010. 8


37


V

ille-Port 1 et Ville-Port 2 se sont donc développées sur les zones entre l’Avenue de la République, axe directeur de la ville de l’après-guerre et la base sous-marine; au nord de ma zone de travail, ne faisant que l’effleurer. Il est évident que c’est dans ces zones que la ville était la plus critique à la fin des années 1980. Bien que comportant des lacunes, mon aire d’étude faisait partie de la ville constituée, viable et était donc non prioritaire. Par sa position de «fin de ville» avancée dans l’estuaire, il est logique que le travail urbain se soit déroulé à partir de l’Avenue de la République pour descendre le coteau jusqu’au port, et n’ait donc pas encore atteint le Petit Maroc.

L

oin d’être délaissé, le Petit Maroc verra bientôt son visage modifié. En effet, le périmètre de mon site de travail correspond, à quelques exceptions près, à la dernière étape du programme: Ville-Port 3. Lors d’un long entretien téléphonique, riche en informations, Sophie Minssart, architecte-urbaniste de l’ADDRN (Agence du Développement Durable de Région Nazairienne, maîtrise d’ouvrage de VillePort) m’a donné les principales clés du projet: le programme en réflexion, les études en cours et à venir, les différents souhaits des acteurs du projet... Elle m’a confié que les lignes directrices de ce programme urbain sont actuellement en réflexion. La publication et l’organisation du concours devrait être effectives à l’horizon 2015. Ainsi, en m’intéressant à ce site et en le choisissant dès le mois de septembre dernier pour y travailler, je répondais,

38

sans le savoir, à une demande non encore formulée de la maîtrise d’ouvrage. Si les deux premières étapes consistaient en une reconquête de friches industrielles, Ville-Port 3, s’implantant, on l’a dit, dans une zone urbanisée plus ou moins viable, traitera quant à elle du rapport entre la ville et le port autonome actif, de l’interaction entre vie urbaine et vie portuaire. De l’essence même de la ville Saint Nazaire, donc. En termes programmatiques, Ville-Port 1 a été axé sur le tourisme, Ville Port 2 sur la culture. Pour compléter l’ensemble, Ville-Port 3 est logiquement tourné vers l’économie et le logement. Dans cette optique, une étude est menée actuellement en vue de regrouper dans la zone est de l’avant port, les activités liées au port autonome: La capitainerie du port et le pôle national de formation des sauveteurs en mer de la SNSM pourraient y être installés. De même, la reconversion de l’ancienne usine élévatoire en Centre d’Interprétation et de Valorisation de l’Estuaire de la Loire est étudiée. Cet équipement se veut être la tête de réseau des équipements ligériens qui rythme le cours du fleuve. Le départ programmé de la salle polyvalente Jacques Brel, vers une des alvéoles de la base sous-marine, libère le plateau des entrepôts portuaires. Par ailleurs, dans une volonté d’attirer des créativités d’entreprises, l’ADDRN étudie actuellement la faisabi-lité d’une structure d’innovation d’entreprises en lien avec les industries implantées et les acteurs culturels.

L’accent n’est donc pas mis sur les équipements publics culturels, l’offre étant déjà suffisante de l’autre coté du bassin. Un rééquilibrage entre les deux rives du bassin serait pourtant souhaitable. Ainsi, outre le logement dans la partie centrale, sur le rocher, la réorganisation des activités portuaires sur l’avant-port est, le plateau du Petit Maroc, actuellement occupé par les entrepôts et halles sera plutôt dévolu à un espace public de qualité. Pour Sophie Minssart, «l’idée est de maintenir suffisamment d’espaces publics, pour un lieu à la fois culturel, festif et nautique.». Il s’agirait de «mettre en valeur la dimension publique et festive , réveiller la vie et l’animation quotidienne par une mixité de fonctions attractives. Tout en cultivant sa singularité, son paysage, son ambiance.»11. De plus, un enjeux de loisir, de promenade par l’espace public se révèle judicieux. Le front de mer réaménagé et redécouvert par les Nazairiens en 2010 trouverait ici son aboutissement logique.

M

on travail urbain vient donc précéder une consultation publique prochaine et se nourrit, en partie, des demandes, encore à l’étude, de la maîtrise d’ouvrage.

MINSSART Sophie, in Place Publique, Hors-série: Saint-Nazaire Ville-Port: l’histoire d’une reconquête, 2010. 11


L’avant port Est et l’usine élévatoire: Ville-port 3 remodelera prochainement ce paysage . 39


40


PARTIE II. LA FORME D’UNE VILLE. conception urbaine.

41


La forme d’une ville fait référence ici 12 au roman de Julien Gracq, dont l’œuvre littéraire est imprégnée de sa passion pour la géographie. Ecrivain ligérien, s’il en est, il a fait de son fleuve natal une figure centrale de nombre de ses écrits. Dans cet ouvrage autobiographique, le vieil homme qui évoque ses souvenirs d’enfance, dessine en arrière plan le portrait d’une ville qu’il a connu et qu’il a depuis vu changer: Nantes. Malgré la sousjacence de cette figure, la cité ligérienne n’en est pas moins le personnage central. Ma Forme d’une ville dépeindra le Petit Maroc, sa forme actuelle et son évolution envisagée. Les écrits de Julien Gracq ont nourri, depuis longtemps déjà, ma culture urbanistique, et c’est donc naturellement que je voulais alluder ici à celui que Saint-Nazaire «touchait jusqu’à l’exaltation» 13.

1. Les 3 figures urbaines en présence: un tracé urbain conséquence de l’histoire du site.

L

’analyse historique, géographique et sociologique menée préalablement au travail de conception urbaine, ainsi que les nombreux moments passés à arpenter le lieu pour en capter l’esprit, en comprendre le sens m’ont amené à discerner dans ce site particulier trois «formes d’une ville», trois facettes du site qui dialoguent et se nourrissent les unes les autres. Elles sont le fruit de l’histoire même du site. En effet,

42

le noyau historique de la ville, coupé tragiquement en son milieu par le percement de l’accès sud, s’est développé en deux entités distinctes, d’autant plus depuis la reconstruction qui n’a suivi en rien le plan originel. Pourtant, un esprit toujours présent, une impression subtile plane et unie ces deux formes urbaines. La troisième est constituée du plateau du Petit Maroc qui, lors de la naissance du port, a été formé du remblaiement artificiel de la vasière et est venu s’arrimer au rocher primitif.

C

es trois entités urbaines distinctes mais affiliées, entretiennent toutes une relation à l’eau différente. Au fil des siècles, de nombreux écrivains ont évoqués l’impression de ville flottante à propos de Saint-Nazaire. La ville est «mal ancrée au sol, prête à céder à je ne sais quelle dérive sournoise» pour Gracq14. Paul Louis Rossi évoque la sensation d’une «Ville Flottante qui se déplacerait sans cesse, le long de l’estuaire, dans l’espérance un jour de gagner le large»15. Pour le collectif du Bureau de la Main d’Oeuvre Indigène, «Saint-Nazaire cultive un joli jeu: celui du détachement. La ville elle même [est] prête à se détacher du continent, à larguer ses amarres, lever l’ancre.»16. Paul Nizan, quant à lui, dit d’elle qu’elle «s’agitait de son mieux au dessus de la plaine lisse des eaux»17.

S

elon mon appréciation, cette impression de ville flottante est la plus évidente dans la partie habitée du Petit-Maroc. Sa construction sur le rocher pourrait laisser penser au premier abord à un ancrage fort. Pourtant, il n’en est rien. Le fait qu’elle soit la partie de la ville la plus avancée et son statut d’île

artificielle qui peut à tout moment larguer ses pontsamarres l’emportent. Par parallèle, la partie ouest du site d’étude, par son attache au plan de reconstruction et son arrimage au côteau pourrait être appelée Ville Ancrée. Enfin, les terres pleins portuaires seront eux désignés par le terme d’Estran Urbain: par leur planitude qui laisse penser que la mer s’est simplement retirée et reviendra dans quelques heures d’une part, mais également par l’impression qui en émane qu’elle peut s’animer alternativement par l’estuaire et le bassin, qu’une «vague» viendrait créer l’événement, tantôt venant des eaux estuariennes, tantôt de celles intérieures immobiles.

C

e constat, issu de l’analyse, a dressé les grandes lignes du projet urbain. A partir de ces trois formes urbaines, le parti-pris a été de les développer, de cultiver leur esprit propre, mettre en valeur leur identité individuelle, dans un premier temps, puis d’ensuite travailler leur relation, les faire dialoguer, par leurs différences et ce qui les lient, les intégrer dans un continuum urbain. En quelque mots, cultiver l’identité au cœur et ouvrir les contours, faire dialoguer les franges.

