InspirAction n° 6, mars 2017

Page 1

InspirAction Le magazine qui incite à bouger dans le Chablais

Vincent Veillon Une publication des Transports Publics du Chablais N° 6 – avril 2017

26 minutes sans rigoler

1

Un chemin de fer tout neuf pour mieux franchir le Rhône

PORTFOLIO

Eugen Hüttenmoser, l’homme qui photographiait depuis son balcon | InspirAction | TPC # 6

SUPPLÉMENT : Nouvelles de l’Association

du Chablais

PARENTÉ : LES ORMONTSLA MONGOLIE


Les nuits des

étoiles filantes Dès 13 h les 11-12 août 2017

Maison de Montagne de Bretaye, Villars-sur-Ollon

Observer le soleil Visiter le planétarium Fabriquer sa fusée Visionner des films Assister à des conférences Zieuter au télescope Rêver sous la lune Rentrer en train ou marcher sous les étoiles

Renseignements : www.tpc.ch


www.leysin-tourisme.ch

Photos: Christophe Racat, Daniel Aebersold, José Crespo, ATALC.

Revivons notre fabuleuse expérience à Leysin !


IMPREssUM Éditeur : Transports Publics du Chablais SA Rue de la Gare 38 –1860 Aigle info@tpc.ch – www.tpc.ch Responsable de la publication : Grégoire Praz Rédacteur en chef : Grégoire Montangero Secrétaire de rédaction : Géraldine Candido Photographe : Grégoire Montangero (sauf mention contraire) Mise en pages : Halter & Gault Relecture : Bernard Huber et Patrick Schifferle Photolithographie : Baptiste Doxa Régie publicitaire : TPC Impression : Imprimerie DBSprint, Vevey. Distribution : TPC et Loisirs’ Live Sàrl. Ont contribué à cette édition : Virginie Duquette, Georges Duchaudron, Yves Effrett, Christian Schülé (textes) ; Eugène Hüttenmoser, Valérie Passello (Le Régional) , Laurent Pittet, Micaël Rio (photos). Virginie Duquette (carte et photos). Photo de couverture : Une hermine printanière, saisie en position de « chandelle » à Prafandaz (Leysin) par Eugène Hüttenmoser. Cette double page : depuis les Fers, les sommets autour de Leysin photographiés par Eugène Hüttenmoser. InspirAction est une publication gratuite des Transports Publics du Chablais. Le contenu de ce numéro est également disponible sur www. tpc.ch Tirage : 25 000 exemplaires. Diffusion : Suisse romande et Chablais français. 4

| InspirAction | TPC # 6


ÉDITORIAL À qUATRE MAIns

Du Chablais… comme s’il en pleuvait ! Un territoire aux proportions modestes. Une population pas immense (bien que, côté vaudois, Aigle fêtera bientôt son dix millième habitant et, côté valaisan, Monthey a été sacrée deuxième plus grande ville du canton). Néanmoins, sur ses 785 km2 (à peine plus que la surface du Léman) et parmi ses 77 000 habitants (presque la population de Lucerne), quel foisonnement de lieux à

découvrir, de choses à voir, de gens fascinants ! Tel est le constat que confirme chaque édition d’InspirAction. Quant aux sujets régionaux, ils ne sont pas près de manquer tant ils abondent… comme s’il en pleuvait ! Frédéric Borloz Président

Grégoire Praz Directeur

Transports Publics du Chablais

Eugène Hüttenmoser a décidé de ne plus arpenter le Chablais pour photographier les animaux dans leur habitat. Aujourd’hui, il braque simplement son objectif sur la

nature qui l’entoure. Et bien lui en prend. Habitué à patienter des heures pour immortaliser ses bêtes favorites, il attend sagement que la lumière devienne « magique »…

sOMMAIRE 6 14 20 26 34 36 38 41

Portfolio par Eugène Hüttenmoser Vincent Veillon, humoriste sérieux L’AOMC nouveau est arrivé ! Randonner malin: trois merveilles sur un sentier… Quand Christian Constantin rêve de créer une ville dans le Chablais… Christophe Ruppen, le camioneur des airs ! Nostalgie chablaisienne L’ASD aquarellé d’Olivier Geerinck

44 Kathleen Malcause et son Crime parfait ! 48 Le quatrième Chablais de Yann Gross 53 SUPPLÉMENT : Dernières nouvelles de l’Association du Chablais 58 Au Diable vert : l’extraordinaire jardin de Magali et Dominique Mottet 63 La Mongolie amoureuse de Pascal Gertsch 68 Pierre chablaisiennes par Christian Schülé 72 Coin bouquins

InspirAction | TPC # 6 |

5


PORTFOLIO Eugène Hüttenmoser, photographe animalier

Fenêtre sur Chablais

Vous souvenez-vous de Fenêtre sur cour, exceptionnel huis clos signé Alfred Hitchcock ? C’est un peu à cela que nous convoque Eugène Hüttenmoser – le meurtre en moins ! 6

| InspirAction | TPC # 6


Après avoir beaucoup usé ses bottes à poursuivre les bêtes les plus rares, ce photographe animalier s’est fait casanier, avec l’âge. Maintenant, il se contente de capter des

lumières d’exception depuis son balcon. Bien installé chez lui, à Leysin, il immortalise les flammes qui embrasent, quelques secondes parfois,les cieux chablaisiens.

InspirAction | TPC # 6 |

7


La Dent de Morcles (ci-dessus), le Chamossaire (à droite) et les Dents du Midi (ci-dessous), saisis dans des lumières d’exception

8

| InspirAction | TPC # 6


depuis l’appartement leysenoud d’Eugène Hüttenmoser. Comblé par ce qui s’offre à lui, il déclare : « Je n’ai plus besoin d’aller à la

montagne, puisqu’avec mon téléobjectif, la montagne vient à moi ! ». Le luxe du photographe, en somme.

InspirAction | TPC # 6 |

9


Ci-dessus : ce lagopède femelle, tout comme les autres images de cette page, reflète les fameuses vues animalières qui ont fait le succès du photographe chablaisien Eugène Hüttenmoser.

10 | InspirAction | TPC # 5


Page de gauche, de haut en bas : superbe accenteur alpin photographié à Aï. Un gros bec saisi par un Eugène qui n’en espérait pas tant. Toute de grâce et de noblesse, une

perdrix bartavelle aux aguets. Un monticole de roche mâle, proie en bouche. Ci-dessous et page suivante : le tichodrome échelette que seul Eugène a su capter en vol.

Photo surprise / En quittant les berges du lac de Constance, où il est né, pour s’installer à Aigle en 1962, Eugène Hüttenmoser, 20 ans, pensait se lancer dans une carrière de monteur en chauffage. Jamais ce photographe amateur n’aurait imaginé que sa passion grandirait au point d’accaparer tout son temps libre. Ni que ses images animalières rafleraient les prix les plus prestigieux lors de concours internationaux. Ni qu’elles finiraient par illustrer un grand nombre de livres, pour l’essentiel

InspirAction | TPC # 6 |

11


publiés en Allemagne. Ni encore qu’il serait le premier à photographier le vol du tichodrome échelette – série d’images qui fera le tour du monde. Tel fut pourtant le destin d’Eugène Hüttenmoser qui en vint à s’installer à Leysin pour se rapprocher de l’habitat naturel de ses amis à plumes et à poils. Balcon de rêve / Cent mille clichés plus tard, le photographe a ralenti sa course : « J’ai cessé de galoper à travers les Alpes. Je ne me suspends plus

à une corde, avec l’assistance de guides de montagne, dans le vide sous la Tour d’Aï pour faire des photos. Et j’ai rendu mon permis de conduire au profit des TPC ! Alors maintenant, je me contente de saisir ce que m’offre la région. Avoir découvert et photographié ce fossile maritime à Brion audessus de Leysin me comble. Et tout ce que je peux capter depuis mon balcon avec vue à 180°, c’est déjà beaucoup ! » En effet, de son belvédère leysenoud, Eugène, aidé de son épouse Marguerite, guette les lumières folles, les nuées romantiques, les rougeoiements fugaces. Certes il a remisé l’affût dans lequel il patientait des heures en pleine nature pour saisir un rapace ou du gibier à la dérobée. Mais il n’en reste pas moins sur le qui-vive, prêt à bondir sur tous les instants d’extase visuelle que lui offre la météo. Et il a raison : c’est déjà beaucoup ! Texte : Grégoire Montangero. Images : Eugène Hüttenmoser.

12 | InspirAction | TPC # 6


25 %

jusqu’à ie d’économ

Offres spéciales TPC – Thermes Parc

Train + Thermes Parc : Exemples de prix • Champéry à Fayot / Val-d’Illiez : Abt 1/2 : CHF 20.90 • Aigle à Fayot / Val-d’Illiez : Abt 1/2 : CHF 25.90

Le trajet (aller-retour) en train et une entrée à Thermes Parc, véritable oasis de bien-être et de détente, dans un cadre naturel et enchanteur. A votre disposition, des services et des prestations de qualité : bains, soins, aire de détente et restaurant.

Offre valable toute l’année. Disponible dans les gares et les distributeurs TPC. Renseignements : Gare de Champéry 024 479 12 15 Gare de Monthey-Ville 024 471 22 16

www.tpc.ch

InspirAction | TPC # 6 |

13


LA qUEsTIOn D’OPRAH

Vincent Veillon, humoriste

« Ma hantise ? que les gens pensent : “comme il se la pète!” » « Une interview pour un magazine chablaisien? Vous me prenez par les sentiments ! » Telle fut la réponse de Vincent Veillon à notre proposition d’interview. D’habitude, le Monsieur Loyal du duo d’humoristes vaudois de 120 secondes et de 26 minutes s’exprime brièvement dans la presse. Mais notre question empruntée à Oprah Winfrey « qu’est-ce qui est vraiment vrai pour vous ? » l’a, pour une fois, incité à s’épancher – Chablais oblige !

14 | InspirAction | TPC # 6


InspirAction | TPC # 5 |

15


Qu’est-ce qui est vrai pour vous ?

La vérité… Une notion tellement différente d’une personne à l’autre… Pour moi ? Le goût que laisse la dégustation d’un verre de Barbaresco dans mon palais. L’effort lorsque je monte jusqu’au col du Pacheu, au-dessus de Plan Névé, dans le massif du Muveran. L’amour que j’éprouve pour ma fiancée ! La vérité… comme me l’a dit un jour l’avocat Marc Bonnant lors d’une interview pour Couleur 3 : « Il faut sans cesse être à sa recherche. Mais si l’on pense l’avoir trouvée, faire demi-tour et filer dans la direction opposée. » J’aime cette vision. Elle s’applique à nos préjugés. Notre jugement doit toujours rester en mouvement. Sinon, dès que l’on cesse de penser… on devient con.

16 | InspirAction | TPC # 6


Longtemps, Vincent Veillon a été le fils de l’ancien Conseiller d’Etat UDC. Mais depuis le succès des émissions 120 secondes et de 26 minutes, Pierre-François Veillon est devenu, sous la coupole, à Berne, le père de Vincent ! Avant de faire la joie des auditeurs de la RTS, ce bachelier en nouveaux médias de l’ECAL a appris son métier sur les ondes de Radio Chablais. Pour qui n’aurait pas encore goûté au talent des deux Vincent (Veillon et Kucholl), un DVD des meilleurs extraits de 26 minutes vient de paraître !

