JTO N°2/2016

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JOURNAL TUNISIEN D’OPHTALMOLOGIE

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1ÈRE PARTIE : MISE AU POINT LES ABCÈS DE CORNÉE APRÈS CHIRURGIE RÉFRACTIVE ................................................................................................................................... 4 Rim Kahloun, JiheneNemria, NesrineAbroug, Anis Mahmoud, Sonia Zaouali, Salim Ben Yahia, BechirJelliti, Moncef Khairallah BLEPHAROPLASTIE INFERIEURE TRANSCONJONCTIVALE (BITC) : INTERET, INDICATIONS, TECHNIQUE, RESULTATS, LIMITES........... 7 Wathek Cheima, Khallouli Asma, Maalej Afef, Rannen Riadh PHYSIOPATHOLOGIE DE L’ŒDÈME MACULAIRE DIABÉTIQUE : DONNÉES RÉCENTES ................................................................................. 10 R Messaoud1, W Ammari1, A Mahmoud1, S Mbarek1, I Khairallah-Ksiaa1, Bouzayane M, N Lahmar1, M Khairallah2

2ÉME PARTIE : ARTICLES ORIGINAUX EPIDÉMIOLOGIE DES ENDOPHTALMIES POST OPÉRATOIRES AU CHU FARHAT HACHED DE SOUSSE ..................................................... 18 Knani Leila ; Bouzayène Malak ; Ben Hadj Salah Wassim ; Mahjoub Ahmed ; Mohamed Ghorbel ; Mahjoub Hechmi ; Fafani Ben Hadj Hamida LES VASCULARITES RÉTINIENNES CHEZ L’ENFANT : PROFILS ÉPIDÉMIOLOGIQUES, CLINIQUES ET ÉTIOLOGIQUES .......................... 22 Saadouli D1, Yahyaoui S2, Choker A1, El Matri K1, Sayadi J1, Ammar F1, Dhouib N1, Mallouch N1, El Afrit MA1 IDIOPATHIC JUXTAFOVEAL TELANGIECTASIS GROUP 1 IN A TUNISIAN POPULATION ................................................................................. 25 A. Maalej1, J. Sayadi1, C. Wathek, S. Ben Yahia2, R. Rannen1 PEMPHIGOÏDE OCULAIRE CICATRICIELLE SÉVÈRE : À PROPOS DE 5 CAS .................................................................................................... 29 Khochtali S, Hachicha G, Zina S, Ksiaa I, Anene S, Zaouali S, Khairallah M LES ENDOPHTALMIES POST OPÉRATOIRES : RÉSULTATS THÉRAPEUTIQUES ET PLACE DE LA VITRECTOMIE PREMIÈRE.................. 33 Imen zghal; Amine souguir; Olfa fekih; Omar Romdhane; Zgolli Hssouna; Sayedi Jihène; Malek Inès ; Leila Nacef LA PARALYSIE CONGÉNITALE DE L’ÉLÉVATION D’UN ŒIL : ASPECTS CLINIQUES ET THÉRAPEUTIQUES ............................................... 41 Khochtali S, Gatfaoui F, Bouabana A, Mahmoud A, Attia S, Zaouali S, Khairallah M LE SYNDROME PSEUDO-EXFOLIATIF DANS LA CHIRURGIE DE LA CATARACTE. ........................................................................................... 44 ZoneAbid I, Gargouri S, Châabane M,Turki R, Ben Amor S , Sellami D, Feki J LES TRAUMATISMES OCULAIRES À GLOBE OUVERT DE L’ENFANT. ................................................................................................................ 48 Inès Malek, Jihene Sayadi, Olfa Fekih, Mekni Madiha, Omar Romdhane, Zghal Imene, Nacef Leila.

3ÉME PARTIE : CAS CLINIQUES EVOLUTION NATURELLE DE LA DYSTROPHIE MACULAIRE PSEUDOVITELLIFORME DE L’ADULTE : APPORT DE L’OCT-SPECTRAL DOMAIN ........................................................................................................................................................................................................................ 56 BOURAOUI R, BOULADI M, MGHAIETH F, SAMMOUDA T, MASMOUDI A, LIMAIEM R, CHAKER N, EL MATRI L EXTENSION ORBITAIRE D`UNE MUCOCÈLE FRONTO-ETHMOÏDALE: À PROPOS D’UN CAS CLINIQUE ....................................................... 58 Saadouli D, yahyaoui S, Ammar F, Sayadi J, Choker A, El Matri K, Dhouib N, Mallaouch N, El Afrit MA LE TRAITEMENT DE NEUROPATHIES OPTIQUES TRAUMATIQUES : SUJET DE CONTROVERSE EN 2016 ................................................... 60 Ammari W; Bouzaiene M; Mahmoud A; Ksiaa I; Kochtali S; Mbarek S; Messaoud R, Khairallah M. CHIRURGIE DE LA CATARACTE COMPLIQUÉE D’OCCLUSION DE LA VEINE CENTRALE DE LA RÉTINE, À PROPOS DE DEUX CAS. ..... 64 A W.Zbiba, A.Baba, E.Buayed, E.Kallel, M.Rekik, N.BenAbdessalem, M.Lahdhiri,.Elleuch SYNDROME DES TACHES BLANCHES ÉVANESCENTES ET MULTIPLES ........................................................................................................... 67 Zahaf Amin, Sellami Dorra, Abid Imen, Hriz Amir, kharrat Wassim, Feki Jamel LA NANOPHTALMIE : PARTICULARITÉS THÉRAPEUTIQUES ET PRONOSTIC. A PROPOS DE QUATRE OBSERVATIONS ........................ 70 Knani Leila ; Mahjoub Ahmed ; Gatfaoui Faten ; Krifa Fethi ; Mahjoub Hechmi ; Ben Hadj Hamida Fafani

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Mise Au Point

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LES ABCÈS DE CORNÉE APRÈS CHIRURGIE RÉFRACTIVE Rim Kahloun, JiheneNemria, NesrineAbroug, Anis Mahmoud, Sonia Zaouali, Salim Ben Yahia, BechirJelliti, Moncef Khairallah Service d’Ophtalmologie, Hôpital Universitaire Fattouma Bourguiba, Faculté de Médecine, Université de Monastir, Monastir, Tunisie Pas de conflit d’intérêts pour tous les auteurs Ce travail a été soutenu par le Ministère de l'enseignement supérieur et la recherche de la Tunisie.

INTRODUCTION La chirurgie réfractive est actuellement une méthode très répandue pour la correction des troubles de la réfraction[1]. Elle permet une récupération rapide de l’acuité visuelle avec unfaible taux de complications pouvant menacer le pronostic visuel[2,3].Les kératites infectieuses après laser in situ kératomileusis (LASIK) et photofératectomie réfractive (PKR) représentent actuellement une complication de plus en plus reconnue de la chirurgie réfractive[4].

EPIDÉMIOLOGIE Selon les cas rapportés dans la littérature, la fréquence des infections post-LASIK varie de 0,02% à 1,5% [5].Sa fréquence est sous-estimée du fait des cas non déclarés. LesCocci Gram positif (S. aureus, S. pneumoniae, S. viridans, S. epidermidis, Nocardia, Rhodococcus) et les mycobactéries(M. chelonae, M. abscessus, M. szulgai, M. fortuitum, M. mucogenicum) sont les plus germes les plus incriminés dans les kératites infectieuses après chirurgie réfractive [3,5]. D’autres germes ont été rapportés tel que Pseudomonas aeruginosa et Acanthamoeba. Des infections fongiques sont aussi incriminées dans les infections post-LASIK tel que candida, Fusarium, Aspergillus, Curvulariaet Scedosporium. Des infections polymicrobiennes ont été aussi rapportées [5].

FACTEURS DE RISQUE Les facteurs de risque d’infections après LASIK sont multiples[6,7] et peuvent être liés à des facteurs locaux ou liés au terrain. Les facteurs locaux sont dominés par la pathologie palpébrale tel que les blépharites et le syndrome

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sec oculaire[8].La dénervation cornéenne post LASIK associée à une blépharite sont probablement la cause d’un syndrome sec favorisant l’infection cornéenne, d’où l’intérêt d’un examen systématique de la surface oculaire (paupières, BUT) et d’une bonne hygiènepalpébrale avant LASIK. Les antécédents de chirurgie cornéenne représentent aussi un facteur de risque d’infection post LASIK[8]. Les facteurs liés au terrain comportent la profession (les personnels de la santéont un haut risque d’infection par staphylocoqueaureus), Toxicomanie, HIV, Diabète, dialyse, ainsi que les lésions dermatologiques[9-13]. D’autres facteurs de risque sont liés à des erreurs d’asepsie (instruments chirurgicaux contaminés: lame de microkératome, champs, gants, eau de robinet contaminée…)[5].

ETUDE CLINIQUE Il n‘ya pas de signes cliniques spécifiques permettant d’orienter le diagnostic étiologique. La symptomatologie est celle d’une irritation oculaire avec photophobie, larmoiement et rougeur oculaire. La lésion peut se présenter sous plusieurs formes : infiltrat focalisé, unique, central, périphérique, superficiel ou stromal[14] (Figures 1 et 2). Une réaction de la chambre antérieure peut être associée. Le diagnostic étiologique serait orienté surtout par le délai d’apparition de la kératite après LASIK ; en effet une infection précoce(survenant dans les 2 premières semaines après chirurgie réfractive) oriente vers des Cocci G+, alors qu’une infection retardée (survenant entre 2semaines et 3 mois après chirurgie réfractive) oriente vers une infection fongique ou par des mycobactéries [15,16].


JOURNAL TUNISIEN D’OPHTALMOLOGIE Toutefois on doit différencier l’infection proprement dite, d’une kératite lamellaire diffuse (DLK ) qui correspondà des opacités fines et limitées à l’interface cornéenne survenant sur un œil relativement calme dans les jours suivant l’opérationavec absence d’infiltrats stromauxet absence de réaction de la chambre antérieure.Ces infiltrats répondenttrès bien aux corticoïdes topiques[5,8].

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TRAITEMENT Le traitement serait en fonction du germe isolé. Les recommandations de l’ASCRS (American Society of Cataract and RefractiveSurgery) 2005 [15]sont de soulever le volet stromal, faire un grattage, un examen direct et mise en culture dans des milieux de culture appropriés, y compris gélose du sang, gélose de chocolat, gélose de Sabouraud, et bouillon thioglycolate ainsi que les milieux de Lowenstein-Jensen ou Middlebrook 7H-9 agar lorsqu’une infection à mycobactéries atypiques est suspectée. Pour le traitement d’attaque une irrigation du stroma par vancomycine 50mg/ml pour les infections précoces (< 2 semaines) etparAmikacine35mg/ml pour les infections tardives (> 2 semaines) est préconisée. Pour les infections précoces,les recommandations indiquent une fluoroquinolone de quatrième générationcomme la gatifloxacine0,3% ou la moxifloxacine 0,5% par voie topique en alternance avec la cefazoline 50 mg/mL toutes les 30minutes pour augmenter l’activité bactéricide contre les organismes à Gram positif. Les patients qui travaillent dans l’hôpitalprésentent un risque supplémentaire d’infection à staphylocoque aureus méthicilline résistant (MRSA). Chez ces patients, il est recommandé de substituer lacefazoline par la vancomycine50 mg / mL topique, associée à une antibiothérapie orale à base de doxycycline 100 mg deux fois par jour pour inhiber la production de collagénase. Pour les kératitesd’apparition retardée(> 2 semaines). On préconise l'amikacine 35 mg / mlen alternance avec une fluoroquinolone de 4ème génération toutes les 30 minutes par voie topique,

Figure 1: Photographie du segment antérieur de l’œil droit d’un patient âgé de 30 ans montrant des petits infiltrats cornéens contigus centraux à trois semaines après LASIK pour myopie.

Figure 2:Photographie du segment antérieur de l’œil gauche d’un patient âgé de 44 ans montrant 2 infiltrats cornéens stromaux associés à un ulcère cornéen et un œdème du volet (flèche).

Recommandations del’ASCRS Soulever le volet cornéen Examen direct et mise en culture

Début infection < 2 semaines -

Irrigation du stroma par vancomycine 50mg/ml Traitement topique:

fluoroquinolone 4

ème

Début infection > 2 semaines -

génération

(gatifloxacine 0,3% ou moxifloxacine 0,5%)

enalternance toutes les 30 minutes avec :

en alternance toutes les 30 minutes avec :  -

la cefazoline 50 mg/mL ou vancomycine 50 mg / mL (si suspicion MRSA) doxycycline 100 mg peros (2 prises journalières si suspicion MRSA)

Irrigation du stroma par Amikacine 35mg/ml Traitement topique :  l'amikacine 35 mg / ml

-

 une fluoroquinolone de 4ème génération doxycycline100 peros (2 prises journalières).

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associée à la doxycycline100 peros (2 prises journalières). Une greffe de cornée serait indiquée pour les infections sévères ou résistantes au traitement.

PREVENTION La prévention des kératites post-chirurgie réfractive repose sur[15] :  Un bon examen de la surface oculaire (paupières, BUT)  Une bonne hygiène palpébrale quelques jours voire quelques mois avant LASIK dans le cas de pathologie palpébrale.  Une asepsie rigoureuse.  L’éducation du patient : éviter le contact avec les animaux, le jardinage et la natation pendant la période péri-opératoire.  Eviter les corticoïdes en post-opératoire Une Antibioprophylaxie serait utile et devrait être utilisée pendant quelques jours après l'opération[17].

CONCLUSION Les Kératites infectieuses après chirurgie réfractive est une complicationpeu fréquente mais grave pouvant menacer le pronostic visuel.Son diagnostic peut être retardé lorsqu’elle est prise pour une kératite lamellaire diffuse. Les Cocci Gram+ et les mycobactériesatypiquesconstituent de loin les germes les plus fréquemment en cause d’où la nécessité d’une antibioprophylaxie ciblée.

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BLEPHAROPLASTIE INFERIEURE TRANSCONJONCTIVALE (BITC) : INTERET, INDICATIONS, TECHNIQUE, RESULTATS, LIMITES Wathek Cheima, Khallouli Asma, Maalej Afef, Rannen Riadh Service Ophtalmologie. HMPIT. 1008 Mont Fleury. Tunis.

RESUME : La meilleure connaissance des complications et des limites de l’abord externe dans la blépharoplastie a suscité un nouvel intérêt dans l’abord transconjonctival. La voie transconjonctivale est une technique relativement récente. Elle autorise par sa voie d’abord un excellent accès aux loges graisseuses de la paupière inférieure. Cette technique est grevée d’un taux de complications plus réduit que la voie transcutanée habituelle, notamment par l’absence de rétraction de la paupière inférieure. Mots clés : chirurgie esthétique, paupière, voie d’abord

I- INTRODUCTION La BITC a connu un important gain d’intérêt chez les chirurgiens. Développée dans le but d’éviter les malpositions palpébrales et les problèmes de cicatrisation cutanée, elle permet la résection graisseuse et est souvent associée à d’autres moyens de resurfaçage cutané (laser CO², peeling chimique, injections de toxine botulique) [1, 2, 3].

Le sulcus : formé médialement par le creux lacrymal et latéralement par la jonction palpébrojugale. Les modifications cutanées : amincissement cutané, diminution de l’élasticité, hyperpigmentation [5].

II- EFFETS DE L’AGE SUR LA PAUPIERE INFERIEURE (PI): Avec l’âge une démarcation de plus en plus accentuée se crée entre la paupière inférieure et la joue créant ainsi un effet d’ombre. Le vieillissement de la PI peut être assimilé à la création de deux convexités une supérieure et l’autre inférieure séparées par un sulcus [4]. La convexité supérieure : due à la pseudoherniation de la graisse orbitaire qui est le résultat de :  -laxité septale  -affaiblissement du ligament de Lockwood. La convexité inférieure : Déplacement du paquet graisseux malaire qui est sujet à une lipoatrophie et une descente gravitationnelle.

Figure 1 : [7] : 1. Déformation lacrymale 2. Jonction palpébro jugale * : Loge graisseuse latérale Flèche : Condensation du ligament de Lockwood

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III-TYPE D’ANESTHÉSIE : Trois procédés sont envisageables :  Anesthésie locale pure.  Anesthésie locale approfondie par des tranquillisants administrés par voie intraveineuse.  Anesthésie générale classique.

IV-TECHNIQUE OPERATOIRE :

Cependant, plusieurs manœuvres ciblées associées sont décrites, permettant d’améliorer l’efficacité de la BITC tout en étant secure tel que :  transposition de graisse  transfert autologue de graisse  pinch cutané [7]

VI-AVANTAGES DE LA BITC :       

absence d’incision cutanée moindre risque de rétraction palpébrale absence de risque d’ectropion possible resurfaçage simultané de la peau accessibilité plus facile à l’étage moyen de la face durée plus courte taux de complications moins important [7, 8]

VII-RESULTATS :

Figure 2 : [6]

a. Rétraction de la partie centrale de la paupière inférieure à l’aide d’un rétracteur de Desmarres. b. Incision conjonctivale à 5 mm du bord inférieur du tarse en évitant le fornix (approche rétroseptale) permettant un abord direct des poches graisseuses, le muscle oblique inférieur doit être vu afin d’éviter sa section ou son traumatisme. c. Excision de la graisse extériorisée après une légère pression du globe. On commence par la poche latérale puis médiane puis médiale. Une bonne hémostase est nécessaire afin d’éviter la formation d’hématomes. d. Suture conjonctivale par du fil résorbable 5/0.

Un délai de 1 à 6 mois est nécessaire pour réellement apprécier le résultat. L’intervention aura le plus souvent permis supprimer les hernies graisseuses, rectifiant ainsi l’aspect vieilli et fatigué du regard. Les résultats d’une blépharoplastie sont en règle générale parmi les plus durables de la chirurgie esthétique. L’ablation des poches est pratiquement définitive, et ces dernières ne récidivent habituellement jamais [7]. En revanche, la peau continue à vieillir et la laxité en résultant peut, à la longue, reproduire le plissement des paupières. Pour autant, il est rare qu’une nouvelle intervention soit envisagée avant une douzaine d’années [9].

V-INDICATIONS : L’indication la plus largement posée pour une BITC est le traitement de la pseudoherniation légère à modérée de la graisse chez les patients jeunes avec une laxité cutanée minime. La littérature voit de plus en plus une expansion de ses indications et ce en raison des avantages de cette voie d’abord.

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Figure 3 : aspect pré et à 15 jours post BITC chez un patient de 39 ans notant une discrète sous correction droite (loge médiale).


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REFERENCES :

Figure 4 : aspect à 15 J et à 1 mois post BITC chez une patiente de 48 ans : résultat parfait.

VIII-COMPLICATIONS ENVISAGEABLES : Elles sont exceptionnelles. Il faut cependant citer, malgré leur grande rareté habituelle :  Les saignements sont rarement sérieux, sauf trouble de la coagulation associé.  Hématome et épanchement lymphatique, apparaissent exceptionnellement au décours d'une blépharoplastie correctement réalisée. Ils peuvent nécessiter leur évacuation.  Trouble de la sécrétion des larmes : larmoiement pouvant persister quelques semaines, ‘’syndrome d’œil sec’’ pré existant et révélé par l’intervention.  Diplopie le plus souvent transitoire par atteinte de l’oblique inférieur.  sous correction ou une surcorrection [10]

1- Bourguet J. Les hernies graisseuses de l’orbite: Notre traitement chirurgical. Bull Acad Natl Med 1924;92:1270–1272 2-Tessier P. The conjunctival approach to the orbital floor and maxilla in congenital malformation and trauma. J Maxillofac Surg 1973;1:3–8 3- ZaremHA, Resnick JI. Expanded applications for transconjunctival lower lid blepharoplasty. Plast Reconstr Surg 1991;88:215–220 4-Haddock NT, Saadeh PB, Boutros S, Thorne CH. The tear trough and lid/cheek junction: anatomy and implications for surgical correction. Plast Reconstr Surg 2009;123:1332–1340 5-Flowers RS. Canthopexy as a routine blepharoplasty component. Clin Plast Surg 1993;20:351–365 6-D Korchia, F Braccini, J Paris, JM Thomassin. Transconjunctival approach in lower eyelid Blepharoplasty. Can J Plast Surg 2003;11(3):166170 7- Ryan M. Collar, Sofia Lyford-Pike, Patrick Byrne. Algorithmic approach to lower lid blepharoplasty. Facial Plast Surg 2013;29:32–39 8-Valente JH, Jay GD, Schmidt ST, et al. Digital imaging analysis of scar aesthetics. Adv Skin Wound Care 2012;25:119–23 9-M. B. Kashkouli, F. Pakdel, V. Kiavash, L. Ghiasian, A. Heirati, M. JamshidianTehrani.Transconjunctival Lower Blepharoplasty: A 2-Sided Assessment of Results and Subject’s Satisfaction. Ophthal Plast Reconstr Surg 2013;29:249–255 10-Netscher DT, Patrinely JR, Peltier M, et al. Transconjunctival versus transcutaneous lower eyelid blepharoplasty: a prospective study. Plast Reconstr Surg 1995;96:1053–60.

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PHYSIOPATHOLOGIE DE L’ŒDÈME MACULAIRE DIABÉTIQUE : DONNÉES RÉCENTES R Messaoud1, W Ammari1, A Mahmoud1, S Mbarek1, I Khairallah-Ksiaa1, Bouzayane M, N Lahmar1, M Khairallah2 1 2

Service Ophtalmologie, EPS Tahar Sfar Mahdia

Service Ophtalmologie, EPS Fattouma Bourguiba Monastir

I- INTRODUCTION La Rétinopathie diabétique (RD) correspond à la localisation rétinienne de micro-angiopathie diabétique, c’est la complication microvasculaire la plus commune du diabète. Elle constitue l'une des principales causes de cécité dans le monde, chez les adultes de 20 à 74 ans. L’œdème maculaire diabétique (OMD) est une cause importante de malvoyance chez les patients atteints de RD. Sa fréquence chez les patients diabétiques est variable selon les séries et selon le stade de la RD, elle est estimée en moyenne à 10% [1]. L’hyperglycémie est le facteur de risque déterminant pour le développement de l’OMD [2, 3]. Des études récentes ont montré que la RD ne serait pas uniquement l’expression d’une maladie purement vasculaire, et ont démontré le rôle important de l'inflammation dans la genèse et la progression de la RD et de l’OMD [4-6].

II- MECANISMES IMPLIQUES DANS LA GENESE DE L’ŒDEME MACULAIRE DIABETIQUE : La pathogénie de l’OMD est multifactorielle, dans laquelle l'hyperglycémie joue un rôle important par le biais de plusieurs anomalies métaboliques, pariétales et hémorhéologiques [7].

II.1. Facteurs déclenchants : 1- Anomalies métaboliques : 1.1. Voie des polyols : Dans la voie des polyols, le glucose excédentaire est d’abord réduit en sorbitol par l’aldose réductase (Figure 1). Le sorbitol étant ensuite oxydé par la

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sorbitol déshydrogénase en fructose, avec réduction parallèle du cofacteur NAD+ en NADH [8]. Parmi les conséquences de l’activation en excès de cette voie par l’hyperglycémie chronique, la diminution du rapport NADP+/NADPH, responsable de la non-régénération du glutathion réduit et de l’aggravation du stress oxydant.

Figure 1. Voie des polyols.

1.2. Glycation non enzymatique des protéines : La glycation non enzymatique des protéines entraîne des altérations de leur structure et de leurs fonctions [3,4]. L’exemple type de cette glycation est la formation d’hémoglobine glyquée (HbA1C). Les réactions de glycation prennent leur origine dans le milieu intracellulaire à partir du glucose, mais aussi du fructose et d’autres produits de la glycolyse (Figure 2). Ces produits, plus réactifs que le glucose, forment les produits de la glycation avancée (Advanced glycation end-products ou AGE). La formation des AGE semble endommager les cellules par plusieurs mécanismes [7] tels que la modification de protéines intracellulaires impliquées dans la régulation de la transcription génique, la modification des molécules de la matrice extracellulaire responsable d’un


JOURNAL TUNISIEN D’OPHTALMOLOGIE dysfonctionnement cellulaire, et la diffusion des précurseurs des AGE dans la circulation et la modification les protéines dans le sang, tels que l'albumine.

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1.5. Agression radicalaire ou stress oxydatif : L’hyperglycémie chronique est à l’origine d’une production accrue d’espèces oxygénées réactives (ROS) [7,8]. Les systèmes épurateurs des radicaux libres une fois dépassés, ceux-ci exerceraient un effet direct sur l’ADN, activant le PARP, qui inhibe la GAPDH, responsable d’une augmentation de production de diacyl-glycérol qui active la protéine kinase C et de méthyl-glyoxal qui active la production des AGE [9].

