n°337 - Points Critiques - juin 2013

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mensuel de l’Union des progressistes juifs de Belgique juin 2013 • numéro 337

éditorial Ici et Maintenant, hierheid, hereness, do-hikeyt Bureau de dépôt: 1060 Bruxelles 6 - P008 166 - mensuel (sauf juillet et août)

Carine Bratzlavsky En 2023, la Région bruxelloise comptera 83% d’habitants titulaires d’une autre nationalité, naturalisés belges ou enfants de parents étrangers. Bruxelles, ville de plus en plus cosmopolite, multiculturelle,  multilingue  aussi. Pour nous, cette réalité reste investie comme une richesse. Nous, enfants et petits-enfants de parents immigrés, qui avons reçu en héritage, et pour tout bagage, un esprit de solidarité qui continue de flotter sur le 61 de la rue de la Victoire. Solidarité, car avant d’être multiculturelle, notre société est d’abord traversée et structurée par des inégalités socio-économiques grandissantes. Ne vivant ni tout-à-fait dans les

quartiers habités par les expat ou les fonctionnaires européens ni tout-à-fait dans les quartiers populaires où la population issue de l’immigration est majoritaire, nous sommes cette classe moyenne, à la croisée de ces « parcours d’intégration  », fruit d’un ascenseur social qui fonctionnait encore. C’est dans cet espace mental et géographique, à l’image de la commune qui héberge notre maison, avec son taux de métissage le plus élevé et de vraies aires de gentrification, c’est ici et maintenant, que nous tentons d’articuler notre pratique politique et culturelle. Comme pour mieux asseoir cette réflexion, à la fois solidaire et spé-

BELGIQUE-BELGIE P.P. 1060 Bruxelles 6 1/1511


sommaire

éditorial

1 Ici et maintenant, hierheid, hereness, do-hikeyt..............Carine Bratzlavsky

israël-palestine

6 Il faut faire libérer le soldat Nathan Blanc............................. Henri Wajnblum

lire

8 Luciana Castellina. Itinéraire d’une rebelle...................Tessa Parzenczewski

regarder

9 Seule comme Hannah Arendt................................................... Gérard Preszow

lire, écouter

10 Père/Fils : Qui chercehe qui ? (épisode n° 2)......................... Antonio Moyano

regarder 12 « L’acte de tuer » - Ombres d’une massacre oublié................Roland Baumann

réfléchir

14 Les métamorphoses du « Juif»....................................................... Jacques Aron yiddish ? yiddish ! !‫יִידיש ? יִידיש‬ 16 vin un yidish - Vienne et le yiddish..........................................Willy Estersohn

humeurs judéo-flamandes

18 Bilan intermédiaire........................................................................Anne Gielczyk

polémiques

20 Droit de réponse....................................................................... Simon Gronowski 22 La mémoire rétive.............................................................................Matéo Alaluf 24 Réponse à Sender Wajnberg................................................ Thérèse Liebmann 25 Solidarity with Bedouins....................................................... Marci Abarmowicz

activités 28 annonces upjb jeunes 26

30 Cap sur le camp d’été................................................................... Julie Demarez

le point qui pique

32 Duo vers le blanc…

.......................................................... Alpaga & Tanuki

la vie de l’Upjb

34 Les activités du Club Sholem Aleichem........................... Jacques Schiffmann 36

éditorial

les agendas

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cifique, comme Juifs et comme progressistes, nous venons, cette année, d’ajouter à notre calendrier, ce qui pourrait bien devenir un nouveau rituel, « un Premier mai juif ». Il ne s’agissait nullement de culturaliser ou d’ethniciser les questions sociales, comme certains nous l’ont reproché – nous tenions d’ailleurs un stand, Place Rouppe, juste en face de la récente Allée Rosa Luxembourg, signe que l’un n’empêche pas l’autre. Non, il s’agissait plutôt, à notre manière politique (réflexion et table ronde) et culturelle (films et cabaret de crise), de réaffirmer à la fois un pôle de gauche diasporique parmi les Juifs de ce pays et notre identité juive au sein de la gauche bruxelloise. Une façon de donner une nouvelle pertinence aux idées bundistes – dont nous avions célébré naguère le centenaire1 – qui, tant sur les questions sociales que culturelles, nous ont laissé un héritage étonnamment moderne pour un judaïsme vivant et dynamique. À ce premier 1er mai juif, nous avons voulu donner une thématique : celle des immigrations en miroir. Penser une société multiculturelle sans ghetto et pratiquer l’émancipation nationale et culturelle tout en évitant les dérives du nationalisme, voilà un autre héritage précieux du Bund qui résonne aujourd’hui en nous, Juifs, bruxellois, de Belgique, à l’heure où se prépare le 50e anniversaire de l’immigration marocaine ; à la veille d’élections majeures où se joue l’avenir de Bruxelles, de ses identités multiples, du droit des minorités culturelles dans la cité.

Photo GP

Forts de notre sensibilité et de nos clés de réflexion, nous entendons bien être partie prenante dans les questions identitaires et institutionnelles belges. Nous co-animerons d’ailleurs, à partir de septembre et jusqu’aux élections, un café politique avec la revue Politique, dans nos locaux. Pôle alternatif de réel engagement, nous le restons dans notre rapport à Israël, qui n’est pas notre État mais une question. Lorsque nous soutenons le Centre d’Information Alternative de Michel Warchawski – menacé de fermeture aussitôt après avoir reçu le Prix des Droits de l’Homme de la République Française, qui saluait son action pour une coopération israélo-palestinienne dans le combat contre le colonialisme et pour l’égalité – nous sommes soulagés de voir que nos actions, aussi modestes soientelles, peuvent porter. Et lorsque nous montrons Would you have sex with an Arab , Deux fois le même fleuve  ou  Les 5 caméras brisées  – trois points de vue différents sur l’impact du conflit et de l’occupation dans la

vie quotidienne des Israéliens et des Palestiniens, nous voulons croire que oui, l’art peut sauver le monde. Juifs de gauche, franchement solidaires des forces progressistes multiformes, même minimes, qui se dessinent dans les différentes immigrations (Musulmans progressistes, Tayush, la question des sans-papiers) traversés par les questions culturelles, notre revue est une autre forme visible de nos engagements. La publication d’un livre de 10 ans de chroniques judéo-flamandes, contribue à la faire rayonner davantage. Comme y contribue l’arrivée d’une nouvelle génération qui y aiguise sa plume. Transmission d’expériences (compte-rendu commenté des activités du Club Sholem Aleichem), cotoiement des générations (les enfants cachés se mettent à raconter ; c’est un mono de 16 ans qui met sur la route de notre ami Simon Gronowski, Koenraad Tinel, fils de nazi  ; nouvelle rubrique intempestive et piquante de l’Entr’act) : le trans-générationnel n’est pas chez nous un vœu pieu mais une

belle réalité. Les aînés et les jeunes. Ceux pour qui nous avons eu envie de remettre de la couleur, de la chaleur, de la lumière à nos murs et nos plafonds. Pour leur donner l’envie d’un nouvel élan, d’une nouvelle Union ; l’envie d’accueillir, à leur tour, ceux et celles qu’ils voudront pour des activités, des champs de bataille, neufs et multiples. Rythmés par les chants de lutte et de résistance de la chorale de « La Rue de la Victoire » ou du « Yiddish Tanz Rivaïvele » qui les fait tant bouger, faisant remonter sous leur pas, comme par enchantement, des siècles de notre histoire festive. Le chant et la danse, et la joie, plus justes et nécessaires que jamais en ces temps de crise. «  Depuis plusieurs siècles  », nous disait Richard Marienstras lors de ce passionnant colloque sur le Bund à redécouvrir chaque jour, « depuis plusieurs siècles, un grand nombre de Juifs savent que l’appartenance au groupe minoritaire est un acte volontaire puisqu’on les somme de s’assimiler (s’intégrer dit-on aujourd’hui, ndlr) (…), ils savent que tout ensemble culturel est consciemment maintenu, qu’il est une création humaine et que l’on peut donc choisir ou vouloir son appartenance, choisir ou vouloir son identité ou ses identités (…) » Et d’ajouter avec lui : « Efforcez-vous de vous grouper, de vous fédérer afin de transmettre ce que vous pouvez de tel héritage qui vous est cher. Une affiliation à un groupe existant ou, pourquoi pas, la création d’un groupe nouveau vous donnera des soucis supplémentaires, et petit à petit, ces soucis donneront un meilleur sens à votre vie ». ■ Points Critiques, n° 62/63, décembre 1998-janvier 1999, page 20.

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la vie de l’upjb En complément de notre éditorial, trois moments forts de ces dernières semaines en images.

1er mai juif progressiste à l’UPJB. De gauche à droite : Amir Haberkorn, Frank Caestecker, Barbara Dickschen, Hassan Boussetta À l’exposition The Allochtoon.

Photos Sharon Geczynski

Le cabaret de la crise… Yes ! We have no bananas : Kevin van Staeyen et Noemi Shlosser. Photos Henri Wajnblum

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israël-palestine Il faut faire libérer le soldat Nathan Blanc ! Henri wajnblum

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ais d’abord… Le mois dernier, je vous ai longuement parlé de Samer Issawi, ce Palestinien de Jérusalem-Est réincarcéré en Israël pour avoir franchi les limites territoriales qui lui avaient été assignées lors de sa libération conditionnelle en 2011, Samer Issawi que sa grève de la faim pour protester contre la volonté israélienne de l’exiler à Gaza a failli conduire à une issue fatale. Et bien, réjouissez-vous, du moins provisoirement parce que, en Israël, le pire n’est jamais à exclure pour les Palestiniens… Réjouissez-vous car, désireux d’éviter de nouvelles émeutes sur l’Esplanade des Mosquées et en Cisjordanie occupée, qui n’auraient pas manqué de se produire au cas où Samer Issawi serait mort en prison, Israël a finalement cédé… En échange de son engagement à mettre fin à sa grève de la faim, Samer Issawi a obtenu la promesse de pouvoir rester à Jérusalem-Est, sa principale revendication, au terme des huit mois d’emprisonnement qu’il doit néanmoins purger pour une faute bénigne. Affaires à suivre néanmoins…

Nathan Blanc Il n’y a pas que des Palestiniens incarcérés en Israël pour des raisons politiques, il y a également des Israéliens. À force de ne plus en entendre

Nathan Blanc : refuznik

parler dans nos médias et, aussi, dans Points critiques, il faut le reconnaître, vous pourriez avoir l’impression que le mouvement des refuznikim a cessé d’exister. Détrompez-vous… Nathan Blanc est un jeune israélien de 19 ans. Il vient d’être condamné pour la dixième fois, la dixième !, à une peine d’emprisonnement pour refus de servir dans l’armée de « défense » d’Israël. À l’échéance de cette nouvelle sentence, il aura déjà passé 178 jours en prison. Et ce n’est peut-être pas fini tant l’armée israélienne est tentée de faire à nouveau un exemple dissuasif. Nathan Blanc a expliqué que sa décision n’avait pas été facile à

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prendre, qu’il avait mis longtemps à se décider. Ce n’est en effet pas de gaieté de cœur que l’on prend le risque de se couper de sa famille et de ses amis en suscitant leur incompréhension voire leur opprobre. Heureusement, ses parents le soutiennent et ses amis commencent à comprendre son geste et certains vont jusqu’à le féliciter d’avoir le courage de ne pas prétexter un problème médical pour obtenir une exemption de service comme tant d’autres le font aujourd’hui. Il faut dire que l’armée a, depuis un certain temps déjà, cessé d’avoir la cote auprès des jeunes… ‪Ce qui a fini par décider Nathan à refuser de servir, c’est

l’opération Plomb durci, l’offensive contre Gaza fin 2008 qui a causé la mort de 1.400 Palestiniens… Dans un communiqué qu’il a publié lors de sa première incarcération, Nathan déclarait : « la vague de militarisme qui a balayé le pays, les expressions de haine et le discours vide de sens sur l’éradication du terrorisme et sur l’effet dissuasif de l’opération, a été le principal déclencheur de mon refus ». Une autre de ses raisons réside dans son sentiment que son pays est dans le déni de la démocratie et de l’égalité entre Israéliens et palestiniens… «  Il y a deux peuples sur cette seule terre, mais seuls les Israéliens ont le droit de vote », sous-entendant ainsi que la solution à eux États a vécu. Les organisations Yesh Gvoul (il y a une limite) qui soutient et assiste les refuznikim, New Profile, Gush Shalom (le Bloc de la Paix)… ont lancé une campagne exigeant la libération de Nathan Blanc. Vous pouvez vous aussi le soutenir en écrivant à : messages2prison@newprofile. org ou à Nathanbl@walla.com, ou en signant la pétition que vous pourrez trouver sur : http://www. change.org/en-GB/petitions/immediately-and-unconditionally-release-conscientious-objector-natan-blanc-from-his-already -10th-term-in-prison Peut-on espérer que ceux, innombrables, qui se sont mobilisés pour obtenir la libération du soldat Gilad Shalit, feront de même pour exiger celle du soldat Nathan Blanc  ? Rien n’empêche de rêver.