GRACQ Julien, La forme d’une ville, Paris, José Corti, 1985. GRACQ Julien, Pour Galvaniser l’urbanisme, in Liberté Grande, Paris, José Corti, 1945. 15 ROSSI Paul-Louis, La voyageuse immortelle, Bazas, Le temps qu’il fait, 2001. 16 Bureau de la Main d’œuvre Indigène (collectif), Guide Indigène de (dé)tourisme de Nante-s et Saint-Nazaire, Nantes, A la criée, 2009, p 47. 17 NIZAN Paul, Antoine Bloyé, Paris, Grasset, 1933. 12

13 14


La Ville Ancrée .

La Ville Flottante .

L’Estran Urbain .

Les 3 entités urbaines . 43


1. La Ville Ancrée.

A

ncrer, c’est stabiliser, fixer solidement. Un élément ancré, est lié fortement à ce à quoi il est ancré, par ce qui l’ancre. Un bateau, par l’ancre est rattaché au rocher, au fond marin, mais surtout à une plage, une anse, une baie, un havre, un port. Un paysage donc. De la même façon, une ville ancrée est fixée «géologiquement» à son site, mais surtout intégrée à un paysage, un territoire. La Ville Ancrée développée ici s’ancre donc sur le rocher où se tenait la ville historique, mais surtout se rattache à la ville entière, par le biais de son plan de reconstruction orthogonal et homogène.

L

’attache a été amplifiée, dans le projet, grâce à la mise en place de trois situations d’ancrage, à trois échelles.

Un ancrage lointain, tout d’abord, par la mise en valeur de certains axes rectilignes qui traversent la ville et trouvant là leur aboutissement, arrêté par la mer, seule. Ainsi, certaines démolitions pour prolonger les perspectives ou les élargir ont été jugées nécessaires. Des «anomalies» de la grille orthogonale globalisante de la reconstruction ont été corrigées. Inspiré du travail de l’Atelier Ruelle auparavant réalisés sur les alentours du site, l’espace public est pensé pour ouvrir ces perspectives de la façon la plus directe possible, de venir amplifier le caractère rectilignes de ces avenues aboutissant sur la mer. 44

Ensuite, à l’échelle du quartier, un ancrage séquentiel s’installe. Il s’opère par un continuum d’espace public, liés par les coins. Ainsi, dans un modèle de «places à l’italienne», le système de places liées par la diagonale, déjà en place est développé. Depuis le pôle actif du Ruban Bleu, qui relie au centre de la reconstruction, l’espace public est donc «tiré» pour mener naturellement le passant jusqu’au port. Cette attache par la continuité avec l’existant est développé également grâce à la question du végétal. Le site est lié par le front de mer aux deux espaces verts majeurs de la ville: le jardin des plantes et le parc paysager. L’idée a donc été de continuer ce «peigne végétal» qui, à partir du front de mer, s’immisce dans l’urbain à quelques points choisis. La Place du Commando et la zone allant de l’avantport ouest à la base sous-marine sont aménagées dans cet objectif. Le mouvement est d’ailleurs dans le dernier cas, bidirectionnel puisque le végétal avance autant de l’avant port vers la base que l’inverse, puisque la volonté a également été de faire descendre le Jardin du Tiers-Paysage, installé depuis 2009 par Gilles Clément sur le toit de la base, vers la mer. Enfin, un troisième ancrage, local, vient achever la stratégie. En effet, des émergences architecturales, qu’elles soient existantes comme le Building, ou projetées, crée des centralités locales. Elles viennent asseoir la ville, lui donner un poids, une attache. Par leur présence forte, ces éléments architecturaux individualisés structurent l’espace public, les déplacements, les perspectives et viennent combler les lacunes de zones actuellement trop vagues, mal définies.

Ces émergences participent également à l’attache au lointain puisqu’elles sont situées à l’aboutissement des axes développés.


maquette d’étude: l’ancrage lointain.

maquette d’étude: l’ancrage séquentiel, par l’espace public.

maquette d’étude: l’ancrage local.

La Ville Ancrée . 45


2. La Ville Flottante.

L

arousse définit le verbe flotter en ces termes: «rester à la surface, ne pas couler», mais aussi, moins littéralement «être imprécis, sans contours nets»18 .

Cette zone du site possède une limite forte vers la Ville Ancrée mais propose une relation totalement différente sur ses autres franges. En effet, que ce soit, au sud, vers l’avant-port, à l’est, vers l’estuaire, au nord, vers les terre-pleins de l’Estran Urbain, les limites sont vagues, s’ouvrent, par l’horizontalité, vers le paysage, et semblent se déliter dans ces alentours aqueux. La limite vers la Ville Ancrée est nette, certe, mais les deux entités sont mises à distance par l’écluse; l’eau encore, donc. Les ponts constituent les amarres de cette pièce de terre s’élançant dans l’estuaire. Qui plus est, ces franchissements étant tournants ou levants pour permettre le passage des bateaux, le Petit Maroc, peut se retrouver véritablement en situation d’île artificielle: de Ville Flottante. A Saint-Nazaire, le terme de ville flottante a également un autre écho: les paquebots, ces bâtiments navaux où une société vit en autarcie le temps d’une traversée. Une Ville Flottante19 est d’ailleurs le titre d’un roman de Jules Verne, où le héros raconte sa traversée entre Liverpool et New-York, à bord du paquebot le Great Eastern, et décrit ce condensé de civilisation occidentale présent dans l’espace clos du bateau.

46

L

a proposition urbaine est animée du même esprit que la Ville Ancrée: cultiver le coeur et ouvrir les franges. Ainsi, par le tracé urbain existant la figure de la citadelle se dessine. Les façades continues et hermétiques sont développées. Coté estuaire, le bâtiment existant, construit il y a peu par l’agence Reichen&Robert est surelevé à certains endroits, passant de 3 niveaux, à 6. Un meilleur dialogue s’opérera avec le paysage, vers l’estuaire et le coeur d’ilôt sera enrichi. Celui-ci, large espace commun, semi-abandonné sera réanimé par un jardin aménagé et une crèche.

A l’entrée de la citadelle, coté ville, la place est redynamisée par le commerce et surtout refermée dans son tracé urbain originel par une tour de logement de 12 étages, venant dialoguer avec le Building. Dans cette proposition urbaine, l’image du paquebot est primodiale. Ainsi, la citadelle serait le corps du paquebot, l’avant port, par sa forme effilée élancée vers l’eau en constituerait le pont avant et la proue. La tour de logement serait une des cheminées du paquebot.

Les alentours de la citadelle, actuellement encombrée de garages, hangars, stockages divers, de barrières, de clôtures sont lavés, submergés par une vague atlantique, pour constituer par l’espace public, un vide structurant et dynamique. Ainsi la zone de l’avant-port est, placée stratégiquement en avancée dans l’estuaire, constitue une vertitable figure de proue de la ville. Elle est pourtant actuellement totalement délaissée pour cette même raison: la figure de proue s’est transformée en «fin de ville». La gare maritime projetée la transformera en une nouvelle entrée et redynamisera donc le secteur. Cette infrastructure est le coeur du pôle qui regroupera ici différents services liés à la vie du port: la capitainerie, le pôle de formation de la SNSM, le Centre d’Interprétation et de Valorisation de l’Estuaire de la Loire, une antenne de l’office de tourisme, des bars et restaurants...

Le Petit Larousse Illustré, Paris, Editions Larousse, 2013. VERNE Jules, Une ville flottante, Paris, Pierre-Jules Hetzel, 1871.

18 19


maquette d’étude: la citadelle.

maquette d’étude: le vide au limites vagues, structuré par la citadelle.

maquette d’étude: la figure du paquebot.

La Ville Flottante . 47


3. L’Estran Urbain.

U

n estran, en géographie, est constitué de la zone cotière, découverte à marée basse et recouverte à marée haute. Il est donc animé par un flux cyclique et régulier qui en régit la vie, les usages, en redessine les contours, l’apparence, la forme, les couleurs etc. Un estran est donc une zone figée, immobile, animée, seulement par un environnement extérieur qui l’actionne. Les terres-pleins portuaires qui constituent l’Estran Urbain s’y assimilent par la planitude et l’horizontalité à fleur d’eau du plateau bitumé parsemé d’entrepôts et halles s’y posant légérèment, presque sans fondations. Ce site, souvent désert et innocupé, semble donc provisoirement découvert et prêt à être envahi par une vague, venant alternativement de l’estuaire ou du bassin. Les vagues qui animent cet espace sont avant tout humaines: les nazairiens l’investissent lors du festival des Escales, de la Folle Journée, de courses nautiques ou autres animations associatives. La ville rigide, normée et conformiste de la reconstruction trouve dans cet espace le lieu nécessaire à sa respiration naturelle, le lieu où elle peut, un instant, imploser dans une folle étincelle. Je suis personnellement convaincu que de tels lieux de rassemblement sont vitaux à la vie d’une ville. Le Champs de Mars à Paris, le Circo Massimo à Rome, l’Esplanade Saint Jean d’Acre à la Rochelle, l’Esplanade des Chantiers à Nantes répondent à ce besoin de la population urbaine à se rassembler spontanément en masse, le temps d’un événement sportif, culturel, d’une manifestation etc.