2. Anomalies hémorhéologiques :

Figure 2. Glycation non enzymatique des protéines

1.3. Activation de la protéine kinase C : La protéine kinase C (PKC) est activée par le diacyl-glycérol (DAG), produit en excès par l’hyperglycémie, ou indirectement, via les AGE et leur récepteur RAGE, par l’augmentation du flux de glucose dans la voie des polyols, et enfin par l’augmentation de l’agression radicalaire [2]. Les conséquences pathologiques de l’activation de la PKC sont multiples : anomalies de la régulation du flux sanguin rétinien et rénal par réduction de la production de l’oxyde nitrique (NO) et/ou augmentation de l’endothéline 1, augmentation de la perméabilité endothéliale, augmentation du VEGF, hyperproduction de la matrice extracellulaire, surexpression du PAI-1(inhibiteur de la fibrinolyse), et activation du facteur de transcription nucléaire (NF-κB) des cytokines inflammatoires.

Plusieurs anomalies de la crase sanguine ont été rapportées au cours de la RD avec un état d’hypercoagulabilité:  Modifications érythrocytaires avec diminution de la déformabilité des érythrocytes  Altération de la fonction plaquettaire avec hyperadhésivité et hyperaggégabilité plaquettaire  Hyperviscosité sanguine avec troubles de l’hémostase  Augmentation de la laminine (Masmiquel 1999).

3. Anomalies pariétales : Plusieurs anomalies pariétales sont décrites expliquant l’hyperperméabilité et les occlusions capillaires au cours de la RD [10]:  Altération et perte des péricytes  Atteinte de la BHR interne avec prolifération des cellules endothéliales  Atteinte de la BHR externe avec altération de l’épithélium pigmentaire

1.4. Voie des hexosamines :

II.2. Conséquences :

L’activation de la voie des hexosamines par l’hyperglycémie chronique conduit à une augmentation de la production du TGF-α, TGF-β et PAI-1, et amplifie les effets géniques du NF-κB.Le NF-κB est activé par divers stimuli, tels que l’augmentation des concentrations de glucose intracellulaire, le stress oxydant, les cytokines proinflammatoires, l’angiotensine II, l’activation des récepteurs RAGE par les AGE [7]. Activé, le NFκBlui-même active les gènes du VEGF, du TGF-α, de l’IL-β, du récepteur AGE, et des molécules d’adhésion (VCAM-1).

Les anomalies déjà décrites sont souvent intriquées et sont responsables de l’OMD et de l’ischémie rétinienne :  Augmentation du flux sanguin avec vasodilatation des capillaires et perte de l’autorégulation du flus sanguin (stade précoce)  Rupture des BHR avec hyperperméabilité capillaire. Au début de la RD il existe une atteinte de la BHR interne qui est compensée par les capacité de resorption l’épithélium pigmentaire (OMD infraclinique). Par la suite survient une atteinte de la BHR externe

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responsable d’un OMD cliniquement évident avec ou sans exsudats. Ischémie rétinienne, lorsque cette ischémie est étendue elle est responsable de l’apparition d’une néovascularisation prérétinienne et prépapillaire. Cette néovascularisation est stimulée par plusieurs facteurs angiogéniques dont le VEGF (Vascular Endothelial Growth Factor) qui est à la fois un puissant facteur angiogénique et d’hyperperméabilité capillaire responsable de l’OMD.

Sur le plan physiopathologique, l’OMD peut être aggravé par plusieurs facteurs systémiques et/ou oculaires [11-12]:  Pression hydrostatique  (HTA)  Pression oncotique capillaire  (néphropathie, hypoprotidémie) 

Pression veineuse centrale  (insuffisance cardiaque)

Hyperlipidémie

Pression veineuse rétinienne  (occlusion veineuse)

Traction vitréenne sur la macula

Inflammation oculaire (uvéites)

Chirurgie (cataracte)

Laser (PPR)

IIIPHYSIOPATHOLOGIE L’OMD, DONNEES RECENTES :

DE

Le VEGF a été pendant longtemps le facteur le plus étudié pour expliquer la pathogénie de la RD et de l’OMD [4-6]. C’est une cytokine vaso-active avec un effet angiogénique et d’hyperperméabilité. Cependant il a été rapporté récemment que les antiVEGF étaient efficaces pour traiter la néovascularisation de la RDP, et que leur effet était transitoire et partiel sur l’OMD: plus de 50% des patients gardent un OMD à an (DRCR network study). Depuis ces constations, plusieurs nouvelles études ont montré que l’inflammation est un acteur important dans la pathogenèse de l’OMD [4-12] (Tableau I).

Tableau I : Mécanismes inflammatoires impliqués dans la pathogénie de l’œdème maculaire diabétique [4-12]: - Expression des molécules d’adhésion ICAM1 et VCAM1 au niveau de l’endothélium - Adhésion des leucocytes aux vaisseaux rétiniens (leucostase) - Expression des cytokines et des facteurs de croissance - Activation des cellules microgliales - Infiltration par des monocytes et des neutrophiles (diapédèse) - Hyperperméabilité vasculaire (OMD) et néovascularisation (RDP) - Apoptose des cellules rétiniennes

1. Facteurs inflammatoires : L’inflammation jouerait un rôle central dans la pathogénie de l’OMD, et ce par le biais de différents médiateurs (cytokines) et des cellules de l’inflammation (polynucléaires neutrophiles et macrophages). Il a été rapporté que le taux des biomarqueurs de l’inflammation était élevé aussi bien dans le sang et au niveau du vitré et de la rétine (Tableau II).

1.1. Facteurs systémiques : Le Taux sanguin de polynucléaires neutrophiles était plus élevé chez les sujets diabétiques par rapport aux sujets normaux. De même ce taux était plus élevé en présence d’une RD qu’en son absence, il était aussi corrélé à la sévérité de la RD [13]. Plusieurs autres facteurs inflammatoires systémiques sont impliqués dans la progression de l’OMD (Tableau II). Les biomarqueurs systémiques qui ont été largement étudiés sont : la protéine C–réactive (CRP) et les molécules d’adhésion cellulaire (les sélectines, ICAM-1 soluble, et VCAM-1 soluble) [11, 12]. Des études cliniques ont établi une corrélation entre les concentrations sériques de l’IL- 1 bêta, TNF- alpha, et le VEGF, et la présence et la sévérité de la RD [14-18]. Le VEGF est un facteur pro-inflammatoire important qui est considéré comme la molécule clé dans la pathogenèse de la RD. Ses concentrations sériques élevées semblent être associées au développement de la RDP et de l’OMD [14].

1.2. Facteurs locaux: Les niveaux de chémokines et de molécules d'adhésion cellulaire ICAM-1 sont élevés dans l’humeur aqueuse et dans le vitré des sujets atteints

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JOURNAL TUNISIEN D’OPHTALMOLOGIE de RD (Tableau II). Suzuki et al, ont rapporté que les niveaux d'interleukines IL-6, IL- 8 (CXCL8), IL- 10 (CXCL10), IL- 13, IP- 10, MCP- 1(CCL2), MIP- 1b (CCL4), de PDGF et de VEGF dans le vitré sont significativement élevés à tous les stades de RD [11-15]. La corrélation positive entre les niveaux d'IL-6 et l'épaisseur maculaire indique que l'IL-6 jouerait un rôle important dans le développement de l'OMD [14-15]. De même les niveaux vitréens de VEGF, ICAM- 1, IL- 6 et de MCP-1 semblent être corrélés à l’hyperperméabilité vasculaire rétinienne et à la gravité de l’OMD [11-25]. Tableau II : Biomarqueurs inflammatoires de la rétinopathie et de l’œdème maculaire diabétique [11-25] Facteurs systémiques

Facteurs locaux (Humeur aqueuse / Vitré)

IL-1bêta, IL-6, IL-8

IL-6, IL-8(CXCL8), IL-

TNF-alpha

10(CXCL10), IL13, IP-10

VEGF

TNF-alpha

CRP (Protéine C– réactive)

VEGF

Sélectines

RANTES, MCP-1béta(CCL2),

ICAM-1 soluble et VCAM-1

MSP-1(CCL4)

MCP-1, CCL2, RANTES,

Protéines de liaison

SDF1-alpha

lipopolysaccharidiques

IL-2R soluble, IL-6

CD14 soluble

2. Rôle de l'inflammation dans l'altération de la barrière hémato-rétinienne chez les patients diabétiques: L'un des facteurs impliqués dans la genèse de l’OMD est l'adhérence des leucocytes à la microvascularisation (leucostase) [25]. L'adhérence des leucocytes dans la rétine diabétique est associée à la perte de cellules endothéliales et à la rupture de la barrière hémato-rétinienne[11]. Elle est facilitée par l'augmentation de l'expression des molécules d'adhésion telles que, ICAM-1 et P-sélectine, sur l'endothélium et de son contre-récepteur au niveau des leucocytes CD18 [4,11,24,25]. Le rôle de la migration des leucocytes du sang vers le tissu rétinien (diapédèse), est considéré comme la conséquence de la rupture de la BHR. Il a été démontré que la diapédèse survient dans la rétine lorsque les leucocytes et l'endothélium sont activés [11]. Le processus de diapédèse est déclenché par l'altération des protéines de jonction dans les

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cellules endothéliales. Les études ont montré que les molécules de jonction intercellulaire se dissocient lors de la migration des leucocytes. Les cytokines inflammatoires comme le TNF-α et le VEGF diminuent les niveaux des protéines des jonctions serrées (occludine et ZO-1) et la protéine de jonction adhérente (VE-cadhérine) pour augmenter la perméabilité vasculaire [11,25]. Les angiopoïétines représentent une autre famille de facteurs de croissance inflammatoires qui se lient à la tyrosine kinase du récepteur Tie2, et sont des modulateurs importants del'angiogenèse. Les niveaux vitréens de l'Ang-2 sont significativement plus élevés chez les patients présentant un œdème maculaire cliniquement significatif(CSME), indiquant le rôle de Ang-2 dans l'altération de la barrière hémato-rétinienne [22]. La perte des péricytes est un élément bien connu au cours de l’OMD, plusieurs facteurs seraient à l’origine de cette perte :  Augmentation du BAX : Facteur proapoptotique de la famille Bcl-2  Augmentation du taux de certains facteurs de croissance : TNF-α, TGF-β Augmentation du taux d’Ang-2/Tie-2 qui produit l'apoptose des péricytes Il est désormais évident que les MMP (métalloprotéinases matricielles) jouent également un rôle important dans la pathogenèse de l’OMD. Les niveaux vitréens de protéases, comme MMP2 et MMP9, est plus élevé chez les sujets diabétiques avec RD que chez les sujets diabétiques sans RD. Des études ont également montré que les MMP provoquent le recrutement des leucocytes et la dégradation protéolytique de la VE-cadhérine [11,25]. Diverses études ont montré que les chémokines sont significativement plus élevées au cours de la RD, et la chémokine la plus retrouvée dans le sérum et dans le vitré est la CCL2[11]. Le ligand des chémokines2 (CCL2), également connu sous le nom de monocytes protein-1(MCP-1) joue un rôle important dans l'inflammation vasculaire en induisant le recrutement et l'activation des leucocytes. L'hyperglycémie augmente la production de CCL2/MCP-1au niveau des cellules endothéliales vasculaires rétiniennes, des cellules de l’épithélium pigmentaire et des cellules de Müller[23-25].Des études récentes préliminaires

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(ARVO abstract, 2011) indiquent que l'inhibition sélective du gène CCL2peut empêcher la rupture de la BHR au cours du diabète.

IV. CONCLUSION : Grâce à une meilleure connaissance des mécanismes et des médiateurs impliqués dans la genèse de l’OMD, il apparait que le VEGF ne serait pas le seul facteur impliqué dans la survenue de cette complication chez les patients atteints de RD. La pathogénie de l’OMD est plutôt multifactorielle, dans laquelle les biomarqueurs de l’inflammation joueraient un rôle central (Figure 3). La connaissance de tous ces facteurs ouvrira certainement de nouvelles perspectives dans le traitement de l’OMD dans un avenir plus moins proche.

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Diabète sucré

Augmentation des molécules d’adhésion (ICAM-1, VCAM-1)

Adhésion leucocytaire aux cellules endothéliales

Libération des médiateurs de l’inflammation (VEGF, TNF-α, Ang-2, chémokines)

Leucocytostase

Rupture des jonctions des cellules endothéliales, perte des péricytes, capillaires acellulaires

Altération et rupture de la BHR

Œdème maculaire (OMD)

Figure. 3 : Pathogénie de l’œdème maculaire diabétique (OMD)[11].

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Articles Originaux

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EPIDÉMIOLOGIE DES ENDOPHTALMIES POST OPÉRATOIRES AU CHU FARHAT HACHED DE SOUSSE Knani Leila ; Bouzayène Malak ; Ben Hadj Salah Wassim ; Mahjoub Ahmed ; Mohamed Ghorbel ; Mahjoub Hechmi ; Fafani Ben Hadj Hamida Service d’ophtalmologie, CHU F Hached, Sousse Faculté de médecine Ibn Jazzar, Sousse

Résumé : Introduction : Les endophtalmies post opératoires sont des infections profondes de l’œil. Il s’agit d’une réponse inflammatoire post opératoire du contenu oculaire suite à une invasion bactérienne, fongique ou parasitaire. Le but de notre travail est d’étudier les aspects épidémiologiques à propos de 58 cas d’endophtalmie post-opératoire. Matériel et méthode : Il s’agit d’une étude rétrospective de 58 patients (58 yeux) présentant une endophtalmie post opératoire, hospitalisés dans le service d’ophtalmologie FarhatHached de Sousse entre Janvier 2007 et Décembre 2012.Ont été exclues de notre étude les endophtalmies post-traumatiques, les endophtalmies secondaires à des infections de surface et les endophtalmies endogènes.Nous avons revu les caractéristiques épidémiologiques des patients, ainsi qu’une revue des chirurgies pratiquées à travers une étude des dossiers. Résultats : Cinquante huit patients (58 yeux) présentaient une endophtalmie post opératoire. L’âge moyen était de 63 ans avec des extrêmes de 18 à 87 ans. Vingt huit patients ont été opérés par des médecins spécialistes de libre pratique et 30 patients ont été opérés dans notre service. Ainsi, l’incidence hospitalière de l’endophtalmie post opératoire était de0.38%. Un diabète a été retrouvé chez 14 patients (24.1%) et une immunodépression chez 3 patients (5.1%).Une endophtalmie post opératoire était survenue après chirurgie de la cataracte chez 41 patients (70.6%), après chirurgie vitréo-rétinienne chez 7 patients (12%), après trabéculectomie chez 6 patients (10.3%), après une kératoplastie chez un patient (1.7%) et après injection intra-vitréenne chez 2 patients (3.4%). Le délai d’apparition des symptômes était inférieur à 7 jours chez 38 patients (65.5%). Quarante quatre patients ont eu immédiatement et sans délai une injection intravitrénne d’antibiotiques. Une vitrectomie a été réalisée chez 31 patients. Conclusion : Les endophtalmies survenant après chirurgie réglée demeurent une complication grave et redoutée. La chirurgie de la cataracte, vu sa fréquence, constitue la première cause. Le premier souci doit être avant tout préventif dans le respect des précautions élémentaires d’asepsie et d’antisepsie. La prévention de l’endophtalmie post-opératoire a beaucoup bénéficié des injections intra-camérulaires de céfuroxime.

INTRODUCTION Les endophtalmies post opératoires sont des infections profondes de l’œil. Il s’agit d’une réponse inflammatoire post opératoire du contenu oculaire suite à une invasion bactérienne, fongique ou parasitaire.

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Leur pronostic est souvent gravissime avec un risque important de malvoyance voire de perte anatomique du globe oculaire. Cette affection a bénéficié des évolutions des techniques opératoires et des nouvelles molécules antibiotiques.Nous rapportons 58 cas d’endophtalmie post opératoire et discutons les caractéristiques épidémiologiques de cette affection.


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MATERIEL ET METHODES Il s’agit d’une étude rétrospective de 58 patients (58 yeux) présentant une endophtalmie post opératoire, hospitalisés dans le service d’ophtalmologie FarhatHached de Sousse entre Janvier 2007 et Décembre 2012.Ont été exclues de notre étude les endophtalmies post-traumatiques, les endophtalmies secondaires à des infections de surface et les endophtalmies endogènes. Nous avons revu les caractéristiques épidémiologiques des patients, ainsi qu’une revue des chirurgies pratiquées à travers une étude des dossiers.

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Six patients ont reçu 1mg de céfuroxime(Zinnat®) en fin d’interventions (antibioprophylaxie instaurée dans le service depuis Septembre 2011). Quarante quatre patients ont eu immédiatement et sans délai une injection intravitréenne : 1 mg de vancomycine + 2 mg de ceftazidime. Un traitement antibiotique par voie générale et un traitement topique à base de collyres antibiotiques, corticoïdes, mydriatiques et cycloplégiques était prescrit chez tous nos patients. Une vitrectomie a été réalisée chez 31 patients.

RESULTATS Cinquante huit patients (58 yeux) présentaient une endophtalmie post opératoire: 28 cas ont été opérés par des médecins spécialistes de libre pratique et 30 patients ont été opérés dans notre service. Ainsi, l’incidence hospitalière de l’endophtalmie post opératoire était de0.38%. L’âge moyen était de 63 ans avec des extrêmes de 18 à 87 ans, 82.4% des patients étaient âgés de plus de 50 ans.Il s’agissait de 20 femmes et 38 Hommes avec un sex ratio de 1.9. Un diabète a été retrouvé chez 14 patients (24.1%) et une immunodépression chez 3 patients (5.1%). Une endophtalmie post opératoire était survenue après chirurgie de la cataracte chez 41 patients (70.6%) (extraction extra capsulaire manuelle pour 23 patients, et phacoémulsification pour17 patients), après chirurgie vitréo-rétinienne chez 7 patients (12%) (vitrectomiepour 6 patients, et ablation de Silicone dans un cas), après trabéculectomie chez 6 patients (10.3%), après une kératoplastie chez un patient (1.7%) et après injection intra-vitréenne chez 2 patients (3.4%) (bévacizumab pour un patient et acétonide de triamcinolone pour l’autre) (Figure 1). Pour la chirurgie de la cataracte, une complication peropératoire a été notée chez 4 patients (6.7%) à type de rupture capsulaire. Le délai d’apparition des symptômes était inférieur à 7 jours chez 38 patients (65.5%).

Figure1 : répartition des patients selon le type de chirurgie.

DISCUSSION Les études épidémiologiques concernant les endophtalmies post opératoires sont nombreuses et retrouvent des résultats variables en fonction des populations étudiées et du type d’étude. Une étude prospective et multicentrique, menée dans 64 centres hospitaliers français sous l’égide du GEEP [1], durant l’année 1988, avait rapporté une incidence de l’infection oculaire de 0,32% après chirurgie réglée ce qui se rapproche de l’incidence de l’endophtalmie dans notre étude. La moyenne d’âge des patients de notre étude était de 63 ans. Elle est inférieure à celle de l’EndophthalmitisVitrectomyStudy (EVS) (75 ans) [2] et celle de l’étude française GEEP (77 ans) [1]. La survenue de l’endophtalmie chez des jeunes diabétiques expliquerait cette moyenne d’âge dans notre série. Les facteurs favorisants peuvent être des facteurs locaux : les anomalies palpébrales, les conjonctivites, les blépharites, les kératites, les antécédents d’uvéite chronique et l’existence d’une prothèse oculaire controlatérale. Les foyers infectieux périoculaires, dentaires, ORL ou

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pulmonaires constituent aussi des facteurs de risque locaux décrits [3]. Des études récentes ont montré le rôle prépondérant joué par la flore microbienne conjonctivale dans la contamination intra-oculaire. Dans l'EVS, 71 des 105 patients (67.7%) présentant une endophtalmie postopératoire à staphylocoque coagulase négative avaient pour origine la conjonctive du patient [1]. La chirurgie de seconde intention s’accompagne selon Kattan [3] d’un taux plus élevé d’infections, 0.3% contre 0.072% dans la chirurgie de première intention. Les facteurs favorisants sont aussi généraux : le diabète est généralement admis comme facteur de risque d’endophtalmie même s’il n’est pas mis en évidence dans toutes les études [4,5]. Une étude multicentrique française [6] a retrouvé un taux identique d’endophtalmie qu’il ait ou non de diabète. Cependant, une étude Australienne [7] rétrospective sur 13 ans retrouve plus de 30.7% de cas d’endophtalmies chez les diabétiques. Dans notre série le diabète était le facteur de risque le plus prédominent. En effet 24.1% de nos patients étaient diabétiques. Le risque de survenue d’endophtalmie est le plus élevé pour la chirurgie de cataracte et notamment après extraction intracapsulaire du cristallin par rapport aux autres techniques de chirurgie de cataracte [8,9]. La durée de l’intervention semble être un facteur déterminant dans le risque de survenue d’une endophtalmie. Ainsi, une durée de l’intervention supérieure à 60 minutes serait à l’origine d’une fragilisation des tissus oculaires et exposerait au risque infectieux [10]. Pour la chirurgie de la cataracte, l’issue de vitré multiplierait par 4 le taux d’endophtalmie selon une étude rétrospective de Javitt et coll [11]. Deux facteurs interviendraient, la rupture de l’effet protecteur de la capsule qui favoriserait la colonisation bactérienne du vitré et l’allongement du temps opératoire qu’elle entraine. Néanmois, si l’étude EVS [2] affirme que de tels incidents (rupture capsulaire postérieure, issue du vitré et vitrectomie antérieure) augmentent le risque d’endophtalmie, l’étude GEEP [12] ne valide pas statistiquement ce risque. L’implantation secondaire dans la chirurgie de cataracte serait correlée à un taux d’endophtalmie multiplié par 4 par rapport à la chirurgie de première intention [3].

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Actuellement, suite aux études rétrospectives suédoises et l’étude prospective randomisée de l’ESCRS, il est fortement recommandé d’utiliser l’injection intracamérulaire de 1 mg de céfuroxime en fin de chirurgie chez les patients non porteurs d’allergie à la pénicilline avec une diminution significative des taux d’endophtalmie[10, 15].

CONCLUSION Les endophtalmies survenant après chirurgie réglée demeurent une complication grave et redoutée. La chirurgie de la cataracte, vu sa fréquence, constitue la première cause. Le premier souci doit être avant tout préventif dans le respect des précautions élémentaires d’asepsie et d’antisepsie. La prévention de l’endophtalmie post-opératoire a beaucoup bénéficié des injections intracamérulaires de céfuroxime.

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LES VASCULARITES RÉTINIENNES CHEZ L’ENFANT : PROFILS ÉPIDÉMIOLOGIQUES, CLINIQUES ET ÉTIOLOGIQUES Saadouli D1, Yahyaoui S2, Choker A1, El Matri K1, Sayadi J1, Ammar F1, Dhouib N1, Mallouch N1, El Afrit MA1 1 Service d’ophtalmologie CHU la Rabta 2 Service de pédiatrie C Hôpital d’enfant

Résumé : Les vascularites rétiniennes sont rares chez lʹenfant, de part leurs complications, elles peuvent mettre en jeu le pronostic visuel et parfois même vital, dʹoù lʹ`intérêt d`une enquête étiologique exhaustive. Nous avons mené une étude rétrospective de 13 cas de vascularite rétinienne chez lʹenfant, dans le but dʹétayer les particularités épidémiologiques et cliniques.

Mots clés : Enfant, vascularite rétinienne, uvéite, toxoplasmose oculaire

INTRODUCTION Les vascularites rétiniennes (VR) est un ensemble de maladies caractérisées par une inflammation vasculaire rétinienne [1]. Il s’agit d’une manifestation rarement décrite chez l`enfant, mais grave pouvant mettre en jeu le pronostic visuel et parfois même vital [2]. Peu dʹétudes épidémiologiques se sont intéressées à ce sujet. Nous avons procédé à une étude rétrospective de toutes les vascularites rétiniennes chez l`enfant sur une période de 16 ans, dans le but d`étayer les particularités épidémiologiques et cliniques des vascularites rétiniennes de l’enfant.