Les promesses n’engagent… Il y a quelques semaines, faisant suite à la visite de Barack

Obama, John Kerry, le secrétaire d’État américain, s’est à son tour rendu en Israël et en Palestine pour tenter de relancer les négociations entre les deux parties. Excusez-moi, mais il m’est difficile – comme il est coutume de le faire plus par habitude que par conviction – de parler de « négociations de paix » parce que, j’ai beau le scruter jour et nuit, aucune paix ne se profile à l’horizon… Et parce que, aussi, ainsi que l’écrivait récemment Gush shalom sous la plume de Uri Avnery : « De tous les dangers auxquels Israël fait face, celui qui effraie le plus le gouvernement est le danger de paix ». Donc, lors de la visite de John Kerry, Netanyahou s’était engagé à geler la construction de nouveaux logements dans les colonies jusqu’au mois de juin inclus. Concession minime, on en conviendra. Mais il faut croire que c’était encore trop et, comme les promesses n’engagent que ceux à qui elles sont faites comme disait Chirac, dès que Kerry a eu le dos tourné, le porte-parole militaire s’est empressé d’annoncer que le gouvernement avait autorisé la construction de 296 logements dans la colonie de Beit-El. Apparemment, ce qui marche le mieux en Israël, c’est le chantage des colons… Il semble en effet que la construction de ces nouveaux logements s’inscrit dans le cadre d’un accord intervenu en juin 2012 avec des colons qui s’étaient installés sans autorisation dans des logements du quartier d’Oulpana à Beit El, lesquels colons avaient accepté de quitter les lieux sans opposition en échange de la promesse de construire quelque 300 logements pour eux. Dans ce cas-ci ce sont

ceux qui l’ont faite qui se sont senti tenus par la promesse… Les États-Unis n’ont pas vraiment apprécié… le porte-parole du département d’État a immédiatement réagi, affirmant que cette décision était contre-productive. Et d’ajouter : « Comme le président Obama l’a dit, les Israéliens doivent reconnaître qu’une activité continue de colonisation est contre-productive pour la cause de la paix ». Ah ! cette fameuse cause de la paix… Mais rassurez-vous, la contrariété étatsunienne n’aura pas de conséquence dramatique… En effet, la ministre israélienne chargée des négociations avec les Palestiniens, Tzipi Livni, vous savez, la Madame Paix comme on se plaît à la présenter, s’est empressée de déclarer que dès l’annonce de la décision de construire ces 296 logements, elle en avait aussitôt averti les Américains et que « il n’y n’y a pas lieu d’en faire un drame ou de se laisser aller à la colère ; ils ont écouté, ils ont compris et ils n’ont pas réagi ». Comme quoi l’entente continue d’être parfaite entre l’Oncle Sam et son indéfectible allié. Entente parfaite aussi entre les États-Unis et l’Union européenne semble-t-il… Le quotidien israélien Ha’aretz nous apprend en effet que, suite à l’intervention de John Kerry – à la demande d’Israël – auprès de catherine Ashton, l’UE vient de décider de postposer sa décision concenant l’étiquetage des produits émanant des colonies et de Jérusalem-Est. Tout cela, je vous le donne en mille, au nom de cette sacralisée « relance du processus de paix » ! Je cherche le mot qui convient… Voilà, c’est ça… pitoyable. ■

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lire

regarder

Luciana Castellina. Itinéraire d’une rebelle

Seule comme Hannah Arendt*

tessa parzenczewski

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ela commence par une partie de tennis. 1943. Deux amies jouent dans une villa à Riccione, Anna Maria et Luciana. Soudain un policier en civil surgit, interrompt la partie et enjoint Anna Maria de quitter rapidement la villa. Nous sommes le 25 juillet 1943, Mussolini vient d’être arrêté. Luciana Castellina jouait avec sa copine de classe, Anna Maria Mussolini, fille du Duce. À partir de ce jour où tout bascule en Italie, Luciana Castellina, âgée de quatorze ans, commence à tenir son journal. Elle remplira seize cahiers, jusqu’en automne 1947, date de son adhésion au Parti communiste. Comment une adolescente répercute dans ses écrits les bouleversements de l’époque, le renversement des alliances, les désarrois, comment tente-telle de débroussailler dans le vif, de décoder les attitudes des uns et des autres, fascistes, anti-fascistes, qui est l’ennemi ? Qui est l’ami ? Avec pour seuls référents le bourrage de crâne de l’école et des radios et l’antifascisme plutôt modéré de sa famille. Plus de soixante ans plus tard, Luciana Castellina revisite son journal, un dialogue s’instaure entre l’adolescente et la vieille dame, ensemble elles parcourent le chemin qui mène à « la découverte du monde ». Née en 1929, dans une famille bourgeoise, Luciana Castellina semble passer la guerre dans

une sorte de cocon. Bien sûr, il y a les bombardements des Anglais, l’arrestation d’une voisine pour faits de résistance, mais on part toujours en vacances. Parfois cependant, la tragédie se rapproche. Le grand-père maternel de Luciana, Adolfo Liebman, était un juif de Trieste. Le lois raciales frappent des proches. Ceux qui étant déjà « sang mêlé » comme le dit l’auteur, aggravent leur cas en épousant un conjoint juif. Ainsi, une tante meurt en tentant de rejoindre la Suisse. D’autres tantes, très âgées, sœurs d’Adolfo Liebman, quittent Trieste pour Rome et se réfugient sous des faux noms dans la maison de Luciana. Mais dans ce quartier résidentiel de Rome, le ghetto et les rafles semblent bien loin. C’est à la fin de la guerre que Luciana Castellina commence à ouvrir réellement les yeux et les oreilles, comme elle dit, et à découvrir en même temps la politique, la culture, et surtout les injustices, et à choisir son camp. Elle participera à des voyages avec des étudiants, d’abord dans le Paris de l’après-guerre, où par le plus grand des hasards, elle côtoiera Sartre et Beauvoir, Gréco et Vian. Elle s’en ira ensuite à Prague au Festival Mondial de la Jeunesse et plus tard en Yougoslavie pour aider à construire la voie ferrée. Lentement elle s’affirme, s’interroge inlassablement, s’engouffre dans la militance, toujours curieuse et soucieuse de cohérence,

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préservant son sens critique. Ce qui frappe aussi dans ce parcours, c’est l’intérêt jamais démenti pour la culture, où culture et politique semblent inséparables, c’était le temps où des expositions se déroulaient au siège du Parti communiste italien, où des jeunes peintres communistes exploraient le cubisme, loin du réalisme socialiste. Le récit se clôt avec l’inscription au Parti communiste. Plus tard, co-fondatrice du quotidien Il Manifesto, Luciana Castellina sera radiée du parti avec d’autres mais sera réintégrée dans les années 80. Elle a été députée au parlement italien et au parlement européen. Aujourd’hui elle n’a pas rendu les armes. Elle vient de publier Ribelliamoci (Rebellons-nous(, comme un écho à Stéphane Hessel, où elle énumère toutes les raisons de s’indigner et de se rebeller. « À la découverte du monde » ou comment ôter les œillères, une à une, même si ça fait mal parfois, ouvrir la porte de sa maison sur le monde extérieur pour essayer de le changer, face au cynisme ambiant. Luciana Castellina, une rouge italienne, comme Jorge Semprun s’était qualifié de « rouge espagnol ». ■ Luciana Castellina La découverte du monde Présentation de Jean Daniel Préface de Lucrezia Reichlin Traduit de l’italien par Marguerite Pozzoli Éditions Actes Sud

gérard preszow

C

’est le grand écart entre un titre et son image, entre un télé film sur grand écran du samedi soir, aux cadrages serrés, pauvres, scolaires, où, tout à coup, des plans extérieurs sonnent la reconstitution bon marché et, dans le bas de l’image, des sous-titres pointus, exigeants, concentrés, ambitieux, où chaque mot pèse son poids de présence et de recherche préalable. Il faut lire ou regarder. Entre des scènes où l’on croit encore entendre « moteur » « action », tellement la mise en place est convenue et le pari audacieux de dresser le portrait d’une femme – Hannah Arendt –, seule contre tous durant trois quatre ans de sa vie, au début des années 60, autour du procès Eichmann qu’elle suit partiellement à Jérusalem pour le New Yorker. Un film où il faut choisir entre le son et l’image ! Comment ne pas aller voir avec un nom pareil, avec un titre pareil, dont le dépouillement seul – Hannah Arendt  – suffit à l’invite ? Le caressant palindrome du prénom et l’abrupt du patronyme. La femme, non pas la philosophe comme elle s’en défendait, mais l’incarnation de la théorie politique. Avant « La banalité du mal », bien avant, il y avait quand même eu l’étude de Saint-Augustin chez son prof-amant Heidegger. « L’étudiante préférée du Maître (nazi) », lui reprochera-t-on par la suite. C’est un film de femme à femme, de réalisatrice à théoricienne, de sensibilité à raison, de Margarethe von Trotta à Hannah Arendt.

De fait, dans la filmographie de la cinéaste allemande, témoin active des « années de plomb », il s’agit plus d’un film sur l’Allemagne (dont elle n’a cessé de dresser le portrait d’après-guerre en compagnie des cinéastes Fassbinder ou Schlöndorff) que sur le procès Eichmann. C’est un fameux pari – c’est sûr – de faire un film grand public, pédagogique sur les années procès-Eichmann qui interroge à la fois le concept controversé de « banalité du mal » et la mise au ban par ses amis, et par les communautés juives en général, de celle qui avait eu l’audace de parler publiquement du rôle pour le moins spécieux des Conseils juifs (parmi lesquels l’AJB en Belgique) et de ceux qui avaient accepté d’y siéger (notables, religieux, mafieux). À ce jour, le Consistoire de Belgique n’a pas encore ouvert la question... Si l’explicite du film tourne autour du débat suscité par ce procès et l’ostracisme radical dont fut victime Hannah Arendt, la cinéaste nous glisse autre chose au creux de l’oreille. Et là où une pédagogie respectable pourrait se faire pesante, des propos en filigrane nous donnent la profonde préoccupation de la cinéaste, sa manière à elle de tirer le procès vers soi. La beauté des langues – l’anglais, l’allemand, l’anglais avec l’accent allemand –, leur musicalité et ce qu’elles disent du statut des relations qu’elles soustendent : amicales et nostalgiques en allemand, professionnelles en « anglo-allemand ». C’est cela que

souligne en pointillé Margarethe : Hannah souffre de l’exil de la langue maternelle. Le plus grand regret, la plus grande souffrance, c’est cela. Et l’apparition plus que forcée dans le laborieux flash-back du Maître et professeur Heidegger met l’accent sur la blessure incurable de la brillante intellectuelle d’avoir été trahie par la philosophie allemande qu’elle chérissait tant. Près de 60 ans après le procès, le film relance la polémique, non pas tant sur le procès que sur l’attitude ou les « erreurs » d’appréciation de Hannah Arendt. Comme si sa pensée – n’importe quelle pensée – devait être immuable, comme si, dès le départ, à l’occasion de ce procès historique qui, pour la première fois, mettait au centre le génocide des Juifs en tant que tel, l’instrumentalisation de son récit n’avait jamais cessé : le procès lui-même au bénéfice d’Israël comme État se faisant naturellement héritier de la Shoah, comme dénonciation de cette manœuvre chez d’autres dont Hannah Arendt, comme l’usage des images d’archives dans le film d’Eyal Sivan et Rony Brauman au profit d’une thèse sur « L’éloge de la désobéissance ». Mais puisqu’il est question d’images : rien de tel que d’aller voir sur le net les interviews données par Hannah Arendt à Günter Gauss pour la télévision allemande en 1964. ■ * Margarethe von Trotta, Hannah Arendt, 2012, 113’

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lire, écouter fils : «  J’ai mené la carriole la dernière fois c’était l’été/les gens se

Père/Fils : Qui cherche qui ? (épisode n°2) antonio moyano

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ubelè est de retour  ! Quelle joie ! Oui, Bubelè l’enfant à l’ombre1 est reparu dans la collection de poche Espace Nord. Le livre d’Adolphe Nysenholc, je l’avais déjà lu, mais voilà, c’est un des privilèges du « devenir vieux » : on prend plaisir à relire – relire ce qu’on a déjà beaucoup aimé. Aucun livre avant celui-ci ne m’avait plongé avec autant de crudité, autant de poésie dans le destin d’un enfant caché. Poésie, dis-tu ? Oui, pour la bonne raison que ce livre est aussi une invitation à La Légende d’Ulenspiegel. Un petit rappel touristique : Thyl et Nele habitent toujours à deux pas de chez moi, au coin de la place Flagey et des Étangs d’Ixelles, vous le saviez ? En bronze, sur une espèce de stèle avec colonnettes et médaillon à la mémoire de leur papa Charles De Coster. Il y a des hommes qui n’ont pas eu de progéniture mais qui ont tout de même légué l’un ou l’autre fils à la postérité, des élus des dieux, en quelque sorte. Qui ? Deux exemples : le cinéaste François Truffaut avec sa série des Antoine Doinel – Balzac avec ses jeunes provinciaux désireux de se tailler une place dans la haute société ; la liste est longue, n’en citons qu’un : Lucien de Rubempré. Bubelè est un livre essentiel pour saisir de l’intérieur toute une

époque, l’Occupation, le destin des enfants cachés et le supposé retour à la vie normale de tous ces orphelins. Bubelè c’est aussi une histoire de nous tous car très bruxelloise ; l’enfant a été caché à Ganshoren, une commune par-delà Jette et Koekelberg, chez d’humbles gens qui parlent bruxelleer, lui est éboueur, et elle, elle fit jadis du théâtre amateur. Bubelè appelle ses « nouveaux parents » Tanke et Nunkel : « Tanke avait interprété antan Soetkin, la mère de Thyl. Et Nunkel était Claes, le père. Elle connaissait encore son rôle par cœur. » (p.14) « Elle me nomma ‘ma kiekebilleke’ et je la baptisai ‘ma boterkoekske’, elle fut ma ‘kriekske’, je fus son ‘muggetje’. » (p.39) Le livre est divisé en cinq parties, et chacune est très distincte, vu que chacune correspond aux étapes d’une éducation avec ses désillusions, ses amertumes, ses découvertes. Le chapitre 2 porte le titre Léa et Salomon, il débute par ces mots : « Ce même soir, tout me revint. Les yeux fermés, je voyais. » Celui qui vient sous les paupières, c’est le père. Page 59, on est déjà en mai 1945, et Bubelè est loin, très loin, de savourer la paix. Car alors surgit une autre guerre, ou disons un tiraillement : à qui doit-il rester fidèle, Bubelè ? À qui appartient-il ? Pourra-t-il couper son cœur

