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Mon premier emploi MON PREMIER EMPLOI Après des études en sciences éco à Namur, je me suis retrouvé dans une des dernières levées pour le service militaire, en 93. J’ai opté pour l’objection de conscience et c’est par hasard que je me suis retrouvé dix-huit mois chez Aide Info Sida, une association de prévention et d’aide aux personnes où j’ai été amené à faire des recherches de sponsoring, à organiser des événements, notamment autour de la sortie du film Philadelphia. Je m’occupais aussi de la permanence téléphonique. Je

me suis même retrouvé en Russie pour former des professionnels de la santé sur la question du sida. Après mon objection, j’ai passé six mois dans une boîte qui éditait une revue sur le management. J’ai vite compris que je m’étais fourvoyé et ayant gardé des contacts avec Aide Info Sida, j’ai été engagé lors de la création de l’asbl Ex æquo, active dans le milieu homosexuel depuis 94, comme responsable des actions de prévention de terrain. MON PREMIER SALAIRE Environ 400 euros par mois comme

Thierry Martin, Directeur de la Plate-forme Prévention Sida

objecteur, ce qui me permettait de vivre à Bruxelles. Pour mon premier job comme salarié, je gagnais 1.250 euros, mais j’ai préféré accepter un mi-temps plutôt que de continuer dans une voie qui ne convenait absolument pas. MES PREMIERS ACQUIS PROFESSIONNELS Je me souviens de ce jeune de 18, 19 ans qui a débarqué à la permanence d’Aide Info Sida alors qu’il venait de découvrir sa séropositivité. J’en ai été profondément marqué. En réalité, toute ma carrière professionnelle a

PHOTO Pierre-Yves Thienpont

Dans un contexte où certains présentent le sida comme une forme de justice immanente, la Journée mondiale contre le Sida du 1er décembre rappelle les réalités de vie de millions de personnes concernées par ce virus. Pour la Plate-forme Prévention Sida et Thierry Martin, c’est l’occasion de taper sur le clou des gestes qui mettent à l’abri.

été orientée par ce choix d’objection de conscience qui, d’un licencié en sciences éco, m’a transformé en M. Préservatif. C’est un engagement dans lequel je me sens utile et la création de la plate-forme en 2000 m’a permis de mettre à profit tous les acquis engrangés jusque-là pour élaborer des stratégies de prévention en adéquation avec la sensibilité et la diversité des publics concernés. MA FIN DE CARRIÈRE RÊVÉE Je me vois peut-être mener un combat plus international, dans des pays où les gens meurent sans traitement, sans soins.

J’ai changé ma vie

Fabrice Collignon

MES CONSEILS AUX PLUS JEUNES Ce n’est pas directement en lien avec le premier emploi, mais si je peux attirer l’attention des plus jeunes sur la peur des séropositifs d’être rejetés sur leur lieu de travail. D’où un de nos slogans : « La seule chose qu’on peut attraper en travaillant avec une personne séropositive, c’est un fou rire de temps en temps ».

Propos recueillis par Nathalie Cobbaut

Son parcours marqué de nombreux changements suit un fil conducteur très logique. Fabrice Collignon cherche à proposer des alternatives au modèle économique mondial. Les 10 ha de vigne que cet ingénieur commercial va planter en région liégeoise en sont une : « Un projet ambitieux, écologique et humain »… et sans doute un peu fou. Pour le porter, il fallait forcément un entrepreneur peu banal.

PHOTO dr

In vino maturitas

On le dit d’un tempérament assez impatient. « Je suis un bélier, têtu et fonceur. » Fabrice Collignon vient d’annoncer à la presse son projet d’implantation de 10 ha de vignes sur les coteaux de la Citadelle (à Liège), qu’il lance notamment avec Romain Bévillard, viticulteur français recruté pour devenir le régisseur du domaine. « Nous voulons devenir le domaine viticole de référence en Wallonie et en Belgique. Un domaine connu pour sa qualité, son engagement social et son

souci de l’environnement, qui propose un modèle économique original grâce à une entreprise à finalité sociale. » En réalité, la société coopérative Le Vin de Liège n’est pas encore tout à fait créée, « mais des fois, il faut bousculer les choses », confie l’entrepreneur social. Il a d’ailleurs souvent appliqué cette stratégie apprise aux Hautes Etudes Commerciales de Liège : tirer d’abord, ajuster ensuite. « Pour ce projet de vin, nous avons bien entendu un plan financier très solide, cependant