MATERIEL ET METHODES On a mené une étude rétrospective portant sur 17 yeux de 13 enfants présentant une vascularite rétinienne colligés de janvier 1998 à décembre 2011. Tous les patients ont bénéficié d’un interrogatoire des parents et de lʹenfant quand l`âge le permet ; dʹun examen ophtalmologique complet : mesure de lʹacuité visuelle avec correction de loin

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et de prés plus examen complet à la lampe a fente ; d’une angiographie rétinienne en fluorescéine ; un bilan étiologique de première intension comprenant un examen pédiatrique un bilan biologique des sérologies virales, parasitaires (toxoplasmose et toxocarose) et de la syphilis en plus de la radiographie du thorax et de lʹintradermoréaction à la tuberculine. Sinon le reste de l’enquête étiologique était orienté par les résultats de l’interrogatoire et de l`examen clinique.

RESULTATS Nous avons recensé 13 cas de vascularite rétinienne chez l`enfant. L’âge moyen des patients était de 10 ans avec des extrêmes de six et 14 ans, le un sexe ratio était de 2,25. Le motif de consultation était une baisse de la vision dans 64.7% des cas, une rougeur oculaire dans 23,5% et des myodésopsie dans 11,8% des cas. L’atteinte était bilatérale chez 4 patients. Une uvéite était associée dans 13 yeux (76,5% des cas), soit une uvéite antérieure dans 5,8% de tout les cas (un œil), uvéite postérieure a été notée dans 17,6% (3 yeux), et une panuvéite dans 52,9% (9 yeux). Selon le type du vaisseau atteint, nous avons notés une périphlébite chez 12


JOURNAL TUNISIEN D’OPHTALMOLOGIE malades (15 yeux) et une artérite bilatérale chez une malade présentant un lupus érythémateux systémique (LES). Les étiologies étaient : la toxoplasmose (5 yeux), la toxocarose (3 yeux), le syndrome de Voght Koyanagy Harada (VKH) (3 yeux), le LES (2 yeux), la maladie de Behçet (2 yeux). Aucune étiologie n’a été retrouvée chez un patient présentant une atteinte bilatérale (fig.1). Une occlusion veineuse a été observée dans 1 œil et une ischémie rétinienne dans 3 yeux.

Tableau 1 : formes anatomo clinique des uvéites en fonction de l`étiologie Etiologies

Type anatomique

Toxoplasmose

3 PAN, 2 UP

Toxocarose

3 PAN

VKH

2 PAN, 1 UP

LES

Pas d`uvéite associée

Behçet

2 UA

Idiopathique

Pas d`uvéite associée

PAN= panuvéite, UP= uvéite postérieure, UA= uvéite antérieure

Nous avons noté une évolution favorable dans la plus part de nos cas et ceci sous traitement spécifique

Figure.1: Angiographie rétinienne chez un enfant présentant une VR bilatérale d`origine idiopathique

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DISCUSSION Nous avons colligé sur une période de 13 ans, 13 cas de vascularite rétinienne de l’enfant, avec un âge moyen de 10 ans. Les vascularites rétiniennes chez l’enfant restent relativement rares, peu d’articles rapportent la prévalence isolée de cette affection sans qu’elle soit associée à une uvéite [3]. Selon la littérature les VR de l’adulte sont l`apanage du sujet jeune de sexe masculin, ce qui est en concordance avec nos résultats, en fait le sexe ratio dans notre série était de 2,25. [4] La VR est rarement isolée, elle est souvent associée à une uvéite [1]. Dans notre série, on la trouve dans 76.5% des cas, la panuvéite étant la forme clinique la plus fréquente (neuf yeux sur 13). Contrairement à la littérature, où les uvéites de l’enfant sont le plus souvent bilatérales que chez l’adulte, nous avons trouvé une prédominance des atteintes unilatérales. Ceci pourrait être expliqué par la prédominance des causes non systémiques [5]. Compte tenu du faible nombre d`études sur ce sujet, les données publiées permettent difficilement d’établir avec précision les fréquences relatives des principales causes de vascularite rétinienne pédiatrique. [6] La toxoplasmose et toxocarose sont parmi les causes infectieuses fréquentes pour cette VR [6], la fréquence est variable entre 24 et 56 % des cas au cours de la toxoplasmose oculaire. Cette fréquence élevée de formes sévère pourrait être expliquée par une consultation tardive chez l`enfant [8]. En présence de VR, il faut savoir évoquer ce diagnostic, et toujours rechercher un foyer de choriorétinite à distance. La maladie de Behçet est rare chez l’enfant, mais la fréquence de l’atteinte oculaire est variable 0,4% a 76% [7], Laghmari trouve deux cas de VR associée à une panuvéite et ceci parmi 13 cas. On la trouve dans notre série chez un malade ayant une atteinte bilatérale. La VR au cours du LES est rare chez l’enfant, et elle est dans ce cas de type artérite. Dans notre série, on trouve un de nos malade ayant un LES qui s’est présenté pour VR à type d`artérite bilatérale Le syndrome de VKH survient lui aussi rarement chez l'enfant (3 à 5,9 % des cas) [6]. il faut y penser devant toute VR associée à une uvéopapillite.

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CONCLUSION Les vascularites rétiniennes chez l’enfant constituent une pathologie rare mais grave car elles peuvent compromettre le pronostic visuel mais également vital des enfants. Une enquête étiologique exhaustive doit être conduite impérativement. Le pronostic visuel dépend essentiellement de l’étiologie mais également de la précocité de la prise en charge clinique et thérapeutique

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3Ennouri Amine. LES VASCULARITES RETINIENNES: ETUDE RETROSPECTIVE DE 54 CAS. Thèse pour le diplôme national de doctorat en médecine Présentée et soutenue publiquement le 04/11/2011 4- I Mili Boussen, I Letaief, W Zbiba, Trabelsi Omar, N Ben Younnes, J Abid, S Azzabi, N Khalfallah, Khalil Erraies, A Ouertani. Les vascularites rétiniennes: profil épidémiologiques, cliniques et étiologiques. Journal francais d`ophtalmologie 2010; 33: 529-537 5- A Chebil, L Chaabani, F.Kort, N Ben youssef, F Turki, L. Elmatri. Étude épidémiologique des uvéites de l’enfant : à propos de 49 cas. Journal Français d'Ophtalmologie. 2012 ; 35 : 30-35 6-Brézin A. Les uvéites. Rapport de la société française d’ophtalmologie Paris: Masson (2010). 7- lamaldie de Behçet chez l`enfant, aspects cliniques et evolutifs : a propos de 13 cas. M Laghmari. A, Karim, F.Allali, A.Elmadani, W Ibrahimi, N,Hajjaj Hassouni, T.Chkili, A Elmalki Tazi, Z Mohcin. J FR Ophtalmol, 2002 ; 25,9 : 904-908 8- Manuel Garza-Leon and Lourdes Arellanes Garcia. Ocular Toxoplasmosis: Clinical Characteristics in pediatric patients. Ocular Immunology & Inflammation, 20(2), 130–138, 2012


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IDIOPATHIC JUXTAFOVEAL TELANGIECTASIS GROUP 1 IN A TUNISIAN POPULATION A. Maalej1, J. Sayadi1, C. Wathek, S. Ben Yahia2, R. Rannen1 1. Military Hospital of Instruction Tunis, department of ophtalmology 2. Fattouma Bourguiba Hospital, department of ophthalmology, Monastir

Purpose: To describe the clinical, angiographic and tomographic characteristics of idiopathic juxtafoveal telangiectasis (IJT) group 1 in 7 Tunisian patients and to investigate functional outcomes. Methods: Analytic and descriptive study of 7 patients with idiopathic juxtafoveal telangiectasis recorded during the period 2009 to 2014. Diagnosis was based on biomicrosopic and fluorescein angiographic findings and the groups according to the Gass and Blodi classification. A complete and bilateral ophthalmologic examination, fluorescein angiography and optical coherence tomography (OCT) were performed in all patients. Results: In the57-year period of the study, a total of 7 patients with IJT were seen; the mean visual acuity was 3.8/10. OCT showed cystoid macular edema in all affected eyes, central cyst in 50% of cases. Factors of poor functional outcome found in group 1 were the subgroup 1A, the central macular thickening and the central cyst. Conculsion: The current case series provides a baseline data about IJT group 1 and confirms the importance of OCT to provide valuable information as to the diagnosis and natural course of the disease. Key Words: Idiopathic juxtafoveal retinal telangiectasia, juxtafoveal retinal telangiectasia, parafoveal telangiectasis, perifoveal telangiectasis, retinal telangiectasis, aneurysmal telangiectasis, macular edema, Gass classification, OCT, functional outcome.

INTRODUCTION Idiopathic juxtafoveal telangiectasis (IJT) is characterized by the presence of an area of ectatic and incompetent retinal capillaries in the foveolar region in absence of other known causes for retinal telangiectasis. Idiopathic juxtafoveal telangiectasis may be congenital or acquired, and has been classified by Gass and Blodi into three groups. [1] The group 1 is a developmental or congenital, usually unilateral vascular anomaly, which may be part of the larger spectrum of Coats disease. The group 2, a presumably acquired bilateral form found in middle-aged and older persons. The group 3, very rare, occlusive idiopathic retinal telangiectasis which can be associated with central nervous system vasculopathy.

MATERIALS AND METHODS We reviewed the medical records of 7 patients (8 eyes) with IJT presenting to Military Hospital of Instruction in Tunis and Fattouma Bourguiba Hospital in Monastir between 2009 and 2014. Patients with secondary juxtafoveal telangiectasis caused by retinal venous obstruction, irradiation, and intraocular inflammation were excluded from this study. All patients provided a detailed medical and ocular history. A full clinical examination, including indirect ophthalmoscopy and slit lamp biomicroscopy with the Goldmann contact lens, was performed. Analyzed clinical features included age at diagnosis, gender, systemic disease, chief complaint, laterality, best corrected visual acuity

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(BCVA) and the stage of the disease according to Gass and Blodi classification [1]. (Table 1) Digital fundus photography, digital fluorescein angiography (FA) and OCT were carried out for all patients.

RESULTS During the 5-year period of the study, a total of 7 patients with IJT group 1 were seen. All of them were male. Patients ranged in age from 25 to 58 years with a mean age of 47 years at presentation. The medical history was noncontributory except for hypertension in one patient and diabetes mellitus in another patient. There was no evidence of related systemic diseases. The disease was unilateral in six patients including 4 right eyes and 2 left eyes and bilateral in one patient (Eight eyes in total). Six eyes were classified as group 1A and two eyes were classified as group 1B. The patient with bilateral IJT showed IJT group 1A in the right eye and IJT group 1B in the left eye. (Table 2) At the time of initial examination, the median visual acuity in the affected eye was 3.8/10 (range from 1/20 to 10/10). The consistent feature of the microangiopathy was the presence of multiple capillary, venular, and arteriolar aneurysms. These aneurysms involved an irregularly round or oval zone centered temporal to the foveola in 75% of eyes (Fig 1). The zone was 1 to 2 disc diameters (DD) in 25% of eyes, 2 to 4 DD in 50% of eyes and greater than 4 DD in 25% of eyes. In three eyes (37.5%) associated aneurysms were found in the peripheral retina. No extramacular macroaneurysms were seen. Varying amounts of yellow exudate at the outer margin of the zone of telangiectasis was noted in 100% of eyes classified as group 1A but not in the group 1B. Two patients (25%) had minimal, patchy nonperfusion or capillary ischemia. No patient had preretinal neovascularization despite the presence of capillary ischemia.

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Blunted right-angle venules, superficial retinal crystalline deposits, intraretinal pigment plaques and subretinal neovascularization were absent. Optical coherence tomography (OCT) demonstrated cystoid macular edema in all cases. Clinical, angiographic and tomographic characteristics of IJT group 1 are summarized in table 3. Factors of poor functional outcome found in group 1 were the subgroup 1A, central macular thickening and the central cyst. Serous retinal detachment was not correlated to the visual acuity.

Table 1. Gass and Blodi Classification (1993) : Group 1: 1A: visible and exudative IJT 1B: visible, exudative, and focal IJT Group 2: 2A: occult and nonexudative IJT Stage 1: occult telangiectatic vessels Stage 2: loss of transparency without clinically evident telangiectatic vessels Stage 3: prominent dilated right-angle retinal venules Stage 4: retinal pigment hyperplasia into the retina Stage 5: SRN from proliferation of intraretinal capillaries 2B: juvenile occult familial IJT Group 3: 3A: occlusive IJT 3B: occlusive IJT with CNS vasculopathy Abbreviation: IJT : Idiopathique juxtafoveolar talangiectasis, SRN : Subretinal neovascularization, CNS : Central nervous system

Table 2. IJT Group 1 Patient No./ Eye(s) Sex/ Age of Lesion 1/M/53 OS 2/M/58 OD 3/M/50 OU 4/M/25 OS OD 5/M/53 OD 6/M/55 OD 7/M/40

Group of IJT 1A 1A 1A/1B 1A 1A 1B 1A

Abbreviation: NA, not applicable.

Systemic Disease Diabetes NA Hypertension NA NA NA NA


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Figure 1. A. Fundus photography of the right eye of a 25 year-old man patient with IJT group 1A : visible and exudative telangiectasis aneurysms B.C The fluorescein angiograms show telangiectasis, microaneurysms, macular edema and areas of capillary nonperfusion D. The OCT shows cystoid macular oedema, central macular thickness: 262 µm

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COMMENTS IJT is an uncommon retinal disorder characterized by incompetent and dilated retinal capillaries in the foveal and parafoveal region. IJT was first described by Gass in 1968 [2]. According to a revised classification [1], group 1 is unilateral congenital parafoveolar telangiectasis. It is less prevalent than IJT group 2, although this might not be true in all populations [3, 4]. Little is known of its pathophysiology and natural history [5]. It has been proposed that the disease is a developmental disorder which represents a mild variant of Coats’ syndrome and Leber’s miliary aneurysms [1, 6]. Tripathi and Ashton [7] suggested that the cause of telangiectasis in group 1 is a functional or structural breakdown of the blood-retinal barrier (vascular endothelial) with consequent mural disorganization and formation of aneurysms or telangiectasis. It may be that the classification into types 1A and 1B represents different stages of the same disease rather than different disease groups [1, 8, 9]. This class is characterized by prominent telangiectatic retinal capillaries that typically involve the temporal half and are usually associated with varying amounts of yellowish exudate. More than 90% of patients with group 1 disease are males, with an average age of 39 years, and more than 90% are unilateral cases, no clear association with systemic or other ocular diseases has been identified. In our study, 100% of the patients were male with a mean age of 47 years and 85.7% were unilateral. Our study was able to incorporate OCT findings in evaluating these patients. The OCT images in patients with aneurysmal telangiectasia clearly documented and confirmed the presence and the degree of macular edema and foveal exudative cystic changes, which were present in all of the cases. The edema was usually evident clinically and angiographically. Decreased visual acuity in patients with IJT group 1 was most commonly caused by macular edema.

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The second described cause of vision loss was the hard exudates involving the macula. In conclusion, the current case series provides a baseline data about IJT group 1 and confirms the importance of OCT to provide valuable information as to the diagnosis and natural course of the disease. Nevertheless the significance of our study was limited by the small number of cases.

REFERENCES [1] Gass JD, Blodi BA. Idiopathic juxtafoveolar retinal telangiectasis. Update of classification and follow-up study. Ophthalmology. 1993;100:1536-46. [2] Gass JD. A fluorescein angiographic study of macular dysfunction secondary to retinal vascular disease. V. Retinal telangiectasis. Arch Ophthalmol. 1968;80:592-605. [3] Lee SW, Kim SM, Kim YT, Kang SW. Clinical features of idiopathic juxtafovealtelangiectasis in Koreans. Korean J. Ophthalmol. 2011;25:225-230. [4] Maruko I, Iida T, Sugano Y, Ojima A, Oyamada H, Sekiryu T. Demographic features of idiopathic macular telangiectasia in Japanese patients. Jpn J Ophthalmol. 2012;56:152-158. [5] Charbel I, Gillies MC, Chew EY, Bird AC, Heeren TF, Peto T, Holz FG, Scholl HP. Macular telangiectasia type 2. ProgRetin Eye Res. 2013;34:49-77. [6] Cahill M, O’Keefe M, Acheson R, et al. Classification of the spectrum of Coats’ disease as subtypes of idiopathic retinal telangiectasis with exudation. ActaOphthalmol Scand. 2001;79:596-602. [7] Tripathi R, Ashton N. Electron microscopical study of Coat's disease. Br J Ophthalmol 1971;55:289-301. [8] Watzke RC, Klein ML, Folk JC, et al. Long-term juxtafoveal retinal telangiectasia.Retina. 2005;25:72735. [9] Yannuzzi LA, Bardal AM, Freund KB, et al. Idiopathic macular telangiectasia. Arch Ophthalmol. 2006;124:450-60.


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PEMPHIGOÏDE OCULAIRE CICATRICIELLE SÉVÈRE : À PROPOS DE 5 CAS Khochtali S, Hachicha G, Zina S, Ksiaa I, Anene S, Zaouali S, Khairallah M Service d'ophtalmologie, Hôpital universitaire Fattouma Bourguiba de Monastir Faculté de médecine, Université de Monastir, Tunisie

RÉSUMÉ : Objectif : Notre objectif était de décrire les manifestations cliniques et les modalités de prise en charge de la pemphigoïde oculaire cicatricielle (POC). Matériel et méthodes : Revue rétrospective des dossiers de 5 patients (10 yeux), présentant une POC. Résultats : L’âge moyen de nos patients était de 51,4 ans (3 femmes et 2 hommes). L'acuité visuelle (AV) initiale était comprise entre une PL négative et 2/10. Une meibomite sévère, une conjonctivite synéchiante et des symblépharons, étaient présents dans tous les cas. Une opacification cornéenne d’intensité variable avec appel néovasculaire a été notée dans 8 yeux (80%). Tous les patients ont eu un traitement local à base d’agents mouillants et de ciclosporine. Trois (60%) ont eu un traitement immunosuppresseur systémique. L’AV finale était < 1/10 dans 7 yeux (70%). Conclusion : La POC est une affection chronique auto-immune rare de l’adulte, caractérisée par une conjonctivite fibrosante et une atteinte cornéenne à type de néovascularisation, métaplasie squameuse et opacification. Son diagnostic est souvent fait à un stade tardif, associé à un pronostic visuel réservé.

INTRODUCTION La pemphigoïde oculaire cicatricielle (POC) est une maladie autoimmune chronique qui affecte les muqueuses, entre autres conjonctivales. Des poussées aigues d’inflammation conjonctivale peuvent survenir sur un fond de conjonctivite chronique. La cible immunologique des autoanticorps appartient à la zone de jonction dermoépidermique et se traduit en immunofluorescence directe (IFD) par des dépôts d’IgG, d’IgA et/ou de C3 sur la membrane basale épidermique. Le traitement de référence repose sur les antiinflammatoires et les immunosuppresseurs par voie locale et générale, l’enjeu étant de limiter l’évolution fibrosante de la maladie. Notre objectif était de décrire les manifestations cliniques et les modalités de prise en charge de la pemphigoïde oculaire cicatricielle (POC).

MATERIEL ET METHODES Il s’agit d’une étude rétrospective de 5 patients (10 yeux) atteints de POC suivis au service d’ophtalmologie du CHU Fattouma Bourguiba de Monastir entre Février 2013 et Aout 2014. Tous nos patients ont bénéficié :  d’un interrogatoire minutieux.  d’un examen ophtalmologique complet comportant une mesure de l’acuité visuelle (AV) avec correction, un examen du segment antérieur avec mesure du tonus oculaire et un examen du fond d’œil (FO) si accessible.  d’une biopsie conjonctivale avec étude en immunofluorescence directe (IFD).  et d’un examen général à la recherche d’une autre localisation cutanéo-muqueuse. On a classé la maladie selon la classification de Foster [1] :  Stade I : fibrose et cicatrisation sousconjonctivale

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Stade II : raccourcissement du cul de sac conjonctival, d’importance variable  Stade III : présence de symblépharon  Stade IV : ankyloblépharon La prise en charge thérapeutique a consisté en un traitement médical local et général adapté selon le stade évolutif de la maladie. 

RESULTATS Les caractéristiques épidémiologiques et cliniques de nos patients à leur présentation, ont été résumées dans le tableau I. L'âge moyen des patients était de 51,4 ans (entre 41 et 70 ans). Il s’agissait de 3 femmes (60%) et de 2 hommes (40%). L’atteinte oculaire était bilatérale dans tous les cas dès la première consultation. L'acuité visuelle (AV) initiale était comprise entre une PL négative et 2/10. Tous nos patients avaient une meibomite sévère, une conjonctivite synéchiante et des symblépharons au niveau des deux yeux (visibles

dans les culs de sac, localisées ou diffus avec raccourcissement du cul de sac). Une opacification totale de la cornée avec appel néovasculaire sur 360° a été notée dans 3 yeux (30%). Une kératinisation partielle de la cornée avec appel néovasculaire localisé a été notée dans 5 yeux (50%). Une perforation cornéenne est survenue dans un seul œil (10%). Le reste de l’examen était difficile à réaliser. Le FO était accessible dans 4 yeux (40%) et il était normal dans ces cas. L’IFD était revenue négative dans 4 cas et a été positive dans un cas (20%), où elle a objectivé des dépôts de C3 au niveau de la membrane basale épithéliale. Tous les patients avaient bénéficié d’un traitement local par les agents mouillants et cyclosporine. Trois d’entre eux (60%) avaient eu un traitement général par immunosuppresseur (mycophénolate mofétil dans 2 cas (40%) et méthotrexate dans un cas (20%)), avec une prise en charge conjointe avec les médecins internistes. L’AV finale était < 1/10 dans 7 yeux (70%).

Tableau I : Caractéristiques épidémiologiques et cliniques des patients avec une pemphigoïde oculaire cicatricielle

Abréviations : M : masculin, F : féminin, ATCD : antécédents, RAS : Rien à signaler, OD : œil droit, OG : œil gauche, VBLM : voit bouger la main, CLD : compte les doigts, PL : perception lumineuse, symb : symblépharon, néovx : néovasculaire, kératinis : kératinisation, inf : inférieur, sup : supérieur LT : lentille thérapeutique, MMF : mycophénolate mofétil, MTX : méthotrexate

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DISCUSSION

Figure 1 : Photographies des yeux (A: œil droit, B et C : œil gauche) montrant une conjonctivite, une opacification et une néovascularisation cornéennes plus importantes à gauche, avec un raccourcissement des culs de sac conjonctivaux inférieurs et des symblépharons (flèche), patiente numéro 3 du tableau I

Figure 2 : (A) : Photographie de l’œil droit montrant une conjonctivite, un raccourcissement du cul de sac conjonctival inférieur, une kératinisation de la cornée en nasal, et une meibomite. (B) : Photographie de l’œil gauche montrant un ankyloblépharon, patient numéro 5 du tableau I

La POC est une pathologie chronique, qui touche les deux yeux de façon asymétrique. Elle associe une cicatrisation et fibrose conjonctivales, avec formation de symblépharons et raccoucissement des culs de sac et une atteinte cornéenne à type de néovascularisation, kératinisation et opacification [1-3]. Une atteinte extraoculaire touchant la muqueuse buccale, le larynx, l’oesophage, et parfois les muqueuses génitales, est associée dans environ 50% des cas. C’est une pathologie relativement rare dont l’incidence est estimée entre 1/15000 et 1/46000 [4]. Nos patients étaient plus jeunes que ceux décrits dans la littérature (51,4 ans versus 65 ans dans la plupart des séries). La prédominance féminine est habituelle, comme notée dans notre série [3, 4, 5]. La POC est une maladie potentiellement cécitante. Tous nos patients avaient une atteinte oculaire sévère au moment du diagnostic avec des lésions cicatricielles difficiles à traiter. Ce retard diagnostique est souvent expliqué par l’évolution lente de la maladie, l’absence fréquente de manifestations extraoculaires lors du diagnostic dans la plupart des cas et la non-spécificité des signes cliniques initiaux [3,5]. Un diagnostic et une prise en charge précoce sont importants pour améliorer le pronostic visuel. Le premier signe ophtalmologique de POC est la fibrose conjonctivale sous-épithéliale prédominant au niveau des conjonctives tarsales, sous forme de fines stries blanchâtres linéaires ou étoilées. Le diagnostic de POC repose sur la présentation clinique et sur l’immunohistopathologie des biopsies conjonctivale, dont la négativité n’élimine pas le diagnostic [3,4,5]. Le diagnostic différentiel se pose avec les conjonctivites chroniques fibrosantes y compris le trachome ou les syndromes de Stevens- Johnson (SSJ) et de Lyell, les intolérances aux collyres ou les conjonctivites fibrosantes associées à l’atopie sévère ou à la rosacée oculaire [6]. Le but du traitement est de contrôler l’inflammation oculaire et d’arrêter la progression des phénomènes de cicatrisation. Un traitement par les immunosuppresseurs par voie générale doit être débuté dés le stade II de la maladie. Le mycophénolate mofétil ou le méthotrexate sont

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souvent utilisés de 1ère intention. Le cyclophosphamide et les agents biologiques peuvent être utilisés dans des cas plus sévères ou réfractaires Une corticothérapie générale de courte durée peut être utilisée [4]. Trois de nos patients ont été traité par des immunosuppressseurs systémiques avec stabilisation de la maladie et une amélioration de l’AV chez un patient (un œil).

