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Au jour le jour!
Un joueur du circuit européen participe, en moyenne, à 25 compétitions dans l’année, qui sont toutes différentes les unes des autres. Climat, dessin du parcours, qualité du gazon, les éléments à prendre en compte sont nombreux. Mais la façon d’aborder la compétition reste la même. Le Français Grégory Havret a accepté de nous décrire, après chaque tour, comment il abordait le parcours de l’Omega European Masters.
Grégory Havret est un pro heureux. En 2007, il a remporté le Scottish Open disputé à Loch Lomond, en battant en play-off l’Américain Phil Mickelson. Cette année, le week-end avant l’Open de Suisse, il a gagné le Johnnie Walker Championship qui se disputait à Gleneagles, encore en Ecosse, grâce à un putt décisif sur le 72ème et dernier trou. Pour le plus «écossais» des Français, la saison était d’ores et déjà réussie en arrivant sur le Haut Plateau valaisan, puisque ce résultat lui a permis de remonter à la 29ème place de l’Ordre du Mérite eu- ropéen et à la 85ème place du World Ranking.
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Mais est-ce qu’il est difficile de se remotiver après avoir remporté un tournoi et assuré l’essentiel de ses objectifs pour 2008? «Bonne question! Je dirais, non, car j’essaie d’aborder chaque tournoi de la même manière. Mais en revanche, si mon score part en vrille, je peux dire honnêtement que je ne vais pas m’accrocher avec autant d’âpreté que d’habitude… Mais l’Open de Suisse est un tournoi particulier, qui a une histoire impressionnante et qui représente une ligne prestigieuse dans un palmarès. Inutile de dire que j’adorerais le remporter et précisément cette année, pour réaliser un doublé après l’Ecosse! En outre, je me retrouve maintenant à la 85ème place du World Ranking, ce qui est mon meilleur classement. Et si je parvenais à entrer dans les 50 premiers, les portes de tous les tournois majeurs et de toutes les grandes épreuves du calendrier, notamment celles du World Golf Championship, me seraient ouvertes. C’est un objectif ambi- tieux, mais cela peut arriver très vite. Si l’on m’avait dit la semaine passée que je pointerais à la 85ème place aujourd’hui, je ne l’aurais pas cru!»

Un wedge de plus
La première tâche du souriant Grégory était de préparer son sac pour affronter les pièges du parcours Severiano Ballesteros. «Comme les greens sont bombés et que je sais que je vais en manquer quelques-uns, il faut que j’emporte un wedge supplémentaire, pour être à l’aise au chipping. J’enlève donc mon fer 3 du sac et je prends un lobwedge à 62°, qui complète les deux autres wedges que je joue habituellement (52°et 58°).» Ensuite, il a fait un petit récapitulatif de la stratégie: «Les greens sont petits et très bien défendus, si bien que je ne vais pas être trop agressif. Je vais observer attentivement l’emplacement des drapeaux, pour attaquer ceux-ci lorsqu’ils sont accessibles ou au contraire jouer le milieu du green quand les positions sont trop dangereuses. La clé à Crans-
Montana est le petit jeu. Le terrain n’est pas spécialement long et les fairways sont assez larges, donc tout se joue aux approches et au putting.»


Premier tour
Jeudi 4 septembre. Départ sur le trou No10 à 8h20, en compagnie de PerUlrik Johannson et de Johan Edfors. Température évoluant entre 10 et 15 degrés, averses soutenues en début de matinée et devenant éparses. Grégory est très détendu après sa partie, il répond gentiment aux enfants qui lui quémandent sa casquette, sa balle, son gant ou qui le sollicitent pour un autographe.
«J’ai joué -1 et je suis plutôt satisfait, car n’importe quel score en dessous du par est un bon score à Crans-Montana. J’ai simplement manqué quelques putts et c’est dommage car les greens sont dans un état parfait. Bien meilleurs que la semaine passée. Et la pluie n’a pas réellement perturbé le jeu, ce qui suppose qu’il y aura de bons scores. Il n’y avait pas de vent non plus. Donc le parcours ne peut que s’endurcir…»
Second tour
Vendredi 5 septembre. Départ sur le trou No10 à 13h20 avec les mêmes joueurs que la veille, comme c’est la coutume sur le PGA European Tour pour les deux premières parties d’un tournoi. Température de près de 20°, avec un foehn extrêmement soutenu et soufflant parfois en bourrasques, donc dans des directions changeantes! Après un ultime bogey sur le 18 il avait envoyé son second coup au mi- lieu des tribunes… - Grégory boucle les deux premiers tours en 145 coups, soit à 3 coups du cut. Son attitude avec les jeunes qui le bousculent à la sortie du green ne change pas, malgré la déception de ne pas pouvoir jouer le week-end. Un vrai gentleman. «Hier c’était humide, mais sans vent et aujourd’hui ce fut sec, mais terriblement venteux. Donc des conditions de jeu plus pénibles que la veille. Quand le vent souffle pareillement, je me méfie surtout du vent latéral, qui peut emporter un coup mal négocié. Notamment sur les pars 3. Sinon, je n’ai pas de stratégie particulière. Je joue un coup après l’autre, en m’adaptant à chaque situation. Je suis prudent lorsque le drapeau est dangereux et plus agressif autrement. Seulement, aujourd’hui, mes coups de fers n’étaient pas performants, au contraire de mes mises en jeu. Et j’ai plutôt mal putté. Cela ne remet pas en cause le fait que je me sente bien dans mon jeu actuellement. C’est un incident ponctuel, très passager j’espère. Mais il faut aussi être honnête et avouer que le parcours de CransMontana ne me convient pas particulièrement. Car en huit tentatives, je n’ai passé le cut qu’une seule fois!»
Grégory Havret a ensuite rejoint son hôtel, pour boucler sa valise et rentrer à la maison, dans le sud de la France, pour retrouver sa famille l’espace d’un week-end. Il reprendra ensuite la route pour l’Allemagne, où un nouveau tournoi l’attend. Avec un «gameplan» adapté au parcours et de nouvelles ambitions.
«La faculté d’adaptation» est d’ailleurs la qualité qui compte le plus chez un joueur professionnel, obligé qu’il est de changer de pays chaque semaine, de climat, de type de cuisine, d’ambiance et surtout de parcours. Sans cette versatilité, sans cette aptitude à digérer de nouvelles conditions, la carrière n’est tout bonnement pas envisageable. Et certains Suisses devraient s’en rappeler à l’heure d’envisager un passage chez les pros…
■ Jacques Houriet