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Mieux vaut prévenir que guérir
from Swiss Golf 01-23 FR
by swissgolf.ch
Le golf suisse a pour objectif d'être exempt de produits phytosanitaires de synthèse d'ici à 2030. Cette transition démarre dès maintenant et concerne tous les acteurs du secteur.

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MIRJAM FASSOLD
Dans sa stratégie de durabilité «Golf Course 2030 Suisse», Swiss Golf a inscrit l’objectif de se passer à l’avenir de l’utilisation de produits phytosanitaires chimiques de synthèse (PPh). Le peuple suisse a clairement rejeté interdiction des pesticides de synthèse lors de la votation du 13 juin 2021, mais le sujet reste d’actualité pour les professionnels concernés. L’Office fédéral de l’agriculture (OFAG) a par ailleurs adopté un plan d’action pour la réduction des risques et l’utilisation durable des produits phytosanitaires afin de limiter considérablement les effets négatifs des PPh. Dans l’Union européenne, un premier projet de loi est actuellement en consultation. Il prévoit des restrictions draconiennes dans l’utilisation des PPh. Conséquence: le nombre de produits phytosanitaires disponibles diminue de plus en plus, car les nouvelles autorisations et les ré-homologations sont en net recul.
NOUVEAUX PLANS D’ENTRETIEN
Le passage à un entretien «zéro-phyto» des terrains pose de nombreux défis à la branche. «Un remplacement 1:1 des produits phytosanitaires chimiques n’est pas possible», explique Dirk Kauter, expert indépendant en gazon. «Les produits phytosanitaires biologiques pour les graminées du gazon sont jusqu’à présent quasiment inexistants sur le marché, à l’exception de quelques insecticides.» Les fongicides et les herbicides, importants pour l’entretien des pelouses de golf, font ainsi défaut. Les alternatives sont des mesures d’entretien mécaniques, l’utilisation de fortifiants biologiques pour les plantes et des variétés de gazon plus résistantes. Et la règle est toujours la même: «Les conditions-cadres pour la croissance des plantes doivent être adéquates.» Dans certains cas, cela peut nécessiter un réaménagement de certaines zones du parcours, ajoute Dirk Kauter.
«Dans la pratique, cela signifie mettre encore plus l’accent sur l’entretien préventif et adapter le plan d’entretien en conséquence», précise Yannick Weber, head greenkeeper au Golf&Country Club Zurich et membre de la commission Durabilité de Swiss Golf. «Nous, les greenkeepers, anticipons à quel moment de la saison la pression des maladies est élevée, afin de pouvoir renforcer à temps les graminées par des mesures préventives contre les risques de maladie.»
UN CHANGEMENT DE MENTALITÉ S’IMPOSE
Il n’existe pas de protection à 100% contre les maladies, ni pour l’homme, ni pour les graminées du gazon. «On peut certes renforcer les plantes et les rendre plus résistantes, mais une fois qu’une maladie s’est déclarée, des spores restent dans le sol et, si les conditions climatiques sont ’appro-
LANCEMENT DES ÉTUDES R&A
A l’initiative du R&A, des projets de recherche et développement sur l’entretien du gazon démarrent cette année dans toute l’Europe. Swiss Golf y participe avec deux projets. En collaboration avec les fédérations de golf de Belgique (direction), de Wallonie et du Danemark, un projet de recherche visant à tester des méthodes alternatives pour le contrôle du Dollar Spot sur les greens sera mené jusqu’en 2024. Onze clubs y participent; la Suisse est représentée par le Golfclub Wylihof, le Golf Limpachtal et le Golfpark Moossee, qui disposent tous les trois de parcours certifiés GEO.
La phase d’essai débute le 1er avril et durera jusqu’à fin septembre. Actuellement, les préparatifs sont en cours; il faut notamment définir les surfaces d’essai. «Les activités de jeu doivent y avoir lieu comme d’habitude. Nous allons probablement délimiter les 44 parcelles sur une partie du putting green», explique Michael Burren, head greenkeeper à Wylihof.
priées’, la maladie peut se déclarer à nouveau», poursuit Yannick Weber. «L’élimination ne réussit jamais; mais plus les graminées sont résistantes, moins les dégâts sont importants en cas de nouvelle apparition.»