… en matière d’humour en Suisse romande?

… en tant que créateur en Romandie ?

L’humour est pluriel. Nous rêvons donc, Vincent Kucholl et moi, avec notre ambition de faire rire de façon « universelle » ! Cela dit, nous vérifions que nos élucubrations nous amusent nousmêmes. Ensuite, nous testons auprès d’un téléspectateur ou d’un ami si notre ressort comique fonctionne ou si l’on a dépassé les bornes. Par chance, les Romands aiment rire d’eux-mêmes. C’est notre veine puisque l’autodérision constitue notre fonds de commerce ! Une sorte de catharsis, qui fait du bien à nos semblables. Voilà pour l’aspect concret de notre métier du rire. En revanche, analyser la structure théorique de l’humour ne m’intéresse pas trop. Vincent et moi sommes juste des fans de l’absurde.

Vous imaginez un peu notre privilège ? Pouvoir vivre de l’humour. Etre compris et appréciés. Avoir le droit de partager – en toute humilité – notre point de vue sur notre pays, le canton de Vaud (et d’autres !). Qu’un public adhère à nos délires. Tout cela comble nos ambitions. Mais la grande question demeure : que dire du reste du monde, de la Syrie, de Trump ? … parlons-en : qu’est-ce qui est vrai pour vous en ce qui concerne l’avenir ?

A 20 ans, je pensais à boire des verres, chanter et faire de la musique. Aujourd’hui, je crois que le monde court à sa perte. On fonce tous, funestement, dans un mur. Chaque génération depuis

InspirAction | TPC # 6 |

17


18

| InspirAction | TPC # 6


un siècle en est consciente. Mais je compte tout de même avoir des enfants et les emmener au col du Pacheu ! Et je mesure la chance que nous avons de vivre, bien abrités, sur notre petit balcon, tout en pouvant se payer le luxe de se dire que rien n’est gagné… Qu’est-ce qui est vraiment vrai pour vous en ce qui concerne ce Chablais où vous êtes né ?

Chaque fois que ma fiancée et moi arrivons à Villeneuve – vous savez, sur la légère pente de l’autoroute après le viaduc, là où le toit d’une halle industrielle indique la température ambiante ! –, on crie : « Cha-blais ! » Normal : j’y ai mes racines, c’est chez moi. C’est là que j’ai poussé mon premier cri, à l’hôpital de Monthey le 4 avril 1986. C’est là qu’adolescent, je me disais : « Je ne pourrais jamais imaginer vivre à Lausanne ! » C’est là que l’on se réunit en famille, dans le chalet où mes sœurs et moi avons grandi. C’est là, au vallon des Plans-sur-Bex, où je construisais mes cabanes, où je marchais en inventant des chansons. C’est là où je piquais des crises quand mon père voulait nous emmener en balade, séjours en pleine nature que je finissais par adorer. C’est là où résidait Jérôme, mon ami imaginaire, qui m’inspirait et à qui je dois la musculature de ma créativité. … votre avenir personnel, dans 20 ans ?

Comment vous répondre, moi qui ne me projette jamais à plus d’un an et demi. Dans l’idéal, j’aimerais continuer à pouvoir disposer de terrains d’expression et de jeu, gagner ma vie en m’amusant. C’est si rare. Combien de nos potes font des jobs sans passion et doivent compter sur leurs loisirs pour s’éclater ? Ma faim et ma soif de travail sont mes moteurs depuis mes débuts, vers l’âge de 15 ans, à la radio et dans le graphisme. Lorsque

j’aurai atteint mon demi-siècle d’existence, peutêtre que je m’occuperai d’un alpage. Ne soyez pas surpris : je me sens aussi bien les pieds dans la bouse de vache que les fesses dans un salon feutré lausannois ! Il faut savoir que depuis mes 12 ans, je garde des troupeaux aux Ormonts ! Une chose me paraît sûre : je n’érigerai pas de frontière entre ma vie privée et professionnelle – en fait, je n’arrête jamais vraiment de travailler ni de vivre. Dans 20 ans… Ça va tellement vite… Et en même temps, tout ce que l’on construit s’inscrit dans une ascension progressive et naturelle. Je ne me vois pas monter à Paris et vivre dans sa jungle médiatique, ça non. Mais continuer à m’intéresser aux gens, certainement. … en ce qui concerne la célébrité ?

Ado, j’étais le chanteur d’un groupe de musique. Et j’avais toujours peur qu’on dise de moi : « Pff… Qu’est-ce qu’il se la pète ! » En fait, cette crainte m’habite encore – sans doute un acquis de mon éducation protestante vaudoise ! Alors j’essaie d’avoir juste ce qu’il faut de culot pour ne pas me griller. Selon moi, la meilleure attitude est d’avancer avec humilité. J’agis par rapport à la grosse tête comme par rapport à la découverte de la vérité. Quand je me crois arrivé ou supérieur, je tourne le dos à la gloire et me dis : « Et si tu avais quelque chose à apprendre, mon gars ? » Ne jamais se croire supérieur à l’autre. Par chance, je possède une bonne jauge. Mon job principal consiste à poser des questions, à me mettre au même niveau que mon vis-à-vis, que celui-ci soit une star ou un individu lambda. La radio m’a enseigné cette notion et… ça, c’est une grande vérité !

Texte et photos : Grégoire Montangero.

InspirAction | TPC # 6 |

19


LEs COULIssEs DU RAIL

20 | InspirAction | TPC # 6


L’AOMC nouveau est arrivé !

Entre ceux qui n’y croyaient plus et ceux qui n’y croient pas encore, cela en fait du monde. Il est pourtant bien là, l’AOMC nouveau ! Lumineux, spacieux, silencieux : que de mots en « eux » pour évoquer ces véhicules modernes et pimpants qui filent à travers le Chablais en se riant des embouteillages…

InspirAction | TPC # 6 |

21


Clarté des habitacles, hauteur sous plafond, accès bas, places assises gagnées et

22

| InspirAction | TPC # 6

silence régnant dans ces véhicules spacieux font de l’AOMC un train dans lequel il fait bon

voyager. Les usagers en sont ravis. Pari gagné pour le renouvelement de la flotte des TPC !


Fini le temps où comparer la reine d’Angleterre et l’AOMC pouvait s’imaginer (l’une et l’autre apparaissant comme « démodés et inutiles, bien qu’appréciés », selon certains usagers). La reine du rail « à l’ancienne » est morte ! Vivent les très démocratiques nouvelles rames de l’AOMC. Démocratique, le terme convient non seulement parce qu’elles sont au nombre de sept, comme

les « sages » qui siègent sous la coupole fédérale. Mais encore parce que la direction des TPC a eu la bonne idée d’écouter les précieux conseils de ses spécialistes en matériel ferroviaire. Grâce aux experts de terrain que sont Eric Olloz, Alain Morisod et Alain Schœnmann, responsables des ateliers-dépôts des TPC, l’achat le plus pertinent a pu avoir lieu. Ces derniers, comme la Direction

InspirAction | TPC # 6 |

23


Dépose de l’ancienne voie (avant évacuation du ballast) ;

Creusage du nouvel encaissement ;

et le Conseil d’administration de l’entreprise se déclarent enchantés du matériel livré dans les temps par Stadler Rail, constructeur suisse. Et les usagers ? Les échos les disent ravis, comblés, soulagés, heureux de voyager dans des véhicules conformes à leurs attentes. « Confort et modernité forment la partie visible de l’iceberg », explique Claude Oreiller, Directeur

24

| InspirAction | TPC # 6

Pose et alignement des

des TPC. Concrétiser cela a impliqué un effort financier et humain considérable. « Septantedeux millions de francs d’investissements ne se trouvent pas sous la première traverse ferroviaire venue ! Quant aux compétences nécessaires, elles furent pointues et nombreuses. D’où la nécessité de relever les prouesses de nos collaborateurs et des entreprises impliquées dans ce chantier. Sans


Le chantier du siècle des TPC • Enveloppe totale de 72 millions de francs, matériel roulant compris ; • Prouesses techniques, humaines et ferroviaires ; • Ligne valdo-valaisanne entièrement remise à neuf ;

nouvelles traverses ;

• Délais respectés au jour près ; • Budgets tenus ; • Inconvénients réduits au minimum pour les usagers ; • Accidents évités ;

Montage des lames doubles de la nouvelle crémaillère ;

eux, sans elles, nous ne saluerions pas ce résultat. » Pour leur part, la Direction et le Conseil d’administration des TPC pensent avoir accompli une mission d’importance. Petit pas pour l’histoire du rail, certes, mais grand pas pour la mobilité régionale, pour la qualité des déplacements dans le Chablais et pour la pérennité de l’AOMC. A tester toute affaire cessante !

• 3 secteurs de crémaillère sur un tracé de 3,7 km ; • 351 tonnes de rails ; • 9000 tonnes de ballast ; • 309 tonnes de traverses ; • 110 tonnes de lames en acier de crémaillère posées.

Pose des voies avant recharge du ballast, bourrage, réglage et fixation.

Texte : Grégoire Montangero. Photos : Micaël Rio (p. 20-21), Grégoire Montangero (p. 22-23), Laurent Pittet (p. 24-25), Valérie Passello (Le Régional) (vignettes p. 24-25).

InspirAction | TPC # 6 |

25


26 | InspirAction | TPC # 6


RANDONNER MALIN

Balade entre Leysin et Prafandaz

Trois merveilles sur un sentier…

« Stratus, froid et humidité me glaçaient les os en ce 22 décembre. Néanmois, je décidai de monter à Leysin pour emprunter le sentier que je vous propose de suivre aujourd’hui », se souvient la guide naturaliste Virginie Duquette. « Je m’équipai donc d’un pull polaire, d’une veste en plumes, d’un bonnet de laine et de gants Gore-Tex pour “l’expédition” quasi-polaire que je m’apprêtais à vivre ! Mais arrivée à 9 heures en gare de Leysin-Village, un soleil radieux régnait déjà, me réchauffant pour toute la journée. “Équipement de survie” inutile, confirmant une fois de plus le climat privilégié dont jouit la station. » L’itinéraire de Virginie va vous conduire du village jusqu’aux beautés de la moyenne montagne typique des Préalpes vaudoises. Vous y croiserez

à de nombreuses reprises une belle plante aux feuilles vert foncé dont la forme rappelle celle du chanvre : l’hellébore fétide. Vous verrez aussi, çà et là, de discrets mélèzes, ces arbres particuliers que l’on croit – à tort ! – uniquement visibles en Valais. Enfin, dans ces lieux paisibles et faiblement peuplés, avec un peu de chance vous verrez voler quelques spécimens de becs-croisés des sapins, bel oiseau rouge au bec fascinant. » Mélèze, hellébore et bec-croisé : trois bonnes raisons de vous engager sur ce chemin des délices (avec plan et itinéraire ci-après). Et pour vous convaincre des « vertus cachées » de ces trois hôtes des hauteurs de Leysin, les pages suivantes vous proposent encore un portrait de chacun d’entre eux, plus un bonus « titanesque » !