Référencé par

Le harcèlement au travail en baisse Le groupe Sécurex vient de publier une étude aux résultats plutôt encourageants puisqu’ils montrent un (léger) recul du harcèlement au travail – même si les chiffres restent encore trop élevés. En 2010 en effet, 13 % des travailleurs affirment avoir été victimes de harcèlement moral, contre 14 % en 2009. Et parmi eux, 60 % affirment être harcelés moralement par leur supérieur, 28 % par un collègue, 21% par un groupe de collègues et 9 % par des externes (clients, fournisseurs, patients,…). C’est en matière de harcèlement sexuel que l’évolution est la plus positive. En 2010, 1 travailleur sur 100 affirme avoir été victime de harcèlement sexuel au travail, contre 2 % en 2009 et 5 % en 2008. A noter que dans un peu plus de la moitié des cas (52 %), les auteurs seraient des personnes extérieures à l’entreprise… www.securex.be

nous n’avons pas encore toutes les cartes en mains. » Mais il faut avancer. Il reste notamment au groupe de pilotage à réunir un capital d’un million d’euros avant de pouvoir déguster, si tout va comme prévu, les premières bouteilles en 2015. Etudiant, Fabrice Collignon n’était pas particulièrement militant. Sa « fibre sociale » s’est révélée plus tard, à travers les différents virages de sa vie professionnelle. « Au départ, j’ai fait des études techniques en électronique. En fin de secondaire, j’ai pris conscience que j’avais la capacité de suivre des études plus poussées, et j’ai bataillé ferme pour convaincre ma famille de m’inscrire à HEC. J’avais donc l’obligation de réussir. » L’ingénieur commercial a entamé une carrière de conseiller en organisation dans une mutualité, puis de directeur commercial dans une société privée du secteur médical. À la même époque, il a commencé à fréquenter les milieux altermondialistes. « C’est là que j’ai pris conscience du fait qu’il y avait peut-être d’autres valeurs à aller chercher que la carrière, même si elle est agréable. Je me suis alors dit que tout compte fait, ce serait pas mal de donner plus de sens à ma vie. » Il est d’abord allé voir ailleurs : au Burundi, puis au Tchad, avec Médecins Sans Frontières. Un an. Juste assez, selon lui, « pour remettre les choses à leur place en termes de vraies valeurs et d’abondance des biens. » Et aussi pour en conclure « qu’être sur place en tant que coopérant est un peu un emplâtre sur une jambe de bois. Le problème est en effet beaucoup plus large, dû à la mondialisation de l’économie. » À son retour, il a décidé de s’investir dans différentes associations altermondialistes, histoire « d’attaquer le mal à la racine ». Il a notamment

travaillé pour le Forum social de Belgique. « En très résumé, ce réseau altermondialiste met en contact les différentes associations et ONG pour qu’elles travaillent ensemble. » Le reste de son parcours est une construction d’expériences dans le monde associatif : avec les Tournières, asbl à finalité sociale active dans l’immobilier, puis la Bourrache, entreprise de formation par le travail qu’il a luimême créée. Celle-ci est (toujours) active dans le maraîchage. C’est là, à propos, qu’est née l’idée du vin. « J’ai un jour demandé à un des formateurs maraîchers pourquoi nous vendions si peu de légumes, et il m’a répondu que les terres étaient assez pauvres pour des légumes, mais qu’elles étaient plus adaptées pour des vignes. » Cette remarque n’est pas tombée dans l’oreille d’un sourd. L’amateur de vin s’est débrouillé pour trouver des subsides et financer l’étude de faisabilité qui a confirmé le potentiel du Vin de Liège. Et pour terminer, Fabrice Collignon est devenu, en septembre 2010, le directeur de la Maison liégeoise, qui gère 3.900 logements sociaux à Liège et emploie une septantaine de personnes. « Maintenant, je pense que mes cycles d’engagement vont être plus longs. Je suis sur ces deux projets passionnants et prometteurs pour un certain temps. J’ai eu pas mal d’expériences dans ma vie, mais aujourd’hui, je sais qu’il va falloir être patient avant de récolter les fruits. Finalement, j’ai un peu l’impression de vivre ma vie à l’envers : souvent, les gens ont envie de changer à 40 ans. Moi, j’ai plutôt envie de bien prendre le temps de mener les deux projets jusqu’au bout. » LILIANE FANELLO www.vindeliege.be

Serge Dehaes


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