W-Fenec Mag#4

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EDITO

SOMMAIRE

JOYEUX NOËL ! LES DISQUES DU MOIS / INTERVIEW

Ok, on a de l’avance. Ou du retard si tu ne lis ce mag’ qu’après le 25 décembre... 2012, car oui, a priori, le monde existe encore et ce mag est sorti en décembre 2012 donc on te souhaite un «Joyeux Noël» mais qui n’est valable que pour 2012, si tu découvres ces pages virtuelles en 2032, tu vas peut-être halluciner. Parce que si les Mayas d’Hollywood ont vu la fin de leur monde en 2012, ils n’ont pas été fichu de prévoir que les cadeaux musicaux pourraient disparaître de sous le sapin... Y’a 40 ans, les amateurs de bonne musique pouvaient deviner le style de cadeau qu’ils auraient à la forme sous l’emballage, ouais, on dissimule assez mal un vinyl. Y’a 30 ans, on pouvait de la même façon penser à récupérer une magnifique K7, y’a 20 ans, on fantasmait pour savoir quel CD était sous le sapin et aujourd’hui comme demain, va-t-on emballer du vent ? La musique devient toute numérique, des 1 et des 0 qui s’enchaînent sur tes lecteurs portables, du binaire dématérialisé, téléchargé pour pas cher, rangé dans un sous-dossier et vite oublié. Mais ce n’est pas le sujet de l’édito, le sujet, c’est comment l’emballer ? Ta liste de .mp3, tu l’offres comment ? Tu imprimes un code d’accès ? Tu dégotes une vieille clé USB ? Y’aura quoi au pied du grand sapin vert ? Du vent sifflant soufflant ? Le Père Noël gagnera du temps dans sa distribution mais qui osera offrir un CD à un jeune lambda ? Celui qui ne jure que par son I-truc où il stocke la bande-son de sa life n’en a rien à faire... Si on est en 2032, tu as peut-être du chercher ce qu’était un vinyl, une K7, un CD et un .mp3, peut-être que tu te marres sur ces considérations réactionnaires mais crois-en un jeune vieux, de la musique dans un objet, ça avait plus de gueule que ta pochette hologramme 3D !

04. Ez3kiel 05. Converge 10. Troy Von Balthazar 12. Redoo 14. Noïd 16. Uncommonmenfrommars 17. General Lee 18. Interview : The Arrs 40. Interview : The Rebel Assholes 50. Interview : Huck (....) 60. IL Y A 10 ANS 61. CONCOURS 62. EN BREF

Oli

68. DANS L’OMBRE 70. LIVE 2

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LE DVD DU MOIS

Naphtaline orchestra (L’autre distribution)

Au moment de se confronter à l’art délicat - et exercice potentiellement fastidieux sinon quelque peu soporifique du concert filmé - Ez3kiel a choisi de faire les choses en grand en adaptant son album Naphtaline pour la scène, en compagnie d’un orchestre symphonique et de filmer la performance captée dans un théâtre (en l’occurrence celui de Tours). Plus qu’une simple prestation accompagnée de musiciens additionnels mise en image dans un cadre s’y prêtant à merveille, le résultat marque ici la réinvention d’Ez3kiel et de sa musique dans le cadre d’un spectacle live à la classe étourdissante et enjôleuse. «Derrière l’écran», «Lady Deathstrike», «Adamantium», «Lac des signes» ou le sublime «Exebecce», la quasi intégralité des morceaux réorchestrés de Naphtaline sont ici des déclarations d’amour à la musique sous toutes ses facettes. Tour à tour néo-classique, jazzy et protéiforme, toujours moderne dans son approche créative et autant rythmé par les arrangements à cordes que par une mécanique percussive à la précision chirurgicale, le concert est également sublimé par des projections vidéos de haute volée, parfaitement insérées dans un montage DVD réussi (le live est également disponible en CD dans un digipak double-disque à l’esthétique particulièrement étudiée). De fait, la musique des Touran-

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geaux, lesquels évoluent à domicile, n’a jamais été aussi cinégénique que sur ce Naphtaline orchestra aussi raffiné qu’élégant. Sorte de bande-son d’un long-métrage rêvé, ou même de plusieurs, fantasmés encore et encore par des musiciens qui en couchent les émotions sur la partition, parsemés d’une myriade d’influences, à situer entre musique néo-classique, sonorités afro-asiatiques, ambiances de western crépusculaire, ou jazz moderne d’une élégance rare, le résultat s’offre également, à l’image de l’album originel, une progression narrative dont l’inexorable montée en puissance trouve son climax sur un «The wedding» explosif. Un hommage à peine déguisé au maître Sergio Leone (l’auteur des musiques d’Il était une fois dans l’Ouest, Le bon, la brute et le truand, Pour une poignée de dollars, Et pour quelques dollars de plus...) en forme de climax à fleur de peau, laissant le spectateur chancelant bien que confortablement installé dans un lieu qui se prête tout particulièrement à un spectacle de cette intensité sensorielle. Une scénographie étudiée pour rendre l’enchaînement des morceaux particulièrement harmonieux, des mouvements de caméra qui pendant une heure et trentedeux minutes, font voyager l’auditeur à l’intérieur d’un album qui s’en trouve dès lors métamorphosé («Leopoldine», «Subaphonic»), la fièvre gagne l’auditoire et lorsque survient l’apothéose finale avec un «Volfoni’s revenge» dantesque, on est suspendu aux lignes instrumentales d’un ensemble symphonique en phase avec la création originelle d’Ez3kiel. Et pourtant, ce n’est pas tout à fait terminé puisque derrière, en guise d’épilogue idéal, Naphtaline orchestra se conclue sur une reprise du fameux «Lux æterna» de Clint Mansell (connue pour figurer sur la bande-son du film Requiem for a dream). Une manière comme une autre de se faire des politesses entre créateurs de chefs-d’œuvre. Aurelio

LES DISQUES DU MOIS

EZ3KIEL

CONVERGE

All we love we leave behind (Epitaph / Deathwish Inc.) la caisse notamment avec un «Tender abuse» littéralement écorché vif.

Après des albums du calibre d’un Jane Doe (cultissime), You fail me (imparable) ou cet Axe to fall qui démontrait que le groupe n’avait toujours rien perdu de sa verve hardcore punk métallique et qu’il était plus en forme que jamais, voici maintenant All we love we leave behind. Un opus tout en douleur viscérale, en férocité frontale et abrasion émotionnelle : car Converge est la violence même quand il s’exprime par la mélancolie. Et tout chez le groupe respire ici ce sentiment de danger permanent, de guérilla intime, palpable et déchirante. Quasiment un affrontement intérieur réglé à coups de riffs de tueur. Converge fait avec ce nouvel album ce qu’il sait faire de mieux. Soit du Converge. Pur et dur. Sans la moindre concession sur la forme ou le fond. Oui, on vous voit venir, car ce n’est pas tout à fait vrai : les Américains font mine d’aérer leur musique sur l’inaugural «Aimless arrow». Sauf que cela ne dure pas et dès la deuxième piste, ils reviennent avec le terrible «Trespasses» à leurs violents amours charnels, brutaux. Entre les deux, des cagettes entières de riffs assassins qui giclent aux quatre coins du studio, une production thermonucléaire et des plans de basse/batterie juste phénoménaux : si on a cru que les gaziers allaient se calmer avec l’âge on s’est méchamment trompé. Et il va donc falloir passer à

«Sadness comes home», «Empty on the inside», «Sparrow’s fall», le groupe vomit ses tripes dans les amplis, All we love we leave behind transpire la haine, exhale le désespoir et marteau-pilonne les conduits auditifs en multipliant les assauts hardcore/rock/punk/ metal jusqu’à ce que mort s’ensuive. Converge s’exprime dans la déflagration auditive, la démolition sensorielle trouvant son exutoire par le chaos, le démembrement sonore qui ne semble jamais vouloir s’arrêter dès lors que l’on a mis un pied dans l’album. Les morceaux se suivent, s’enchaînent, donnant un effet de démultiplication et de férocité pure ; et alors que l’on s’abandonne aux enchaînements effrénés d’»A glacial place», puis au groove fulgurant d’un «No light escapes», le groupe assène ses ultimes coups de boutoir. Que ce soit avec le brutal «Vicious muse» ou le plus insidieux et retors «Veins and veils», Converge ne s’autorise aucune limite dans l’agression viscérale, aucune retenue dans l’expression d’émotions brutes qui ne demande qu’à jaillir de ses cordes surtendues (vocales ou instrumentales), le tout, sans jamais faiblir ou sembler renoncer à ses fondamentaux hardcore. On en prend une dernière fournée avec au hasard «Shame in the way» et on les laisse sagement nous faire la leçon. Non, en fait, la leçon on peut oublier tant cet album ressemble à une expédition punitive destinée à faire comprendre que quand les grands mamamushi du hardcore/punk métallisé planétaire envoient du riff : on écoute, on encaisse. Hard(core). Aurelio

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INTERVIEW

Si j’ai bien suivi, c’est toi qui écris l’essentiel des titres depuis le GodCity Studio (le propre studio de Kurt chez qui il enregistre quantité de groupes dont Cave In, Ken Mode, Kvelertak, Old Man Gloom), en amont du travail

qui forme l’ossature du titre. Chaque morceau est créé de façon différente, c’est pour ça que je pense pouvoir dire que chaque titre de ##Converge a au final sa propre identité.

INTERVIEW

L’artwork de All we love we leave behind est vraiment bluffant. Jacob (Bannon) bosse sur des visuels pour d’autres groupes en parallèle, comment ça se passe en termes d’inspiration avec Converge là ? Quand Jake travaille sur l’artwork d’un album de Converge, il pense autant à la tonalité de l’album qu’à rester dans l’esthétique visuelle qu’on a toujours eue avec le groupe. C’est important pour lui comme pour moi quand de mon côté j’écris ou je produis notre son, de préserver une forme de continuité d’album en album.

Quelle est ta source d’inspiration, de manière générale ou plus simplement pour cet album ? Penses-tu qu’un musicien doive toujours se réinventer pour créer ou juste voir ce que lui apporte le futur ? Honnêtement, pour l’inspiration, je ne saurais pas te dire. Je ne me souviens jamais d’où viennent les titres une fois qu’ils sont composés. En fait, à chaque fois que je pense avoir trouvé d’où ça provient réellement, je me rends compte que ça vient en fait d’encore plus loin.

Avant-propos : lorsque l’on nous a proposé une interview de Converge, on avait le choix entre Jacob Bannon ou Nate Newton pour les réponses, donc on a essayé de poser les questions de manière à pouvoir jongler entre les deux. Finalement (et pour notre plus grand plaisir), c’est Kurt Ballou qui s’y est collé, ce qui suppose qu’il n’y ait pas plus que ça de questions «technique»... L’autre petite anecdote, c’est qu’on a bossé dans l’urgence et que Kurt a eu la gentillesse de nous répondre en même pas 3 jours, week-end compris.

Avec Converge, vous venez de sortir votre nouvel album All we love we leave behind, quel est son concept ? On voit derrière ce titre des sentiments, des émotions qui cadre avec le contenu que j’ai personnellement trouvé plus intense émotionnellement que les précédents. Ça sonne comme un mix entre rage féroce, violence pure et une agression constante mais aussi l’expression d’une tristesse profonde, brutale et crue. Quand on écoute l’album, on est comme en apnée. Les breaks, la violence est partout et à la fin, les oreilles saignent et dans le même temps on perçoit presque une certaine

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mélancolie... On fait des disques pour exprimer ce qu’il y a au plus profond de nous, on suit notre inspiration, on s’arrange pour écrire les meilleurs titres qui soient, les faire sonner le mieux possible. Tu peux les interpréter comme tu veux, ressentir ce que tu veux, tout cela vient de nous certes, mais cela ensuite t’appartient. Du moment que les gens éprouvent quelque chose de positif en écoutant notre musique, nous avec ##Converge, on est satisfaits.

collectif : à quel moment le reste du groupe intervient ? C’est vrai, j’écris la plupart des riffs, mais en fait on compose les titres comme un groupe. Je ne bosse pas trop sur un titre tant que les autres ne sont pas intervenus pour donner une direction au morceau. La plupart du temps, Nate apporte un riff ou Ben apporte un rythme

Finalement, après toutes ces années tu préfères quoi ? Enregistrer en studio ou être sur scène ? T’en n’as pas marre d’être sur les routes à bouffer du kilomètre, du camion, des hôtels ? Je préfère écrire et enregistrer. Pour moi, c’est plus important d’être créatif et produire de nouvelles choses

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INTERVIEW

Cette été vous avez joué au Hevy (un gros festival anglais qui se déroule au mois d’août dans le Kent) alors que le planning était plus que serré. Du coup vous avez dû jouer le set alors que The Descendents faisaient leurs balances juste à côté plus fort que vous... Ouais, c’était plutôt ennuyeux... Bon au moins, quand on a fait notre balance durant le set de Madball, on jouait dans le même ton et le même tempo qu’eux ! Enfin bon, c’étaient The Descendents bordel, alors qu’est-ce qu’on s’en tape ? C’est un de nos groupes préférés ! crédits : Ronan Thenadey que de rebalancer des titres du passé. Mais attention, je m’éclate toujours en tournée. J’aime bien découvrir de nouveaux paysages, vivre de nouvelles expériences, recroiser de vieux amis que je ne vois pas souvent, mais je préfère définitivement travailler la musique au sens strict du terme. Tu peux me définir Converge en une phrase ? Simplement une bande d’amis jouant de la musique... Comment “Dark horses”, qui figurait au tracklisting d’Axe to fall s’est retrouvé dans un jeu vidéo ? Y’a d’autres choses de prévues dans ce genre-là ?

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Si ça ne te gêne pas de parler business, ça fait maintenant un peu plus de 20 ans que vous êtes dans le circuit, vous sortez des albums sur un gros label (Epitaph), Jake cogère en parallèle Deathwish (qui sort notamment des éditions vinyls de Converge) mais les ventes de disques se cassent la gueule, du coup qu’estce qui vous fait vivre ? En effet, même si pour la presse et lors des concerts ou festivals, on a l’impression que pour le public Converge n’a jamais été aussi important, nos ventes baissent d’albums en albums. Mais tu sais, c’est valable pour tous les groupes. Tous les labels que je connais sont vraiment en difficulté. Tu as dû entendre parler de la fermeture prochaine d’Hydrahead… C’était une sale journée ici. Ces

derniers temps, notre principale rentrée d’argent, c’est le merch’ et les concerts, c’est pareil pour tout le monde. Pour les groupes qui veulent vivre de leur musique ça signifie qu’ils doivent passer toujours plus de temps sur la route et passer le moins de temps possible à écrire et enregistrer leur musique. La bonne chose, au moins à court terme, c’est que tu peux assister à bien plus de concerts... Vous avez sorti l’album avec une édition digisleeve plutôt sympa et une version Deluxe là pour le coup carrément très classe. Alors que vinyl a fait son retour, les gens achètent des versions collector, alors que l’industrie pense que le support physique est mort, c’est un peu contradictoire... Personnellement, quand j’aime vraiment un album, j’apprécie de m’immerger totalement dans son univers. Avoir un beau packaging, regarder le livret, lire les notes qui l’accompagnent, tout ça ne fait qu’améliorer l’expérience. Pour moi un album n’existe pas réellement si je ne l’ai pas entre les mains, ce doit être un tout. Rien à voir mais tu as posté une photo d’une guitare à 9 cordes il y a quelques mois, c’est une vraie ? Oui, c’est une vraie ! Je m’en sers sur “Glacial pace” et “Sparrow’s fall”. Une 9 cordes, c’est pas si exceptionnel en fait. Matt (Pike) de High on Fire et Bill (Kelliher) de Mastodon en utilisent aussi. BC Rich a même fait une 10 cordes dans les années 80’. C’est bien d’avoir une rythmique avec une tonalité solide et en même temps un son chorus naturel. Si je t’offre 1 million de $, t’en fais quoi ? Et ne me dis pas que t’achètes des grattes ! Non, je pense que j’aiderais mes parents à préparer leur retraite, que j’aiderais aussi mes potes de Brooklyn qui ont perdu leur appart’ à cause de l’ouragan Sandy. Je donnerais aussi de l’argent à la SPA et avec le reste, je terminerais de payer ma maison. Vous tourniez côté Pacifique quand l’ouragan Sandy a touché votre région (côte Est donc), comment tu as vécu ça ? On était inquiets pour nos potes et nos familles, on aurait aimé être là pour eux. Par chance, notre coin n’a pas été trop touché, ceci dit, on a des potes de New York qui ont tout perdu. Ça fait chier. On a joué avec la nature et là on est en train de se prendre le changement climatique dans la tronche. C’est dur...

Ben a un nouveau projet avec Stephen Brodsky de Cave in, Jacob bosse sur Wear Your Wounds. Tu peux nous en parler ? Pas trop, je ne suis pas trop au courant...J’ai juste écouté ce que Ben et Steve font ensemble et c’est vraiment excellent. C’est metal, mélodieux et assez novateur.

INTERVIEW

Matt Elard qui a bosse avec nous sur Jane Doe a lancé une boîte qui met des titres sur le réseau Rock Band. Il nous a demandé si on voulait y contribuer donc on l’a fait. C’est sorti au moment de l’effondrement du marché de Rock Band / Guitar Hero / Powergig. Les gens en avaient marre et personne ne voulait plus dépenser d’argent là-dedans. On n’a pas vendu assez de copies pour rembourser ce que ça nous a coûté donc non, on ne refera plus ça.

Et le projet United Nations, ça en est où cette affaire après les problèmes légaux et ces histoires de censure (évoquer l’histoire) ? Des rumeurs parlaient d’un nouvel album ? Alors là, je n’en sais rien... Je ne sais pas ce qu’il s'est passé pour United Nations, je ne sais même pas qui fait encore partie du groupe ! Il y a eu beaucoup trop de membres dans ce projet et son histoire est pas mal tumultueuse... Il y a quelques mois, Max Cavalera et Greg Puciato de The Dillinger Escape Plan ont intégré Nate Newton dans leur projet avec Dave Elitch (ex-The Mars Volta). Bah, Nate est déjà pas mal occupé avec Converge, Doomriders et Old Man Gloom. Mais je ne peux pas t’en dire plus. Au W-Fenec là, il y a notamment les Birds in Row et les Code Orange Kids qui tournent pas mal en boucle, on trouve quoi dans ton iPod ? J’ai tellement de musique dans les oreilles quand je suis au boulot ou en tournée que quand je coupe avec tout ça, j’en n’écoute plus trop. En général j’écoute la station de radio NPR ou je mate des films. Tu penses que tu seras encore dans Converge quand t’auras 40, 50 ans ? J’espère ! Avec Converge : tant qu’on sera inspiré et capable de jouer, je pense qu’on jouera. Barack Obama vient d’être réélu pour 4 ans. Tu espères quoi pour les USA maintenant ? J’aimerais qu’on fasse des progrès concernant les libertés individuelles et complètement revoir notre système de santé. Moins d’ingérence dans les politiques étrangères aussi. Je pense qu’Obama élu, c’est mieux que si c’était Romney au moins pour le symbole mais d’un point de vue personnel, j’aurais voulu voir Jill Stein (NDR : une écologiste) se faire élire. Bon, désolé, je n’ai pas 1M$ ! Quelque chose à ajouter ? Non, c’est cool. Merci beaucoup. Aurelio

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LES DISQUES DU MOIS

TROY VON BALTHAZAR

LIVE

...is with the demon (Vicious Circle)

Fargier, une de ses éternelles complices musicales, pour un chouette titre tout en caresse mais aussi quelques résurgences de son passif sur «Queen of what ?». Le musicien semble moins farouchement enclin à séparer stylistiquement son groupe et sa carrière solo, les frontières s’amenuisent, et au vu de Falls best, ce constat n’est finalement pas si étonnant.

LIVE > TROY VON BALTHAZAR La maison Folie Beaulieu est un théâtre/complexe moderne situé dans la banlieue de Lille... 25 minutes de métro, 20 minutes de marche à pied. Mais le jeu en valait la chandelle ce soir puisque c'est ni plus ni moins que Troy Von Balthazar qui était en haut de l'affiche du festival Tour de chauffe, un dispositif qui a pour but de faire découvrir des groupes régionaux via une affiche alléchante. Ok, c'est aussi bien souvent l'objet d'une première partie... Mais bon... Hélas, Tim Fromont Placenti, la jeune pousse que l'on doit découvrir ce soir, me laisse malheureusement une première impression tiédasse, de la pop très orchestrée qui peine à capter mon attention... A réécouter sur disque et à revoir sur scène histoire de leur donner une nouvelle chance. Parce qu'on n’est pas du genre à sceller notre avis dans le marbre au W-Fenec. Comment ça, bien sûr que si ? Au vu de la configuration de la scène, on est heureux de découvrir que Troy Von Balthazar jouera seul ce soir. Non pas que l'on n’avait pas aimé sa dernière tournée où il était accompagné de musiciens mais force est de constater que la magie qu'il incarne prend tout son volume lorsqu'il fait vivre ses morceaux spleenesques seul, la plus belle façon, à mon humble avis, de livrer son sacerdoce émotionnel en pâture. Puis, avec des musiciens, son répertoire évoque un peu trop le Chokebore d'It's a miracle. Un rideau rouge, deux chaises, un ampli, deux guitares, une petite lampe offrent une ambiance tamisée. La soirée promet d'être lovely. Et comme toujours, la magie ineffable opère durant une grosse heure, le bonhomme a toujours un talent incroyable pour vous donner envie de vous pendre dans les toilettes avec vos lacets de bas-

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kets. Le set s'entame sur "Tiger vs pigeon", un des jolis morceaux du nouvel album sorti via Vicious Circle il y a quelques semaines. Puis après, c'est une machine de guerre pop qui déroule tout son savoir-faire. Le musicien nous fait revivre quelques belles compositions de sa carrière solo : "Rainbow", "Communicate", "Cats"... toujours entrecoupé de petites interventions entre causticité et mélancolie. Les fans de Chokebore sont nombreux ce soir et ont un avis mitigé sur la prestation. Mais pas votre serviteur. Après un show à la durée raisonnable, Troy quitte la scène, ça sent le sacro-saint rappel... Et c'est effectivement le cas : "Days of nothing" (issu de Taste for bitters de qui vous savez...), et le hanté "I block the sunlight out" qui nous ensorcelle avec son beat mécanique... Très beau live par un grand Monsieur de la musique indé. Comme à son habitude, Troy vient à la rencontre du public, discute, vend quelques vinyles et votre serviteur quitte La maison Folieavec la douce impression de s'être pris 3-4 déceptions amoureuses en pleines tronches. Oui, je suis sensible sous mes airs de mec bourru. Note : Si le personnel de La maison Folie Beaulieu était ma foi très accueillant et d'une humeur particulièrement joviale, vendre de la bière à 2 euros, c'est a priori plutôt sympa sauf quand il s'agit d'une canette de 33 export. Un crime de lèse-majesté dans une région où le houblon est élevé au rang de religion. Merci : Anne Leduc et Tour de chauffe Distribution de coucous : Nicolas Ah bon, Vivi, Jean-Philippe... David

Un excellent album de plus dans la discographie de Troy Von Balthazar. Les fans de Chokebore le bouderont toujours partiellement avec une affection non-feinte, tandis que les autres, ceux qui le suivent depuis ses débuts en solo, seront toujours ravis. Nous aussi. David

Après un EP avec Chokebore (Falls best), Troy Von Balthazar revient avec un album intitulé ... is with the demon via le toujours excellent label Vicious Circle (Shannon Wright, Olivier Depardon et une foultitude de choses). Dès le premier titre, on est en terrain connu, celui de la pop doucereuse destinée à empoigner votre petit cœur d’âme en peine. Le morceau «Tropical» est une belle introduction , la mélodie raffinée et le chant susurrée de Troy atteignent, comme à leur habitude, leurs offices. Deuxième piste avec «Coco» et première surprise avec un titre qui aurait pu figurer aisément sur Black black, on retrouve ce soupçon d’électricité et cette pesanteur inhérente à l’ancien groupe de Troy. Peut-être un reliquat de morceau d’une session de Chokebore, toujours est-il qu’il ne fait pas tache dans son univers. La suite est prévisible, dans le sens positif du terme, une succession de bijoux pop comme seul ce musicien est aujourd’hui capable d’en produire. Petite touche de piano délectable et voix planante sur «About being hurt», titre un poil plus enlevé sur «Distresses», jolie chanson pop avec «Tiger vs. Pigeon», Troy dévoile toute la mesure de son talent de songwriter haut de gamme et le spectre pas si limité que ça de sa musique. Sur la piste «Butter», on retrouve également la jolie voix d’Adeline

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LES DISQUES DU MOIS

Doolittle (Musiquarium) Green Vaughan vs "Tame" On retrouve le groove turgescent et la dynamique robotique propre à Green Vaughan. Une belle réussite où se confond naturellement la voix extatique de Niko Sushi. Shiko Shiko vs "Wave of mutilation" Première version réellement étonnante mais on en attendait pas moins de ces grands olibrius de Shiko Shiko : phase chloroformée ou le clavier domine les débats, voix croonerisé, puis dynamitage rythmique en règle. Première relecture vraiment audacieuse et rafraichissante. Pouce levé. Château Brutal vs "I Bleed" Version sensiblement identique mais rafraîchie par un parti pris garage pas inintéressant.