InspirAction | TPC # 6 |

27


sUIVEZ LE GUIDE 1. Départ de la gare de Leysin-Village. Empruntez la route sous la gare, direction plaine (à l’ouest). 2. Après 500 m., prenez le sentier à droite qui serpente entre connifères, feuillus et mélèzes. 3. Après 15 minutes de montée dont une partie dans le bois « sur le scex », visez la petite route qui file vers la plaine. suivez-la jusqu’au pâturage de Prélan. 4. A la sortie du pré, juste avant la forêt, reprenez le chemin jusqu’au croisement (à 10 minutes). 5. suivez direction « Gd Crevasse ».

28

| InspirAction | TPC # 6

6. Au croisement, bifurquez à droite sur la route forestière, suivant l’indication « Prafandaz 40 minutes ». 7. sur l’épaule, à 1 520 mètres d’altitude, les sentiers se rejoignent pour arriver à une belle place de piquenique aménagée pour des grillades. Poursuivez à plat, sur l’épaule, jusqu’à Prafandaz 8. Descendez jusqu’à la seconde place de pique-nique de Prafandaz (à gauche) ou plus bas (à droite), jusqu’à la buvette. 9. Plusieurs itinéraires s’offrent pour le retour. Pour atteindre Leysin,

engagez-vous sur la petite route (20 minutes jusqu’au village). Pour rallier la gare de Leysin-Village, commencez sur la même route et quittez-la à l’hôtel abandonné (300 mètres plus bas sur la droite). De là, fiez-vous aux panneaux de l’itinéraire raquettes (signalisation rose fuchsia), lequel contourne le bâtiment jusqu’aux chalets du Torrentet. Poursuivez l’itinéraire raquettes jusqu’au croisement (point 5) que vous avez rencontré à l’aller et revenez jusqu’au point 1. Bien du plaisir!


L’HELLÉBORE FÉTIDE : BELLE À En MOURIR…

sur le sol calcaire de Leysin, vous la rencontrerez souvent. Elle vous charmera par sa beauté. Mais malheur à qui touche ou cueille le redoutable hellébore fétide : tout de cette plante est vénéneux. Fortement. surveillez vos enfants car la peau fine et fragile de leur jeune corps ne retient pas toutes les substances toxiques de la plante. Celles-ci peuvent donc pénètrer leur organisme et affectent leur système nerveux ou sanguin. quant aux adultes, ils ont grand intérêt à éviter tout contact avec elle. Froissées, ses feuilles répandent une – très !

– désagréable odeur. D’où son nom, fétide. Malgré de telles particularités, la médecine antique a recouru à cette plante pour soigner la folie. Certains ouvrages voient dans le nom hellébore des racines sémitiques : helibar (remède contre la folie) ou même helein (faire mourir) et bora (nourriture) soit nourriture mortelle. Charmant ! Mais au diable l’étymologie ! Trop de patients ont perdu et leur folie et leur vie à cause de la toxicité de la plante. quelques dizaines de grammes de racine suffisent à conduire un homme

au cimetière. Dans sa fable sur le lièvre, La Fontaine tente de raisonner la tortue en lui prescrivant de l’hellébore : « Ma commère, il vous faut purger / Avec quatre grains d’hellébore. » Conseil d’ami ou d’ennemi ? Au musée, on regarde avec les yeux et non avec les doigts. Pareil devant un hellébore. Mais il vaut vraiment la peine de s’y pencher tant elle est belle. sa tête penchée, aux sépales verts bordés de rouge, fleurit début janvier. Ainsi la neige la recouvre-t-elle souvent. Mais la nature a tout prévu. Tourné vers le sol – à la manière d’une fleur fanée –, l’hellébore supporte les flocons qui tombent bien vite au sol en glissant sur ses sépales. Toxique pour l’homme, elle attire cependant les diptères (mouches, moucherons). Riche en pollen, elle les séduit avant le réveil printanier des autres insectes. Les fourmis l’affectionnent aussi. Vous aurez peut-être la chance d’en voir, affairées à ramener un follicule (coque crochue qui renferme les graines). Celui-ci produit une substance conçue pour séduire les fourmis qui s’en délectent. Tout en amenant le follicule à la fourmilière, elles disséminent la plante dont les graines tombent à terre en chemin. Cette collaboration entre un insecte et un végétal assure la reproduction de la dangereuse, mais ô combien séduisante, hellébore fétide.

InspirAction | TPC # 6 |

29


LE BEC-CROIsÉ DEs sAPIns : LE ROUGE DE LA LIBERTÉ Cet oiseau, au plumage rouge pour le mâle et jaune brun pour la femelle (moins visible pour les prédateurs), apprécie nos forêts d’épicéas. L’évolution a fait de lui le champion de l’extraction des graines de ces conifères, source première de sa nourriture. Comme son nom l’indique, il possède un bec croisé. La mandibule inférieure du poussin va croître de manière démesurée jusqu’à s’orienter, pour toujours, d’un côté ou de l’autre, tout comme les hommes

30

| InspirAction | TPC # 6

peuvent être droitiers ou gauchers. Cette caractéristique, doublée de muscles associés très développés, va permettre à l’oiseau d’écarter les écailles des pives (comme on dit chez nous) pour s’emparer des graines. Pour assurer l’efficacité de cette manœuvre, sa patte opposée à la direction de sa mandibule inférieure est plus robuste pour lui offrir un meilleur soutien. De plus, des pièces cartilagineuses équipent la base de sa langue. Il peut

ainsi saisir les graines logées au fond, à la base des écailles. Adapté à la collecte de graines de conifères, il niche en plein hiver, lorsque les graines d’épicéas arrivent à maturité. Onze à douze jours après avoir quitté son œuf, le poussin possède déjà un plumage protecteur. La femelle peut alors partir en quête de nourriture malgré le froid. Cet oiseau doit s’emparer des graines avant qu’elles ne tombent car son bec


PEnDAnT qUE VOUs Y ÊTEs… Loin des eaux, près du ciel, du soleil plein les yeux si l’envie vous prend de boire un verre à la buvette de Prafandaz, dégustez-le en vous remémorant cette histoire étonnante! Un beau jour, un étranger arriva à Leysin. Un seul désir l’animait : s’installer « le plus haut possible ». Il trouva la buvette d’alpage de Prafandaz à son goût. C’est ainsi qu’il en devint le fidèle tenancier durant des années. sur cette pente dominant Rhône et Léman, il se sentait en parfaite

le désavantage au sol. Le bec-croisé dépend des fructifications des épicéas. Or, celles-ci fluctuent par intervalles de 2 à 5 ans. s’ensuivent donc de nombreuses périodes de disettes. Le beccroisé doit alors migrer et s’alimenter sur des pins, d’autres conifères, voire des feuillus. Les années d’abondance de graines favorisent la survie de l’espèce. Leur population grandit, grandit. Mais les quelques graines encore accrochées aux pives ne leur suffiront

sécurité. L’homme en question s’était juré de ne plus descendre en plaine. Il avait horreur de tout ce qui ressemblait à de l’eau, à un bateau, à l’idée même de faire trempette. seul le glouglou d’un chasselas emplissant un verre constituait un liquide convenable. Il coula donc des jours heureux, sous le soleil exactement. Pourquoi une telle phobie de l’eau ? Parce que l’homme en question, Tito Trinca, était un rescapé du naufrage du Titanic ! Incroyable mais vrai, cela n’arrive que dans le Chablais !

pas. En groupe, ils parcourent des milliers de kilomètres à la recherche de terres accueillantes. Il se peut que le plumage rouge vif du mâle provienne de la décomposition des caroténoïdes de sa nourriture. A l’état sauvage, il fournit un intense travail musculaire. Cela augmente son métabolisme, active sa circulation sanguine, ce qui oxyde les pigments couleurs carotte présents dans sa nourriture. D’où sa belle couleur

rouge, affirment certains. La preuve ? En cage, l’oiseau passe du rouge au jaune. Mais une fois libéré, son plumage retrouvera sa couleur originelle ! Alors, laissons les beaux becs-croisés rougir de leur liberté !

InspirAction | TPC # 6 |

31


LE MÉLÈZE D’EUROPE : LE VOYAGEUR DE L’EXTRÊME Pensez-vous, comme la plupart des gens, que les mélèzes viennent du Valais? Pourtant leur origine est bien plus lointaine. Leurs graines auraient quitté la sibérie pour arriver jusqu’à nous ! Oui, les arbres « marchent », colonisent le territoire. Et pas qu’un peu. Certaines conditions ont incité le mélèze à s’installer chez nous. D’abord, un sol peu détrempé et pas trop riche. Ensuite, de la lumière. Beaucoup. D’où sa présence dans les éboulis et autres lieux sans concurrents. D’où aussi sa prédilection pour les zones inhospitalières et à variations climatiques extrêmes (de -50 à plus de 20 C°). Là

32

| InspirAction | TPC # 6

au moins, aucun autre arbre ne lui vole son soleil. solitaire en son royaume, il prospérera. Assombri par l’ombre de voisins indésirables, il se raréfiera. Et les aiguilles qu’il abandonne en hiver – humus idéal – aideront d’autres plantes à coloniser le sol. Le reste de l’année, son feuillage très ajouré diffusera une lumière douce à son pied. Revenons à ses aiguilles qu’il est l’un des rares conifères à perdre tous les ans. Malgré le froid, ses confrères, sapin et épicéa entre autres, en gardant leurs feuilles, reprennent leur activité de photosynthèse (création du sucre) – sous certaines conditions.

Une bonne partie des sucres des arbres à feuilles persistantes sert à fabriquer un antigel. Avec le reste, ils produisent à grand prix une cuticule anti-transpirant, des feuilles épaisses et des substances qui repoussent les prédateurs. Le mélèze, lui, ne joue pas au chimiste. sa solution : perdre ses feuilles pour éviter un gel ou une sécheresse fatals. En effet, dans un sol entièrement gelé, ses racines ne peuvent puiser de l’eau. Or, durant de belles journées printanières, le feuillage risquerait de transpirer sans que l’arbre ne puisse compenser ses pertes en eau. Contre le froid, le mélèze peut développer


une écorce de 20 cm d’épaisseur. Cette protection maintient hors gel ses délicates structures conductrices de sève. Le mélèze produit des aiguilles souples et fines, avec une faible cuticule et sans antigel. Il utilise ainsi au mieux ses ressources pour pousser et se reproduire sans feuilles persistantes consommatrices d’énergie. Econome, le mélèze ne fleurit que tous les 3, 4 ou 5 ans. Et selon les rigueurs du climat (dans la forêt boréale, par exemple), sa période de croissance annuelle peut se réduire, à 3-4 mois seulement. Rien d’étonnant donc que, comparaison faite, il apprécie le climat

des Alpes valaisannes et vaudoises! Voilà peut-être pourquoi le mélèze a émigré (entre autres) jusqu’à Leysin. Même après avoir pris racine sur nos flancs montagneux, il a conservé ses adaptations sibériennes qu’il met à profit pour faciliter sa survie. Autant de bonnes raisons, la prochaine fois que vous croiserez un mélèze lors d’une excursion, d’observer quelques minutes ce rescapé des milieux extrêmes qui est venu de – très ! – loin pour s’établir chez nous.

Informations scientifiques, itinéraire et cartographie : Virginie Duquette. Texte : Grégoire Montangero. Images : Yoann Chassot (p. 26-27). Virginie Duquette (p. 28). Buvette de Prafandaz (p. 31). Web (autres pages).