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en deux comme l’on fait d’une pomme ? Car l’Oncle, seul survivant des frères du père, est revenu de l’enfer, et quoi de plus normal qu’il veuille prendre soin du petit ?! Et puis il y a le grand frère qui fut caché du côté de Binche en Wallonie. « Chacun voulait mon bien, qui était le mal pour l’autre. Personne n’avait été vraiment à l’écoute de mes aspirations. Et je n’avais plus trop envie de voir ni Nunkel ni oncle. » (p.98) En voici un autre qui s’est retrouvé seul à 14 ans après l’arrestation et la déportation de ses parents, c’était en septembre 1942. Je vous parle d’un gars découvert tout à fait par hasard, en feuilletant un livre sur l’histoire de la chanson française, Joël Holmès2. Holmès  ? Comme le détective de Sir Conan Doyle ? C’est le nom d’artiste de Joël Covrigaru, né en 1928 à Tighinan, Bessarabie, dans cette région de la Roumanie annexée par la Russie, aujourd’hui en Moldavie, en région séparatiste de Transnistrie. En 1934, il arrive à Paris avec ses parents. En 1965, il abandonne la chanson après une douzaine de disques où ça swingue, ça trompette, ça java, ça jazze du tonnerre, je réécoute jour après jour Les Souvenirs, La Grande Foraine, La Vie s’en va, Jean Marie de Pantin, C’était Johnny, À tout choisir. Dans La Carriole, il évoque l’amitié d’un père et d’un

découvraient quand nous sommes passés/sur mon père qui partait vers son dernier été… » Ferrat, Moustaki, Maurice Fanon, Christine Sèvres ont chanté ses chansons. Et Pia Colombo sa Rue des Rosiers. Joël Holmès est mort en septembre 2009. Bouclez vos ceintures, nous partons vers Tottori avec escale à Tokyo. Nous voici dans Le Journal de mon père3 de Jirô Taniguchi. Après 14 ans d’absence, un fils s’en retourne dans sa ville natale, pour assister aux funérailles de son père. La ville de Tottori fut ravagée par les flammes en avril 1952, et cet incendie provoqua une crise au sein du couple. Le père qui était barbier-coiffeur dut repartir à zéro mais refusant par trop d’orgueil l’aide de son beau-père… Non, en vérité, il accepta un prêt mais qu’il voulut honorer le plus rapidement possible (alors que rien ne l’obligeait), et pour ce faire, il se mit à travailler comme un forcené, et son épouse se sentant négligée… Je vous raconte tout cela assez bêtement, alors que la merveille de cette BD réside dans les détails, la minutie, les micros-fictions, les micros-récits de la narration qui est d’une fluidité digne du grand cinéma japonais ; je pense en particulier à Kenji Mi-

zoguchi (1898-1956) par ce goût de la vue qui surplombe la scène, et le respect de la bonne distance, pudique et élégante. Ce fils, bien des cases nous le montrent bec cloué, attentif, écoutant, se souvenant, se remémorant, accaparé par un silence qui tient du calcul mental : la résolution du ressentiment. Par le procédé des flashbacks, il revisite le passé, sautant à gué la basse-fosse des regrets, pour se réconcilier avec le défunt. Tokyo – Taipeh, c’est combien d’heures de vol ? Rebouclez vos ceintures ! On est reparti. La Rivière4 (Grand Prix du Jury à la Berlinale 1997) est un film venu de Taiwan, du réalisateur Tsai Ming-liang. Je passe sous silence certains aspects de ce film énigmatique. Pourquoi  ? Il pleut dans la chambre du père. L’inondation vient des voisins, ou estelle provoquée par la maladie du fils ? Enfin, il en va ainsi depuis que le fils a tenu le rôle d’un noyé à la dérive dans les eaux noires d’une rivière (ou d’un cloaque ?) Père, mère et fils vivent si séparés que ce n’est qu’allusivement que l’on constate que ces trois-là ont un lien de parenté, logeant même sous le même toit. Et le fils se lave sans cesse, il a si mal au cou qu’il se tord de douleur. On essaye les imprécations, la papaye magique, l’acupuncture, les prières aux encens, les massages, l’ostéopathie et même la divination auprès d’un mage. Cette ultime tentative exige que père et fils s’éloignent quelques jours de leur domicile. Et le père téléphonera depuis la chambre d’hôtel au « Maître » pour savoir si ce dernier a reçu en songe « des consignes » de guérison. Me restera à jamais en mémoire cette image de père et fils roulant en moto sur l’autoroute, et le père tient à deux mains la tête bien droite du fils, car si la tête penche c’est tout le corps qui

part à vau-l’eau. À quoi tient la beauté d’un film ? Sans doute à la magie des ingrédients, au secret de fabrication ? Et ici bien sûr, comme chez Grimm ou Kafka pas la moindre explication de causalité. Et père et fils se retrouvant dans le noir total ! Et puis voici un autre fils se glissant dans la peau du père comme pour le régénérer, afin qu’il surgisse des limbes et parle, parle ! La Dodge5 de William Cliff est un monologue intérieur, le père évoque son propre père, son frère, ses oncles, ses aïeux, ses débuts, sa vie de médecin, sa douce épouse, l’exode de ’40 vers la France, le retour au pays. « Jamais je n’ai accepté, quand les Allemands venaient me réquisitionner pour des soins, jamais je n’ai accepté de monter avec eux dans une de leurs voitures… » (p.54) Et le père est fort mécontent, ses fils l’ont tant et tant déçu. D’un geste théâtral, il nous invite à regarder des photos, tenez, regardez ! Embarquez dans la Dodge « monument extraterrestre » (p.31) d’une seule traite, l’émotion y sera ad hoc. « Il fallut penser à remplacer la Dodge, trop vieille, trop ancienne de conception. Comme moi-même. » (p.100) Ni à la casse, ni pièce de rechange, pour nous les fils, les pères, mêmes morts, restent increvables, non ? ■

Adolphe Nysenholc, Bubelè l’enfant à l’ombre, postface de Rossano Rosi (Collection Espace Nord, 314, 2013) 167 pages. 2 Joël Holmès, Les Souvenirs (19 chansons), Disques Pathé. Collection La Chance aux chansons, réédition 1990. 3 Jirô Taniguchi, Le Journal de mon père, traduit du japonais, Casterman, 2007, 274 pages. 4 Tsai Ming-Liang, La Rivière, DVD VO CH st FR. Durée : 118 min.(Films sans frontières). 5 William Cliff, La Dodge, Éditions du Rocher, 2004 (Collection Anatolia, 106 pages. 1

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regarder « L’acte de tuer » - « Jeu d’Ombres » autour d’un massacre oublié roland Baumann Film novateur sur la mémoire des massacres de 1965-1966 en Indonésie, « L’acte de tuer » (The Act of Killing) de Joshua Oppenheimer est une oeuvre déconcertante dans laquelle d’anciens tueurs témoignent des meurtres de masse dont ils furent les auteurs et mettent en scène leurs souvenirs dans un « docu-fiction » d’une insoutenable vérité.

M

ontré début mai au festival international de films documentaires « Docville » à Leuven, The Act of Killing est sorti en salles en France le 10 avril dernier et aux Pays-Bas le 23 mai ; étapes récentes d’une oeuvre considérée comme la « révélation » du festival de Toronto en septembre 20121. « Il est défendu de tuer ; tout meurtrier est puni, à moins qu’il n’ait tué en grande compagnie, et au son des trompettes. » cette citation de Voltaire, tirée du Dictionnaire philosophique (1765) et figurant au plan d’ouverture du film donne la clé d’interprétation de ce « sidérant documentaire », dont les « vedettes », « le vieil Anwar et l’obèse Herman, Laurel et Hardy de l’assassinat sériel », « pétant la forme, exaltant leur sadisme »2 reconstituent devant la caméra les rituels de la torture et de la mise à mort auxquels ils soumettaient quarante ans auparavant les communistes, à Medan, grande ville du Nord de Sumatra. Confronté à une telle « célébration » de « l’extermination des communistes  », le spectateur est médusé par les témoignages d’Anwar et ses amis, cinéphiles de toujours, amateurs de cinéma américain, fans d’Elvis, de Marlon Brando, Charlton

Heston et expliquant comment ils s’inspiraient de ces vedettes de l’écran lorsqu’ils « jouaient » leurs rôles de bourreaux face à leurs victimes... Visiblement fiers de leurs crimes, ces anciens « Preman », (gangster en Indonésien) ont tué à l’instigation de l’État et jouissent encore aujourd’hui de l’estime et du respect des autorités et de la société locale. Rien d’étonnant donc à les voir rejouer avec autant de précision que de « passion » leurs gestes de tueurs. Comme le suggère le film et l’exprime clairement son réalisateur, la « bonne tenue de l’économie indonésienne » célébrée aujourd’hui dans la presse économique internationale est étroitement liée à l’héritage des massacres de 1965, « acte fondateur » de « l’Ordre nouveau » du général Suharto dont la dictature militaire favorisa dans l’ancienne colonie hollandaise l’hégémonie du capitalisme international qui n’a cessé depuis de présider à la destinée de l’archipel indonésien.

La liquidation du PKI En 1965, le parti communiste indonésien (PKI) avec deux millions de membres est un des piliers du régime du président Sukarno, père de l’indépendance indonésienne et champion des

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pays non-alignés. Le 30 septembre 1965, une soi-disant tentative de putsch militaire, attribuée d’emblée au PKI, déclenche la tragédie qui met fin à l’Indonésie de Sukarno. Dès le 1er octobre, le général Suharto écrase la « rébellion » et dirige la répression anti-communiste. En quelques mois, de 500.000 à un million de membres ou « sympathisants » du PKI et membres de l’importante minorité chinoise d’Indonésie sont assassinés par les milices nationalistes et musulmanes dans une vague de meurtres de masse orchestrés par l’armée et les autorités de l’État. Évinçant rapidement Sukarno, le général Suharto instaure « l’Ordre nouveau ». Des centaines de milliers de «  communistes » sont emprisonnés, souvent pendant de longues années, tel le célèbre écrivain Pramoedya Ananta Toer (1925-2006), détenu jusqu’en 1979 à Buru, île de l’archipel des Moluques où le régime Suharto emprisonna des milliers de suspects. Assigné à résidence jusqu’en 1992, le sort réservé par la dictature à l’auteur de la « Tétralogie de Buru » est emblématique des persécutions dont sont l’objet les survivants du massacre ainsi que les familles et proches des « communistes » disparus,  qui, jusqu’aujourd’hui,  sont

discriminés et terrorisés au quotidien, tandis que les bourreaux et leurs enfants « tiennent le haut du pavé ». Dominant la vie sociale de la nation émergente et œuvrant à la «  bonne tenue de l’économie indonésienne  », ces «  patriotes » honorés n’ont jamais cessé d’être les principaux bénéficiaires de tous les bienfaits du « miracle » du « dragon indonésien ».

L’occultation du meurtre de masse En 1982, «  L’année de tous les dangers » (The Year of living dangerously) du réalisateur australien Peter Weir avait pour toile de fond les événements qui mirent fin au régime Sukarno. Ce film de fiction, qui souscrivait au mythe officiel d’une conspiration communiste orchestrée en sousmain par la Chine maoïste mais évoquait aussi la brutalité de la répression militaire et le bain de sang qui suivit l’échec du «  complot communiste  », fut interdit de diffusion en Indonésie jusqu’en 1999 ! Le «  mouvement du 30 septembre » (Gerakan 30 September – G30S), ce prétendu « complot communiste », mené par quelques officiers subalternes – en fait proches de Suharto– qui font enlever et assassiner six généraux, dont le commandant en chef de l’armée indonésienne, ouvrant ainsi la route du pouvoir militaire absolu pour Suharto, constitue la première étape du coup d’État militaire qui permet à la fois de liquider le parti communiste et d’éliminer Sukarno, dont l’autoritarisme nationaliste à relents de socialisme anti-impérialiste ne cessait d’inquiéter les intérêts géopolitiques américains et britanniques en Asie du Sud-Est. Dès 1966, à l’université de Cornell,

le politologue Benedict Anderson, spécialiste de l’Indonésie, prouvait l’inconsistance des thèses de complot communiste dans «  l’affaire du G30S  », cause du coup d’État du 1er octobre 1965. Publiée en 19713, ce «  Cornell Paper » vaudra à Anderson d’être interdit de séjour en Indonésie jusqu’à la fin de la dictature militaire. Portée à l’écran à l’initiative du régime Suharto, l’histoire officielle du G30S, sera l’objet d’un « docu-fiction » diffusé chaque année dans les écoles et à la télévision, le 30 septembre, jour anniversaire de la « trahison communiste »4 Le départ du dictateur (1998) favorise une ouverture : libération des prisonniers politiques, indépendance du Timor oriental, occupé depuis 1975, et amorce d’un retour sur les massacres de 1965-1966. Présenté sur Arte dans «  Les mercredis de l’histoire » en avril 2002, Shadow Play : Indonesia’s year of Living Dangerously (2002) du réalisateur australien Chris Hilton, résumait la chronologie et le contexte politique international du « Massacre en Indonésie  » montrant de rares images d’archives et quelques témoignages d’experts et de survivants. Le titre de ce documentaire « classique » renvoie au film de Peter Weir ainsi qu’au traditionnel  « jeu  d ’ombres » du «  théâtre de marionnettes wayang  », inscrit au patrimoine immatériel de l’UNESCO, célèbre à Java, et à Bali, « île de rêves » théâtre d’abominables tueries en 1965-1966. Inspiré par le « cinéma vérité » de Jean Rouch, The Act of Killing se centre sur l’interprétation subjective de ces événements historiques, afin de mieux comprendre ce qu’ils signifiaient, pour les tueurs et la société indonésienne. Mettant en

scène l’imaginaire des bourreaux, le film suscite des débats animés et me semble tout aussi « provocateur » que le fut en son temps le chef-d’oeuvre de Rouch, Les maîtres fous (1955). En juillet 2012, la Commission nationale des droits de l’homme (Komnas HAM), a publié un rapport qualifiant de crimes contre l’humanité les massacres de 1965-1966 et demandant une enquête officielle et la création d’un tribunal de justice, ainsi que d’une commission pour la vérité et la réconciliation. Une demande rejetée par le bureau du Procureur Général suite aux pressions de l’armée  ! Cette histoire occultée «  interfère avec le présent et empêche une société de se regarder elle-même  » souligne Joshua Oppenheimer, interrogé sur les réactions provoquées par son film en Indonésie où, diffusé lors de séances privées, il suscite un vaste débat. Aléas de la distribution en Belgique : aux dernières nouvelles, The Act of Killing est diffusé en Flandre, mais pas en Wallonie... ■

