Joël Jouanneau
Marie-Claire Le Pavec
Mamie Ouate en Papoâsie
Heyoka jeunesse ACTES SUD-PAPIERS
MAMIE OUATE EN PAPOÂSIE
ACTES SUD-PAPIERS
Direction éditoriale : Claire David
Loi no 49-956 du 16 juillet 1949 sur les publications destinées à la jeunesse
Illustration de couverture : Sur terre © Laurent Lefèvre et Laurent Bauché
© ACTES SUD, 1989, 1999, 2024
ISSN 1296-154X
ISBN 978-2-330-19214-3
Également disponible en livre numérique
Joël JouanneauMarie-Claire Le Pavec
MAMIE OUATE
EN PAPOÂSIE
COMÉDIE INSULAIRE
Heyoka jeunesse ACTES SUD-PAPIERS À Alain Aithnard et Mireille MosséSans réalité
En un pincement
Le papillon.
Buson
ÉTAT DU LIEU
Blupblup. C’est le nom de l’île, une île minuscule. C’est assez loin d’ici.
Administrativement, l’île Blupblup dépend d’une île géante, la Papoâsie. Elle n’a plus qu’un habitant, Kadouma. Les autres, eh bien ils sont morts, ou ils sont partis, ou ils se sont effacés dans le paysage, c’est comme on voudra !
Comme tous les Blupblupiens, Kadouma est grand et noir de peau, il a l’âge que vous lui donnerez, il parle parfaitement notre langue, il ne roule pas les “r”, on ne sait pas pourquoi, c’est comme ça !
Depuis quelque temps, il n’est plus seul sur son île, Mamie Ouate est là. C’est une vieille dame blanche, une lilliputienne qui, sans même en référer à la Papoâsie, s’est installée chez Kadouma. Elle a planté là sa tente, le laboratoire ambulant d’une parfaite naturaliste et derrière la tente, on peut voir la gueule d’une jeep, et comment cette jeep a pu atterrir là, c’est vraiment sans importance !
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Mamie Ouate a une obsession : capturer Virginia, une femelle papillon dont on ne connaît que des spécimens mâles. Depuis lurette, les entomologistes du monde entier recherchent Virginia, mais seule Mamie sait qu’elle est venue se réfugier là, sur l’île Blupblup. Kadouma est devenu son bras droit, elle troque son aide contre du crabe et du foie gras, c’est sans doute qu’il aime ça !
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— 1. L’ÉLIXIR —
C’est la nuit noire sur la Papoâsie. Seuls les phares de la jeep éclairent Mamie Ouate versant dans une cuvette le contenu bleu d’une petite fiole rouge.
“Allez allez
Tout doux mes jolies tout doux j’ai dit !
On m’avale ça s’il vous plaît
L’élixir de Mamie Ouate
Il est doux mon élixir
Question sommeil c’est une pure merveille
Mieux que le marchand de sable
On ne se réveille pas
On boit un petit coup on est mort et voilà tout !
Allez allez
On se calme mes toutes belles on se calme
Dodo les chéries dodo
Finis les rêves finie la vie
Elle vous dit adieu Mamie.”
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Et Mamie Ouate, chantonnant une berceuse, regagne sa tente et s’abandonne au sommeil, alors qu’autour d’elle, le monde de la nuit, qui un temps s’était assagi, reprend ses droits, sur l’île Blupblup c’est toujours comme ça !
— 2. LE MARI —
L’aurore se met en place. Mamie Ouate est déjà en plein travail. Elle recense les malheureux insectes qui se sont aventurés la nuit dans sa cuvette et vont enrichir sa collection.
MAMIE OUATE . Nous disions : Troides victoriae regis, famille des Papilionides, ordre des Lépidoptères. En parfait état la Reine Victoria ! Ils m’en donneront bien mille euros au Muséum. Ou deux mille, ma foi pourquoi pas.
Suivante : Quoiquoiquoiquoi ? Un Polistes fastidiosus, ici en Papoâsie. Alors ma petite dame, qu’est-ce qu’on vient faire par là, hein, tu peux lui dire à Mamie Ouate, ce que tu viens faire à cinq mille kilomètres de chez toi ? Non, tu ne peux pas ! Polistes fastidiosus, dit comme ça, évidemment on pourrait croire, voyez-vous, que je vais devenir riche grâce à vous, madame, eh bien pas du tout. Fastidiosus, entre nous vous ne vous refusez rien, un peu prétentieux vous ne trouvez pas, pour une vulgaire guêpe, rien de plus et encore, presque une mouche, vraiment je ne peux
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rien faire de vous, et puis personne ne croira que je vous ai trouvée là, alors au trou !
Elle enterre l’insecte dans le sable, puis en prend un autre.
Par ici toi que je te voie. Hou là, un Bactrodema aculiferum. À voir, tu n’es pas joli joli. Ouiouiouioui, mon bonhomme, je sais ce que je dis, et mets-toi à ma place, à dix ans si j’avais dit au père Hugo : “Voilà monsieur, pour votre hameçon, un Bactrodema”, il m’aurait répondu : “Quoiquoiquoiquoi, un Bactrodequoi, mais avec une tête comme ça, ma p’tite, les poissons ne mordront pas, je n’en veux pas Lilly”…
KADOUMA (invisible, il dormait sous un cône de natte). Dis, Mamie, on t’appelait déjà “ma p’tite” ?
MAMIE OUATE . C’est malin, Kadouma, très malin ce que tu viens de dire là… Mon Grand Nègre !
KADOUMA . Ne redis jamais ça, Mamie Ouate ! (Il se lève d’un bond et le cône renverse la cuvette et ses insectes.) Oh, zut, ça, je ne le voulais pas.
MAMIE OUATE . Zut oui, il y a de quoi, crois-moi, regarde les dégâts… Mes piérides… et le scarabée… saccagé… et l’araignée… une araignée à deux pattes, tu parles d’un handicap… invendable… Monsieur se met en colère et fiche tout en l’air !
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Mamie Ouate en Papoâsie
Joël Jouanneau
Marie-Claire Le Pavec
Blupblup, c’est une île minuscule, très loin d’ici, qui dépend d’une île géante, la Papoâsie. Elle n’a plus qu’un habitant, Kadouma, il est grand, et fort, et noir. Depuis quelque temps, il n’est plus le seul sur son île, Mamie Ouate est là. C’est une vieille dame blanche, toute petite, et qui ment avec beaucoup d’aisance. Elle n’a qu’une obsession : capturer Virginia, ce papillon si rare qu’il n’existe qu’en un seul exemplaire.
ISBN 978-2-330-19214-3 10,90 € TTC France
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