InspirAction | TPC # 6 |

33


CLIn D’œIL Le projet fou de Christian Constantin

Bientôt une Constantinople 2.0 dans le Chablais ? Christian Constantin rêve de bâtir une ville du futur à Collombey. Ecologique et technologique, cette cité nouvelle pourrait accueillir 20 000 habitants sur la rive sud du Rhône. Enrichie de quantité d’arbres, de bassins et d’espaces verts, voilà qui offrirait une seconde vie à la sinistre friche industrielle actuelle de Tamoil. Un projet chablaisien de plus pour l’architecte valaisan… Parce que le Chablais le vaut bien. / N’ayant pu construire un stade dans notre région, on aurait pu croire Christian Constantin dédaigneux de ce coin de pays. C’était mal le connaître. En réalité, il convoite depuis longtemps les 130 hectares de la raffinerie pétrolière libyenne bien situés à Collombey. Encore faudra-t-il que

34 | InspirAction | TPC # 6


les propriétaires veuillent lui vendre ce lieu abandonné et pollué. Agissant comme s’il l’avait déjà acquis, le patron du FC Sion a déjà demandé à son architecte, Vasile Muresan, un « archibiotic-concept ». Sur le terrain assaini, les visionnaires ont imaginé une agglomération d’avenir, productrice d’énergies renouvelables et capable de loger le flot croissant de nouveaux habitants chablaisiens. Accueillir une nouvelle ville : un privilège rare. /

En Europe, aucune ville n’est sortie ex nihilo de terre ou du cerveau d’un concepteur depuis un moment. Et dans le monde, le fait n’est guère plus courant. Certes Washington DC en est une, surgie en 1790. New Delhi (1911) aussi. Certes deux ans plus tard poussait la capitale australienne Canberra. Puis, grand trou avant la construction de Brasília, en 1960. Sept ans plus tard, toujours loin de chez nous, le Pakistan se dotait d’Islamabad. Et en 1970, c’était à Belize d’ériger Belmopan. Ensuite, deuxième tarissement. Mais à la fin du XXe siècle, le Nigeria a accouché d’Abuja, en 1991, le Kazakhstan d’Astana, en 1997, et Myanmar (ex-Birmanie) de Nay Pyi Taw, en 2005. Aujourd’hui, le sud-Soudan serait

enceint de Ramciel, ville future ou fausse couche en perspective ? Même question qu’à Collombey. Et si cela prennait forme ? / Qui peut dire si l’idée folle de Constantin se concrétisera ? Car sur le papier, tout paraît très simple. Sur le terrain, en revanche, les choses tendent volontiers à se compliquer. Les rives du lac de Neuchâtel en sont la preuve. Elles auraient pu abriter Henripolis, ville planifiée et dessinée en 1625 par Henri II d’Orléans-Longueville. Mais le refus des propriétaires de vendre leurs terrains, entre mille autres tracas, et l’impossibilité de réunir les fonds nécessaires, ont eu raison de l’ambitieux projet. Alors souhaitons qu’une Constantinopolis voie le jour chez nous et complète la brève liste des villes nées d’une volonté forte, d’un lieu propice et d’une conjoncture favorable. Le Chablais proposerait ainsi une cité douce à vivre, exemple d’intelligence appliquée, de responsabilité écologique et d’intégration que le monde nous envierait ! Rêvons donc avec Christian Constantin car, à ville nouvelle, vie nouvelle. Texte : Grégoire Montangero. Images de synthèse : Christian Constantin SA.

InspirAction | TPC # 6 |

35


PORTAIT CHInOIs

Christophe Ruppen, le montheysan de l’asphalte et du ciel

Un routier qui vole haut IL EST SANS DOUTE le routier au monde qui évolue dans les sphères les plus élevées. Tout gosse déjà, il s’intéressait à ce qui roule, s’élève, flotte. Incapable de rester assis derrière un bureau, il a songé à conduire des trains. Mais il est devenu camionneur. Comme son père. Incapable de se contenter du plancher des vaches, ce grand marcheur s’est aussi lancé dans l’aviation et la voltige aérienne…

36

| InspirAction | TPC # 6


« Depuis mes 19 ans, je passe l’essentiel de mon temps libre en l’air. Pour ma défense, lors de mon premier vol en planeur, j’ai rencontré un aigle. Il a plongé droit devant mon cockpit pour me signifier que j’avais pénétré sur son aire de vol. Cela m’a marqué à jamais. » Passion ravageuse et de longue durée que de côtoyer les nuages avec un oiseau mécanique. « Pour ma défense toujours, avant de m’épouser, ma future femme connaissait déjà ma maîtresse ! » A Monthey, les murs de son entreprise de transports affichent des photos de ses sept camions. Mais des images d’avion, des vues aériennes vertigineuses et des souvenirs de virées avec Claude Nicollier attirent surtout le regard. « Je lui ai offert un vol en Piper. Il m’a emmené dans son Hunter ! Grand moment que de piquer à la verticale le long d’une paroi rocheuse dans les Alpes… » Généreux, Christophe Ruppen partage sa vision du monde depuis le ciel. « Dans un avion, on se sent grand. On dirige. Voler, c’est

Si vous étiez… un livre : Le Petit prince, parce que ce texte vous fait voyager sans même devoir quitter votre siège. …Un objet : un avion, à défaut de pouvoir être un aigle ! Voir où l’on habite depuis l’espace, c’est vraiment de la 4 D, car les sensations offrent une dimension supplémentaire ! lieu : Cap Canaveral ou son équivalent russe : Baïkonour ! Des endroits mythiques ! J’avais un mois quand

embrasser d’un même coup d’œil Léman, Cervin, Dents du Midi, Eiger, Munch, Jungfrau et le Bietschhorn ainsi que les panaches de vapeur des centrales nucléaires suisses allemandes… Avec de tels repères, impossible de se perdre. » Logique, il ajoute encore : « Il suffit d’une piste de décollage de 800 mètres pour faire le tour du monde. Alors qu’avec la même longueur d’autoroute, on ne va même pas un kilomètre plus loin… De ce fait, grâce à l’aérodrome de Bex, le monde est à portée du Chablais. » CQFD. Cette vérité lâchée, ce père Noël occasionnel doublé d’un amateur de théâtre et de politique, met sa casquette. D’un geste vif, il extrait un monoroue électrique superhigh-tech de son camion. Sautant dessus, et juste avant de démarrer en trombe sur le tarmac pour rejoindre son avion, il nous crie : « Désolé, mais la passion du ciel n’attend pas ! »

on a monté le premier homme dans l’espace et le mur de Berlin. Ces deux projets se sont cassé la gueule, mais moi – que l’on surnommait Gagarine ! –, je suis toujours debout ! …Une personnalité : Je m’aime bien, vous savez ! Mais mettons Neil Armstrong car j’aurais aimé mettre un pied sur la Lune.

…Un

…Une image :

un coucher de soleil rougeoyant avec un oiseau. Le soleil, la mer, l’espace,

la lumière, l’air : tout pour faire exploser notre esprit de clocher si terrien. A mes yeux, notre planète est un vaisseau spatial. Le seul qui nous convienne vraiment. Alors, moi, les frontières… …Un proverbe : « Le monde appartient à ceux qui se lèvent tôt. » Comme mon grand-père, je souhaite mourir un soir pour pouvoir encore apprendre des choses durant mon dernier jour ici bas !

InspirAction | TPC # 6 |

37


IL EsT PAssÉ PAR ICI Photographies d’un anonyme, prises entre 1890 et 1900

Nostalgie chablaisienne

MÊME LES SERVICES SECRETS AMÉRICAINS ignorent tout de son identité. Etait-ce un homme, une femme, quelqu’un d’ici ou du Nouveau-monde ? Mystère. Seule certitude : un photographe a fixé les traits du Chablais (et d’autres coins de Suisse) à la fin du XIXe siècle. La Bibliothèque du Congrès, à Washington, a archivé ce legs anonyme sous l’énigmatique cote Lot 13410…

38

| InspirAction | TPC # 6


Page 38 : le Grand-Hôtel d’Aigle (emplacement qu’occupe actuellement Parc Aventures).

Ci-dessus et page suivante : recto verso de saint-Maurice, façon maquette ferroviaire. Vignettes : le

château de la Porte du scex avant qu’un débordement du Rhône n’en emporte une partie. La construction

Rêve en plaques / Qui eut imaginé que le Lot 13410 du gigantesque fonds photographique de la Library of Congress recelait un trésor non seulement suisse, mais chablaisien ? En l’occurrence, un stock de près de 750 plaques photographiques. Vues colorisées à la main de notre coin de pays sous un jour idéalisé et bucolique. De quoi séduire les touristes d’alors – surtout anglais – avides de sommets et d’exotisme.

InspirAction | TPC # 6 |

39


du pont sur la Gryonne, entre Gryon et la Barboleuse. Le siège de l‘actuelle Leysin American school, au temps où

ce bâtiment s’appelait le Grand-Hôtel. Le village rural de Leysin lorsque poussaient ses fameux sanatoriums.

Coup de chance / Ce fonds public nous est tombé sous les yeux par hasard. Les TPC en ont fait leur calendrier (disponible dans leurs gares). Ce tirage limité témoigne de la persévérance et de l’endurance du courageux arpenteur photographe. Car du courage, il en fallait pour sillonner ainsi les monts et les vaux de notre territoire. Surtout avec une lourde chambre photographique à soufflet sur l’épaule et un trépied sous

40

| InspirAction | TPC # 6

le bras… Une chance de pouvoir contempler l’allure qu’avaient alors tant d’emplacements de ce Chablais que desservent aujourd’hui les TPC. Une chance car bien d’autres régions romandes n’ont pas eu les faveurs de l’avide créateur de ces images au charme aussi délicieux que désuet. Pour en voir plus : bit.ly/locsuisse


EnTRE PAssÉ ET PInCEAU L’ASD aquarellé

Une aquarelle de l’ASD dans votre salon ? L’AQUARELLISTE BELGE Olivier Geerinck a encore frappé ! Depuis plus de quarante ans, ses pinceaux immortalisent les rames de l’ASD. Par tous les temps et en toute saison. Insatiable, il n’a pu s’empêcher de réaliser quatorze tableaux pour les cent ans de la ligne. Sept d’entre eux quittent le Musée des Ormonts où ils ont été exposés. En voulez-vous un pour votre salon ?

InspirAction | TPC # 6 |

41


sept aquarelles à saisir ! Les petits futés, amateurs d’aquarelles ferroviaires, ont déjà réservé leur coup de cœur durant la grande rétrospective que le Musée des Ormonts a consacré à l’AsD. Bonne nouvelle pour qui n’y aurait pas pensé mais rêverait de posséder une peinture d’Olivier

Geerinck : il reste à acquérir sept originaux encadrés de cette série pour seulement 480 francs pièce ! Conseil : faites vite ou bien… attendez le 200e anniversaire de la ligne – dans 98 ans ! – mais ce seront alors des pièces de collection, sans doute hors

Fou de l’ASD / A la fois aquarelliste, auteur et éditeur ferroviaire, Olivier Geerinck est un vrai passionné du rail. Bien que Belge, il fréquente les lignes des TPC « depuis toujours ». Deux preuves de cela : un trajet en train entre le Bévieux et Gryon constitue le plus ancien souvenir de sa vie; et l’AOMC lui a inspiré ses premières photos lorsqu’il avait 10 ans ! Pinceaux d’un jour, pinceaux toujours! / Lorsqu’on

lui demande ce qui l’incite à peindre encore et encore l’AOMC et surtout l’ASD, Olivier répond : « J’aime ces voies qui partent à l’assaut des

42

| InspirAction | TPC # 6

de prix ! Pour voir les sept aquarelles encore disponibles : www.tpc.ch/geerinck. En cas d’intérêt : service.promo@tpc.ch.

montagnes du Chablais, avec ou sans l’aide de la crémaillère. Ces lignes présentent une variété infinie de paysages en toutes saisons, sujets à reproduire à l’aquarelle sans modération ! » Pour lui, les TPC réunissent : « un subtil mélange de grand air, de liberté et de poésie ». Il n’est donc pas près de poser ses pinceaux. Surtout pas au vu du succès que remportent ses œuvres auprès des publics vaudois et valaisan, ce qui l’encourage plus que jamais à continuer !