Offrir un lifting complet à un album mythique, en l'occurrence le Doolittle des Pixies (soit l'un des dix meilleurs albums du monde), par la crème des groupes lillois, c'est une sacré foutue bonne idée. Remember notamment le webzine Stereogum qui avait fait subir le même traitement par des groupes indie rock au Ok computer de Radiohead. Les poncifs récurrents dans ce genre de compilation hommage, c'est de retrouver des groupes qui vont se montrer (trop ?) respectueux, d'autres qui vont se réapproprier joliment le morceau et puis il y a la sainte catégorie de ceux qui vont dynamiter la composition originale pour en faire une piste totalement méconnaissable. Et sur Redoo(little), il y a les 3 et chacune de ces catégories trouvent son intérêt dans cette compilation en terme d'équilibre et de plaisir d'écoutes. Notez bien que les groupes n'ont pas choisi les morceaux, tout a été tiré au sort. Respect à eux. Le Duc Factory vs "Debaser" Une version dopée par une guitare un poil plus virtuose. Un peu comme si les Pixies avaient invité Omar Rodriguez Lopez (The Mars Volta, At The Drive-In) pour une session péché mignon. Très plaisant.

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The Hanged and The Moon vs "Here comes your man" Très joli travail de la part de The Hanged and The Moon qui reprend "Here come your man" dans une version Elysian Fieldsisée... Très appréciable. Marvin hood vs "Dead" Je ne suis pas forcément très client de Marvin hood à la base mais force est de constater que leur reprise de "Dead", pleine de candeur et d'énergie garage, mérite d'y figurer. Excellente pioche de la part des instigateurs de la compil'. Fat Supper vs "Monkey gone to heaven" Fat Supper (avec des bouts de Leo88man, Fordamage) donne encore une raison d'écouter cette compilation de toute urgence avec une cover de "Monkey gone to heaven" dont la retenue "croonerisée" en appelle à Nick Cave et Morphine, le tout avec une orchestration desertrock pleine de finesse. Chapeau. Peru Peru vs "Mister Grieves" Joli effort de Peru Peru qui reprend "Mister Grieves" un peu comme si Pavement pouvait la reprendre, dans une version pop faussement bancale : le charme de la voix féminine et des sonorités vintages en plus. Bravo.

Ed Wood Jr vs "La la evol you" Peut-être ma relecture favorite de l'album. On retrouve tout ce qu'on aime chez Ed Wood Jr : l'énergie math-rock, les riffs distordus, la batterie en mode baston subtile... Franck Black n'y reconnaîtrait pas sa progéniture et on est ravi, même si on adore la composition originale. Bison Bisou vs "Number 13 baby" Excellent boulot également de la part de ce supergroupe lillois (avec des bouts de Tang, O' Superman, Sexual Earthquake In Kobe...) qui rend une copie post-hardcore survitaminée (Blood Brothersisée pour les connaisseurs) de "Number 13 baby". We Are Enfant Terrible vs "There goes my gun" Même verdict que Marvin hood, We Are Enfant Terrible, ce n'est pas vraiment ma came même si leur pop-éléctro semble très populaire dans nos contrées. Mais leur version electro-cheap en mode game boy (copyright Nintendo) fait littéralement mouche et s'avère très rafraîchissante après plusieurs écoutes.

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REDOO

Roken Is Dodelijk vs "Crackity Jones" Là aussi c'est du très inspiré par un groupe qui me touche pas forcément à la base... Au menu, beat électro, velléités pop naïves et excellent boulot sur les voix... Une reprise pleine d'ultraviolet nordique. Oui, il y en a de temps en temps à Lille.

elle plaira surement à d'autres... Hubresearch vs "Debaser remix" Marklion vs "Monkey Gone to Heaven Remix" Lepolair : Gouge away (Pan Aurora cover) Remix Du coté des remixes, les réussites sont variables : la version Aphex Twin-like faite par Hubresearch est dépaysante tandis que la piste de Marklion me donne envie de zapper. Et le lifting de Lepolair également. Ah, mais je n'apprécie que très rarement les remixes. 1/3, c'est déjà pas si mal. Sans rancune. A toi désormais d'écouter cette fabuleuse compilation (en téléchargement libre...) et d'adorer des versions qui m'ont laissées tièdes, de détester des relectures que j'ai adorées. Une chronique, on ne le répète jamais assez et pourtant c'est l'évidence même, ce n'est jamais que l'avis d'une seule (modeste) personne. Bravo aux groupes mais aussi à Pascal et Sophie (aussi instigateurs des projets Forest & Secret sessions) d'avoir porté ce projet à bout de bras. Oui, je suis un lèche- bottes. David

Cercueil vs "Hey" Là aussi une sacrée réussite que cette version de "Hey" de plus de 7 minutes d'électro hybride où la voix fantomatique de Pénélope atteint son office aisément. 10/10 sur l'échelle de l'endorphine. Et c'est quasiment mon morceau favori des Pixies, c'est dire si le challenge était élevé... Bobik Ou Sacha vs "Silver" Une réappropriation toute mignonne de "Silver" par Bobik Ou Sacha, groupe oeuvrant dans une frange pop à cordes, banjo et jolis voix. Très très plaisant. Pan Aurora vs "Gouge away". Egalement un de mes morceaux favoris des Pixies et ici, le résultat me laisse un froid là ou Cercueil, dans un registre cryogénisé similaire, touchait ma petite corde sensible. C'est pas grave,

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NOÏD

Clashing daily (TFT Label) en suivant la caisse claire et les notes coulent dans nos oreilles, tant et si bien qu’on est surpris que le disque soit déjà terminé quand la musique s’arrête. Pour ne pas verser dans l’idolâtrerie sourde, je reprocherais aux Noïd d’être un peu répétitifs sur quelques passages («Fair and free») et de ne pas suffisamment s’éloigner de ce qui fait leur identité, les nouveaux titres étant homogènes et collant à leur passé. Le groupe enfile les très bonnes compositions sans se mettre en danger et mon esprit perfectionniste pense qu’ils sont capables de repousser leurs limites et de faire encore mieux, en témoigne la partie quasi instrumentale finale de «Story of the next day».

Les amateurs de Noïd vont se ruer sur Clashing daily et ils ne seront pas déçus tant le groupe semble être au meilleur de sa forme et fait étalage de tous ses talents sur ce nouvel opus. Les Normands naviguent toujours entre rock et métal nous caressant la peau avec la lame d’un couteau bien aiguisé, prête à trancher dans le vif au moindre changement d’inclinaison... Et si certaines accélérations de tempos et quelques breaks sont soudains, le quatuor est toujours dans le contrôle, gérant son rythme, imposant ses dynamiques, dynamitant nos oreilles en douceur. Car oui, c’est une certaine douceur qui émane de la voix de David qui laisse filtrer pas mal d’émotions aux tonalités très rock, selon les aspirations de chacun on peut y voir le même genre de talent que chez Cave In quand ça touche au core voire à la tripotée de groupes aux origines plus punks (dans la famille The Get Up Kids) quand ça envoie tout droit, et pour autant, Noïd propose quelque chose de vraiment différent. Leur truc à eux. Un truc avec des guitares très proprement saturées, des riffs offensifs qui n’hésitent pas une seconde à taper du côté du stoner sur quelques mesures pour poser un titre dans la poussière avant de l’illuminer («Clashing daily»). Et quoi qu’ils fassent, aussi agressifs soientils, les pistes défilent tranquillement, on hoche la tête

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Toujours chez TFT Label (un micro label dont les autres signatures sont 7Questions, Bow Low et Milkorova), les Noïd ont fait confiance à la référence caennaise Guillaume Doussaud (dont la liste des excellentes prods est hallucinante et devrait faire réfléchir quelques groupes quant à leur choix de studio : Headcharger, 64 Dollar Question, Aussitôt Mort, A Lost Fear, Guns of Brixton, Amanda Woodward, The Elektrocution.), preuve, s’il en fallait, qu’on peut travailler localement et ne pas avoir à rougir face au monde. Oli

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Easy cure (Effervescence Records)

GENERAL LEE Raiders of the evil eye (Play the Assassin)

Comme l’imagerie visuelle et sonore d’ailleurs.

(«Blue pill» chanté par Jim et mélancolique à souhait, l’excellent «Skateboarding hurts more when you’re over 30» pop punk à fond les ballons, le garage noisy «Too drunk to truck» qui n’aurait pas déplu aux Beastie Boys).

Laquelle avec «LVCRFT» visite donc des paysages mythologiques (d’où la «Medusa « du troisième titre et de l’artwork) et/ou lovecraftiens exhalant assez étonnamment une violence relativement plus contenue que ce à quoi l’on pouvait s’attendre, comme si une fois encore sur cet album, General Lee avait voulu repenser sa manière de composer, d’instiller douleur et tourments sur ses créations pour mieux en apprécier les pulsions libératrices («Running with sharp scissors»). Le groove post-truc aussi, même si ce n’est plus forcément la clef de voûte d’une musique qui en a désormais plusieurs, ne se privant de la rendre plus organique que jamais. On appelle ça une remise en question créative pour laquelle le groupe s’est ouvert à de nouveaux horizons sans jamais trahir ce qui faisait sa griffe musicale originelle.

Evidemment, l’auditeur retrouvera tout au long de ce disque la «touche UMFM» caractérisée par des envolées lyriques (putain, les chœurs de «Distorted information» !), des refrains inoubliables («The only way to make it through the day») et des tempos plus ou moins rapides («Do you believe?», «You remind me the kids I used to hate at school»). Mais ce disque est différent, et je n’arrive pas vraiment à expliquer pourquoi. Peut-être que certains morceaux sont plus matures, moins accessibles, moins entêtant. Vas savoir. Ce qui est sûr, c’est qu’après plusieurs écoutes, je ne peux que me rendre à l’évidence : j’aime ce disque. Ah, qu’est-ce que j’aime quand les copains de Uncommonmenfrommars sortent un nouvel album ! Non pas que le groupe soit contre productif en terme de productions sonores et qu’il se fasse rare sur nos platines (preuve en est ce septième opus en une quinzaine d’années), mais le quatuor déjanté de Serrieres, véritable bombe scénique, a toujours sorti des disques punk rock d’excellente qualité. Et ce n’est certainement pas Easy Cure qui me contredira. Après une expérience chez Kicking Records le groupe a désormais rejoint l’écurie Effervescence Records et reste fidèle au studio Warmaudio (quasi à la maison) où a été enregistré ce nouvel album, tout en confiant le mix et le mastering à Ryan Green, vieille connaissance du quatuor (le gazier était aux manettes des trois premiers LP). Il en ressort un disque qui respire la spontanéité et la liberté tant en bénéficiant d’un gros son caractéristique du producteur américain. Le groupe ratisse large au niveau des compos, restant fidèle au punk rock mélodique («You remind me the kids I used to hate at school», «The only way to make it through the day», «Do you believe ?») et crasseux («Guess what?», le savoureux et véridique «Jim got in a fight with Brian Molko»), mais s’autorisant à sortir des sentiers battus

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UNCOMMONMENFROMMARS

J’aurais tendance à considérer ce Easy Cure comme un formidable condensé de leur riche carrière, mixant le fun, la rapidité, l’efficacité et la dureté de leur discographie. Ce qui est certain, c’est que ce groupe dont on pourrait ne plus rien attendre en 2012 arrive encore à nous surprendre. Uncommonmenfrommars reste une très belle machine de guerre et rien que pour ça, il mérite le respect. Alors courrez vite jeter une oreille sur ce disque et vous m’en direz des nouvelles .

A l’époque de Roads, on avait pu reprocher à General Lee de ressembler un peu trop à Cult of Luna période Somewhere along the highway. C’est à croire qu’ils nous ont écouté puisqu’avec leur nouvel opus, les Nordistes délaissent un peu le postcore lourd et tellurique de leurs débuts pour quelque chose de plus orienté rock-hardcore-punk («The witching hour»), avec quelques éléments post-rock et surtout une énorme dose de mélodies intensément salvatrices, déchirantes, portées par l’intensité palpable d’un «Medusa howls with wolves» qui fait toute la force de ce Raiders of the evil eye.

Si Roads avait pu être une légère déception ou tout du moins un album en deçà de ce qu’avait pu offrir Hannibal ad portas, le troisième album du General est donc celui qui fait basculer le groupe dans une autre dimension, celui-là qui démontre que cette fois, la formation nordiste est entrée chez les grands. Aurelio

Gui Disque de la maturité pour les General Lee, il est celui qui leur permet de ménager leurs effets et excroissances sonores («Alone with everybody») pour mieux libérer leurs éruptions de rage brute. A l’image de cet «Overwhelming truth» qui maîtrise ses progressions narratives en préparant le terrain à un «The end of bravery» qui vient violenter nos conduits auditifs en prévenant de son arrivée tout en assumant sa venue. Un mélange de post-rock élégant et de noise-hardcore salvateur, les riffs vont et viennent, les hurlements sortent de la cage thoracique pour s’encastrer dans les enceintes, mais surtout le groupe dépose ici sur la platine le climax d’un album dont il a su parfaitement maîtriser les étapes.

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THE ARRS

INTERVIEW

Avant de parler de choses plus récentes, quel bilan faites-vous de l'opération "Héros/Assassins" ? Les fans sont généreux ? Pour parler d'un bilan, Héros assassin a reçu un retour très gratifiant de la part du public. Que ce soit pour l'album studio ou l'opé sur le DVD Just live, on a la chance d'avoir une foule de sur-motivés prête à tout pour faire avancer le groupe et prêcher pour notre paroisse. Depuis nos débuts, on continue sur une phase ascendante, on gagne des amis au fur et à mesure du chemin. Et pour parler de générosité, comme une évidence, on peut juste affirmer que sans eux, sans vous, on n'aurait pas les moyens de continuer. Dans "Fahrenheit", on parle de "renaissance" et de "nouveau départ", au moment des changements de line-up, vous avez imaginé que ça pouvait être la fin de l'aventure ? Le départ de Paskual, même si il s'est fait dans les meil-

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leures conditions qui soient, a foutu un coup au moral au groupe. Mais comme dans toute rupture, on a appris à surmonter cette épreuve, et renforcer notre amitié et notre rigueur dans le travail. Paskual a taffé avec notre nouveau grateux, Stefo, des mois avant son départ. Et le fait qu'il ait passé le flambeau à Stefo de la plus belle manière qui soit, ne nous a laissé aucune expectative, il fallait continuer notre route. Pour ce qui est de Jerôme, le temps des remises en question a fait un peu de casse, et il a pris la décision de suivre sa voie, celle de sa famille et de sa femme. Ta question est donc au centre des thématiques de cet album, la renaissance, un nouveau départ. Mais il n'y a aucune fin envisageable à l'heure d'aujourd'hui. Qu'est-ce qui a changé avec les arrivées de Stefo et Phil ? Du sang neuf, et deux mecs aussi motivés et talentueux font forcement monter la pression et les ambitions du groupe, et l'envie de ne pas formater The Arrs, de le pousser vers le meilleur de nos précédentes prod, pour donner vie aux compos de Soleil noir. Qu'est-ce qui a motivé votre signature chez Verycords ? On avait le bébé bien au frais dans la boîte, prêt à le sor-

Musicalement, l'album est un peu un "retour en arrière" car beaucoup moins mélodique et moins estampillable "metalcore" que le précédent, vous n'avez pas composé de titres plus mélodiques ou vous ne les avez pas conservé pour Soleil noir ? En terme de compos, on n'a jamais été aussi productifs. Mais on est parti dans tous les sens avant de trouver une homogénéité certaine qui ferait de Soleil noir un nouveau chapitre à l'histoire du groupe. Si tu sens un retour en arrière, c'est aussi le désir des deux nouveaux de ressortir ce qu'il considérait comme le meilleur de The Arrs. Ils adorent Et la douleur est la même notre premier opus, son coté ultra catchy et très live. Ils apprécient également le coté théâtrale de Trinité et Héros assassin. Ils avaient besoin d'un mix, d'un best-of de The Arrs pour ce nouvel album. Y'a pas mal de pays pas trop loin (Angleterre, Allemagne, Pays-Bas...) qui pourraient apprécier The Arrs, vous avez des projets de ce côté-là ? A suivre, on a des retours. On verra ce qu'il se deale pour 2013... A ce propos, si les titres sont en français, c'est parce que c'est plus facile de s'exprimer dans sa langue ? Cet album est assumé 100% français. Un frein pour l'étranger ? Peut-être, à nous de creuser notre tranchée. Qui a réalisé l'artwork ? Encore une fois, c'est très réussi... On doit tout l'univers de Soleil noir à Benoit G. qui avait déjà réalisé l'artwork de Trinité. Après lui avoir fait tourner le son et les paroles, on a beaucoup discuter de nos envies, de nos ambitions autour de cette production. Il en est ressorti ce putain de Soleil noir. Pour les curieux,

retrouvez son univers sur son blog : ben-in-black.blogspot.fr.

INTERVIEW

Alors que Soleil noir débarque à peine dans les bacs, c'est Nico, chanteur de The Arrs, qui se charge de répondre à nos quelques questions sur l'évolution du groupe mais également sur le visuel, le clip ou leur futur proche...

tir en autoprod. Verycords est un "nouveau" label, une oreille fraîche sur la scène française, animé par des passionnés de métal et de mainstream. Quitte à signer sur un label, on avait besoin d'un coup de coeur réciproque. Ca a été chose faite, l'engouement de Verycords pour cet album nous a convaincu de signer.

Pourquoi avoir choisi le titre "Soleil noir", les nazis ont récupéré ce symbole, c'est pas dangereux de s'y associer ? J'emmerde, on emmerde ce genre de personnages et d'idéologie. Dangereux ? Non, il suffit de se pencher sur quelques phrases de l'album pour se rendre compte qu'on est à mille lieux de cette merde. Pour la petite histoire, mon feu père, a été résistant et déporté, notre position est claire et sans aucune idée de provocation ridicule sur ces sombres années de l'Histoire. A l'époque du tournage du clip de "Mon épitaphe", Djoul's était-il déjà devenu Mike Rugg ? Non, on ne connaissait pas du tout le personnage de Mike Rugg à l'époque, pour nous c'est un pote, Julien, chanteur de Post Offense. Obtenir un clip aussi bon, ça demande quel investissement ? Pour ce qui est de l'investissement de ce clip, on le doit à tous ceux qui l'ont rendu possible, notamment Ronan Lagadec, le réalisateur qui a mené le projet. Le concept était très simple, donner une lecture simple à un texte assez philosophique où la rhétorique est prédominante. D'où un certain nombre de clichés métal voulus dans la réalisation. Vous êtes supers actifs sur Internet (page Facebook, blog, Twitter...), ça ne vous prend pas trop de temps ? On est cinq, on s'amuse ! L'année 2013 sera consacrée à la scène, y'a déjà des gros trucs de prévus ? Oh oui !!! Restez connecté... Merci Merci Oli. Merci à Nico et à The Arrs, merci également à Verycords. Oli

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Music from another dimension (Sony Music)

Avant d’entamer la lecture de cette chronique, il faut que tu saches que la présence d’Aerosmith dans nos pages a fait l’objet d’un vif débat au sein de la rédaction. A ma gauche, les intégristes avides de décibels et technocrates de l’indépendant. A ma droite, les puristes amateurs de bon goût et respectueux des aînés qui ont participé à l’avènement du rock. Choisis ton camp, camarade. Je vous rassure tout de suite, je fais partie du deuxième groupe. Mais pourquoi une telle levée de boucliers ? Aerosmith, un groupe has been qui n’a rien à foutre sur ton mag numérique préféré ? Music from another dimension, le disque de trop pour un groupe qui aurait du raccrocher ? Pas si sûr. Nouvel album depuis 2001, Music from another dimension marque le grand retour aux affaires de la bande de Steven Tyler. Franchement, au moment d’enfourner la galette dans sa platine, on sait à peu près à quoi s’attendre : ça sera classic rock ou ça ne sera pas. Il y aura forcément des riffs imparables, des solis en place et des balades euh... peut-être dispensables. De ce côté-là, pas de surprises donc. Les riffs sont là ( « Oh Yeah », « Beautiful », « Out go the lights »...), les solis sont présents à la pelle et les balades, bah ... elles sont là (« Tell me », « What could have been love », « Can’t stop lovin’ you »). Aucun doute donc, il s’agit bien là d’un album

d’Aerosmith. Voilà, pour le fond. En ce qui concerne la forme, il y a bien sûr des choses à dire pour un disque que les fans attendaient depuis dix piges. Pour les passionnés du son et des arrangements, la production assurée par Jack Douglas et la paire Tyler/ Perry est imparable pour desservir un album pop rock lisse et puissant sans être agressif. Les gars en mettent partout (chœurs vertigineux, instruments à corde, j’imagine les dizaines de pistes sur la console !), ce qui aurait pu rendre le disque indigeste si nous n’étions pas en présence de pros. Malgré le grand nombre d’informations à enregistrer à l’écoute de chaque morceau, on ne pourra pas reprocher aux cinq de Boston d’avoir lésiné sur les moyens. Aerosmith opte depuis un bon nombre d’années pour une formule mélangeant morceaux rock et ballades dont ils sont devenus des experts. Mais contrairement à Get a grip, grand succès commercial du début des années 90, j’ai du mal à trouver le ou les morceaux qui se détacheront du lot et qui deviendront des tubes interplanétaires. Et même si les musiciens sont en forme (la voix de Steven Tyler est magique, la paire basse batterie fait des merveilles, et les guitares sont globalement inspirées) pour délivrer de bons morceaux, on ressent parfois la désagréable impression que les gars ne sont pas revenus uniquement pour l’amour de la musique et ainsi se retrouver dans un local pour envoyer des répètes endiablées. En résumé, Music from another dimension est un bon disque malheureusement sans surprise. Le fan d’Aerosmith sera comblé de bonheur à l’écoute de ce disque qui n’aurait très bien pas pu voir le jour (les relations entre les deux têtes pensantes de la formation US ne sont pas vraiment au beau fixe), l’amateur de rock au sens large du terme jettera une oreille attentive sur la nouvelle production d’un groupe qui sait écrire de bonnes chansons tout en regrettant que le quintet ne délivre pas un disque entier de boogie rock aux rythmes endiablés, et l’intégriste avide de décibels et technocrate de l’indépendant brûlera cette chronique tout en jetant un sort à mon patronyme.