CONCLUSION La POC est une affection chronique auto-immune de l’adulte, caractérisée par une conjonctivite fibrosante et une atteinte cornéenne à type de néovascularisation, métaplasie squameuse et opacification. Son diagnostic est souvent fait à un stade tardif, caractérisé par un pronostic visuel réservé. Son contrôle doit faire appel à des immunosuppresseurs systémiques, en plus des traitements topiques.

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REFERENCES 1-Foster CS. Cicatricial pemphigoid. Trans Am Ophthalmol Soc 1986;84: 527-663 2-Tauber J, Jabbur N, Foster CS. Improved detection of disease progression in ocular cicatricial pemphigoid. Cornea 1992;11:446—51 3- Chang JH, McCluskey. Ocular cicatricial pemphigoid: manifestations and management. Curr Allergy Asthma Rep. 2005 ;5(4):333-8 4- Sobolewska B, Deuter C, Zierhut M.Current medical treatment of ocular mucous membrane pemphigoid. Ocul Surf. 2013;11(4):259-66 5- Radford C, Rauz S, Williams GP, Saw VP, Dart JK. Incidence, presenting features, and diagnosis of cicatrising conjunctivitis in the United Kingdom. Eye (Lond). 2012;26(9):1199-208. 6-Gueudry J, Vera L, Muraine M. Cicatricial conjunctivitis. J Fr Ophtalmol. 2010;33(8):577-85


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LES ENDOPHTALMIES POST OPÉRATOIRES : RÉSULTATS THÉRAPEUTIQUES ET PLACE DE LA VITRECTOMIE PREMIÈRE Imen zghal; Amine souguir; Olfa fekih; Omar Romdhane; Zgolli Hssouna; Sayedi Jihène; Malek Inès ; Leila Nacef Institut d’ophtalmologie de tunis Faculte de medecine de tunis Universite de tunis el manar

RESUME : L’endophtalmie post opératoire pose un problème de santé publique de part son pronostic souvent défavorable. Le traitement comporte un volet médical et un volet chirurgical. Classiquement la chirurgie est préconisée lorsque l'acuité visuelle est limitée aux perceptions lumineuses. But: Evaluer les résultats therapeutiques des endophtalmies post opératoires en particulier comparer les thérapeutiques utilisées: injection intravitreenne d'antibiotiques versus la vitrectomie première. Patients et Méthodes: Il s'agit d'une étude rétrospective comparative portant sur 120 yeux traités pour endophtalmie post opératoire aigue dans le service A de l’institut Hédi Raïs d’Ophtalmologie entre juin 2007 et juin 2013. La comparaison a porté sur deux groupes de 25 et 94 yeux selon que le traitement en première intention a reposé sur la vitrectomie première (groupe1) ou sur les injections intravitréennes d’antibiotiques seules (groupes2). Résultats: L’incidence de l’endophtamie post opératoire dans notre série était de 0.38 %. Streptocoques et Staphylocoques épidermidis étaient les germes les plus incriminés. La meilleure acuité visuelle finale (MAVC) était 2/10 chez 11 patients, entre 2/10 et 1/20 chez 43 patients et inférieure ou égale à 1/20 chez 66 patients parmi les patients des deux groupes. Les facteurs corrélés statistiquement au résultat final étaient l’inflammation initiale intense (p<0.001), une forte virulence bactérienne (p=0.002), un streptocoque isolé aux cultures bactériennes (p=0.024), un défaut au niveau de l’incision opératoire (p= 0.012), l’âge supérieur à 80 ans (p=0.022) et la rupture capsulaire postérieure (p=0.013). La vitrectomie première (groupe1) a permis d’obtenir un plus grand pourcentage de bons résultats par rapport au groupe 2 (60% vs 41.5%) P:0,09 Conclusion: Le résultat fonctionnel était meilleur dans le groupe vitrectomie première par rapport au groupe injections intra vitréennes d'antibiotique. Mais le résultat n'est pas Statistiquement significatif.

Mots-clés : endophtalmie - cataracte - prévention – injection intra vitréenne - antibiothérapie - vitrectomie.

INTRODUCTION Les endophtalmies sont des infections profondes de l’œil, potentiellement cécitantes qui peuvent survenir après chirurgie ouverte du globe, après un traumatisme perforant ou suite à une contamination de l’œil par voie hématogène ou par contiguïté.

La prise en charge d’une endophtalmie post opératoire aigue est un défi thérapeutique où il s’agit de faire face à un processus rapidement évolutif dans le but d’obtenir le meilleur résultat visuel possible et éviter les complications qui peuvent compromettre le pronostic visuel voir anatomique. La chirurgie de la cataracte, de par sa fréquence, est l’acte le plus pourvoyeur d’endophtalmies post

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opératoires (1), les injections intra vitréennes en sont une cause récente et en progression(2,3).

Buts Les objectifs de notre travail sont de présenter les aspects épidémiologiques et cliniques ainsi que le profil bactériologique des endophtalmies post opératoires hospitalisée dans notre service, en étudier les facteurs pronostiques, évaluer les résultats thérapeutiques de la vitrectomie première par rapport aux injections intravitréennes seules et enfin réévaluer les moyens de prévention et notre conduite à tenir devant une endophtalmie.

PATIENTS ET METHODES Norte étude est rétrospective et comparative. Elle a concerné 120 yeux de 120 patients. Nous avons inclus tous les patients admis au service « A » de l’institut Hédi Raïes d’Ophtalmologie de Tunis pour endophtalmie aigue secondaire à une chirurgie ophtalmologique (chirurgie de la cataracte, chirurgie filtrante, chirurgie vitréo-rétinienne, kératoplasties transfixiante) ou suite à une injection intra vitréenne dans la période couverte par l’étude entre juillet 2007 et juin 2013, qu’ils aient été opérés dans notre service ou adressés par un autre centre ou pris en charge initialement par un médecin de libre pratique, nous n’avons pas inclus les patients adressés pour énucléation ou pour des séquelles d’endophtalmie telle qu’un trouble vitréen persistant ou un décollement rétinien. Nous avons également exclus les patients hospitalisés pour endophtalmie endogène, endophtalmie d’origine cornéenne et endophtalmie post traumatique et les patients ayant présenté des réactions inflammatoires aseptiques à type de TASS. Tous les patients ont été interrogés et ont bénéficié d’un examen ophtalmologique complet, un examen général, une échographie en mode B a été réalisée lorsque le fond d’œil n’était pas accessible afin de s’assurer du diagnostic et éliminer une complication. Le diagnostic d’endophtalmie aigue a été évoqué devant toute réaction inflammatoire atypique survenant au cours des 6 premières semaines en post opératoire avec une participation vitréenne. Plusieurs prélèvements bactériologique ont été réalisés avant et après la mise en route du

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traitement et lors du temps opératoire (prélèvement conjonctival, ponction de la chambre antérieure (PCA), prélèvement de vitré, de membrane cyclitique…). Nous avons divisé nos patients en deux groupes selon le traitement en première intention, le groupe1 a inclus les patients ayant bénéficié d’une vitrectomie première précédée et/ou suivie d’une ou de plusieurs injections intravitréennes d’antibiotiques soit 25 yeux. Le groupe 2 a inclus les patients chez qui le traitement a reposé sur les injections intravitréennes d’antibiotiques seules, soit 94 yeux, une vitrectomie en deuxième intention a été indiquée chez 6 de ces patients dans le but de traiter une complication (un décollement rétinien, une membrane épirétinienne persistante) ou le rétablissement de la transparence des milieux. La vitrectomie première était dans tous les cas une vitrectomie à 3 voies par la pars plana, et réalisée à l’aide d’instruments 23 Gauges. Les indications de la vitrectomie de première intention étaient un tableau clinique sévère et/ ou une acuité visuelle (AV) initiale limitée aux perceptions lumineuses bien orientées, ou une mauvaise évolution initiale malgré un traitement médical bien suivi. Par Ailleurs, tous les patients ont reçu une association d’antibiotiques par voie générale et des collyres fortifiés en plus de collyres mydriatiques et corticoïdes. Nous avons effectué une analyse statistique afin de rechercher les facteurs pronostiques significatifs et rechercher une supériorité de la vitrectomie première comme traitement de première intention de l’endophtalmie aigue post opératoire.

RESULTATS Durant la période de l’étude 11768 actes opératoires ont été effectués au service A de l’institut Hédi Raïes d’ophtalmologie. Parmi nos patients 45 ont été opérés à l’origine dans notre service et 75 patients nous ont été adressés par d’autres services, l’Incidence générale des endophtalmies post opératoires dans notre service sur la période étudiée était de 0.38 %. L’âge moyen des patients était de 67.13 ans, la tranche d’âge la plus représentée était l’intervalle 66-70 ans avec 24 cas soit 20% de l’effectif total, le


JOURNAL TUNISIEN D’OPHTALMOLOGIE sex ratio était de 1.35 avec 67.5% de patients de sexe masculin. L’endophtalmie a touché l’œil droit dans 50.84% des cas. L’année 2010 a apporté le contingent le plus important de patients avec 38 cas d’endophtalmie, dont 10 patients opérés à l’origine dans notre service le taux d’incidence a atteint 0.5%. Durant la première moitié de l’année 2013, 6 cas ont été hospitalisés dont 1 seul opéré à l’origine dans notre service, 952 actes opératoires ont été effectués durant cette période le taux d’incidence a donc baissé en 2013 à 0.1 %. La chirurgie la plus pourvoyeuse d’endophtalmie a été la chirurgie de la cataracte en extraction extra capsulaire avec implantation postérieure ou antérieure avec 47 cas d’endophtalmie, suivie par la chirurgie de la cataracte par phacoémulsification avec 42 patients, nous avons répertorié 11 cas d’endophtalmie survenus suite à une implantation secondaire, 6 post vitrectomie ou chirurgie épisclérale, 6 post ablation de silicone, 4 post injection intra vitréenne de Bevacizumab ou de triamcinolone, 3 post trabéculectomie. Un seul cas d’endophtalmie s’est présenté suite à une kératoplastie transfixiante. Tous les patients ont présenté des symptômes à type d’hyperhémie conjonctivale et baisse de vision, tous les patients se sont plaints de douleurs oculaires à l’exception de 2 patients. 82% des patients ont présenté un hypopion, 34% une membrane cyclitique et 100% ont présenté un tyndall inflammatoire en chambre antérieure ou dans le vitré lorsque celui ci était accessible à l’examen. 10 patients étaient âgés de 80 ans ou plus, un diabète a été retrouvé chez 34 patients (28 %), une HTA a été retrouvée chez 34 patients également, 2 patients étaient sous corticothérapie dont l’un présentait également une polykystose rénale. Un foyer infectieux non traité a été découvert chez 3 patient (blépharite, pied diabétique, dacryocystite chronique de l’œil contro-latéral). L’implantation secondaire a concerné 11 patients (9.1 %), 35 patients (31.5 %) ont présenté une rupture capsulaire postérieure avec issue de vitré. Un défaut au niveau de l’incision à type de point lâche ou de Seidel positif a été retrouvé chez 11 patients (9.1 %), 2 autres patients ont eu une chirurgie de la cataracte sans sutures (1.6 %).

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Dans notre série, des données bactériologiques étaient disponibles pour 103 patients (PCA, prélèvement de vitré, membrane cyclitique, prélèvement conjonctival), les prélèvements répétés réalisés chez ces patients ont permis d’identifier un germe chez 54 patients (52,4 % des cas). Une ponction de chambre antérieure a été réalisée chez 76 patients, elle a permis l’identification d’un germe dans 46% des cas, 13 patients ont pu bénéficier d’un prélèvement de vitré en plus d’un prélèvement d’humeur aqueuse, les cultures bactériennes sont revenue positives chez 9 de ses patient soit 69% d’identification bactérienne. Pour les cultures positives, la répartition des germes isolés était la suivante : 29.6 % streptocoque (16 yeux), 29.6 % staphylocoque épidermidis (16 yeux), 14.8% staphylocoque aureus (8 yeux), 1.8 % staphylocoque lugdunensis (un seul œil), bacille gam négatif (BGN) 22.2 (12 yeux), 1.8 % mycoses (un seul œil). Tous les patients ont été mis sous traitement topique par collyre fortifiés, une bi-antibiothérapie par voie générale a été instaurée systématiquement chez tous nos patients, l’association la plus utilisée en première intention a été ofloxacine ( Oflocet)® à la dose de 200mg*2/j , imipénème ( Tienam® 500mg*4/j), le traitement a été par la suite adapté en fonction de l’antibiogramme. 119 patients ont pu bénéficier d’au moins une injection intra vitréenne de vancomycine (1mg /0.1ml) et de Ceftazidime (2mg/0.1ml), le seul patient qui n’en a pas bénéficié s’est présenté dans un état de phtyse oculaire, le traitement adjuvant a comporté des collyres corticoïdes et mydriatiques. 31 yeux ont bénéficié d’une vitrectomie à trois voies, parmi eux 25 yeux ont bénéficié d’une vitrectomie première avec injection intravitréenne d’antibiotiques en fin d’acte opératoire. La vitrectomie a été indiquée lorsque l’atteinte semblait sévère ou l’évolution clinique défavorable quelque soit l’acuité visuelle à la présentation. Nous n’avons pas opéré les patients qui présentaient un œdème cornéen important ou une perte des perceptions lumineuses. La vitrectomie était indiquée en deuxième intention pour 6 yeux soit pour traiter une complication, à type de décollement rétinien (un œil), ou une membrane épirétinienne (un œil) ou dans le but de rétablir la transparence des milieux (4 yeux).

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L’étude comparative a porté sur deux groupes Groupe 1 : 25 yeux ayant bénéficié d’une vitrectomie première avec injection intravitréenne d’antibiotiques en fin d’acte. Groupe 2 : 94 yeux chez qui le traitement en première intention a reposé sur les injections intravitréennes d’antibiotiques y compris les patients ayant bénéficié d’une vitrectomie en deuxième intention. Les patients ont été classés comme suit selon les résultats thérapeutiques: Résultat favorable (11 yeux), lorsque l’acuité visuelle finale était supérieure ou égale à 2/10. Résultat plutôt favorable (43 yeux), lorsque l’acuité visuelle finale était inférieure à deux dixièmes et supérieure à 1/20 avec une clarté des milieux permettant de voir les vaisseaux rétiniens de deuxième ordre. Résultat défavorable (66 yeux) lorsque l’acuité visuelle finale était inférieure ou égale à 1/20 ou une opacification des milieux ne permettait pas de voir les vaisseaux rétiniens de deuxième ordre ou en cas de perte fonctionnelle ou anatomique de l’œil. Dans le groupe 1 (des patients ayant bénéficié d’une vitrectomie première), le résultat a été favorable dans 60 % des cas avec AV >1/20. L’acuité visuelle finale variait entre la perte des perceptions lumineuses et 5/10. Une réintervention a été nécessaire pour 3 yeux pour cause de décollement rétinien avec succès anatomique dans 2 cas et échec dans les autres cas. Les autres complications de la vitrectomie première étaient la survenue d’un glaucome néo-vasculaire (2 yeux), des douleurs persistantes ayant nécessité l’injection de xylocaïne alcool en retro bulbaire dans un but antalgique (un œil), un décollement rétinien tractionnel non opérable chez un patient diabétique (un œil). Aucun patient vitrectomisé n’a présenté de phtyse du globe oculaire ou n’a dû subir une chirurgie mutilante.

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Dans le groupe 2 le résultat a été favorable pour 41.5% des yeux avec AV>1/20. l’acuité visuelle finale a varié entre la perte des perceptions lumineuse et 3/10, une perte totale des perceptions lumineuse est survenue chez 26 patients (28% de l’effectif). 11 yeux ont fini par présenter une phtyse ou une fente purulente, 3 yeux ont développé un glaucome néovasculaire, 2 patients ont développé une membrane épirétinienne, enfin deux autres patients ont présenté des néo vaisseaux cornéens. 6 yeux ont dû subir une vitrectomie en deuxième intention, les indications étaient un décollement rétinien (un œil), une membrane épi-rétinienne persistante (un œil), un trouble vitréen (4 yeux). Les facteurs significativement liés à un résultat final défavorable étaient (dans les groupes 1+ 2) (tableau 1): Un âge supérieur à 80 ans (p=0.022, 8.3%), un défaut au niveau de l’incision (p=0.012, 9.2%), une culture bactérienne positive a un germe virulent (BGN, Streptocoque ou staphylococcus Aureus) (p=0.002, 34%), une culture bactérienne positive à un streptocoque (p=0.024, 15.7%), une réaction inflammatoire initiale sévère c'est-à-dire un œdème cornéen généralisé et/ou panophtalmie et/ou un hypopion dont la hauteur dépasse le tiers de la chambre antérieure (p<0.001, 29.9%) et une acuité visuelle a la présentation ne dépassant pas les perceptions lumineuses (p<0.001, 57,7%). La vitrectomie première a permis dans notre étude d’obtenir un plus grand pourcentage de bons résultats par rapport au groupe 2 (60% vs 41.5%), aucun cas de phtyse oculaire n’a été noté, le résultat de la vitrectomie n’était pas statistiquement significatif (p=0.098). Un résultat inattendu était la corrélation entre la rupture capsulaire postérieure et un résultat final favorable (p=0.083, 29.4%). Aucun facteur corrélé au résultat thérapeutique n’a été retrouvé lorsque l’étude statistique a porté uniquement sur le groupe1 (tableau 2).


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Tableau1 : récapitulatif des facteurs étudiés et corrélation avec les résultats thérapeutiques pour 119 yeux (groupe 1+2) Pourcentage Facteur analysé Nombre de patients P OR De résultats défavorables Age > 80 10 90 % Age (ans) 0.022 8.368 Age< 80 110 51.8 % M 69 56.5 % Sexe 0.697 F 51 52.9 % oui 34 58.8 % diabète 0.560 Non 85 52.9 % oui 34 47.1 % HTA 0.295 non 85 57.6 % oui 35 42.9 % Issue de vitré 0.083 non 83 60.2 % oui 35 37.1 % Rupture capsule postérieure 0.013 0.364 non 84 61.9 % oui 11 90.9 % Incision défectueuse 0.012 9.636 non 108 50.9 % >=72 H 39 56.4 % Délai avant première IVT 0.124 <72h 50 40 % oui 35 85.7 % Inflammation initiale intense <0.001 8.47 non 82 41.5 % + 54 55.6 % Positivité des cultures bactériennes 0.161 48 41.7v oui 16 75 % Streptocoque 0.024 3.78 non 38 44.2 % oui 35 71.4 % Bactéries virulentes 0.002 3.79 Non 68 39.7 % Groupe 2 94 58.5 % Vitrectomie première 0.098 Groupe 1 25 40 % >=2.6 LogMAR 50 74 % Acuité visuelle à la présentation <0.001 9.966 <2.6 LogMAR 36 22.2 % Tableau 2 : récapitulatif des facteurs étudiés et corrélation avec les résultats thérapeutiques pour 25 yeux (groupe 1) Pourcentage Facteurs analysés Nombre de patients P OR de résultats défavorables Age > 80 2 100 % Age (ans) 0.071 Age< 80 23 34.8 % M 12 41.7 % Sexe 0.87 F 13 50 % oui 4 75 % diabète 0.119 Non 21 33.3 % oui 5 40 % HTA 1 non 20 40 % oui 6 16.7 % Issue de vitré 0.151 non 18 50 % oui 9 22 % Rupture capsule postérieure 0.174 non 16 50 % oui 0 0% Incision défectueuse non 25 100 % >=72 H 8 37.5 % Délai avant première IVT 0.96 <72h 11 36.4 % oui 4 50 % Inflammation initiale intense 0.665 non 21 38.1 % + 15 40 % Positivité des cultures bactériennes 0.47 8 25 % oui 3 66.7 % Streptocoque 0.214 non 20 30 % oui 7 57.1 % Bactéries virulentes 0.116 Non 15 26.7 % >=2.6 LogMAR 8 50 % Acuité visuelle à la présentation 0.45 <2.6 LogMAR 12 33.4 %

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DISCUSSION Parmi les résultats thérapeutiques des 120 patients inclus dans notre étude, 66 étaient considéré comme défavorables, 54 étaient considérés comme favorables avec une acuité visuelle supérieure à 1/20 et des milieux non opacifiés. Nos résultats biologiques étaient caractérisée par un taux élevé de germes virulents parmi les cultures positives, particulièrement les streptocoques : 29.6% pour les Streptocoques (16 yeux), 14.8% pour Staphylococcus Aureus (8 yeux), 1.8 % pour Staphylococcus Lugdunensis (un seul œil), et 22.2 % pour les BGN (12 yeux). Les facteurs prédictifs de mauvais résultat thérapeutique les plus significatifs avec P<0.001 étaient l’acuité visuelle initiale inférieure ou égale à 2.6 LogMAR, l’intensité de la réaction inflammatoire initiale et la forte virulence bactérienne. Bien que nos résultats restent comparables à ceux de la littérature(4,5), les 66% de résultats défavorables retrouvé dans notre série devraient être expliquée par différents facteurs : nous avons retrouvé un taux élevé de germes virulents particulièrement BGN et streptocoques(6,7), ensuite, notre centre étant de type tertiaire, nous ont été référés préférentiellement des patients qui ont mal évolué et qui seraient donc plus fréquemment infectés par des germes virulents ce qui constitue un biais de sélection. Un retard thérapeutique est souvent constaté. Enfin, nous avons également été limités par notre incapacité à opérer en cas d’œdème cornéen puisque nous ne disposions pas de la visualisation endoscopique ou de chambres antérieures artificielles(8,9). Les facteurs fortement corrélés au résultat thérapeutique lorsque l’étude a porté simultanément sur les groupes 1 + 2 tel que l’acuité visuelle à la présentation inférieure ou égale à 2.6 LogMAR, l’intensité de la réaction inflammatoire initiale et la forte virulence bactérienne, ne l’étaient plus lorsque l’étude a porté uniquement sur le groupe 1 (tableau 3). On pourrait expliquer ceci par l’action de la vitrectomie elle-même qui a permis de débarrasser la cavité vitréenne de bactéries et de plusieurs facteurs pro-inflammatoires (10). On observe une tendance à obtenir de meilleurs résultats grâce à la vitrectomie première par rapports aux recours

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exclusif aux injections intravitréennes d’antibiotiques et ce alors même qu’elle a été pratiquée chez des patients ayant une acuité visuelle initiale supérieure aux perceptions lumineuses. La vitrectomie première est donc particulièrement intéressante en cas d’inflammation initiale intense ou de présentation clinique précoce qui traduisent une forte virulence bactérienne ou en cas d’endophtalmie sur blébite ou celle compliquant une injection intravitréenne caractérisée par un pronostic plus péjoratif(2,3,11–13).Le faible effectif de patients inclus dans le groupe 1 a limité l’étude statistique et a pu masquer certains résultats. Une étude multicentrique plus large permettraient de comparer différents sous-groupes de patients vitrectomisés afin d’affiner les indications thérapeutiques mais ceci serait difficile à cause de la faible incidence de l’endophtalmie, de la difficulté à mettre en œuvre une randomisation notamment à cause de considérations éthiques. En effet, le traitement doit être adapté à chaque patient et en cas d’acuité visuelle à la présentation limitée aux perceptions lumineuses une vitrectomie première est formellement indiquée selon les conclusions de l’EVS (7,14). Une autre problématique est représentée par la technique chirurgicale elle-même, car selon kuhn(15), une vitrectomie totale avec décollement postérieur réalisée dans les premières 48 heures de l’évolution permettrait d’obtenir de meilleurs résultats fonctionnels en éliminant l’accumulation de matériel inflammatoire et de pus au niveau de la macula véritable « hyopopion maculaire ». Au contraire, une vitrectomie centrale aurait un risque iatrogène moindre mais ne protègerait pas suffisamment la macula contre les effets de l’inflammation et des toxines bactériennes d’où un résultat fonctionnel moins intéressant(14,15). La nette baisse du taux d’incidence de l’endophtalmie post opératoire dans notre service en 2012 et la première moitié de 2013 (respectivement 0.29% et 0.1%), souligne l’importance de la prévention du risque infectieux car on attribue cette baisse à l’application du protocole de l’ESCRS dans notre service depuis la fin 2011 (injection de 50mg de céfuroxime en intra camérulaire en fin d’intervention). Ce résultat concorde avec de nombreuses études retrouvant une diminution de l’incidence de l’endophtalmie


JOURNAL TUNISIEN D’OPHTALMOLOGIE post opératoire suite à l’introduction de ce protocole (16–18). Tableau3 : Facteurs de risques étudiés et significativité selon les groupes étudiés Inflammation initiale intense Valeur de P pour les <0.001 groupes 1+2 Valeur de P Pour le 0.665 groupe 1

AV à la présentation Forte Virulence >=2.6 LogMAR bactérienne Valeur de P Valeur de P pour les <0.001 pour les 0.022 groupes 1+2 groupes 1+2 Valeur de P Valeur de P Pour le 0.45 Pour le 0.116 groupe 1 groupe 1

Résultats Résultats défavorables défavorables 85.7% pour les pour les groupes 1+2 groupes 1+2 Résultats défavorables 50% pour le groupe 1

leur

Résultats défavorables pour le groupe 1

74%

Résultats défavorables 71.4% pour les groupes 1+2

50%

Résultats défavorables 57.1 pour le groupe 1

La rupture capsulaire postérieure s'est révélée être un facteur de risque très important de par sa fréquence élevée dans notre série (29.1%) mais paradoxalement, elle s’est révélée être un facteur corrélé avec un résultat final favorable (p=0.083). On explique ceci par l’administration systématique à nos patients de fluoroquinolones par voie générale en per et en post opératoire qui n’empêcherait pas la survenue d’une endophtalmie mais limiterait d’emblée la sévérité de l’infection(19). Bien que la plupart des études aient retrouvé la rupture capsulaire comme facteur de risque de survenue d’une endophtalmie (7,20) elle n’a été retrouvée comme facteur de mauvais pronostic que par l’étude EVS, or, les antibiotiques utilisés en 1995 lors de cette étude avaient une faible pénétration dans l’œil(7). A l’avenir, le diagnostic bactériologique devrait s’améliorer grâce au recours à la PCR en temps réel mutibactérienne (21,22) et la généralisation des prélèvements vitréens plus contributifs ce qui permettra d’adapter plus rapidement le traitement (23). L’amélioration de la pénétration intra-oculaire des antibiotiques notamment par l’utilisation des fluoroquinolone de 3 ème et 4ème génération permettra de traiter plus efficacement l’endophtalmie sans avoir à multiplier les IVT d’antibiotiques(24,25). La vitrectomie assistée par endoscopie permettra de réaliser des vitrectomies plus complètes voir un

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DPV lorsque la chirurgie est effectuée dans les premières 48 h de l’évolution(26). L’application généralisée des recommandations de l’ESCRS en matière de prévention de l’endophtalmie post opératoire contribuera à faire baisser le taux d’endophtalmies et de sauver la vue de centaines de patients (17,18).