Voir les extraits traduits en français d’un dossier du magazine indonésien Tempo publiés par le Courrier International « 360° - À Sumatra, les jeux de la mort et du cinéma », Courrier international n°1150 (15-21 novembre 2012), pp. 50-54. Partenaire actif dans la diffusion de The Act of Killing, le Courrier a publié un nouveau dossier à l’occasion de la sortie du film en France : http://www.courrierinternational.com/ dossier/2013/04/10/un-film-ou-les-tueursmettent-en-scene-leurs-crimes 2 Jacques Mandelbaum, « The Act of Killing : quand les assassins rejouent leur folie meurtrière », Le Monde, 9 avril 2013. 3 Anderson, Benedict et Ruth McVey : A Preliminary Analysis of the October 1, 1965, Coup in Indonesia. Ithaca (NY), Cornell Modern Indonesia Project ,1971. 4 Pengkhianatan G30S/PKI (1984) du réalisateur Arifin Noer 1

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réfléchir Les métamorphoses du « Juif » Jacques Aron À propos du dernier livre d’Enzo Traverso : La fin de la modernité juive1 La mémoire est nécessaire pour toutes les opérations de la raison. Pascal, Pensées

V

ingt ans après Les Juifs et l’Allemagne, Traverso nous revient avec un essai qui a pour ambition de marquer un nouveau jalon dans l’évolution perceptible mais difficile à cerner du « monde juif », si tant est qu’il existe un corps social identifiable sous ce nom. C’est donc davantage un livre consacré à l’évolution d’une pensée produite par des Juifs ou sur des Juifs dans des sociétés en mutation constante, dans des circonstances dont ils ont été les acteurs ou qu’ils ont subies à leur corps défendant. L’ouvrage de 1992 portait en sous-titre : « De la symbiose judéo-allemande à la mémoire d’Auschwitz  ». Son récent complément : « Histoire d’un tournant conservateur ». Le lecteur est ainsi invité à parcourir un cycle, une boucle qui serait en passe de se refermer entre des repères historiques marquant pour la mémoire contemporaine bien au-delà du milieu ou des individus directement concernés, des repères à ce point symboliques qu’ils se rattacheraient aux valeurs fondamentales affirmées à partir du noyau « occidental » (Europe et Amérique) et qui se sont répandues avec son expansion économique et colonisatrice. Traverso est évidemment conscient du caractère ré-

ducteur de cette approche, aussi insiste-t-il sur une tendance générale plus que sur l’homogénéité d’un groupe qui se serait tout entier détourné de la pensée critique que lui aurait quasiment imposée sa condition de « paria », de groupe minoritaire méprisé, pour se ranger graduellement sous la bannière d’une pensée conservatrice soucieuse du maintien d’un ordre social dans lequel il se serait intégré et auquel il serait parvenu à s’identifier. L’époque de cette mutation, dont le génocide serait le pivot, et surtout sa célébration selon des rituels qui l’aurait transformé en une véritable religion civile, substitut sacré d’une société de plus en plus sécularisée, – cette époque se serait ouverte à la fin du 18e siècle avec l’émancipation, ses césures successives ayant pris les noms d’antisémitisme (1879), de sionisme (1896-97), de colonisation de la Palestine sous mandat britannique à partir de la Première Guerre, d’arrivée au pouvoir du national-socialisme et de son oppression graduelle (1933-1941), de son paroxysme génocidaire (1941-1945) ; la proclamation de l’État d’Israël (1948) ensuite, ses conflits internes et externes dans le contexte de la guerre froide et de la redistribution des grandes puissances mondiales. À l’appui des moments d’inflexion de ce grand revirement, des noms apparaissent, de Juifs connus, dont le statut social témoignerait du

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passage d’un déni persistant de reconnaissance par l’environnement majoritaire, aux signes évidents de pouvoir et de distinction, en raison même de leur judéité et pour des raisons inverses à celles qui entraînaient auparavant leur rejet.

différencier les contextes J’avoue avoir quelque peine à adhérer à cette vision synthétique de contextes historiques à ce point différenciés, dans le temps et dans l’espace, et ce pour deux raisons : la première tient au flou des concepts, à commencer par celui de « modernité », en soi et dans sa qualification de « juive ». La seconde a trait à cette forme d’amalgame d’individus dont les trajectoires sont à ce point hasardeuses et les intérêts opposés. Hannah Arendt, à qui il est beaucoup fait référence dans l’ouvrage, appelle l’antisémitisme « une insulte au sens commun ». L’antisémitisme appartient entièrement au champ effectivement « moderne » du débat politique, qui s’ouvre de plus en plus largement avec la désagrégation des structures de pouvoir médiévales et l’affaiblissement du lien religieux entretenu par les grandes Églises. Si une thèse réactionnaire bien connue a consisté à voir dans la nouvelle « ère des masses » un « déclin de la civilisation » (le titre même d’un ouvrage d’Henri de Man), il n’en est pas

cer sur les positions imposées par l’adversaire. Les réponses à des questions irrationnelles sont à leur tour irrationnelles, la seule attitude critique radicale serait le refus de la question, le déplacement du questionnement vers une forme d’organisation collective des problèmes concrètement posés, à laquelle tous les acteurs concernés puissent effectivement prendre part. En politique, cela s’appelle aujourd’hui l’État, concrétisation de ce que les Lumières avaient esquissé comme un nouveau « contrat social ». Est-ce cette position critique qui s’est affaiblie avec le temps ? On peut le penser. Dans le milieu des Juifs allemands entre 1880 et 1933, beaucoup de voix se sont élevées pour dépasser l’instrumentalisation propagandiste moins vrai que l’immaturité po- d’une prétendue « question juive », litique autant que culturelle des catalyseur empoisonné de toute producteurs de la nouvelle puis- la vie politique. Elles sont sousance économique, que les États vent bien oubliées aujourd’hui. Le nationaux vont armer et dres- scientifique Josef Popper fit déjà ser les uns contre les autres, al- le procès de cette tendance morlait jouer un rôle de plus en plus tifère en 1886 dans un pamphlet : décisif. À continuer à travailler – Le prince Bismarck et l’antisémimême de façon critique et ration- tisme. Et comme il le rappelait nelle – sur de pseudo-questions dans son autobiographie parue posées en termes irrationnels, en 1917 : « Je m’efforçais dans cet fantasmatiques, voire complète- écrit de traiter de la soi-disant ment absurdes, sur de la non-pen- question juive de manière parsée, le philosophe et l’historien faitement objective ; je croyais ne restent-ils pas prisonniers des encore à cette époque pouvoir anti-Lumières de l’adversaire  ? combattre par des faits et des arAccepter l’idée d’une « question guments une question dominée juive », du « Juif », du « judaïsme », par des instincts élémentaires. du « peuple juif », c’est déjà se pla- J’ai bien vite dû reconnaître mon

erreur. »2 Posée en tant que telle, la « question juive » est insoluble, comme le démontrait encore brillamment le philosophe Theodor Lessing peu avant son assassinat par les nazis en 1933. Et le jour de sa mort parut son éloge du mulet, l’animal métissé dans lequel il voyait la métaphore du destin juif : « Toute la fierté du cheval est précisément de ne pas être un âne. Et tout le sentiment de supériorité de l’âne consiste précisément en ceci : Dieu merci, je ne suis pas un cheval ! Tandis que le mulet se dit : qu’importe qu’il y ait des Allemands ; qu’importe qu’il y ait des Juifs ; que nous importe la conservation ou l’affirmation des peuples ? La seule question qui compte est celle-ci : quand un peuple est-il digne de durer et de se maintenir ? »3 C’est cette figure de l’hybride, incarnée aujourd’hui par beaucoup à l’heure de la mondialisation, qui reste l’épouvantail, la « tête de turc » de tous les nationalismes, lesquels, par nature, ne peuvent être que de droite. C’est à cette conclusion que Traverso semble aussi revenir à la fin de son essai. ■ Éditions La Découverte, 2013. Josef Popper-Lynkeus, Selbstbiographie, Leipzig, 1917. 3 Theodor Lessing, Gnade dem Maultier (Pitié pour le mulet), « Selbstwehr », Prague, 31 août 1933. 1 2

Enzo Traverso sera à l’UPJB le vendredi 14 juin (voir annonce page 26)

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! ‫יִידיש ? יִידיש‬

Yiddish ? Yiddish ! par willy estersohn

Traduction

‫װין און ייִ דיש‬

vin un yidish Vienne et le yiddish Il y a cent ans, en 1913, paraissait un article qui fit date dans le mouvement qui s’était donné pour tâche de « sortir le yiddish de sa gangue de ‘langue du peuple’ pour atteindre une vocation universelle ».* Intitulé di oyfgabe fun der yidisher filologye (Le devoir de la philologie yiddish), cet article-programme avait pour auteur Ber Borokhov qui vécut à Vienne de 1912 à 1914. La capitale de l’empire austro-hongrois avait vu affluer, depuis la fin du XIXème siècle, une masse d’immigrés juifs – yiddishophones pour la plupart – fuyant la misère et les pogromes sévissant en Europe orientale. Mais, jusque-là, Borokhov s’était surtout illustré comme théoricien du sionisme socialiste et comme fondateur du parti Poale-Tsion (en hébreu : les Travailleurs de Sion). Après la Première Guerre mondiale, les conceptions que Borokhov (mort en 1917) avait développées dans son article jouèrent un rôle éminent dans la « normalisation » du yiddish. Le chercheur juif autrichien Thomas Soxberger consacre précisément son dernier livre à la culture et à la politique yiddish à Vienne entre 1904 et 1938. Voici, à ce propos, un extrait d’un article du Forverts de New-York.

Aujourd’hui on considère Borokhov avant tout comme un penseur politique, comme le théoricien du poaley-sionisme. Mais son œuvre politique (sa politique) ne peut être séparée (ne se laisse pas séparer) de son intérêt pour la philologie (de ses intérêts philologiques). Le lien étroit entre yiddish et politique est le thème central des recherches (de la recherche) de Soxberger qui démontre clairement que la culture yiddish a été une composante importante de différentes conceptions du nationalisme juif dans la diaspora. Une part substantielle de ces conceptions a émergé ou s’est développée d’abord en Autriche, dans la monarchie habsbourgeoise, et ensuite dans ce qu’on a appelé (dans la ainsi appelée) la « première république».

*Jean Baumgarten, Le yiddish, histoire d’une langue errante, Éditions Albin Michel.

‫ דעם‬,‫ּפאליטישן דענקער‬ ָ ‫ װי ַא‬,‫ קודם־ּכל‬,‫כאװן‬ ָ ‫רא‬ ָ ‫בא‬ ָ ‫הײנט געדענקט מען‬ ַ dem

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opteyln nit zikh lozt

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ershter

remarques

‫ בָארָאכָאװן‬borokhovn = accusatif de ‫ בָארָאכָאװ‬Borokhov. ‫ּכל‬-‫ קודם‬koydem-kol (hébr.) = avant tout. ‫ בֿפירוש‬befeyresh (hébr.) = clair, principal ; clairement, principalement. ‫ גלות‬goles (hébr.) = exil, diaspora. (‫ דָאזיקע)ר‬dozike(r) précédé d’un article défini = ce, cette, ces (exemple dans notre texte : ‫קָאנצעּפציעס‬ ‫ די דָאזיקע‬di dozike kontseptsyes.

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anne gielczyk

Bilan intermédiaire

B

onjour les amis, la saison tire à sa fin et mon énergie aussi, faut bien le dire. En néerlandais on dit «de laatste loodjes wegen het zwaarst», en français ça devient apparemment « rien n’est plus difficile à écorcher que la queue ». Autrement dit, je peine. Certes je n’ai plus l’excuse du manque d’oxyde de carbone, qui m’avait vidé la tête pendant mes vacances de Pâques à la montagne. Par contre, avec le temps qu’il fait ici, je suis en déficit de lumière et de chaleur et comme ça fait longtemps que j’ai rangé ma luminette, ainsi que mes lainages, mes écharpes et mes moufles, – que je suis obligée d’aller repêcher au fur et à mesure que les jours se succèdent – c’est pas la forme. Enfin, toujours est-il que voici le dernier numéro avant l’été. Le temps de faire un bilan intermédiaire. Pour résumer la situation, ça se gâte les amis, ça se gâte.

O

n s’enfonce, on s’enfonce. Austérité, rigueur, récession, austérité, rigueur, récession. Et dire que tout ça est basé sur des erreurs de calcul ! Comme vous le savez sans doute, les politiques budgétaires sont calculées en fonction du pourcentage que représente la dette d’un pays en rapport avec son PIB. Pour entrer dans la zone euro par exemple, nous étions

censés ne pas dépasser un taux d’endettement de 60%. Cela n’a pas empêché la Belgique d’accéder à l’euro avec des pourcentages bien plus élevés.