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AEROSMITH

LENTO

Anxiety, despair, languish (Denovali Records) sième piste («Questions & answers»). Le contenu proposé y gagne en noirceur, en âpreté quand bien même le tout relève parfois de l’exercice de style à la technicité imparable (et implacable) certes, mais quelque peu roborative à la longue.

Troisième opus discographique à voir le jour chez Denovali Records en à peine plus de dix-huit mois, revoici les italiens de Lento qui pour la peine portent bien mal leur patronyme. En ce qui concerne leur productivité en tous cas, parce que d’un point de vue du tempo, Anxiety, despair, languish, joue la carte d’un sludge «mid-tempo» à des années lumières d’un hardcore punk épileptique et turbopropulsé à la vitesse de la lumière. Rien à voir même avec ce qu’est la formation italienne qui développe encore une fois un condensé de couches progmétal qui s’empilent les unes sur les autres pour ne plus former qu’un amoncellement de riffs massifs d’une densité étourdissante. Mais pas que. Prolixe dans sa propension à sortir des disques à un rythme soutenu, Lento est aussi volubile que changeant dans son approche stylistique, si bien qu’après un «Glorification of the chosen one» plutôt monolithique dans ses réflexes sludge quasi pavloviens, la suite avec «Death must be the place» aère un peu l’ensemble par instants, même si c’est pour mieux réserver un final résolument prégnant et outrageusement heavy. De manière à se muer en une sorte de rouleau-compresseur post-métallique d’abord insidieux dans son immersion dans les sphères du hard, puis plus frontal dès la troi-

Parce que des titres, Anxiety, despair, languish en compte une grosse douzaine tout de même (en fait treize pour être exact) et que malgré quelques très jolies finesses sur chaque pièce, la trame générale ne change pas (à l’exception dans sa première partie de la digression post-doom discrètement jazzy «Blackness») et vire même à la déclinaison immuable d’une ligne directrice dont chaque (ou quasiment) création est la variation. Non pas sur un thème donné mais sur une formule qui, si elle mélange magistralement sludge, métal, doom, postcore et prog toujours exclusivement en instrumental - en témoigne l’excellent titre éponyme de l’album - tourne un peu trop souvent à la démonstration de force et de maestria formelle, certes étourdissante, mais un peu répétitive. Quoiqu’impressionnante techniquement oui, on le redit («The roof», «A necessary leap»), Lento oublie un peu d’insuffler un supplément d’âme à sa musique. Pourtant le groupe s’essaie par instants à quelque chose de bien éloigné de ce sludge magmatique et oppressif qui fait sa marque de fabrique, sauf que cela ne fonctionne pas réellement (l’expérimental mais abscons «Years later», «Inwards disclosure» drone-doom bruitiste complètement halluciné...), si bien que l’on se dit que ce n’est que lorsqu’il revient à ses premiers amours sonores que Lento est réellement lui-même («Underbelly»). Quitte à tutoyer un peu trop souvent les limites d’un concept qu’il s’est lui-même imposé («Blind idiot good», «Unyielding unwavering»). Une œuvre paradoxale car à la fois brillante par intermittence et ennuyeuse en d’autres moments. Aurelio

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Burning motherfuckers (Handmade Records)

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BURNING MOTHERFUCKERS

THISQUIETARMY / YEAR OF NO LIGHT Split (ConSouling Sounds) que prégnante. Le tout est parsemé de quelques éclairs post-rock lumineux et confère au morceau une majesté propre au talent de YONL. Lesquels confirment quelques instants plus tard leur forme olympique sur le divin «Une odeur que je capte quand leur yeux explosent».

et ça marche plutôt pas mal. Le dernier véritable morceau intitulé «Voice in my head» dure 8 minutes et sollicite les nerfs de l’auditeur à persévérer dans les écoutes : des éléments catchy, d’autres beaucoup moins... Mais votre serviteur a fait le boulot à votre place et vous assure que cela vaut la chandelle. Les deux derniers sont des remix et ne sont pas aussi inintéressant que peut le suggérer de prime abord cet exercice. Laconic Zero rhabille «End of the line» pour une version «mathcore» pleine de saturations électro tandis que Zixaq donne une éspèce de groove robotique plus incisif à «Voice in my head». Un EP réussi donc et un retour appréciable pour Handmade records. David

Le label norvégien Handmade records (Mindy Misty, Izakaya Heartbeat) est de retour avec un EP du duo Burning Motherfuckers constitué de Thomas Eggum (basse, voix) et Øysten Monsen (batterie, clavier, voix). Il suffit de lire le nom du groupe pour s’attendre à de la musique qui dégomme sévèrement le bitume : et bien il y a de ça mais pas que ça... Et pour cause, «End of the line» démarre sur un riff entêtant, un chant type David Yow (The Jesus Lizard) qui peut s’avérer éreintant et agressif mais qui au final participe grandement à la singularité de ce groupe. Et nous v’là donc avec une attaque frontale qui n’a rien à envier aux meilleurs brulots des Pissed Jeans, avec ce squelette très épuré à la Minutemen. C’est donc tambour battant et sur la voie d’un noiserock sous amphétamines que Burning Motherfuckers entame les hostilités. Les deuxième et troisième titres, «Retired» et «Society», se la jouent mid-tempo et plus crooner dans la voix, le groupe cherche à tisser des ambiances, à titiller le tensiomètre de l’auditeur pour mieux toucher la corde sensible... Cette orientation n’en demeure pas moins séduisante, le propos devient moins monocorde, lorsque le groupe cherche à chatouiller le terrain d’un Nick Cave qui aurait bouffé deux-trois lions

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Sorti au printemps via Destructure Records au format vinyle LP et rapidement épuisé (ça c’est sans doute l’effet YONL), le split réunissant les postcoreux (mais pas que) bordelais et le one-man-band canadien Thisquietarmy a aujourd’hui droit aux joies d’une réédition CD par le biais du toujours excellent et très indépendant ConSouling Sounds (AmenRa, Alkerdeel ou encore Syndrome et Royal Talons...). Un programme forcément alléchant pour un ensemble de 4 titres présentant ce que les sphères indépendantes de l’underground ambient, postcore, sludge et doom hexagonal d’une part, drone/ ambient/shoegaze canadien d’autre part peuvent offrir de mieux.

Derrière l’arôme romantique mais glauque du titre (allusion à peine voilée au Parfum, roman culte de l’allemand Patrick Süskind) se cache la première des deux collaborations franco-canadienne avec le canadien Eric Quach aka Thisquietarmy. Une pièce qui au royaume évanescent des odeurs, explore avec saveur les affres d’un abîme sonore saturé par les effluves bruitistes de l’ambient/drone fleuve et narcotique des deux entités. Une expérience particulièrement immersive renouvelée pour le final de ce split avec «Langue de feu», languissant, littéralement incandescent de part sa densité sonore aussi organique que palpable et succédant à un «Aphorisms» mettant cette fois en scène un Thisquietarmy en solo. Pour un résultat aux textures drone expérimentales angoissantes laissant ses grésillements souterrains s’emparer de la psyché de l’auditeur dans un souffle presque morbide. Une danse macabre sentencieuse à l’image de ce split CD/LP collaboratif exhalant des senteurs aussi hypnotiques qu’obsédantes. Classe. Aurelio

Titres fleuves (entre 8 et 12 minutes trente à chaque fois), atmosphères ombrageuses et sinusoïdes métalliques à tous les étages, Year Of No Light comme Thisquietarmy délivre des pièces dont la lourdeur se veut oppressive, la noirceur saturée, la déviance auditive parfaitement assumée. Même si sur le premier titre du split, «Vous êtes un nada mort marchant autour du visible», les frenchies ne donnent pas tout de suite dans cette violence cendrée au nectar de sang qui a fait sa griffe musicale, avant de s’offrir enfin un climax à la lourdeur postcore baignant dans une mare doom aussi épaisse

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Black traffic (Verycords)

THIS PATCH OF SKY Newly risen, how brightly you shine (Oxide Tones)

guitare s’efface et change de registre, jouant davantage sur la délicatesse et la chaleur le temps de cette parenthèse chargée d’émotions. On retrouve cette atmosphère feutrée un peu plus tard sur les complaintes «Our summer kills the sun», «Drowning» ou «Diving down». La force passe alors par la mélodie alors que le reste du temps, c’est de l’énergie pure que transmettent les Skunk Anansie qui savent très bien gérer leurs efforts (la basse et le chant de «I believed in you» occupent parfois seul l’espace) sur la distance, accélérant même de temps à autres («Satisfied», «Sticky fingers in your honey») avant de reprendre leur souffle.

Après un retour mitigé en 2010 avec un Wonderlustre un peu trop... lustré justement, Skunk Anansie a mis de côté les dorures, a laissé tomber les producteurs les plus pops pour ne garder que Chris Sheldon (Foo Fighters, Oceansize, Pixies, Therapy?...), histoire de laisser davantage parler le côté sombre de sa force. Le noir est à l’honneur avec le titre (Black traffic), une pochette travaillée dans des teintes cendrées et une tracklist qui laisse présager une ambiance peu réjouissante («I will break you», «Sad sad sad», «Our summer kills the sun», «Drowning», «Diving down»...), on sait un peu où l’on met les tympans... Pourtant, loin d’amener la dépression dans tes oreilles, ce nouvel album de Skunk Anansie a tout d’une cure de jouvence ! Par certains plans, on se retrouve en 1995 quand on découvrait la puissance et la fraîcheur de Paranoid and sunburnt ! Et les Anglais ne tortillent pas du cul : dès «I will break you», l’attaque est frontale, la guitare fait tournoyer les riffs, Skin cisaille l’air avec son chant vindicatif et basse comme batterie enfoncent les clous. Lancé à grande vitesse, ce Black traffic ne ralentit véritablement le tempo qu’au quatrième titre («I hope to get to meet your hero») lorsque quelques violons s’invitent pour accompagner la voix toute en douceur de Skin. La

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Blindé de pépites explosives («Sad sad sad», «Spit you out», «Sticky fingers in your honey»...) et adouci par quelques sucreries («I hope to get to meet your hero», «Drowning»...), l’album que Skunk Anansie nous propose en 2012 est un condensé du potentiel de la bande de Skin qui a parfaitement sa place aux côtés de Paranoid and sunburnt et Stoosh tant les titres composés sont proches de l’esprit qui habite les hits «I can dream», «Weak», «Charity», «Hedonism», «Twisted (everyday hurts)». Ca fait du bien de retrouver un peu de sa jeunesse à travers le dynamisme des Londoniens qui ne se contentent plus de jouer du charme de leur chanteuse pour nous faire bander. Oli

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SKUNK ANANSIE

À chaque fois que je lis ou parle autour du Post Rock j’ai l’impression que tout le monde est unanime : quelle pertinence en 2012 ? Qu’est-ce que l’on apporte de neuf et comment ? Autant crever l’abcès immédiatement, il ne faudra pas compter sur This Patch Of Sky et Newly risen, how brightly you shine pour démêler ce sac de nœuds et sortir de son huis-clos un post rock qui se bouffe la queue. Après un premier Ep, The immortal, the invisible paru début 2011, This Patch Of Sky jeune groupe de l’Oregon, a sorti en juin 2012 ladite production aujourd’hui sur le billard. C’est par une petite phrase et avec une certaine admiration pour la modestie de notre groupe, teintée de «WhatTheFuck», que j’ai débuté l’écoute de cet album : «We know God has given us musical talent. In return, we have chosen to simply give these talents back to god in a way to glorifies him». (Vu sur le site de leur label Oxide Tones). Alors gavons nous de ce talent. D’épique et de belles harmonies sauce Majeur grandiloquent, de nappes et bourdons grouillants, de presque carillon ou mignardises du même genre, de vision post apocalyptique héroïque et guitares brillantes, parce que c’est tout ce que ce cd a à nous offrir... Concrètement une fois que le check du

trousseau du parfait petit PostRockeur est fait il ne nous reste rien. J’ai même envie de dire que ce qu’il subsiste c’est un seul mouvement réduit par une vision qui n’est pas aventurière, à rouler dans les mêmes sillons creusés par des dizaines de groupes avant. Vu 100 fois et vu en mieux ! Les groupes passés avait la décennie pour eux, la fraîcheur et la presque nouveauté pour certains... A l’écoute de Newly risen, how brightly you shine on est en droit de se demander où se dissimulent les prises de risque ? Les tentatives ? À l’heure où les clichés sont là, tout prêts à être utilisé, comme des sachets fraîcheurs : de l’envolée giga delay à la douce sur-saturation convenue de mauvais garçon. Non non non et non. Alors oui c’est mignon comme tout, c’est chou mais ça en devient chiant et consensuel. Je veux dire, forcément c’est beau, à force de mièvre on ne peut pas avoir un produit qui ne l’est pas. Enfin le beau, entendons-nous bien, c’est pas ce beau qui vous fera accuser une poussière passagère d’une larme à l’oeil, mais plus celui d’un tableau simplement technique et bien réalisé. Parce qu’à la réflexion il y a un truc qui vient planter la mécanique bien huilée de This Patch Of Sky. Plus que son nom encore c’est son son. Alors là, plus sérieusement, je ne sais pas ce qu’il s’est passé avec la batterie. Abus de trig ou production sur ordi par défauts de moyens ? C’est incroyable et presque drôle comment cette batterie rigide sans dynamique empêche le mouvement et fige l’écoute, paradoxe qui réduit l’horizon commun contemplatif du groupe ; surtout dans les syncopes robotiques. Même les choeurs sur l’avant dernier titre donnent l’impression d’avoir été composés avec le Preset Choir d’un arrangeur début 90. Ça m’emmerde toujours d’être dur comme ça, mais avouez le, les garçons de This Patch Of Sky, en 2012 on ne peut plus ignorer tout ça. Pour le reste, les références non digérées m’ont au moins donné envie de me réécouter This Will Destroy You, Explosions in the Sky ou ILIKETRAINS. Anthony

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Rock’n’roll is black and blue (Bad taste records)

A la première écoute de Rock and roll is black and blue, dernière production en date du trio canadien Danko Jones, je n’ai pas tout compris. J’ai même été légèrement déçu. Ok, ça rock, ça roll, mais il manquait un truc. Je n’ai pas pris dans la gueule à la première écoute le côté « explosif » du trio comme cela m’est arrivé avec Sleep is the enemy, album référence pour votre humble serviteur. Et puis, cette voix davantage dans les mélodies, ça collait pas avec le coté brut de décoffrage caractéristique au trio canadien. Enfin, aucun titre ne se démarquait dans mes écoutilles attentives, pas de hit interplanétaire se détachant des autres. Alors, j’ai relancé une fois la lecture avant d’abandonner ce disque dans les méandres de ma rockothèque... Puis une deuxième fois. Aujourd’hui, je ne sais pas à combien d’écoutes j’en suis tellement j’adore ce disque. C’est simple, je ne peux plus m’en passer. Bizarre docteur ? mais non, je vais vous expliquer !

 Premier album enregistré avec Atom Willard (batteur au pedigree intéressant : Alkaline Trio, Social Distortion, Rocket From The Crypt, The Offspring...), il en ressort un disque moins linéaire et peut-être moins monotone et plus fourni en mélodies. Pas de doute, le nouveau cogneur apporte quelque chose en plus dans la cohésion du groupe (peut on vraiment parler de groupe tant le

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charisme de Danko est impressionnant ?). Pour marquer le coup, « Terrifed » ouvre ce disque tel un coup de massue. Tout dans le rouge, on suffoque déjà, la machine est lancée, les riffs sont chauds bouillants. Et même si le pont de la chanson laisse entrevoir l’espoir pour l’auditeur de prendre sa respiration, c’est pour mieux supporter la fin du brûlot incandescent. Et ce n’est pas prêt de s’arranger avec un « Get up » entraînant et un « Legs » lourd et pesant. Mais déjà s’affichent quelques « gimmicks » vocaux quelque peu déconcertants au premier abord et qui ne semblent pas en cohésion avec le heavy rock brut et abrasif du trio. Et ça ne va pas en s’arrangeant avec « You hear me down » et « Type of girl » où l’ami Danko envoie des vocalises perchées. Et c’est bien là que le bonhomme a tout compris : en prenant des « risques » vocalement parlant et en s’épargnant tout au long du disque des lignes vocales parfois linéaires mais tellement efficaces, le guitariste chanteur s’ouvre un champ de perspectives pour ses prochains disques. Ok, je me répète, ça peut surprendre dans un premier temps, mais au final, j’ai le sentiment que ça apporte un « plus », une couleur, une chaleur à certains morceaux qu’on imagine pas, du coup, chantés autrement. Mais j’ai bien conscience que ça pourra rebuter les puristes.

 Pour le reste, musicalement parlant, et une fois digérée la surprise du chant, tout roule. Je dirais même que ça dépote. La magie du rock opère avec l’irrésistible « Conceited » (le voilà ce putain de tube !!!), l’organisme « Type of girl » (tiens, un deuxième tube !) ou « Always away » (merde, encore un tube !!!). Derrière, ça tabasse avec un basse batterie irrésistible, et devant, les grattes sont plus qu’inspirées. High energy meets Hard Rock/ Punk riffs. Belle équation, n’est ce pas ?

 Rock and roll is black and blue est au final un très bon album, plus mélodique et (un peu) moins punk rock que ses prédécesseurs. Toujours pied au plancher mais avec un peu plus de volupté, le dernier effort de Danko Jones peut surprendre mais ne vous y trompez pas, ce disque vous aura à l’usure ! A tel point que je suis pressé de voir ce joyeux bordel sur scène. Avis aux promoteurs. Gui

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DANKO JONES

METZ Metz (Subpop)

au jeu et on laisse alors Metz aligner sur la platine les torpilles post-punk sans baisser de rythme ni de ton (le fuselé «Get off», un «Rats» aussi sauvage que carnivore). Mais entre-temps, le groupe a le culot de larguer à pleine vitesse un «Sad pricks» thermonucléaire. Le compteur de décibels dans le rouge, une hargne contaminatrice et une envie débordante : on est KO debout mais on a le sourire.

Alex Edkins, Hayden Menzies et Chris Slorach sont Metz, un power-trio canadien qui (Metz)-câline (tentative de vanne épisode 1) Shellac, Pixies et autres The Jesus Lizard dans le tube à essai des influences avouées, trio magique d’une catégorie musicale dont on se réfère aujourd’hui autant pour se donner un genre que pour confirmer des prédispositions aisément devinées. Metz se voue au sein (Metz + sein = on ne dirait pas comme ça mais essaie des les travailler nos vannes) du label Sub Pop, un incontournable de sa catégorie (Dinosaur Jr, Mudhoney, Nirvana ou encore Soundgarden) sensé lui assurer une exposition maximum. A raison puisque le groupe tourne avec Oneida mais également Mudhoney et autres NoMeansNo et fait rapidement le buzz autour de lui...

Eponyme, l’album est ainsi une collection grenades noise-indie-rock-post-punk dégoupillées avec ce qu’il faut d’assurance pour faire de jolis dégâts dans la tuyauterie. Un disque gueulard («Knive in the water») qui s’offre un interlude ouvertement anti-mélodique avec l’acide et grinçant «Nausea» pour mieux propulser quelques instants un «Wet blanket» en forme de single détonnant mais évident. Sauf que pas selon les canons de l’industrie. Une sorte de coup de Trafalgar façon Metz lequel en propose ici un véritable modèle du genre. A Metz dans les oreilles de toute urgence... Surtout quand c’est pour enchaîner avec «Wasted» ou «The mule» et enfin «Negative space», toujours sans la moindre retenue ni hésitation mais une sacrée envie de faire cracher les flammes de l’indie-rock pour les aviver à coup de post-punk incendiaire. Pas une simple découverte de plus, non. Une véritable claque en bonne et due forme qui arrache les tympans comme rarement par les temps qui courent. Prends ça dans les dents le formatage pour les masses obéissant aux diktats de l’industrie du disque. Aurelio

Lequel se révèle justifié. Musicalement, on en prend d’entrée plein les conduits avec un «Headache» qui tape fort sur ses fûts en égrainant ses harangues rageuses, dopées par des riffs teigneux et une basse pesante qui colle les tympans aux amplis. Une puissance de feu considérable pour le genre et un objet sonore qui évoque assez immédiatement la déflagration A Place to Bury Strangers dans cette manière d’incendier les enceintes avec une fougue peu commune. Fatalement on se prend

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Bitches Palace (Shotgun Generation Records)

SHIKO SHIKO Best new bestiole (Laybell)

: grosses guitares, riffs entraînants, voix parfois haut perchées, refrains inoubliables, solis démoniaques, textes lorgnant de l’amour et de ses dérivés (« Give me your love », « Girlz », « S.E.X. »,.). Avec ce disque à 13 titres (il en manque 56 les gars !) à la production énergique et au son dans la lignée des premiers Mötley Crüe, Rakel Traxx ne fait pas les choses à moitié et propose tout bonnement une excellente carte de visite. Pas de temps mort, high energy du début à la fin (même si « Try again » offre une petite respiration en fin de disque), le moins que l’on puisse dire, c’est qu’on ne s’ennuie pas, même si, au final, l’ensemble formant une cohésion a tendance à se répéter sur la longueur. N’empêche que ça fait mouche à chaque coup de médiator, et on sent que le groupe n’est pas né de la dernière pluie.