CONCLUSION Le chirurgien ne doit pas omettre d’éduquer les patients et les inciter à consulter au moindre signe évoquant une endophtalmie. Pour que le patient bénéficie des meilleures chances de récupération un traitement adéquat doit être instauré le plus rapidement possible. Il est parfois nécessaire d’adresser le patient à une équipe spécialisée dans la chirurgie du segment postérieur car même s’il est toujours nécessaire d’administrer rapidement des injections intravitréenne d’antibiotique et d’instaurer un traitement médical, une vitrectomie première aussi complète que possible améliorera d’autant plus le pronostic qu’elle est réalisée précocement, en plus de l’intérêt d’un prélèvement vitréen à visée bactériologique. Les indications d’une telle vitrectomie doivent tenir compte non seulement de l’acuité visuelle à la présentation mais également d’autres facteurs pronostiques telle que l’intensité de la réaction inflammatoire initiale, la virulence du germe incriminé et l’acte opératoire initial.

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LA PARALYSIE CONGÉNITALE DE L’ÉLÉVATION D’UN ŒIL : ASPECTS CLINIQUES ET THÉRAPEUTIQUES Khochtali S, Gatfaoui F, Bouabana A, Mahmoud A, Attia S, Zaouali S, Khairallah M Service d’Ophtalmologie, Hôpital universitaire Fattouma Bourguiba de Monastir Faculté de Médecine de Monastir, Université de Monastir, Tunisie

RESUME : Introduction : Le but de ce travail est de décrire les aspects cliniques et les modalités de prise en charge de la paralysie congénitale de l’élévation d’un œil (PCE). Matériel et Méthodes : Il s’agit d’une étude rétrospective, de 10 cas de PCE. Tous les patients ont eu un examen ophtalmologique complet. Tous ont bénéficié d’une correction optique adaptée, avec traitement d’une éventuelle amblyopie associée. Une chirurgie conventionnelle visant à corriger la déviation oculaire verticale, était indiquée en cas d’hypotropie oculaire significative. Résultats : L’âge moyen de nos patients était de 8,1 ans. Il s’agissait de 6 garçons (60%) et de 4 filles (40%). Une hypotropie de l’œil atteint, en position primaire a été objectivée chez 8 patients (80%). Chez deux patients (20%), il n’y avait d’asymétrie oculaire que lors de l’effort d’élévation des yeux. Un « ptôsis » ipsilatéral a été retrouvé dans 6 cas (60%). Un recul de muscle droit inférieur homolatéral à la paralysie de l’élévation, a été réalisé chez 6 patients. Une patiente a nécessité une reprise avec recul du muscle droit supérieur controlatéral. Aucune chirurgie de ptôsis proprement dite, n’a été réalisée. Le résultat sur la déviation oculaire verticale a été satisfaisant dans les 6 cas opérés. Le recul moyen a été de 6 mois. Discussion : La PCE est caractérisée par une limitation du mouvement d’élévation en dedans et en dehors, avec possibilité de formes majeures et de formes mineures. Elle ne doit pas être méconnue chez un patient qui consulte pour un « ptôsis » apparu depuis la naissance, afin d’éviter des erreurs de prise de charge. Un examen clinique minutieux permet de bien poser les indications chirurgicales. Conclusion : La PCE est rare. Elle réalise un tableau clinique assez caractéristique, facilement reconnu par un examen rigoureux.

INTRODUCTION La paralysie congénitale de l’élévation d’un œil (PCE) ou déficit monoculaire de l’élévation ou paralysie des deux élévateurs, est une atteinte unilatérale, caractérisée par une hypotropie de l’œil atteint, une impotence de l’élévation en abduction et en adduction et souvent un ptôsis. Ce tableau est rare, mais important à reconnaître, pour une prise en charge adéquate.

Le but de notre travail est de décrire les aspects cliniques de cette entité et d’en discuter les modalités thérapeutiques.

MATERIEL ET METHODES Il s’agit d’une étude rétrospective de 10 cas de PCE, colligés au service d’Ophtalmologie de Monastir entre janvier 2005 et décembre 2013. Tous nos patients ont eu un examen ophtalmologique complet. L’étude des reflets cornéens, l’évaluation de l’oculomotricité, et le test à l’écran étaient réalisés dans tous les cas. En cas d’abaissement du niveau de la paupière supérieure, le test à l’écran permettait de distinguer un vrai ptôsis d’un pseudoptôsis lié à l’hypotropie. Dans le dernier cas, la paupière supérieure se relevait complètement lorsque le patient fixait avec l’œil atteint. Le signe de Charles Bell défini par une

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élévation du globe lors de la fermeture des paupières, et des syncinésies oculo-palpébrales ou facio-palpébrales étaient systématiquement recherchés. L’examen de la réfraction sous cycloplégie était réalisé dans tous les cas, avec prescription d’une correction optique adaptée. Un traitement proprement dit de l’amblyopie étai prescrit au besoin. Un bilan orthoptique permettait de mesurer la déviation oculaire en position primaire (verticale et/ou horizontale). Le traitement chirurgical était essentiellement indiqué en cas d’hypotropie oculaire significative en position primaire et consistait en un recul du muscle droit inférieur homolatéral et/ou un recul du muscle droit supérieur controlatéral. Une chirurgie de ptôsis proprement dite (résection du releveur de la paupière supérieure ou suspension au muscle frontal) n’était préconisée que si le ptôsis persistait après correction satisfaisante de l’hypotropie.

reprise chirurgicale avec recul du muscle droit supérieur controlatéral. Aucune chirurgie de ptôsis proprement dite, n’a été réalisée. Le résultat sur la déviation oculaire verticale et le niveau du bord libre de paupière supérieure, a été satisfaisant dans les 6 cas opérés (recul moyen de 6 mois).

Figure 1 : Enfant âgé de 5 ans, qui présente une paralysie congénitale de l’élévation de l’œil droit : hypotropie de l’œil droit (A), avec déficit de l’élévation en dehors (B), et en dedans (C). Le test à l’écran translucide montre bien l’hypertropie de l’œil gauche, lorsque l’œil droit fixe (D) et l’hypotropie de l’œil droit lorsque l’œil gauche fixe (E)

RESULTATS L’âge moyen de nos patients a été de 8,1 ans (extrêmes : 2-21). Il s’agissait de 6 garçons (60%) et de 4 filles (40%). L’œil atteint a été l’œil gauche dans 7 cas (70%). Une hypotropie de l’œil atteint, en position primaire a été objectivée chez 8 patients (80%), avec une déviation verticale allant de 8 à 20dp (Figure 1). Chez deux patients (20%), il n’y avait d’asymétrie oculaire que lors de l’effort d’élévation des yeux (Figure 2). Une ésotropie (de 15 dp) a été associée chez un patient (10%). Un ptôsis ipsilatéral a été retrouvé dans 6 cas (60%). Il était minime dans 2 cas (20%), modéré dans 2 cas (20%) et majeur dans 2 cas (20%) (Figure 3). Lorsque l’œil atteint fixait, le ptôsis disparaissait en totalité (pseudoptôsis) chez 4 patients (4/6 soit 66,7%) et partiellement chez 2 patients (2/6 soit 33,3%) (pseudoptôsis associé probablement à un vrai ptôsis). Un torticolis, tête relevée en arrière, a été noté dans 3 cas. L’indication chirurgicale n’a pas été retenue chez 4 patients à cause d’une hypotropie absente ou discrète en position primaire, ou à cause d’un âge trop jeune. Un recul de muscle droit inférieur homolatéral à la paralysie de l’élévation, a été réalisé chez 6 patients. Une patiente a nécessité une

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Figure 2 : Enfant âgé de 4 ans, qui présente une paralysie congénitale de l’élévation de l’œil gauche : pas d’hypotropie dans le regard primaire (A) mais déficit de l’élévation (B), aussi bien en dedans (C), qu’en dehors (D).

Figure 3 : Enfant de 2 ans, amené par ses parents pour une chute de la paupière supérieure gauche depuis la naissance : hypotropie et « ptôsis » de l’œil gauche en position primaire (A), avec déficit global de l’élévation (B) en rapport avec une paralysie congénitale de l’élévation de l’œil gauche.


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DISCUSSION La paralysie congénitale de l’élévation d’un œil (PCE) pourrait relever de 3 mécanismes étiopathogéniques différents : une paralysie supranucléaire de l’élévation, une fibrose initiale du muscle droit inférieur ou une paralysie isolée du droit supérieur entrainant un déficit global de l’élévation. Un signe de Charles Bell négatif (situation rare) et un test de duction forcée positif sont en faveur d’une restriction au niveau du muscle droit inférieur primitive ou secondaire [15]. Les signes cliniques sont marqués par l’hypotropie de l’œil atteint en position primaire (80% de nos patients). De face, il existe souvent un « faux ptôsis » lié à l’hypotropie et qui disparaît lorsque cet œil prend la fixation. Un vrai ptôsis peut parfois y être associé. D’ailleurs, l’abaissement du niveau du bord libre palpébral peut être le motif de consultation du patient ou de ses parents. Dans les formes mineures de la PCE, le tableau clinique est réduit à un déficit de l’élévation dans le regard vers le haut. Ceci était le cas de 20% de nos patients [14]. Le diagnostic différentiel de la PCE peut se poser pose avec le syndrome de Brown (une restriction de l’oblique supérieur à l’origine d’un déficit de l’élévation en adduction), une paralysie du IV, une paralysie congénitale du III ou d’autres affections orbitaires [3,6]. La prise en charge consiste tout d’abord à prescrire une correction optique adéquate, à rechercher une amblyopie et à la traiter. La chirurgie des formes majeures a pour but de corriger un torticolis, une déviation verticale ou horizontale en position primaire et éventuellement un ptôsis. Plusieurs procédés chirurgicaux sont envisageables. La chirurgie conventionnelle des muscles droits verticaux peut comporter un recul du droit inférieur homolatéral, un recul du droit supérieur controlatéral, une plicature ou une résection du droit supérieur homolatéral ou un recul de l’oblique inférieur homolatéral. La chirurgie de transposition, consiste à réaliser une transposition des tendons des droits horizontaux aux bords de l’insertion du droit supérieur (intervention de Knapp). La chirurgie de transposition est

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essentiellement destinée à corriger des déviations verticales importantes, non associées à une restriction du muscle droit inférieur homolatéral. Il existe un risque de surcorrection avec cette chirurgie, qui peut apparaître tardivement ou s’aggraver progressivement [1-4]. Six de nos patients ont eu une chirurgie conventionnelle, avec un résultat satisfaisant sur la déviation verticale et l’abaissement de la paupière supérieure.

CONCLUSION La PCE réalise un tableau clinique assez caractéristique. Elle ne doit pas être méconnue chez un patient qui consulte pour un « ptôsis » apparu depuis la naissance, afin d’éviter des erreurs de prise de charge. Un examen clinique minutieux, avec en particulier l’examen de l’oculomotricité, le test à l’écran, l’évaluation du signe du Charles Bell et le test de duction forcée, permettent de bien poser l’indication chirurgicale.

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LE SYNDROME PSEUDO-EXFOLIATIF DANS LA CHIRURGIE DE LA CATARACTE. ZoneAbid I, Gargouri S, Châabane M,Turki R, Ben Amor S , Sellami D, Feki J Service d’Ophtalmologie CHU Habib Bourguiba 3029 Sfax TUNISIE

RÉSUMÉ : Introduction : Le syndrome exfoliatif est une atteinte systémique liée à l’âge. Ce syndrome se manifeste par une atteinte bilatérale et asymétrique et la cataracte se manifeste plus précocement. La chirurgie de la cataracte présente des taux de complications per et post opératoires plus élevées que pour la population générale. But :Analyser les particularités épidémiologiques, cliniques du syndrome exfoliatif et étudier les complications liéesà la chirurgie de la cataracte dans le syndrome exfoliatif. Matériel et méthodes: Etude rétrospective incluant 97 yeux avec SPE opérés de cataracte entre le 1er Janvier 2013 et 31 septembre 2013 versus un groupe témoin de 105 patients sans syndrome exfoliatif. Résultats: Dans le groupe avec syndrome exfoliatif l âge moyen était de 74 ans avec une prédominance masculine (53.6%). La forme bilatérale (70,1%) était plus fréquente. Dans le groupe témoin l'âge moyen était de 71ans. Dans les deux groupes, un seul œil était opéré de cataracte. La pression intra oculairepré opératoire était de 17,19±5,38mmHg dans le groupe avec syndrome exfoliatif versus 14,88±6,54mmHg dans le groupe témoin. Les complications pré-opératoires étaient observées chez 9% des patients avec syndrome exfoliatif versus 17% dans le groupe sans syndrome exfoliatif. Les complications per opératoires étaient observées dans 35% dans le groupe syndrome exfoliatif versus 6,7% dans le groupe témoin avec une différence significative. Les complications post opératoires étaient supérieures dans le groupe avec syndrome exfoliatif (31% versus 5% dans le groupe témoin) sans différence significative. Discussion: Le syndrome de pseudo-exfoliation capsulaire entraîne des modifications de tous les tissus oculaires avec des risques de complications spontanées : mauvaise dilatation, fragilité zonulaire, phacodonésis, sub-luxation cristallinienne. Il est également responsable de complications chirurgicales spécifiques : désinsertion zonulaire, décompensation cornéo-endothéliale, inflammation postopératoire. Conclusion : Le syndrome pseudo exfoliatif est plus fréquent dans sa forme unilatérale. On observe une mauvaise dilatation de manière plus fréquente avec des complications per opératoires plus importantes. Mots clés : cataracte, syndrome exfolitaif, complications opératoires

INTRODUCTION Le syndrome pseudo exfoliatif (SPE)est une atteinte systémique d’étiologie inconnue, liée à l’âge, définie par la production et le dépôt anormal de matériel fibrillaire pseudo-exfoliatif dans le segment antérieur [1].La première description date de 1917 par Lindberg [2]. Le diagnostic est clinique avec un aspect en cocarde caractéristique de matériel exfoliatif déposé sur la capsule cristallinienne. La prévalence augmente avec

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l’âge : 1 % des patients ayant un SPE ont moins de 60 ans, et 10 % ont plus de 80 ans. Par ailleurs, sa distribution est planétaire [3]. Le matériel fibrillaire pseudo-exfoliatif a également été retrouvé dans plusieurs tissus extra-oculaires : peau, cœur, poumons, foie, vaisseaux, reins, méninges [4]. Le but de notre travail est d’étudier les caractéristiques cliniques ainsi que les complications liées à la chirurgie de la cataracte dans le SPE.


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PATIENT ET METHODES Nous avons mené une étude mono centrique, rétrospective, comparative, incluant 97 yeux avec SPE opérés de cataracte entre le 1er Janvier 2013 et 31 septembre 2013 par 10 chirurgiens entrainés à l'Hôpital Habib Bourguiba de Sfax. Les patients ont été opérés soit par phacoémulsification, soit par extraction extra capsulaire avec implantation dans la chambre postérieure. En cas de subluxation ou de luxation cristallinienne, on a opté pour une extraction intra capsulaire avec implantation dans la chambre antérieure. Le groupe témoin, constitué par tirage au sort, était composé de 105 patients sans SPE opérés de cataracte pendant la même période et dans les mêmes conditions. Le diagnostic de SPE était clinique, défini par la présence de dépôt de matériel pseudo-exfoliatif sur la capsule antérieure du cristallin après dilatation. Les caractéristiques des patients du groupe porteur de SPE (âge, sexe, ethnie, antécédents généraux et ophtalmologiques), un examen ophtalmologique complet (dilatation pupillaire, uni/bilatéral, la pression intra oculaire) préopératoires ainsi que les complications pré, per et post opératoires ont été analysées et comparés au groupe témoin (sans SPE). Les données quantitatives sont exprimées sous forme de moyenne (± écart type) [Min ; Max]. Pour les calculs statistiques, un test de Student a été utilisé. Une valeur de « p » inférieure à 0,05 a été considérée comme significative.

RESULTATS Les caractéristiques des deux groupes ont été résumées dans le tableau I Tableau I : Caractéristiques démographiques et comorbidité associées dans les deux groupes. Groupe Nombre de patients Nombre d’yeux examinés Nombre d’yeux opérés Homme Femme Age moyen (années) [min, max] Forme unilatérale

SPE 97 194 97 52 (53.6%) 45 (46.4%) 74,27±8,68 [52 ; 95] 29 (29,9%)

Témoin 105 210 105 54 51 71,25±8,41 [50 ; 93] -

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Forme bilatérale 68 (70,1%) GCAO associé 13 (13,9%) 3 (2,9%) HTA 43 (44,33%) 38 (36,19%) Diabète 23 (23,71%) 16 (15,24%) Dyslipidémie 2 (2,06%) 8 (7,62%) AVC 3 (3,1%) 3 (2,86) Coronaropathie 24 (24,74%) 7 (6,67%) GCAO : glaucome chronique à angle ouvert ; HTA :hypertension artérielle ; AVC :accident vasculaire cérébral.

Les deux groupes étaient constitués de 97 yeux porteurs de SPE et de 105 yeux sans SPE. Le sexe ratio du groupe avec SPE était de 1,16 avec 52 hommes (53,6%) et 45 femmes (46,4%), d’âge moyen 74,27±8,68 ans. Le sexe ratio du groupe témoin était de 1,06 avec 54 hommes (51,4%) et 51 femmes (48,6%), d’âge moyen 71,25±8,41 ans. La forme bilatérale (70,1%) était plus fréquente par rapport à la forme unilatérale (29,9%). Une mauvaise dilatation était observée dans 13 cas (13,4%) dans le groupe SPE versus 3 cas (2,9%) dans le groupe témoin. La pression intra oculaire (PIO) pré opératoire était de 17,19±5,38mmHg dans le groupe SPE versus 14,88±6,54mmHg dans le groupe témoin.La répartition des différents types de cataracte observés dans le groupe SPEétait : cortico-nucléaire (40 %), blanche totale (31 %), sous-capsulaire (5 %), nucléaire (2 %) et brune (22%). Pour le groupe témoin, la répartition des différents types de cataracte était : cortico-nucléaire (40 %), blanche totale (35%), sous-capsulaire (5 %), nucléaire (1 %) et brune (19%). La phacoémulsification était réalisée dans 40 cas (19,8%),l’extraction extra capsulaire dans 152 cas (75,2%) et l’extraction intra capsulaire dans 10 cas (5%). Les complications pré-opératoires (intumescence, subluxation, luxation et glaucome phacolytique) ont été observées chez 9% des patients avec syndrome exfoliatif versus 17% dans le groupe sans syndrome exfoliatif(Figures 1). Les complications post opératoires (inflammation post opératoire, cataracte secondaire, décompensation cornéenne) étaient supérieures dans le groupe avec syndrome exfoliatif (31% versus 5% dans le groupe témoin)(Figures 3). Il n’y avait pas de différence significative entre les deux groupes concernant les complications pré et post opératoires. Quant aux complications per opératoires, elles étaient observées dans 34 cas (35%) dans le groupe SPE versus 7 cas (6,7%) dans le groupe témoin avec une différence significative(p<0,05) (Figure 2).

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Figure 1 : Complications pré opératoires du syndrome exfoliatif versus le groupe témoin.

Figure 2 : Complications per opératoire du syndrome exfoliatif versus le groupe témoin.

Figure 3 : Complications post opératoires du syndrome exfoliatif versus le groupe témoin.

