URBAIN Tanger - n°2 - FEVRIER 2013

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TANGER VUE PAR...

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enaissance. Tanger renait de ses cendres. Les Tangérois aussi. Il n’y a rien de spectaculaire pour confirmer cette solide impression mais tout est dans l’atmosphère, ce mardi 9 mai 2000. Dans le regard des gens. Dans leur démarche. Et dans leur manière de se réapproprier leur ville. Pour quelqu’un qui n'a pas visité la cité du Détroit depuis huit ans, le changement est aussi épais que l’espoir qui habite de nouveau les yeux des clients désœuvrés des cafés du port. Le retour de l’espoir tient à peu de choses. Mais elles sont d’une importance décisive. Bien sûr, il y a le nouveau port Tanger Atlantique, il y a aussi la nouvelle zone franche, il y a également le formidable projet de la rocade méditerranéenne qui va ressouder le Nord et le mettre en posture de développement et il y a, entre mille petites autres choses, l’ambitieux projet de reconquête touristique niché dans la belle et prometteuse baie de Malabata. Mais finalement ce n'est pas de cela exactement qu'il s’agit. L’espoir se mesure en termes de reconnaissance, de considération, de respect et d’attention reçus. C’est cela le moteur de la confiance retrouvée. De la dignité recouvrée. Il a fallu que le Souverain, SM le Roi Mohamed VI, remette Tanger

... Khalil Hachimi Idrissi En l’an 2000, celui qui n’était pas encore Directeur Général de l’Agence Maghreb Arabe Presse (MAP) écrivait un texte plein d’espoir sur Tanger... à relire treize ans après.

au cœur du Maroc politique et diplomatique pour que la ville se réveille. Qu’elle sorte de sa léthargie suicidaire et de sa propension à la déviance. Le réveil des Tangérois, galvanisés par les multiples séjours royaux et les mille attentions que prodigue le Souverain à la ville aux mille secrets, a fait que la peur a changé de camp. La peur, celle qui s’installe après la défaite des gens honnêtes, celle qui occupe les esprits quand les intellectuels marginalisés ont baissé les bras et celle qui tord les boyaux d’une élite locale qui a perdu son ascendant naturel devant les voyous, les délinquants et les faiseurs de mal vie. Quand les Tangérois, surtout jeunes écoliers et écolières, parfois des chômeurs, et souvent des mères de familles, s’amassent sur le parcours du cortège royal, ils crient un espoir formidable qui cautérise leurs peines enfouies, qui refoule leurs peurs passées et qui fait jaillir, à l'image d’un geyser, un torrent de désir de mieux-être. Que disent-ils ? Des mots simples. Nous voulons une cité de droit contre la faillite d’une administration locale entamée par la corruption. Le retour des justes contre les spéculateurs véreux et les promoteurs frauduleux. Des élus vertueux contre la faune, déliquescente et mafieuse, qui peuple une partie des conseils élus. Une ville avec de vraies valeurs de solidarité contre les marginalités, les exclusions et les égoïsmes. C’est tout ce qu'ils disent sur les trottoirs, dans les cafés, dans les salons

familiaux et dans les cercles dans lesquels la citoyenneté continue à être une source, encore vivante, qui puise sa force dans l’extraordinaire combat pour l'indépendance qu’a livré Tanger. L’esprit d’Abdelkhalek Torres1 souffle encore. Celui d’Abdeslam Bennouna2 caresse encore les consciences.

“ La pensée d’Abdellah Guennoun est toujours vivante ” Tous les esprits que cette ville a rassemblés par le passé frémissent encore. Des écrivains, des peintres, des voyageurs, des diplomates et des créateurs en tout genre et de tous horizons. La couche de médiocrité veule et vénale qui a recouvert, par la suite, cette cité n'a pu étouffer cette humanité flamboyante. SM le Roi incarne aujourd’hui le renouveau de Tanger par ses valeurs, ses choix, ses décisions et sa manière de régner. C’est un fait incontestable. Et Tanger, que tout le Maroc regarde, l’a bien compris. 1 Abdelkhalek Torrès (1910-1970), journaliste et leader nationaliste tétouanais. Il a combattu le colonialisme espagnol puis fut Ministre sous

SM Mohammed V.

2 Abdeslam Bennouna (1887-1935), nationaliste tétouanais à l’origine de la création du Parti de la Réforme Nationale (1936). 3 Abdellah Guennoun (1908-1989). Un des plus grands érudits du XXe siècle au Maroc. Militant nationaliste et associatif, il devint Gouverneur de Tanger à l'indépendance du Maroc.

Janvier/Février 2013

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