48

Le plan s’implantant sur l’Estran Urbain est conçu dans cet esprit.

L

a grandeur du site, les perspectives lointaines qui s’y ouvrent, le rapport au Grand Paysage, et à la base sous-marine, le tissu disparate et ouvert du port appellent, par ailleurs, une échelle autre que celle des deux précédentes Villes, plus grande, plus ouverte, faisant appel à un imaginaire plus lointain C’est lors d’une tempête hivernale sur la côte bretonne que l’image du rocher s’est imposé dans mon esprit pour répondre à cette question. Le rocher est avant tout, une forme minérale, organique, totale, immobile et immuable. Il est animé et rendu vivant par les marées qui lui apportent algues, crustacés ou laisses de mer, le vent qui y dépose sable, écume, et graines de plantes maritimes, les hommes qui y pêchent et s’y promènent...

A

insi, le projet propose une nappe d’espace public, ouverte et continue, sous laquelle vient se glisser du programme. Cette nappe vient effleurer, enveloppe ou intègre les trois halles en bois, et l’écomusée existants. Les références architecturales ayant nourries ce projet sont multiples et très larges. Elles vont du travail d’agences nordiques (Meccanoo, BIG, ou Snohetta) à la Villa Malaparte de Libera, en passant par le Potager du Roy de La Quintinie, pour son double niveau d’usage, ou l’habitat trogodytique de Cappadoce.

Le programme qui y prend place est à prédominance publique. La «Maison des Escales», vient s’installer le long du bassin. Elle présentera les travaux de la MEET par une antenne de la médiathèque dédiée au thème du voyage, abritera les bureaux de l’association des Escales, et des espaces associatifs investis lors des courses nautiques, d’expositions etc. La partie centrale sera dédiée à l’enseignement universitaire technique (IUT). En lien avec ce programme, un pôle d’innovation technologique s’installera dans la halle au nord. Elle répond à une volonté de l’ADDRN de créer une structure d’innovation entrepreneriale, s’appuyant sur les industries historiquement ancrée: les Chantiers de l’Atlantique, Airbus... La partie orientale du Rocher, tournée vers l’estuaire est dédiée au loisir et au sport, grâce à l’implantation de thermes marins, et d’une salle de sport. Enfin, un théâtre en plen air, vient s’ouvrir sur les installations portuaires au nord-est. De ce Rocher, émerge dans son extrémité sud-est une tour de 72 m, dédiée au logement. Le paquebot esquissant la Ville Flottante est poursuivi ici: la tour en est sa seconde cheminée, et le Rocher, le pont arrière, traditionnellement dédié à la détente.


maquette d’étude: le Rocher.

maquette d’étude: des bâtiments-objets, unis par le Rocher.

L’Estran Urbain . 49 maquette d’étude: mise en rapport d’une architecture organique, ouverte et fluide avec des constructions fortes, géométrisées et fermées.

xxxxxxx . 49


4. La mise en relation des 3 Villes par leurs franges.

C

es trois entités à l’identité propre mise en avant dans le plan urbain sont reliées, «cousues» entre elles, grâce au travail porté sur deux axes.

T

out d’abord, l’axe urbain de l’Avenue De GaulleBoulevard Coty-Avenue de la Vieille Ville, descendant de l’hotel de ville et constituant l’unique ouverture vers le port du plan de reconstruction, les relie par l’intérieur. Cette branche est du trident du plan de reconstruction, a été retravaillée par l’Atelier Ruelle, dès les années 1990 et le début de sa longue intervention sur les espaces publics de la ville. D’axe automobile délaissé, il a donc été requalifié en boulevard urbain, animé par les commerces qui s’y sont naturellement installés. Cependant, son existence demeure quelque peu artificielle, coupée de son contexte immédiat et stoppée net à quelques pas du bassin portuaire. Le travail sur cet axe a donc principalement constitué à l’ouvrir latéralement au quartier de la Ville Ancrée, et à requalifier son extrémité, donner une réelle valeur à cet achèvement d’avenue. Il en résulte ainsi la démolition de certains batiments de peu de valeur ou la requalification d’espaces publics non valorisés qui ont permit d’ouvrir les perspectives vers la mer ou à l’inverse vers l’arrièrepays.

Les deux tours «cheminées de paquebot» de la Ville Flottante et l’Estran Urbain, cadrent la perspective 50

sur la mer depuis la Ville Ancrée. Elles permettent également, combinées au bassin creusé à l’intérieur de l’Estran Urbain et à la redynamisation de place par le commerce, d’orienter cet axe à travers la citadelle et la faire aboutir naturellement sur l’avantport, centre d’économie, d’activité, de transport et de loisir portuaires, organisé autour d’une place.

A

u contraire, le Boulevard du Front de Mer, axe d’espace public, relie les trois entités en les enveloppant par le pourtour. Cet axe est développé parséquences d’espace public, en «pas japonais» s’appuyant sur des infrastructures existantes. Ainsi de la Ville Ancrée à l’Estran Urbain, se succèdent, le parvis de la sous-prefecture, la terrasse surelevée de la Place du Commando, l’aire de jeux existant sur la plage, le restaurant et le jardin submersible de l’avant-port ouest, le Centre d’Interprétation et de Valorisation de l’Estuaire de la Loire, l’espace public de l’avant-port est, la gare maritime, la halle de l’estuaire, et s’achevant sur le Rocher par le théâtre de plein air ouvert vers le port. La stratégie mise en application à propos de cet axe constitue donc en un parcours piéton orientant naturellement le passant vers ces espaces de la ville qu’aujourd’hui il n’arpente pas ou peu.


Un axe urbain aménagé mais souffrant d’un achèvement vague.

L’avant-port ouest: lieu du futur jardin submersible

Un front de mer délaissé.

Les axes unificateurs . 51


L

ors de la conception de ce projet urbain, la question de l’identité du lieu a été centrale. Mon intérêt pour le thème du port, son tissu urbain et l’imaginaire qu’il suscite, le plan et l’architecture de la reconstruction caractéristique du site m’a intimement poussé à comprendre le lieu et à y concevoir un projet s’y insérant avec respect et volontairement référencé, sans tomber dans la simpliste copie historico-pittoresque toutefois.

52

Il en résulte, dans les Villes Ancrée et Flottante, une intervention par touches: un «urbanisme-acupuncture», s’insérant le tissu existant silencieusement, sobrement, sans détonner avec le quartier. L’esprit est volontairement différent dans la zone de l’Estran Urbain. La possibilité d’une tabula rasa de l’existant, l’échelle des éléments alentours et le programme implanté permettaient d’y développer un projet d’une envergure autre. L’échelle, le dessin

urbain, la perte de repères habituels causée par la non-distinction entre le bâtiment et l’espace public crée un évènement dans la ville. Suscitant la curiosité et porteur d’une identité caractéristique, il devrait être vite appréhendé par les nazairiens et entrer dans la mémoire collective, au même titre que la base sous-marine, les grues des Chantiers de l’Atlantique ou le pont haubané.


De ce Rocher, élément identitaire s’il en est, émerge la plus haute des tours «cheminées de paquebot».

E

lle est l’objet du volet architectural de ce Projet de Fin d’Etude. Elle tire son intérêt principalement de sa position qui offre des potentialités intéressantes. Elle se révèle en effet être un possible centre de gravité

du plan urbain, dialoguant avec les trois entités urbaines à la fois: géographiquement à la transition entre la fluidité organique de l’Estran Urbain et la citadelle de la Ville Flottante, elle se situe à l’aboutissement de la perspective urbaine de la Ville Ancrée. Cette relation aux deux autres Villes s’opère également par le dialogue qu’elle entretient avec les autres émergences du site (le Building, et la deuxième tour), qu’elle domine par la hauteur.

Issue du Rocher, elle entretient un rapport intéressant, avec lui, par sa verticalité. Cette dernière s’inscrit également dans une relation avec les horizontalités fortes caractérisant le site: la base sous-marine, le bassin, l’estuaire, le pont... Une verticalité s’avère donc, il me semble, judicieuse à cet endroit, pour caractériser un quartier dans la ville mais surtout pour révéler les éléments forts constituants celle-ci.

élévation conceptuelle: analyse du site et esquisse de projet . 53


54


PARTIE III. UNE CHAMBRE EN VILLE. réflexions architecturales.

55


Le titre de cette ultime partie se réfère au film de Jacques Demy, datant de 1982. L’œuvre de Demy, cinéaste nantais, est habitée d’idées, de sensations qui nourrissent également mon projet. Ainsi, le départ-le retour, celui qui partcelui qui reste, le voyage, le passage, des personnages, des activités humaines et naturelles mais aussi au sens étymologique: le port, donc, le quai, le pont transbordeur... sont récurrents dans sa filmographie. Nombre de ses films se déroulent dans des villes portuaires: Nantes pour Lola et Une Chambre en ville, Marseille pour Trois places pour le 26, Rochefort pour les Demoiselles, Cherbourg pour les Parapluies, Los Angeles pour Model Shop... Une Chambre en ville, évoque également évidemment le programme de ce projet, proposant une offre hôtelière en ville. Par ailleurs, le départ-l’absence-le retour, triptyque des Parapluies de Cherbourg renvoie autant à l’escale que propose le programme qu’aux pulsations du port.