DISCUSSION Le SPE est une atteinte liée à l’âge dont la prévalence augmente significativement au-delà de 60 ans. Dans notre étude, l’âge moyen des patients était de74,27±8,68 ans dans le groupe SPE. La prévalence serait autour de 30 % dans une population au-delà de 60 ans de toute origine confondue [5]. Dans notre étude, le diagnostic de SPE était clinique, défini par la présence à la lampe à fente

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de matériel exfoliatif sur la capsule antérieure du cristallin. Plusieurs autres signes cliniques moins spécifiques sont retrouvés dans leSPE comme une transillumination irienne, un dépôt pigmentaire sur l’iris, une dispersion pigmentaire après dilatation pupillaire, une pigmentation du trabéculum et des complications comme un phacodonésis, une luxation ou sub-luxationcristallinienne. Dans notre étude et dans le groupe SPE, nous avons retrouvé une prédominance de la forme bilatérale (70 %) par rapport à la forme unilatérale (30 %). Selon l’étude de Puska et al. [6], il s’agit d’une atteinte bilatérale, mais de présentation asymétrique avec un long délai entre les deux yeux : 38 % de bilatéralisation à 10 ans. Dans les formes unilatérales, l’œil avec un SPE clinique présente une PIO plus élevée, une moins bonne dilatation, une cataracte plus importante et un trabéculum plus pigmenté. Guo et al. [2] ont montré l’intérêt de l’UBM en cas de doute sur le diagnostic clinique de SPE. En effet l’UBM montre une capsule antérieure et périphérique fine, une zonule plus fine et des dépôts nodulaires dans la zonule. Dans notre étude, la PIO préopératoire était plus élevée dans le groupe SPE (17,19±5,38mmHg) par rapport au groupe témoin (14,88±6,54mmHg), comme dans l’étude de Ritch et al. [6]. Damji et al. [7] ont rapporté un risque d’hypertension intraoculaire 6 à 10 fois supérieure chez des patients atteints de SPE, avec un taux de 25 % d’hypertension intra-oculaire, soulignant l’intérêt majeur de surveiller la PIO en présence d’un SPE clinique. L’association entre SPE et glaucome chronique à angle ouvert est connue depuis longtemps [5]. Dans notre étude, 13 cas (13.9 %) d’association entre glaucome chronique à angle ouvert et SPE ont été notés alors que le groupe témoin ne comptait que 3 cas (2,9 %) de glaucome chronique à angle ouvert. Ces résultats montrent que le SPE est un facteur de risque indépendant de glaucome chronique à angle ouvert. Le SPE représente un risque relatif de 2 de passage à un glaucome chronique à angle ouvert à 8 ans en présence d’une hypertension intra-oculaire [3]. Dans notre étude, nous avons noté 13 cas (13,4 %)de mauvaise dilatation irienne dans le groupe SPE et 3 cas (2,9 %) dans le groupe témoin. Ces résultats sont concordants avec ceux rapportés


JOURNAL TUNISIEN D’OPHTALMOLOGIE dans la littérature. La mauvaise dilatation fait en effet partie des signes cliniques décrits dans le SPE, et représente une des difficultés opératoires liées au SPE, d’autant plus qu’elle est associée à une fragilité zonulaire [8]. Dans notre étude, le taux de complications peropératoires était significativement supérieur dans le groupe SPE que dans le groupe témoin : 34 cas (35 %) dans le groupe SPE versus 7 cas (6,7%) dans le groupe témoin. Hyams et al.[9] n’ont pas trouvé de différence significative entre les taux de complications peropératoires des patients atteints de SPE et les témoins (5,8 % versus 4 %). Selon ces auteurs, le SPE ne serait pas un facteur de risque pour la chirurgie de la cataracte, mais uniquement en l’absence de phacodonésis ou de sub-luxation cristallinienne. Le SPE comme facteur de risque de la chirurgie de la cataracte est un sujet de controverse, certaines études montrant une différence et d’autres non entre les groupes SPE et témoin [9]. Les points clés dans la chirurgie sont l’expérience du chirurgien et une bonne dilatation pupillaire (éventuellement à l’aide de crochets iriens). Dans notre étude, la cataracte de type corticonucléaire était la principale forme de cataracte associée au SPE (40 %). En ce qui concerne les atteintes systémiques associées, nous avons noté une différence significative concernant les patients atteints d’insuffisance coronaire dans les deux groupes : 34 cas (35 %) dans le groupe SPE et 7 cas (6,7 %) dans le groupe témoin. Le SPE est une atteinte systémique ; un dépôt de matériel pseudo-exfoliatif a été mis en évidence dans plusieurs tissus extraoculaires [4]. Une association a été retrouvée entre le SPE et l’hypertension artérielle, l’infarctus du myocarde, l’accident vasculaire cérébral et la maladie d’Alzheimer [10]. Alors que Shrum et al.[4] n’ont montré aucune association entre SPE et mortalité cérébro-vasculaire et cardio-vasculaire, il semblerait néanmoins que l’on retrouve un taux d’hyperhomocystéinémie plus importante dans le SPE [4].

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CONCLUSION Le SPE doit être systématiquement recherché dans le bilan préopératoire de la cataracte. Il faut examiner tous les patients après dilatation pupillaire à la recherche de dépôt de matériel pseudo-exfoliatif sur la capsule antérieure et suspecter un SPE en présence d’une mauvaise dilatation irienne. D’autre part, il faut systématiquement prendre la PIO en présence d’un SPE à la recherched’une hypertension intraoculaire ou un glaucome chronique à angle ouvert.

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LES TRAUMATISMES OCULAIRES À GLOBE OUVERT DE L’ENFANT. Inès Malek, Jihene Sayadi, Olfa Fekih, Mekni Madiha, Omar Romdhane, Zghal Imene, Nacef Leila. Service A d’ophtalmologie, Institut « Hédi Raies » d’ophtalmologie Faculté de Médecine de Tunis

RÉSUMÉ : Introduction : Le traumatisme à globe ouvert de l’enfant est un motif fréquent de consultation aux urgences d’ophtalmologie. Il s’agit d’un accident grave qui peut compromettre définitivement la vision de l’œil atteint. Le but de ce travail est de déterminer les particularités épidémiologiques et les facteurs pronostiques des traumatismes à globe ouvert de l’enfant. Patients et méthodes : Nous avons mené une étude rétrospective sur une période de 10 ans portant sur 173 enfants de moins de 16 ans, hospitalisés dans le service « A » de l’institut d’ophtalmologie de Tunis, entre 2005 et 2015 pour traumatisme oculaire à globe ouvert. Résultats : L’âge moyen des enfants était de 7,06 ans ±4,2. Une prédominance masculine a été notée 67% des cas. Le domicile était le lieu de prédilection de ces accidents (43,41%). Les circonstances du traumatisme étaient dominées par les accidents de jeux (63,07%). La meilleure acuité visuelle corrigée finale était supérieure ou égale à 5/10 dans 24,83% des cas. La cécité monoculaire était observée dans 38,88%. Les principaux facteurs de mauvais pronostic étaient: l’acuité visuelle initiale inférieure à 1/10, le siège cornéoscléral de la plaie, les plaies de taille supérieur à 10 mm, l’hyphéma, la cataracte post-traumatique, l’hémorragie intravitréenne, le décollement de rétine, l’issue du vitré et la rupture du globe. Conclusion : Au terme de cette étude, nous insistons sur l’intérêt d’une chirurgie rigoureuse dans les plus brefs délais. Le meilleur traitement demeure sans doute préventif. Mots clés : traumatisme à globe ouvert, enfant, épidémiologie, pronostic. Key-words: uveitis, children, epidemiology, sarcoidosis

INTRODUCTION Malgré les importants progrès réalisés dans la prise en charge thérapeutique, les traumatismes oculaires à globe ouvert demeurent une cause majeure de cécité monoculaire infantile dans le monde.Ces accidents constituent un véritable problème de santé publique avec un impact psychologique et socioéconomique important. Dans notre étude, nous rapportons 173 cas de traumatisme à globe ouvert chez des enfants de moins de 16 ans hospitalisés au service «A» de l’institut « Hédi Raïs » d’ophtalmologie de Tunis entre 2005 et 2015. Le but de ce travail est de rapporter les particularités épidémiologiques et cliniques des traumatismes à globe ouvert de l’enfant et de dégager les facteurs pronostiques.

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PATIENTS ET METHODES Nous avons mené une étude rétrospective sur une période de 10 ans portant sur 173 enfants de moins de 16 ans, hospitalisés dans le service « A » de l’institut d’ophtalmologie de Tunis, entre 2005 et 2015 pour traumatisme oculaire à globe ouvert. Nous avons exclus de notre étude les enfants ayant un traumatisme à globe fermé, les traumatismes ayant occasionné uniquement des lésions des annexes, les traumatismes orbitaires isolés. Le recul moyen de notre étude était de 20 mois avec des extrêmes allant de 2 mois à 7 ans et 5 mois. L’anamnèse a permis de recueillir les antécédents généraux et ophtalmologiques (en particulier une pathologie oculaire préexistante source d’amblyopie ou de malvoyance), les circonstances


JOURNAL TUNISIEN D’OPHTALMOLOGIE de l’accident, l’agent causal ainsi que le délai de consultation. L’acuité visuelle préopératoire a été mesurée chaque fois que les lésions et la coopération de l’enfant le permettaient. Un examen ophtalmologique, le plus complet possible, a été pratiqué à la lampe à fente ou sous anesthésie générale pour les enfants non coopérants.Il a permis de préciser les caractéristiques de(s) la(les) plaie(s) oculaire(s) (siège, taille, nombre….) ainsi que les lésions associées. Au terme de cet examen, les traumatismes ont été classés selon la classification de Kuhn [1] : « la Birmingham eye trauma terminology ». Une radiographie standard des orbites était systématique pour tous les enfants à la recherched’une fracture du cadre orbitaire, un hémo-sinus, un pneumo-orbite ou un corps étranger radio-opaque. Une échographie oculo-orbitaire en mode B a été pratiquée en cas de plaie minime colmatée ou en postopératoireaprès suture des plaies. Une tomodensitométrie oculo-orbitaire a été indiquée en cas de suspicion d’un corps étranger intraoculaire ou face à un traumatisme complexe pour un bilan lésionnel plus précis.

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L’âge de nos patients variait de 9mois à 15 ans et 10 mois avec une moyenne de 7,06ans±4,2 ans. Les enfants âgés de 5 à 10ans étaient les plus fréquemment atteints avec une fréquence de 65,27% des cas. Une prédominance masculine était notée dans 67 % des cas. Le traumatisme oculaire était unilatéral dans tous les cas. Le lieu de l’accident a été précisé dans 116 cas soit 67% des cas, révélant une prédominance des accidents domestiques (41,9%). Les circonstances de survenue étaient dominées par les accidents de jeux (63,2% des cas).L’agent traumatisant a été précisé dans la plus part des cas (140 cas soit 80,9%) avec une nette prédominance des objets métalliques a été constatée (32,9%). La plaie oculaire était pénétrante dans 111 cas (64,16%) et perforante dans un cas (0,6%). Un éclatement du globe a été noté dans 43 cas (27,7%). La plaie du globe était de siège cornéen chez 107 enfants (61,84%) (Figure 1), cornéo-limbique chez deux enfants (1,2%), limbique chez deux enfants (1,2%), cornéo-scléral chez 25 enfants (14,45%) et scléral chez 14 enfants (8%). Quatre enfants présentaient des plaies oculaires multiples (2,31%). Un corps étranger intraoculaire (CEIO) a été objectivé dans 10 cas (5,78%) (Figure2).

Tous les enfants ont bénéficié d’une sérothérapie et/ou d’une vaccination antitétanique selon leur profil vaccinal ainsi que d’une antibiothérapie prophylactique par voie générale. La prise en charge chirurgicale a consisté à suturer les plaies après parage ± réintégration des tissus hernié. En fonction des lésions associées, une reprise chirurgicale a été nécessaire pour certains patients. Tous les enfants ont été suivis régulièrement jusqu'à consolidation des lésions. Les données statistiques ont été analysées au moyen du logiciel SPSS version 18.0.

RESULTATS

Figure n°1 : Aspect postopératoire à J15 d’une plaie de cornée paracentrale suturée avec excision de l’iris hernié.

Durant la période d’étude, 417 patients atteints de traumatisme à globe ouvert ont été hospitalisés. Parmi eux, 173 étaient des enfants de moins de 16 ans, soit 41,48% des cas.

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Figure n°2 : cataracte post-traumatique associée à un corps étranger intra-cristallinien

L’acuité visuelle initiale n’a pu être précisée que chez 108 patients, soit 62,42% des cas. Elle était supérieure ou égale à 5/10 dans 11 cas (10,1%) et comprise entre 5/10 et 1/10 dans 22 cas (20,37%). Dans 64 cas (59,2%), l’acuité visuelle initiale était inférieure à 1/10. La perception lumineuse négative était notée dans 11 cas (10,1%). Certaines lésions, associées à la plaie, ont été traitées dans le même temps opératoire,d’autres ont nécessité un second temps opératoire voir plus (Tableau1). Ces lésions ont été dominées par l’hernie de l’iris et la cataracte traumatique. Tableau 1 : Lésions oculaires associées à la plaie du globe Lésionsassociées Nombred’yeux Pourcentage (%) Hernie de l’iris 89 51,4 Hernie du corps ciliaire 10 5,7 Hyphema 50 28,9 Issue de vitré 33 19 Cataracte post-traumatique 61 35,2 Hémorragieintravitréenne (HIV) 17 10,4 Corps étrangerintraoculaire (CEIO) 11 6,35 Décollement de rétine 4 2,31

Au cours de la période de suivi, de nombreuses complications post traumatiques ont été observées, dominées par les réactions inflammatoires (Tableau 2). Tableau 2 : Complications rencontrées au cours du suivi postopératoire Complications Abcès de cornée Réaction inflammatoire de la Chambre antérieure Endophtalmie Décollement de rétine tardif Glaucome post-traumatique Ophtalmie sympathique Phtyse du globe

50

Nombre d’yeux 2

Pourcentage(%)

45

2,6

1 7 2 1 33

0,57 4 1,15 0,57 19

1,15

Après consolidation des lésions, 40 enfants (23,12% des cas) ont développé une opacité cornéenne séquellaire. Un astigmatisme irrégulier post-traumatique a été noté chez 31enfants de notre série (17,9%des cas).QuaranteQuatre enfants, soit 25,43% des cas, ont développé des synéchies iriennes. Deux enfants (1,2% des cas) ont développé un glaucome secondaire. Un décollement de rétine post-traumatique tardif a été constaté chez six patients de notre série, soit 3,46% des cas. Son délai d’apparition variait de deux mois à 4ans neuf mois après le traumatisme. L’ophtalmie sympathique a été observée chez un seul enfant présentant un éclatement du globe sur œil non fonctionnel (glaucome congénital absolu). Enfin, la phtyse du globe a été observé chez 32 patients de notre série, soit 18,49%. La meilleure acuité visuelle finale, après consolidation des lésions, a été précisée chez 107 patients. Elle était supérieure ou égale à 5/10 dans 24,83% des cas et comprise entre 5/10 et 1/10 dans 27% des cas avec une acuité visuelle finale moyenne de 3,2/10. Une acuité visuelle inférieure à 1/10 a été retrouvée dans 51,5 % des cas dont 38,88% avait une cécité monoculaire définitive (acuité visuelle inférieure à 1/20). Les principaux facteurs de mauvais pronostic visuel retrouvés dans notre série étaient : l’acuité visuelle initiale inférieure à 1/10 (p=0,001), la rupture du globe (p=0,039), le siège cornéo-scléral de la plaie (8.10-5), la taille de la plaie supérieure à 10mm (p=3.10-4), l’issue de vitré (p=10-5) et l’existence d’une cataracte post traumatique (p=7.10-4). Par ailleurs, l’hyphéma (p=10-4), l’hémorragie intravitréenne (p=0,005), le décollement de rétine (5.10-5) ainsi qu’un nombre de procédures chirurgicales supérieur ou égal à deux (p=0,018) étaient également associés de manière significative à un mauvais pronostic fonctionnel. Cependant, nous n’avons pas trouvé de relation statistiquement significative entre la présence d’un CEIO et un mauvais pronostic visuel (p=0.851).


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DISCUSSION La fréquence des traumatismes à globe ouvert chez l’enfant est variable d’un pays à un autre allant de 18,7 à 69,8℅ de l’ensemble des traumatismes à globe ouvert[2,3]. Selon certaines études, ces accidents représentent près de 20 %des consultations de traumatologie oculaire pédiatrique avec une incidence variant de 1,5 à 8 cas par 100000 habitants dans les pays développés [4,5]. La prédominance masculine est classiquement rapportée dans la littérature avec un sex-ratio variant de 2 à 7,3 selon les séries [6,7,8]. Cette prédominance a été également constatée dans notre série. L’atteinte unilatérale, constatée dans notre série, est une observation habituelle des traumatismes à globe ouvert de l’enfant. Les cas d’atteinte bilatérale, rapportés dans certaines séries, sont très rares [9]. La moyenne d’âge de survenue de ces traumatismes chez l’enfant varie de 5 à 9,4 ans selon les auteurs [7,10]. Dans notre étude avons retrouvé une moyenne d’âge de 7,06ans. Notre résultat se rapproche de celui rapporté par Hill[11]. Le pronostic fonctionnel des traumatismes à globe ouvert chez l’enfant est dominé par le risque d’amblyopie pouvant compromettre la récupération visuelle chez l’enfant en bas âge même après une récupération anatomique satisfaisante. En effet, Baxter [12] a rapporté de mauvais résultats fonctionnels chez les enfants âgés de moins de huit ans. Cependant, pour d’autres auteurs [13], l’âge au moment de survenue du traumatisme n’avait pas de valeur pronostique. Il est admis que le retard de prise en charge augmenterait le risque de survenue d’infections endoculaires dont le pronostic est souvent réservé. Cependant comme d’autres auteurs [13], nous n’avons pas trouvés de relation statistiquement significative entre un délai de consultation de plus de 24 heures et un mauvais pronostic fonctionnel. Ce résultat peut être expliqué par le fait que les enfants gravement blessés, dont le pronostic était souvent réservé, ont été amenés aux urgences dans les plus brefs délais.

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L’acuité visuelle initialea été retrouvée par la plus part des auteurs comme étant un facteur de pronostic fonctionnel lors des traumatismes à globe ouvert [10,14, 15]. Ainsi, dans la série de Hill [11] 81,3% des enfants ayant une acuité visuelle finale inférieure à 1/10, avaient une acuité visuelle initiale identique. En effet, une baisse importante de l’acuité visuelle initiale témoigne généralement d’un traumatisme oculaire grave. Dans notre série, une acuité visuelle initiale inférieure à 1/10 était un facteur significatif de mauvais pronostic fonctionnel. De plus, l’acuité visuelle initiale a une valeur médicolégale et doit être mesurée chaque fois que les lésions et la coopération de l’enfant le permettent. Parmi les traumatismes à globe ouvert, les lacérations transfixiantes à type de plaies pénétrantes sont classiquement les lésions prédominantes avec une fréquence variant de 75% à 95,8%[8]. Dans notre étude, les plaies pénétrantes du globe étaient retrouvés dans 64,16% alors que les ruptures du globe étaient notées dans 27,7% des cas ce qui concorde avec les résultats de la littérature.Ces ruptures du globe sont habituellement un facteur de mauvais pronostic car elles sont souvent responsables de plaies assez étendues avec hernies tissulaires et atteinte fréquente du segment postérieur. Ceci a été rapporté par de nombreux auteurs [2,10] et constaté par notre étude également. La prédominance de l’atteinte cornéenne a été unanimement rapportée dans la littérature avec des fréquences variables allant de 47,1% à 75% selon les séries [3]. Dans notre série, la plaie oculaire était de siège cornéen chez 61,84% des patients. Les plaies sclérales ont été considérées par de nombreux auteurs comme un élément clinique de mauvais pronostic fonctionnel [15,16]. D’autres auteurs [17] ont retrouvé que la localisation cornéosclérale était plus fréquemment associée à un mauvais pronostic fonctionnel par rapport aux plaies cornéennes ou sclérales pures. Ces mêmes constatations ont été retrouvées dans notre série. Pour certains [13], les plaies de taille supérieure ou égale à 5mm étaient corrélées à un pronostic visuel défavorable. Toutefois, pour d’autres auteurs [10,16], cette relation n’a été retrouvée que pour les plaies de taille supérieure ou égale à 10mm. Nos résultats concordent avec les constatations de ces derniers.

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Les lésions associées du segment antérieur sont plus fréquentes et souvent de meilleur pronostic que celles du segment postérieur[15]. L’hyphéma post traumatique représente la lésionla plus fréquemment associée à la plaie[7,18].Sa résorption s’accompagne d’un risque important d’hypertonie oculaire et d’hemato-cornée auxquelles s’ajoute le risque d’amblyopie chez les petits enfants, si l’axe visuel n’est pas dégagé dans les meilleurs délais [19]. Ainsi, aussi bien dans la littérature que dans notre série, l’hyphémaa été associé à un mauvais pronostic fonctionnel. La cataracte est l’une des complications les plus fréquentes des traumatismes à globe ouvert. La fréquence de la cataracte post traumatique chez l’enfant, suite à un traumatisme à globe ouvert, varie de 16,8% à 67% selon les séries[3,17]. Dans notre série, 35,2% des patients ont développé une cataracte post-traumatique. Certains auteurs[18,20] ont retrouvé que la cataracte était liée à un mauvais pronostic fonctionnel en raison des problèmes de correction de l’aphaquie unilatérale, ce qui a été confirmé par notre étude. Les lésions associées du segment postérieursont très variés et peuvent intéresser toutes ses structures mais la lésion la plus redoutable reste de loin le décollement de rétine (DR). Le DR post-traumatique précoce est un décollement rhegmatogène dont l’origine est une déhiscence rétinienne ou une dialyse à l’ora[19]. Ses principaux facteurs de risque sont l’existence d’une plaie sclérale, d’un corps étranger intraoculaire, d’une issue du vitré oud’une hémorragie intravitréenne. Sa fréquence chez l’enfant varie de 5,3% à 14,3% selon les séries [18,21]. Dans notre série, 11enfants ont présenté un décollement de rétine (DR) post traumatique dont 4 avaient un DR précoce.C’est l’un des facteurs les plus péjoratifs du pronostic fonctionnel retrouvé dans la littérature [2,10,20].Parallèlement,dans notre série, le DR a été retrouvé comme étant un facteur de mauvais pronostic fonctionnel. Par ailleurs, l’issue du vitré et l’hémorragie intra vitréenne sont classiquement associé à un mauvais pronostic fonctionnel comme l’attestent plusieurs études [10,15,20]ainsi que notre série. La fréquence des CEIO chez l’enfant varie de 4,5% à 27% selon les séries [11,18]. Dans notre série, un corps étranger a été retrouvé chez onze patients dont dix était intraoculaires.

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Une revue de la littératuremontre que le pronostic fonctionnel des plaies oculaires avec rétention d’un corps étranger intraoculaire est souvent réservé en raison des complications inhérentes aux CE (traumatiques, infectieuses, toxiques…) et des éventuelles problèmes d’extraction [22,23]. Cependant, dans notre série, nous n’avons pas trouvé de relation statistiquement significative entre l’existence d’un CEIO et un mauvais pronostic fonctionnel (p=0.851). Ce résultat serait probablement en rapport avec le faible effectif des CEIO dans notre série.

CONCLUSION Le traumatisme à globe ouvert de l’enfant est un accident grave qui peut conduire à la malvoyance voir la cécité monoculaire dont les répercussions sur l’avenir psychologique, scolaire et ultérieurement professionnel sont considérables. Le pronostic fonctionnel dépend de plusieurs facteurs notamment le type de la plaie, lésions associées, la précocité et la qualité de la prise en charge ainsi que la survenue de complications ultérieures. Le meilleur traitement reste sans doute préventifen passant par la sensibilisation des parents et l’éducation des enfants.

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Cas Cliniques

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EVOLUTION NATURELLE DE LA DYSTROPHIE MACULAIRE PSEUDOVITELLIFORME DE L’ADULTE : APPORT DE L’OCT-SPECTRAL DOMAIN

BOURAOUI R, BOULADI M, MGHAIETH F, SAMMOUDA T, MASMOUDI A, LIMAIEM R, CHAKER N, EL MATRI L

INTRODUCTION

La dystrophie vitelliforme de l’adulte est une affection maculaire relativement peu fréquente décrite par Gass en 1974 et qui a des similarités phénotypiques avec la maladie de Best. Le début clinique survient entre la 4ème et la 6ème décade et se caractérise par le dépôt de matériel maculaire sous rétinien jaunâtre. C’est une maladie cliniquement hétérogène avec des variabilités dans la taille, la forme, les modifications pigmentaires et la distribution du matériel jaunatre. Ce matériel est très hyperautofluorescent. Les appareils d’OCT de nouvelle génération en mode spectral ont permis une meilleure analyse de la localisation du matériel et de ces modifications avec le temps.

OBSERVATIONS OBSERVATION 1 Patient âgée de 64 ans, sans ATCD pathologiques particuliers qui consulte pour une gène à l’œil droit, L’examen ophtalmologique trouve à l’œil droit une acuité visuelle à 8/10, un segment antérieur calme, une pression intraoculaire à 13mmHg et au fond d’œil la présence d’une lésion jaunâtre sous rétinienne maculaire arrondie, pas d’hémorragie ou de DSR. A l’œil gauche, l’acuité visuelle était à 9/10 non améliorable, le segment antérieur était calme, la pression intraoculaire à 13mmHg, Cataracte corticale et un fond d’œil normal.

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FIGURE 1 : (a)Photographie du fond d’œil montrant une lésion jaunâtre sous rétinienne maculaire arrondie correspondant au matériel. (b) L’OCT SD montre le matériel rétrofovéolaire hyperréflectif localisé entre le complexe EP-membrane de bruch et la rétine neurosensorielle et la ligne SI/SE qui est intacte expliquant L’AV conservée

OBSERVATION 2 Patient âgé de 65 ans, sans ATCD pathologiques particuliers qui consulte pour une Baisse progressive de la vision à l’œil droit. L’examen


JOURNAL TUNISIEN D’OPHTALMOLOGIE ophtalmologique trouve à l’œil droit une acuité visuelle à 1/10, un segment antérieur calme, une pression intraoculaire à 13mmHg et au fond d’œil présence d’altérations de l’épithélium pigmentaire maculaire, pas d’hémorragie ou de décollement séreux rétinien. A l’œil gauche, l’acuité visuelle était à 10/10, le segment antérieur calme, la pression intraoculaire à 13mmHg, une cataracte corticale et un fond d’œil sans particularités.