Quand je feuillette les biographies des groupes que j’écoute, quand je reluque les livrets intérieurs des skeuds dans lesquels lesdits groupes posent (ou se pavanent), je reste toujours dans l’expectative s’agissant d’un disque de glam sleazy rock. Vous voyez où je veux en venir ? Non ? Ah. Non pas que je juge un groupe sur son apparence mais je me demande toujours si ces gars fagotés et maquillés comme des filles sont « sérieux ». Vous voyez toujours pas où je veux en venir ? Toujours pas ? Nom d’une pompe à vélo, mince alors. Je veux dire, le contenu du disque sera-t-il aussi ridicule que ces poses, ces attitudes, ces accoutrements qui faisaient fureur au débuts des 80’s quand Mötley Crüe et consorts arpentaient les scènes du monde entier pour propager la bonne parole, mais qui ont mal vieillis ? Ok, Steel Panther a changé la donne ces dernières années, permettant à ce grand bordel de revenir à la mode. En tout cas, ce n’est pas pour me déplaire, car j’adore ça. Et Rakel Traxx va faire bonne figure dans ma modeste rockothèque, tant le groupe marseillais (si si !!) assure. Avec Bitches palace, Rakel Traxx use et abuse (dans le bon sens du terme) des codes et autres ficelles du genre

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Après un peu moins d’une heure d’écoute de Bitches palace, me voilà convaincu : Marseille n’est pas qu’une ville de rap et de foot (l’est-elle encore pour le foot ?) : c’est aussi la capitale française du glam. Et même si je m’interroge encore sur le fait que ce groupe est une funeste blague ou un engagement sérieux à faire honneur aux légendes déchues que sont Ratt, Poison et Mötley Crüe, je me dis que c’est certainement les deux et que je passe trop de temps à réfléchir : seule la musique compte. Gui

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RAKEL TRAXX

vite dans ses travers positifs. Au bout de neuf titres, difficile de ne pas se dire que Shiko Shiko continue sa douce progression, les influences (on parle souvent de Battles, y compris votre serviteur, à leur sujet) semblent définitivement reléguées au placard. Bilan très positif donc pour ce premier album. Et comme ils tournent pas mal, on t’incite à aller les voir en live. Ils viennent d’ailleurs d’évan-Shiko Shiko-giliser l’Islande lors d’une date au Iceland Airwaves Music Festival avec les Cercueil. David

Après deux EPs assez convaincants, les grands coquins de Shiko Shiko reviennent avec un album intitué Best new bestiole. «Best» car ils reprennent quelques titres de leurs anciens méfaits. «New» car il y a aussi du neuf justement sur cette galette. Et c’est en terrain conquis que commence l’album puisque Best new bestiole s’entame sur une vieille composition, «D.P.M.M.P.D», qui m’avait déjà enthousiasmé à l’époque : un pot-au-feu électro indie-rock du tonnerre, entre phases percussives (néologisme = percussion + persuasive) extatique et énergie punk qui déboite quelques épaules. D’ailleurs, dans mon souvenir, c’est le titre qui leur sert de conclusion en live. C’est dire la folie que dégage ce morceau. La deuxième piste, «Let’s go to Pyongyang and kill a bunch of people», attaque d’emblée avec un habillage électro sucré puis le morceau part en vrille, toujours en côtoyant cette extase chère au groupe, avec quelques mélodies à la fois catchy et naïves, puis de jolies phases où le titre s’apaise pour mieux revenir dans du pur Shiko Shiko, c’est à dire la fête du slip. «Pandanosaure» est l’un des morceaux les plus surprenants de cet album, il s’introduit sur une nappe de clavier aux sonorités vintages pour partir sur des territoires moins encombrés qu’à l’accoutumée. Cette épure, qui leur va plutôt bien, reste toutefois momentanée est le groupe repart bien

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TECHDIFF P.Conv (Ad Noiseam)

quelques esquisses mélodiques en filigrane («Zero moment point», «Stochastic process»), P.conv se révèle être un modèle de maîtrise et de variation d’approche artistique. En témoigne le très beau et aérien «Xkiysa icwe olrxgln».

Projet de l’artiste et producteur breakcore/ambient/ electronica anglais Dave Forrester, TechDiff, encore méconnu à ce jour (un seul EP sorti en 2010), fait ses premiers pas chez la pointure Ad Noiseam, inlassable découvreur de talents et défricheur de nouveaux horizons sonores qui ici propulse l’entité anglo-saxonne sous d’autres spotlights que ceux des dance-floors auxquels elle était habituée jusqu’alors. Le résultat a pour titre, plutôt étrange, P.conv, et consiste en une dizaine de pistes oscillant entre minimalisme breakcore et sounddesign électronique clinquant. Avec quelques petites finesses et surprises au milieu.

On passe alors de la froideur clinique d’un mélange dont les sons rebondissent dans les quatre coins de la pièce à quelque chose de délicieusement hypnotique, sur courant ambient électronique aux volutes 80’s particulièrement classes. Pourtant, malgré ses digressions stylistiques, la griffe de Dave Forrester explore essentiellement la mouvance breakcore cybernétique («Positronic meltdown») avec ce bémol que l’on trouve dans la légère répétitivité de son travail («Decommission procession»). Alors que c’est lorsqu’il s’éloigne justement de ses territoires sonores, pour s’orienter vers quelque chose de plus ambient, atmosphérique, que TechDiff excelle. Un paradoxe étonnant pour un album se concluant sur un excellent remix ambient/dub-step/ breakcore de «Go fair» signé Hecq. Toujours surprenant et souvent efficace, quand il n’est pas brillant, P.conv est une énième découverte à mettre au crédit de la maison Ad Noiseam. Les habitudes ont l’oreille aiguisée. Aurelio

Une atmosphère résolument futuriste, textures robotiques («Elcolux 9») et groove mélodique aussi hypnotique que planant («Go fair»), TechDiff donne une première tonalité de l’album sur les deux premières plages, avant de basculer dans des ambiances ténébreuses, âpres, même glauques par moments («Sentience»). On s’attend alors à explorer les tréfonds d’une musique visitant les confins du drone, voire du doom et là encore, l’Anglais surprend son auditoire en la jouant breakcore technoïde avec un dansant «Thirteen acres» à la précision quasi chirurgicale. Les beats tranchés au scalpel, une mécanique d’horlogerie agressive et percutante,

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House of gold & bones Part I (Roadrunner)

BILLY TALENT Dead silence (Roadrunner)

et habile donne toute sa sève à des compos addictives. Si on rajoute des backvocals de goule affamée et l’on aura vite compris que ce guitariste n’est pas là que pour représenter les laques Loréal...

(sans intérêt) pour enchaîner ensuite avec un «Tired» qui synthétise tout ce qu’est Stone Sour avec House of gold & bones Part I : fade, sans inspiration et tournant à vide, en laissant Corey Taylor faire son numéro pendant que les musiciens derrière assurent le minimum syndical (et encore on est généreux là). Quand en plus il y a des arrangements à cordes d’une pauvreté incroyable, on est à deux doigts de couper le compteur.

Alors que Slipknot a annoncé sa mise en hiatus à durée indéterminée (qui vient de hurler de joie au fond de la pièce, on a entendu jusqu’ici ?), voici que Stone Sour, l’autre projet du chanteur des têtes de nœud de l’Iowa remet le pied à l’étrier deux ans après un Audio secrecy pas franchement convaincu et six après un Come what(ever) may clairement bancal. Bon en clair depuis le premier album, éponyme et plutôt très bien foutu, du groupe, le vrai/faux side-project des Knots bat pas mal de l’aile. Ce qui ne l’empêche pas de faire partie des meubles de Roadrunner depuis racheté par Warner Music mais ça, c’est déjà une autre affaire : aujourd’hui, les pierres qui ne roulent pas livrent avec House of gold & bones Part I, le premier volet d’un diptyque dont le second épisode (jusque là c’est logique) sortira l’année prochaine. «Gone sovereign», «Absolute zero» puis «A rumor of skin», on ne s’embarrasse pas des détails et on enfile la première fournée de titres pour se rendre compte de ce que l’on redoutait un peu, à savoir que Stone Sour en 2012, c’est du rock US sans vraiment d’âme, ni réellement de puissance, pas plus que de mélodies accrocheuses. En clair, juste du rock FMisé qui s’offre aussi une mini-ballade de 2’21 avec «The travelers pt.I»

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Parce qu’on n’a encore écouté que cinq titres et qu’il y en a quand même onze (et donc un deuxième album derrière à venir quand on aura oublié celui-là, merci ceux qui ont suivi), on expédie la suite et là petite surprise, cela se révèle un peu plus mordant sur un «RU486» qui ne casse pas non plus des briques, mais qui au moins, a le mérite d’envoyer un peu la sauce façon punk-rock métallique burné. Ce n’est pas encore la panacée, mais Stone Sour reste crédible. Pour mieux ralentir le moteur sur «My name is Allan» (poussif) et de faire le coup de la panne sèche avec la ballade pour blockbusters hollywoodien de série B (voire Z) «Taciturn» avant de se ridiculiser sur «Influence of a drowsy God», comme frappé par le syndrome Muse version rock presque couillu. Soit le coup du «j’en fais trois tonnes niveau grandiloquence de toutes les façons, plus c’est gros plus ça passe». Sauf que là non. Plus de doute maintenant, on se dirige vers un four intégral et comme les Américains n’ont pas envie de nous contrarier, ils n’en rament pas une et remplissent la fin de l’album avec «Travelers pt.II», du genre plus chiant tu meurs puis «Last of the real» R.I.P parce que finalement, vu que la quasi intégralité des titres était déjà à jeter, autant y aller jusqu’au bout histoire de larguer tout le monde en route. Non mais sinon, ils sont vraiment sûrs de faire une suite là ? Aurelio

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STONE SOUR

Billy Talent en a... Du talent s’entend (facile oui). Après I, II, III, le groupe pare son petit dernier d’un vrai titre, Dead silence, histoire de dire qu’il assume tout dans cette nouvelle sortie made in Roadrunner. Et lils font bien car en reprenant les basiques de leur style, les Canadiens signent une galette qui a un goût de futur classique, ne changeant rien quand certains voudraient qu’ils évoluent, enfonçant le clou dans ce qui fait leur identité : bref Billy Talent fait du Billy Talent et c’est déjà pas mal ! «Lonely road to absolution» ouvre les hostilités mettant tout de suite les choses au clair avec pourtant un titre assez éloigné des canons du genre : harmonies vocales en quadricolor, sens de la mélodie accrocheuse puissance 4 le tout au service d’une musique épique, en 1 minute 15 la messe est dite et le reste ne viendra que le confirmer. «Viking death march», «Runnin’ across the tracks», «Man alive» ou encore «Hanging by a threat» passent la surmultipliée pour des tubes immédiats où les 4 musiciens témoignent d’une maîtrise totale de leur sujet tout en conservant ce qui a toujours fait leur originalité. En cela le combo à la feuille d’érable peut remercier leur guitariste Ian D’sa dont le jeu fait encore une fois merveille. Ses arpèges alambiqués et éminemment mélodiques, mêlés à un jeu rythmique percutant

Après quelques écoutes, une impression bizarre nous gagne tant il devient impossible de séparer ces nouveaux titres du reste de la production du groupe, ces nouvelles pépites sonnant comme des évidences. Dans l’ensemble les structures restent des modèles d’efficacité («Don’t count on the wicked» semble décoller comme un airbus à l’approche de la minute 45, le reste du titre semblant avoir été construit pour amener cette progression) sans pour autant abuser de schémas pops surannés. Pour couronner le tout, le chant lead de Ben n’a jamais été aussi bon, traduisant l’éternel adolescent aux prises avec ses angoisses et ses doutes. Son timbre reste toujours aussi irritant mais il faut imaginer qu’avec le temps nos oreilles se sont habituées. Il est au final pratiquement impossible de mettre en avant un titre plus qu’un autre parmi les 14 morceaux que composent ce nouvel album de Billy Talent : inspiré, sincère et dévolu à sa propre cause, le groupe semble indestructible et taillé comme une machine de guerre punk rock partie pour ferrailler encore longtemps sur la scène internationale. Erwan

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MEL-P

Multiplicity (Jerkov Records)

On savait les Manimal un peu tarés, même eux ne s’en cachent plus puisqu’ils exposent au grand jour leur schizophrénie sur Multiplicity. Leurs différentes personnalités s’expriment tour à tour sans qu’on puisse aisément trouver des explications aux prénoms donnés aux titres... Chacun pouvant y voir des signes explicatifs divers et variés, les seules choses qui sont certaines sont que le groupe avait déjà joué à ce petit jeu sur Succube avec des titres de films et que le seul prénom féminin («Laura») est dû à la présence de Lussi (MyPollux, Lussi in the Sky). Elle comme Ludo (ex-membre et actuel Leiden sur «Edmond») sont invités sur un morceau alors que le guitariste Julian (également chez Dwail) est lui venu renforcer le combo pour cet ultime opus puisque Vidda a tenu à se libérer de la compagnie de son animal. Multiplicity, c’est 9 compositions, 9 visages, 9 personnalités, 9 façons de faire du métal, 9 prénoms qui sont autant d’ambiance peu évidentes à décrire par des mots pour qui n’est pas familier du style Manimal... Le premier, «Michael», une fois branchés les jacks, sonne et nous ouvre les portes d’un univers maëlstromique qui envoie les cheveux derrière les oreilles et fait fondre le cérumen. Break cinglant, démarrage vrombissant, c’est un «Nicholas» machiavélique qui s’offre à nous avec ce

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MANIMAL

Anima asylum (Autoproduction) chant à la fois séducteur et destructeur mais aussi des grattes éclairées qui ne sont pas sans rappeler Psykup. Après un murmure, «Ben» hurle son message, là encore, le chant est multiple (ça plaira aux fans de SOAD), le tempo complètement brisé jusqu’au silence qui amène sur scène «Corey» et son rythme matraqué qui élève la densité lors de quelques passages fracassants. «Christian» dope leur folie tourbillonaire et ses fameux riffs qui nous font boîter le cerveau... C’est ensuite avec Lussi et «Laura» que les Manimal s’mettent sur la gueule, si tu espérais un peu de douceur, tu repasseras... «Franck» et ses quelques moments lents, part dans tous les sens, il est vraiment difficile à suivre, c’est certainement le profil le moins évident de la galerie... C’est moins compliqué avec le taureau Scottie qui nous smashe la tronche et nous rosse tant et si bien qu’»Edmond» la joue pépère et balade acoustique au bord de la folie... douce et dure. Cet album est (a priori) le dernier du groupe qui a décidé d’arrêter ses aventures après une dernière tournée (à la vôtre) même si à l’écoute de ce Multiplicity, on regrette encore davantage cette décision. Les Manimal ont toujours eu une liberté absolue, on se voit mal leur demander de continuer à produire un aussi bon métal rien parce que ça fait du bien à nos oreilles. Non, on va juste leur dire deux mots assez proches : merci (pour tout) et merde (pour le reste). Oli

mystérieuses («Nyourk reliquus», «Persequor») pour déverser dans la minute qui suit un vrai déluge métallique («Sollicitudo», «Intermuralis»). La désorientation sonore est alors à son paroxysme et l’on ne sait plus vraiment où donner de la tête : Dub ? Death-Metal ? Math-Rock ? Ambiant ? Post-Rock ? Indus ? Un peu tout ça à la fois en somme. L’exploration est intense et cette prise de risque est jubilatoire. Ce disque est à l’image des tons de couleurs utilisées pour sa pochette : un peu de noir pour la virulence, un peu de blanc pour la pureté et des nuances de gris parsemées un peu partout pour tenir en haleine ceux qui sauront rentrer dans l’univers de ces musiciens qui n’ont pas peur d’infliger des maux sans mot. Ted Mel-P n’est ni la nouvelle chanteuse des tristement reformées Spice Girls, ni même le nom d’une artiste voilant son identité à coup de diminutif souvent évident. Non, le cas évoqué ici est manceau est pratique une musique hybride constituée de dub et de métal aux ambiances à en devenir maboule. La belle affaire car le W-Fenec est plutôt bon client de ce genre de mélange qui génère très souvent bien d’agréables surprises. Je pense instinctivement à Yerban Kuru, JMPZ et aux inévitables Dub Trio), si proches sur le papier mais tellement éloignés dans la réalité quand chacun élabore sa propre cuisine en fonction de son background. A en croire l’écoute de cet opus discographique, Mel-P semble avoir un passé métal assez sérieux. On ne laisse jamais des plans de tremolo picking sur un enregistrement par hasard. Anima asylum porte bien son nom. Le premier LP des Mel-P, faisant suite à leur plus tout jeune EP Nouvelles de la jungle, est à l’image de celle qu’ils souhaitent bien laisser à leur auditoire : névrosé, tordu, sombre et oppressant. Certes le parallèle avec l’univers psychiatrique est axiomatique mais il n’est pas synonyme d’insignifiance. Mel-P sait transmettre l’intransmissible, le combo jouant de manière éloquente quand il s’agit de maîtriser les ambiances mélodiques frigides et

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FARFI(Z)A SESSIONS (Laybell)

«Les Farfi(z)a Sessions sont une aventure humaine et musicale entre un orgue Farfisa des années 70 et 17 groupes Folk/Pop/Electro/Noise principalement issues du Nord de la France. Le Studio Noize Maker, à l’initiative du projet, a sauvé ce Farfisa Partner 15 qui trouve refuge entre ses quatre murs. Ce dernier suscite alors la curiosité de beaucoup de musiciens passant par là. Le casting s’est fait en grande partie sur des coups de cœur et au fur et à mesure» Et voilà, rien de tel qu’un petit speech promo pour résumer l’état d’esprit d’une compil... Mais ce que ne dit pas ce speech, c’est que cette compilation en deux volumes recèlent quelques bijoux et des découvertes assez fameuses, même pour un humble connaisseur de la scène nordiste. Alors bien sûr, dès que l’on écoute la compil’, les mots sur-usités concernant cette orgue mythique nous viennent à l’esprit : une coloration chaude et imprégnée de velours qui servira de fil rouge à une compilation dont les groupes œuvrent dans une frange à la fois proche et éloignée. C’est Gunter Carnaval qui entame les Farfi(z)a sessions avec un morceau pop au rythme hypnotique tandis que

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Louis Aguilar (déjà connu de nos services avec Louis Aguilar And The Crocodile Tears) délivre une mignonne chanson folk comme il en a le secret. Deux belles introductions. La suite n’est pas en reste avec Amélie qui nous permet de découvrir un bien joli timbre de voix et des dispositions en terme de songwriting qui ont de quoi laisser rêveur tandis que Tall Paul Grundy exploite au possible la température de l’instrument sur une piste qui plait assez rapidement. Premier titre véritablement électrique avec Marvin Hood dont la voix est toujours aussi segmentante tandis qu’O Superman, dont le sillon creusé, tranche également avec le début de la compil... Mais rien de grave, ça reste toujours super plaisant, avec à boire et à manger en fonction des dégouts et des couleuvres. Mention spéciale à Peru Peru qui occupe la dernière piste avec une chanson pop Pavementisé, dont l’orgue permet ici d’ajouter un supplément de naiveté à un groupe qui n’en a surement pas besoin. Car on le dit jamais assez, mais la naiveté et la pop, ça fait souvent bon ménage. On va éviter de vous parler de Grandaddy, oh et puis si en fait... Du coté de la deuxième compilation dans un registre rock/noise etc, c’est également la panacée en terme de découvertes. On passe sur Cercueil, L’objet, Shiko Shiko et Ed Wood Jr, des groupes déjà passés au crible lors d’une chronique et dont les pistes s’avèrent une franche réussite pour se concentrer sur les inconnus de l’étape. Notamment Luminocolor dont le travail sur les voix est assez hypnotique mais aussi Oui Mais Non qui offre un moment plein de tension latente. Du bel ouvrage en somme. En plus, les instigateurs du projet (les labels Noize Maker Records, Pilotti, Laybell et Ah Bon?) ont eu la bonne idée de publier ces compilations sur deux beaux vinyles avec des jolies pochettes. Très beau projet et encore un signe de l’émulation qui règne dans la capitale nordiste en terme de musiques. David

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FARFI(Z)A SESSIONS

DIE!DIE!DIE! Harmony (Golden Antenna Records)

la scène indie-rock/noise-pop moderne : l’explosivité d’une écriture qui se nourrit constamment d’une colère punk très actuelle («Erase waves»), la vigueur immédiate d’une spontanéité rageuse, l’urgence crue d’une musique dont le temps semble être compté («Trinity»).

On avait découvert les Néo-Zélandais de Die!Die!Die! en Europe au printemps 2011 avec Form, leur déjà troisième album qui s’était alors révélé une bien jolie surprise en matière de pop-noisy aux textures shoegaze et atmosphères comme projetées hors du temps, les revoici avec leur quatrième opus long-format, Harmony, sorti comme son prédécesseur par le biais du toujours très fin label Golden Antenna Records (Eathlimb, Kerretta, Maserati, Planks...). Une petite maison de disques indépendante basée outre-Rhin qui, au fil des années et des productions relevant quasiment de l’orfèvrerie artisanale, a su se constituer un catalogue des plus enviables sur le vieux continent.

Vocaux perchés et éraillés, une frappe de batterie très sèche et des ambiances old-school à tous les étages, Die!Die!Die! est toujours aussi révolté que son patronyme lorsqu’il dévoile son jeu, en maîtrisant ses élans les plus fougueux («Seasons revenge») ou à défaut en faisant l’étalage de toute son incandescence juvénile sur «No one owns a view». Electrisant. De l’électricité d’ailleurs, il y en a dans un «Changeman» résolument accrocheur comme sur «16 shades of blue», bien chargé en disto, toujours frondeur et bercé par des esquisses de mélodies déglinguées. Le riffing est cinglant et la hargne contaminatrice, les kiwis donnent dans l’indie-rock oui mais racé, pas du genre à se reposer sur ses lauriers pour plaire à la hype bien pensante se complaisant dans un confort critique écœurant («Get back»). Ici le groupe envoie les décibels mais pas que («Twitching sunshine») et surtout le fait avec une classe folle. Toujours imparfait certes mais pourtant régulièrement jouissif. Aurelio

Harmony, le dernier-né des albums à être débarqué de l’écurie allemande ne sera certainement pas celui qui infirmera le constat édicté plus haut. Piloté par des natifs de la Terre de Bilbo, ce nouvel opus a le bon goût d’effacer consciencieusement les reproches que l’on avait pu leur faire à l’époque de Form. Le songwriting a gagné en maturité, le chant, en constance et en naturel là où il était auparavant un peu trop trafiqué et l’on retrouve cette constance (le fougueux «Oblivious oblivion», l’éponyme «Harmony») qui semble affecter nombre d’excellents groupes évoluant en diverses cases sur

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KOMAH

Between vice and virtue (Spinal Records)

Dead and alive (Roadrunner)

c’est de l’américain typique, soit un pur truc d’entertainers metalcore prenant la forme d’un CD/DVD live emballé en s’appuyant sur un talent évident et blindé par un professionnalisme à toute épreuve lui-même doublé d’une efficacité quasi surnaturelle, Ferret Music & Roadrunner oblige.

oreilles un bon moment de jouissance technique. Néanmoins, lorsque l’on peut lire dans leur biographie que les belges de KomaH se démarquent par leur métal moderne, agressif et puissant sans pour autant renier leurs origines plus groovy, je ne retrouve pas cette impression à l’écoute de l’album. Groovy ? Où ça ? Ne vous y trompez pas, KomaH est un bon groupe de metal hardcore. Ils rappellent sous bien des coutures Do or Die, Madball ou encore H-Tray, mais ne vous attendez pas à un niveau supérieur par rapport à leur premier album. Nous attendrons leurs prochaines créations pour y trouver, peut-être, le petit quelque chose qui démarquera vraiment le groupe des milliers d’autres dans le genre. Charlotte 3 ans après Straight line et un bon buzz médiatique les emmenant à tourner aux côtés de Pro-Pain, KomaH, revient sous le feu du hardcore avec un deuxième album long-format : Between vice and virtue. Alors, est-ce goûtu ? Première alerte : l’artwork de l’album. Surtout ne vous y arrêtez pas. Rayon cliché, le groupe a tapé dans le mille (un ange démoniaque, quelle originalité !), mais la musique étant le seul sujet digne d’intérêt pour juger de la qualité d’un groupe, allons directement à l’essentiel : Between vice and virtue est un album cohérent qui s’inscrit dans la suite logique du premier. Nous regretterons néanmoins l’absence de prises de risque et de bonnes surprises, si ce n’est la participation à cette galette de Gary Meskil et Adam Philips, chanteur et guitariste de Pro-Pain pour «The king of raptors». Et sinon ? Sur l’ensemble des morceaux, on retrouve des riffs furieux en pagaille tandis qu’au quatrième, «A humbling experience» le groupe tente une introduction plus aérienne que de coutume, sans grand succès. Plus loin par contre, les morceaux «Last way to Cerberus» et «Beyond the limits» nous offrent des passages avec instruments à cordes et des ambiances post-apocalyptiques millimétrées à la perfection qui offrent aux