1. Le logement sous 3 formes, une réponse aux demandes du plan urbain.

C

ette tour est dédiée au logement. Cependant elle ne propose pas une offre classique d’immeuble de grande hauteur divisé en appartements. Le logement est ici décliné sous 3 formes. La distinction s’opère quant à la question de la durée: ces trois formes entretiennent un degré graduel de la période d’usage du logement. La tour tire son nom de cette escale proposée, à la durée fluctuante.

56

U

dans les étages. une suite 4 étoiles peut donc occuper un étage bas, et une simple chambre 2 étoiles se trouver en hauteur. Cette proposition d’un «hôtel démocratique» correspond bien à l’image de SaintNazaire, bastion rouge, à l’ADN politiquement à gauche tant ces partis réalisent des scores systématiquement élevés.

Cet hôtel est conçu autour de l’idée de la mixité de l’offre, en terme de standing et donc de prix. Ainsi, j’ai pris le parti de composer mon plan à partir de 9 propositions de chambres. Elles se déclinent d’une chambre minimale de 16m², pourvue d’un lit simple à une suite de 70m², dotée d’une chambre avec lit double, d’un salon en double hauteur, d’une loggia de 15m². Il est ainsi mis en place, 3 offres équivalent à un confort 2 étoiles (chambre simple, double, triple), 3 équivalent à un niveau 3 étoiles, et 3 types de suites de type 4 étoiles. L’offre ne propose pas volontairement des suites 5 étoiles. J’estime en effet, que Saint Nazaire ne constitue pas une destination privilégiée par ce type de clientèle, et qu’une telle offre entrerait en concurrence avec la Baule, distante de 20 km et déjà dotée de trois palaces 5 étoiles.

Autour de cet hôtel gravitent d’autres programmes, à l’escale limitée dans le temps, réduite à quelques heures: un restaurant panoramique, occupant les deux derniers étages de la tour, deux bars, un accessible depuis l’espace public et dont la terrasse se développe sur le Rocher, et le second à un étage intermédiaire, et enfin, des thermes marins, implantés au pied de la Tour, dans le Rocher, coté estuaire et la halle en bois existante.

n hôtel propose une offre de logement de courte durée. Dotée de 72 chambres ou suites, la structure vient combler une lacune en offre hôtelière dans le centre de Saint-Nazaire, partiellement rectifiée par la construction d’un hôtel 3 étoiles, face à la base sous-marine, lors du projet Ville-Port 2.

Cette grande mixité de typologies de chambre permet un jeu de combinaison dans le plan et en élévation, accentué par la volonté de ne pas ségrégationner selon les prix des chambres. En effet, les bâtiments alentours étant bas, les contraintes liées au vis-à-vis sont très vite éliminées. La seule distinction entre les offres réside donc dans la surface proposée et n’est plus conditionnée par la hauteur

L

ié étroitement à l’hôtel dans son fonctionnement, une résidence hôtelière propose une escale de moyenne durée, de quelques jours à quelques semaines. Cette résidence propose 11 T1 et 11 T3. Un tel programme répond à une demande formulée par d’autres élements du plan urbain, existants ou prévus dans le projet. En effet, la Maison des Ecrivains Etrangers et des Traducteurs (ses résidences d’écrivains ou épisodiquement lors de salons littéraires), le pôle d’innovation technologique et l’université (ses séjours de chercheurs ou conférenciers), les événements culturels et sportifs (équipes techniques des courses nautiques, ou artistes et techniciens du spectacle des festivals musicaux) sont autant de programmes demandant une telle offre de logement temporaire, à proximité directe de leur site d’action.


Organigramme conceptuel: une mixitÊ dans le programme source d’interactions riches . 57


Un espace de séminaires et congrès y est lié directement. Ainsi, dans la partie basse de la tour viennent s’organiser 2 salles de réunions, un espace multimédia et un auditorium de 80 places.

E

nfin, une résidence étudiante propose une escale longue durée dans la tour. Bien qu’étant d’une durée plus conséquente, il s’agit bien encore là d’une escale et non d’une réelle sédentarisation: par son programme lié à la vie étudiante, un passage dans l’existence d’un être, le caractère non définitif du logement est clairement déclaré. Au fonctionnement et à la gestion plus autonome vis à vis des deux structures précédentes, cette résidence est évidement liée à l’antenne de l’université située en contrebas, dans le Rocher. Elle propose 60 chambres, organisées par étage autour d’une communauté de 6 chambres.

2. L’architecture du lieu: recherches, conclusions et interprétations.

M

on projet urbain a été le fruit d’une recherche et d’une compréhension de l’esprit du lieu, préalable à la création qui s’y réfère. Le projet architectural, développement logique du travail urbain, s’inscrit naturellement dans la même veine et recherche dès la première esquisse à s’intégrer dans un lieu donné, possédant une identité forte.

Cette démarche ne fut pas aisée, puisque la figure de la tour ne s’impose pas d’elle même naturellement et conserve intrinsèquement, par ses dimensions, ses 58

proportions, un caractère d’architecture-objet souvent coupé du lieu qu’elle investit. Cette impression est amplifiée selon moi par le fait que la tour est un modèle architectural relativement récent (dans sa version habitée toutefois; les tours de cathédrales ou défensives ont une dimension différente), et donc dans l’incapacité de s’inscrire dans une tradition historique et vernaculaire, d’une part, et par le faible nombre d’architectes pouvant construire des édifices de cette taille, d’autre part. Les Foster, Nouvel, Hadid, Piano ou encore Koolhas, pour ne citer qu’eux, construisent régulièrement des tours partout sur la planète et un «style international» se définit (Quelle est la différence entre la Swiss Tower de Foster à Londres et la Torre Agbar de Nouvel à Barcelone?).

A

fin d’inscrire ma tour dans son site, j’ai donc essayé de comprendre préalablement ce que pouvait être «une tour nazairienne». Une recherche théorique s’imposait donc afin de répondre à cette question: «Que signifie construire une tour dans le port de Saint Nazaire, au bord de la Loire, en Bretagne?». J’ai donc tenté de répondre à cette triple question en analysant des édifices construits afin d’en déceler les points communs et les caractéristiques générales. En ce qui concerne les tours portuaires, le parti a été pris de limiter mon analyse aux exemples de ports européens de la côte atlantique, puisque formant un ensemble cohérent.

L’étude d’exemples de tours construites à Copenhague, Hambourg, Brême, Amsterdam, Almere, Rotterdam, ou encore Bilbao m’a amené à formuler deux conclusions théoriques quant à la construction d’une tour dans un port. Tout d’abord, le travail sur la double échelle est accru par rapport à une tour classique. En effet, une tour portuaire est perceptible, dans sa totalité, depuis l’échelle humaine: celle de la rue, du piéton ou de l’automobiliste arpentant la ville, mais également, et avec autant d’importance depuis celle du grand paysage: contrairement à une tour dont la base est noyée dans le tissu urbain et les bâtiments environnants, une tour portuaire est visible depuis le lointain dans sa totalité, de la base à la cime. Un travail sur la cette double perception est donc indispensable. Par cette caractéristique, l’importance du rapport entre verticalité et horizontalité est accrue. Une verticalité, visible dans sa totalité qui plus est, entre encore plus directement en confrontation avec l’horizontalité caractérisant un site portuaire: quais, entrepôts, ponts, planéité de l’eau...


Les tours portuaires de la presqu’île de Kop Van Zuid, signées Renzo Piano, OMA-Koolhas, Alavaro Siza, Mecanoo, Norman Foster et Dam & Partners.

L’Hotel Movenpick à Amsterdam, Claus en Kaan.

Scheepvaart en Transport Collegeà Rotterdam, Neutelings Riedijk.