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qui montre un matériel hyperréflectif qui apparait localisé entre le complexe EP-membrane de bruch et la rétine neurosensorielle et permet l’analyse de la ligne SI/SE. L’évolution du matériel se fait vers la résorption progressive partielle ou totale et l'OCT-SD montre bien ces modifications avec le temps, en effet, au stade de début où l’acuité visuelle est relativement conservée, l’OCT-SD montre l’accumulation du matériel hyperréflectif dans l’espace sous rétinien avec une ligne SI/SE intacte. La progression de la maladie survient après une courte période avec une résorption partielle ou complète du matériel responsable de zone hypo et hyperréflective à l’OCT-SD et cette progression entraine une altération de la ligne SI/SE et une baisse de l’acuité visuelle. Le matériel vitellin peut évoluer vers l’atrophie ou se compliquer de néovascularisation choroïdienne.

CONCLUSION L’OCT-SD est un examen incontournable en cas de dystrophie vitelliforme de l’adulte à tous les stades, il démontre l’homogéneité ou l’hétérogeneité hyperréflective du matériel, l’aspect de la ligne SI/SE et détecte une éventuelle néovascularisation.

REFERENCES

FIGURE 2 : (a) la photographie du fond d’œil montre une résorption quasi-totale du matériel, et (b,c) l’OCTSD montre une absence de la ligne SI/SE expliquant la baisse profonde de l’acuité visuelle.

DISCUSSION Le diagnostic de la dystrophie vitelliforme de l’adulte a été nettement facilité par les clichés en autofluorescence qui montrent un matériel maculaire de forme arrondie et fortement hyperautofluoresccent et l’OCT en mode spectral

1- Querques G, Forte R, Querques L, Massamba N, Souied EH. Natural Course of Adult-Onset Foveomacular Vitelliform Dystrophy: A SpectralDomain Optical Coherence Tomography Analysis. Am J Ophthalmol 2011;152:304–313. 2- Dolz-Marco R, Gallego-Pinazo R, Díaz-Llopis M. Natural course of adult-onset foveomacular vitelliform dystrophy: a spectral-domain optical coherence tomography analysis. Am J Ophthalmol. 2012 Feb;153(2):389. 3- Grob S, Yonekawa S, Eliott D. Multimodal imaging of adult-onset foveomacular vitelliform dystrophy. Saudi Journal of Ophthalmology (2014) 28, 104–110.

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EXTENSION ORBITAIRE D`UNE MUCOCÈLE FRONTO-ETHMOÏDALE: À PROPOS D’UN CAS CLINIQUE Saadouli D, yahyaoui S, Ammar F, Sayadi J, Choker A, El Matri K, Dhouib N, Mallaouch N, El Afrit MA Service dʹophtalmologie dʹophtalmologie La Rabta

Résumé : La mucocèle naso-sinusienne est une formation pseudo-kystique histologiquement bénigne, mais grave du fait dʹune possible extension intra-orbitaire via une destruction des parois osseuses des sinus, pouvant être à l`origine des complications ophtalmologiques redoutables. Son traitement est chirurgical. Nous rapportons le cas d`un patients ayant une mucocèle fronto-ethmoïdale envahissant l`orbite. Mots clés : Mucocèle fronto-ethmoïdale, Complications orbitaires, Chirurgie

INTRODUCTION La mucocèle naso-sinusienne est une pseudotumeur kystique se développant aux dépend des muqueuses de tous les sinus de la face [1,2]. Elle est souvent latente et bénigne, mais une extension intraorbitaire via une destruction des parois osseuses des sinus peut être responsable de plusieurs complications ophtalmologiques redoutables. La chirurgie est le traitement de choix des mucocèles, et consiste à l’exérèse du kyste et au drainage du sinus causal [1]. Le but de ce travail est de rapporter le cas d`un patients ayant une mucocèle fronto-ethmoïdale envahissant l`orbite.

L’examen ORL à l’admission a mis en évidence une tuméfaction fronto-ethmoïdale droite. La rhinoscopie antérieure retrouve une hypertrophie du cornet inférieur droit. La tomodensitométrie du massif facial a montré une masse éthmoïdo-frontale pseudo-liquidienne bien limitée à parois fines, avec une lyse osseuse du toit de l’orbite et de la lame papyracée. Le patient a été mis sous traitement antibiotique puis opéré par voie endo-nasale: Une méatotomie moyenne avec marsupialisation de la mucocèle.

OBSERVATION Enfant Il s’agit d’un patient âgé de 51 ans, sans antécédents de traumatisme qui s’est présenté pour exophtalmie, évoluant depuis 6 mois. La symptomatologie clinique était marquée au début par une douleur fronto-orbitaire droite, obstruction nasale homolatérale, une tuméfaction canthale interne. A noter qu`il n’y a pas eu de baisse de l’acuité visuelle, ni de trouble de l’oculomotricité ou du champ visuel.

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Figure 1. TDM du massif facial (coupe coronale) : masse éthmoïdo-fronto-orbitaire pseudo-kystique refoulant le globe oculaire en dehors


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DISCUSSION REFERENCES La mucocèle siège moins souvent dans le sinus ethmoïdal que dans le sinus frontal (3,4). Les complications et extension vers l’orbite représentent le mode d’expression clinique le plus courant des mucocèles fronto ethmoïdales [5]. Malgré lʹabsence de baisse de l`acuité visuelle et de trouble oculomoteur, les complications orbitaires sont graves. Elles peuvent mettre en jeu le pronostic visuel par : compression du nerf optique (complication la plus fréquente) [6], atteinte au niveau de l’apex orbitaire des nerfs crâniens, paralysie oculomotrices, atteinte du chiasma optique) [7]. De nos jours, malgré les progrès techniques en imagerie TDM et ou IRM, le diagnostic des mucocèles à un stade avancé, comme c’est le cas chez notre patient qui consulte au stade de déformation du visage, dénote d’une consultation tardive. Ceci pourrait être expliqué par les mauvaises conditions socio-économiques. Le traitement des mucocèles est essentiellement chirurgical. Deux voies d’abord sont possibles : les voies externes, et la voie d’abord endonasale ou chirurgie endoscopique [8]. Pour notre patiente on a opté pour une voie d`abord endonasale. Cependant cette voie présente des limites telles une marsupialisation insuffisante, sources de synéchies et de récidives [9]. Le recul pour notre cas (3 mois) parait insuffisant pour juger de l’évolution; car selon Devary du Mayne et coll [10] les mucocèles des sinus paranasaux peuvent récidiver plusieurs années après cure chirurgicale. D`où une surveillance post opératoire aussi prolongée que possible est indispensable pour détecter précocement les récidives.

CONCLUSION La mucocèle fronto-ethmoïdale est une affection bénigne, mais grave possédant un potentiel agressif vis-à-vis des structures de voisinage. D’où la nécessité d`un diagnostic clinique et radiologique rapide pour un traitement chirurgical adapté.

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LE TRAITEMENT DE NEUROPATHIES OPTIQUES TRAUMATIQUES : SUJET DE CONTROVERSE EN 2016 Ammari W; Bouzaiene M; Mahmoud A; Ksiaa I; Kochtali S; Mbarek S; Messaoud R, Khairallah M. Service Ophtalmologie, Hopital Fattouma Bourguiba Monastir. Service Ophtalmologie, Hopital Taher Sfar Mahdia.

RESUME Le nerf optique peut être endommagé lors d'un traumatisme crânio-orbitaire ou du globe. Le mécanisme lésionnel est le plus souvent indirect et complexe. Le diagnostic est clinique se base sur la baisse de l'acuité visuelle avec altération de la composante afférente dans un contexte de traumatisme. L'imagerie neuroradiologique a un triple intérêt diagnostic, pronostic, et thérapeutique. Une récupération spontanée d'un certain degré de la fonction visuelle a été rapportée. Le traitement de ces neuropathies optiques traumatiques reste controversé. Devant l'absence de consensus thérapeutique, l'administration d'une corticothérapie à haute dose, dans les 8 premières heures est discutée, mais la dose et la durée ne sont pas claires. Une décompression chirurgicale du canal optique peut être nécessaire, mais ne modifie pas le pronostic visuel lié à l'atteinte du nerf optique.

INTRODUCTION Les neuropathies optiques post traumatiques correspondent aux lésions traumatiques des fibres optiques de la lame criblée jusqu’au chiasma optique. Elles représentent 0,5 à 5% des traumatismes crâniens de l'adulte jeune de 30 ans, de sexe masculin[1]. Elles sont responsables de cécité dans plus de 40% des cas[1,2]. Le traitement de ces neuropathies traumatiques reste controversé. Les traitements recommandés sont la corticothérapies intraveineuse à forte dose et la décompression transcrânienne ou transethmoïdale du nerf optique[3]. Cependant une simple surveillance peut être proposée, vu les chances de récupération spontanée d'un certain degré de la fonction visuelle[3,4]. Nous discutons les différentes modalités thérapeutiques des neuropathies optiques traumatiques, à travers une observation clinique et une revue de la littérature et nous proposons une stratégie thérapeutique.

OBSERVATION Nous rapportons l'observation clinique d'un enfant âgée de 11ans, sans antécédents pathologiques

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notables victime d'un accident de la voie publique ayant occasionné un traumatisme crânio-faciale gauche. L'examen ophtalmologique initial a révélé une ecchymose palpébrale inférieure (Photo1) avec douleur à la palpation du cadre orbitaire gauche. L'oculomotricité était normale.

Photo1: Ecchymose périorbitaire secondaire traumatisme orbito-faciale chez un enfant de 11ans

au

L'acuité visuelle était chiffrée à 10/10 du côté droit et au compte les doigts à 10cm à gauche. L'examen du segment antérieur était normal des deux côtés. L'étude du réflexe photomoteur direct et afférent a révélé une mydriase paradoxale à gauche en faveur d'un signe de Marcus Gun positif (photos 2).


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Photo2: Une mydriase paradoxale lors de l'étude de la composante afférente du reflexe photomoteur : Signe de Marcus Gun positif

L'examen du fond d'œil était normal des deux côtés hormis une discrète pâleur sectorielle temporale à gauche (photo 3). Une TDM orbito-cérébrale demandée en urgence a montré une fracture de la paroi latérale du cadre orbitaire gauche, sans signes d'incarcération musculaire, avec un nerf optique libre (photo 4). Le diagnostic de neuropathie optique traumatique gauche a été posé, et l'enfant était surveillée de près. L'évolution était marquée par la persistance de l'acuité visuelle basse à compte les doigts à 1mètre, et l'apparition d'une pâleur optique gauche, quatre semaines après.

Photo3: L'examen du fond d'œil est normal à droite, montre une discrète pâleur temporale à gauche.

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facial. La neuropathie optique traumatique directe est la conséquence d'une avulsion du nerf optique ou de lacérations causées par des fragments osseux ou par des corps étrangers. La neuropathie optique traumatique indirecte est due à des forces de cisaillement s'appliquant sur le nerf optique et sur sa vascularisation , au niveau de sa portion intracanalaire, où il adhère aux parois. Certains traumatismes peuvent êtres responsables de compression du nerf optique par une hémorragie intraorbitaire ou par un hématome de sa gaine méningée. La perte de vision est le plus souvent complète et immédiate, 24 à 86% des patients n'ont aucune perception lumineuse lors de l'examen[5]. Les signes cutanés témoignant du traumatisme, peuvent manquer. l'altération de la composante afférente du reflexe photomoteur permet de poser le diagnostic de neuropathie optique traumatique, puisque la papille puisse être normale au début et devienne atrophique en 4 à 8 semaines. Un bilan neuroradiologique permet de cerner le bilan lésionnel et de rechercher des lésions intracrâniennes et orbitaires associées ainsi que des corps étrangers intraorbitaires ou un hématome. Le traitement des neuropathies optiques traumatiques qui vise la décompression du nerf, reste controversé vu le manque d’essais cliniques contrôlés randomisés prospectifs[3,4]. Ce fait peut être expliquée par la difficulté relative de recrutement d’un nombre suffisant de patients, par la présentation clinique très hétérogène de l'affection, et par la possibilité de guérison spontanée dans 25 à 35% des cas dans les 5 jours qui suivent le traumatisme[5]. cette prise en charge propose une corticothérapie intraveineuse, une décompression chirurgicale et une fenestration des gaines du NO, de manière isolée ou associée.

La corticothérapie : Photo4: TDM orbito-cérébrale: Fracture de la paroi latérale (flèche blanche) de l’orbite gauche sans signes d’incarcération musculaire avec pneumo-orbite(flèche noire).

DISCUSSION Les lésions traumatiques du nerf optique sont rarement en rapport avec un traumatisme direct. Il s’agit habituellement d’un choc indirect crânio-

La corticothérapie était recommandée pour ses effets anti inflammatoire et neuroprotecteur. Ce pendant, il n'existe jusqu'a l'heure actuelle, de consensus quant à l'utilisation de ces traitements de façon isolée ou combinée. L'International Optic Nerve Trauma Study, étude non randomisée, multicentrique, qui a comparé les deux modalités thérapeutiques, n'a pas trouvé de bénéfice de la corticothérapie ou de la chirurgie par rapport à la

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simple surveillance[6]. D'autant plus que la dose exacte, la durée et les indications de la corticothérapie ne sont claires[7]. Une étude récente "CRASCH" portant sur 10008 patients victimes d'un traumatisme crânien a montré que les mégadoses de corticoïdes, à raison de 30mg/kg en IV à passer en 30 minutes, suivie de 15mg/kg 2heures après, augmentent la mortalité chez les sujets avec des traumatismes crâniens[8]. Ce qui soulève la question de sécurité d'une corticothérapie à haute dose dans le traitement des neuropathies traumatiques souvent associées à des traumatismes crâniens graves. D'ou l'arrêt précoce de l'étude et la proscription des méga doses de corticoïdes. La posologie recommandée par Entezari et coll est de 250mg de méthylprednisolone en IV toutes les 6 heures pendant 3 jours , suivie de 1mg/kg/j par voie orale en cas d'amélioration clinique et arrêtée progressivement[9]. Ce pendant les résultats de cette étude randomisée, en double aveugle, n'ont pas montré de différence en terme de gain de l'acuité visuelle entre le groupe traité par corticothérapie à haute dose et le groupe traité par placébo.

La décompression transcrânienne ou transethmoïdale du canal optique: La décompression procède au retrait du toit et de la paroi interne du canal optique. Elle est indiquée en cas de fracture de la paroi interne et de rétrécissement du canal optique, et en présence de compression du nerf optique par un fragment osseux, par une hémorragie de sa gaine ou par un hématome rétrobulbaire[10]. Bien que certains auteurs considère la décompression transcrânienne

Non

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du canal optique comme une alternative thérapeutique en cas de résistance à la corticothérapie pendant les premières 24 à 48 heures, avec un gain significatif d'acuité visuelle[11]. Une revue récente de la littérature n'a pas trouvée d'essais cliniques contrôlés randomisés étudiant le bénéfice exact de ce moyen thérapeutique[12]. D'autant plus que c'est une chirurgie délicate, qui nécessite une expérimentation, et présente des risques de méningite et de fuite du liquide céphalo-rachidien chez des patients parfois jeunes[13]. La voie endoscopique garde toujours un intérêt même après un délai de 7 jours du traumatisme[14]. L'âge jeune et la présence d'onde aux potentiels visuels évoqués en préopératoire représentent de bon facteurs pronostics[15].

Protocole thérapeutique : une fois le diagnostic de neuropathie optique post traumatique est posé, un bilan pré-thérapeutique est demandé afin d'éliminer les contre indications de la corticothérapie (un état infectieux, un diabète mal équilibré, un ulcère gastroduodénal ..). L'administration précoce dans un intervalle de 8 heures, de 3 bolus de 15mg/kg/j de methylprednisone pendant 3 jours de suite. En cas de récupération visuelle, un relai par 1mg/kg/j de prednisone per voie orale est démarré avec une dégression progressive. En absence de réponse clinique au bout de 48heures la décompression chirurgicale du nerf optique est discutée. En cas d'avulsion ou de section complète du nerf optique une abstention thérapeutique est proposée (voir schéma thérapeutique).

Non

Schéma thérapeutique des neuropathies optiques traumatiques


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CONCLUSION Les neuropathies optiques traumatiques sont des affections graves. Le pronostic visuel dépend de l'acuité visuelle initiale, du mécanisme du traumatisme, et de la précocité et la nature du traitement instauré. Les bénéfices des différents protocoles thérapeutiques proposés dans la littérature restent encore incertains, des études randomisées prospectives semblent nécessaires pour établir un consensus thérapeutique.

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CHIRURGIE DE LA CATARACTE COMPLIQUÉE D’OCCLUSION DE LA VEINE CENTRALE DE LA RÉTINE, À PROPOS DE DEUX CAS. A W.Zbiba, A.Baba, E.Buayed, E.Kallel, M.Rekik, N.BenAbdessalem, M.Lahdhiri,.Elleuch

INTRODUCTION Bien qu'elle soit parfaitement standardisée et suivie d'excellents résultats, la chirurgie de la cataracte n'échappe pas à la règle générale selon laquelle il n'existe pas de chirurgie sans risque. Certaines complications peuvent mettre en jeu le pronostic anatomique et fonctionnel oculaire. L’occlusion de la veine centrale de la rétine (OVCR) dans les suites post opératoires précoces de la chirurgie de la cataracte a été décrite dans la littérature[1][2]. Nous rapportons le cas de deux patients ayant développé une OVCR après chirurgie de la cataracte.

Figure 1 : FO de l’OD multiples hémorragies en tache et profondes

OBSERVATIONS

OBSERVATION N°1 Il s’agit d’un patient âgé de 80 ans, hypertendu depuis 6 ans, qui a été opéré pour une cataracte sénile de l’œil droit (OD) par phacoémulification et implantation dans la chambre postérieure sous anesthésie locorégionale sans incidents. Le fond d’œil (FO) était normal aux deux yeux en préopératoire. L’examen ophtalmologique à J8 post opératoire a noté:  Au niveau de l’OD, une acuité visuelle (AV) à compte les doigts à 2 mètres, un segment antérieur (SA) calme, un tonus oculaire (TO) à 14mmhget multiples hémorragies en tache et profondes au FO(figure 1).  Au niveau de l’OG, une AV à 1.5/10, un SA calme, un TO à 15, et un FO normal (Figure 2).

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Figure 2 : FO de l’OG :normal

L’angiographie rétinienne à la fluorescéine (ARF) a montré, au niveau de l’OD, au temps précoce, un retard du temps veineux(figure 3), une tortuosité veineuse, et une absence de zones d’ischémie et au temps tardif une diffusion de la fluorescéine en rapport avec un œdème maculaire(figure 4). Au niveau de l’OG, l’ARF était normale.


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Le bilan étiologique a révélé une sténose carotidienne non significative à l’échographie en mode doppler des troncs supra aortiques. La glycémie, le bilan lipidique et la numération formule sanguine étaient normaux. Le patient a bénéficié d’injections intra vitréennes de Bevacisumab.

OBSERVATION N°2 :

Figure 3 : ARF de l’OD: temps précoce :retard du temps veineux, une tortuosité veineuse

Figure 4 : ARF de l’OD :temps tardif : œdème maculaire

La tomographie en cohérence optique (OCT) montrait un œdème maculaire à droite (figure 5).

Figure 5 : OCT de l’OD : œdème maculaire

Il s’agit d’une patiente âgée de 74 ans, hypertendue depuis 4 ans, qui a été opéré pour une cataracte sénile de l’OD par phacoémulification sous anesthésie locorégionale, compliquée d’une rupture capsulaire avec issue du vitré, et luxation d’un fragment du noyau dans le vitré. Le FO était normal aux deux yeux en préopératoire. L’examen ophtalmologique à J9 post opératoire a noté:  Au niveau de l’OD, une AV limitée à voit bouger la main, une cornée claire, une chambre antérieure siège de masses cristalliniennes, une aphakie, une hypertonie oculaire et un FO flou.  Au niveau de l’OG, une AV à 1.5/10, un SA calme, une cataracte corticonucléaire moyennement dense, et un FO normal. La patiente a été reprise à j12 post opératoire par vitrectomie et extraction des masses. En per opératoire, on a noté des hémorragies rétiniennes multiples avec tortuosité veineuse et œdème papillo-rétinien évoquant une OVCR.

DISCUSSION La cataracte liée à l'âge est la première cause de cécité dans le monde (48%). Cela représente 18 millions de personnes[3]. Les OVR constituent la deuxième cause de pathologie vasculaire rétinienne après la rétinopathie diabétique. Leur incidence annuelle est de 2 à 3 / 10 000 personnes[4][5]. La relation entre chirurgie de cataracte et OVR n’a pas été suffisamment étudiée dans la littérature. D’une part, les patients avec uneOVR qui subissent une chirurgie de la cataracte ont un risque accru d'œdème maculaire cystoïde postopératoire[6].

On a retenu le diagnostic d’OVCR dans sa forme œdémateuse.

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D’autre part, la chirurgie de la cataracte pourrait favoriser la survenue d’une OVR. Cette éventualité n’a été rapportée que dans 3 publications [1, 2, 7]. Dans l’étude deTing et al [7], les auteurs rapportent la survenue de 3 cas d’OVCR suite à une chirurgie de cataracte sans incidents. Le délai moyen entre la chirurgie et le diagnostic de l’OVR était de 73.3 ± 39.7 jours. Dans notre étude, le diagnostic d’OVR a été réalisé eu 9èmeet 12ème jours postopératoire dans le 1er et le 2ème cas respectivement. Nos deux patients étaient hypertendus. Un terrain vasculaire a étéidentifiéchez tous les patients de l’étude de Ting[7]:antécédent d’OVR dans 2 cas, une hypertension artérielle (100% des cas), un diabète (33% des cas), une cardiopathie ischémique (33% des cas) et un tabagisme (66% des cas). Deux hypothèses ont été énoncées pour expliquer la survenue d’OVR suivant la chirurgie de cataracte. Ting et al [7] pensent que le mécanisme incriminé serait une fluctuation de la pression intraoculairedurant la chirurgie de la cataracte.L’autre mécanisme est rapporté par Yoon et ses collaborateurs[1] : l’OVR serait en rapport avec l'injection d’anesthésique en rétrobulbaire dans la gaine du nerf optique ce qui provoque une pression accrue dans la gaine du nerf optique qui peut compromettre en premier l’écoulement veineux puis le flux artériel.

CONCLUSION La chirurgie de la cataracte pourrait favoriser la survenue d’une OVCR par la variation de la pression intra oculaire, et/ou par les complications de l'anesthésie rétrobulbaire. Même si cette complication demeure rare, son diagnostic est important de point de vue pronostic et thérapeutique.

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SYNDROME DES TACHES BLANCHES ÉVANESCENTES ET MULTIPLES Zahaf Amin, Sellami Dorra, Abid Imen, Hriz Amir, kharrat Wassim, Feki Jamel Service d’ophtalmologie CHU Habib Bourguiba Sfax

Résumé But : Etayer à travers une observation les particularités cliniques, le profil évolutif et le pronostic d’une manifestation oculaire rare : le syndrome des taches blanches évanescentes et multiples (MEWDS : Multiple Evanescent White Dot Syndrome) Observation : Nous rapportons le cas d’une patiente âgée de 23 ans qui a présenté une baisse de l’acuité visuelle unilatérale avec des microscotomes centraux. L’examen et les explorations complémentaires ont conclu qu'il s’agit d’un MEWDS. Conclusion : Le syndrome des taches blanches évanescentes et multiples est un désordre intraoculaire idiopathique inflammatoire qui se résout habituellement spontanément. Il existe des controverses relatives aux aspects importants de l’affection, tels que la nature précise des lésions associées du fond d’œil ou le rapport du désordre avec d’autres maladies rares choriorétiniennes inflammatoires, telles que la choroïdite multifocale et la rétinopathie aiguë occulte zonale externe (AZOOR).

INTRODUCTION Le syndrome des taches blanches évanescentes multiples a été décrit pour la première fois en 1984 comme une perturbation unilatérale de l’acuité visuelle remarquable par des taches blanches de l’épithélium pigmentaire et un aspect granité de la macula. L’ étiopathogénie de cette affection est non encore élucidé. Les patients présentent des symptômes qui peuvent inclure une baisse de l’acuité visuelle, des photopsies et des scotomes. L’évolution est spontanément favorable sans traitement avec parfois persistance de quelques altérations discrètes de l’épithélium pigmentaire et surtout la persistance de l’aspect granité de la macula.

L’examen ophtalmologique de l’œil gauche trouve une acuité visuelle avec correction à 4/10, un segment antérieur normal, un cristallin transparent, un tyndall cellulaire vitréen à 1+ et au fond d’œil une hyperhémie papillaire avec des taches blanches arrondies situées au pole postérieur et en moyenne périphérie rétiniennes .la macula avait un aspect rougeâtre granité. L’examen de l’œil droit était normal (figure n°1).