InspirAction | TPC # 6 |

43


L’HEURE DU THÉ A l’enseigne de la librairie Le crime parfait, chez Kathleen Malcause, à Bex…

La tête, le cœur et les mains dans le crime ! L’HEURE DU CRIME… La librairie d’occasions de Bex porte bien son nom puisqu’on n’y trouve que thrillers, polars et romans policiers. Une adresse que se refilent les amateurs de décharges livresques d’adrénaline. « Que faisiez-vous la nuit du X au Y », « Quel est votre alibi ?», aurait-on envie de demander à Kathleen Malcause, alias « Madame Thriller Suisse romande », tant son amour du genre est… suspect !

44 | InspirAction | TPC # 6


Lady Thriller et le Chablais / La fin tragique et pa-

risienne de Lady D pourrait inspirer un romancier. Mais les débuts livresques, improbables et chablaisiens, de Lady T ont aussi de quoi susciter l’intérêt. L’aventure bibliophile de cette physiothérapeute-bijoutière reconvertie en libraire débute à Corbeyrier. « Mon Bed and Breakfast avait alors une particularité : 900 polars en français, en anglais et en allemand, à disposition des hôtes. Les médias en ayant beaucoup parlé, ma bibliothèque a attiré des gens de loin à la ronde. Pour une fois, ils n’avaient pas à se justifier même s’ils consacraient tout leur séjour à lire plutôt qu’à se balader ! » Cinq ans plus tard, Kathleen avait accumulé plus de 6 000 titres. « Faute de place, je les ai proposés à la ville d’Aigle, à condition que j’en prenne soin. Mais je n’ai pas aimé que, bientôt, l’heure de la retraite sonne mon arrêt de travail. Alors, j’ai empaqueté ma bouquinerie pour aller voir ailleurs. » C’est ainsi que notre criminophile tous azimuts a déposé ses bagages à Bex, d’abord juste à côté de la Coop, puis au Cèdre. L’amour du thriller de cette Bruxelloise s’explique par ses origines : « Vous comprenez, Hercule Poirot est belge. Le commissaire Maigret également. Et tout a commencé pour moi avec les romans policiers de Simenon. Ensuite, j’ai évolué, ai découvert la BD (belge également !), mais suis restée fidèle à la richesse du polar – bouquins intelligents par excellence. Ils font réfléchir et voyager, distraient et fourmillent d’enseignements sur les hommes et la vie. Et puis lire, c’est être son propre metteur en scène, cela nous rend actif, co-créateur, alors je ne suis pas près de m’arrêter ! » Les amateurs s’en réjouissent car Kathleen, par sa bonne connaissance des auteurs, peut aider sa clientèle à trouver son bonheur dans les méandres de ce genre littéraire complexe et foisonnant.

comme Sjöwall & Wahlöö, les premiers auteurs nordiques, néanmoins excellents. » Pas tant une question de style que d’évolution de notre mode de vie. « Tout a tellement changé ces dernières décennies. Un enquêteur qui écrit à la CIA et doit patienter une semaine, ça paraît vieillot. » En ce moment, les auteurs nordiques la fascinent. Mais elle doit son plus grand plaisir à un français : Ian Manook. « Son Yeruldelgger est le plus beau livre que j’aie lu. Sur le plan humain, ethnique, géographique et policier, les aventures de ce commissaire mongol sont à découvrir de toute urgence. » D’ailleurs, il s’agit du thriller le plus primé de tous les temps… Elle raconte

Des favoris qui évoluent / «Mes

auteurs préférés changent régulièrement ! Certains ne sont plus dans le coup. Simenon, par exemple, tout

InspirAction | TPC # 6 |

45


aussi avoir adoré Le lecteur de cadavres, d’Antonio Garrido. « Du James Bond, mais… au XIIIe siècle ! » Suivre le premier médecin légiste de l’Histoire est passionnant. Mais c’est un bouquin difficile à trouver. « A tel point que lorsque j’en ai un exemplaire, je ne le vends pas à n’importe qui ! Car j’aime mes livres. Je souhaite donc les mettre entre les mains de lecteurs qui les apprécieront à leur juste valeur. Si je soupçonne que ce ne sera pas le cas, il m’arrive de mentir : « Celui-ci ? Non, il est déjà réservé ! » Longtemps méprisés, les thrillers ont depuis peu acquis leurs lettres de noblesse. Il s’en vend aujourd’hui autant que de « grande » littérature. « A qui me dit : “Je n’y connais rien, que me conseillez-vous ?”, je demande : voulez-vous de la violence physique ou psychologique ? Du sang ou du soft ? Souhaitezvous découvrir le Nord, l’Ecosse, l’Irlande, l’Espagne, voire… la Mongolie ? » Les réponses obtenues permettent à Kathleen et à ses collaborateurs d’aiguiller les débutants. « Ensuite, je leur demande ce qu’ils ont aimé et je tente de rester dans la veine qui leur a procuré du plaisir tout en imaginant comment les faire avancer. D’après leurs appréciations, je reprends mon (modeste !) rôle de guide. » Ce conseil personnalisé participe au succès du Crime parfait. « Nos lecteurs sont non seulement

Une librairie particulière /

46 | InspirAction | TPC # 6

fidèles, mais très attachés à la survivance de cet endroit unique. A tel point que, souvent, après nous avoir acheté un livre, ils nous le rapportent une fois lu pour repartir avec une nouvelle provision de bouquins ! Sans parler de ceux qui s’approvisionnent ailleurs en nouveautés pour nous les off rir ensuite ! » Retour – heureux ! – de manivelle en faveur de cette aficionada qui consacre ses jours de congé à dénicher des ouvrages pour ses fans. « En plus, j’ai des indicateurs un peu partout : ils cherchent et engrangent des volumes pour enrichir nos rayonnages, à tel point qu’on ne sait plus où mettre les livres ! » Vers une tradition chablaisienne du thriller ? /

Notre coin de pays semble commencer à inspirer des auteurs de romans noirs. En 2000, Michel Bory a situé à Gryon son roman Les mensonges de l’inspecteur Perrin. Tout récemment, Marc Voltenauer y a aussi placé le cœur de l’action de son best-seller Le dragon du Muveran. Et son prochain bouquin, comme l’auteur l’a confié à Kathleen, se déroulera à Aigle, Villars, Bex, Gryon et autres capitales européennes comme Paris et Berlin ! Ainsi, malgré lui, le Chablais estil devenu le théâtre d’obscures intrigues d’encre et de papier. Texte : Yves Effrett.


SWISS VAPEUR PARC • LE BOUVE RET •

VREZ DÉCOU EAUTÉS UV LES NO SAISON DE LA

7 1 0 2

Informations, tarifs et horaires

swissvapeur.ch

InspirAction | TPC # 6 |

47


DÉCOUVERTE

Reflets d’un roadtrip en vélomoteur dans un Chablais insoupçonné, et au-delà…

Le quatrième Chablais existe, il l’a rencontré !

48

| InspirAction | TPC # 6


VAUDOIS, VALAISAN ET FRANÇAIS : tels sont les trois découpages officiels du Chablais. Le photographe Yann Gross en a découvert un quatrième : celui d’Horizonville, zone marginale et insoupçonnée, peuplée d’Indiens et de cow-boys qui vivent, chez nous et à notre insu, leur rêve américain !

Yann Gross ne dira jamais : l’Amazonie c’est bien, le Chablais c’est mieux. Mais après avoir arpenté cette partie du monde cinq ans durant pour en rapporter matière à son dernier livre, ce photographe qui publie dans le New York Times Magazine et National Geographic, entre autres, affirme avoir vécu, sur notre coin de terre, l’un des voyages les plus exotiques de sa vie !

Page 48 : La dépaysante station-service Horizonville. Ci-dessus : Piste de tractor pulling à Illarsaz. P. 50 : Val et la saucisse à Collombey-le-Grand. P. 51 : Martin Rohrer, à Illarsaz. 2. P. 52 : Les citernes, à Aigle. Cathy Lavanchy, à Villeneuve. Le Cheyenne Bar du temps de sa splendeur, à Aigle.

Quand le Chablais inspire une série télé / Le regard oblique qu’a posé Yann Gross sur le Chablais et au-delà relève presque d’une trouvaille ethnographique. L’incroyable ne se situait pas au bout du chemin. Il l’a déniché aux abords du Rhône. Ou sur des plateaux en moyenne altitude. Ou encore dans des campings d’aspect ordinaire, entre autres lieux à la conformité trompeuse. Là, il a débusqué des tribus aux mœurs, vêtements, loisirs et distractions inattendus. Curieux et fasciné, il a souhaité apprivoiser (à coups de bières partagées) certains des membres de ces étonnantes colonies. Ensuite, il a passé du temps avec eux, assistant à leurs rites, découvrant leurs jeux. Enfin, il a osé sortir flashs, caméras et objectifs pour les immortaliser. Son livre Horizonville réunit ce reportage surprenant. La RTS, inspirée par ce recueil, en a tiré sa série télé Station Horizon.