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THE DEVIL WEARS PRADA

Oui on l’a tous imaginé au moins une fois juste pour la déconne, passer du The Devil Wears Prada à fond les ballons dans un magasin rempli de jeunes lectrices du phénomène littéraire (si si, c’en est un) dont a été adapté le film du même nom. Alors d’accord c’est quelque chose d’un peu retors mais par conséquent terriblement tentant. Parce que si les petites nymphettes ont les conduits auditifs pas encore déflorés, avec ces Américains-là, elles vont comprendre leur douleur. Mais si jamais elles ont envie de se frotter au genre métallique, elles peuvent se déguster Dead and alive, le premier CD/ DVD live de la machine de guerre TDWP qui brosse un portrait particulièrement bruyant de ce qu’est un live des coreux originaires d’outre-Atlantique. Soit une grosse dérouillée métallique dopée par un charisme de showman et un son drôlement bien équilibré car même si évidemment, vu (et entendu) ce dont ils sont capables en studio (en témoigne l’énorme Death throne sorti l’an dernier déjà chez Roadrunner), il est forcément bien difficile d’arriver à être comblé avec un rendu live normal. Pourtant, là cela fonctionne et la première volée de titres, avec «Dead throne», «Untidaled» ou «Escape», ne fait que confirmer l’évidence. Gros son, charisme phénoménal, grosse prod’, gros tout en fait :

Pas avare dans la débauche de moyens comme de la «mise en scène» de son show, The Devil Wears Prada propose en sus une tracklist tout bonnement mortelle, avec des titres du calibre de «Born to lose» véritable ogive metalcore calibrée pour faire mâle, de l’impérial «Kansas» ou encore de l’hymne «Mammoth», taillé pour le live, le groupe sort la grosse artillerie et n’hésite pas à en mettre partout dans le public. En même temps, c’était l’idée d’enregistrer et faire une captation vidéo d’un concert alors autant y aller gaiement, quitte à balancer au milieu de la set-list des titres un peu dispensables («Vengeance», «Outnumbered», «Dez Moines») tout en jetant toutes ses forces dans la bataille sur des titres de guerriers à l’image de «Hey John, what’s your name again?» et ses harangues teigneuses ou «Dogs can grow beards all over» appuyé par un groove rock’n’roll détonnant, évidemment plutôt bien charnu dans son genre (sachant que le contraire eut-été bien étrange). Une ambiance chauffée à blanc pour un mitraillage en règle des tympans par un groupe expert ès-metalcore qui butine sévère, Dead and alive est la concrétisation pure et simple (et dure aussi) sur support CD /DVD live de Dead throne. Une suite «logique» qui paie sa tournée en concassage de décibels. Aurelio

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INTERVIEW

L'album sort en CD dans quelques jours, mais le disque est dispo depuis le début de l'année en version microsillons : pourquoi tant de décalage ? La sortie du disque en CD n'est-elle pas trop tardive ? Oula. La question qui fâche ! Ah ah !!! Alors, comment expliquer tout ça simplement car c'est assez compliqué ! En fait, on s'était fixé l'objectif d'enregistrer l'album comme prévu en novembre sauf qu'entre-temps on a eu cette opportunité de monter une grosse tournée avec Burning Heads à partir de février 2012. Du coup, c'est un peu ça qui a tout fait speeder ! On s'est dépêché d'enregistrer l'album et de le faire mixer/masteriser dans la foulée pour espérer le sortir juste avant la

guitaristes, bossait des morceaux de son côté et les envoyait par mail aux autres. On les a ensuite joués tous ensemble sur les 2-3 week-ends qu'on avait réussi à bloquer. L'avantage est que notre chanteur a un chouette studio d'enregistrement chez lui, le Indie Ear Studio, et qu'on a pu maquetter les morceaux avant de les enregistrer réellement ce qui nous a permis d'avoir un peu de recul et d'effectuer quelques petits changements entre-temps. Du coup, on a fait les prises instrus courant novembre 2011 puis les chants début décembre. On a ensuite fait mixer ça au Warmaudio à Lyon puis masteriser aux Blasting Room Studio aux USA.

tournée. Sauf que tout ne s'est pas passé comme prévu ! Très clairement, tu ne peux pas sortir un skeud dans de bonnes conditions c'est à dire avec un bon label et une bonne distribution en faisant ça dans le speed ! On aurait pu le sortir en autoprod et l'avoir à temps pour le vendre sur table mais c'était chaud financièrement pour nous, je n'avais pas le temps de m'occuper de cette partie car le reste me prend déjà beaucoup de temps et l'idée de bosser avec Crash nous branchait bien ! Je ne connais pas tous les tenants et aboutissants mais, grosso modo, quand tu bosses avec une boîte comme PIAS pour la distrib qui sort plein de gros trucs chaque mois, et bien tu n'es pas une priorité et ça peut prendre plus de temps

INTERVIEW

pas mal de groupes, on n'a pas vraiment fait de pause concerts pour composer l'album. En fait, pas mal de données font qu'on n'a pas beaucoup l'occasion de répéter et de s'enfermer plusieurs jours pour bosser des nouveaux morceaux. Depuis quelques années, on est un peu tous dispatchés car notre guitariste vit en Suisse et notre batteur à Strasbourg. En plus, les 2 sont devenus papa entre-temps. Bref, tout ça pour dire qu'avec tous les concerts qu'on fait chaque année, en moyenne à peu près 50, on répète peu et on ne trouve pas assez de temps pour bosser la composition comme on voudrait. Du coup, pour cet album, chacun, enfin surtout les 2

Eric est un bon gars. Et il a bon groupe. Et comme sur le W-Fenec, on aime les bons gars (enfin, n’y voyez aucune connotation sexuelle bien sûr) et qu’on aime son bon groupe, il n’y a pas de raison de se priver des bons mots d’un activiste de la scène punk rock. De la gène de Deactivated, nouvel album à paraître dans quelques jours, aux incessantes tournées de ces derniers mois en passant par le futur du groupe, tu sauras tout (ou presque tout) de The Rebel Assholes. Hey, ho, let’s go !!!

Salut Eric, ça roule ? Bon, on ne va pas se mentir, on est content de retrouver The Rebel Assholes sur disque pour un effort longue durée. Peux-tu me faire un petit topo de ce qui s'est passé pour le groupe depuis la sortie de Click and say yeah ! ? Alors, depuis le 1er mars 2009, date de sortie de notre deuxième album Click and say yeah !, il s'est passé pas mal de choses... Tout d'abord, on peut dire que c'est avec cet album qu'on a pu passer un cap et se faire véritablement connaître dans la scène Punk Rock française. Il était sorti à l'époque sur Productions Impossible records/Anticraft et on l'avait bien bossé en terme de promo. On l'a aussi bien défendu sur la route en tournant beaucoup en France et à l'étranger, on est allé en Allemagne, en Hollande, en Belgique, en Suisse... On a aussi ouvert pour pas mal de grosses pointures : Anti Flag, Beatsteaks, Mad Caddies, Snuff, The Adolescents, Teenage Bottlerocket, Youth Brigade. Il y a aussi eu cette tournée « Vans Wheels Of Rock » qu'on a fait en mai 2010 et qui changeait pas mal de nos habitudes. On s'est retrouvé pendant 10 jours à voyager dans un gros tourbus avec quelques-uns des meilleurs riders BMX mondiaux et à jouer dans des skatepark ou sur des gros event comme le FISE à Montpellier.

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Sinon, on a également sorti un split vinyle & CD avecDumbell, un très bon groupe de Punk R'N'R Garage mi américain / mi allemand en janvier 2011. On avait l'envie à ce moment-là de partager une galette avec un groupe étranger, de pouvoir s'ouvrir mutuellement des portes et un ami en commun nous a mis en relation... On a effectué 3 tournées avec eux dans l'année, une vingtaine de dates au total, en jouant en France, en Allemagne, en Suisse et en Espagne ! Ce que l'on retient le plus ce sont les super moments partagés avec eux. Enfin surtout le chanteur, Paul Grace Smith, accompagné de ses différents zicos car le line up changeait sur chaque tournée ! Sur la dernière, ce sont même les amigos Nasty Samy et Turbogode qui assuraient le basse/ batterie ! Tourner avec des mecs qui font ça depuis plus de 25 ans est super formateur au final ! D'ailleurs, sans forcément le vouloir, on a justement pris l'habitude de tourner avec des « anciens » et on kiffe bien ça ! T'apprends beaucoup aux côtés de ce genre de mecs qui ont consacré presque toute leur vie au Punk Rock ! Comment s'est passé le processus de création de ce nouvel album ? Dans le speed comme d'hab ! Ah ah ! Contrairement à

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INTERVIEW

dates sur 62 avec eux en 2012 et on a encore quelques week-ends de prévus ensemble l'année prochaine. Très clairement, c'est un peu un rêve qui s'est réalisé pour nous. On est fan du groupe depuis pas loin de 15 ans et même si on avait déjà joué avec eux auparavant, jamais on aurait espéré en faire autant.

Ces derniers mois ont été prolifiques en terme de concerts, avec notamment cette énorme tournée avec les fabuleux Burning Heads : comment s'est montée cette tournée ? C'est clair que cette année aura été prolifique en terme de concerts. En bientôt 10 ans d'existence, 2012 aura été notre plus grosse année à ce niveau ! En fait, Je suis rentré en contact avec leur tourneur 3C Tour pour les faire jouer à plusieurs reprises avec Mighty Worm, l'asso qu'on a créée avec des collègues en 2003, un peu en même temps que le g r o u p e. Je me suis bien entendu avec la personne qui se charge de leur booking, lui ai filé quelques coups de main et ce dernier nous a rendu la pareille en nous permettant d'ouvrir pour eux et The Adolescents à la Maroquinerie à Paris en juin 2011. Il a aimé le groupe, on a continué à rester régulièrement en contact et c'est de là qu'a émergé l'idée de monter le plateau « Burning Heads + The Rebel Assholes » pour une tournée européenne en 2012. On a enchaîné 25 jours de tournée en mars dernier à travers l'Europe : France, Belgique, Hollande, Allemagne, Croatie, Autriche, Slovénie, Suisse et Italie et on a joué presque tous les week-ends avec ce plateau en avril, mai et juin en France et en Espagne. Au total, on aura effectué 54

Sur Deactivated, on retrouve la « touche » TRA qu'on identifie dorénavant facilement. Je me trompe ou alors il est exact de dire que le groupe a réussi le pari de développer sa propre identité sur disque ? Je ne suis pas assez objectif pour parler de la musique de mon propre groupe. Evidemment, je pense qu'on s'est amélioré avec le temps et qu'on a développé notre propre style. Après, on ne prétend rien inventer... Nos influences doivent forcément se faire ressentir mais je ne pense pas non plus qu'on soit une copie conforme de tel ou tel groupe, comme c'est parfois le cas dans cette scène. Enfin bon, comme dans tous les styles finalement tu me diras ! Dès qu'il y a un groupe locomotive qui marche bien, il y a forcément plein de groupes qui surfent sur la vague comme c'est le cas actuellement avec l'électro pop ! Excellente surprise que ce "I'm guilty" très influencé par Second Rate et d'ailleurs chanté par Sylvain (batteur chanteur du groupe bisontin) : hommage ? Ce groupe a-t-il mis un coup dans la fourmilière du Grand Est et ouvert des portes pour des groupes comme le tien ? Héhé. Je savais qu'elle te plairait vu l'amour que tu portes à Second Rate ! Figure-toi que c'est moi qui ait composé cette zik, la seule de l'album d'ailleurs...! Je ne sais pas si c'est vraiment un hommage à Second Rate mais c'est sûr qu'on y ressent l'influence tout comme celle de groupes tels que Samiam que j'affectionne particulièrement. J'ai proposé à Bombled d'écrire les textes et de chanter dessus car j'adore sa voix, tout comme les autres membres du groupe ! Alors, forcément, ça fait

à Paris le 20 avril et peut-être un groupe anglais dont on est fan mais dont je tairais le nom. Affaire à suivre ! Le mois d'avril s'annonce particulièrement chargé avec beaucoup de concerts en France et une tournée Chine/Japon qui est en train de se monter... Si tout se passe comme prévu, il y a des chances qu'on soit sur la route pendant pas loin d'un mois ! Bref, 2013 s'annonce également comme une bonne année pour le groupe et on en est ravi !

crédits : Florian Denis penser à du Second Rate ! Concernant ces derniers, c'est clair qu'ils ont laissé des traces. Il m'arrive encore assez souvent d'écouter certains de leurs albums. Mon époque préférée était celle du split avec Scuttle. Leurs morceaux sur ce split sont excellents ! A l'époque, ils étaient un modèle de débrouillardise dans notre région, surtout Nasty Samy qui se bougeait à fond le cul pour le groupe, créant des liens avec tout ce que la scène underground pouvait compter comme activistes : fanzines, radios indés, assos... Ce sont ce genre de mecs tout comme MinMin des Flying Donuts pour ne citer que lui qui m'ont donné l'envie de faire la même chose pour mon groupe, c'est-à-dire passer des heures à envoyer des mails ou passer des coups de fil pour qu'il se passe des trucs avec le groupe !

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que tu ne le pensais. C'est sûr qu'on aurait préféré sortir l'album avant, on a quand même envoyé un bon paquet de dates avec ce set, mais si tu prends le truc à l'envers, cette tournée avec les Burning nous aura permis de bien faire parler du groupe avant la sortie de l'album et de bien préparer le terrain.

Quels sont tes albums du moment ? Alors, sans ordre de preférence : le dernier Hot Water Music : Exister, le dernier Dinosaur JR : I bet on sky, Graveyard : Hisingen blues et, côté français The Decline : Broken hymns for beating hearts. Avec ton recul, quel est ton sentiment sur notre nouveau format « magazine pdf » ? Je trouve personnellement que c'est une bonne idée. Bien entendu, je préférerais que ça soit un fanzine mais je connais les contraintes... Du coup, c'est un bon compromis et c'est assez plaisant à lire. En tout cas, c'est une chouette initiative ! Merci Eric !!! Gui de Champi (Retrouve l’intégralité de l’interview en cliquant ici)

Que va-t-il se passer pour TRA dans une semaine ? Dans un mois ? Dans un an ? Alors, on tourne actuellement un clip avec Scopa Films, notre premier en bientôt 10 ans ! C'est pour le morceau "Set like a machine" qui sortira probablement tout début janvier 2013. On a encore un week-end de concerts avec les Burning en décembre et après, on prendra une petite pause d'un mois, le temps que notre chanteur se barre pour un trip vacances au Pérou. On enchaînera ensuite dès fin janvier avec une bonne tripotée de concerts étalés sur l'année en compagnie de groupes tels que Flying Donuts, Burning Heads, The Decline, Les Sales majestés avec qui on effectuera plusieurs dates dont le Bataclan

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We lack time, but we don’t waste it (Opposite Prod)

CLOUD NOTHINGS Attack on memory (Carpack Records)

a good place to hide)» et son break aérien qui repart ensuite sur du DevonMiles typique... c’est à dire du tout bon. Et il ne faut pas négliger non plus «Tommy Gavin» dont l’entame mid-tempo et le chant en mode spokenword me rappelle étrangement le Rollins Band de la grande époque, avant de repartir sur ce punk-rock des familles qui fait carrément du bien par où il passe. On valide donc et plutôt deux fois qu’une.

à la griffe personnalisée (du ténébreux et addictif «No future no past» à l’outrancier «Cut you» en passant par le survolté et accrocheur «Fall in»). On valide les yeux fermés et plutôt deux fois qu’une.

Ah, et DevonMiles, c’est le vieux monsieur aux cheveux gris qui chapeautait les missions de David Hasseloff dans K-2000 (oui, on a connu les 80’s...), c’est dire à quel point ce groupe est respectable, même dans leurs références. Ils peuvent donc être très fier de ce We lack time, but we don’t wast it. En effet, aucun gâchis ici. Même le digipack est super joli, c’est dire... Il se sera fait attendre ce premier album long-format signé DevonMiles mais le moins que l’on puisse dire, c’est que ça valait diablement le coup. Les gaillards ont eu le temps d’affiner leur punk-rock mâtiné de relents émo (dans le sens At The Drive-In et Fugazi du terme, donc fatalement rien de péjoratif là dedans) et le résultat est plus que satisfaisant. D’ailleurs, on retrouve dès le premier titre tout ce que l’on demande à un album de ce type, soit des mélodies accrocheuses, une voix plaisante avec un joli grain, des phases qui scotchent rapidement les neurones. «Mr Advice» est donc une excellente entame d’album et une belle prise de contact avec un combo que l’on connaissait finalement assez peu, voire pas du tout même pour certains à la rédac. Et le groupe ne faiblira pas, fort d’un songwriting qui n’a rien à envier à personne : «Golden cage», la seconde piste avec un riff incisif, est ainsi un joli tube à mettre à leur actif, à tel point qu’au bout de deux-trois écoutes, le morceau squatte déjà les neurones de manière assez définitive. Parmi les autres morceaux de ce We may lack time, but we don’t waste it, tous plus excellent les uns que les autres, se démarque agréablement «Lack of time (it’s

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David

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DEVONMILES

3 disques en 3 années et des poussières, un « simple » one-man band devenu accidentellement LE truc à suivre du moment et accessoirement un vrai groupe, une trajectoire assez météoritique et une vitesse de propagation de buzz proprement effarante, la comète Cloud Nothings fait gazouiller la blogosphère indie/pop/rock depuis quelques temps déjà alors forcément, le W-Fenec devait finir par se pencher sur la question. Et puis caution Steven Albini (aka Mr. Big Black, Rapeman et Shellac) aux manettes oblige, il y a des trucs comme ça à la rédac’ qui envoient invariablement un bon gros ping sur le sonar interne. On peut le comprendre en même temps. Cela étant, les buzz préfabriqués, généralement au WFenec on les évite comme la peste bubonique. Les coups marketing, ça va merci on a donné en quinze ans. Mais quand c’est un « truc » qui prend de manière un peu inattendue, là, il y a sans doute matière à étudier le cas clinique au spectromètre de masse. D’autant que petite surprise tout de même : au lieu d’un disque vachement calibré indie hype, on a droit à une jolie mixture sonore rendant joyeusement hommage aux vénérées 90’s (si si, ici on les vénère). Le résultat sonne indie-rock, poppunk, noise, garage, post-hardcore et l’on se dit que Cloud Nothings a parfaitement ingéré/digéré ses classiques et influences pour en proposer ici une exégèse

En plus de connaître leur sujet, on l’a dit précédemment, sur le bout des riffs, les américains ont juste ce qu’il faut pour faire bouillonner les enceintes. Avec des torpilles sonores de l’efficacité d’un «Wasted days» à la fougue juvénile contaminatrice, ou en usant à loisir des atouts du single pop-punk évident qu’est «Stay useless», ils développent un cocktail sonore de tout ce que les 90’s ont apporté sur la scène musicale d’aujourd’hui, sans jamais s’abaisser au plagiat éhonté (le fougueux «Separation», «No sentiment» et sa harangue noise-rock teigneuse). Le résultat est de fait particulièrement électrisant même si le groupe ne s’évite pas quelques facilités peu nécessaires sur un «Our plans» qui tourne peu à vide après deux/trois écoutes successives. Une élégance racée, des compositions savamment fuselées et un songwriting à l’irrévérence que lui autorise l’éloquence de ses jeunes années, Cloud Nothings est au mieux un groupe débordant de talent, au pire un recycleur particulièrement doué. On a connu des débuts bien plus délicats chez des groupes qui sont par la suite devenus grands. A suivre de près. Aurelio

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STUPEFLIP Terrora !! (Etic System)

par son passé délirant («Crou genesis»), s’en sert pour entretenir cette terreur intrinsèque au culte (ayons une petite pensée à ce pauvre Joël qui continue à se fait martyriser ici sur la fin de l’introduction).

Le retour l’année dernière du gang le plus taré du paysage musical français a été autant surprenant que l’étendue du succès qui a suivi sur sa tournée. Stupeflip surfe donc sur ce come-back triomphant et publie sans prévenir à la mi-septembre un EP de six titres intitulé Terrora !!, disque accompagné d’un DVD live d’une heure capté sur les dates de The hypnoflip invasion. On se dit d’emblée qu’il n’y a pas foutage de gueule sur la marchandise même si au final, ce sont quatre «réelles» compositions originales qui viennent s’ajouter à ce tableau de chasse, si l’on omet l’introduction, l’interlude et la chanson cachée finale toujours synonyme d’exutoire virant au grand n’importe quoi. Hourra, on a échappé aux remixes ! Terrora !! n’a pas le profil du disque qui va impressionner, trop proche du dernier album. Quand on connaît un temps soit peu l’aventure du «crou» et l’interminable attente entre Stup religion et The hypnoflip invasion, soit six ans, on se dit que ce dernier aurait du/pu faire figure de révolution pour cette formation obnubilée par les ères. Inévitablement, on se rend compte avec cet EP que la «menuiserie» n’a pas vraiment changé de bois, ni même d’outil. Pire, l’auditeur se retape certain vieux samples utilisés sur le premier album. Stupeflip, hanté

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Rentrons dans le vif du sujet. Le trio nous a épargné le retour de Pop-Hip (ah oui, il est mort, c’est vrai !) et sa synth-pop rétro parfois imbuvable pour un hip-hop sans grande surprise dans la droite lignée de ce que fait le groupe depuis plusieurs années. En clair, Stupeflip ressort du tiroir ses prod’ bien agencées aux boucles à la fois sombres («Nan ?.. Si ?») et festives («Le sonkifoudécou») et aux flows toujours dévastateurs dans le fond comme dans la forme comme sur «Strange traps» où la formation varie les types de voix à chaque couplet. Contrairement aux LPs, les morceaux de Terrora !! ne dépassent pas les trois minutes et filent donc à la vitesse de la lumière ce qui nous oblige rapidement à se délecter du DVD livré avec. Enregistré à l’Olympia, du moins on le devine, le show est à l’image du groupe : mystérieuse. Doté d’une mise en scène savamment pensée faite entre autres de déguisements flippants, ce spectacle revèle dans un climat sectaire des réorchestrations des morceaux étonnantes à l’instar du cultissime «A bas la hiérarchie». Une vraie valeur ajoutée à cette nouvelle sortie malgré une durée relativement courte, proche des shows du groupe, à savoir environ une heure. Cette terreur ravira sans problème les die-hard fans de la bande de l’inépuisable King Ju. Ted

NOUVEL ALBUM « DEACTIVATED » DANS LES BACS LE 03 DÉCEMBRE

* Version CD (Crash / Pias) dispo dans la plupart des magasins et sur le CD1D de Crash Disques * Version LP (Productions Impossible records) dispo dans la plupart des disquaires indés et sur www.productions-impossible.com * Album en streaming sur : http://therebelassholes.bandcamp.com

*** ON TOUR *** - 02/11/12 : MARMANDE (FR) - Le Buffet de la Gare (+ Burning Heads) - 03/11/12 : CARMAUX (FR) - Fame Festival (+ Burning Heads...) - 09/11/12 : ESSEN (DE) - Panic Room - 10/11/11 : DUSSELDORF (DE) - Linkes Zentrum (+ The Decline) - 16/11/12 : CHALON SUR SAONE (FR) - La Péniche (+ Burning Heads) - 17/11/12 : AUXERRE (FR) - Le Silex (+ Burning Heads)

- 14/12/12 : DECINES (FR) - Warmaudio (+ Burning Heads) - 15/12/12 : MONACO (FR) - AJM (+ Burning Heads) - 29/03/13 : CANNES (FR) - MJC Picaud (+ Burning Heads) - 12/04/13 : NEVERS (FR) - Café Charbon (+ Burning Heads + The Decline !) - 20/04/13 : PARIS (FR) - Le Bataclan (+ Les Sales Majestés + Chépa?) *** + de dates à venir très bientôt..... 47


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OYAARSS

L.A. ? (Cool Green Recordings)

Smaida Greizi Nakamiba (Ad Noiseam) copier-coller pour mieux plonger la tête la première dans ce que réservent Arvīds Laivinieks et ses machines. Un homme-orchestre aux multiples talents d’ingénierie sonore qui se révèle encore une fois être un véritable alchimiste du son des temps modernes.