D

epuis 2010, un nouveau taux a vu le jour : les 90%. Les auteurs de cette nouvelle formule magique, Carmen Reinhart et Kenneth Rogoff. Ces deux éminents économistes américains démontrent, en s’appuyant sur des données historiques dans 44 pays, que la croissance diminue au fur et à mesure que la dette augmente et qu’à partir d’un seuil de 90% de taux d’endettement, la croissance se transforme en décroissance. Cette étude a rapidement été adoptée par tout ce qui compte dans le monde des décideurs économiques et politiques, cela n’étonnera personne, puisqu’elle ne fait qu’apporter de l’eau au moulin des politiques d’austérité.

U

n petit étudiant de l’Université de Massachusetts, Thomas Herndon, a refait les calculs à titre d’exercice dans le cadre de ses études et a constaté à son grand étonnement qu’avec les mêmes données, il arrivait à un résultat de 2,2% de croissance alors que Reinhart et Rogoff obtenaient une (dé)croissance de -0,1% pour les pays dont le taux d’endettement dépassait

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les 90%! Poussant plus loin l’enquête, notre étudiant a découvert que le tableur Excel de R&R comportait une « erreur » d’encodage dans la formule de calcul. De plus, nos éminents économistes avaient « oublié » d’inclure cinq pays dont les données excédaient comme par hasard la moyenne. Cette méthode d’exclusion sélective, contestable et contestée, est bien connue des chercheurs et porte le nom évocateur de «massage» de données. Elle a pour avantage non négligeable de consolider des résultats qui vont dans le sens des convictions initiales de leurs auteurs. In casu, le raisonnement néoclassique qui veut qu’une sortie de la crise passe nécessairement par une réduction de la dette. C’est pourquoi la révélation de cette erreur de calcul est venue perturber quelque peu le ronron néo-libéral ambiant, d’autant plus, que de plus en plus de voix, y compris dans les plus hautes sphères, s’élèvent pour mettre en cause la politique de rigueur, tant celle-ci s’avère désastreuse dans la pratique. En janvier, le FMI avait avoué en la personne de son chef économiste Olivier Blanchard (bien connu des étudiants en macro-économie) une autre erreur de calcul, qui avait conduit à une grave sousestimation des effets néfastes de la politique d’austérité en temps de crise et plus spécialement en Grèce. En février, Paul De Grauwe publiait une recherche

qui démontre que l’austérité augmente la dette au lieu de la diminuer. Et pourtant, rien ne semble vouloir ébranler les convictions de notre cher Commissaire en charge de nos affaires économiques, Olli Rehn. Bien au contraire, il persiste et signe dans ce qu’un autre économiste éminent, Paul Krugman, appelle le « Rehn de la terreur ». Selon Olli, si la politique d’austérité ne fonctionne pas, ce n’est pas la faute à la politique d’austérité mais aux économistes qui par leur critique sapent la confiance des marchés. C’est ce qui s’appelle je crois, tirer sur le pianiste.

E

t pour conclure cette saison morose, mon ordinateur, volé souvenez-vous en gare de Gand en décembre dernier et localisé trois semaines plus tard rue Zénobe Gramme à Charleroi, a disparu. Je veux dire, de mon écran et pour de bon cette fois, je le crains. J’ai beau scruter la toile, il n’est plus visible. Statut « déconnecté ». Eh bien, c’est comme si on me l’avait enlevé une deuxième fois ! Jusque-là, j’allais vérifier de temps en temps sur le net s’il était bien là et j’avais noté qu’il apparaissait surtout la nuit. Que faisait donc le nouveau propriétaire la journée ? Dormir ? Travailler dans le bâtiment ? Et surtout que faisait-il avec mon ordinateur la nuit ? Écrire le roman du siècle ou regarder du porno ? Quoiqu’il en soit, ça me rassurait de le savoir à Charleroi, c’est pourquoi j’ai tardé à user de mon pouvoir d’intervention, qui me permet de le verrouiller

ou de l’effacer à distance. Avec quelques amis nous avons bien évoqué la possibilité d’aller faire un tour rue Zénobe Gramme en utilisant l’option « émettre un son », mais ne sachant pas exactement à quel numéro il se trouvait, cela aurait plutôt alerté le receleur et d’ailleurs cela nous a été fortement déconseillé par la police qui n’a eu de cesse de nous avertir qu’il s’agissait d’une rue très mal famée. On sentait bien que eux non plus n’aimaient pas trop y mettre les pieds. Comme vous pouvez le voir, j’ai activé la fonction « me prévenir lorsque l’appareil sera retrouvé » mais bon, je ne me fais pas trop d’illusions, il semble bien perdu à jamais.

U

ne histoire similaire est arrivée à Dom, un Anglais vivant à Londres, qui s’est fait voler son ordinateur et son iPad dans son appartement. Rien de plus banal me direz-vous, si ce n’est que quelques semaines plus tard, son ordinateur a réapparu… en Iran. Évidemment entre la rue Zénobe Gramme à Charleroi et Téhéran, y a pas photo. Et justement, Dom disposant d’un logiciel bien plus sophistiqué que le mien, il a pu capter des images des nouveaux utilisateurs. Il en a immédiatement informé la police qui comme ce fut mon cas lui a dit qu’ils ne pouvaient malheureusement rien pour lui. Il a alors « partagé » son histoire (et ses photos) avec ses amis, qui ont beaucoup « liké » et qui à leur tour ont partagé ça avec d’autres

amis, qui à leur tour etc. Ainsi les (nombreux) « amis » de Dom ont pu suivre en direct les images des nouveaux utilisateurs de son MacBook Pro chaque fois que ceux-ci allumaient l’ordinateur. Ceci étant finalement arrivé aux oreilles (ou plutôt aux yeux) des nouveaux propriétaires, une famille iranienne tout ce qu’il y a de plus respectable, ils ont, aussi mortifiés qu’innocents, pris contact pour lui rendre son bien. Dom, un peu coupable d’avoir dévoilé leur image et conscient de ce viol de leur vie privée, le leur a gracieusement offert en guise de réparation. Je parie qu’il ira faire un petit tour cet

été à Téhéran, question de saluer son vieil ordi et ses nouveaux propriétaires et qu’il nous fera partager tout ça sur Facebook. Je sens qu’on va liker, very much. En attendant, je vous souhaite de bonnes vacances les amis, pour autant que l’état de vos finances en ces temps d’austérité vous les permette… ■

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polémiques Deux articles publiés dans notre numéro précédent ont suscité de vives réactions de plusieurs de nos lecteurs. En premier lieu celui de Richard Kalisz, intitulé Die Sheisssseimer/Le seau à merde, qui s’en prenait en termes injurieux à Simon Gronowski. Nous aurions dû faire précéder cet article d’un chapeau nous démarquant fermement des propos de Richard Kalisz, à tout le moins sur la forme et sur le ton. Nous prions nos lecteurs, et avant tout Simon, de nous excuser de ne l’avoir pas fait. Et nous publions ci-après son droit de réponse ainsi qu’une réaction de Matéo Alaluf. Le deuxième article qui a suscité des réactions indignées était signé Sender Wajnberg et intitulé Collusion d’idéologie. Lui aussi nous aurions dû le faire précéder d’un chapeau indiquant clairement que L’UPJB soutenait, et ce depuis toujours, ViaVelo Palestina et que les propos de Sender Wajnberg n’engageaient que lui. Thérèse Liebmann nous a fait parvenir une réaction que nous publions, ainsi qu’un article de Marco Abramowicz qui fut à l’initiative de ViaVelo Palestina, et qui, aujourd’hui est très engagé dans les actions de solidarité avec les Bédouins du Neguev menacés d’expulsion. Points critiques a toujours ouvert ses colonnes au débat et se fait fort de réfléter ainsi toutes les opinions qui prévalent en son sein et dans la gauche en général sur des sujets qui font partie de son « core-business » (la politique israélopalestinienne, l’identité juive, l’immigration, l’héritage du judéocide...) H. W.

DROIT DE RÉPONSE à l’article de Richard Kalisz, intitulé « Die Scheisseimer/Le seau à merde. Un procès de merde », paru aux pages 16 et 17 du numéro 336 de mai 2013 de Points critiques. Cher Monsieur Kalisz, Je n’ai pas l’honneur de vous connaître mais votre nom m’est familier. C’est celui de mon professeur de liturgie hébraïque d’avant guerre, un monsieur très distingué qui m’apprenait à lire mais ne m’a jamais traduit un mot, discutant plutôt avec ma mère dans un yiddish flamboyant autour d’une tasse de thé, Je l’ai revu après la guerre dans son échoppe de maroquinerie chaussée de Forest à Saint-Gilles. J’ai rencontré il n’y a pas longtemps son fils, ou plutôt son petit-fils, qui faisait des reportages photographiques de bar-mitzvas et de mariages. Vous êtes peut-

être de sa famille. J’ai découvert dans Points Critiques de mai 2013 les propos que vous me consacrez suite au documentaire de CANVAS du 25.11.2012 et au spectacle de Koenraad Tinel du 22.2.2013 au théâtre Les Tanneurs, concernant notre rencontre et l’amitié née entre nous, 1. Vous écriviez déjà à mon sujet le 27.3.2013 : « Et, savoir aussi parler de Gronowski en mesurant toute sa démarche, qui constitue à mes yeux ce qui est le plus gênant car, en effet, cette amitié semble forcée. Elle verse dans un mauvais mélo plutôt que dans une explication face à face et sans concession qui aurait pu alors être complémentaire et sa-

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lutaire. C’est la partie ratée de l’émission et de cette fausse relation qui évite une vraie confrontation. Son humanisme envahit son champ de vision et le fausse fortement. Le traiter de Judas ne sert à rien et ne correspond pas à la réalité. Il abîme seulement son histoire dans un sentimentalisme qui noie le poisson ». Ces lignes apparaissent dans un toutes-boites informatique, « l’Agence Diasporique de l’Information » (ADI), à la suite d’un éditorial de son promoteur, M. Eric Picard, qui sous le titre « Néo-révisionnisme en Belgique », me reproche d’avoir « chanté, entonné un chant nazi à la télévision », me traitant virtuellement de nazi. Ce titre et ce reproche n’ont

évidemment aucun fondement : a) l’énoncé est faux ; pour dire que quelqu’un a « chanté, entonné un chant » ou même « interprété une chanson  », il faudrait qu’il en ait chanté paroles et musique ; je n’en ai prononcé aucune, n’en connaissant aucune et ne connaissant pas l’allemand ; b) je ne faisais que rechercher et fredonner une mélodie souvent entendue comme illustration de documentaires consacrés à la Shoah ; j’ai alors dit : « c’est une belle mélodie…. » ; vous le dites également le 22 mars 2013 dans le même ADI : « … il est juste de dire que le célèbre chant nazi fonctionnait car sa mélodie était prenante. NE PAS S’EN RENDRE COMPTE équivaut à sa cacher la tête sous le sable et surtout à ne pas savoir apprécier la célèbre séquence de Cabaret de Bob Fosse qui diffuse un chant nazi de toute beauté, qui fait frémir le spectateur,…. » ; c) j’ai clairement rejeté les horribles paroles de ce chant, en précisant dans l’émission : « c’est une belle mélodie, on ne peut en dire autant des paroles » ; d) M. Picard a isolé ces quelques secondes d’une émission d’une heure durant laquelle je n’ai cessé de dénoncer la barbarie nazie, procédé journalistique qui n’est pas des plus brillants. L’allégation me fait penser à ceux qui traitent Daniel Barenboïm de nazi car il joue du Wagner. Dans le même éditorial, M. Picard, achevant de se déconsidérer, profère deux mensonges : – «  Gronowski et Tinel soutiennent que leurs malheurs sont ‘similaires’… », alors que j’ai toujours dit que notre douleur n’est pas comparable (mon livre, page 60), – « … et cherchent, par un pardon accordé sans condition de re-

pentir, … », alors que j’ai toujours subordonné tout pardon à deux conditions : que le coupable le demande et qu’il regrette sincèrement son acte (page 56). En mêlant votre voix à la sienne, vous risquez d’apparaître comme cautionnant ses outrances. Il publie également les réactions de quelques personnes, dont aucune, même vous dans votre article, n’avait encore lu une ligne de mon livre paru le 17.4.2013. Je n’ai évidemment pas assez d’estime pour cet obscur mailing électronique, destiné à un certain public, pour lui répondre. 2. Il en va autrement de Points critiques, mensuel de l’UPJB, que je respecte infiniment. Vous écrivez dans l’ADI le 20.4.2013 : «  Ayant été sollicité par la revue Points critiques pour écrire un article de fond sur ce qu’on peut appeler maintenant l’affaire « Seau à merde », j’ai repris mon point de vue déjà exprimé ici, mais en l’étoffant avec plus d’arguments et le formulant mieux. Ce faisant, je le lui ai transmis » ; 1) vous avez en effet «  étoffé »  votre premier texte de l’ADI : a) vous parlez de ma « réconciliation  » avec Koenraad Tinel  ; je ne puis me « réconcilier » avec Koen puisque je n’ai jamais été en conflit ou en litige avec lui, encore moins sa victime ; b) cette réconciliation serait « improbable », donc douteuse ; vous parlez de « ma confusion amicale forcée », supposant donc que mon amitié serait feinte ; « fusion émotive non demandée, sauf peut-être par un certain Rangoni », soupçonnant ainsi, de manière méprisante, le jeune Sacha Rangoni, 16-17 ans début 2012, de m’avoir demandé de feindre l’amitié ; « dans un sentimentalisme de merde » ; « cet acte télévisuel (le documentaire de