Ij Toren à Amsterdam, Neutelings Riedjick.

recherche: la tour portuaire . 59


L’étude des verticalité ligérienne a constitué en un recensement des tours jalonnant le cours de la Loire. Celui ci a prouvé l’existence d’un parcours séquencé cohérent s’achevant à Saint-Nazaire. En effet, de la source à Tours, existe ce qu’on pourrait appeler «la Loire des cathédrales», tant ce sont les tours et clochers des cathédrales ou abbatiales qui rythment le parcours du fleuve. A cette Loire de la religion succède celle de l’apparat: «la Loire des châteaux». En effet, de Tours à Nantes se succèdent les châteaux Renaissance, où le tufeau joue avec les reflets de la Loire: Chaumont, Amboise, Langeais, Montsoreau, Saumur, Oudon, Nantes... La «Loire industrielle», de Nantes à Saint-Nazaire vient achever le parcours. La tour LU, les grues Titan, les silos industriels et le pont de Cheviré à Nantes, la centrale thermique de Cordemais, la raffinerie de Donges, puis le pont haubané et les installations portuaires de Saint-Nazaire en constituent l’image. Par ailleurs, ce parcours cohérent en terme de fonction, l’est également historiquement. Des abbayes romanes du centre de la France au pont haubané de Saint-Nazaire de la fin du XXe siècle, en passant par les châteaux du XVIe siècle et les installations industrielles du XIXe siècle, les verticalités ligériennes suivent un parcours chronologique cohérent. Lorsqu’on sait que ce parcours ligérien est loin d’être une vue de l’esprit et est réellement emprunté dans sa totalité (développement de la «Loire à vélo», du tourisme fluvial etc...), on peut se demander comment Saint-Nazaire peut constituer le point final d’un tel parcours typologique et chronologique. 60

Une tour contemporaine mais rendant hommage au parcours historique de l’eau s’écoulant à ses pieds semblent s’imposer naturellement. En ce qui concerne, l’architecture bretonne mes recherches se sont appuyées sur la très complète encyclopédie Architectures en Bretagne au XXe siècle20. Il en ressort, aussi divers soient les typologies et programmes des édifices étudiés plusieurs caractéristiques récurrentes. L’architecture bretonne est tout d’abord simple, introvertie. Pauvre et géographiquement isolé par la position de la péninsule armoricaine, le peuple breton a peu été en capacité de créer une architecture flamboyante. Au contraire, elle se caractérise par la simplicité des volumes, des plans et des formes. Le climat peu enclin à la vie extérieure a également poussé à construire des bâtiments fermés sur euxmême, intériorisés. Le climat et la pauvreté ont par ailleurs conjointement poussé vers une architecture basse, trapue, avec des toits à forte pente. La carence en matériau permettant d’élever des bâtiments et la nécessité d’évacuer rapidement la pluie tombant d’un ciel souvent capricieux ont amené les constructeurs bretons à concevoir une architecture caractéristique. Elle est construite, ensuite, autour d’un triptyque de matériaux: le granite, le crépis blanc et l’ardoise. Rares sont les exemples dérogeant à cette règle. Enfin, cette architecture simple et modeste se caractérise toutefois par une importance du motif et de la polychromie. Il semble en effet, que la sobriété de l’architecture ait été compensée par une richesse dans le second œuvre. Une explication possible

serait l’attachement de la Bretagne à la tradition catholique. Celle-ci pour dialoguer avec une population analphabète a vite compris l’importance de l’iconographie dans ses églises. Dans cette lignée, s’inspirant également des motifs celtiques fortement enracinés dans la culture locale, le mouvement Ar Seiz Breur a développé durant l’entre-deux-guerres une recherche sur le motif et le renouveau de la culture bretonne par l’art, au sens large. De nombreux édifices du XXe siècle portent la marque de ce mouvement artistique insufflé par René-Yves Creston, peintre et ethnologue, natif de Saint-Nazaire.

BONNET Philippe et LE COUEDIC Daniel, Architectures en Bretagne au XXe siècle, Quimper, Palantines, 2012. 20


Les verticalité ligériennes: un parcours typologique et chronologique cohérent. ici, l’abbatiale de la Charité sur Loire, le château de Montsoreau et la centrale de Cordemais.

L’architecture bretonne: église de Donges, chapelle Notre-Dame de la Route et chapelle Saint Joseph.

recherches: la verticalité ligérienne et l’architecture bretonne . 61


L

es conclusions issues de ces trois questions, ont nourri la conception de ce projet, sans que celui-ci se résume à une succession de références additionnées toutefois.

Ainsi, le Rocher, socle à échelle humaine, et la proposition de deux rapports d’ancrages à ce socle: doux, du coté de la ville et fort, vers le quai et le paysage font écho au travail sur la double échelle et le rapport verticalité-horizontalité de la tour portuaire. L’horizontalité des balcons de la résidence hôtelière se réfère clairement a ceux de la Cité de l’Hermitage, HBM nantais, situé sur un promontoire pointé vers l’estuaire. Elle se veut être une septième sœur de ces petites tours. Ces lignes cherchent évidemment leur origine dans les transatlantiques. La verticalité de la façade est de l’hôtel se reflétant dans le bassin se réfère au tours des cathédrales et aux châteaux de la Loire, plongeants dans l’eau.

La verticalité ligérienne: un parcours typologique et chronologique cohérent.

L’architecture bretonne: une architecture simple, introvertie, basse et trapue, à la matérialité uniformisée, et au sens du motif affirmé.

Celle de la résidence étudiante, recouverte d’une résille métallique, répond autant au sens du motif de la tradition bretonne que de la finesse des grues et structures portuaires environnantes.

La tour portuaire: un rapport horizontale-verticale accru, une double échelle de perception.

62


Une tour portuaire: modeler le socle pour ancrer la tour .

Une tour ligérienne: des lignes hommage à la Cité de l’Hermitage.

Une tour portuaire: deux situations pour deux échelles: doux coté ville, fort coté paysage.

Une tour ligérienne: des lignes hommage aux tours des cathédrales et aux châteaux de la Loire.

Une tour portuaire: une verticalité mise en rapport avec l’horizontalité du paysage: quai, estuaire, pont, trait de côte.

Une tour bretonne: une façade-motif, référence à l’art breton.

état du projet au 15.03.13 . maquettes d’étude.

une tour s’intégrant dans un Lieu . 63


La Cité HBM de l’Hermitage, Nantes. 1938-1953: une référence forte. Ma tour se veut être leur «7e soeur», à l’autre extrémité de l’estuaire.

64


La référence aux paquebots transatlantiques toujours présente. Ici le Queen Mary II (2005), et le France (1960). Tous les deux ont été construits à Saint-Nazaire.

références . 65


3.Une tour à la présence mouvante.

U

ne fois imprégné de ces recherches théoriques, la conception du projet à proprement dire a débuté grâce à trois paroles, exprimant une même idée qui m’a intéressé au plus haut point.

J

ulien Gracq écrit en 1945, Liberté Grande, un recueil de poèmes et d’impressions diverses, contenant entre autres Pour galvaniser l’urbanisme21. Il y écrit ces mots: «Et pourtant, des villes réelles, une me toucherait encore jusqu’à l’exaltation: je veux parler de Saint Nazaire. [...]Je lui dus par un bel été, la surprise d’une de ces poétiques collusions, de ces drôles d’idées qui naissent parfois aux choses et laissent soudain interdire la pire fantaisie. par dessus les toits de ses maisons basses, la ville, en moquerie profonde, je pense, de ses dérisoires attaches terrestres, avait hissé en guise de nef de sa cathédrale absente - haute de trente mètres et visible mieux que les clochers de Chartres à dix lieues à la ronde, la coque énorme entre ses tins du paquebot «Normandie». Ville glissant de partout à la mer comme sa voguante cathédrale de tôle, ville où je me suis senti le plus parfaitement, sur le vague boulevard de brumes qui dominent le large, entre les belles géographies sur l’asphalte d’une averse matinale et tôt séchée, dériver comme la gabare sans mât du poète sous son doux ciel aventureux. Mais ce Saint Nazaire que je rêve du fond de ma chambre existe-il encore?»

Q

uelques années plus tard, en 1951, Vladimir Nabokov publie son autobiographie, Autres Rivages22. Un passage témoigne de son escale à Saint Nazaire:

66

«Au cours de l’année 1939, nous retournâmes à Paris, et, vers le 20 Mai de l’année suivante, nous étions de nouveau près de la mer, cette fois sur la côte ouest de la France, à Saint-Nazaire. Là un dernier petit jardin nous entoura, tandis que toi et moi, et notre enfant, maintenant âgé de six ans, entre nous deux, le traversions en nous rendant aux docks , où, derrière les bâtiments qui nous faisaient face, le paquebot Champlain nous attendait pour nous emmener à New-York. [...] Ce dont je me souviens réellement à propos de ce motif fleuri de style neutre, c’est de ses habiles correspondances thématiques avec les jardins et les parcs d’outre-Atlantiques; car brusquement, au moment où nous arrivâmes au bout de son allée, nous vîmes toi et moi, quelque chose que nous ne montrâmes pas tout de suite à notre enfant afin de jouir pleinement du sursaut de bonheur, de l’enchantement et de la joie qu’il allait éprouver en découvrant devant lui , réel au-delà de tout réalisme, gigantisme à ne pas y croire, le prototype des divers petits bateaux qu’il avait fait voguer de-ci, de-là dans sa baignoire. Là, devant nous, à l’endroit où une rangée interrompue de maison se dressait entre nous et le port, et où l’œil rencontrait toutes sortes de camouflages, tels que du linge de corps bleu pâle et rose dansant le cakewalk sur une corde à linge, ou une bicyclette de dame voisinant bizarrement avec un chat rayé sur un rudimentaire balcon de fer coulé, quelle profonde satisfaction ce fut de distinguer, parmis le brouillamini angulaire des toits et des murs, une superbe cheminée de paquebot, se laissant voir derrière la corde à linge comme ce que, dans une image-devinette Trouvez ce que le marin a caché -, on ne peut plus ne

plus voir une fois qu’on l’a vu.» Ainsi Gracq et surtout Nabokov, expriment une idée forte: celle d’une présence verticale au cœur de la ville qui la surplombe et est clairement visible, «mieux que les clochers de Chartres à dix lieues à la ronde», mais qui en même temps, depuis la ville, peut être cachée et brusquement, par surprise, au détour d’une rue, se dévoiler.

