LFC Magazine #2 Amélie Nothomb Septembre 2017

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LFC : Comment est née l’idée de votre premier roman ? EB : Le racisme est un sujet dont on parle beaucoup, pas un seul jour sans qu'il occupe l'actualité. Il intéresse, il interpelle, il énerve. C'était un matériau intéressant pour un roman. Pour bien le traiter, je devais faire un pas de côté, ne pas entrer dans la polémique et encore moins dans un roman politique, dénonçant, vitupérant, sermonnant. La farce m'est apparu comme le meilleur moyen de traiter le sujet. Au delà du racisme, ce roman parle de haine, une haine qui envahit tout, qui devient incontrôlable, chez Amédée Gourd, mon personnage principal qui est raciste, mais aussi, d'une autre manière, dans cette société imaginaire d'autant plus violente qu'elle se cache derrière des slogans pleins de bons sentiments. LFC : Dans « Les Peaux rouges », vous parlez de racisme en mettant en scène un anti-héros, de haine, de violence, d’amour raté, d’excès, de bêtises humaines, d’humain un peu trop humain. Pourquoi ces thèmes au point de passer le cap de l’écriture ? EB : Je voulais traiter de la haine, d'une haine. J'ai choisi cette haine parce qu'on en parle beaucoup, sans véritablement la traiter (est-ce possible?). J'aurais tout aussi bien pu choisir une autre haine. LFC : Pour aider les lecteurs à faire leurs choix en librairie, influencez-les en leur offrant trois raisons de lire « Les Peaux rouges » ? EB : D'abord parce que les lecteurs me disent qu'il s'agit d'un roman déconcertant, qui inverse les codes et qui laisse une trace lorsqu'on referme le livre. On peut se prendre d'affection pour ce raciste bien maladroit, même si on ne l'excuse jamais. Et cette société imaginaire, qui fait de la lutte contre le racisme son cheval de bataille, apparaît comme une société violente. Dans ce roman, il n'y a pas de méchants ou de gentils, il n'y a que des gens bêtes, qui n'y arrivent pas : Amédée Gourd, mon personnage principal bien sûr, car le racisme est bête avant tout, avant même d'être immoral, et cette société qui prétend soigner le racisme comme on soigne une grippe. Ensuite, parce que c'est un roman bouffon, qui prend le parti du rire sur un thème qui ne fait pas rire. C'est un rire jaune parfois, un rire franc d'autre fois, des rires de toutes les couleurs, en forme de feux d'artifice. Enfin, parce que ce roman nous concerne tous, le racisme mais surtout la haine présente en chacun de nous. Nous sommes des humains ! Le dompteur face à un lion, n'oublie jamais qu'il a un animal en face duquel il peut, à tout moment, perdre le contrôle. LFC MAGAZINE | 46

Sachons reconnaître la haine et sachons la dompter !


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