Canvas) en faisait trop, sans aucun doute… » ; vous n’indiquez pas sur quelle base vous mettez en doute mon amitié pour Koen ; je vous dénie le droit de vous immiscer dans l’analyse de mes sentiments ; c) vous indiquez que je suis atteint de « confusion mentale », autre affirmation gratuite de votre part ; 2) Je ne comprends pas que Points critiques a pu laisser passer un tel article, alors que dans son numéro précédent, pages 32 et 33, l’UPJB exprimait son bonheur de s’associer à la sortie de notre livre et publiait de larges extraits de la postface de David Van Reybrouck ; 3) Koen a rejeté l’idéologie de son père et pour moi c’est l’essentiel ; mais selon vous, l’enfant de six ans en 1940 est aussi coupable que le père ; vous ne pouvez comprendre que moi, enfant de la Shoah, puisse devenir l’ami de l’enfant d’un nazi ; cela vous paraît tellement inconcevable que, soit je joue la comédie, soit je suis un malade mental. De tels propos sont regrettables, sans aucun fondement et gravement insultants. Ils tombent en outre sous le coup de la loi pénale, au titre de calomnie, diffamation et injures, notamment par voie de presse. Mais je ne déposerai pas plainte, car je mets vos propos sur le compte de l’étourderie et de l’inadéquation. 3. Vous écrivez par ailleurs: « … ceux qui votent pour son nationalisme douteux (celui de Bart De Wever) sont les mêmes personnes (« les SA en marche et les bataillons bruns »). D’accord, il ne s’agit plus d’eux, mais de leurs fils et de leurs filles. Sont-ils très différents ? Non, car ils n’ont pas accompli la rupture indispensable (…). Et il ne faut pas al-

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polémiques ➜

La mémoire rétive Mateo Alaluf

ler les chercher bien loin : ils sont présents à tous les coins de rue, à toutes les terrasses. D’Anvers à Alost, de Gand à Maaseik, de Bruges à Ostende ». Il ne faut pas oublier les résistants flamands : beaucoup sont morts en camp de concentration. Lors de ma fuite du 19 avril 1943, je suis tombé sur un gendarme du Limbourg qui a risqué sa vie pour me sauver : si les nazis avaient su qu’un gendarme belge avait protégé un enfant juif évadé, ils l’auraient fusillé ; son frère a été fusillé comme partisan armé à Breendonk le 26 avril 1944. Au Limbourg par exemple, il y avait durant l’occupation une véritable guerre civile entre VNV et résistants. Il y a autant de démocrates en Flandre qu’en Wallonie. Il y a cependant des néo-nazis, des négationnistes, en Flandre, en Wallonie, en France (le Front national), en Grèce (Aube dorée), etc… et vous avez raison de dire qu’il faut rester vigilant. C’est le but de Koen et le mien et de notre livre Ni victime, ni coupable, enfin libérés , vrai plaidoyer pour la démocratie, la paix, la tolérance, l’amitié entre les hommes, le respect mutuel, en un mot pour l’humanité. Je suis sûr que vous partagez ces valeurs et ce combat. ■ Bien cordialement à vous, Simon Gronowski

N

i victime ni coupable. Enfin libérés est un livre à 3 voix qui ne ressemble à aucun autre. Il est écrit par Simon Gronowski, mis en dessins par Koenraad Tinel et en perspective par David Van Reybrouck. Il raconte, avec les mots de l’un et les dessins de l’autre, deux histoires singulières : celle d’un en-

fant juif échappé du 20è convoi en route pour Auschwitz où disparaîtront sa mère et sa sœur et celle d’un enfant flamand, Koenraad Tinel, dont le père était un inconditionnel de Hitler et dont les deux frères avaient porté l’uni-

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forme des SS. Ce livre, issu de la rencontre improbable de Simon, à présent avocat âgé de 81 ans et de Koenraad, artiste peintre et sculpteur de 79 ans, est à mettre d’urgence dans toutes les mains. Non pas comme un devoir, le livre veut d’ailleurs nous libérer du « devoir » de mémoire, mais d’un droit de mémoire qui est aussi un bonheur de lecture. L’amitié naissante de cette rencontre apprendra à Koenraad Tinel à ne pas porter la culpabilité de ses parents et permettra à Simon Gronowski d’honorer ses proches et toutes les victimes de la barbarie sans se parer pour autant d’une posture victimaire. « Je n’ai pas besoin d’une cérémonie pour penser à mes parents et ma sœur, écrit-il, j’y pense tous les jours ». Simon Gronowski était sorti de son silence pour combattre le négationnisme. Il avait écrit en 2002 l’histoire de son évasion dans L’enfant du 20è convoi et maintenant il raconte sa rencontre avec Koenraad Tinel. «  Les négationnistes sont des gens dangereux : écrit Gronowski, ils nient les crimes d’hier pour en commettre d’autres demain ». Il rappelle cependant que si tous les Juifs étaient victimes des nazis, toutes les victimes n’étaient pas juives. Il y a eu aussi, préciset-il, d’autres génocides dans l’histoire. Élu en 2005 président de l’Union des déportés juifs de Bel-

gique, il avait invité un rescapé du génocide des Tutsis à prendre la parole lors de la Journée du Martyre Juif à la caserne Dossin, malgré de nombreuses réticences. Il ne put cependant rééditer l’année suivante pareille invitation adressée cette fois à un représentant arménien. «  Il faut se recueillir entre nous, lui avait-on objecté, la caserne Dossin est notre symbole, il ne faut pas banaliser la Shoah, la mêler à d’autres génocides ». Simon Gronowski démissionna alors de sa présidence. La mémoire, réduite au devoir, enferme ceux qui s’en réclament et leur fait tourner le dos à l’avenir. La posture victimaire revendiquée ne se prête guère à l’échange avec les autres. Les souffrances du passé entrent alors en compétition avec celles d’aujourd’hui. D’autant plus que, pour les générations suivantes – « victimes indirectes » selon les mots d’Emmanuel Terray1 – le devoir de mémoire consiste dans bien des cas, «  à s’abriter derrière les morts pour présenter leur propre cas ». « Les enfants et petits enfants des nazis ne sont pas responsables  » écrit Gronowski. Les abus de mémoire en font un culte qui détourne ses tenants des combats du présent. Le livre à trois voix que nous présente Simon Gronowski, tout comme ses adaptations télévisées à la VRT Canvas et à ARTE-RTBF (Quai des Belges), est le produit d’une mémoire rétive qui interdit toute instrumentalisation de la Shoah. Les clientèles mémorielles de tous bords n’y trouveront sans doute pas leur compte. Pour les autres, ce sera un véritable bonheur de lecture. Chez Simon Gronowski «  le pardon n’efface pas le crime » et pardonner ne revient pas à oublier. Sa victoire ne consiste pas

à exhiber sa douleur, mais réside dans son attention et sa sensibilité à celle des autres. « Son histoire a beau être spectaculaire, dit de lui David Van Reybrouck, Simon n’en fait pas un spectacle », tout comme « il se refuse à cultiver le statut de victime ». À propos de son père qui, après avoir fui la Pologne, avait finalement atteint clandestinement la Belgique et se rappelant à son

de son appartenance communautaire qu’elle peut mettre en garde contre les situations présentes, semblables à celles qu’elle a subies ? C’est « en quittant le particulier pour rejoindre l’universel » que Gronowski combat l’antisémitisme dont il a été victime. Cette rencontre nous fait découvrir, comme l’explique Gronowski que « c’est en vivant pleinement que l’on honore les morts ». Ce

tour son séjour à la caserne Dossin, Simon Gronowski évoque le sort des sans papiers et leur enfermement en centre fermé. Plus tard, lors de sa visite du camp d’Auschwitz-Birkenau en mai 2012 en compagnie de Koenraad Tinel, Simon Gronowski s’interroge à propos de groupes défilant avec des drapeaux israéliens. À quel titre ceux-ci peuvent-ils se prévaloir des victimes ? Il pose en conséquence la question de l’instrumentalisation de la Shoah et suggère l’interdiction de tous les drapeaux nationaux sur ce lieu. « Ce que Simon a de plus remarquable, écrit encore Van Reybrouck, c’est qu’il n’a rien d’exceptionnel » (p.106). Mais n’est-ce pas précisément lorsque la victime peut s’élever au dessus

récit passionnant s’offre à nous dans un beau livre irrécupérable. Il faut se dépêcher pour le lire. PS : Je souhaite exprimer mon indignation par rapport à l’article injurieux à l’égard de Simon Gronowski et méprisant envers Sacha Rangoni qui a rendu possible la rencontre entre Simon Gronowski et Koenraad Tinel, publié dans la livraison précédente de Points Critiques. ■ Emmanuel Terray, Face aux abus de mémoire, Actes Sud, Paris, 2006, p.16.

1

Simon Gronowski, Koenraad Tinel et David Van Reybrouck, Ni victime ni coupable. Enfin libérés, Renaissance du livre.

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polémiques ➜

Solidarity with Bedouins

Réponse à Sender Wajnberg Thérèse Liebmann

Q

uel ne fut pas mon étonnement de lire sous la plume de notre ami Sender Wajnberg (Points Critiques, mai 2013) qu’il y avait non seulement « Collusion d’idéologies » entre « l’écologie et la Palestine », mais qu’en outre cette collusion d’idéologies était confirmée par « l’existence de l‘association «  ViaVelo Palestina »… qui fournit le kit complet, les deux en un pour le prix d’une ! ». Or cette formule, qui se veut humoristique, est loin de traduire la réalité. En effet, même si des écologistes et des groen ! participent régulièrement à ces randonnées vélocipédiques, on y trouve aussi des socialistes, des démocrates chrétiens, des  Femmes en Noir » et des sans-parti. Et il n’est pas du tout prouvé que parmi eux se glissent des «  âmes promptes à faire la morale à Israël …souvent proches d’un antisémitisme new look qui trouve parfois le moyen de taper sur les Juifs par le truchement d’Israël », comme le suggère Sender. Par ailleurs, en écrivant « Ces compagnons de roues ne militent à vélo pour AUCUNE des autres causes qui nous sont chères… Avons-nous entendu parler de « ViaVelo Centres fermés… », Sender a-t-il oublié le succès qu’a remporté une telle randonnée – qui ne portait pas le nom de ViaVélo - vers le Centre 127bis, à laquelle ont participé des députés

bruxellois de plusieurs tendances, lait la plus visible et ostensible sauf évidemment de l’extrême possible dans le but de sensibiliser un large public en ce 1er mai, droite ? Quant à la droite nationaliste qui se veut – ne l’oublions pas flamande, elle avait déjà instau- – une journée de solidarité. Et, ré, depuis 1981, son fameux Gor- pourquoi pas, avec le peuple padel (ceinture) autour de Bruxelles lestinien ? qui parvient à mobiliser plus de Enfin, à quoi correspond ce be100.000 cyclistes. Je doute fort soin, chez Sender Wajnberg, de qu’on puisse rencontrer parmi eux de nombreux écologistes ou des défenseurs de la Palestine. Revenons-en au titre de l’article de Sender et à la « Collusion d’idéologies ». S’il est vrai que l’écologie ViaVelo Palestina. 1er mai 2013 peut être considérée comme une idéologie, on chercher à ridiculiser ces militants ne peut en dire autant de la Pa- portant « des gilets fluos avec des lestine, qui est bel et bien « une casques à la con », alors qu’ils miterre avec un peuple ». litent pour une cause juste – que Quant au terme collusion, il dé- ce soit à vélo ou autrement – et signe, selon le Petit Robert, une qu’ils soutiennent le même comentente secrète au préjudice d’un bat que les pacifistes israéliens tiers. qui se mobilisent pour une paix On peut évidemment considé- juste entre Israéliens et Palestirer que l’action de ViaVelo Pales- niens. tina est dirigée contre le gouverQuant aux Juifs qui, en Belnement israélien et sa politique gique, participent à ce combat, ils d‘occupation, mais on ne peut en contribuent, en outre, à démonaucun cas y voir une « entente se- ter l’amalgame, trop fréquemment crète  » avec quiconque, puisque exploité, entre antisionisme et anla randonnée cycliste à travers tisémitisme. ■ Bruxelles et ses environs se vou-