InspirAction | TPC # 6 |

49


Un retrait de permis et tout bascule… / De Chexbres, son village natal, Yann Gross n’apercevait que les prémisses de la plaine du Rhône. « Gamin, c’est à peu près tout ce que j’en connaissais. » Devenu ado, l’amour de la montagne le gagne. « Les sommets chablaisiens me promettaient des sensations fortes. Mais le fond de la vallée me semblait terne. » Jusqu’au jour où, après avoir longtemps entendu parler du mythique Yukon Café, à Collombey, le jeune adulte s’y arrête. « Là, près des réservoirs de la rafinierie pétrolière, tout un monde s’est révélé à moi. Je me suis cru dans Une nuit en enfer de Tarantino. J’étais au bar Titty Twister, avec sa clientèle sortie d’on ne sait

50

| InspirAction | TPC # 6

où. » Encore étudiant en photo à l’Ecal, Yann entend consacrer un projet à ce lieu atypique. « Pas si simple, pourtant. Les habitués voulaient me payer un verre plutôt que de se faire tirer le portrait. Et puis, certains bikers bien machos me prenaient pour un gamin de 22 ans. Juchés sur leurs grosses cylindrées américaines, ils me disaient : “Pas de place pour les scooters ici !”». Un an plus tard, Yann rêve d’un voyage lointain où moissonner des images pour son travail de diplôme. « Mais sans argent et sans permis de conduire – retiré à tort, je précise ! –, je me suis demandé comment me déplacer tout de même et faire des photos. » Lui revient à l’esprit


A Straight story, le film de David Lynch. Un fait divers authentique : deux frères, Alvin et Lyle Straight, brouillés depuis une décennie. Dans l’Iowa, Alvin, 75 ans, fait une mauvaise chute. A plusieurs centaines de kilomètres de là, dans le Wisconsin, Lyle, son aîné, est victime d’un problème cardiaque. Malgré son état de santé, Alvin part retrouver son frangin en… tracteur tondeuse ! « Un fabuleux road trip de la lenteur. De belles rencontres entre départ et arrivée. Je me suis dit : si un vieillard a pu avaler des centaines de kilomètres avec son tracteur tondeuse , pourquoi je ne partais pas découvrir, en boguet, une région dont j’ignore tout ? » Le photographe s’est

acheté une vieille remorque à boilles. Il y a déposé sa tente et sa caméra Mamiya. Son aventure, entre Villeneuve et Brigue, pouvait commencer ! Se perdre dans son propre pays… / « Mon intention se limitait à capturer des images très personnelles. Pour cela, je souhaitais me sentir perdu dans mon propre pays, ne pas rentrer à la maison tous les soirs. Progresser à 30 km/h me permettait de capter tout ce qui s’offrait à moi, de modifier ma trajectoire à la moindre sollicitation visuelle. » Chemin faisant de ses trois mois de voyage en zig-zag, le photographe est tombé sur des totems indiens et des concours de tractor

InspirAction | TPC # 6 |

51


pulling à Illarsaz et des séances de strip-show Collombey. « Confinée entre les montagnes, la dure et sauvage vallée du Rhône m’est apparue comme le far-west de la Suisse. Hors des zones urbaines, elle recèle des ambiances rares. C’est ce que démontre Horizonville, le livre qu’Yann a publié au retour de ses pérégrinations. Lointain, impalpabe, exotique, comme Nashville ou Louisville… / Horizonville, le titre de son re-

portage, Yann Gross l’a emprunté au nom de la micro-station essence de Saint-Maurice. « Elle semble photographiée au bord de la Road 66 ou sortie d’un tableau d’Edward Hopper ! » Ces photos prises en 2005, mais qui pourraient aussi bien dater de 1970 que d’aujourd’hui, évitent avec soin les références à des technologies. De même, elles excluent les indications précises de lieux ou d’époques. D’où l’étrangeté de ces images qui semblent couvrir une zone géographique où l’on vit, s’amuse, s’habille comme aux USA. « Les Américains imaginent qu’Horizonville est une ville de Suisse où se retrouvent les amateurs de country ! J’ai reçu de nombreux mails d’outre-Atlantique disant : “Google Earth ne localise pas Horizonville… Où est-ce ?” Il m’a donc fallu m’expliquer : c’est un vaste territoire, sans

52

| InspirAction | TPC # 6

rapport avec la conception habituelle du Pays de Vaud ou du Valais. En fait, Horizonville n’existe que dans la tête des gens qui le rêvent, le vivent et s’y rendent, ainsi que… dans la mienne ! » Parmi d’autres endroits entre Villeneuve et Brigue, le Yukon Café offrait à ses clients une sorte de plongée dans l’American dream. Un rêve né d’un mythe, conçu par Hollywood. Un rêve capable de susciter un fort sentiment d’appartenance. « Je voulais vivre tout cela, pénétrer très lentement dans cette réalité décalée. » Depuis que le Yukon Café a brûlé, reste le livre Horizonville, témoin que le quatrième Chablais se révèle à qui va à sa rencontre. Texte : Grégoire Montangero. Photos : Yann Gross.


Dernières nouvelles de l’Association du Chablais Relier les Chablaisiens : telle est la mission des Transports Publics du Chablais, telle est la vocation de l’Association du Chablais. C’est ainsi tout naturellement que le magazine des uns s’est imposé comme le vecteur de communication de l’autre. Depuis 2014, rendez-vous est pris pour vous faire partager, une fois par an dans InspirAction, la vie et les activités de l’Association du Chablais !

Texte : Christian Schülé. Photos : Gérard Berthoud (Tour) / Magali photography (Griffons) / Aigle Région (Reflets) / Looping Création Monthey (pub).

Supplément Association dudu Chablais – InspirAction | TPC #6 2#| 2 | 53 Supplément Association Chablais – InspirAction | TPC 53


Deuxième cérémonie de remise des Griffons L’Association du Chablais a attribué le 17 novembre 2016 ses Griffons lors d’une cérémonie organisée aux Bains de Lavey. Remise tous les cinq ans, cette distinction récompense personnalités, institutions ou entreprises s’étant particulièrement distinguées par leurs performances, leurs compétences ou leurs qualités dans les domaines de l’économie, de la culture et du sport. Un jury composé de sept membres issus des domaines concernés et provenant du Chablais valaisan et vaudois a examiné les candidatures proposées par les communes du Chablais ainsi que le Groupement

d’entreprises du Chablais. Neuf finalistes ont été retenus, trois par catégorie : Griffon Économie André Pugin, fondateur et directeur d’APCO Technologies, Aigle. Jean-Marc Rogivue, cofondateur de BEM et NV Terra,

Monthey. Lauréats : MarcFrédéric OTT et Christoph Ott, Leysin American School, Leysin. Griffon Culture Bernard Favre, président de la Fondation Frédéric Rouge, Aigle. Christine Aymon, artiste peintre et sculpteur, Vérossaz. Lauréat : Marc Voltenauer, auteur du roman policier Le dragon du Muveran, Gryon. Griffon Sport Arnaud Guex, ski de fond, Leysin. Mathéo Tüscher, sport automobile, Noville. Lauréat : Sébastien Buemi, sport automobile, Aigle.

Reflets de la Journée des citoyens La Journée des citoyens a réuni près de 80 personnes le 18 septembre à Aigle dans le cadre de la Journée de la Via Francigena organisée par Aigle Région. Après avoir embarqué à bord d’une rame des TPC à destination d’Ollon, les participants ont marché sur les pas de l’archevêque de Canterbury Sigéric, qui chemina ici même en 990. Son itinéraire sert de base de référence à la Via Francigena, chemin de pèlerinage reliant les terres anglo-saxonnes à Rome. Petite célébration œcuménique de circonstance et propos officiels ont précédé le repas servi dans l’ancienne grange du château d’Aigle. Durant l’après-midi, des visites guidées du château étaient proposées ainsi que la découverte en mots et en images de la Via Francigena, de l’Angleterre à l’Italie, en passant par le Chablais. Rendez-vous à l’automne 2017 en terres valaisannes ! 54 ||InspirAction InspirAction||TPC TPC##66– Supplément Association du Chablais

Griffon d’honneur Un Griffon d’honneur a par ailleurs été attribué à l’Abbaye de Saint-Maurice pour sa contribution exceptionnelle à la mise en valeur et au partage de l’histoire et du patrimoine d’un site majeur du Chablais au travers d’un programme d’actions conçu pour le 1500e anniversaire de sa fondation, fêté en 2015.


31e édition du Tour du Chablais L’Association du Chablais organise le Tour du Chablais grâce à l’engagement d’un comité œuvrant pour vous faire courir dans les meilleures conditions. Ses six étapes sont préparées en partenariat avec les sociétés locales et avec le soutien de fidèles sponsors et partenaires. La 31e édition du Tour se déroulera du 19 avril au 24 mai 2017. Pour entamer cette nouvelle décennie, nous vous emmenons voir du pays, de l’embouchure du Rhône au pied des sommets, en passant les coteaux ! Evionnaz ouvrira les feux de cette édition avec un nouveau

parcours. A quelques encablures de là, c’est une voisine du Chablais qui accueillera la deuxième étape : Fully, dont le territoire est limitrophe de celui de Bex. Lac, montagne et vignoble s’enchaîneront ensuite avec les étapes du Bouveret, de Champéry et d’Yvorne. Une fois n’est pas coutume, les dernières foulées prendront de la hauteur : la dernière étape se déroulera à Villars. Pour faciliter vos déplacements, les Transports Publics du Chablais et CarPostal offrent à nouveau la gratuité pour se rendre sur les étapes que

desservent leurs lignes de train ou de bus. Pour un déplacement en toute convivialité et afin de limiter le trafic automobile, une plate-forme de covoiturage est par ailleurs mise à disposition. L’Hôpital RivieraChablais rejoint les partenaires du Tour du Chablais en 2017. Il proposera divers massages par l’intermédiaire des physiothérapeutes de l’établissement. Enfin, Radio Chablais, partenaire média de la première heure, sera comme toujours sur la ligne de départ avec des émissions en direct, des interviews et des reportages.

Devenir Citoyen du Chablais La carte de Citoyen du Chablais vous fait bénéficier de réductions dans plus d’une quinzaine de sites touristiques, culturels et sportifs de la région. Ce sésame vous permet de participer à la Journée des citoyens organisée chaque automne.

Pour obtenir votre carte, il suffit d’adhérer à l’Association. La cotisation pour membre individuel s’élève à CHF 20.– par an. Informations et adhésion : www.association-chablais.ch

Actualités 2017 19 avril-24 mai 31e édition du Tour du Chablais

Printemps Sortie découverte

18 mai Assemblée générale à Vionnaz

Automne Journée des citoyens du Chablais

Renseignements et inscriptions www.association-chablais.ch ou 024 47 33 111

Supplément Association du Chablais – InspirAction InspirAction || TPC TPC ##66||

55


56 ||InspirAction InspirAction||TPC TPC##66– Supplément Association du Chablais


Six cabanes dans un train : du jamais vu à découvrir !

Un train unique, aux couleurs des quatre saisons, rempli de cabanes en bois, de nains de jardin, d’arrosoirs et de mille autres folies … Pour groupes (jusqu’à 50 personnes). Réservation obligatoire au : 024 468 03 41.

c’est Chez Rose, un véritable univers sur rails, fascinant, pour petits et grands !

Trajet : Aigle – Les Diablerets. Aller simple : CHF 350.-Aller retour : CHF 520.--

Une exclusivité décorée par DERIB, Patricia et Frédéric Studer (boutique Calice à Ollon).