P

arallèlement, cette idée de présence presque théâtrale d’une tour omniprésente mais pouvant aussi disparaitre, a été formulé différemment une troisième fois: ce fut au détour d’une discussion avec Philippe Pinson, architecte-urbaniste associé de l’Atelier Ruelle, qui suit particulièrement, depuis de nombreuses années, les projets d’espaces publics à Saint-Nazaire. Il me raconta une anecdote vécue quelques années plus tôt, où se rendant le matin à Saint-Nazaire depuis la route de Nantes qui suit le sillon de Bretagne et surplombe donc l’estuaire de loin, plusieurs paquebots étaient à différents stades de constructions dans les halles des chantiers. Par le tramage régulier et la répétition de modules identifiables (les cabines), ils possédaient une skyline nette, qui participait pleinement à celle de la ville. Le soir, en repartant, un paquebot était parti en essai en mer, et avait donc déserté sa cale de construction: en quelques heures, l’image même de la ville était clai-

GRACQ Julien, Pour Galvaniser l’urbanisme, in Liberté Grande, Paris, José Corti, 1945. 22 NABOKOV Vladimir, Autres Rivages, Moscou, Editions Chekhov, 1954. 21


Un paquebot dans la ville .

xxxxxxx . 67


rement différente, son visage avait profondément changé. Rares sont les villes possédant cette capacité inédite de changement profond de physionomie dans un laps de temps si court.

N

ourri de ces trois témoignages, j’ai alors débuté l’esquisse d’une tour présentant un visage différent dans le temps, donc le déplacement. Si concevoir une tour pouvant se mouvoir dans l’espace tient encore de l’imaginaire pur, je pouvais au moins tenter d’en donner l’illusion. Pour cela, j’ai également regardé de près le travail de l’agence Mecanoo pour sa tour Montevideo à Rotterdam et d’Herzog et de Meuron pour la tour Triangle ou le projet de la Tour Phare à Paris, qui, par le biais de deux stratégies différentes ont exprimé la même idée: une tour présentant un visage radicalement différent selon le pont de vue de l’observateur. Ces tours, peuvent être très présentes, s’afficher frontalement et durement tout comme sembler disparaitre, ou être de taille beaucoup plus modeste. Ce jeu sur la perception m’a particulièrement intéressé.

D

ans cette optique, j’ai débuté mon travail de conception par la formulation de volonté de perception de la tour depuis l’espace public et ses différents axes majeur d’observation.

Depuis l’ouest, l’axe De Gaulle-Coty-Vieille Ville dégage une perspective magistrale issue du plan de reconstruction. La monumentalité de l’ouverture visuelle mérite une présence sensible à la hauteur. Cette façade se veut donc frontale, forte et affirmée, homogène. 68

Au contraire depuis le nord, que ce soit depuis le lointain et l’axe d’arrivée depuis Nantes, ou de plus près depuis le dédale que constitue les bâtiments portuaires, l’aspect de la tour se veut minimisé, fin et effilé, dans une impression de mouvement insufflé vers l’avant-port: celui du paquebot urbain, se détachant lentement de ses attaches terrestres pour gagner l’océan s’ouvrant face à lui. La façade est, répond à deux volontés de perception, issues des deux échelles de perception de cette façade. Elle sera en effet observable, partiellement par le manque de recul, depuis l’espace public proche, et dans sa totalité depuis le lointain: depuis un bateau sur l’estuaire, le pont, la rive opposée... Ainsi, elle se doit d’être très verticale, pour répondre à l’échelle des horizontales, mais doit également jouer avec l’environnement aqueux environnant. Une façade «impressionniste» dialoguant avec l’estuaire par les jeux de reflets et de lumière s’avèrerait intéressante. L’Institut des Etudes Avancées, en bord de Loire, à Nantes par l’agence Ferrier-Gazeau-Paillard ou encore le Mucem de Rudy Ricciotti, construit au plus près de la Méditerranée sont des illustrations de cette idée recherchée. Enfin, une observation depuis le sud-est, et le pôle portuaire, donc de la gare maritime, vers le nord et les Chantiers de l’Atlantique, fait appel à une vision séquencée, donnant une impression de profondeur par une multiplication de plans successifs. S’ajoute à cette volonté de profondeur, celle d’un édifice multiple, dissocié, comme une succession d’objets

construits, préalables à ceux du port visible en arrière-plan. Ces volontés théoriques sont donc à l’origine de l’esquisse.


Tour Montevideo, Kop Van Zuid, Rotterdam, par Mecanoo Architekten, 2003-2005.

IEA, Ferrier-Gazeau-Paillard architectes, Nantes, 2009.

Tour Triangle, Paris, par Herzog et de Meuron, livraison: 2017.

MUCEM, Marseille, par Rudy Ricciotti, 2013.

rĂŠfĂŠrences diverses . 69


4.Le modèle du paquebot.

O

n ne le répétera jamais assez, l’image de SaintNazaire est indissociable de celle du paquebot. La gare construite en 1955, par Le Maresquier, urbaniste de la reconstruction, est clairement dessinée comme un paquebot posé parallèlement aux rails, les références nautiques (balcons aux garde-corps filants, fenêtre rondes: hublots...) sont omniprésentes, le centre République, construit par Claude Vasconi est à peine inauguré qu’il est immédiatement surnommé par la population «le paquebot», les espaces publics cultivent cet imaginaire (on pensera par exemple aux étonnantes grilles d’arbres de l’Atelier Ruelle). Sans tomber dans l’imitation simpliste, négliger cette référence inscrite dans le génome même de la ville semblerait être une erreur évidente.

C

ette référence aux transatlantiques s’opère, en premier lieu, par les proportions. Ainsi, si la tour s’élève à 72m, ce n’est pas un hasard, hérité d’une quelconque nécessité de surface. En effet, cette hauteur est au mètre près celle du Queen Mary II, paquebot mythique, le plus grand construit à SaintNazaire en 2005 et l’Oasis, futur plus grand paquebot du monde, dont la livraison est prévue pour 2016. Par ailleurs, cette dimension renvoie à d’autres proportions du site. Le restaurant panoramique, au dernier étage, se situe à une hauteur de 68m, c’est à dire aussi celle du tablier du pont haubané, lui faisant face. La dimension 72m est également rattachée à la basesous marine, par un rapport net: la tour s’élève à 1/4

70

de la longueur de la base sous-marine, quand 1/4 de 72m, c’est à dire 18m correspond à sa hauteur.

L

e travail en plan fait également appel à l’image des paquebots. En effet, mes chambres d’hôtels se déclinent selon un niveau de confort à travers neuf typologies. Pour combiner en plan ce grand nombre de types différents, j’ai travaillé à partir d’un module minimal-type, une «cabine» de base, qui comme dans les paquebots est déclinée pour offrir une multiplicité de typologies: le module est doublé, triplé, symétrisé, pivoté etc...

L

a résidence étudiante est traitée, elle aussi, à partir d’une «cabine» individuelle par étudiant, où il peut dormir et travailler. Comme dans un paquebot, les autres fonctions de la vie quotidienne (manger, se laver, recevoir...), s’effectuent dans les espaces communs. En effet, la minimisation des cabines (même les suites les plus luxueuses qui sont souvent plus petites que dans les hôtels classiques) et la générosité dans les espaces partagés est une caractéristique propre aux paquebots. Le temps d’une traversée, on y vit en commun et généralement peu dans son propre espace individuel. Ainsi, chaque étage de la résidence étudiante est pensé comme un pont de paquebot, où les six étudiants y ayant leur chambre, vivent en communauté dans les espaces partagés: cuisine, salle à manger, salon, et chambres largement agrandissables vers l’espace de circulation.

Cette générosité dans les espaces communs s’illustre également dans les passerelles de liaison vers la tour de l’hôtel, où se trouve l’ascenseur desservant les étages. Ces passerelles de circulation sont agrandies pour devenir un réel lieu partagé, à la fonction flexible et modulable: tel un pont de transatlantique, initialement vide et inoccupé qui accueille les manifestations temporaires caractéristiques d’une traversée en mer, ces espaces peuvent à la fois être des lieux de travail commun (un table installée, face à la mer), un espace de contemplation, des salons conviviaux (deux canapés déposés là, toujours face à la vue imprenable sur l’estuaire), des lieux festifs, un espace de répétition pour un groupe de musique ou d’entrainement sportif etc... Tout comme le Rocher est l’espace où la ville de Saint-Nazaire peut spontanément s’exprimer, dans toutes ses nuances possibles, ces passerelles assurent une fonction similaire à l’intérieur de la communauté étudiante qui l’habite.