Dirk Kauter affirme donc avec conviction: «En Europe, nous devrons en partie dire adieu aux parcours de golf ’léchés’, complètement dépourvus de mauvaises herbes.» Sans PPh, le Dollar Spot, la moisissure des neiges et la présence de mauvaises herbes ne pourraient par exemple être contrôlés que de manière limitée à l’heure actuelle. Des mesures d’entretien mécaniques, des hauteurs de coupe et une fertilisation adaptées, de meilleures conditions de croissance et aussi d’autres populations de plantes deviennent donc de plus en plus importantes. En matière de praticabilité des parcours, un changement de mentalité des golfeurs est nécessaire. «Nous devrions peut-être nous souvenir du célèbre Old Tom Morris, le rénovateur du greenkeeping, qui a dit que les golfeurs n’avaient peut-être pas besoin d’un jour de repos, mais que le parcours, en revanche, en avait bien besoin», suggère Dirk Kauter. Dans ce contexte, Yannick Weber fait référence à la journée d’entretien classique, telle qu’on la connaît encore dans un certain nombre de clubs.
UN TRAVAIL LONG ET EXIGEANT
Les Pays-Bas montrent que les golfeurs et golfeuses sont tout à fait prêts à accepter des adaptations, remarque Dirk Kauter. On y fait depuis longtemps des recherches en matière d’entretien «zéro-phyto» des parcours et on l’introduit dans les clubs à l’aide d’un modèle d’échelle. «On se rapproche de l’objectif au fil des ans, en prenant les échelons les uns après les autres et en appliquant les mesures progressivement.» Cela a du sens, car le passage à un entretien «zéro-phyto» ne peut pas se faire du jour au lendemain, estime l’expert en gazon.
«Jusqu’à présent, le thème des fortifiants biologiques pour les graminées de gazon n’a été que peu étudié scientifiquement, et il manque donc des résultats de recherche et des rapports fiables sur lesquels s’appuyer», dit Yannick Weber. L’échange avec des experts en gazon et des collègues professionnels est donc d’autant plus important à ses yeux. «Nous testons nous-mêmes les nouveaux produits sur des surfaces d’essai afin de découvrir ce qui fonctionne sur notre terrain.» Cela prend beaucoup de temps, tout comme la recherche des bons webinaires de différents centres de formation et associations. Les projets internationaux de recherche appliquée, soutenus aussi par le R&A, sont donc extrêmement précieux (voir page 56). •
QUE VEUT DIRE…?
Pesticide — Le terme pesticide désigne de nombreuses substances et combinaisons de substances différentes utilisées comme produits phytosanitaires ou comme biocides. Les pesticides sont toxiques, en particulier pour les plantes (herbicides), les insectes (insecticides) ou les champignons (fongicides). Ils sont conçus pour tuer ou endommager des organismes indésirables et protéger ainsi les cultures. Les biocides sont destinés, eux, à protéger les personnes et les matériaux et sont utilisés dans des produits antiparasitaires, des désinfectants, des peintures de protection ou des produits antibactériens. On peut donc dire que les produits phytosanitaires sont une catégorie de pesticides destinés à protéger les plantes.
Produits phytosanitaires — Sont considérés comme produits phytosanitaires tous les produits utilisés pour protéger les cultures contre les organismes nuisibles aux végétaux. Il s’agit principalement de substances actives naturelles ou synthétiques. En principe, on distingue les produits phytosanitaires organiques (autorisés notamment dans l’agriculture biologique) et les produits phytosanitaires chimiques de synthèse. Ce sont ces derniers qui posent problème et dont on veut pouvoir se passer.
PPh — Abréviation courante pour parler de produits phytosanitaires chimiques de synthèse.
Zéro-phyto — Terme qui désigne l’entretien sans produits phytosanitaires chimiques de synthèse.
Fortifiants pour plantes — Substances et mélanges organiques, minéraux ou microbiens destinés à maintenir la plante en bonne santé. Ils agissent de manière préventive. Les fortifiants sont particulièrement importants dans la protection biologique des plantes.
Dollar Spot — Dans le jargon, «Sclerotinia homoeocarpa» est une maladie du gazon provoquée par un champignon, qui apparaît entre le printemps et l’automne. L’agent pathogène s’attaque exclusivement aux feuilles des herbes. Sur les greens en particulier, ce champignon peut fortement nuire à la qualité du gazon. L’aspect des dégâts provoqués est caractéristique et a donné son nom à la maladie. Selon la hauteur de coupe des graminées, il se forme de grandes taches rondes de la taille d’une pièce d’un dollar, qui se distinguent nettement du gazon sain par leur aspect de paille.