à la manière des band(e)s de Josh Homme, Tracer sait parfaitement explorer des horizons différents sans se disperser. La majorité des titres de ce L.A. ? sentent le souffre et sont résolument portés vers le rock brut de décoffrage. La production est efficace, les guitares chaudes comme la braise sous un soleil californien et la voix de Michael Brown n’est pas sans rappeler les grands noms des leader grunge d’une époque malheureusement révolue (Chris Cornell ou Layne Staley en tête). La définition même du power trio : puissance maximale et efficacité sans faille, le tout sans artifice ni compromis.

Alors que le deuxième album des Australiens de Tracer est sorti il y a quelques semaines, penchons-nous si vous le voulez bien sur L.A ?, EP paru en 2009 et réédité en France en 2012 (va comprendre Charles !). Mon ami Aurélio connaît très certainement ce trio du Pacifique, et pour cause, le groupe donne dans le stoner rock. Appétissant comme programme n’est ce pas ? Une fois la galette enfournée dans son lecteur, nous voilà embarqués dans un voyage d’une trentaine de minutes, temps accumulé pour ce disque composé de 7 titres, au pays du bon goût. Le démarrage se fait tout en douceur avec un « End of the samouraï » tout en retenue. Les Tracer maîtrisent les ambiances, jouant un rock tant survitaminé qu’assumé. Un bon début. L’héritage du rock des années 70 hante ce très bon EP, et les influences lorgnant du côté de Kyuss et des Queens of The Stone Age se font nettement ressentir sur les plages suivantes (« Wrecking ball », « All look the same »), frôlant même le plagiat avec le titre « Don’t forget my name », largement inspiré de l’excellent « Medication » tiré du non moins excellent Lullabies to paralyze, tant au niveau des rythmes que des sons de guitares !). Il n’empêche que l’ensemble est vraiment excellent, peut-être pas forcément très original mais vraiment bien fait. Et

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TRACER

L’atterrissage se fait en douceur avec une magnifique chanson intitulée « Sleep by the fire » dans un style blues rock sentant bon les 70’s, morceau original au vu du contenu du disque mais idéal pour reprendre ses esprits fortement secoués suite à la tornade Tracer et se rendre compte de la maîtrise du trio australien pour combiner riffs puissants et émotions planantes. Gui

Après un premier album sorti au printemps dernier, Oyaarss s’est retrouvé propulsé comme l’une des nouvelles découvertes de la prolifique et pointue écurie Ad Noiseam (Balkansky, Broken note, Enduser, Niveau Zero, Subheim, The Outside Agency). Jusqu’à susciter une attente méritée et dès lors devoir exhumer sa première démo, sortie un peu confidentiellement en 2011 et remasterisée afin de lui donner une seconde vie, fort logiquement par le biais d’Ad Noiseam. En l’agrémentant d’un nouvel artwork, Oyaarss a également soigné le look visuel de ce Smaida Greizi Nakamiba qui, en plus du reste, nous offre nos premières bases de letton, ce qui peut toujours servir pour briller en société. Ou pas.

Les pistes défilent, fuyant vers un horizon bien incertain, les atmosphères s’assombrissent, se voulant parfois grinçantes, souvent énigmatiques, elliptiques. Oppressives ou à l’inverse plus aérées, épiques en certains moments même. L’agrégat sonore proposé par Oyaarss distille ses ambiances, les colle de très près de manière à mettre l’auditeur dans un état de conscience éveillée, afin d’en accroître sa réceptivité. Des arrangements aux nuances subtiles, à l’équilibre constant presque idéal, un piano qui joue la carte du néo-classicisme sur un titre avant que les machines ne reprennent le contrôle dans un maelström de sons qui s’agglomère patiemment, inexorablement, en une sorte de chaos apaisé. Ce Smaida Grezi Nakamiba n’avait beau être à l’origine qu’une démo, il se révèle être désormais un disque d’Oyaarss à part entière et la confirmation rétroactive d’un talent à part, trouvant ses inspirations dans sa terre natale comme les œuvres de George Orwell (1984) et Stanislav Lem (Solaris). Ingénieux et bluffant. Aurelio

Musicalement, on reste sans surprise dans les courants de Bads, le premier album du projet, soit dans des sphères dub-step/electronica cliniques et industrielles, brossant le portrait - à l’image de la pochette - d’un paysage urbain désolé. Carte postale magnifiquement cynique et contemporaine, en forme d’instantané cinglant d’une cité d’Europe de l’Est désormais peuplée par les fantômes de son passé communiste révolu, l’album se fait l’écho des ombres qui semblent encore hanter les lieux. On fait grâce de la tracklist de cet opus en s’évitant de recourir encore et encore aux artifices du

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Pour se faire entendre sur le web, il faut faire le buzz, "allez vous faire foudre", c'est un peu léger pour être scandaleux non ? Vous seriez prêt à quoi pour attirer l'attention ? Chercher le scandale est souvent un calcul à très court terme. Quand le titre « La foudre » a été écrit, le but n'était pas de choquer mais plutôt de montrer qu'on pouvait être malin et plus fin qu'un simple "*uck" !

INTERVIEW > HUCK C'est Greg, compositeur, chanteur et guitariste au sein de Huck qui répond à quelques questions au moment de clore le chapitre Faire parler la foudre et d'en ouvrir un nouveau... Quand Huck est revenu, le personnel avait changé à 75% et le nom à 20%, pourquoi avoir gardé le même nom ? On ne s'est pas vraiment posé la question sous cet angle. Les changements de line-up se font toujours de manière assez naturelle. Ce sont les chansons qui sont à la base du projet et ce sont elles qui font que les gens rejoignent Huck ou pas. Ce parti-pris d'avoir une intention rock et de le confronter au français, ce qui n'est vraiment pas une mince affaire. Et pour ce qui est des changements de line-up, ce n'est toujours pas fini. L'équipe, pour le deuxième album sur lequel nous sommes en train de travailler, a encore changé en partie ces dernières semaines. Et on ne se pose pas trop la question de garder le nom Huck, même si ça peut nous arriver d'y penser. Vous avez sorti un bon album de rock chanté en français qui a bonne presse, c'est gratifiant mais est-ce que ça se vend ? En fait, je n'en sais rien. Mais pour être honnête, je pense que si ça avait bien marché, on serait au courant (sourire). Mais, pour nous, la vrai réussite de cet album c'est

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avant tout d'avoir réussi à aller jusqu'au bout malgré son histoire compliquée. Au tout début, on a rencontré plein de labels intéressés mais ça ne s'est pas fait au final. On a donc perdu beaucoup de temps avant de décider de faire l'album par nous-mêmes, ce qui a été aussi assez compliqué. Donc, que les chansons sortent enfin dans de bonnes conditions et que l'on puisse fermer la page, c'est vraiment ce qui compte pour nous. Le public est plus volatile qu'avant ? J'ai l'impression qu'il se contente d'écouter un titre via internet et ne fait plus beaucoup de démarche pour vraiment découvrir l'artiste... C'est vrai qu'aujourd'hui les gens n'écoutent souvent qu'un titre et ne vont plus loin que s'ils ont vraiment accroché. Donc on n'a pas le droit de se louper. On réfléchit beaucoup à la façon dont on va présenter le prochain album et le choix du premier titre que l'on va proposer. Et en même temps on est déjà très impatient de dévoiler les nouveaux morceaux. Vous avez donc déjà des choses de prêtes ? On prévoit de commencer à dévoiler un nouveau titre début 2013, de sortir un maxi 4 titres au printemps et enfin l'album fin 2013. Comme tu vois, on est dans les startings block !

Votre site web, c'est "Huck you", là encore c'est un peu irrévérencieux mais ça reste poli et subtil, ça vous plaît d'être des mecs "polis et subtils" ? Oui, on l'assume. C'est l'idée qu'on évoque aussi dans "Fils de rien. C'est la tragédie de la middle class. Vu les conditions de confort indécent dans lesquels on vit en France, et en occident en général, en comparaison du reste de la planète, on peut s'exprimer adroitement sur ce qui nous agace mais je trouve ridicule dans faire des tonnes. Enfin, c'était aussi un moyen de boucler la boucle avec le jeu de mots de « La foudre » notamment.

morceau. Et le fait que le titre soit un medley de "Mauvaise came" et "La déglingue", c'est un pari d'Antoine, qui a réalisé l'album, lancé à Julios. Le résultat nous a plu et on l'a ajouté au tracklisting. Après, ça ne reste qu'un titre bonus. Votre actu est plutôt tournée vers la scène même si vous tournez assez peu, c'est si compliqué de convaincre des salles ? C'est lié à l'histoire compliquée de Faire parler la foudre. On a quand même enregistré 3 versions de l'album avant sa sortie avec Volvox Music, beaucoup de temps s'est passé et on a travaillé avec beaucoup de personnes différentes. Au final, il y avait un décalage entre l'album et le live qui était beaucoup plus actuel. Mais, c'est avec l'album que le booker travaille pour convaincre les salles. C'est aussi pour ça que l'on se met la pression pour que le prochain album sorte rapidement ; les nouveaux morceaux sont vraiment représentatifs du groupe aujourd'hui !

Si "on" vous demandait de faire des titres "plus simples, plus consensuels" en échange d'une promesse de gloire, vous acceptez ? Les promesses n'engagent que ceux qui les écoutent. Et puis j'ai l'impression qu'une partie du public est devenue beaucoup plus exigeante et pousse les groupes à devenir plus créatifs. C'est un des aspects positifs de la diffusion de la musique sur internet. Beaucoup de kids se sont forgés une grosse culture musicale et ça oblige à prendre plus de recul sur sa musique, à justement proposer des choses plus pointues et avec une forte identité !

Au printemps, vous avez fait pas mal de show case, ce sont des plans "à perte" non ? Pas vraiment. Et puis ça nous a permis de réarranger des versions acoustiques des morceaux sur lesquels on s'est éclaté et d'aller vers un public que l'on n'aurait pas touché autrement. Ca reste un super souvenir pour nous en tout cas !

Le titre bonus de Faire parler la foudre, "Mauvaise déglingue" n'est pas une réussite selon moi, vous pouvez expliquer son histoire et le défendre ? On a toujours écouté beaucoup d'electro dans le groupe et c'est Julios qui a fait ce remix que l'on assume complètement. Il a même largement influencé la version live où la ligne de clavier/basse est la colonne vertébrale du

Pour finir une question conne, c'est quoi votre pâtisserie préférée ? Pour continuer avec les références à l'album je devrais répondre l'éclair... mais c'est le mille-feuilles ! Merci à Greg et aux Huck !

Sur votre page Facebook, dans la liste des dates, il est noté un passage dans un pub de Seattle ! C'est une erreur ? Oui, c'est une erreur. J'espère que c'est prémonitoire.

Oli

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LES DISQUES DU MOIS

Atlas (Epitaph)

GREAT MOUNTAIN FIRE Canopy (Konijn Music)

Des titres à l’image de « It’s alright » suspendent l’écoute avec la superbe d’un Beck. Des petites perles qui confèrent à l’album un véritable intérêt, à l’instar d’autres dévoilant une facette plus « standardisée » où il n’est pas impossible de retrouver, entre autres, un certain esprit Miami Horrors. Le contenu n’est pas directement orienté « aventure et expérimentation » : on ne joue pas hors les sentiers battus, on se joue plus avec un certain talent, idées et moyens de ces sentiers battus. Sans éviter le référencement on peut dire que ça fonctionne malgré tout très bien.

redire, c’est net, propre et sans bavure, limite trop tant la machine de guerre australienne, si elle marche à pleines turbines, se révèle parfois tellement impitoyable dans la boucherie auditive qu’elle en oublie ce petit supplément d’âme qui fait la marque des très grands.

A l’image de son titre, Parkway Drive s’offre une intro de titre inaugural aux textures voyageuses, sorte de petit périple musical aux débuts rock acoustique avant cette légère mais inexorable montée en puissance qui va aboutir à une grosse baston metalcore testostéronée à l’image de ce que les australiens proposent depuis leurs premiers efforts. Et là donc forcément, s’ils s’amusent avec une petite douceur en entrée («Sparks»), c’est surtout pour s’en aller guerroyer ensuite avec une sacrée cargaisons d’ogives métalliques ultra-produites et expédiées dans les écoutilles avec une précision chirurgicale. Paraîtrait même que l’Air Force américaine ferait la gueule du coup. «Old ghosts/new regrets», les océaniens montent en front et déballent le matos sans coup férir : oui, forcément ça calme parce que rayon arsenal de metalcoreux, les Parkway Drive ont la puissance de feu d’un croiseur et parce que eux, quand ils jouent à la bataille navale, vaut mieux savoir nager en face. Rayon finesse, on repassera, ici on cause metal (sur)chargé en épinéphrine et biberonné aux moshparts qui assomment brutalement, aux breakdowns qui amochent et autres petites tendresses viriles («Dream run», «Dark days», «Swing»), qui équarrissent les tympans à la scie circulaire. Rien à

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Essentiellement taillé pour les stades - tremble public du Big Day Out, tu risques de prendre ta fessée - Parkway Drive cogne fort, frappe juste avec juste ce qu’il faut de groove rock’n’roll pour s’offrir ce petit zeste de cool qui fait du bien par où ça passe («Wild eyes»). Et si l’ensemble reste parfois un peu trop lisse on l’a dit, le groupe, sous la férule de la mini-major qu’est en train de devenir le label Epitaph (Converge, Bring Me The Horizon, Motion City Soundtrack, Weezer tout de même), arrive à insuffler quelques grammes de finesse («The river», «The slow surrender») à un ensemble de brutes par trop monolithique quoique d’une effroyable efficacité («Sleight of hand»). Mais aussi épique et porteur d’un souffle metalcore sous adrénaline quelque peu surprenant à ce niveau, si bien que ce n’est qu’au fil des écoutes que cet album se dévoile un peu moins calibré que prévu (l’excellent et éponyme «Atlas»). Douze titres pour quarante-huit minutes de grosse artillerie metalcore sévèrement burnée, Atlas est donc le disque de brutasses attendu, une impressionnante collection de torpilles sonores écrasantes de puissance doublée d’un bombardement massif qui fait de jolis dégâts dans la tuyauterie auditive. Parkway Drive est venu, Parkway Drive a vu, Parkway Drive a vaincu. Par K.O. Aurelio

LES DISQUES DU MOIS

PARKWAY DRIVE

Anthony

Que faire lorsqu’une vague a été surfée des dizaines de fois, par des dizaines de groupes et dans presque tous les sens ? Reste-il des choses à dire ? Canopy, « debut album » du groupe Great Mountain Fire, n’est pas loin d’être concerné. En vérité le coup d’essai n’est que nominal. Avant GMF, il y a Nestor!, groupe formé en 2006, constitué des mêmes membres et ayant déjà pas mal vécu. Pour information voilà déjà presque un an qu’est sorti cet album sur leurs terres natales belges. Mais revenons à cette belle métaphore de la vague, surfée et éprouvée. Dans ce lot de surfers il y a toujours un premier et toujours un dernier. Et avec cet album Pop/ nuDisco/Synthétique, qui compte dans ses rangs des morceaux anciens et compositions plus récentes, Great Mountain Fire surfe un peu le rouleau dans les derniers de la liste. Dommage pour un groupe présent sur la rive depuis le départ. C’est dur parce qu’ils ne déméritent pas, malheureux, car il faut et faudrait alors redoubler d’effort et de créativité pour se renouveler et faire oublier les groupes jusqu’alors sur le devant de la scène. Cette houle, même si un peu épuisée, reste bavarde et d’agréable compagnie. Au fil des 11 titres qui composent l’album on trouve du bon, du réchauffé, mais jamais de mauvais goût.

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LES DISQUES DU MOIS

The promise of tomorrow (Dunk! Records)

AFTER TASTE

Motifs & ornements - Partie I (Autoproduction) de l’ensemble sonore proposé. La musique est elle aussi recherchée et bien loin d’un style bourrin et creux. Les premières écoutes nécessitent un effort tant les dissonances, ruptures de rythme et de structures font partie intégrantes du style d’After Taste. On s’enfile malgré tout d’une traite les 6 titres qui gardent une certaine cohérence et surprennent par des orchestrations variées et pertinentes. Les 10 minutes de «Mars : les forêts rouges» alternent entre post-hardcore classique tout en guitare, des trompettes sur un premier pont avant de finir sur un crescendo «Trent Reznorien» amenant à un monologue glaçant... Ces plages laissent à l’auditeur quelques répits avant de replonger dans le tumulte des guitares et le martèlement frénétique de la section rythmique. En effet la base du groupe reste tout de même une musique puissante empruntant à Will Haven ou Poison the Well.

du lion au petit dej’ et d’un Mogwai revenu d’un séjour en terre d’Islande ; avec un petit côté rock alternatif qui confère à l’ensemble toute sa saveur incandescente.

A l’instar de leurs compatriotes danois Late Night Venture (eux aussi chez l’excellent Dunk! Records (Kokomo, Terraformer), les Sky Architects sont les nouveaux lanciers d’une scène post-rock venue du froid qui ne manque décidément pas d’attrait : on pense à Jeniferever, Pg.Lost, Scraps of Tape et autres The Samuel Jackson Five, autant de formations reconnues en la matière et toutes détentrices d’un secret régulièrement avoué : ne pas faire du pur post-rock selon la définition consacrée par les médias dits spécialisés. Et en même temps, c’est normal, il n’y en a pas vraiment (de définition s’entend). The promise of tomorrow, s’il n’est pas un disque destiné à fondamentalement révolutionner le genre (puisque cela ne veut donc rien dire), est une première œuvre à la maturité bluffante, au songwriting épuré et la maîtrise formelle quasi irréprochable. Depuis l’introductif «The promise» jusqu’à l’explosive conclusion «Procession of hearts», Sky Architects délivre un album opératique de par le souffle épique qu’il y insuffle comme de par son intensité émotionnelle, laquelle joue de la carte du grand huit vertigineux entre épisodes stratosphériques et poussées de fièvres métallisées, quelque part aux croisement des chemins d’un Sigur Ros qui aurait bouffé

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On s’offre ainsi une belle épopée stylistique avec l’intense «Fade out», ou un moment d’intimité plus apaisée et retenue («We’ll never forget this» avec toutefois un final complètement virevoltant), et toujours au coin du feu, des arrangements plus feutrés que la neige craquant sous nos pas lors d’une ballade nordique un soir d’hiver. A force de rechercher le climax d’intensité pure et abrasive, Sky Architects la trouve et alors ne la lâche plus. Notamment sur un «All free must fly» diaphane à la beauté gracile appuyée par les participations de deux vocalistes féminines et d’un quartet à cordes, ou «Waves of light» et ses enluminures (post)pop enivrantes. Malgré quelques longueurs éparses, le groupe dynamite savamment son album en faisant étalage d’une puissance post-rock aux incisions métalliques acérées, celles-ci martelées par une section rythmique qui pilote cet orchestre venu du froid avec une précision d’orfèvre. Imprimant les accélérations ou à l’inverse les ralentissements, marquant les ruptures de tempo avec un sens aigu de l’équilibre mélodique («The dark wave»), Sky Architects aime aussi mélanger les genres, comme avec ce «Breach these walls» pour lequel les scandinaves développent une mixture doom-pop et post-rock discrètement constellée d’electronica fugitif ; sur «Ignite» et sa complainte à fleur de peau empreinte de mélancolie douloureuse ; ou cet «Endzeit» emmené par des harmoniques fuyantes vers un épilogue à l’aune de ce qu’est The promise of tomorrow, un disque parfois clair/obscur, souvent lumineux : une œuvre dense, palpable, passionnante. Aurelio

LES DISQUES DU MOIS

SKY ARCHITECTS

Il en va des concepts albums comme de certains bons films : leur niveau de lecture est multiple et c’est même dans ce cas-là qu’ils sont les plus intéressants. Les Dijonnais d’After Taste se sont lancés dans l’aventure avec un dyptique en forme de double 6 titres, un projet ambitieux mais foncièrement casse gueule tant il est facile de laisser l’auditeur sur le bord du chemin de sa propre créativité. De prime abord, les six plages que composent l’EP, reprenant six mois de l’année avec un sous-titre sibyllin, se suffisent à eux-mêmes. La musique parle d’elle-même et on oublie vite les présupposés théoriques ou conceptuels. Celle-ci est suffisamment évocatrice et cinématique pour que chacun puisse se faire son petit film, les paroles en français et les quelques intermèdes parlés permettant de se raccrocher aux branches. La parole tient d’ailleurs un rôle paradoxal, essentielle pour apporter les clefs de compréhension celle-ci reste compréhensible seulement par intermittence, entre screamo et scansion rythmique le tout en français mais sans que le sens en soit pour autant accessible facilement.

Au final et même si le concept le concept sous-jacent proposé par le groupe semble être un véritable vecteur créatif, After Taste évite le piège d’en faire une doctrine rigide, limitante et stérile. Les musiciens ont su transcender leur idée directrice pour que la musique reste l’élément essentiel et prioritaire. On leur en sait gré, évitant par la même les poses arty et autres dérapages pompeux, profitant ainsi d’un travail complet, élaboré et même efficace in fine. C’est avec une certaine impatience que l’on attend les 6 prochains titres afin de boucler la boucle. Erwan

L’apport mélodique du chant est nul mais la tension imprimée palpable en fait un instrument fondamental

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ON ÉTAIT PASSÉ À COTÉ

Treillères über alles (Can I Say? Records)

DEATH CAB FOR CUTIE Codes and keys (Atlantic Records)

son punk-rock de base (mais pas basique) nous refont Du pareil au même mais en pas pareil, en mieux et en urgent, le tout sans incartade, toujours sur l’accélérateur, jamais sur le frein. Un tempo toujours à fond de cale, une salvatrice nervosité, une textuelle à la fois surréaliste, poétique, un brin anar’ et dotée de second degré, la gestuelle précise et la manivelle à portée de main pour en découdre envers des supporters trop peu fervents. Ils évitent systématiquement la situation de hors-jeu, enchaînent boulets de canon sur tirs cadrés, donnent des leçons de fair-play à qui veut l’entendre, jouent de virtuosité à en faire pâlir Pelé et font entonner à leur public des refrains imparables. Tu auras sans nul doute compris que Justin(e) est toujours au sommet de son art et, faute de prolongation, qu’il n’y a absolument plus aucun moment à perdre avant de mettre la main sur Treillères über alles. Alors que l’enthousiasme du célébrissime Gui de Champi m’avait tout autant enveloppé lors de la découverte de Justin(e) et Du pareil au même, il faut avouer que j’ai eu du mal à le partager (l’enthousiasme, pas Gui de Champi, quoi que...) concernant l’Accident N°7, malgré des écoutes suivies, répétées plus que de raison, enfoncées au burin, martelées lourdement. Rien n’y faisait, cela tenait à un je ne sais quoi d’inexpliquable par les lois raisonnées de la physique mais la sortie de route semblait belle et bien réelle à mes oreilles. C’est donc avec une certaine nonchalance accouplée à la vision des premiers flocons s’échouant sur le vélux de mon logis et redoublée du sentiment de ne pas trop y croire que l’index appuie sur «Play» après avoir laissé patienter le disque quelques heures dans la platine, plusieurs semaines après l’avoir récolté sur une distro d’une soirée bisontine, plus d’un an après sa sortie via l’improbable agrégation de Can I Say? Records, Guerilla Asso, Des Ciseaux Et Une Photocopieuse et le groupe luimême via son asso. Mais, instantanément les doutes partent en fumée, se volatilisent, bref, se désintègrent. En un éclair, on sait que c’est bon, très bon et même mieux : ultime. Voilà que les Nantais, à défaut de réinventer l’efficace recette de

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Remiii

ON ÉTAIT PASSÉ À COTÉ

JUSTIN(E)

On peut compter sur la versatilité des guitaristes Ben Gibbard et l’homme à tout faire Chris Walla qui fréquemment substituent les six cordes au synthé ou au piano, concevant des associations mélodiques complémentaires. Les batteurs (et les autres) apprécieront le style toujours classe de sobriété et de toucher de Jason McGerr qui varie toujours ses compositions rythmiques et donne à DCFC, par la dimension de son jeu, une part non négligeable de son identité. Par-dessus tout cela, Benjamin Gibbard ne perd pas ses qualités de parolier, remarquera qui pourra.