Plan du Pont n.4 du Queen Mary II, 2005.

Plan et axonomĂŠtrie de principe des cabines du futur Oasis, 2016.

Le modèle de la cabine de paquebot en plan . 71


4.L’enjeu environnemental.

L

es recherches effectuées sur la tour ligérienne ont conclu à l’existence d’un parcours chronologique cohérent, des abbayes du XIe siècle, des confins de la Bourgogne, aux installations portuaires de l’estuaire. La tour, par la conclusion qu’elle apporte au cours de la Loire appelle donc à une contemporanéité affirmée. A l’heure de la prise de conscience des changements climatiques provoqués par l’être humain et de la mutation des façons de faire vers un meilleur respect de notre environnement, une architecture qui se veut durable semble se définir comme particulièrement emblématique de notre époque. Loin de constituer maladroitement un prétexte à la mode, comme c’est malheureusement trop souvent le cas aujourd’hui, l’aspect environnemental de ce projet a été rapidement pris en compte, tout particulièrement par le biais du confort thermique et de l’efficacité énergétique. L’avis et les recommandations d’un professionnel m’ont aiguillé tout au long du projet, dans ce volet de l’architecture trop peu abordé à mon goût dans le cursus universitaire que j’ai reçu.

D

ès le départ, ma volonté de perception depuis le nord d’une tour effilée, d’une simple arrête, est synonyme naturellement d’une minimisation de cette façade. Il résulte donc l’impossibilité évidente d’espaces mono-orientés nord, posant des problèmes thermiques, tout comme à l’usage quotidien.

P

ar ailleurs, le plan de ma tour-hôtel est composé, je l’ai dit, d’un jeu de combinaison effectué à partir d’un module de base, de dimension 4x4m (chambre 72

de 12m² et salle de bain de 4m²). Celui ci, doublé, pivoté, symétrisé vient créer en fonction de l’aménagement intérieur un jeu d’avancées et de retraits, à la fois en façade, vers l’extérieur de l’édifice et sur la circulation, en son cœur. Cette dilatation ponctuelle de la circulation est l’occasion de crée des communications entre les étages, par des doubles hauteurs, qui à la fois agrémenteront les circulations, et permettront de créer une ventilation naturelle. Par une position stratégique en plan de ces doubles hauteurs, elles permettront à l’air frais venant des ouvertures du hall, et des étages bas, de monter vers les étages en empruntant le chemin le plus long possible, en ne délaissant aucun espace commun, d’où s’ouvrent ensuite les parties privées, avant d’être naturellement évacué en partie haute. Ce jeu en plan, permet de la même façon, une efficacité thermique en façade. En effet, l’espace situé entre le nu de la façade et les chambres en retrait est occupé par des jardins d’hiver. Là encore, tout en apportant un confort d’usage aux occupants qui disposent donc d’un espace agréable, avec vue directe sur la mer, ces jardins d’hiverpermettent un confort thermique naturel, entrainant une économie énergétique intéressante. Le climat océanique, pouvant être chaud comme froid, mais dans tous les cas, très rapidement changeant, mon choix s’est porté sur des panneaux de façade de type Naco. Ces panneaux de verre présentent en effet la qualité d’une modularité triple. Les panneaux fermés, le jardin d’hiver, bien que non isolé est chauffé par effet de serre

La paroi vitrée, en réalité constituée de ventelles en verre, peut s’entre-ouvrir pour laisser une ventilation naturelle s’opérer, en protégeant toutefois la loggia, des averses et des rafales de vent. Enfin, par beau temps, ces panneaux peuvent se replier sur les cotés de la loggia qui devient donc ainsi un véritable espace ouvert, sans plus aucune limite à la vue. Ces jardins d’hiver modulables en fonction des données climatiques communiquent avec un deuxième dispositif. Lorsque le travail en plan, dessine une paroi pleine au nu de la façade extérieure, contrairement au retrait occupé par les jardins d’hiver, celle-ci devient un mur trombe. Un mur trombe est constitué d’un mur à l’inertie importante, peint en couleur sombre, qui, situé derrière une vitre augmentant l’effet de serre, capte la chaleur et la restitue à l’espace intérieur. Cette restitution se réalise de deux façons, par conduction naturelle, la chaleur que le mur accumule est restituée à l’intérieur, lorsque la température intérieure y est plus faible, mais aussi par convection lorsque des gaines de ventilation en partie basse et haute du mur, permettent à l’air froid intérieur de circuler dans l’interstice entre le mur et la paroi vitrée et de retourner à l’intérieur par la trappe haute. Malheureusement, la RT2012 interdit toute nonisolation d’une paroi interface entre intérieur et extérieur, rendant ainsi la mise en place d’un mur trombe difficile en pratique.


Images de la modularité des panneaux Naco, permettant une régulation intéressante par l’usage. Ici, dans un bâtiment de logements à énergie positive, à Lyon-Confluence, par Lipsky & Rollet (2010).

L’enjeu environnemental exprimé par la matérialité de la façade . 73


Après réflexion, une solution issue de ce modèle s’est avérée intéressante. Le mur trombe isolé, et ne fonctionnant donc de fait plus par conduction, peut jouer un rôle proche de celui d’un puit canadien. En effet, en faisant communiquer les étages par la faille comprise entre les murs superposés et les parois vitrés, l’air frais y entrant en partie basse s’y réchauffe. C’est donc un air à température déjà agréable qui pénètre dans les espaces intérieurs par une ventilation simple flux, évitant ainsi une remise à température nécessaire. La communication de cette lame d’air avec les jardin d’hiver permet d’ailleurs de réguler simplement et naturellement par l’usage, la température: en position fermée des Nacos, l’air est chauffé efficacement par cette surface noire et le jardin d’hiver profite donc de cet accroissement de la température. Au contraire, lorsqu’en été la température est trop élevée dans la faille pour être agréable à l’intérieur, l’ouverture des panneaux permet une évacuation du surplus de chaleur.

D

e plus, les balcons de la façade sud, référence à la cité de l’Hermitage apportent une protection solaire simple et évidente mais non moins performante aux appartements s’y ouvrant. Ces casquettes permettront de se protéger des apports solaires néfastes d’été. En raison de la course plus basse en hiver, elles ne gêneront en rien l’apport solaire. La résidence étudiante quant à elle est protégée dans sa façade sud-est par la résille métallique rendant hommage au motif breton et à la finesse des structures industrielles de l’estuaire. Cette résille, située à 80cm de la façade isolée pour permettre un

74

accès technique apporte quant à elle une protection légère et fine, amplement nécessaire à cette façade ne captant que le soleil du matin, encore peu fort une majeur partie de l’année (les étudiants étant pour la plupart absents, lors des mois les plus chauds où cette protection pourrait s’avérer moins efficace). une plupart absents, lors des mois les plus chauds où cette protection pourrait s’avérer moins efficace).

A

insi, le volet environnemental de ce projet n’est pas ici fruit d’une réflexion tardive, et artificiellement intégrée. je me suis au contraire efforcé d’énoncer au mieux des principes en plans, de l’esquisse générale à la combinaison des appartements, ou en façade qui se révèlent pouvoir répondre également à cette question.


Coupe-perspective schématique d’une portion intermédiaire de la tour, illustrant le parcours de la ventilation naturelle à travers les étages grâce aux double-hauteurs des circulations.

Illustration du fonctionnement d’un mur trombe classique (source: le panneausolaire.net)

L’enjeu environnemental exprimé dans le projet . 75


4.Le jeu de la matérialité.

L

a matérialité des façades, articule les trois notions fondamentales ici, pour former un ensemble cohérent. Elles garantissent tout d’abord un confort des usagers et une spatialité intérieure intéressante. Le dessin de façade ne s’est fait en aucun cas au sacrifice d’une qualité des espaces intérieurs. Ensuite, comme visage offert à la ville, les façades participent à la perception de celle-ci tout en étant porteur de l’identité de l’édifice. Ici, un soin tout particulier a été porté aux différentes échelles que le site induisait. Par une progression logique, suivant le déplacement naturel d’un passant descendant de la ville et arrivant au bord de l’estuaire, les façades offrent tout d’abord une échelle, connue, celle de la ville de la reconstruction, avant de doucement s’ouvrir une échelle autrement plus grande, celle du paysage. Enfin, le confort et l’efficacité thermique, ont permis par des dispositifs particuliers d’induire un dessin de façade s’accordant avec les deux autres notions précédentes.