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Marco abramowicz Randonnée vélo, marche et chorale pour relier des villages bédouins non-reconnus du Néguev-Naqab en Israël à Pâques 2013 du 1er au 7 avril. En collaboration avec le Negev Coexistence Forum, organisation judéo-arabe à Beersheva. Et oui, nous l’avons parcouru ce Néguev – Naqab, en vélo et à pied (17 cyclistes et 10 marcheurs). Du moins, nous avons rejoint, relié, reconnu 10 de ces 35 villages bédouins non-reconnus par l’État d’Israël. Nous les avons trouvés alors qu’ils n’existent sur une aucune carte officielle ou touristique. Privés de routes, de réseaux électriques, de conduites d’eau, d’écoulement des eaux usées, les Bédouins s’accrochent à leurs terres ancestrales avec l’énergie d’un désespoir empreint d’indignation, de colère mais surtout de courage, de détermination et d’une ingéniosité époustouflante. Parmi les chants que nous entamions lors de nos différentes rencontres avec ces citoyens israéliens de seconde, si pas de troisième catégorie (ils sont plus mal traités que les Palestiniens arabes, également citoyens israéliens), résonne encore en nous le refrain de l’un d’eux : «  …No, no we shall not be moved (bis) – this is our land – this is Bedouinland – We shall not be moved –… ». Quelle émotion ! Quelle empathie, de part et d’autre ! Ce trip, que nous voulions avant tout informatif et dénonciateur de la froide détermination des autorités israéliennes, secondées comme pour toute spoliation de terres palestiniennes par le Fond national juif, a pris cette allure de randonnée pédestre et cycliste, tant pour favoriser le recrutement de «  courageux  » randonneurs et cyclistes belges s’engageant à

agir en tant que témoins actifs à leur retour en Belgique, que pour espérer un engouement et une participation de la part des Bédouins et de leurs responsables dans chaque village. Grâce à cette conjonction, nous pouvions espérer plus de publicité et pourquoi pas une couverture médiatique, en Israël et chez nous. Et bien, et ce n’est qu’un début (pas courant), Colette Braeckman, la spécialiste connue de l’Afrique au journal Le Soir, en payant de sa personne, a pédalé crânement sur son VTT tout au long des 25 à 30 km quotidiens par 30° C et a pu, en tant qu’envoyée spéciale couvrir notre mission et publier dans Le Soir du 27 et 28 avril la moitié de son reportage (voir l’entièreté sur son blog : Le carnet de Colette Braeckman). Pour les lecteurs, il est sans doute important de savoir, même brièvement, comment notre groupe PJPO a été amené à s’intéresser, puis à faire cause commune pour l’arrêt des destructions des villages bédouins non-reconnus en Israël par Israël. Il faut remonter à juillet 2010 : sous les auspices du Conseil consultatif de la Solidarité internationale de la commune, PJPO s’est intéressé à cette problématique, puis a organisé une mission de reconnaissance, et…. pour une information plus complète sur ce voyage initiatique, voir l’excellent film reportage de Patrick Monjoie « Les petites rivières font… ». À la fin de celle-ci, nous avons « visité »

une maison du village d’Al Araqib, plutôt les ruines d’une maison qui venait d’être abattue ! Alors que depuis 2002, nous sommes « familiers » des destructions de maisons palestiniennes par l’armée israélienne en Cisjordanie et/ ou à Gaza, quel choc dans cette confrontation au désespoir d’habitants bédouins israéliens devant leur maison démolie en Israël ! Ce village a depuis été détruit plus de 40 fois ; ses habitants déplacés de fait dans le  « township » de Rahat. À partir de ce douloureux constat, notre soutien sur le plan culturel se borne à chanter pour les Bédouins lors de manifestations auxquelles nous avons participé, par contre notre action devenue politique est marquée principalement par l’information mais aussi par le soutien financier aux formations de Bédouins à la résistance non-violente, aux missions témoignages. Notre espoir : voir nos autorités politiques, communales, régionales, nationales et certainement européennes sortir de leur apathie et oser enfin s’opposer à la puissance immorale d’Israël. En tant que citoyen (informé ?) partisan d’une paix juste au ProcheOrient vous pouvez aussi contribuer à cette cause en versant un soutien financier au compte : PJPO Ittre, 001 – 4355930 – 27, mention : Solidarité Bédouins 2013. ■

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activités

samedi 22 juin de 20h à 23h

dimanche 2 juin à 16h

Deux fois le même fleuve un film de Effi Weiss et Amir Borenstein (108’ - 2013 - sous titré en français) Projection en présence des réalisateurs Non seulement un portrait inhabituel d’Israël, mais aussi un autoportrait surprenant d’un couple à la vie comme à l’écran. Lire l’article de Gérard Preszow «  À contrecourant » dans notre numéro de mai, page 7 PAF : 6 €, 4 € pour les membres, tarif réduit : 2 €

vendredi 14 juin à 20h15

Conférence débat avec Enzo Traverso Auteur de « La fin de la modernité juive. Histoire d’un tournant conservateur »

Claude Semal en duo avec Frank Wuyts Petite restauration sur place à partir de 19h. A l’occasion de la sortie de son 10 ème album «  Les bals, les BBQ et les crématoriums  », produit par Igloo Records, Claude Semal présente 14 nouvelles chansons accompagné par Frank Wuyts aux claviers. En une cinquantaine de concerts, Claude et Frank ont développé une belle complicité contagieuse… P e r s o n n a l i t é incontournable de la scène francophone belge, Claude Semal navigue depuis une trentaine d’années entre la chanson et le théâtre et s’est fait aussi bien connaître comme auteur, humoriste, comédien et chroniqueur que comme interprète sensible et engagé d’une certaine « belgitude ». Dans ses chansons, les colifichets de l’humour et de la poésie se mêlent toujours à une forte trame sociale, et  « mélancomique » est un néologisme qui semble avoir été inventé pour lui.

L’auteur, professeur à Cornell University (USA), présentera son dernier livre qui apparaît, 20 ans après, comme le prolongement de son essai antérieur : Les juifs et l’Allemagne, de la symbiose judéo-allemande à la mémoire d’Auschwitz.

Claude vient de recevoir, en France, le prix « Jacques Douai 2012 », attribué par vingt-cinq professionnels du spectacle (dont Anne Sylvestre, Moustaki et Jacques Bertin).

Ainsi actualisée, l’analyse propose une lecture des tendances récentes de la « pensée juive » à passer d’une tradition critique à un discours conservateur fondé sur un axe politique IsraëlUSA.

Il sera accompagné ce soir aux claviers par Frank Wuyts, qui est aussi l’arrangeur de l’album et le compositeur de certains titres. Fondateur du groupe Musique Flexible (avec le regretté violoncelliste Denis Van Hecke), pionnier du rock belge (Pazop, Akzak Maboul, Wallace Collection,...), Frank Wuyts est un musicien créatif, ludique et passionné. Un vrai amateur de chansons, aussi, qui connaît les chansons de Nougaro par coeur et a tourné trois ans avec Jacques Higelin à la belle époque de « Caviar » et « Champagne ». En Belgique, il joue régulièrement avec Claude Semal et Christiane Stefanski.

Présentation : Jacques Aron PAF : 6 €, 4 € pour les membres, tarif réduit : 2 € €

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Entrée : 10 €, membres 6€€, étudiants et sans emploi : 2 €

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annonces Samedi 1er Juin à 11h

Nox Une création théâtrale de l’Anneau pour les spectateurs grands et petits à partir de 4 ans mise en scne par Ariane

Buhbinder

Ce soir-là, tu n’as qu’une seule envie : aller au lit et dormir ! Mais rien à faire, ça ne marche pas ! Tu as pourtant bien ôté tes pantoufles. Tu t’es couché. Tu as éteint la lumière. Mais la voilà qui se rallume et toi, tu n’es pas dans ton lit comme tu le pensais, mais debout, les pantoufles aux pieds. Tu replaces bien ta couette mais elle n’en fait qu’à sa tête. Le lustre se met à clignoter et plus moyen de l’arrêter. Quant au radio réveil, il s’enclenche sans être branché. Même ton ombre se met à bouger alors que toi, tu n’as pas levé le petit doigt ! Tu crois que c’est un cauchemar, mais non, tu ne dors pas ! Alors, qui est là ? Mise en scène Ariane BUHBINDER Scénographie Matteo SEGERS et Isabelle KENNES Charlotte MAREMBERG Composition musicale Ludovic ROMAIN Images vidéo Sébastien FERNANDEZ Perruques & maquillage Zaza DA FONSECA Régie générale Benoît LAVALARD Christophe VAN HOVE Interprétation R-Gaël MALEUX Bertrand KAHN Avec le soutien de La Roseraie et du Théâtre La montagne magique. Mille merci pour leur aide précieuse à Emma, Hadi et Christine, au Zététique Théâtre, au Théâtre du Papyrus ainsi qu’à Guy Carbonelle. Un spectacle sans paroles où images et gestuelle se conjuguent avec une malicieuse tendresse pour évoquer ce moment si délicat du coucher. Lorsque le jour fait place à la nuit et que petit ou grand, on se retrouve seul, face à soi-même et somme toute, bien vulnérable. Dans ce moment, il peut parfois en effet, survenir des phénomènes étranges… Le spectacle se construit comme une traversée onirique où se succèdent illusions et surprises, déjouant le réel et la perception qu’on peut avoir de Soi. Poésie étrange d’un univers, où le corps se dérobe, se démultiplie, où les objets s’inventent une vie. Fantaisie visuelle révélatrice de nos petites et grandes peurs, mettant à nu lesstratagèmes absurdes qu’on invente parfois pour les amadouer !

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Membres et amis de l’UPJB Bloquez déjà dans votre agenda la date du samedi 21 septembre 2013 : soirée cabaret. Pour l’organisation de ce cabaret lors de la soirée de rentrée de l’UPJB, nous recherchons des talents divers et de tous âges, issus de la maison UJJP/UPJB, pour se produire chacun durant une dizaine de minutes : - chanteurs (euses); - musiciens (iennes); - slameurs (euses); - comédiens (iennes); - clowns; - mimes; - magiciens (iennes); - ... Merci de contacter l’UPJB (upjb2@skynet.be) ou arianebratz@ yahoo.co, dans les délais les plus brefs, pour la bonne organisation de la soirée. L’équipe de l’événement

Une Allée Sarah et Jacques Goldberg Le Conseil communal de Woluwé-Saint-Lambert a décidé d’attribuer le nom de Sarah et Jacques Goldberg à l’allée joignant l’avenue de Toutes les Couleurs à la rue Voot. Par cette décision, la commune souhaite rendre hommage et transmettre aux générations futures le souvenir d’une importante figure de la résistance belge à l’occupation nazie et à son époux, Jacques Goldberg. En juin 2013 il y aura 10 ans que Sarah Goldberg est décédée. L’inauguration de l’Allée Sarah et Jacques Goldberg aura lieu le vendredi 7 juin à 19h.

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Carte de visite

UPJB Jeunes Cap sur le camp d’été

À Sacha et Kevin La grande famille de l’« Entr’Act » partage la peine de Sacha et de Kevin (« Grizzli Hors-la-loi »), deux amis de longue date du mouvement de jeunesse de l’UPJB, suite au décès, aussi tragique que soudain, de leur papa, Daniel De Keijser. Nous avons également une pensée chaleureuse pour leur maman, Nadine.

Julie Demarez

L

’été qui pointe son nez, les examens qui se préparent, l’odeur des vacances qui se fait sentir, ... ça y est nous sommes presque au camp d’été. Cette année, nous prendrons la direction de l’est de la France. C’est non loin de Besançon que l’UPJBJeunes fera escale pendant 2 semaines. Du 1er au 14 juillet l’équipe de moniteurs tentera une fois de plus de faire de ce camp un moment d’échanges, de découvertes, d’émotions et de créativité. Pour la plupart d’entre eux, il s’agira de leur derniers moments de monitorat, alors, soyons prêts, cela risque d’être incroyable !

Freedom Theatre L’UPJB-Jeunes a participé à la représentation de la pièce de théâtre Stolen Dream du Freedom Théâtre lors de sonr passage à Bruxelles. En hommage à Juliano Mer-Khamis, militant juif palestinien, armé de culture et d’art, visant à lutter contre la violence d’un État, cette pièce parle de la situation des Palestiniens en Cisjordanie. Tous ont des rêves, de très simples rêves, comme par exemple aller voir la mer. L’occupation empêche ces rêves de se réaliser. La pièce reflète la souffrance des prisonniers palestiniens, le dialogue entre la violence et la culture, et les mains cachées qui ont tué le symbole de la culture : Juliano Mer Khamis – co-fondateur du Freedom Theatre.

la Maison familiale rurale, lieu du camp d’été.

Soirée UPJB-Jeunes Pour la dernière réunion de l’année, nous avons convié parents et enfants, à la toute première soirée-repas. L’objectif était de rassembler tous les parents afin qu’ils puissent faire
plus ample connaissance mais aussi de rencontrer les
 moniteurs dans un cadre plus convivial qu’en fin de réunion. Si nous avons pour habitude de nous croiser, de papoter et d’échanger quelques mots sur le pas de la porte du 61, avant que les réunions ne commencent, nous nous sommes dit que ce serait sympa de pouvoir prolonger la discussion le temps d’une soirée. Chose faite ! Pour sa première édition, nous avons pu profiter d’une soirée agrémentée d’animations upjibiennes, de bonne tajines, et de chaleureux échanges où se sont retrouvés les parents, les anciens, les enfants, les monos et

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les amis de notre mouvement de jeunes.

En attendant d’autres lendemains qui chanteront à nouveau sous le soleil, nous leur témoignons toute l’affection et le soutien nécessaire dans cette épreuve. Avec beaucoup d’amour, L’Entr’Act

À vos agendas Pour sa journée de clôture, l’UPJB-Jeunes vous convie le samedi 22 juin à la journée sportive. Nous attendons tous les membres et amis, les anciens et les nouveaux, des plus jeunes aux plus âgés, les enfants de notre organisation de jeunesse et leurs parents au Parc Schaveys à partir de 12h. Au programme, pique-nique, farniente et jeux, dont les incontournables parties de crix et de grens  ! Échauffez-vous, entraînez-vous, on vous y attend de pied ferme ! ■

L’UPJB Jeunes est le mouvement de jeunesse de l’Union des progressistes juifs de Belgique. Elle organise des activités pour tous les enfants de 6 à 15 ans dans une perspective juive laïque, de gauche et diasporiste. Attachée aux valeurs de l’organisation mère, l’UPJB jeunes veille à transmettre les valeurs de solidarité, d’ouverture à l’autre, de justice sociale et de liberté, d’engagement politique et de responsabilité individuelle et collective. Chaque samedi, l’UPJB Jeunes accueille vos enfants au 61 rue de la Victoire, 1060 Bruxelles (Saint-Gilles) de 14h30 à 18h. En fonction de leur âge, ils sont répartis entre cinq groupes différents.

Bienvenus

Les pour les enfants nés en 2006 Moniteurs : Léa : 0487.69.36.11

Juliano Mer-Khamis

Les 2005 Moniteurs : Milena : 0478.11.07.61 Selim : 0496.24.56.37 Axel : 0471.65.12.90

pour les enfants nés en 2004 et

Marek Edelman

Les pour les enfants nés en 2002 et 2003 Moniteurs : Sacha : 0477.83.96.89 Lucie : 0487.15.71.07 Tara-Mitchell : 0487.42.41.74 Youri : 0474.49.54.31

Janus Korczak

Amis lecteurs Ce numéro de Points critiques est le dernier de la saison 2012-2013.

Les pour les enfants nés en 2000 et 2001 Moniteurs : Charline : 0474.30.27.32 Clara : 0479.60.50.27 Jeyhan : 0488.49.71.37

Émile Zola

Le prochain sera daté de septembre.