Malgré un passé à distribuer ses mélodies sur le très bon label Barsuk Records (également maison de disque de John Vanderslice ou Nada Surf), le quatuor de l’État de Washington est depuis 2003, et un certain Transatlanticism, un groupe d’Atlantic Records. Le «Death Cab» mainstream est bien là. Certains s’en plaignent, pas moi. Car au-delà d’une évolution naturelle au fil des années, la patte est toujours là.

Beaucoup de caractéristiques énoncées jusque-là peuvent être mentionnées pour parler du groupe en général. Alors pourquoi tout ça dans la chronique d’un album spécifique et non une biographie analytique, me direz-vous (ou pas). Parce que Codes and keys en particulier illustre bien ces constats. On trouve effectivement dans tous les aspects un album aux compositions soignées et diversifiées, créé par de bons musiciens, le tout dans une sphère indie-pop. Car les américains ont beau être chez une grande major, ils sont restés fidèles à eux-mêmes. Koudzy

Death Cab For Cutie possède une très bonne faculté de composition pour peu que l’on soit sensible à sa cause, car même lorsque des suites d’accords des plus banales sont employées comme dans le deuxième morceau éponyme «Codes and keys», les membres parviennent toujours à les arranger pour en faire quelque chose de bon. À l’exception de «Stay young go dancing» qui le clôt d’une belle et joyeuse manière, Codes and keys est un album sans véritable gratté (ce que l’on appelle «strumming» chez les anglophones). C’est probablement là sa plus grande particularité. En effet, les cordes s’emploient en quasi permanence à jouer en arpège ou en note-à-note, à opter pour des nappes de sons et d’effets, déléguant parfois tout aspect rythmique à la basse toujours juste de Nick Harmer. «You are a tourist» par exemple, le démontre parfaitement.

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ON ÉTAIT PASSÉ À COTÉ

In the spirit of total resistance (Folklore de la Zone Mondiale)

ATLANTIS

Mistress of ghosts (Dunk! Records) insérer de discrets éléments électroniques, le morceau s’offre quelques poussées de fièvre mélodique aussi ascensionnelles qu’abrasives. Mais là encore, on n’est pas au bout de nos surprises et c’est sur «She loves all» que la maîtresse évoquée précédemment joue de ses charmes vénéneux pour envoûter l’auditeur.

pour avoir été au mauvais endroit au mauvais moment dans les mauvaises circonstances, croupit dans une des geôles du pays de la Liberté, actuellement à Lewisburg, Pennsylvanie.

A l’heure où sont écrites ces lignes, Oncle Barack, Prix Nobel de l’usage des Drones (euh... de la Paix –souvenezvous du slogan «La guerre c’est la paix» en l’an 1984 de George Orwell), authentique visage pâle (quoiqu’en disent les apparences de sa pigmentation cutanée), termine son premier mandat de Président des Etats-Unis d’Amérique et escompte bien retourner séjourner à la Maison Blanche quatre années supplémentaires (et il faut avouer qu’il s’agirait d’un moindre mal, vu le pedigree de son adversaire). Et quoi de neuf à l’horizon pour Leonard Peltier ? Les magnifiques étendues du désert de Sonora ? La somptueuse région des Grands Lacs ? Les fastueuses gorges du Colorado ? -Tu rigoles !?- La date de révision de son procès est planifiée pour le second semestre 2015 ? -Autant patienter jusqu’à la Saint Glin-Glin.- Sa double peine à perpétuité a été commuée en peine de trente ans de réclusion et donc la liberté lui a été accordée de fait ? -’Faut pas rêver.- Rien de tout ça et tout le contraire : toujours le béton, toujours les barreaux, toujours la surveillance panoptique, toujours l’isolement, toujours les fouilles arbitraires, toujours les parloirs, toujours ce qui ne filtre qu’à mots couverts de prison. Depuis plus de trente-cinq longues années, ce qui en fait un des prisonniers politiques enfermé depuis le plus longtemps à la surface du globe ! Leonard Peltier,

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Tu es de type amérindien, tu es un dissident politique lié de près ou de loin à une fusillade impliquant les forces vives de la nation (FBI, Marshals, milices privées, troupes fédérales, ...), tu oses ne pas assister à un procès truqué en fuyant à l’étranger et c’est l’engrenage diabolique. Tu peux toujours clamer ton innocence. Dieu reconnaîtra les siens, il paraît. Tu t’agites derrière un ordinateur dans un open-space d’une tour vitrée de la Défense, de Wall Street ou de la City et tu décides de la durée de vie de millions d’êtres humains en spéculant sur les cours de céréales et tu es adulé, montré en exemple, monté au pinacle (même si le vent est doucement en train de tourner depuis la catastrophe de 2007/2008). Telle est la Loi. Pour soutenir Leonard Peltier, les groupes aux styles divers et variés que sont Blackfire, Cellule X, Loaded, Trouz An Noz, Tagada Jones, Mauresca Fracàs Dub, Rosa Park, Aztlan Underground, Urban Attack, T.R.I.B.E., Kilnaboy, Fermin Muguruza, Oi Polloi, La Phaze, Hydra, Les Ramoneurs de Menhirs et Ethnopaire ont offert un peu de leur talent. A leur image et si le coeur t’en dit, accorde un peu de ton temps et de ton argent pour que l’espoir d’une vie autre prenne corps le plus rapidement possible du coté de Lewisburg, territoire Shawnee.

ON ÉTAIT PASSÉ À COTÉ

COMPILATION

Après un premier album plutôt remarqué paru chez le label anglais Field Records (Her Name Is Calla, Khuda, Maybeshewill.), lui ayant offert la possibilité de tourner avec quelques pointures de la scène post-rock et affiliés (65daysofstatic, Oceansize, Envy, Pure Reason Revolution), le Néerlandais Gilson Heitinga et son projet Atlantis livre son deuxième album studio Mistress of ghosts toujours via Field Records pour la version CD et le concours du jeune label belge Dunk! Records en charge de l’édition vinyle. Un troisième effort étant en cours d’élaboration à l’heure où sont rédigées ces quelques lignes et Atlantis ayant été découverts par nos services sur le tard, une séance de rattrapage s’imposait.

Un mélange de noise-électronique et de post-rock lourdement métallisé, une teinte doom lumineuse et quelques riffs rock titanesques font le reste, porté par quelques samples vocaux sensuels. Résultat parfaitement bluffant, tout comme les sequels qui vont suivre et enfoncer un peu plus le clou de cet album qui s’immisce inexorablement dans la mémoire pour ne jamais pouvoir en être extrait. Que ce soit avec «Mascara» et son divin mélange électro/post-classique, ou «Sweet venom» (tout est dans le titre) et «To catch a voyeur», la thématique est clairement identifiée et le mélange musical lui sied à merveille. L’ensemble est d’une étonnante homogénéité et chaque morceau est une nouvelle pièce s’assemblant, se superposant aux autres, de manière à ne plus former qu’un puzzle musical à l’image de la vision de son auteur («Mistress», «Give me one more hour»). Très classe. Aurelio

Remiii On n’a pas le temps de se poser de question sur la teneur du projet que déjà, les premières mesures de «White russians», le morceau inaugural de l’album résonnent dans l’atmosphère et que l’on est surpris par le mélange du Hollandais volant. Quelque part entre noise-doom avec des voix trafiquées et post-quelque chose teintée d’electronica, l’ensemble se révèle extrêmement prégnant, magnétique et fascinant. Une forme d’introduction originale que vient sensiblement alourdir, mais dans le bon sens du terme, le puissant «Mata Hari’s kiss». Plus proche d’un post-rock conventionnel avec une envie d’y

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CONCOURS METALLICA

Let go

sans peine sur un «Blizzard of 77’» qui laisse rêveur, avant que la batterie énergique d’Ira redonne la pêche sur un «The way you wear your head» simple mais imparable. La quasi-acoustique «Fruit fly» gagne en intensité sur la fin tandis que «Blonde on blonde» restera à tout jamais la ballade idéale pour les temps de pluie. Le sommet de cet album reste sans doute «Hi-speed soul» et son riff assassin, un morceau taillé pour faire danser les foules suivi de près par l’impétueuse “No quick fix“. “Kilian’s red“, fragile et lancinante, nous envoute par une structure trop rare chez Nada Surf. Après un “La pour ça“ mollasson, “Happy kid“ et “Treading water“ dévoilent une nouvelle fois la puissance power-pop du combo. La fin de l’album se termine en douceur par la sublime et touchante “Paper boats“.

Je me souviens encore de la scène il y a 10 ans. La couverture de Rock Sound annonçait le retour en grande pompe de Nada Surf, une couv’ imposée par son rédac chef de l’époque, Thomas VDB, au grand dam de ses patrons plus enclin à faire figurer en “une“ les très bankables Korn, Limp Bizkit, Sum 41 ou bien encore Papa Roach. Un sacré pied de nez à ce milieu de la presse musicale trop fébrile pour parier sur un album qui n’arrivait pas là par hasard. Quand Let go débarque dans les bacs, Nada Surf sort d’un conflit de plusieurs années avec son ancienne maison de disque, Elektra Records, concernant la gestion de son excellent deuxième disque, The proximity effect, qui finira par être publié sur leur propre label, MarDev Records. Une renaissance pour un trio malmené qui se délivrait en accouchant d’un album pop de grande classe.

CONCOURS

IL Y A 10 ANS

NADA SURF

A l'automne 2009, Metallica avait passé deux soirées à Québec sur la tournée Death magnetic, le premier soir, ils ont joué un set "classique" (si tant est que ça existe avec les horsemen), le deuxième, ils avaient laissé leurs fans choisir les morceaux... Trois ans plus tard, le groupe sort le double DVD/Blu-Ray de cette fameuse deuxième soirée construite par et pour les passionés du groupe. Avant la sortie (le 10 décembre) et jusqu'à après Noël, c'est avec Mercury / Universal qu'ont t'offre trois exemplaires de ce Quebec Magnetic, pour l'emporter, il va falloir être rapide ou chanceux... Rapide car le premier à envoyer la liste complète des 18 groupes dont on a mixé les pochettes remportera l'offrande, chanceux car parmi les bonnes réponses qui arriveront ensuite, on en tirera deux au sort pour distribuer le cadeau. Dès qu'on a un gagnant, tu seras informé dans les news du site. Si jamais, personne ne trouvait les 18 groupes, on prendra ceux qui ont le plus de bonnes réponses ! Bonne chance et joyeux Noël. Lien du concours

On ressort de cette écoute avec le sentiment que Nada Surf a enfin posé les bases immuables de sa musique, reconnaissables aux premiers accords, entre ballades sentimentales et éclairs de guitares bien placés. Par la même, cet album confirme la solidité et la sincérité du trio. Encore aujourd’hui, Let go reste l’un des classiques des New-Yorkais, peut-être trop sous-estimé contrairement à un High/Low hanté par la ferveur de son “popular“. Ted

Je me souviens encore de la scène il y a 10 ans. Le CD accompagnant ce fameux Rock Sound nous fait découvrir le single “Inside of love“ en version live. Je suis resté littéralement scotché par le pouvoir qu’avait ce groupe à délivrer des frissons avec si peu d’artifice. Ce troisième album contient un fort pourcentage de chansons pop faciles à retenir tout en étant pourvu d’une grande maturité. Les voix de Matthew et de Daniel s’entrecroisent

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EN BREF

EN BREF

MY SECRETARY

BEN SHARPA

THE TIGER THEORY

MONKEY BIZNESS

SPYLOWN

THE F-MONSTERS

Fool secrets

4th density light show

Dim Mak 1971-1981

Monkey Bizness

Depth

Soulseller

(Maïzena Records)

(Jarring Effects)

(Autoproduction)

(Autoproduction)

(Heimathome Records)

(Monstermind Records)

En 2012, un groupe peut sonner comme il y a 30 ans et plaire à des gens qui n’étaient pas nés à l’époque... My Secretary nous replonge dans la coldwave des Depeche Mode, Cure ou New Order à coups de sonorités froides, de rythmiques punchies et d’effets à tous les étages. Les quatre Niortais (oui, ils ne sont pas anglo-saxons !) risquent bien de faire un carton chez les quadra’ en manque de nouveautés nostalgiques mais aussi de charmer une jeunesse désabusée qui chercherait une pop rock sincère différente des canons actuels. Alors que je n’ai jamais été particulièrement fan des années 80 et de leurs claviers pimpants, là je me retrouve à freudonner les mélodies, à suivre les chaleureuses lignes de basse avec mes épaules et à chroniquer ce Fool secrets que je n’aurais certainement pas supporté 10 minutes il y a 30 ans. My Secretary exploite la faille spatio-temporelle avec un son propre et moderne et même si les références au passé s’entendent, jamais elles ne dérangent. Et si jamais tu pouvais être sceptique avec ces écrits, jette un oeil sur la pochette, ces gars-là savent accrocher autant les regards que les oreilles.

2012 est l’année du retour en force pour Ben Sharpa, le rappeur sud-africain de chez Jarring Effects, qui, accompagné du duo Pure Solid, a monté 4th density light show, un challenge audiovisuel et multimédia prévu tout spécialement pour la scène. L’enregistrement studio qui accompagne ce projet devenu réalité confirme au plus haut point tout le bien loué à ce bonhomme sensible aux bonnes basses et à la production aiguisée comme un couteau. La formule hip-hop grime aux textes passés au polissage et à la brosse à reluire refait plus que jamais surface, Ben Sharpa tentant de soumettre à son auditoire sa révolution par des hymnes militants novateurs. Les rythmes implacables de 4th density light show n’auront aucun secret pour les «jumpeurs» en chef et la froideur robotique qui s’en dégage donne du piment à ce voyage sonore aux accents futuristes. La «Sharpaganda» n’est pas prête à rendre son dernier souffle.

Quartet franc-comtois issu de la prolifique scène bisontine, The Tiger Theory (né sur les cendres du groupe Welcome to Miami) revendique assez clairement son identité indie-rock branchée 70’s : soit quelque part au croisement d’un At the Drive-In et d’un Led Zeppelin, saupoudré d’un peu de JR.Ewing voire d’une pincée de Refused pour la hargne. Première sortie signée par le tigre, Dim mak 1971-1981 souligne du reste parfaitement l’époque dans laquelle celuici se complait, en cinq titres joliment fuselés, parsemés d’atmosphères chamaniques («Enola»), rock psyché aux confins du stoner («Dim mak») ou tout simplement indie groovy intense et salvateur («Dark electricity»). Pour ses débuts, The Tiger Theory a l’œil du tigre et sait déjà où il va en distillant une musique toujours électrique («Eagles riot»), assez largement influencé par le dieu Sabbath en mode rock indé lofi mais teigneux et joliment ravageur («Guillotine»). Une bien jolie surprise qui plus est livrée dans un élégant objet CD simili vinyle respirant le DIY. On valide sans la moindre hésitation.

Après leur démo Too fast, too close, too often... too late ! sortie il y a déjà 3 ans, les Monkey Bizness ont enchaîné les scènes et passé un peu de temps en studio pour enregistrer une dizaine de nouvelles compos regroupées sur un album éponyme autoproduit et autodistribué à la fin de leurs concerts et sur le net. La production est un peu problématique car à vouloir sonner propre, elle finit par gommer toutes les petites aspérités et fait perdre une partie de l’énergie que semble dégager le groupe, le mixage manque aussi de ces graves qui donnent de la puissance et du punch à des titres qui ne nous rentrent pas totalement dedans malgré une écriture punchy («Lipstick», «Blind»). Le chant toujours un peu criard me dérange moins que sur la démo mais reste perfectible sur quelques passages (le parlé/chanté de «Red zone» par exemple) et si les guitares ont des idées dans tous les compartiments de leur jeu (ponts, solo, riffs...), elles manquent d’attaque pour faire monter les Monkey Bizness dans une division supérieure. Pour le moment, il faut donc surtout en profiter en live.

Hardcore/crust/grind des familles : tout tient en seulement quelques mots. Et dans l’art de brutaliser les tympans s’inscrivant dans la longue tradition ô combien jouissive du hard suisse, c’est cette fois Spylown, qui par l’intermédiaire de l’écurie Heimathome Records (la bien-nommée), se charge de la distribution de baffes. L’auditeur, lui de son côté, il encaisse. Normal en même temps, parce que niveau démembrement auditif, l’helvète s’y connaît et ce n’est pas avec Depths que ça va changer. Production rugueuse, virulence métallique symptomatique du genre, le deuxième album du groupe ne s’embarrasse pas avec les convenances : il tranche dans le gras et balance les restes aux charognards. Une charge furieuse et discontinue dont les riffs viennent s’empaler sur les amplis, un groupe qui marteau-pilonne ses morceaux jusqu’à défoncer les cloisons auditives de ses victimes. Spylown est à l’image de son artwork, puissamment destructeur avec ce qu’il faut de petite dose de «cool», histoire de prendre toute son efficacité en live. Mais là déjà en l’état, dans le genre je bombarde d’abord tes enceintes, je pose les questions après, c’est du hard qui fait bien mâle.

Jeune power trio dans le circuit depuis 2008, The F-Monsters vient de sortir Soulseller, premier EP que je qualifierais de convaincant. Le groupe s’est donné les moyens avec un digipak soigné et une cession à l’Indie Ear Studio de Mathieu Kabi (chanteur guitariste de The Rebel Assholes) pour faire honneur à ses cinq brûlots 100 % punk rock. The F-Monsters revendique notamment comme influences Foo FIghters et The Wildhearts, mais c’est clairement la carcasse d’Hot Water Music qui ressort à l’écoute de ce premier effort. Ça lorgne même du coté des irrésistibles Flying Donuts dans le traitement des guitares et des voix, ce qui n’est évidemment pas pour me déplaire. L’énergie est là, ça balance de grosses guitares, les mélodies sont imparables et les morceaux explorent plusieurs facettes du rock survitaminé. Et même si l’ensemble manque peut-être d’originalité (et de folie), les trois gaillards ont le mérite d’envoyer un punchy rock bien ficelé débordant d’authenticité qui ne demande qu’à s’affirmer. Pas de doute, Soulseller est plus qu’une carte de visite, c’est un joli tremplin pour faire chavirer vos cœurs de punk-rockers !

Ted

Aurelio

Oli

Gui de Champi

Oli Aurelio

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EN BREF

EN BREF

TAGADA JONES

KOTIPELTO & LIMATASINEN

AMERICAN HERITAGE

NOSE IN THE NOSE

BLACK COUNTRY COMMUNION

TRACTOPELLE IN VERSAILLES

Descente aux enfers

Blackoustic

Sedentary

Crash

Afterglow

Marquise des anges

(Enragé Production)

(Ear Music)

(Solar Flare Records)

(Autoproduction)

(J&R Adventures)

(Autoproduction)

Tagada Jones est un groupe réac’ ! Et ouais, ils sont super attachés aux mêmes valeurs depuis toujours ! La critique de la société en mode anar’ («Zéro de conduite», «Le moins que rien»), la défense des grandes idées (la démocratie, l’environnement...), une musique et un chant agressifs et l’amitié (Stéphane Buriez ou André Gielen sont à la prod) : voilà de quoi est faite leur Descente aux enfers. Tagada Jones n’a rien changé depuis 2008 et poursuit donc sur sa lancée à tombeaux ouverts et c’est peut-être là que l’on se lasse. Si le groupe est ultra efficace en live, sur disque, quand on a le temps de se poser, on se retrouve avec les mêmes thèmes, les mêmes rythmes et leur punk-core n’accroche pas vraiment faute de nouveauté. Ce n’est que sur «La raison» et les deux titres bonus qu’on trouve vraiment du plaisir car on se fait bousculer par la rythmique, les variations de tons et les invités (Hescess et La Phaze) qui mettent joyeusement leur grain de sel et de sable dans la machine Tagada Jones qui sort alors de ses recettes traditionnelles. Dommage que ces bonus soient placés en fin d’album, incorporés à l’ensemble, il lui aurait donné plus de saveur.

Bon, ok, je ne vais pas vous mentir. Quand j’ai reçu la galette de Kotipelto & Liimatasinen intitulée Blackoustic avec la photo des deux gaziers en contre jour sur la pochette, j’ai eu peur. Merde, comment peut-on faire du black metal avec des guitares acoustiques ? Rassurez vous, il s’agit juste d’une erreur d’interprétation, ou plutôt d’un jugement hâtif. Blackoustic est tout simplement un disque charmant et apaisant. Je ne connais pas exactement le pedigree des deux oiseaux, juste que Kotipelto est le chanteur de Stratovarius (j’en vois un qui fait des bonds là) et que le duo, fort du succès de leur formule « une voix et une guitare » écumée sur les routes des pays nordiques, a décidé de graver sur galette un ensemble de reprises des répertoires de leurs groupes respectifs ainsi que quelques covers de Gary Moore, Deep Purple et The Who. Il en ressort un album agréable, sans prise de tête, gorgé de chansons à écouter au coin du feu en sifflotant. Bref, un disque qui fonctionne. Faut juste que les gars fassent attention avec leur accent anglais, surtout quand les (très belles) voix sont mixées en avant comme sur ce disque.

Après le Pigs de Dave Curran (Unsane), Solar Flare Records s’occupe du cas American Heritage, un trio américain qui empiète sévèrement sur les plates-bandes d’un Mastodon sur ce Sedentary. Dès le premier titre, «City of god», c’est règlement de compte à K.O Coral via un sludge mordant qui rappelle l’agressivité d’un Remission et une section rythme/guitare mathcorisée à la Keelhaul. Bref, un mélange pas dégueulasse du tout, d’autant que le groupe sait varier les plaisirs et gravir la frange heavy-metal des familles histoire de se singulariser un peu sa mixture. Sur 11 titres, les 5 ou 6 premiers s’avèrent diablement jouissifs et le reste peine hélas à capter l’attention, un sentiment de lassitude commence à poindre. Reste (bis) que lorsqu’on prend la deuxième partie de l’album après une petite pause, on se rend assez rapidement compte qu’il s’agit tout simplement de bonnes baffes sonores sans prétention. Et on se dit que le format vinyle (face A, face B) est d’autant plus pertinent pour American Heritage. Cale donc toi un disque de Low entre les deux faces et tu auras là un très bon disque que tu aimeras ressortir de temps en temps.