InspirAction | TPC # 6 |

57


DÉCOUVERTE Quand le diable se met au vert et s’allie avec les fées…

C’est un jardin extraordinaire…

UNIQUE, la roseraie du Diable Vert est unique. Rien de moins que l’une des dix plus belles du monde ! La très officielle International Rose Societies ne se contente pas de l’affirmer. Elle le certifie. Son délégué a fait le voyage depuis l’Australie avant de lui décerner cette prestigieuse récompense. Mais il y a bien plus à voir et à découvrir dans ce jardin extraordinaire niché aux confins de Bex et de Saint-Maurice…

58 | InspirAction | TPC # 6


InspirAction | TPC # 6 |

59


Si l’arbre ne doit pas cacher la forêt, la rose ne doit pas occulter le jardin ! / A Bex, mille huit cents et

quelques roses réparties en 185 espèces croissent sur une aire plus vaste qu’une piscine olympique. Un enchantement pour les yeux et le nez. Dès l’entrée dans la roseraie, la magie opère. Les tons mêlés – fuchsia, jaune, orange, blanc – foisonnent et ensorcellent. Quelques pas plus loin, l’ivresse vous gagne. Mais le Diable Vert déborde du pré carré de sa roseraie. Il s’agit d’un espace fascinant où – pour sûr ! – fées et lutins ont élu domicile. « On a fait ce que l’on a pu, en tout cas ! s’exclame Dominique Mottet. C’est pourquoi au portail, la maison d’Ansel et Gretel accueille le visiteur. Cette matérialisation d’un conte de fées signifie : “Toi qui entre ici, perd toute peur. Retrouve ton âme d’enfant. Renoue avec ton état d’esprit originel. Souviens-toi de l’époque où tout te semblait possible, avant l’immanquable formatage… Viens et découvre ce jardin…” »

60 | InspirAction | TPC # 6

Magali et Dominique Mottet se consacrent à cette parcelle comme d’autres s’adonnent à la poésie. Avec le soin de l’esthète qui choisit ses mots. Ils définissent quel élément intégrer à tel endroit. Avec amour, ils tentent de donner du sens, de partager. Rien chez eux d’aseptisé ni de tiré au cordeau. Leur création relève plutôt d’une conception « à l’anglaise ». Ainsi cet espace ne s’embrasset-il pas du premier regard. Il faut l’arpenter. Lentement. Découvrir ses coins ombragés. Franchir son pont de bois. Se ressourcer auprès de ses pierres énergétiques. « Pour ressentir, se connecter aux forces du sol, du cosmos, de la nature. » Géobiologue de formation, Dominique s’explique : « Avant que l’on en prenne soin, cette surface ressemblait à une feuille blanche. Maintenant, elle vibre d’énergies de valeurs différentes, comme une cathédrale. Dit de manière moins prétentieuse, c’est le jardin de l’équilibre.

Adieu le diable, bonjour le vert. /


Vues partielles d’un lieu enchanteur ouvert à quiconque souhaite se ressourcer au pays des fées et des lutins ou partir à la recherche des Ansel et Gretel de son enfance…

InspirAction | TPC # 6 |

61


Un coin idéal pour déguster un chocolat chaud maison, feuilleter un bouquin qui traîne ou simplement goûter à la quiétude des lieux…

Ou, en tout cas, celui d’une recherche en ce sens. » Recherche positive, spirituelle et élévatrice, bien sûr. « La précision s’impose puisque le nom de Diable Vert effarouche certains, explique Magali. Nous avons choisi cette appellation en clin d’œil à l’expression au diable vauvert qui signifie : perdu dans la nature. Or, c’est le cas. Et puis cela a tellement verdi ici, que c’en est… divin ! » Apprécier ce jardin des yeux et du nez, c’est déjà bien. Mais l’éprouver de tout son être, c’est mieux encore. Ainsi font les moines bouddhistes du Mont-Pèlerin. D’où leurs visites régulières. « Les avoir vus s’installer d’eux-mêmes sur chacun des hauts points énergétiques (mais invisibles !) pour méditer fut ma plus belle récompense », explique Dominique. Cette évocation ravive un souvenir chez son épouse : « Pendant des mois, une femme fraîchement opérée d’un cancer passait ses après-midi ici et

Percevoir tous sens ouverts. /

disait : “Je me ressource, me recharge.” Elle a sans doute profité de l’énergie du lieu, celle qui me manque tant lorsque je m’en éloigne ! » A ces bienfaits, Dominique et Magali ajoutent encore une conviction. Pour eux, les plantes ont des choses très personnelles et intimes à nous raconter. « Il suffit d’ouvrir son cœur pour les entendre. » S’échapper des lourdeurs du monde. / « Nous sommes des nains de jardin au service de la nature » déclarent ces artisans. « Nous lui donnons juste un coup de pouce pour l’aider à atteindre symbiose et équilibre avec l’environnement, explique Dominique. Reproduit à l’échelle planétaire, cela résoudrait mille choses. Mais notre modeste exemple permet déjà de s’échapper des lourdeurs du monde… » Ouvrant grand le portail de l’espace ouvert à tous, Magali conclut, en philosophe naturaliste : « Si chacun était jardinier, la terre irait mieux… » A méditer… sur place ! Texte : Yves Effrett

62

| InspirAction | TPC # 6


A LA CROIsÉE DEs CHEMIns

Pascal Gertsch – Médecin, sportif d’élite, sauveteur de l’ASD et grand voyageur

Les Ormonts et la Mongolie : comme un air de famille Sans doute l’un des Occidentaux ayant le plus parcouru la Mongolie, l’infatiguable Pascal Gertsch relève des similitudes entre ce pays sauvage et les Ormonts, région où il a longtemps agi en tant que médecin. Ci-dessus : vision du lac d’Arnon, juste derrière la palette d’Isenau au-dessus de Diablerets ? non ! il s’agit du massif de l’Altaï Tavan Bogdt, à l’extrême ouest de la Mongolie.

InspirAction | TPC # 6 |

63


Trois casquettes pour un seul homme. / Dans le Chablais, on ne présente plus Pascal Gertsch, médecin très apprécié des Ormonts. De même, ceux qui ont contribué à sauver l’Aigle – Le Sépey – Les Diablerets savent qu’il compta parmi les plus zélés défenseurs de cette ligne longtemps menacée. Mais qui se souvient du voyage en famille qu’il fit à 15 ans, au Moyen-Orient et dont le magazine Tintin et La Feuille d’Avis d’Aigle publièrent le récit? Et personne, c’est sûr, n’aurait imaginé que ce bourgeois d’Aigle, fort attaché à sa région, aimerait la Mongolie au point de lui consacrer le plus grand livre de photos jamais réalisé sur ce pays. Tel est, en trois mots, le portrait de ce père de six enfants. Ancien sportif d’élite, il enseigne encore le ski de fond (aux Mongols !), pratique toujours la voile et la plongée. Et il bouffe du kilomètre comme d’autres avalent des bonbons. Ainsi a-t-il parcouru

64 | InspirAction | TPC # 6


Ci-contre : une vue chablaisienne prise par Pascal Gertsch depuis la Tornetta, en dessus d’Isenau. Ci-dessous : un glacier mongol entouré de sommets qui, dans ce pays, ne portent pas tous de noms !

septante mille kilomètres entre Les Ormonts et le pays de Chinggis Khaan où il a engrangé, en cinq voyages, plus de cent mille photos. Un livre en guise de trace. / Un chalet témoigne de

l’art du charpentier. Un pont démontre la maîtrise de l’ingénieur. « Rien de tel pour un médecin de campagne. Il ne laisse ici-bas que des croix dans un cimetière ! » Un constat affligeant pour Pascal, source d’une vieille frustration. Une intime conviction, renforcée trois mois après son départ à la retraite : « La Poste des Diablerets tamponnait déjà “Inconnu à cette adresse” sur un courrier écrit à mon attention… Plus trente années d’investissement dans le village s’effaçaient encore plus vite que prévu… » Une première bonne raison de faire un livre venait de naître. Une seconde allait suivre : « Aucun ouvrage sur la Mongolie ne couvre les nombreux

aspects fascinants de ce pays. Voilà comment s’est imposé à moi Mongolie mon amour ! » « Vingt ans durant, je suis allé deux fois par semaine au Japon ! », lâche avec malice l’ancien médecin de la Kumon, école japonaise installée à Leysin. « Une fois retraité, je voulais me rendre, pour de bon, et en voiture, jusqu’au Pays du Soleil Levant. Projet sympathique, exécution difficile. Mais le retour me réserva la plus belle des compensations : un coup de foudre pour la Mongolie ! » Dès lors, l’infatigable Pascal ne cessera de revisiter ce territoire vaste comme trois fois la France et de l’arpenter en tous sens… « D’abord il y a le choc de l’espace. Cette immensité sans cesse renouvelée, vous laisse sans voix, vous purifie. Ensuite, c’est un espace vivant. Même le désert de Gobi grouille de vie : milliers de chèvres en liberté, hordes de chevaux sauvages, meutes de loups

InspirAction | TPC # 6 |

65


Ci-dessus : les montagnes Gurvan saikhan, au sud de la Mongolie et non au nord des Diablerets. Ci-contre : la Tsagaangol ou rivière blanche qui paraît s’écouler du fond de la vallée des Ormonts !

Pascal Gertsch se révèle intarissable sur ce pays méconnu qu’il a parcouru à 5 km/h. « Même avec un véhicule tout-terrain, l’état des pistes et la quasi-absence de panneaux vous impose de lever le pied. Mais rien de tel pour s’émerveiller et capturer la magie des lieux. » En clin d’œil à la façon de voyager de Nicolas Bouvier, le médecin-photographe a enrichi son livre de citations poétiques, « comme un supplément d’âme ». Homme de cœur, de passion et d’engagement, Pascal Gertsch semble s’être toujours ingénié à offrir ce « supplément d’âme » aux causes qu’il a défendues. Celle de l’ASD lui doit beaucoup. Et un jour, la Mongolie réalisera combien il fut l’un de ses ardents ambassadeurs – par l’image –, en plus d’avoir contribué – par ses soins médicaux – au bien-être de plus d’un de ses habitants.

Comme un supplément d’âme. /

qui hurlent la nuit. Rien à voir avec le Sahara, à la faune rarement visible. De plus, à la troublante diversité des espaces s’ajoute l’infinie variété des lumières, selon les saisons. Dramatiques, découpant des pans de ciel et de sol, elles s’offrent sur un plateau au photographe. Enfin, les paysages alpestres de l’Altaï Tavanbog font écho aux montagnes de chez nous. Quant aux Mongols, ils partagent une certaine retenue avec les Ormonans. Entre les propriétaires de yourtes et l’inconnu de passage à qui ils offrent l’hospitalité, la glace fond petit à petit. Mais… plus vite en Mongolie qu’ici ! Sans doute parce qu’à mille milles de toute terre habitée, les rencontres sont rares, donc forcément appréciées, tant de l’éleveur local que du voyageur solitaire. »

Exposition au Musée des Ormonts, à Vers-L’Eglise : Photographies Mongolie Ormonts par Pascal Gertsch et Christophe Racat. Jusqu’au 30 avril 2017 puis du 3 juin au 22 octobre 2017. Texte : Georges Duchauderon Photos : Pascal Gertsch et Grégoire Montangero (portrait de Pascal Gertsch).

66

| InspirAction | TPC # 6


A Leysin, c’est Noël même en été ! 50 francs seulement ! Forfait remontées mécaniques de Leysin valable tout l’été !

Afin d’exaucer les vœux des amateurs de rando et de VTT, Leysin Tourisme a décidé de jouer au Père Noël… en plein été ! Pour une somme dérisoire, vous profitez des remontées mécaniques durant toute la saison. Une offre exceptionnelle qui tombe du ciel !

Oui, je désire commander un forfait, valable tout l’été, sur les remontées mécaniques de Leysin pour 50 francs seulement ! nom

Prénom

Date de naissance Rue nPA E-mail

Localité Tél. portable

Je pratique : [ ] la rando [ ] le parapente [ ] le VTT

ATALC – Office de Tourisme de Leysin route de la Cité 27 – 1854 Leysin info@leysin.ch – 024 493 33 00

Revivons cette fabuleuse expérience à Leysin !