Les pour les enfants nés en 1998 et 1999 Moniteurs : Sarah : 0471.71.97.16 Fanny : 0474/63.76.73

En attendant de vous retrouver, le Comité de rédaction vous souhaite des vacances aussi insouciantes que possible.

Les pour les enfants nés en 1996 et 1997 Moniteurs : Maroussia : 0496.38.12.03 Totti : 0474.64.32.74 Manjit : 0485.04.00.58

Yvonne Jospa

Informations et inscriptions : Julie Demarez – upjbjeunes@yahoo.fr – 0485.16.55.42

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le point qui pique Duo vers le blanc du haut vert le chant dialogue à vingt doigts Alpaga & tanuki

Exil

– ami, vagabond et curieux curieux vagabond voulant me rafraîchir à ta bibliothèque j’ai franchi le seuil de cette chambre que tu as si longtemps refusée tienne ma main s’est mise à chercher dans tes carnets de thé de contes de poésie et un livre fébrile aux pages presque libres m’a émue il voyagea un peu avant de revenir fétiche dans ta besace homme approximatif, femme approximative, entends sonner les cloches et résonner en elle le bruit des chaînes si je dis aujourd’hui que nos nerfs sont des fouets entre les mains du temps c’est grâce à toi, ami– c’est toi qui me l’a dit te l’ai dit par courriel le POC a besoin d’air l’air de rien y poser

quelques lignes à nager à fendre à inhaler glisser par la fissure je pense poésie je pense poésie quelques filets de vents sur nos nerfs mutilés quelque chose vers le chant en wagon découvert par ficelles lumières gouttes d’eaux sur mémoires sur paniques du jour malles de deguisements sur ruines costumées mais quelle direction qui fuirait sens ici même question sûr pour qui veut se joindre au POC et chatouiller lecteur en famille sans famille faut-il politique ou de l’action de la brique l’entracte joue ici un poème de qui t´enivres de Tzara tu bois du Guillevic va pour Tristan volcan ses flammes en dents qui démantèlent ancres molles sans trompette j’entends paravents non plus pas tu le decouvres en-

fin depuis le temps que tu que je t’en parle du poète né Rosenstock ça n’a pas d’importance pour moi pas non plus pas mais certains aiment je sais savoir leurre et date tout du décor du crime le pays Roumanie et Dada pas seulement tu m’as dit quoi piocher et comment t’y corrompre j’aimerais en dire plus quelques recherches pour en quoi faire de plus il y a wikipedia tu as choisi l’Exil qui me souffle Pessah je n’en sais rien de rien tu carbures au mot rien ça y est je me répète laisse alors le poète est-ce l’air qu’on voulait une ruelle ailée foudre où boivent les loups ah venir à venir signe de vie ici qu’à gorgées de Lueur tout est à voir encore paroles comme sabres décollent de l’œuf l’œil là-

Une lueur pour la route ouverte pour un repos d’un sou pour une parole d’eau comme pour un matin de rire pour que le mur se dresse contre le cri du monde que le vin absurde aboie dans la tête et chasse les merveilles dont il n’a que faire sous le tas de paroles où les feuilles se mêlent pour l’amour du diable pour l’abeille ronde pour un seul espoir le désert aux lèvres et la mer à boire il secoue l’arbre le sommeil de sable

la route a mis à nu la cendre des misères et les jours que j’ai vus et les mots passés et le soleil et moi frileux dans l’inconsistance la peine la plus pressée l’amour le plus obscur je suis au bord du monde racine qui s’égare l’angoisse a dépassé le terme du voyage dans la solitude des villes nous ceux à la mort apparentés par les fils visibles et invisibles de la mémoire nous ouvrons sans crainte des écluses en nous-mêmes et remontons absents le sens écœuré des grands pâturages abandons c’est dans le majestueux silence de vos paillasses que j’ai appris le langage du sang fraternel la sourde indifférence à jamais closes les portes désirées et les moindres lueurs où s’accrochaient dans les branches la croyance en sa propre vie à peine vivante aux limites du chemin que la pudeur retrouve sa paille maternelle aux tristesses sans nom écorchées à vif les arbres et les feuilles suffisent à la tendresse aucun mot n’est assez pur dans la lumière pour couper le diamant de leur beauté autour de nous Tristan Tzara, Le signe de vie

Dessins de Geko

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est le mensuel de l’Union des progressistes juifs de Belgique (ne paraît pas en juillet et en août)

Les activités du club Sholem Aleichem

L’UPJB est soutenue par la Communauté française (Service de l’éducation permanente)

jacques schiffmann

16 avril: Zoé Blusztejn, ancienne de Solidarité Juive, nous a parlé de son parcours et de son engagement militant au Parti Communiste. Cette rencontre a été un moment de plaisir partagé, entre « Zouzou », ancienne monitrice puis directrice des colonies de la Sol, et maints de ses colons, aujourd’hui septuagénaires! Zoé est née en 32, et à plus de 80 ans, est restée toujours aussi volontaire, optimiste, et militante active, fidèle à son idéal de jeunesse, de gauche. Ses parents venus de Pologne en 1929, militent contre la montée du fascisme à l’organisation juive, l’Unité. En 1940, la guerre éclate et pour Zouzou, 8 ans, débute une enfance bouleversée. En 42, début des rafles, et l’étoile jaune qu’elle portera moins d’un jour. Les familles juives doivent se cacher. Zoé passera de couvent en maison particulière : Ottignies, Jolimont, Morlanwelz, où en 43 elle sera baptisée, par sécurité. Les conditions de vie sont dures et en 44, âgée de 12 ans, elle fuguera et réussira à rejoindre sa mère, cachée elle aussi. Parce que résistants, ses parents seront arrêtés en 44 sur dénonciation et amenés à la Gestapo. Interrogé en présence du « traître Jacques », le père nie et sera envoyé à Malines, puis déporté à Auschwitz. Sa mère malade, sera sauvée par un médecin allemand. Les parents de ses cousines Francine et Jenny, que sa mère adoptera après guerre, seront aussi déportés. C’est à Wezembeek que sa mère viendra la recher-

Secrétariat et rédaction : rue de la Victoire 61 B-1060 Bruxelles tél + 32 2 537 82 45 fax + 32 2 534 66 96 courriel upjb2@skynet.be www.upjb.be

cher, chez les religieuses, à la libération. En 1945, Solidarité Juive, proche du Parti communiste, est crée, pour venir en aide aux rescapés. Sa mère y travaillera. Zoé, très malade, finira par guérir et retourne à l’école. Elle adhèrera à la fois aux pionniers et à l’USJJ, à la section Henri. En 48, à 16 ans, aînée de 4 enfants, elle commence à travailler et déjà, à militer. Arrêtée lors d’une manifestation antifasciste, elle passera une nuit en prison. Jusqu’en 55, elle participe à la grande époque de ferveur communiste avec les festivals de la jeunesse, à Berlin, Bucarest, Varsovie : elle adhère au PC, vend le DR, colle des affiches. Elle se marie en 56, ses 2 fils naissent. Grèves de 1961, son mari Vassia est sans travail, Zouzou doit se débrouiller avec les enfants encore très petits, le travail, et l’activité au Parti, dont elle ne peut se passer. En 1963, Maggy la recrutera à Solidarité Juive, où elle travaillera dix ans comme monitrice puis directrice de colonie et comme secrétaire. De 65 à 73 la famille part vivre à la campagne : période difficile et mouvementée, prise en charge de sa mère malade, séparation d’avec son mari. Engagée au PC à Bruxelles en 1973, elle y travaillera jusqu’à la pension. Vivant à La Louvière, elle « sera dans l’action, en milieu ouvrier », connaîtra les occupations d’usine et fera beaucoup de rencontres marquantes. Elle sera membre du comité Central du PC de 1980 à 2000 et plusieurs fois candidate aux élections locales sur la liste du PC.

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voile, marquage social importé d’Iran. On assiste partout à la régression du lien social, à la dégradation du rapport hommes-femmes, et à la recrudescence du racisme. Face à ce dur constat, Jamila affirme avec force, et se bat pour promouvoir les principes d’égalité, de laïcité et de mixité, de neutralité de l’école où les enfants doivent apprendre à se connaître, dans le respect de la spécificité de chacun et la réciprocité. Pour elle, seul ce socle de valeurs démocratiques, inscrit dans le Droit, permettra de renforcer le lien social et d’améliorer le vivre ensemble.

Fatiguée et très malade, Zouzou continue pourtant à militer en transmettant son expérience aux jeunes, fait des formations et anime des ateliers pour jeunes dans les quartiers à problèmes. On ne peut qu’admirer ce parcours, et cette fidélité à son idéal de jeunesse, qui lui a été transmis par ses parents. 25 avril: «  Féminisme, égalité, mixité et laïcité » par Jamila Si M’Hammed, psychiatre et présidente du comité belge de « Ni putes ni soumises » (NPNS) C’est à un vaste état des lieux que nous convie Jamila, militante engagée aux côtés des associations laïques et démocratiques, pour effacer dans le domaine du droit toutes les inégalités, et favoriser le vivre ensemble. NPNS mène, par des actions multiples, ce combat pour l’égalité des hommes et des femmes, en dehors de toute distinction religieuse, philosophique ou ethnique, et prône un socle de valeurs communes et non les particularismes. Ce sera d’abord le plan « Brisons le silence » qui dénonce les sources des violences, dues aux rapports de domination, tant dans la société que dans la sphère privée. Ensuite le «  Guide du Respect » qui dénonce les violences, le machisme et les traditions patriarcales qui enferment : diffusé dans les écoles avec le « Kit du Respect », il fait du respect le fil rouge du vivre-ensemble et l’antidote aux violences et inégalités de toute nature, par le changement des

des comportements. En ce qui concerne les Belges d’autres cultures et les femmes d’origine maghrébine, l’expérience acquise par Jamila au sein de la « clinique de l’exil  » qu’elle a ouvert à St-Pierre en 2002, l’amène à un constat préoccupant pour le sort des femmes : recrudescence des mariages arrangés (forcés), des certificats de virginité, des réfections d’hymens, des excisions même, de la polygamie. En parallèle, l’immixtion du religieux, le mouvement islamiste qui investit les quartiers de mal-vie, embrigade les jeunes et aggrave la situation des femmes et des filles à qui on impose le

2 mai : « Tu ne tueras pas, tu aimeras ton prochain comme toi-même. Patrimoine moral judéo-chrétien, ou traductions infidèles ou anachroniques ou paradoxales » par Vladimir Grigorieff. Le compte-rendu de cette conférence paraîtra dans le numéro de septembre prochain. ■

Comité de rédaction : Henri Wajnblum (rédacteur en chef), Alain Mihály (secrétaire de rédaction), Anne Gielczyk, Carine Bratzlavsky, Jacques Aron, Willy Estersohn, Tessa Parzenczewski Ont également collaboré à ce numéro : Marco Abramowicz, Mateo Alaluf, Alpaga et Tanuki, Roland Baumann, Julie Demarez, Simon Gronowski, Thérèse Liebmann, Antonio Mayano, Gérard Preszow, Jacques Schiffmann Conception de la maquette Henri Goldman Seuls les éditoriaux engagent l’UPJB. Compte UPJB IBAN BE92 0000 7435 2823 BIC BPOTBEB1 Abonnement annuel 18 € ou par ordre permanent mensuel de 2 € Prix au numéro 2 € Abonnement de soutien 30 € ou par ordre permanent mensuel de 3 € Abonnement annuel à l’étranger par virement de 40 € Devenir membre de l’UPJB Les membres de l’UPJB reçoivent automatiquement le mensuel. Pour s’affilier: établir un ordre permanent à l’ordre de l’UPJB. Montant minimal mensuel: 10 € pour un isolé, 15 € pour un couple. Ces montants sont réduits de moitié pour les personnes disposant de bas revenus.

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agenda UPJB

Sauf indication contraire, toutes les activités annoncées se déroulent au local de l’UPJB, 61 rue de la Victoire à 1060 Bruxelles (Saint-Gilles)

dimanche 2 juin à 16h

Deux fois le même fleuve - un film de Effi Weiss et Amir Borenstein en présrnce des réalisateurs (voir page 26)

vendredi 14 juin à 20h15

Conférence débat avec Enzo Traverso autour de son livre Fin de la modernité juive. Histoire d’un tournant conservateur (voir page 26)

samedi 22 juin de 20 à 23h

Claude Semal en duo avec Frank Wuyts (voir page 27)

club Sholem Aleichem Sauf indication contraire, les activités du club Sholem Aleichem se déroulent au local de l’UPJB tous les jeudi à 15h (Ouverture des portes à 14h30)

jeudi 6 juin

Marc Henri Wajnberg, réalisateur du film Kinshasa Kids, évoquera la genèse de son œuvre et les conditions de tournage

jeudi 13 juin Éditeur responsable : Henri Wajnblum / rue de la victoire 61 / B-1060 Bruxelles

Les changements climatiques sont-ils une réalité ? - que va-t-il se passer ? - qu’est-ce qui permet de dire que les activités humaines perturbent le climat actuel  ? - qel sont les scénarios ? Edwin Zaccaï : professeur du développement durable à l’ULB. fera le point sur les faits et les incertitudes . Il montrera que les scientifiques, les citoyens, l’économie, la politique sont intimement liés

jeudi 20 juin

Projection d’un film sur la guerre d’Espagne, d’après le roman l’Espoir d’André Malraux.

jeudi 27 juin

1ère partie : concert de musique klezmer et flamenco par Yossy Erlbaum 2ème partie : discussion conviviale autour d’une collation maison : - bilan des activités de la saison . - Propositions d’activités futures.

et aussi samedi 1er juin à 10h

NOX, une pièce pour adultes et enfants de Ariane Buhbinder au centre culturel Jacques Frank (voir page 28)

Prix : 2 euro

Les agendas sont également en ligne sur le site www.upjb.be


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