OBSERVATION Une patiente âgée de 23 ans, sans antécédents pathologiques particuliers, a consulté en urgence pour un flou visuel depuis 3 jours avec des microscotomes centraux de l’œil gauche sans douleur ni rougeur oculaire.

Figure n°1 : Fond d’œil gauche montrant quelques discrètes taches blanches arrondies au pôle postérieur étendues en moyenne périphérie avec un aspect granité rougeâtre de la macula. On note aussi la présence d’un œdème papillaire stade 1.

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L’angiographie à la fluorescéine trouve une hyperfluorescence précoce de ces taches blanches observées au fond d’œil, qui augmente au cours de la séquence angiographique sans diffusion tardive. On note aussi une hyper-fluorescence papillaire de l’œil gauche (figure n°2 et 3). Le diagnostic retenu était un syndrome des taches blanches évanescentes multiples L’acuité visuelle est revenue normale après quelques semaines spontanément sans traitement avec disparition des taches au fond d’œil.

Figure n°2 : Angiographie à la fluorescéine de l’œil gauche (17 secondes) : Certaines taches blanches se colorent rapidement et apparaissent sous forme de nombreux points fluorescents groupés en amas (flèches blanches)

Figure n°3 : Angiographie à la fluorescéine de l’œil gauche (5 minutes) : persistance de l’hyperfluorescence des lésions sans diffusion (flèches blanches). On note l’hyperfluorescence papillaire (flèche noire).

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DISCUSSION Le syndrome des taches blanches évanescentes multiples est une affection rare, d’étiologie inconnue, initialement décrit en 1984 par Jampol et al [1] et Sieving et al [2]. L’atteinte est typiquement unilatérale (80 % des cas), même si des cas bilatéraux ont été décrits .Elle touche principalement les femmes âgées de 20 à 40 ans. Un épisode viral quelques jours avant la baisse de l’acuité visuelle est présent dans un tiers des cas. Les symptômes sont une baisse d’acuité visuelle rapide allant de 1/20 à la notion de flou visuel avec une acuité conservée à 10/10, parfois associée à des photopsies, des scotomes centraux ou paracentraux secondaire à l’élargissement de la tache aveugle et une dyschromatopsie. Au fond d’œil, on visualise des taches blanches, de petite taille (50µm à 100µm), discrètes, profondes qui sont situées dans les couches externes de la rétine ou de l’épithélium pigmentaire au niveau du pôle postérieur. Il existe quasiment toujours un aspect granité jaune orangé de la macula, qui persiste même à la phase cicatricielle. On peut également retrouver un œdème papillaire, une hyalite et des vascularites (rare) [3]. Ces taches sont transitoires et laissent place à des altérations de l’épithélium pigmentaire. La traduction angiographique en fluorescéine est modérée: on note une hyperfluorescence précoce et sans diffusion de ces taches, qui persiste aux temps tardifs. Elles sont plus nombreuses par rapport au fond d’œil, avec une disposition évocatrice en couronne périfovéolaire Il existe également des taches en péripapillaire avec parfois une hyperfluorescence papillaire. En angiographie au vert d’infracyanine (ICG), les lésions sont très hypofluorescentes hypocyanescentes aux temps tardifs, beaucoup plus nombreuses qu’au fond d’œil et en angiographique en fluorescéine, et disséminées au pôle postérieur et en moyenne périphérie [4—6]. Leur intensité augmente au cours de la séquence angiographique, avec constitution d’un anneau hypofluorescent autour du nerf optique. Le champ visuel montre fréquemment élargissement isolé de la tache aveugle.

un


JOURNAL TUNISIEN D’OPHTALMOLOGIE Des études par électrorétinogramme montrent une réduction de l’onde a avec des réponses scotopiques diminuées dans 75 % des cas de MEWDS [7]. Ces résultats, couplés à l’hyperfluorescence précoce en AF, suggèrent que les lésions se situent au niveau des couches externes de la rétine ou de l’épithélium pigmentaire [2]. En OCT spectral domain, Sikorski et al. [8] ont montré que les altérations de la ligne de jonction SI/SE ont une conformation en tache, et une disposition identique aux taches hypocyanescentes retrouvées en angiographie ICG. En OCT en face [9] les images passant par la ligne de jonction SI/SE montrent des taches sombres, de motif identique aux taches visualisées en angiographie ICG. Les mêmes images sont retrouvées sur l’OCT « en face » au niveau de la choroïde interne. L’évolution classique se fait vers la résolution spontanée de ces taches avec parfois de discrètes altérations résiduelles au sein de l’épithélium pigmentaire, et surtout la persistance du granité maculaire. Dans la forme typique non récidivante, l’acuité visuelle remonte spontanément en un à deux mois et les taches disparaissent sans laisser de cicatrices. Il reste à souligner l’association possible avec une rétinopathie occulte externe zonale aiguë. Ces deux tableaux peuvent s’observer simultanément ou se succéder (MEWDS puis AZOOR). Le pronostic visuel est spontanément bon, mais des néovaisseaux sous rétiniens maculaire ou prépapillaires peuvent se voir ou encore une récidive de ce syndrome (moins de 10 % des cas). Comme l’évolution classique est spontanément favorable, aucun traitement n’est habituellement nécessaire.

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LA NANOPHTALMIE : PARTICULARITÉS THÉRAPEUTIQUES ET PRONOSTIC. A PROPOS DE QUATRE OBSERVATIONS Knani Leila ; Mahjoub Ahmed ; Gatfaoui Faten ; Krifa Fethi ; Mahjoub Hechmi ; Ben Hadj Hamida Fafani Service d’ophtalmologie de Sousse

Résumé Introduction : la nanophtalmie est une anomalie rare caractérisée par un globe oculaire de petite taille sans autres malformations. Nous nous proposons de décrire les particularités cliniques, thérapeutiques et pronostiques de la nanophtalmie. Observations : quatre patients ayant une nanophtalmie bilatérale avec un âge moyen de 50 ans, dont un patient avait une crise aigue de glaucome par fermeture de l’angle ayant cédé sous traitement médical et après iridotomie périphérique au laser yag, deux patients avaient un glaucome chronique par fermeture de l’angle et ont été opérés de trabéculectomie et trois patients ont été opérés de cataracte. Un patient a développé une effusion uvéale post trabéculectomie qui a bien évolué sous traitement médical. Discussion : Avec l’âge, la nanophtalmie se complique de glaucome chronique à angle fermé qui est difficile à maitriser. De plus, la prise en charge de la cataracte et du glaucome dans les yeux nanophtalmes expose à un haut risque de complications per et post opératoires. La manipulation chirurgicale d’une chambre antérieure étroite avec la tendance au blocage pupillaire à cause de la pression exercée par le vitré constitue un défi. Conclusion : la nanophtalmie est une entité clinique rare qui peut menacer la vision par les complications auxquelles elle expose.

INTRODUCTION La nanophtalmie est une condition clinique congénitale rare et généralement bilatérale (1). Elle fait partie du spectre clinique des microphtalmies qui englobe un groupe hétérogène de phénotypes ayant en commun « un œil de petite taille »(2) variant de la forme extrême l’anophtalmie à la microphtalmie simple (3,4) la microphtalmie pure ou nanophtalmie (5), la microphtalmie partielle (6), la microphtalmie compliquée (5), la microphtalmie postérieure (7) et la microphtalmie antérieure relative (8). Pour les petits yeux sans malformations oculaires associés, ce qui définit la nanophtalmie, les principaux aspects cliniques comprennent (9) : une sclère épaissie, un cristallin de volume normal mais disproportionné par rapport à l’oeil, une chambre

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antérieure (CA) étroite et une longueur axiale (LA) totale plus courte que la moyenne pour l’âge. Ces 4 aspects cardinaux sont à la base du risque élevé de glaucome et de complications rétiniennes sur ces globes. Nous nous proposons, à travers ces 4 observations, d’étudier les particularités cliniques, thérapeutiques et pronostiques de cette entité.

OBSERVATIONS

OBSERVATION 1 : Patiente âgée de 23 ans, suivie pour glaucome par fermeture de l'angle (GFA) bilatéral sous traitement médical maximal, présentait à l’examen des deux cotés une hypermétropie à +13,00, une acuité visuelle de loin (AV) à 3/10


JOURNAL TUNISIEN D’OPHTALMOLOGIE non améliorables, une microcornée, un tonus oculaire (TO) à 40 mm Hg avec une excavation papillaire à 0,8. L’échographie en mode A a permis de confirmer le diagnostic de nanophtalmie en montrant une LA à 15,2 mm au niveau des deux yeux. Elle a été opérée d'une trabéculectomie bilatérale à quelques semaines d’intervalle. Celle-ci s'est compliquée d'une athalamie avec hypotonie en post-opératoire immédiat associée à une effusion uvéale au niveau de l’œil droit puis d'une hypertonie résiduelle contrôlée par un traitement médical. Deux ans après, la patiente a développé une cataracte bilatérale associée à une seclusion pupillaire. Une phacophagie a été réalisée avec des suites opératoires simples en dehors d’une réaction inflammatoire modérée contrôlée par des stéroïdes par voie locale. Mais le résultat fonctionnel final était décevant avec une AV à 1/20 et un TO à 17 mmHg au niveau des deux yeux sous traitement médical.

Fig 1 : photo du segment antérieur de l’œil droit du 1er patient montrant une chambre antérieure étroite avec un iris convexe en avant.

Fig 2 : Echographie en mode B du 1er patient montrant un globe oculaire de petite taille

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OBSERVATION 2 : Patient âgé de 47 ans a été hospitalisé dans un tableau de crise aigu de GFA de l’œil gauche (OG). L’examen ophtalmologique a relevé du coté droit une AV à 4/10 (+6,00), une microcornée, une CA étroite, un TO à 14, un AIC étroit et fermé par endroits avec une excavation papillaire à 0.3. Du coté gauche, il comptait les doigts à 1m, le TO était à 50 mm Hg et l’AIC était fermé sur 360. La LA mesurée au niveau des 2 yeux par écho A était à 17,6 mm. Une perfusion de mannitol relayée par du diamox a permis de normaliser le TO. Une iridotomie périphérique (IP) au laser Yag a été ensuite pratiquée au niveau des 2 yeux. Devant la normalisation du TO, on a arrêté le traitement hypotonisant et le traitement chirurgical n'a pas été envisagé. L’évolution a été marquée par l’apparition d’une hypertonie oculaire modérée contrôlée par un traitement médical. L’AV finale était de 4/10 au niveau de l’OD et de 1/10 au niveau de l’OG.

Fig 3 :photo du segment antérieur de l’œil gauche du 2ème patient montrant une chambre antérieure presque plate avec un iris convexe en avant

Fig 4 : échographie en mode B de l’ œil gauche montrant un globe oculaire de taille réduite avec un épaississement sclérochoroidien

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OBSERVATION 3 : Patient âgé de 77 ans, connu fort hypermétrope, a consulté pour une baisse progressive de la vision bilatérale plus accentuée du côté droit. L’examen ophtalmologique a noté du coté droit une AV réduite à des PLBO, une micro cornée, une CA peu profonde, un TO à 14 mmHg, un AIC ouvert mais étroit et une cataracte blanche totale. Du coté gauche, nous avons noté une AV à 2/10( +12,00), une micro cornée, une CA peu profonde, un TO à 14 mmHg, un AIC ouvert et étroit, une cataracte corticonucléaire et pré capsulaire postérieure peu dense et un FO normal. L’échographie en mode A a confirmé le diagnostic de nanophtalmie en montrant une LA aux deux yeux à 15 mm. Le patient a bénéficié d’une extraction extra capsulaire avec implantation dans le sulcus d’un implant de 38 dioptries avec suites opératoires simples. L’AV , après un recul de 6 mois, était de 1/10.

OSBSERVATION 4 : Patient âgé de 56 ans, monophtalme de l’OG consultait pour une baisse progressive de la vision de l’OG. Il était suivi pour GFA bilatéral opéré de trabéculectomie bilatérale 20 ans auparavant et absolu du coté droit. L’examen a noté du coté droit des PL négatives, une CA étroite, un TO à 14 mmHg, un angle fermé avec présence de synéchies antérieures périphériques, des synéchies irido-cristalliniennes, et une cataracte totale. Du coté gauche l’examen a objectivé des PLBO, une CA étroite, un TO à 14 et une cataracte blanche totale. La LA était de 16 mm des 2 cotés. Le patient a bénéficié d’une extraction extra capsulaire avec implantation dans le sac d’un implant de puissance de 29 dioptries sans incidents particuliers. L’AV en post opératoire était réduite à des PLBO avec découverte d’une papille glaucomateuse avec excavation totale.

DISCUSSION La nanophtalmie est un syndrome clinique caractérisé par un globe oculaire de petite taille avec une LA inférieure à 20.5 mm (10) pour la plupart des auteurs. Ceci se traduit par une fente palpébrale rétrécie avec un globe enfoui et une hypermétropie modérée à forte. Le cristallin est de taille normale mais démesurément grand par rapport à la taille de l’œil avec un rapport volume du cristallin/ volume de l’œil 4-8 fois celui du sujet normal (11). La CA est par conséquent étroite avec un iris convexe en avant ce

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qui explique la forte incidence du GFA. La sclére de sa part, est épaissie et de structure anormalement dense avec des fibres de collagène désorganisées, perte de l’élastine et accumulation anormale de glycosaminoglycanes (12). Il en résulte un arrêt du drainage du liquide supra choroïdien par diminution de la perméabilité sclérale aux protéines et une expansion choroïdienne (13). Celle ci se complique éventuellement de glaucome malin et d’effusion uvéale. De même, diverses anomalies du FO sont décrites : les cystes rétiniens, l’hypoplasie maculaire, le rétinoschisis, les plis papillomaculaires, les dépôts « drusen like », la rétinite pigmentaire, les drusen du disque optique et les altérations géographiques de l’EP (14=9). La cornée du patient nanophtalme n’est pas tout à fait normale non plus. Plusieurs anomalies cornéennes ont été décrites dans la littérature dont la plus fréquente est la microcornée mais aussi l’astigmatisme cornéen irrégulier, les cornées très prolates ou très oblates, les opacités et la néovascularisation cornéennes (14). De plus, des études récentes ont montré que la cornée du nanophtalme a des paramètres biomécaniques élevés à son étude par l’Ocular Response Analyser (ORA) qui font que la pression intraoculaire est surestimée dans cette population, élément à prendre en considération dans la surveillance des patients nanophtalmes glaucomateux (14). La microcornée était la seule anomalie cornéenne notée chez nos patients. L’épaississement choroïdien initialement noté sur l’échographie en mode B a été confirmé et étudié de façon plus objective actuellement par l’EDI OCT (1). La choroïde serait, selon certains auteurs, la structure pathologique qui émettrait des influx commandant la croissance anormale des structures avoisinantes. D’autres mécanismes physiopathologiques ont été proposés notamment un arrêt du développement du globe après fermeture de la fissure optique ou une vésicule optique anormalement petite (1). La nanophtalmie peut être héréditaire avec une transmission autosomique dominante ou autosomique récessive comme elle peut être sporadique (15). Des ATCD familiaux évocateurs n’ont pas été relevé à l’interrogatoire de nos patients mais un examen ophtalmologique n’a pas été pratiqué systématiquement. Cette entité clinique expose essentiellement au risque de GFA. Mais des cas de glaucome primitif à angle ouvert ont été décrits et la fréquence du syndrome pseudo exfoliatif arrivait jusqu’à 16 % des cas (16). Le GFA au cours de la nanophtalmie est


JOURNAL TUNISIEN D’OPHTALMOLOGIE multifactoriel. Plusieurs mécanismes sont incriminés notamment le blocage pupillaire relatif (10), la configuration iris plateau (20) et le déplacement en avant de la périphérie irienne à cause de l’expansion choroïdienne (10). La fréquence du GFA est élevée dans cette population variant de 54 (17) à 77 % (16) des cas, survenant généralement entre 20 et 50 ans (12). L’âge de début de la fermeture de l’angle iridocornéen est inversement proportionnel au degré d’hypermétropie (12). Le tableau peut être chronique insidieux en rapport avec l’augmentation progressive de la taille du cristallin avec l’âge mais des crises aigues de GFA peuvent survenir à tout âge (18). Trois de nos patients avaient un GFA, dans sa forme aigue dans un cas, celle çi étant survenue à l’âge de 47 ans. L’arsenal thérapeutique dont on dispose comprend essentiellement l’IP et l’iridoplastie au laser, l’extraction du cristallin, la chirurgie filtrante et la cyclophotocoagulation au laser diode (10, 19). L’IP au laser agit sur la composante en rapport avec le blocage pupillaire. Elle est utile à un stade précoce du glaucome avant l’apparition des synéchies antérieures périphériques. Cependant, cet acte relativement anodin sur un œil normal, expose aux risques d’effusion uvéale et de glaucome malin sur un œil nanophtalme (10). De plus, il est techniquement difficile à cause de l’épaisseur de l’iris et de la proximité de la cornée, sans oublier que son efficacité est temporaire puisque la fermeture de l’AIC ne fait que s’aggraver avec l’âge et l’augmentation conséquente de la taille du cristallin. L’IP a permis d’éviter la chirurgie filtrante dans le seul cas de crise aigue de GFA de notre série et ceci sans aucune complication. Cependant le patient a développé ultérieurement une hypertonie ayant nécessité sa mise sous traitement médical. L’iridoplastie, quant à elle, permet d’élargir davantage l’AIC en agissant sur la composante en rapport avec la configuration iris plateau (10). Aucun de nos patients n’avait bénéficié de cette technique. Partant du rôle indiscutable du cristallin dans la physiopathologie du GFA au cours de la nanophtalmie, l’extraction du cristallin clair semble avoir un effet bénéfique dans ces cas. En effet l’approfondissement de la chambre antérieure et l’ouverture de l’AIC ont été prouvés à leur étude par pentacam, UBM et OCT du segment antérieur avant et après extraction du cristallin (20). Des précautions ont été proposées par certains auteurs pour pallier aux difficultés techniques et aux risques inhérents à cette procédure sur un globe aussi petit notamment la vitrectomie antérieure par la pars plana permettant

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d’approfondir la CA et d’hypotoniser le globe et les sclérectomies préventives pratiquées une semaine avant l’acte ou en peropératoire afin de réduire le risque d’effusion uvéale (21). Cependant, et malgré ces précautions et les progrès de la chirurgie de la cataracte, l’extraction du cristallin clair n’est pas encore reconnu comme moyen thérapeutique du glaucome par fermeture de l’AIC au cours de la nanophtalmie (22). La chirurgie filtrante, elle aussi, n’est pas un acte anodin. Outre le risque de cataracte iatrogène, la décompression soudaine du globe, d’autant plus s’il est hypertone, expose aux risques de décollement choroïdien, de décollement rétinien non rhégmatogène, de glaucome malin, d’hémorragie expulsive... (10) Certaines mesures pourront atténuer ces risques notamment les sclérectomies préventives, les fils préplacés au niveau du volet scléral, les points serrés, garder le visqueux au niveau de la chambre antérieure (10). Cependant, ces risques subsistent et la chirurgie filtrante est, par conséquent, à garder en dernier recours lorsque le traitement médical maximal n’est plus efficace et que les moyens physiques ont échoués (10). Ainsi, la trabéculectomie pratiquée éventuellement chez notre première patiente s’est compliquée d’hypotonie oculaire, d’athalamie, d’effusion uvéale et de cataracte. La cyclodestruction au laser diode, quant à elle, a été présentée dans une petite série de 5 cas de GFA chronique avec une hypertonie persistante malgré le traitement médical maximal et l’IP, comme alternative à la chirurgie filtrante avec de bons résultats et moins de complications. Aucun de nos malade n’a subi une cyclodestruction.(19) Pour résumer, les indications thérapeutiques ne sont pas codifiées. Certains proposent une gonioscopie tous les 6 mois si l’AIC est fermé sans SAP et que le TO est normal et de compléter, si besoin, par une IP et ou une iridoplastie au laser. Lorsque la PIO s’est déjà élevée, il faut se suffire au traitement médical tant qu’il est efficace avec recours éventuellement à la chirurgie filtrante tout en prenant les précautions nécessaires (23). La cyclodestruction au laser diode, et jusqu’à preuve du contraire par des études contrôlées et randomisées sur un grand nombre de patients, n’a de place qu’après échec de toutes ces modalités.(23, 19) Par ailleurs, la chirurgie de la cataracte sur un globe nanophtalme, quand l’indication fonctionnelle y est, est elle aussi un réel défi. Tout d’abord, l’implant pose des problèmes de choix de la formule de calcul

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de sa puissance puis un problème de disponibilité des grandes puissances. Certes, l’avènement des implants piggyback a permis de surmonter en partie ces difficultés. Ceux-ci présentent les avantages de pouvoir viser l’emmétropisation en fournissant des puissances élevées, et d’améliorer la qualité de l’image en réduisant les aberrations sphériques. Toutefois, leur implantation est difficile et ils présentent l’inconvénient de l’opacification inter lenticulaire.(22) Deuxièmement, la chirurgie de la cataracte en ellemême est techniquement difficile chez ces patients à cause de l’étroitesse de la CA. Celle-ci expose, de ce fait, à un risque élevé de rupture capsulaire et de lésion endothéliale mais aussi d’effusion uvéale, de glaucome malin… La vitrectomie antérieure par la pars plana, les sclérectomies préventives pré ou per opératoires sont des mesures proposées pour éviter ces complications. Troisièmement, le résultat fonctionnel est souvent subnormal et ceci même en l’absence de toute complication à cause des grandes erreurs réfractives et des anomalies maculaires (22). La chirurgie de la cataracte chez nos deux patients (3ème et 4ème observation) était heureusement sans incidents mais la récupération visuelle était décevante à cause de l’excavation glaucomateuse associée. Le glaucome et la cataracte au cours de la nanophtalmie présentent des particularités propres à cette entité clinique. De même, l’effusion uvéale est une complication assez caractéristique de la nanophtalmie. Elle est en rapport soit avec l’obstacle que constitue la sclère épaissie au drainage des protéines dans le liquide suprachoroidien soit avec la densité du collagéne autour des veines vortiqueuses et la compression conséquente des canaux de drainage

veineux (22). Le gradient de pression oncotique qui en résulte aboutit à une congestion de la choroide, à un décollement choroïdien et à un décollement de rétine non rhégmatogène à un stade ultime (24,25). Cette complication peut survenir spontanément ou suite à un traitement physique au laser ou un traitement chirurgical. L’effusion uvéale est spontanément peu et lentement évolutive [26]. Etant de mécanisme non inflammatoire, les corticoïdes sont d’une efficacité variable [27]. Par contre, le traitement chirurgical, notamment les sclérectomies selon la technique de Gass, se sont montrées efficaces [28-32]. L’effusion uvéale compliquant la trabéculectomie dans notre série a bien évolué sous corticothérapie orale.

CONCLUSION L’œil nanophtalme est prédisposé, de par ses particularités anatomiques, à de nombreuses pathologies dont la prise en charge constitue un défi pour l’ophtalmologiste. Le GFA dans sa forme aigue ou chronique est fréquent. La stratégie de sa prise en charge n’est pas parfaitement codifiée. De même, les résultats de la chirurgie de la cataracte sur ces globes sont relativement décevants comparativement aux globes normaux. Les indications chirurgicales doivent, de ce fait, être bien réfléchies.

Tableau1 : récapitulatif des 4 observations Age

Sexe

Observation 1

23

F

Observation 2

47

M

Observation 3

77

Observation 4

74

56

Œil atteint

Acuité visuelle

TO

Cristallin

AIC Fermé avec SAP

ODG

3/10

40

Cataracte moyennement dense

OD

4/10

14

transparent

OG

CLD 1m

OD

PLBO

50

14 Cataracte totale

M OG

2/10

OD

PL négative

OG

PLBO

transparent

14

Cataracte moyennement dense

Fermé sur 360 Fermé sur 360

Longueur Diagnostic axiale

15,2

17,6 17,6

étroit

15

étroit

15

Fermé 14 Cataracte totale avec SAP

16

Fermé avec SAP

16

M 14 Cataracte totale

GFA chronique

Crise de GFA Cataracte sénile

Traitement

Complication

AV finale

Décollement Trabéclectomie Choroïdien puis Athalmie phacophagie Hypotonie post opératoire

1/20

IP au laser Yag

4/10

Médical puis IP au laser Yag Extraction extra capsulaire

1/10 1/10

Non encore opéré Cataracte iatrogène GFA chronique absolu Cataracte iatrogène GFA chronique

Non opéré

PL négative

Extraction extra capsulaire

PLBO (excavation en chaudron)


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