Après un EP dont mon collègue Rémi avait été à demi-satisfait, le groupe stéphanois Nose In The Nose revient avec un album qui semble corriger le tir. Et mieux que ça en fait, il s’agit tout simplement d’un bon disque. Après une première piste percutante qui sent bon le rip-off bien foutu de The Jesus Lizard et Pissed Jeans, le groupe fait évoluer sa musique vers des sphères garage qui leur font beaucoup gagner en singularité. Dès le deuxième titre, on a en effet affaire à un tout autre groupe et d’autres influences, le chant scandé fait penser à Mark E. Smith de The Fall, les riffs tirent vers le rock’n’roll enflammé et les morceaux vers la dynamique du Jon Spencer Blues Explosion des débuts. Et que dire de «Bob of the bridge» où apparaissent des phases psychés et ce 4ème morceau intitulé «74 tempo» où la voix subit une reverb’ qui me fait penser à la production bizarre du Era vulgaris de Queens Of The Stone Age. D’ailleurs, on pense encore beaucoup au groupe de Josh Homme sur «XYZ», son riff robotrock et sa rythmique saccadée très desert-rock... Nose In The Nose est un groupe qui se cherche, sans œillères, et qui marque les esprits, petit à petit.

Black Contry Communion est un « super groupe » américain comptant notamment parmi ses membres Glenn Hughes (ex-Deep Purple) et Jason Bonham (fils du regretté batteur de Led Zeppelin). Une belle équipe qui, en deux ans d’activité, sort déjà son troisième LP intitulé Afterglow. Au vu du CV des protagonistes, ne vous attendez pas à un album de polka ou de death metal progressif, mais tout simplement à un putain de disque de rock ! La voix du bassiste chanteur est tout bonnement à tomber par terre, Bonham envoie fort à la caisse, et les guitares sont ultra efficaces. Ajoutez à ça des compos quasi parfaites et vous obtiendrez un disque qui deviendra vite incontournable dans votre discothèque. J’en viendrais même à aimer les claviers tellement ces derniers s’intègrent parfaitement dans cette osmose musicale entraînante et convaincante. Les influences Deep Purple/Led Zep hantent ce disque à la production impeccable, où les ambiances pesantes succèdent aux moments de folie heavy rock. Passer en revue chaque titre d’Afterglow serait une perte de temps, alors dépêchez-vous de vous procurez ce disque et vous m’en direz des nouvelles.

Que de chemin parcouru en seulement deux ans pour les Tractopelle In Versailles. En 2010, nous restions consternés en découvrant la médiocre prestation des Franc-Comtois lors du Méline Rock Festival ; et puis le fruit d’un travail d’expérimentation et d’élaboration d’une identité sonore est venu changer la donne. Le premier album des Belfortains, Marquise des anges, émeut et surprend par sa capacité à procurer des sensations qui évoluent selon les titres proposés. Ce disque estampillé post-rock composé de sept morceaux à la longueur assumée (certains atteignent presque les dix minutes !) nous suggère un voyage mêlant de lourds riffs typés post-hardcore à des arpèges de piano voire à des nappes de claviers new-wave qui renforcent le côté sombre du combo. Par moment, des voix pas toujours indispensables viennent donner le dernier coup de pinceau au tableau d’une œuvre dotée d’une production honnête et modeste pour un groupe émergeant. De bonne augure pour l’avenir. Ted

Gui de Champi David

David

Gui de Champi

Oli

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EN BREF

EN BREF

THE DATSUNS

OVERHEAD

MALHABILE

Death rattle boogie

Death by monkeys

Sailing a grey sea

(Hellsquad Records)

(Plus Loin Music)

(Autoproduction)

10 ans déjà que la musique proposée par The Datsuns a traversé la planète et le moins que l’on puisse dire, c’est que les Néo-Zélandais ne chôment pas. Explorant à l’envie divers horizons du rock avec leurs quatre premiers albums, ils reviennent cet automne avec une production signée Nicke Andersson (zicos notamment chez Entombed puis The Hellacopters et producteur pour les Backyard Babies). Bref, après une incartade plus pop (Headstunts), le rock’n’roll burné est de nouveau de mise, les médiators grincent sur les cordes, les frappes sont sourdes et le chant dynamise son petit monde. Death rattle boogie provoque des déhanchements («Gold halo», «Helping hands», «Goodbye ghosts»...) mais sait aussi ralentir le rythme pour délivrer une complainte rocailleuse («Axethrower»), une promenade tubesque («Shadow looms large» qui rappelle les QOTSA) ou épopée lounge avec de belles guitares («Wander the night»). Au final, The Datsuns offrent un album équilibré et riche en énergie. A consommer sans modération.

Le retour d’Overhead après huit ans de silence discographique suscitait de nombreuses questions dont la plus évidente : où en est donc cette formation liée au destin d’un seul homme à savoir Nicolas Leroux ? La solution la plus logique était peut-être de se tourner vers Stone age, son album solo sorti en 2008. Ou se fier tout simplement à Facing the grims, l’EP sorti en avril signant le grand retour du groupe et censé préparer la sortie de ce Death by monkeys. Ces deux disques de pop-rock démontrent d’emblée à leurs écoutes que la voix de Leroux, qui faisait l’alchimie d’Overhead, est restée totalement intacte, glaçante, magique et touchante. Si les compositions de l’EP m’avaient un peu laissé sur ma faim entre bon («The destroyer», «The wonderer») et passable («Other dissidents», «Facing the grim»), Death by monkeys remonte néanmoins le niveau sans toutefois arriver à bouleverser comme sur un certain No time between. La faute à des titres plus longs à digérer par leur exigence car la qualité, elle, reste bien au rendez-vous.

Malhabile est un jeune projet où se faire un avis n’est pas une mince affaire, où l’esprit se contorsionne entre une forme agréable et un fond qui manque d’audace. Les titres sont beaux, mais je n’arrive pas à croire et à projeter l’image d’une folk habitée, témoignage oral d’une condition, d’un passé, d’un présent et d’un futur. L’imagerie fait l’effet d’un costume emprunté : on reste dans la surface. Sans forcément parler d’accessoire, il faut malgré tout bien s’avouer que cet EP renforce une projection actuelle, inconsciente et collective de la « folk » : voyez la pochette avec cette imagerie du marin barbu, solitaire et usé, malgré tout un peu « vogue ». La voix fragile, belle, n’est en tout cas pas à mon goût pas assez traversée d’émotion, neutre comme une récitation, positivement sur le fil mais où l’accent parfois trop scolaire n’oeuvre pas toujours au crédible du contenu. Le tout est lumineux, avec une bonne production qui suggère malgré tout une vision un peu orienté folk de salon. Reste à Malhabile de se mettre à nu, charcuter le fond pour éviter cet état.

Ted Oli

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Anthony

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DANS L’OMBRE

J'ai rencontré Christian Ravel pour la première fois lors d'une des tournées de La Ruda au début des années 2000. Un chic type. Puis j'ai recroisé à plusieurs reprises dans le cadre de ses activités photographiques et de management d'artistes, les bands qu'il accompagnait croisant le fer avec les groupes pour qui je tournais en lights. On est devenu potes et j'ai toujours suivi d'un oeil averti les activités du bonhomme. C'est pas compliqué, à chaque fois que je vais à un festival en tant qu'accrédité ou en simple spectateur, je tombe sur sa trombine !! Et rendre un hommage appuyé à un fan d'Iron Maiden et Black Sabbath n'a jamais fait de mal.

Quelle est ta formation ? Côté scolaire, j’ai un bac et j’ai fait une année en fac d’anglais puis une de LEA. Sinon, je suis photographe autodidacte, comme pour tout le reste de mes activités dans la musique. Quel est ton métier ? Je suis steward pour une compagnie aérienne française. J'ai longtemps hésité à faire une école de photo, mais c'était cher et je ne voulais pas faire de la pub ou de la mode. Je voulais juste shooter des groupes de rock. Donc je suis devenu steward car c'est sympa, fun, dépaysant et ça me laisse énormément de temps libre pour voir des concerts en France mais surtout à l'étranger. Quelles sont tes activités dans le monde de la musique ? J'ai toujours fais de la photo de concert. J'ai commencé vers 17-18 ans avec l'appareil de mon père en shootant les groupes lors de la fête de la musique à Angers. J'ai également managé le groupe des potes du lycée. C'était en 1994. C'était une bonne première expérience: chopper tous les fanzines, éplucher les dates de concerts, appeler sans cesse les assos, les bars pour jouer, enregistrer des démos, etc... Ensuite j'ai managé un groupe qui s'appelait Carc[h]arias. On a sorti deux CD 5 titres

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et puis ce fût la prise de tête avec les mecs, donc j'ai quitté mon poste et un an plus tard, les Sexypop avaient besoin d'un manager... J'ai refusé mais je leur ai dit que je pouvais m'occuper du booking. Ensuite voyant que ça n'avançait pas plus vite que ça, je suis passé manager. J'ai également fait de la régie pour Ltno, Lycosia et dernièrement, de 2007 jusqu'à la fin en 2010, pour Taint, un groupe gallois. Cette dernière rencontre a été vraiment magnifique car nous sommes devenus rapidement de très bons amis et j'ai adoré chaque seconde passée en leur compagnie. Le groupe ne joue plus mais je continue de voir les mecs assez souvent, chez eux ou en concert avec leurs nouveaux projets. En photo, j'ai été photographe du Chabada (salle de concert à Angers) pendant 6 ans. Aujourd'hui je shoote officiellement pour le festival Hellfest depuis 2010, pour le festival Roadburn depuis 2009, et je travaille régulièrement avec quatre magazines et de temps en temps avec d'autres. Et là, je travaille sur une exposition sur la Ruda dont je fais les photos depuis 18 ans maintenant ! Elle aura lieu au Chabada où ils donnent leurs trois derniers concerts avant de tirer leur révérence. Il y a aura des photos live mais aussi des images prises sur la route avec tout ce que ça comporte !

Comment es-tu entré dans le monde du rock ? Gamin, j'écoutais les groupes dont ma frangine était fan: David Bowie, Depeche Mode, The Cure, Joe Jackson, AC/ DC,... Mais la grosse claque dont je te parlais plus haut, c'est quand j'ai acheté le Live after death d' Iron Maiden. Tout était là, sur une simple galette : le son, la pochette, les photos live, les photos backstages, etc... Maiden est mon groupe favori et c'est grâce aux photos de Ross Halfin que je fais de la photo aujourd'hui. En fait j'adore tous ces vieux groupes : Thin Lizzy, Led Zep, The Who, Judas Priest, The Clash, Black Sabbath, The Rolling Stones, etc.. pour leur musique mais aussi pour la carrière qu'ils ont eu, les hauts, les bas, la façon dont ils l'ont gérée ... ou pas... En tant que manager/tourmanager, j'aurais adoré être un Peter Grant ou Colonel Parker et en imposer à mort, mais ce n'était pas franchement le cas (rire). Une anecdote sympa à nous raconter ? En 98 j'ai inventé un magazine bidon pour me faire accréditer sur un festival en Bretagne avec Portishead, 16 Horsepower et Nick Cave... et en prime j'avais droit à l'open bar ! Tous les bons moments passés avec Sexypop, La Ruda et Taint sur la route! Que de bons souvenirs! Voir AC/DC à Boston en 2000 ou 2001 avec une copine et rencontrer le groupe backstage. Angus m'a dédicacé une des photos que j'avais faite d'eux quelques années plus tôt...

Magus et je réécoute pas mal de vieilleries comme Hawkwind, Black Flag, Mudhoney, Slade, etc... J'avoue que je ne trouve plus trop le temps d'écouter de nouveaux groupes et c'est bien dommage. Je traque les coups de coeur de mes potes sur facebook et autre pour savoir où jeter une oreille.

DANS L’OMBRE

CHRISTIAN RAVEL

Ca rapporte ? Rien ! Que dalle... mais ce n'était pas le but au départ. Ca ne l'est toujours pas. Je gagne un peu d'argent avec mes photos sur les mags étrangers car les mags français ne paient pas ou plus, mais je dépense plus en matos et en transport que ça ne me rapporte. Le truc c'est que je bosse avec des groupes, des labels et des médias assez underground donc sans trop de moyens mais dont je suis fan et ça c'est le principal. Le plaisir est toujours intact depuis toutes ces années.

Es-tu accro au web ? Pas franchement non. C'est indispensable et je suis connecté tous les jours, mais je me rends compte que les fois où je n'ai pas le net ou que la connexion est difficile dans certains pays, ça ne me manque pas. A part le rock, tu as d'autres passions ? Toujours la photo. J'aimerai bien prendre le temps de faire d'autre type d'images. Je suis les travaux de quelques photographes de paysages et c'est assez bluffant. Il faut que je m'y mette. Sinon, j'adore lire et j'aime l'histoire et donc les livres à ce sujet. J'aime aussi visiter les monuments, flâner autour des vieilles pierres et me promener en forêt. Il y a aussi l'aviation. J'ai été pilote de planeur quand j'étais plus jeune et ça, ça me manque vraiment. J'espère pouvoir trouver le temps un de ces jours de m'y remettre. Tu t'imagines dans 15 ans ? Comme maintenant. Aller à des concerts et continuer les photos de live. Idéalement, j'habiterai en Angleterre et bosserai pour Rock Classics. christianravelphotography.com Gui de Champi

Ton coup de coeur musical du moment ? En ce moment, j'écoute pas mal H A R K, le nouveau projet du chanteur de Taint. J'écoute pas mal de groupes de heavy rock psyché 70's commeOrchid, Uncle Acid and the Deadbeats ou Diagonal. J'ai un coup de coeur pour un groupe gallois qui s'appelle Sigriya et également pour un groupe Nantais faisant plus dans le trip-hop: Mac Guffin. Leur premier album devrait sortir au printemps prochain. J'adore les derniers Orange Goblin et Grand

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LVIE

Pas évident d'envoyer un set seul avec une guitare devant un public qui le découvre, mais ça ne semble pas décontenancer notre homme qui se livre sans retenue, chantant à travers ses chansons des instants de vie, avec une sincérité touchante. Forest offrira même deux covers des Uncommonmenfrommars et de Sons Of Buddha. Le temps passe vite, et il est déjà temps pour notre cavalier seul de terminer par une deuxième version de "Lullabies" sous les applaudissements fournis de l'assistance qui, un samedi soir dans un endroit sans prétention et dénué de tout artifice, vient de découvrir ce que j'appelle un artiste. Et je ne boude pas mon plaisir d'avoir revu une nouvelle fois un gars attachant et franchement doué.

LIVE > FOREST POOKY Attention, Forest Pooky est dans le secteur, et l'amateur de mélodies que je suis ne pouvait pas louper la venue du bonhomme dans cette belle ville de Nancy. Rendezvous est pris au bar "Le Bon Temps", nouveau bar qui semble accueillir des concerts. A l'arrivée dans le rade, surprise, pas de sono, un zinc, quelques tables, quelques gars sirotant quelques bières et notre bon Forest Pooky traînant près de son stand de merch. Conditions à la roots, juste un tabouret pour faire découvrir à quelques habitués du quartier le répertoire de l'artiste. Forest Pooky est en tournée, c'est un plan dépanne calé il y a quelques jours, très peu de promo, pas beaucoup de monde, mais qu'importe, le gars fera le boulot. Et c'est bien là que la magie opère : qu'il se produise sur une scène avec de véritables conditions live ou dans un bar aux conditions techniques précaires (voire inexis-

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Forest Pooky passera forcément dans le bar en bas de chez toi, dans une salle de ta ville ou même dans le salon de ton voisin : ne laisse donc pas passer l'occasion de vérifier que je ne baratine pas et que ce mec a un don, un vrai. Photo : Brice Lettelier Gui de Champi

LIVE

tantes comme ce soir), Forest Pooky arrive sans difficulté à mettre l'assistance dans sa poche et à livrer ses chansons de la plus belle manière qu'il soit. Le concert débute avec le magnifique "Deaf house", titre ouvrant son premier LP Every key hole has an eye to be seen through. La (faible) assistance est tout de suite marquée par la puissance vocale du guitaristechanteur, puissance que je qualifierais d'impressionnante. Les émotions se succèdent au fil des titres composant une set list faisant également honneur au premier EP (dont le magnifique "Rooftops", un de mes titres préférés).

LIVE > UNCOMMONMENFROMMARS Mazette, les Uncommonmenfrommars sont en ville pour présenter Easy cure, nouvelle production des extraterrestres de Serrières ! Rendez-vous est donc pris au Rivoli, seul bar d'Epinal où il possible d'envoyer du punk rock (et peut être même du rock tout court !!!). La tournée des Unco servant de « release party », un exemplaire du dernier album est offert pour l'achat d'une place. Brillante idée pour propager le bon son ! UMFM réalise cette tournée avec les Américains de The Shell Corporation et s'autorise un arrêt dans le 88 avant quelques dates en Allemagne. Alors que The Shell Corporation s'apprête à fouler le carrelage du Rivo, la sono fait des siennes et du coup, il faudra attendre une bonne heure et un nouveau système son pour que le quatuor américain délivre à un public « relativement » nombreux (pour un mardi soir à Epinal, ça reste tout à fait correct) son punk rock mélo mêlant rapidité d'exécution, refrains accrocheurs et rythmes reggae sur certains titres. Les morceaux sont courts, énergiques, allant à l'essentiel. Sympa. Rien de transcendant mais sympa. Evidemment, le gros morceau de la soirée, c'est le retour des Uncommonmenfrommars à Epinal. Je me trompe peut-être, mais il me semble que c'est en 2003 que le quatuor a posé pour la dernière fois ses amplis dans la capitale vosgienne. Je n'ai jamais vu le groupe en configuration « bar », et je suis impatient de voir ce que ça va donner. Le set commence avec « Sk8boarding hurts more when you're over 30 », morceau ouvrant également le nouvel album. L'ambiance monte au fur et à mesure de la chanson jusqu'à l'explosion tant attendue. C'est parti pour environ une heure de show mené tam-

bour battant. J'ai vu ce groupe un bon paquet de fois, et j'ai toujours été frappé par son côté « fun » et « pro ». Fun car toujours souriant et communicatif, et pro dans la façon de dérouler le show : les morceaux sont en place, les voix sont quasi parfaites et le jeu de scène ne relève pas du hasard. Alors, évidemment, ça fait mouche à tous les coups. Tournée promo oblige, c'est évidemment Easy cure qui est à l'honneur ce soir, même si les Unco parsèment le set d'extraits de Noise pollution (incontestablement mon préféré), Longer than an EP, shorter than an album ou I hate my band. Le mélange est homogène, le public réagit positivement aux nouveaux brûlots des Unco et le groupe le lui rend bien ! Il prend manifestement plaisir à envoyer le bois quelque soit les conditions, les gars ne tiennent plus en place et l'énergie débordante du groupe est communicative. Il est minuit passé quand les Unco délivrent au milieu du public « My white russian », dernière cartouche de la soirée. Trint, déchainé, balance ses derniers riffs sur le zinc tandis que les spectateurs enthousiastes encerclent Ed et Jim. Joli final !!! Le temps passe trop vite, et ce concert m'a une nouvelle fois conforté dans l'idée que les Uncommommenfrommars savent tenir une putain de scène. Chapeau bas messieurs et à la revoilure ! Coucou et merci à Sid (oh Toulouse !), Thib et les Unco au grand complet, Nico Last Dance, Dick, Mitch, les Flying Donuts, Nico et Aurore, Mesdames Dalstein, Mike Greg et Paul Lim. Photo : Mike ( Knight ) Emmendoerffer Gui de Champi

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LIVE

et cette présence. Les quadragénaires ont offert une de ces belles et crapuleuses leçons. Majestueux.

Doomsday Student n'est pas un groupe sans manières, j'en suis sur, mais il n'y a juste aucune envie d'en faire. Un concert quasi historique pour moi. J'ai bien souvent été à la recherche d'une hargne pareille. La où folie n'est pas à jouer, où on tombe les masques et la coquetterie... Sur l'affiche, sous le nom du groupe était marqué « Rock frénétique ». La frénésie, la folie, la complexité d'un tel discours. C'est presque la première que j'ai pu lire autant de justesse dans une description de groupe, loin des noms à rallonge qui tentent de vous vendre un faux contenu. Un set court et directif. Le bulldozer bruitiste était emmené par un chanteur fou, équivalent à Ian Curtis en pleine crise d'épilepsie, littéralement possédé, décomplexé et grimaçant. Le concert était véritablement l'occasion d'un pogo réussi : j'en voyais aller chercher leurs potes restés dans le fond de la salle avec une malice à peine dissimulée. C'était gras, furieux et sans concession. Scène dans son plus simple appareil avec une seule lumière pour habiller le plateau, comme si il n'y avait pas besoin d'autres artifices que leur musique

Fin de soirée avec Electric Electric. Pas évident de parler de cette prestation à cause d'une obligation de quitter la salle au bout de 40 minutes pour des raisons de transports liés à la localisation du Clacson. Un live bien dans ses baskets, où les trois garçons ont naturellement et simplement occupé la scène, formant une et même ligne, délaissant le schéma type de la batterie en arrière-plan. Une solidarité et une proximité, un set foutrement bien exécuté, aiguisé. Electric Electric a plongé sans chichi la salle dans son discours, ses longues plages rythmiques, sonnantes et dansantes. Là où les rythmes s'entrecroisent aux synthés crades et guitares matheuses. Le moment était beau, et se succédaient des véritables pop song, charcutées, intelligentes et animales. Le contenu est bien ficelé, unis, donnant l'illusion d'une masse organique.

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pour Doomsday Student (ex-Arab on Radar) et la droite pour Electric Electric.

Anthony

Electric Electric Belle soirée au Clacson ce jeudi 25 octobre. Une programmation folle, éclatée et généreuse, pour (presque) tous les goûts avec Sheik Anorak, Début de soirée avec Sheik Anorak, homme orchestre intelligent, qui nous reçoit devant la scène, dans sa presque chambre avec une simple lumière brute audessus de lui, dévoilant le visage d'un public de plus en plus nombreux. En cercle avec lui, dans cette piaule dont on aurait défait les murs pour exposer un laboratoire le temps d'un set d'une demie heure. Inutile de vous cacher que j'ai été effrayé, au moment de m'avancer dans la salle et de voir quelque chose comme l'équivalent d'une dizaine de pédales au pied de la batterie. Ne connaissant ni d'Adam ni d'Ève Sheik Anorak, je me suis fait la réflexion suivante : « Bordel, un démonstrateur de chez Boss, on va se taper un salon ringard de la

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musique ». Hé bien non. Il m'a vite rassuré. Des titres inspirés et interprétés ! Avec un système de séquences qui devraient s'intensifier pour permettre de multiplier les points d'entrée parce que Sheik Anorak n'évite malheureusement pas l'écueil de l'homme qui fait tout tout seul : avec quasiment toujours le même type de schéma avec de longues introductions, le temps de tout mettre en place. Ceci dit, même dans l'arrangement de manière générale Sheik Anorak prend le temps et c'est appréciable, ça rééquilibre la balance. Un set lumineux automnal sans soupe faussement contemplative et avec un dernier morceau malin, une longue montée et une tuerie de frustration. Pour la suite, Pas UNE claque à proprement parler. Je préfèrerais plutôt l'image d'une bonne paire de gifles... De ces belles gifles qui laissent des marques : gauche

# NEXT (si on passe l’hiver) : Gojira, Deftones, Mogwai, Soundgarden, Mudhoney, UMFM, The Bots, Eths, ... 73



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