L’HEURE DU THÉ

Pierre qui roule… ne s’arrête pas en si bon chemin

Des pierres à la brillante carrière QUEL EST LE POINT COMMUN entre le château d’Aigle, la cathédrale de Soleure, le Palais fédéral à Berne ou encore la gare centrale de Zurich ? Ils ont tous en eux quelque chose de chablaisien ! Une identité partagée, inscrite dans la pierre…

Le serment des trois suisses qui orne le Palais fédéral de Berne, une colonne de l’Hôtel de ville de Lausanne (sur cette double page) ou encore

une sculpture contemporaine et un encrier ancien (en pages suivantes) : quatre usages, parmi bien d’autres, de la fameuse pierre du Chablais.

InspirAction | TPC # 6 |

69


Deux belles pièces réalisées dans de la pierre d’ici: une grande œuvre sans titre de nathalie Delhaye (100 x 42 x 17 cm), et l’encrier du savant universel bernois, Albrecht von Haller.

Deux variétés de roches tiennent la vedette dans la région : le granit et le calcaire. Le premier provient des blocs erratiques que le glacier du Rhône, tel le Petit Poucet, a semés derrière lui lors de son retrait, il y a près de 10 000 ans. Le second se compose d’anciennes boues déposées par une mer évaporée depuis plusieurs dizaines de millions d’années, avant que les Alpes ne pointent le bout de leurs sommets. Le calcaire se décline en différentes variétés. Chacune sa structure, sa couleur et… ses amateurs ! Sous l’effet du polissage, il prend un aspect marmoréen qui lui vaut le privilège d’être appelé marbre. Granit et calcaire /

Des pierres qui ne laissent pas de marbre / Voilà des siècles que l’on casse du caillou dans le Chablais. Le marbre noir de Saint-Triphon est omniprésent dans la région. Sous le règne de la maison de Savoie, la pierre extraite de

70

| InspirAction | TPC # 6

ses collines prend le chemin du château de Chillon, de la cathédrale de Lausanne ou du prieuré de Romainmôtier. Des morceaux de roche partent même comme échantillons jusqu’à Paris. Les siècles passent sans que l’attrait pour la roche du Chablais ne trépasse. En 1618, Saint-Triphon fournit les pierres destinées au portail de l’hôtel de ville de Genève. Quelques décennies plus tard, on taille les colonnes de celui de Lausanne dans la roche de Truchefardel, à Yvorne. Pierres d’extérieur ou d’intérieur, les marbres extraits des carrières de Saint-Triphon, Yvorne, Roche, Villeneuve ou Collombey agrémentent de nombreux édifices civils et religieux. Sous les doigts du sculpteur Johann Friedrich Funk, la pierre de Truchefardel devient un élégant encrier destiné au célèbre savant bernois Albrecht von Haller (1708-1777), directeur des salines à Roche et vice-gouverneur d’Aigle.


Au Caire, le tombeau du fondateur du premier musée égyptien ouvert

au public provient d’un bloc de roche noire de… saint-Triphon !

La pierre dans le sang / Un nom émerge de cet uni-

vers de pierre, celui de la famille Doret. Durant près de deux siècles, cette véritable dynastie de marbriers exploite avec succès les richesses minérales du Chablais. Elle s’établit à Vevey en 1716 avant de s’installer à Roche, Yvorne et Saint-Triphon. Le maître-autel de la basilique de Saint-Maurice tout comme celui de l’église de Vouvry sont signés Doret. Les marbres du Chablais investissent également les cathédrales de Fribourg et Soleure, sous la forme d’autels. Le gris porcelin ou le jaspé rouge de Roche y côtoient le prestigieux marbre de Carrare. Quant aux bassins de fontaine made in Saint-Triphon, ils se vendent dans le Pays de Vaud et au-delà. La production de David Doret et de ses descendants connaît un rayonnement international. Celui-ci contribue à la diffusion des calcaires chablaisiens aux apparences de marbres italiens non seulement en Suisse, mais également en France, en Italie et en Russie. Alors que rivalisent d’éclat les marbres d’Arvel, de Collombey ou de Saint-Triphon, les blocs erratiques qui parsèment les hauts de Monthey et Collombey subissent les assauts des carriers dès le milieu du

Une carrière internationale /

XIXe siècle. La plupart d’entre eux disparaissent de la nature pour se fondre dans l’architecture, comme à l’église paroissiale de Monthey. En parallèle, de part et d’autre du Léman, on utilise de façon intensive la roche de Meillerie, tandis que Mex apporte sa modeste pierre à l’édifice avec sa carrière d’ardoise active entre 1888 et 1901. L’arrivée du chemin de fer en 1857 favorise le transport des matériaux. De Genève à Bâle et de Lausanne à Winterthour, en passant par Berne et Schaffhouse, les pierres du Chablais essaiment à travers la Suisse, et même jusqu’au pays des pharaons. Dans les jardins du Musée égyptien du Caire repose le tombeau d’Auguste Mariette, fondateur en 1863 du premier musée égyptien ouvert au public. Taillé dans du marbre noir de Saint-Triphon, ce monument confirme qu’au moyen de ses pierres, le Chablais s’est exporté bien au-delà de ses frontières.

Texte : Christian Schülé. Photos : www.parlament.ch (trois Suisses), Grégoire Montangero colonnes de l’hôtel de ville de Lausanne), Bibliothèque de la Bourgeoisie de Berne (encrier de Haller) et Nathalie Delhaye (œuvre).

InspirAction | TPC # 6 |

71


CHABLAIs-CHABLAIs

COIN BOUQUINS Le Chablais s’écrit et s’illustre, alors parlons-en ! Petite sélection de livres réalisée en partenariat avec la librairie A l’ombre des Jeunes Filles en Fleurs, à Monthey.

Animaux des Alpes Claude Morerod , Ed. Glénat, 46 CHF Claude Morerod a photographié la faune des Alpes pendant cinquante ans. Il connaissait bien les secrets des lieux et des bêtes qu’il a observées avec une patience infinie. Il savait interpréter les comportements, lire les traces, débusquer les créatures les plus discrètes. A tel point que les scientifiques l’ont souvent sollicité pour enrichir leurs recherches. Contempler ses photos d’exception en dit parfois plus que le meilleur ouvrage didactique.

72

| InspirAction | TPC # 6

L’Alpe, Dossier eaux-de-vie et liqueurs – L’esprit de la montagne Mary-Claude Busset et al., Ed. Glénat, 28 CHF Le superbe magazine français L’Alpe consacre un dossier complet au Bitter des Diablerets et à son imagerie due au peintre aiglon Frédéric Rouge, ainsi qu’à la reprise qu’en avait fait le grand affichiste zougois Martin Peickert. Ces pages signées de la directrice du Musée des Ormonts reviennent sur toute l’aventure de la boisson des Alpes préférée des Romands.

Le dragon du Muveran par Marc Voltenauer, Ed. Plaisir de lire, 23 CHF Emoi à Gryon : un cadavre gît dans le temple, nu, allongé sur la table sainte. Bras écartés à l’image du Christ crucifié, il horrifie avec ses orbites vides et ensanglantées. Au bout du couteau planté dans son cœur, un message : « si donc la lumière qui est en toi est ténèbres, combien seront grandes les ténèbres ! » Pour l’inspecteur Auer, il ne s’agit là que du premier crime d’une série aussi symbolique que sordide…


Les Monuments d’art et d’histoire du canton du Valais, tome VII. Le district de Monthey Patrick Elsig, Ed. société d’histoire de l’art en suisse, 110 CHF Longtemps située en marge des grandes voies de communication et des centres historiques importants, la région montheysanne n’a vraiment pris son envol qu’au XIXe siècle. Elle est alors devenue l’un des moteurs de l’industrialisation du canton. Le Moyen Âge n’a ainsi guère laissé de monuments marquants. En revanche, sous l’Ancien Régime, l’aristocratie locale prend de l’envergure comme en attestent quelques belles maisons de maître. Dès le milieu du XIXe siècle, l’égalité des droits avec le reste du canton, l’ascension sociale de nombreuses familles, puis l’industrialisation font prospérer la région. La ville de Monthey accuse alors un fort développement qui se lit dans son architecture. si le district de Monthey n’est pas connu sur la scène internationale, il regorge néanmoins de petits trésors qui ont sans conteste leur place dans le patrimoine régional.

Mongolie mon amour – Voyages au hasard des rencontres Pascal Gertsch, Ed. Favre, 58 CHF Mongolie ! Trois syllabes, une consonance féminine pour une fée enchanteresse, presque inaccessible, au bout du monde. Un rêve d’étreinte que tout aventurier, baroudeur ou voyageur intrépide aimerait vivre. Pascal Gertsch, médecin humanitaire sans limite qui a longtemps œuvré aux Diablerets et à la sauvegarde de l’AsD, par ailleurs photographe émérite, nous propose de le suivre, au fil de cinq voyages couvrant plus de 70 000 km pour découvrir ce territoire méconnu – grand comme trois fois la France – loin des clichés habituels.

Les cœurs noircis – Portrait des derniers raffineurs de CollombeyMuraz Michel Zobrist, Yannick Barillon 20 CHF Collaboration entre une journaliste et un photographe, ce livre présente la raffinerie de Collombey-Muraz sous un angle inédit. Les images montrent le visage humain et l’ambiance de l’usine, après l’annonce choc des licenciements de janvier 2015. Les mots témoignent de ces rencontres privilégiées, au cœur de l’une des dernières raffineries de suisse.

Aymon de Savoie, un prince secret Danielle Berrut, Ed. Pierre Philipe, 20 CHF Aymon, prince de la Maison de savoie, du XIIIe siècle est sommé de renoncer à l’amour de Lison, une humble jeune fille qui vit à la cour. La tentative du prince de contourner le veto de son père échoue et Lison disparaît. Dès lors, il n’aura de cesse de la rechercher. Cette quête désespérée le conduira jusqu’aux confins du Comté, dont le château de Chillon, l’exposant aux rencontres les plus imprévisibles… InspirAction | TPC # 6 |

73


Les TPC et Chablais Gourmands présentent

Les déjeuners

ferroviaires

En plus de l’enchantement du parcours BexVillars, dégustez les produits des meilleurs artisans locaux : • plateau de viandes froides et assortiment de fromages • pain artisanal • pomme du verger • tartelette au citron • 1 bouteille de Gamettino (25 cl) • 1 bouteille d’eau CHF 37.– par personne (repas + train aller-retour)

74

| InspirAction | TPC # 6

Offre valable dès 20 personnes. Produit uniquement disponible dans la voiture salon de la ligne Bex–Villars-Bretaye et sur réservation (délai minimum : 5 jours ouvrables). Valable au printemps, en été et en automne. Aucune réduction (AG, Free Access) accordée. Renseignements et réservations : info@tpc.ch – 024 468 03 30


Profitez à fond de la montagne ! Offre valable du 15 au 18 juin 2017

Tarif unique 10 francs (train et télécabine)

Photo : Laurent Pittet.

Découvrez les nouvelles rames de l’AOMC! Allez d’Aigle à Champéry dans des trains modernes et silencieux ! Profitez aussi d’un aller-retour en téléphérique depuis Champéry jusqu’à la Croix de Culet!


Un train tout neuf pour arpenter le Chablais !

Randonnez dans le Chablais, des deux côtés du Rhône, en empruntant le nouvel AOMC (Aigle – Ollon – Monthey – Champéry).

Photo : Micaël Rio.

Découvrez le nouvel AOMC! Sept rames flambant neuve


Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.