L

a façade ouest, regarde vers la ville et, de part sa hauteur, y est très visible. Derrière cette peau se développent les appartements de la résidence hôtelière en partie basse, les chambres d’hôtel et le restaurant en partie haute. Orientée légèrement nordouest, elle méritait de s’ouvrir dans son coin sud et être plus fermée au nord. A partir de ces données, la façade a été conçue autour d’une interaction entre deux types de matériaux: des ensembles maçonnés

76

blancs (balcons, allèges, parties fermées au nord...), qui répond au type connu de la ville qui lui fait face, et qui correspond donc à une échelle, une image identifiable par tous, et un jeu de panneaux métalliques sombres, suivant une trame de 50cm, alternativement vitrés ou pleins, selon le besoin intérieur, qui sont d’autant plus présents à l’angle sud-ouest que la maçonnerie blanche l’est au nord-ouest.

D

ans une progression circulaire logique, les parties maçonnées se replient sur une partie de la façade sud pour former les balcons. Ceux-ci par leur avancée, apportent une protection solaire indispensable aux appartements s’y ouvrant. La trame de 50cm des panneaux, se poursuit majoritairement sur cette façade, par les panneaux Naco, précédemment décrits, s’inscrivants dans cette même trame. Les murs trombes, dessinent par leur masse sombre, une seconde modénature en arrière plan.

C

e jeu entre la trame des panneaux Naco et les masses des murs trombes prend toute son importance sur la façade est, tournée vers l’estuaire. Si la façade ouest, coté ville voulait répondre à une échelle urbaine identifiable, celle-ci au contraire dialogue avec une autre dimension: celle du grand paysage. Ainsi, deux échelles venaient se confronter: celle intérieure, des usagers de l’hôtel, et celle extérieur, du paysage.. Les panneaux Naco et les murs trombes sont donc disposés en fonction de l’aménagement intérieur des espaces, mais répondent également à la grande échelle désirée en façade. En effet, la multiplication du module standardisé du panneau a pour conséquence de troubler

l’échelle, de faire disparaitre la notion d’étage tant ce même module se développe, indifféremment en horizontale comme en verticale. Les murs trombes, quant à eux, sont superposés par groupes de plusieurs étages, venant là aussi faire disparaitre la perception des niveaux.

L

a façade nord, minimisée et peu visible est elle majoritairement fermée et blanche, venant clore cette progression circulaire de la matérialité. L’espace de circulation séparant la tour de la résidence est largement ouvert et vitré.

Enfin, la

résidence étudiante possède elle aussi deux façades différenciées. L’une, coté ville, développe un rythme standardisé et identifiable. L’autre, coté estuaire, répond à une échelle plus lointaine. Les recherches sur le motif artistique breton, les références aux structures metalliques du port proche, le bassin s’y développant à ses pieds propice aux reflets, et cette volonté de grande échelle se concrétisent dans la mise en place d’une résille venant envelopper l’édifice. Cette peau englobante, évoque également l’idée d’une communauté, d’une «maison commune» des étudiants qui y habitent. Cette résille assume son obscurité, dans la continuité de la façade de la tour et pour un meilleur jeu de reflets. En arrière plan les loggias des chambres, sont colorées en jaune-orangé et viennent relever par touche cette façade. Cette couleur évoque celle des anciennes grues portuaires qu’on distingue en arrière plan.


Une façade impressioniste, jouant avec les reflets: l’IEA, nantes par Ferrier-Gazeau-Paillard.

Une façade impressioniste, jouant avec les reflets: le Mucem, par Rudy Ricciotti.

Saint-Nazaire: une ville à l’échelle identifiable.

Une tour à l’échelle difficilement perceptible: la Seagram Tower, par Mies Van der Rohe.

La matérialité des façades: une triple interaction entre usage intérieur, visage offert à la ville, et aspect thermique. esprit recherché et références . 77


78


CONCLUSION .


L

e déroulement du projet des première esquisses et intuitions urbaines en octobre 2012, à la conclusion du volet écrit de ce projet architectural, aujourd’hui, en juin 2013, a été animée par une ligne directrice constante et au centre des réflexions: l’attention au lieu et le délicat travail d’insertion d’une conception personnelle dans un espace porteur d’une forte identité, où le genius loci s’affirme particulièrement. Ainsi le projet urbain, se développe à partir de cette identité présente et vient la cultiver, la compléter, la poursuivre, entrer en interaction avec elle mais en aucun cas, s’impose à elle ou vient nuire à l’esprit inhérent au lieu. La Tour Escale, dans la continuité de cette réflexion, suit le même esprit. Elle tire son programme, ses lignes et volumes, sa matérialité de l’identité du lieu. Elle se veut être à la fois une conclusion naturelle de la conception urbaine réaménageant ce site délaissé en le respectant, tout en venant le bousculer, l’agiter, pour le dynamiser. En quelques mots, une situation d’équilibre entre deux états.

C

ette situation, sur le fil, fait écho à celle inhérente à Saint-Nazaire, ville d’équilibre entre terre et mer, eau douce, eau saumâtre et eau salée, immobilité et mouvement, côte balnéaire et terre-pleins industriels, Loire et Océan, Europe et Amériques. Cet équilibre se retrouve dans les références assumées du projet. La tour puise en effet ses lignes

autant dans les architectures portuaire, ligérienne et bretonne, et constitue le point de rencontre de ces différentes influences qui constituent l’écriture de Saint-Nazaire. Concluant le parcours géographique et chronologique de la Loire, la tour se devait donc d’être contemporaine, tout en se liant à ce fil ligérien. Un équilibre encore une fois donc, entre passé et présente, voire futur. Loin de constituer un point d’arrêt à ce parcours, la tour se réclame également d’une mesure juste entre les clochers des abbatiales romanes de la France intérieure et les skyscrapers ultramodernes outreatlantiques. Par ailleurs, son programme induit lui aussi cette situation stable, certes, mais intrinsèquement intermédiaire. Un hôtel, une résidence hôtelière, une résidence étudiante proposent une escale, à la durée variable, c’est à dire donc une pause entre une arrivée et un départ. Ce nom d’escale induit naturellement une notion d’ailleurs. Un équilibre existe par essence par ce qu’il n’est pas. C’est par les éléments dialoguant avec lui qu’il s’affirme et est rendu visible. Il s’agit bien là de parler de dialogue puisque loin d’instituer une relation unilatérale, l’élément en équilibre, révèle également ce qui le met en équilibre. De cette façon, cette tour est issue intrinsèquement de la Loire et de l’imaginaire transatlantique, tout en, par sa présence, les révélant, les mettant en confrontation.

L

es transatlantiques, fruits nazairiens, éclos dans ses cales, dont la parenté est ici avouée, évoquent curieusement cet ailleurs-frère, cet équilibre incomplet mais induit en imaginaire. Sophronia, une des très belles Villes Invisibles23 d’Italo Calvino, développe particulièrement cet équilibre incomplet.

«[Elle] se compose de deux moitiés de villes. [...]. L’une des moitiés de ville est fixe, l’autre est provisoire, et quand le terme de sa halte est arrivé, ils la déclouent, la démontent et l’emportent pour la replanter sur les terrains vagues d’une autre moitié de ville. [...] Ce qui demeure ici, c’est la demi-Sophronia [...], et elle commence à compter combien de mois, combien de jours elle devra attendre pour que revienne la caravane et qu’une vie complète recommence.» Cet équilibre rompu dans les faits, est cependant rétabli par le développement de l’imaginaire du voyage, qui relie la ville connue, à celle-soeur lointaine. Retrouver l’équilibre, ce pourrait donc accueillir et inviter au voyage. La Tour Escale en a, à sa hauteur, la volonté.

23

80

CALVINO Italo, Les Villes Invisibles, Paris, Editions du Seuil,


Le bassin portuaire, par une fin d’après-midi de Novembre . 81


82


BIBLIOGRAPHIE .

83

83


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xxxxxxx . 85


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REMERCIEMENTS .

Merci à Brigit de Kosmi, pour sa disponibilité et son suivi pédagogique compétent. Merci à Bernard Desmoulin pour son avis donné lors des corrections de mi-parcours.

Philippe Pinson, Elisabeth Georges et Véronique Navet, architectes

Merci

à

et urbanistes, associés de l’Atelier Ruelle pour le temps consacré, l’expérience partagée et les documents de travail communiqués. Merci à

Merci à Yves et Claudie Desrues pour leur témoignage nazairien et le point de vue sur le site. Merci à Jean-Michel Couronné pour son savoir technique sur la conception des paquebots, et les nombreux documents communiqués. Merci à Brice Guénégo pour ses conseils thermiques, à Aline et Philippe Guénégo.

Sophie Minssard, architecte de Ce projet est aussi une traversée «transarchi-

l’Agence pour le Développement Durable de la Région Nazairienne pour son intérêt tout au

tecturale» en famille.

long de mon travail, les informations hautement intéressantes, pour nombre d’entre elles encore non diffusées publiquement.

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ClĂŠment GUENEGO. Paris / Saint-Nazaire. 06 Juin 2013.

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